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La valeur de la vérité à table

 

 

à table, via morguefile

La vérité blesse, mais elle blesse encore plus à table. Quand tu entames l’étape de la discussion avec toi même et qu’une seule et unique question persiste. La réponse que tu crains est certainement celle qui vrai.  la vérité tu l’as déjà, tu essayes juste de te noyer dans le leurre.
Prenons un exemple simple : tu te demandes souvent à toi même si tu manges trop. Tu voudrais que la réponse soit  » non  » mais tu n arrives pas à te convaincre. Tous les jours après avoir gaver ton gésier , après l’avoir senti pesé sur ta démarche ou simplement dans tes activités; tu décides de poser une énième fois la question. Cette fois-ci non pas à ton  » moi  » freudien, mais au « moi  » sociétal. Qui de mieux qu’un proche ou un ami.
Dans la même ambiance d’odeur et de goût heureux.  Tu te lances. Si j’étais à ta place je ne l’aurai pas fait. Sois sincère avec toi même. Regarde comment tes yeux pétillent à chaque fois tu vois une bonne sauce faire des traces dans ton assiette. Regarde sinon,  les frissons qui te saisissent quand une fois dans ta bouche le goût du gigot se répand sur ton palais. Je ne te ferai pas la liste de ce que tu sais déjà.  Mais une dernière chose. Prend le temps, en  une seconde et considère la portion de mets dans ton assiette par rapport aux autres. Bref si après ça tu veux toujours poser la question à Xavier ou Natacha vas y. Fais toi le plus grand des plaisirs. La vérité ne tue pas toujours.
Ainsi dans la même ambiance que tu apprécies tant,  tu veux prendre ton envol sans parachute. Tu as pris quand même la peine de terminer les quelques bouteilles de bières. Six précisément. Alors que Xavier n’en a pris que deux. Hummm il ne voit toujours pas le rapport.  Bref,  continuons…
Une joue dosée, des lèvres d’une luisance remarquable. tout cela grâce à la sauce.
– Xavier tu sais quoi ???
Il fit une pause. Mais moi je me dis qu’il aurait du s’arrêter là.  son ami Xavier n’avait pas répondu. Il le regardait simplement.  Certainement qu’il lui en voulait déjà.  Il ne supportait plus de le voir ainsi. Tel un… .
– tu sais quoi ? Je me pose une question depuis un moment.  Et pour tout te dire,  je ne sais pas si la question vaut la peine mais elle me revient tout le temps.  Je voudrais donc que tu m’aides à y répondre. Tu es comme un frère et tu sais.
Xavier pris un air intrigué mais les lèvres encore mouillée de son amie le dégoûtait.  Il n’arrivait même pas à le regarder fixement pendant longtemps. La tête baissée il dit quand même :
– allez vas-y craches le morceau. Puis pensant intérieurement il se disait que son ami ne pouvait jamais cracher ce morceau ci qu’il venait d’avaler. Autant en mourir.
– alors dis moi Xavier tu penses que je mange beaucoup. Genre si je mange un peu trop. Vas y hein! Francho ;  cash.  Le
sourire et le soupir de Xavier avaient répondu mais il n’avait encore rien compris.
– Serge. Tu ne fais pas que ça. Tu manges trop et tu bois trop. Le pire c’est que tu parles de la même manière.  Tu sais quoi ? Ce n est pas pour être méchant avec toi mais je préfère être sincère  avec toi. Pour une fois que l’occasion se présente et ça te fera du bien j’en suis sûre.  Tu représentes l’excès en image.
le visage de Serge pris des couleurs bizarre. Du vert il vira au rouge clair. Et maintenant, il suait. Mère vérité venait de lui donne une raclée marteau. Oui , c est ainsi. Cette question que tu te poses dont tu connais déjà la réponse en ton fort intérieur. Une réponse assez évidente. Ne franchis pas le cap du « moi » sociétal. Changes si tu en es capable ou si tu le veux. Mais ne le demande pas à Xavier ni à personne d autre.
La vérité blesse.  Elle blesse encore plus à table.

 

Rouge MarcoMaru, via morguefile


père noël

père noël, via Morguefile

 

Père noël, cher père noël , je sais que tu ne passeras pas me voir cette année. L’année dernière encore tu n’étais pas là. Et puis, quand j’y pense, quelques années plus tôt aussi tu n’étais pas là. Tu m’as quand même gavé de beaux cadeaux pendant longtemps. Je t’en serai infiniment reconnaissante. Au-delà de ces beaux cadeaux que tu m’as offerts, tu m’as surtout donné cette sensation unique de l’être spéciale que je suis. En ces temps-là, je savais qu’une fois par an tu viendras. Oui, je savais que ni la météo, ni une quelconque force majeure ne pourrait changer ta destination ni tes projets pour moi.

Combien je me couchais tôt dans l’impatience d’ouvrir les cadeaux le lendemain. Ta magie et ton attention envers moi ont fait de moi, de mes journées de 24 et 25 décembre les plus belles. Aujourd’hui j’aurai pu , simplement consacrer ma journée à la nostalgie de ces moments de bonheur et d’innocence. Mais ce serait passé à côté de l’essentiel, passé à coté du présent.

Père noël, cher père noël , je sais que tu ne pourras plus passer ce soir. je le sais parce que mes rêves ont changé. Oui, parce que mes souhaits ont mûris. Ils ont grandi avec moi. J’ai troqué mes poupées Barbie contre un besoin ultime de réussite, j’ai troqué mes robes de princesses contre un besoin crucial d’épanouissement. Oui, aujourd’hui,  je ne veux plus des cadeaux pour moi seule. Non je veux des cadeaux pour tout le monde. Plus de bonheur, de paix , d’amour de tolérance, de joie et de sécurité. Plus de nourriture dans les assiettes, de l’eau dans les déserts. Plus de sourire sur les visages noires de chagrin, plus d’assurance face à l’incertitude du lendemain, celui même du 25. je souhaite d’ailleurs, que l’âme du monde prenne en charge la réalisation de mes nouveaux vœux en apaisant les cœurs de chacun .

Père noël, mère noël, cher père et mère noël,   oui je sais que vous étiez deux dans le complot des cadeaux. Je ne sais plus qui d’entre vous deux disjonctait le courant et qui dans le noir posait les cadeaux à mes chevets. Je sais juste que vous étiez deux à le faire. Je voudrais vous dire merci. Merci  d’avoir entretenu cette magie qui continue d’agir sur tous mes noël me rendant tantôt triste et tantôt joyeuse.

Joyeux noël à toutes et à tous.

«Crédit photo : beauty mable »

 


Du rêve à la réalité

«Crédit photo : beauty mable »
«Crédit photo : beauty mable »

 

Je l’ai revu comme je l’ai rêvé il y a quelques années. J’ai fait et refait le même rêve. Ce rêve a conduit toutes mes journées.  Dans mon rêve, tu étais là, à cette même place qu’en cet après-midi. Tes mains serrant les miennes. Et ton regard plongé dans le mien. Tu comptais probablement sur mon visage, mes années d’absence. Tu voulais te rassurer que je suis là pour de vrai. Je n’avais pas les mots pour te rassurer alors je t’ai pris dans mes bras sans un mot. Je t’ai serré aussi fort que possible te témoignant par ce geste affectueux mon amour et ma loyauté.
Puis le jour vint , où enfin on  la longeait , les pieds nus, sans échanger de verbe. Mais de temps en temps des regards suivis de sourire pimentaient l’ambiance. On ne parlait peut être pas, mais on se comprenait. Cela a toujours été notre habitude. Dans ces moments où l’émotion prime sur la raison, on a toujours préféré le silence à nos longs discours. Le silence exprimait mieux ce qui brulait en nous. Les mots ne pouvaient pas décrypter le message qu’envoyait nos battements de cœur. J’ai attendu trop longtemps ce moment. On l’a attendu trop longtemps. Au point où je n’y croyais plus. Je ne voyais plus aucun signe à l’horizon me permettant de croire encore en ce rêve : Pure utopie. Toi non plus tu n’y croyais plus. On en parlait pas vraiment mais j’ai senti très souvent ton désespoir. Ce soir même je me rappelle encore de la froideur qui s’est installée entre nous quand nous avions perdu foi en ces moments. Je me suis accrochée à nos  souvenirs pour me donner du courage mais en vain.  Je les voyais fuir devant moi , je savais qu’un jour je les perdrais. Il est vrais que les souvenirs résistent, mais ils s’effritent avec le temps.
Au loin dans mes souvenirs je revoyais comme une vision, notre première sortie à deux pour ce bleu. Si ma mémoire est encore fidèle je pense que cette première sortie a eu lieu Il y a de cela neuf ans exactement. Je m’en souviens des détails comme de mon dîner d’hier. Comment l’oublier ? comment pourrais-je ? ce serait l’ultime trahison. Je me rappelle de nos rires d’adolescentes gorgés d’insouciance. Nos idées innocentes et naïves.  Notre amour sincère sans aucune blessure. Tout était si beau et si simple. Ces petits plaisirs de la vie qui nous manquent aujourd’hui, ceux que nous avions dû troquer contre les courses folles de la vie. Accumulant une tonne considérable de stress, on avait plus du temps pour le présent. On vivait tantôt au passé, tantôt au futur.
je fis ainsi un autre petit tour dans le passé. je me voyais dans cette jupe blanche que j’aimais tant et ce haut fleurie qu’on avait acheté ensemble.  Tu avais porté le tien aussi, je pense qu’elle était bleue. On avait réservé les 100 francs mythiques pour acheter notre  « Fan Milk ». Ce fut la première chose qu’on avait fait en arrivant avec ta moto, ce joujou de papa qui nous a longtemps fait du bien.
Tu voulais mettre tes pieds dans l’étendue, moi j’avais peur, j’hésitais. Sur le sable blanc brûlant  on s’est amusées comme des gamines de cinq ans, on a parlé de futilités comme les ados qu’on étaient et on a philosophé comme les adultes que nous sommes devenues.  Aujourd’hui nous voilà enfin et encore ensemble, pas sur la même plage peut être, mais avec le même cœur et la même philosophie : celle de cette amitié fraternité qui nous lie.

On aurait dû profiter plus de ces moments, passer plus de temps ensemble, se donner plus souvent la main. Hélas !! mais pourquoi regretter si aujourd’hui on est encore ensemble ? si on peut, non pas recommencer à zéro mais continuer en intégrant dans notre quotidien ces moments de bonheur.

 

«Crédit photo : beauty mable »
«Crédit photo : beauty mable »

 

 

 

 


A qui profitait la grève à la SNCF ?

affluence sur un quai, via Flickr
affluence sur un quai, via Flickr

J’ai vécu une situation de combat permanent et je n’en voyais pas le bout. J’ai tellement tiré la tronche à chaque fois que je me présentais sur le quai et que je voyais qu’il fallait encore se battre pour rentrer dans le train.

C’est la grève à la SNCF depuis quelques jours. Des jours qui semblent être une éternité. C’est une épreuve certainement partagée par une grande partie de tous ces usagers qui tentent le diable en prenant tous les jours les transports en commun. Même les jours ordinaires où il semble y avoir une certaine stabilité, il arrivait toujours des choses bizarres. J’étais donc convaincue que des événements plus que bizarres allaient survenir. Simplement je ne savais pas de quelles textures ils seraient. Aussi, contrairement à ce que les gens peuvent imaginer, l’annonce de la grève fut aussi une source de jubilation pour ces individus instables aux projets tordus.

Dans les premiers jours j’étais la plupart du temps confrontée aux odeurs attentatoires à ma sécurité nasale, via des aisselles à bout portant dégainant le meilleur de plusieurs jours sans douche. Pourtant moi, je prenais toujours la peine de rendre mon corps présentable, en prenant grand soin de ma bouche et de mes aisselles. C’était dommage de voir que certaines personnes s’en foutaient. De plus ils gigotaient, secouant toute la saleté. Et, quand venait le moment de gueuler un « poussez-vous ! », c’était le chaos total. Après quelques jours de grève, les visages étaient fatigués. Malgré tous les efforts de maquillage de certaines personnes, l’épuisement se traduisait assez facilement. Je partais une heure et demie plus tôt de chez moi, mais je faisais tout mon  trajet debout. Si j’avais de la chance, je pouvais m’adosser aux portes ou m’agripper à la barre centrale. La plupart du temps, je me retrouvais en sandwich, au bord de l’explosion. Avec la grève, au lieu d’un seul changement pour me rendre au boulot, j’en faisais quatre et surtout dans les même conditions. La partie triste du feuilleton, c’est l’air hagard de ces touristes perdus du RER B qui ne savaient pas quelle direction prenait le train. On les voyait rentrer dans le train précipitamment avec leurs valises et en sortir deux minutes plus tard quand quelqu’un leur soufflait à l’oreille « c’est en direction de Mitry Claye, Monsieur/Madame et non de l’aéroport ».

En ce mercredi 09 juin 2016 j’allais vivre en direct, la deuxième partie du feuilleton « grève à la SNCF ». J’allais découvrir ces personnes qui se délectent de la grève, qui attendent ces situations de désespoir pour mettre en œuvre leur projets machiavéliques.
Il faisait chaud et le monde à l’intérieur chauffait encore plus l’ambiance. Avec mon petit sac en bandoulière que j’avais acheté exprès afin de rentrer aisément dans le train, mon accoutrement de combat (jean et t-shirt sans maquillage, les cheveux en chignons et des écouteurs) j’étais encore prête pour la bataille. Sur le quai, je voyais très bien qu’il n’y avait plus de place et que je ne pouvais pas rentrer. L’expérience m’avait démontré des jours plus tôt que même à ras bord, il y avait toujours de la place. Et puis, je comptais sur la foule derrière moi pour rentrer. Je savais qu’elle me pousserait tellement que je rentrerais sans soucis. Cela se passa ainsi. Dans la mêlée tu ne choisis plus ta place, elle vient à toi, en fonction de la rotation des corps. Je me retrouvai donc en sandwich entre deux hommes. Pour ma part des géants. Ils m’avaient tellement serré que mes pieds touchaient à peine le sol. Je me sentais flotter. Je réfléchissais à la descente. Vivement que je ne me casse pas la figure. Emportée dans mes réflexions, j’entendis à quelques mètres de moi la voix d’une femme qui se plaignait. Elle criait même pratiquement. Ce sont des choses qui arrivaient souvent depuis le début de la grève, mais cette plainte était particulière.

Un Monsieur venait d’être démasqué, la braguette ouverte. Il s’était tellement frotter à la jeune dame qu’il y avait laissé des traces. Sa jupe était mouillée et tachée disait-elle, je ne pouvais pas voir car j’étais suspendue. Dans un mouvement de panique, tous les esprits féminins du train se touchaient les fesses pour se rassurer. Deux autres cris surgirent cette fois ci plus loin de moi mais ce fut les mêmes plaintes. Il y aurait donc un groupe assez bien organisé, qui, la braguette ouverte profitait avec toute la perversité possible de tous les frottements qu’engendraient la grève. Mais ce mercredi était la pire qu’ils passaient à mon avis, car, non seulement ils avaient été démasqués par les jeunes dames mais il y avait deux agents de la sécurité de la SNCF dans le wagon. A la prochaine station, les agents de la SNCF, les trois pervers et leurs victimes descendirent.

 

RER B, via BIGSTOCK
RER B, via BIGSTOCK

 

 


Le vin et le train

Rouge MarcoMaru, via morguefile
Rouge MarcoMaru, via morguefile

 

Voila la troisième fois en un mois qu’on se retrouvait entre filles autour de quelques plaisirs de la vie. Ce soir c’était le tour de Ghislaine. Elle m’avait prévenu la veille de son intention de me surprendre particulièrement. La surprise fut de taille quand je vis tout ce somptueux rouge dégouliné de partout. De la nappe de table aux petites ampoules en rouge qui scintillaient merveilleusement.
J’ai toujours pensé que les soirées les plus joyeuses et les plus longues sont celles qui consacrent le rouge. Oui du rouge, ce rouge lumineux qui trône dans de bonnes bouteilles de vin vieux de plusieurs années et au goût fidèle à ces années. Ce rouge imposant d’une bonne viande de bœuf qui, malgré les quelques minutes passées à la poêle, résiste. Ce rouge piquant en faible quantité, mais efficace pour accompagner la viande. Et moi dans cette ambiance, je m’impatientais dans le canapé, parée d’une robe fleurie de pétales rouges et noir : mes deux couleurs préférées.

Quelques minutes plus tard, les discussions féminines fusaient de part et d’autre. Une nouvelle paire de chaussures révolutionnaire, un fiancé jaloux qui redoutait le mariage, une collègue au bureau qui imitait la princesse de Cambridge mais en était tout le contraire. La soirée se déroulait dans cette ambiance de rires et de cris joyeux, puis le temps vint de passer à table. Je réalisais assise, là, d’autant plus l’étendue de la générosité du repas. Filet de bœuf poêlé et pommes duchesse étaient au menu. Un repas succulent, tout se passait parfaitement bien. L’atmosphère plus que détendue, le vin qui faisait pétiller les yeux, les lèvres rougies par les épices.

Et puis, le moment le plus redouté de nous toutes approchait. On évitait de regarder nos montres, l’ambiance était trop bonne. Pourtant la fatigue, aidée du vin, s’imposait et s’affichait. Les yeux pesaient, les bouches s’entrouvraient régulièrement pour bâiller. Il fallait partir.

Dans un mouvement de désespoir je pris mon sac et pris congé de Ghislaine. Une petite voix me disait de consulter les prochains horaires de passage de mon train le RER D. Mais une autre me disait qu’à 23h passées je n’avais rien à perdre à m’y rendre sans vérification. Ce que je fis.  Ghislaine était à cinq minutes à pied de la gare de Lyon mais je pris dix minutes pour faire le trajet. J’étais joyeusement rassasié et rien ne pouvait me contrarier. Ni la fraîcheur intimidante de cette nuit, ni le bruit du silence.

J’arrivais sur le quai du RER D avec cette bonne humeur, mais elle se refroidit aussitôt. Les trains ne desservaient pas ma station à partir de la gare de Lyon.  Je crus un moment avoir mal lu sur le tableau d’affichage, je pris la peine de relire encore mais c’était bien le même message. La bonne nouvelle, c’est que j’avais plusieurs options : prendre un taxi, prendre l’autocar de remplacement ou prendre le train pour trois stations plus loin de la mienne et revenir chez moi avec un autre dans le sens inverse. J’avais trop mangé et choisis la troisième option, car je ne voulais plus faire l’effort de chercher un taxi et encore moins de prendre la sortie numéro 6 pour prendre l’autocar. Pour me conforter dans ma paresse, l’écran du tableau d’affichage marquait « train à l’approche »

Tout se passait bien jusqu’à ma première destination, même si je venais de faire plus de vingt minutes pour ce premier trajet. Finalement arrivée à ma première destination, je vis qu’il fallait que j’attende encore trente minutes pour reprendre le train dans le sens inverse.

Alors sur le quai, ma capuche de doudoune sur la tête, je comptais les minutes comme dans l’attente du dernier jugement.  J’avais froid, je n’avais même plus la force de soupirer. Le vent glacial de minuit avait congelé aussi bien mes sentiments que mes émotions.  J’étais comme brisée, privée de quelque chose.  Je me voyais dans mon lit normalement à cette heure.
Je me rappelais encore de ma joie quand, en ce mois de novembre, dans mon déménagement, je me voyais tout proche de la gare de Lyon… oui, à une seule station de la gare de Lyon, je le disais fièrement aux gens. Le RER, le métro pas loin, des bus un peu partout… Pourtant ce soir aucun d’entre eux ne répondait comme je voulais. Certains soir,  tout semble être contre vous, mais l’expérience de ces situations imprévisibles m’ont toujours prouvé le contraire…
Quand tout semble noir pour toi, c’est aussi le bonheur… le bonheur de ne rien comprendre.

Froid mconnors  , via morguefile
Froid mconnors , via morguefile


Notre première rencontre

A la rencontre d'un frère,CandyBoxImages via depositphotos
A la rencontre d’un frère,CandyBoxImages via depositphotos

Je l’ai toujours imaginé sans jamais pouvoir mettre un visage mature sur la photo de bébé qui m’avait été envoyée cinq années plus tôt. Même au son de sa voix je n’ai pas pu le faire. Je ne pouvais que le voir pour trancher.Dans un coin affectueux de mon cœur, j’étais quand même convaincue qu’il aurait un beau visage à vingt-cinq ans. Mon inquiétude n’était pourtant pas la texture de son visage, elle se résumait plutôt à sa réaction. Même s’il a toujours paru enthousiaste à l’idée d’une rencontre lors de nos échanges téléphoniques, je suis tout de même pessimiste.

Ce sentiment fut vite balayé par le souvenir du jour où je pris connaissance de son existence.  Ma mère m’avait abandonné à mon sixième printemps à ma grand-mère et à mes tantes. Elle avait refait sa vie depuis lors. Elle m’informa un matin par un coup de fil que j’avais un petit frère. Il s’appelle Timothée.

Depuis l’abandon au coup de fil informateur je n’avais plus revu ma mère et elle ne cherchait pas à me voir apparemment. Mais pourquoi me parlait-elle de mon frère ? qu’attendait-elle de moi ? on dirait qu’elle me testait, qu’elle me poussait à bout. Mais rien n’en fut ; après quelques jours, je lui demandai une photo ainsi que le numéro de Timothée. Elle m’envoya une photo de lui datant du jour de son premier anniversaire ainsi que son numéro prétextant qu’elle n’avait pas de photo récente de ce dernier. J’appris par la suite qu’elle l’avait abandonné aussi mais communiquait assez souvent avec lui.

Cette rencontre avec mon frère, le seul à ma connaissance, signifiait beaucoup de chose pour moi. Cela dessine d’une part ma volonté de pardonner à ma mère et d’autre part celle de connaître mon frère, de tisser des liens d’amour et d’affection avec lui. Aujourd’hui mère de famille, j’avais conscience de la complicité fraternelle et du bonheur que cela pouvait procurer. Ne l’ayant jamais vécu, je n’en savais pas plus.

Pour cette première rencontre j’optai pour la sobriété. Un simple tailleur blanc et mon sourire pour seule parure. Ce sourire depuis cinq ans je l’aiguisais, l’entretenais, attendant le fameux jour pour le déballer. Je lui avais laissé le choix du lieu et de l’heure. Il m’avait envoyé la veille l’adresse d’un parc situé dans la banlieue sud de la ville, un endroit que je ne connaissais pas.

En cet après-midi de Juin, le soleil semblait encourager notre rencontre par sa luisance et sa brillance renversante. Au volant de ma voiture fraichement lavée pour l’occasion je réfléchissais. Assaillie par de nombreuses questions enfantant confusion, effusion et diffusion de sentiments. Les yeux larmoyants, les joues tremblantes, le nez s’effondrant sous la morve je pris conscience de l’imminence de la situation. Pendant une seconde  je voulais fuir. Mais si je fuyais je ne le verrais probablement plus jamais. Je refoulai subitement ce torrent émotif en voyant le parc se dessiner à l’horizon. Je fis quelques mètres encore et le cri joyeux des enfants m’accueillit. Il y avait un parking du côté gauche du parc, de nombreuses voitures s’y étaient déjà engouffrées mais je n’eus aucun problème pour trouver une place pour la mienne.

J’étais en avance d’une trentaine de minutes. Je pouvais me calmer et me détendre avant son arrivée. Je choisis un banc qui me semblait directement positionné sous le soleil.

L’heure approchait et mon cœur battait la chamade. Inconsciemment je touchais mes pieds, je les retenais presque. J’avais peur qu’ils ne commencent à courir abandonnant mon corps sur le banc.  Mon téléphone sonna, je vis son nom s’afficher, je répondis paniquer et lui indiqua mon positionnement. On raccrocha à peine quand je vis à cent mètres un jeune homme très grand, habillé tout en blanc avancé dans ma direction. A ce moment-là, peur et confusion s’envolèrent de mon être. Je me tins debout, droite, affichant mon sourire le plus grand et le plus beau ; malgré cela le sien était meilleur. Il avait un visage radieux, un visage parfait, une élégance que je ne voyais que chez mon époux. Son sourire était tellement grand que je le confondais à un rire. Il était là, devant moi maintenant les bras grandement ouverts, il m’enlaça sans permission, je l’étreignis à mon tour et puis quand il me dit « grande sœur ! te voilà enfin » je laissai libre cours à mes larmes, depuis longtemps retenues. Je ne pus que bafouiller entre dix mille sanglots « Timothée …Timothée.».

Ainsi  fut notre première rencontre.