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L’incontournable dilemme de la TFM

Le 1er septembre a été un vrai jour de délivrance pour la Télévision Futurs Médias (TFM), la chaîne créée par un certain Youssou Ndour. Le chemin a été long et semé d’embûches. Le projet a été notamment bloqué pendant plusieurs mois au plus haut sommet de l’Etat sénégalais. Le cahier des charges a été revu et corrigé. Au final, l’auteur-compositeur, et star international se voit accorder une chaîne de télévision exclusivement culturelle.

Tout observateur avisé du paysage médiatique sénégalais peut parier que les programmes  de la TFM ne respecteront pas à la lettre ce cahier de charges. En tout cas, pas pour longtemps. En effet, les journalistes de la sixième chaîne viennent essentiellement de la Radio de You qui n’est pas particulièrement célèbre pour ses programmes culturels. La RFM, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, s’illustre plutôt par ses programmes politiques et ses révélations qui font trembler le palais de la République du Sénégal. Comme la fameuse mallette destinée à un ex-représentant du FMI à Dakar en 2009.

Bref, on est curieux de voir comment la TFM va se débrouiller pour ne pas céder à la tentation politique en ne faisant pas de JTgénéraliste avec forcément 80% d’actualité politique au bas mot comme cela se fait à la Radio Futurs Médias depuis sa création.

La rédaction de la sixième chaîne semble déjà avoir trouvé une parade : l’Incontournable. Il s’agit d’un plateau quotidien où trois chroniqueurs (vachement calés en politique d’ailleurs) tournent et retournent les faits saillants du jour, un peu comme au Grand Journal de Canal Plus…

Comme l’a affirmé dans une interview le directeur des programmes de TFM, Bouba Ndour, le petit frère de son grand frère, « Wade et le gouvernement ont déjà fait la pub de TFM ». Il y a eu bras de fer,  pétition, escalade verbale, accusations de financement de la télévision par des étrangers. Mais surtout, il y a eu la parenthèse militante de Youssou Ndour. Il a créé un mouvement dénommé « Fekké ma ci boolé »*, que les esprits malintentionnés ont vite fait de corriger et remplacer par « Télé ma ci boolé »*après que l’Etat a fini par lui accorder la licence.

Avec tout ce tintamarre autour d’une télévision privée, la cinquième du genre dans le PAS (paysage audiovisuel sénégalais), les téléspectateurs ne s’attendent pas du tout à des shows d’humoristes en manque d’inspiration, des clips bidons, des sketches aux scénarios tirés par les cheveux, des concerts interminables ou alors, et c’est le comble, à des émissions de radio filmée où des téléspectateurs appellent pour apprécier la tenue et le maquillage de l’animatrice…

Les centaines de milliers de Sénégalais qui ont  signé la pétition méritent mieux et attendent mieux que ça.  TFM doit contourner l’interdiction qu’on lui a faite de se comporter en chaîne généraliste au risque de décevoir un public nombreux qui salivait déjà à l’idée de regarder une télévision qui serait à l’image des deux premiers organes du groupe Futurs Médias : la radio, RFM et le journal L’Observateur. C’est cela le grand dilemme de la TFM. La chaîne est écartelée entre le marteau du cahier de charges surveillé de près par l’Etat et l’enclume de l’exigence des téléspectateurs qui s’attendent et c’est leur bon droit à des programmes de haute facture.

*Témoin, j’ai le devoir d’agir.

*Pour ma Télé, j’ai le devoir d’agir.

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