Sanctions et asphyxies économiques : le revers de la médaille

Le Ministre français des affaires étrangères, Mme Alliot Marie à propos de la crise Ivoirienne soulignait que « les sanctions économiques à l’endroit du régime Laurent Gbagbo finirait tôt ou tard par l’asphyxier ». Je ne veux pas douter de cette stratégie mais les sanctions économiques n’ont pas seulement un côté positif c’est-à-dire faire plier bagage à un régime déchu. Elles peuvent avoir des retombées désagréables pour le gouvernement élu et les populations.L’argent le nerf de la guerre

Dans le conflit post-électoral Ivoirien, de nombreux chefs d’Etats préconisent le dialogue pour une sortie de crise pacifique. Néanmoins pour éviter que le régime sortant ne puisse dilapider les revenues du pays avant son départ et surtout profiter de ces revenus pour asseoir une dictature, les institutions internationales et les puissances occidentales ont décidé du gel des avoirs des caciques du régime. Cette mesure est payante car elle jette les bases d’une vaste opération visant à couper les vivres au clan Gbagbo. Depuis cette date le contrôle des finances, de la bourse et des avoirs du pays se présente comme une bataille importante dans la guerre politique que se livre les deux camps. Après l’UE, les USA et la France, la CEDEAO et l’UEMOA ont décidé de ne reconnaître que la signature du Docteur Alassane Ouattara. Les côtés positifs de cette décision sont importants : Laurent Gbagbo est privé d’une importante source de revenues. Certaines banques locales, succursales des grandes banques étrangères ne peuvent plus décaisser pour un ordre émis par son gouvernement. La liquidité après un délai très court se fera rare au plan national. La Côte d’Ivoire de Gbagbo qui disait pouvoir se passer du franc CFA et de la BCEAO n’a rien pu faire que de sauter sur les coffres de la banque centrale ! L’arrêt de l’exportation du cacao le prive aussi de recettes d’exportation importantes puisse que le pays est le premier producteur mondial. L’argent du cacao a servi à financer de bout en bout la guerre de Laurent Gbagbo avec la création de nombreuses structures dont le seul objectif était de piller les paysans pour enrichir la nouvelle bourgeoisie des refondateurs. Ces mesures sont si efficaces que c’est haletant que le gouvernement Gbagbo a lancé sa vague de réquisitions, une manière politiquement correcte de dire nationalisation. Après s’être pris pour Martin Luther, Nelson Mandela, tout récemment pour Lumumba, le woody de mama porte aujourd’hui le nom de Fidel Castro de mama ! Ce qu’il oublie c’est que tous les peuples de la terre n’auront pas l’âme des Cubains car chaque peuple a ses habitudes et ses convictions. L’Ivoirien habitué à la bière, aux maquis, au luxe, à la belle vie pourrait-il accepter de vivre en dessous du seuil de pauvreté comme à Cuba ?

L’effet boumerang

Les sanctions économiques envoyées en pleine poire du régime Laurent Gbagbo n’ont pas seulement un côté positif. Bien au contraire elles sont en train de porter des fruits très amers qui risque à la longue de discréditer le gouvernement Soro. Au chapitre de la BCEAO, les Ivoiriens doivent comprendre que la fermeture des agences par Dakar posera le problème de la liquidité si la Côte d’Ivoire décide de rester dans la zone CFA. Les banques Ivoiriennes limitent aujourd’hui tout décaissement à leur guichet à 1 million ! L’absence d’argent frais pour payer les fonctionnaires et surtout les travailleurs du privé devient un problème aussi bien pour le régime en place que pour le gouvernement Soro qui sera présenté comme l’ennemi du peuple. « C’est à cause d’eux qu’on ne pas vous payer ! », « Ils n’ont jamais été pour le développement de ce pays », « Soro est contre les Ivoiriens et veut les affamer » pourra-t-on entendre dire dans les jours qui viennent. Quant au problème café-cacao il risque de créer l’émeute car il touche directement des millions d’Ivoiriens à commencer par des paysans le plus souvent illettrés et faciles à manipuler ! Voici un terrain fertile pour semer l’évangile anti-ouattara et le diaboliser à jamais. Si on arrive à couper les vivres à Gbagbo, on arrive aussi à laisser des millions de paysans sans revenus. Un intellectuel bien disposé d’esprit peut aisément comprendre une stratégie d’asphyxie économique mais pour le paysan celui qui empêche l’exportation du café et du cacao est son ennemi.

Sur le plan économique le temps joue désormais contre le Docteur Alassane Ouattara et non plus contre Laurent Gbagbo. Si la crise ne prend pas fin, le Président Alassane Ouattara sera dans l’esprit de nombreux Ivoiriens celui qui aura fait perdre à des pères de famille leurs emplois et ruiné l’économie du pays. La solution à la crise est ailleurs et plus on met du temps à l’appliquer, plus le Docteur Alassane Ouattara risque d’être isolé.

Suy Kahofi

Partagez

Auteur·e

kingsuy

Commentaires