Quand les écrits s’envolent la parole reste

Me voici penché sur mes papiers les coudes posés sur la table. Une lampe « made in China » éclaire d’une lumière fade la pièce. Mon corps semble avoir une capacité d’immobilité. Il est droit et incliné du côté gauche. J’écris et réécris, lis et relis sans arrêt. Ma main soutient ma tête trop lourde pour penser. Confusion et fusion des pensées de toute sorte, je suis dans une lutte sans fuite déterminé à terminer. Il me faut produire, créer, innover, inventer pour nourrir mon blog. Rien ne me passe par la tête. J’écris des conneries. Impossible même d’impressionner par mes mots un gars de la campagne.

Je suis frustré. J’ai la tristesse de soi en voyant la pauvreté de mes écrits, envie de me réfugier avec joie dans n’importe qui d’autre que moi. Je pense à mon désir ardent de plaire, d’obtenir l’acquiescement, la sympathie, d’étonner, d’être approuvé, remarqué. Je dois m’inspirer à tout ce qui se passe autour de moi : le fondateur de Wikileaks en liberté avec un bracelet électronique, le TP Mazembe en final, Alassane Ouattara et Lorent Gbagbo disputant le pouvoir, la saison de fête de fin d’année au Burundi, Haïti avec l’épidémie de choléra, etc.…Je pense et repense à tout ce que j’ai vu, senti, touché, manié, flairé, regardé, goûté, bu, mérité, souffert, vomi, soupçonné, observé, aimé, haï, convoité, craint, détesté, admiré, pris en dégoût, détruit, construit….. Je pense à notre professeur de Français, cet homme musclé, baptisé par les élèves monsieur « n’est-ce pas », qui nous traitez des petits mabouls. Mais rien ne vient de tout ceci. Rien sur papier.

Soudain j’entends les tirs d’une arme à feu. Une kalachnikov ou une autre arme je ne saurais pas dire. Les portes des voisins se tirent lentement car la nuit n’annonce toujours pas bonne nouvelle aux pays sortis d’une longue guerre. Les voleurs main-armées, les simples tueurs payés par un jaloux…tous sont présents. Je résiste un peu à l’idée de fermer ma petite porte en bois. La pensée qui me vient c’est la parole de ma grand-mère qui disait « un enfant sage voit le mal de loin et s’en écarte. » Cette parole me fait agir. Vite je ferme aussi ma petite porte. J’ai l’idée de ce qu’une seule balle peut faire à ma petite tête soutenu par mon petit cou posé sur le petit buste. Rien qu’une seule balle et le monde ne saura même pas que j’ai existé. Peut-être une seule de mes paroles ou mes écrits témoignera de ma présence. Je pense à ma feue grand-mère qui n’a même pas écrit un poème mais qui reste vivante par ses paroles. Une pensée me vient alors de cette réflexion; les contes, les chansons ou même les proverbes racontés sont une graine dont la récolte reste inestimable. J’écrirais et parlerais de ce dont je connais, me dis-je en renfermant mes papiers !

Partagez

Auteur·e

upendo2010

Commentaires