zmagri

« Une violente et cruelle histoire d’amour … »

Ce matin, des grands rêveurs ont été assassinés parce qu’ils jouaient avec des Magic Colors …

« El erss khayeb, l’basstela kane’t berda »  : « La fête de mariage était nulle, la pastella était froide. »

Voilà la première phrase qui m’est venue à l’esprit en entamant ce post … Allez savoir pourquoi ?

Ce que je retiens pour l’heure des tueries dans la rédaction de Charlie Hebdo et du supermarché casher et que ma colère et ma tristesse peuvent commencer à entrevoir, se précise dans ce tourbillon où viennent se mêler passion, affecte et « déraison »… Comme une violente et cruelle histoire d’amour…

Amour des mots, de la satire, de la liberté et de la folie.

« Je préfère mourir debout que vivre à genoux »

Charb

Le poids des religions, de toutes les religions ça n’existait pas il y a 20 ans.

On est là pour ça, même si on traite de choses graves, il faut faire rire, c’est notre fonction.

Cabu

Un jour je vais faire des dessins sur le sexe, le lendemain je vais faire un dessin su F.Hollande, mais parfois le dessin sur le sexe peut être sur Hollande aussi, il nous a donné des exemples.

Wolinski

Waw, c’est maintenant que vous n’êtes plus que je vous découvre.

Certaines analyses à chaud d’ internautes en mal d’inspiration, voient derrière cette tragédie l’occasion de régler des pathos identitaires, si lourdement justifiés, vous ne trouvez pas ?

Ils crient souvent à l’insoutenable et sempiternel sentiment de justification « imposé », du sentiment d’obligation d’une prise de position « si attendue ».

Un fraternel message à cette majorité silencieuse indignée, qu’elle descende dans les rues, qu’elle envahisse l’espace public, l’heure est à la condamnation, l’heure est à la symbolique. Si cet espace reste vide, il sera envahi par des porte-voix autoproclamés.

Avec ceci comme slogan par exemple :

Au nom d’Allah et de son Prophète on a tué ici, comme on le fait au nom de la démocratie là-bas !

Ces mots pèseront pour certains comme une attaque au bélier devant la porte du silence !

D’autres préfèrent jouer avec des notions complexes, plutôt que de condamner sans ambivalence.

Ceux qui craignent les amalgames peuvent être rassurés, ils existent depuis bien longtemps. Le manque de clarté ne fera que les renforcer.

Aujourd’hui, moi , je me sens le devoir de me prononcer, mais personne ne m’oblige…

Le sens des mots dans de pareilles circonstances a une importance capitale.

De plus, je refuse toutes formes de prise d’otage et de braquage intellectuel, au nom d’un certain appel au consensus dans un camp comme dans l’ autre.

Zmagri , moi le zmagri, parti depuis un petit temps en croisade identitaire, victime d’un racisme occidental comme d’un racisme oriental, je vous la laisse votre terre sacrée que vous choisirez et je vous emmerde tous !

Laissez-moi pleurer en paix, laissez-moi le droit de pleurer qui je veux en liberté.

Au-delà des individus qu’était cette bande de potes, je pleure aujourd’hui ce qu’ils représentaient. Une voix discordante à l’ordre établi et à la « bonne conscience ».

Je n’en étais même pas un lecteur, mais je me retrouve dans la notion de défenseur de la liberté qu’ils insufflaient.

Aujourd’hui, nos têtes bien pensantes au gré de leurs humeurs distribuent ou confisquent des attestations de liberté d’expression à qui bon leur semble.

Cela dénote d’un manque de maturité et d’iniquité flagrante !

Complot or not complot … ?

Pleurer Charlie, c’est comme souhaiter Joyeux Noël, c’est haram … !

  • Hein ????

Cela va du complexe militaro-industriel aux illuminatis en passant par les sionistes … Les médias nous mentent et sont cadenassés, la carte d’identité retrouvée dans le véhicule, l’employé caché dans un carton à Dammartin-en–Goële, la couleur des rétroviseurs qui mue, l’absence de sang sur le trottoir …

Le complot fait office de foi, il explique tout, mais ne résout rien, servant de camouflet par moment. Je l’ai pratiqué et en suis revenu depuis.

Et de lire et entendre aussi :

Ils l’ont bien mérité, tu as vu ce qu’ils ont fait en Syrie et en Palestine

  • Hein ??

Les adeptes des théories multifonctions ne font que réconforter leurs préjugés et leurs thèses sont même considérées pour certains, comme des écrits immuables, voire sacrés qu’ils répètent liturgiquement, en se gardant bien le droit de pratiquer toutes formes de remise en question …

Ces théories sortent souvent de la bouche de ceux qui croient venir à bout des crimes commis par l’Etat d’Israël en arrêtant de manger des kiwis.( je précise LOL)

Why not … Tout le monde a le droit d’avoir un avis, tout le monde a aussi le droit de dessiner en paix !

-« Au nom d’Allah on tue aussi sur cette terre, il serait plus que temps de l’avouer … »

-Moi j’ai juste envie de pleurer des grands rêveurs qui jouent avec des Magic Colors.

Il y aura un après 7 janvier, souhaitons le plus humain que l’après-11- Septembre.

-Moi je veux juste les pleurer …

« Pour énerver les cons aussi on est manifestement utile, donc c’est agréable … ».

Tignous

Les manifestations ont été phénoménales avec évidemment des bémols et selon moi la triste palme revient au Maroc.

Et l’attitude du ministre marocain des Affaires étrangères, Salahedinne Mezouar, qui s’est rendu à Paris, mais n’a pas participé à la marche prétextant qu’il y aurait des caricatures du prophète …

  • Hein ??

Toutefois, il est excusé, qu’attendre de plus d’une classe politique qui est encore selon la théorie freudienne au « stade anal ». Faites déjà bien caca les gars, bientôt vous pourrez vous tenir la bite tout seuls!

Ensuite cette polémique sur certains représentants : Netanyahu aura fait parler de lui, une telle attitude, ça vous surprend ? cette arrogance est le propre des sans vergogne !

Ils en auraient fait une superbe couverture satirique les gars de Charlie Hebdo

Et que dire des représentants de l’Arabie saoudite présents à Paris, alors qu’ au même moment était fouetté sur la place publique à Jeddah, le blogueur saoudien Raif Badawi …

Et bien d’autres qui sans scrupule pointèrent leur gueule en front de manifestation, c’est juste dégueulasse… C’est dégueulasse !!!!

Le clivage entre les « Je suis Charlie » et les « Je ne suis pas Charlie ».

Il n’est guère étonnant celui-là.

Pour ce qui est de notre cher royaume surréaliste, il est même logique.

Nous restons encore en 2015 un pays communautariste, pour le vivre ensemble, on repassera aussi !

Il pourrait trouver une partie de son explication dans la manière dont a été gérée l’immigration maghrébine et turque en Belgique.

Dans la manière dont a été géré le culte musulman en Belgique …

Vous me suivez toujours ?

Avec dans les premières années, un entrisme édifiant du plus obscur et rétrograde des courants qui soient, made in Arabie saoudite : le wahhabisme.

-L’argent n’a pas d’odeur… C’est des conneries ça… L’argent a une odeur et dans le cas qui nous préoccupe ici, une vilaine odeur de fuel !!

Chère Belgique tu as été très gourmande en Afrique et ça ne t’a pas suffit, ton inquiétante naïveté et ta vanité t’ont poussé à faire des choses pas très catholiques !

Et bien évidemment une connerie ne vient jamais seule. Des années plus tard, ce fut les partis politiques qui voyant un potentiel électoral significatif se sont lavés de tout principe séculier dans certaines de leurs opérations de séduction visant ces électeurs-là !

Les espaces culturels, déjà maigres, se sont vus très vite dépassés par une multitude de mosquées qui pour certaines ont servi de lieu de propagande de courants tantôt anodins tantôt plus inquiétants.

Enfin les stratégies de quadrillage des pays d’origine, Ankara et Rabat veulent faire partie du festin.

Contrôler et cogérer voir gérer complètement l’obédience spirituelle de leur diaspora respective. Et nous savons tous que ces deux pays sont loin d’être des Etats de droit, de liberté d’expression et de libertés individuelles.

Ils ont tous bossé en toute tranquillité depuis des décennies et aujourd’hui ils récoltent.

Une politique non réfléchie sur des enjeux cruciaux se paie un jour ou l’autre

Me voilà donc baisé, et tellement bien que je finis par y prendre plaisir.

A chacune de mes positions, chacun de mes choix, mes identités me rappellent à l’ordre, l’une me trouvant trop flou m’invitant continuellement à lui présenter des gages de loyauté , l’autre jouant avec mon affect d’un attachement à des racines qu’elle m’octroie par moments et me confisque à d’autres.

– « Aujourd’hui, il n’y a pas que les travestis prostitués du quartier « Yser » qui se lèvent en ayant mal au cul ! »

Sauf que moi je ne veux plus de ça moi , je ne l’ai pas choisi ! Je veux être libre, comme le vent, me défaire de tout attachement communautariste et chérir moi-même mes identités , en les façonnant comme bon il me semble .

« Je suis Charlie » au nom de l’esprit de liberté qu’insufflait cette presse, je le suis ne veut pas dire que j’en étais féru. Je le suis, car c’est nécessaire pour les personnes qui cultivent la liberté de pensée, d’expression et d’écriture.

Il est nécessaire aussi, car derrière ce canard volontairement provocateur, irrévérencieux à souhait, brisant les limites de la bienséance et des « bonnes consciences », se trouve un refuge pour les bousculeurs… pour les affranchis. Et leur place est indispensable dans nos sociétés.

Que nos gouvernants agissent en cohérence lorsqu’il s’agit de liberté d’expression.

LA LIBERTE D’EXPRESSION EST PLEINE ET ACCESSIBLE POUR TOUS !!!!!

Bordel de merde !!!!!

Une manifestation à Bruxelles

Lors de la manifestation à Bruxelles, je suis passé chez ma mère qui depuis le décès de mon père est morte aussi et que la télévision marocaine est en train de tuer une 2e fois.

Mais dans un sursaut de lucidité, elle m’a dit :

« Allah y Baadek min oulad el haram »

-Que Dieu te tienne éloigné des “personnes indignes ».

De qui parlait-elle ?

Finalement, c’est ma sœur qui m’accompagna avec ses deux enfants. Près de 20 000 personnes dans les rues de la capitale, une très faible présence de la « communauté musulmane » s’il y a lieu de la nommer ainsi, comme le fait une grande majorité de la presse.

Une chose est vraie, cette faible affluence est un signal pour la citoyenneté qu’il faudra avoir le courage d’analyser !

Crispation justifiée ?

Oui , oui et re-oui !

C’est l’expression d’un malaise et d’ un mal-être qui ankylosent cette volonté de solidarité

Il serait temps que ces anthropologues et que cette élite belge se penchent sérieusement là-dessus !

Oui, les Belges d’origine turque et maghrébine sont mal aimés, ils sont mis au ban de la société, ils sont pointés du doigt quotidiennement !

Oui, ils sont assignés à vivre l’ émancipation dans quartiers et écoles ghettos !

Oui, on ne peut pas s’ouvrir aux autres si on ne s’est pas encore révélé à soi-même !

Oui, ça crie à l’aide depuis des décennies. Personne ne l’entend vraiment !

Oui, ça a payé, ça paie et paiera probablement encore !

Oui, ça vit dans l’indifférence de sa différence sans qu’elle ne soit jamais valorisée, comme cet enfant né par accident à qui on a reproché « d’être » toute sa vie et qui réclame juste un peu d’amour …

Cet amour… De cet amour absent et tant recherché, cette reconnaissance sincère « d’être » qui poussa peut-être deux frères dans cette escalade de la folie .

Deux frères qui se sont aimés dans un schéma dénué d’humanité.

Cela pourra en choquer plus d’un ce que j’écris là, j’en suis conscient… Mais tout ça, ça sent juste le manque d’amour.

Conclusion facile me diront certains, peut-être …

Non, à dire vrai il n’y a pas de conclusion.

Et s’il devait y en avoir une pour moi, elle ressemblerait à ça :

Je pleure ces grands rêveurs qui dessinent avec des Magic colors, je pleure Ahmed et toutes les autres victimes, je pleure pour la liberté, je pleure pour le musulman, je pleure pour le juif, je pleure pour l’athée , je pleure pour le chrétien, je pleure pour l’humanité …

J’ai déjà moins mal au cul aujourd’hui, mais je mesure avec effroi la profondeur de l’enculade !

En hommage à Charlie et à tous ceux qui sont tombés.

Reposez en paix …

Zmagri

 


«Chris_coleman24», comme une tempête silencieuse!

C’est bientôt Noël chez les zmagris, il fait froid, tout le monde tire la gueule et ça sent le sapin… Jusqu’au Maroc.

Depuis plusieurs semaines, l’Etat marocain vit tribulations sur tribulations, suite aux multiples publications de Chris_Coleman24. Ce cyber-activiste distille sur le WEB via Twitter, des documents aspirés dans les limbes cybernétiques, classés top secrets du gouvernement marocain.

Il ne cache ni sa sympathie pour la cause sahraouie ni son envie de déstabiliser le régime marocain. Les médias officiels du pays restent trop discrets sur ce qui est déjà qualifié par des observateurs comme étant : l’affaire du « Snowden marocain ».

Et gare à ceux qui tenteront de vexer Chris_Coleman24 en prétextant que les documents présentés ne sont pas authentiques. Il se rebiffe aussitôt, l’amenant à partager, authentifications à l’appui, d’autres documents compromettant.

Une sorte de boîte de pandore qu’il aurait fallu pour le Makhzen (nom attribué à l’Etat marocain) qu’elle ne s’ouvre jamais.

L’un des récents faits d’arme de Chris_Coleman24 rapporté par un journaliste est le partage de documents révélant les noms de journalistes français, soudoyés par les services de renseignement marocain.

Oui Monsieur, de la corruption en d’autres termes !

Pour nous relayer ces histoires de divulgations, quelques médias occidentaux et des médias électroniques indépendants marocains, à l’instar du célèbre journal électronique du journaliste dissident Ali Lmrabet : « Demainonline ».

Chris_coleman24 inquiète jusque dans les plus hautes sphères de l’Etat marocain, il y a peu de doute là-dessus.

Faut-il s’en réjouir ou s’indigner ?

Pour ma part je pense qu’on ne procède pas de manière noble avec ceux qui usent des pires méthodes. Chris_Coleman24 agit tel un miroir, il mime ceux-là même qu’il tente de déstabiliser.

Il est fort à parier que Chris_coleman24 deviendra dans les semaines, dans les mois à venir, la voix de la conscience d’une certaine opposition marocaine. Que ce pseudo emprunté au sélectionneur de l’équipe de football galloise acquiert au fil des jours une couleur outre-Méditerranée.

Il est déjà celui que tout le monde attend … Sympathisants comme contradicteurs.

Est-il protégé  par des cieux moins soupçonnables que « l’éternel coupable » algérien constamment avancé par les officiels marocains ?

Protégé peut-être par ceux qui connaissent le Makhzen, qui mangent à même la table avec lui. Qui tirent les ficelles de ce qui pourrait ressembler à un règlement de compte. Comme celui d’un client déçu par une passe dans une maison close …?

Sont -ils plusieurs …?

Seul le temps et un travail journalistique digne de ce nom pourront nous éclairer.

Pourquoi le dossier du Sahara … ?

Pour ceux qui l’ignorent encore, l’épineux dossier du Sahara est ce legs empoisonné du roi Hassan II à son fils Mohamed VI. Cet immense territoire au sud, revendiqué à la fois par le Maroc et à la fois par le Front Polisario (indépendantistes sahraouis).

Ce dossier « Chlingue » à tous les niveaux, tant les montants alloués à la corruption des élites marocaines et internationales, pour plaider la cause de la souveraineté chérifienne ont été (et sont toujours) faramineuses. Tant la crédibilité des uns est souillée par une pastilla jambe en l’air ou une invitation « mamounesque » de trop.

Ce dossier semble capital pour le sommet du pays et fait l’objet d’un quasi- unanimisme non négociable, qu’il serait inconscient aujourd’hui de vouloir bousculer.

« Ceux qui feignent croire se coucher du bon côté, finissent toujours par avoir des crampes » disait l’ancien.

Chris_coleman24 est cette donne imprévisible, sortie de nulle part et qui vous pète à la figure.

Le journalisme marocain a été tué plusieurs fois, brûlé vif sur l’autel de la corruption ! De ses cendres renaissent ici et là des phœnix qui tentent d’informer au péril de leur vie parfois, ceux qui se donnent la peine de cliquer sur les bons onglets.

Chris_Coleman24 a au moins ce mérite là pour l’heure, donner à cette dissidence journalistique la portée qu’elle mérite.

J’ignore où tout cela va mener… Et ce qui mène vers l’inconnu excite autant qu’il inquiète.

Mais à cette allure, 2015 s’annonce pourri pour ceux qui ont œuvré à tout pourrir autour d’eux.

Zmagri

Lire l’article publié sur France 24 : https://https://m.france24.com/fr/20141208-maroc-chris-coleman-twitter-wikileaks-diplomatie-sahara-occidental/?aef_campaign_date=2014-12-08&aef_campaign_ref=partage_user&ns_campaign=reseaux_sociaux&ns_linkname=editorial&ns_mchannel=social&ns_source=twitter


Une colère « maladroitement gentille »

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Une colère gentille mal exploitée est souvent le résultat d’une incapacité chronique de dissocier la passion d’avec la raison.

Et c’est pareil aujourd’hui, peut-être encore plus !

Il y a des mots et des mots, ceux  qui donnent de l’assurance et ceux qui se livrent dans un brutal silence. Ces derniers, aussi sournois qu’un arracheur de dents, perturbent au départ, mais très vite deviennent les incontournables d’un simulacre de bienveillance servant à notre bonne conscience la preuve de son indispensable raison d’être.

 

A chaque jour suffit sa peine disait l’autre, j’ai comme le sentiment que chaque jour connaît la même peine.

C’est lundi et un lundi ça restera toujours comme un lundi. Je me suis levé de bonne heure, après une douche, un yaourt et un croissant, je me suis rendu au boulot.

Dans l’ascenseur ça parle de Gaza, à la cafèt’ d’Israël et dans les couloirs de Palestine et dans ma tête ça ne parle plus … Pour une fois. C’est étrangement calme, un calme à peine espéré, qui est probablement le résultat d’un mécanisme de défense face au vacarme de dehors.

Comme si mon âme et mon corps endossaient chacun à leur tour des contraintes qu’ils tentent de soulager comme ils peuvent.

Je file aux toilettes et sur le chemin, je la croise. Elle, c’est une collègue que je regarde depuis des mois, qui le sait peut-être mais qui m’ignore, du moins c’est mon interprétation.

Une belle femme qui a tout pour plaire, fougueuse aux yeux de braise, émancipée mais qui à 33 ans vit toujours chez ses parents car elle ne devra quitter le nid familial qu’ une fois la bague aux doigts. Et comme l’âge avance, elle a probablement revu ses critères d’un ou deux crans à la baisse et aujourd’hui elle me parle.

– « Tu as vu Gaza » me lança-t-elle.

-Moi : « Oui ».

-Elle : « Ils exagèrent … ! »

-Moi : « Qui ça ils ? »

-Elle : « Ils enfin … Ils ! »

-Moi : « Mais qui donc ».

Elle s’approcha de moi, son parfum est frais, j’ai toujours aimé les parfums frais et le sien l’est particulièrement.

Sa chemise est déboutonnée à la limite du « raisonnable » laissant entrevoir la dentelle de son soutien-gorge blanc qui contraste avec le bleu qui l’entoure.

A cet instant précis, et là, je m’adresse aux messieurs, plus rien à d’importance, les secondes sont des heures et mes yeux ont des capacités de figer des images dans des angles improbables, le tout avec une certaine classe évidemment.

Elle s’approcha encore plus, son haleine est fraîche et ses cheveux sentent la douche du matin.

-Elle :  en murmurant : « … Les sionistes enfin ».

-Moi : « Ah oui … C’est sûr ».

-Elle : « Ils tuent des gamins, des mères et des pères et toi tout ce que tu arrives à dire, c’est : Oui c’est sûr … ? »

– Moi : « Oui, c’est déconner ».

-Elle : « Wallah ils me foutent la rage ».

– Moi : « Je sais ».

– Elle : « C’est un génocide … On mange ensemble ce midi ? »

C’est à ce moment que je me suis remis en pleine conscience. Et cette phrase « On mange ensemble ce midi » signifie dans mon esprit que soit on va refaire toute la géopolitique du Moyen-Orient, alors qu’on n’en a pas trop les compétences, soit que cela sera les prémisses d’une très belle soirée.

-Moi : « Oui, bien sûr, on va au libanais ».

-Elle : « Oui bonne idée ».

Je me suis donc rendu aux toilettes, tiens je bande … Déjà … Curieux ça.

De retour à mon bureau, je désespérais à la vue de la lourde tâche qui m’attendait, mais à chacune de ses apparitions une bouffée d’optimisme m’envahissait me donnant énergie et pêche pour tout surmonter.

11 h 58,

Je bande toujours …

-Elle : « On y va ».

– Moi : « Let’s go ».

Sur le chemin, on parle peu et on rigole beaucoup sur des conneries utiles dans de pareils moments.

Arrivé au resto, la TV est câblée sur Al-Jazira et ça parle de Gaza dans un arabe qui me fait mal au crâne tellement il m’est incompréhensible.

– Elle : « Mais que fait l’ONU ? »

– Moi : « Ils font d’excellentes grillades ici , on se fait le menu pour deux ! »

– Elle : « Que fait l’Europe ? »

-Moi : « Ça te dérange pas si je prends du vin ?»

– Elle : « Tu sais les juifs ne l’emporteront pas au paradis, et oui un menu pour deux ».

– Elle : « Ils se tirent une balle dans le pied et leur déclin est proche ».

– Elle : « Tu penses quoi de tout ça toi ? »

Ce que j’aurais dû dire à cet instant c’est que je suis fatigué de parler de Gaza. D’ailleurs, je n’en vois  pas beaucoup  qui auraient à la fois la hauteur et le recul nécessaire pour nous livrer une analyse complètement dépassionnée du sujet.

J’aurai dû dire aussi que mes oreilles ont attrapé des paupières tant les conneries avancées par les deux camps sont imprégnées d’une haine non avouée. Je lis trop cette haine des colons d’esprits qui occupent illégalement l’espace de mon cerveau !

Ce que j’aurais voulu dire aussi, c’est qu’elle est belle et encore plus lorsqu’elle est passionnée et que je voudrais juste que cette gentille colère maladroitement exploitée nous serve pour nos futures prises de tête, car je la vois déjà près de moi jusqu’à mon dernier souffle.

Ce que j’aurais dû lui dire, c’est que tous les juifs ne sont pas des légionnaires de Tsahal et que derrière l’antisémitisme se cachent parfois des frustrations qui trouvent leurs origines ailleurs, bien ailleurs.

Ce que j’aurais voulu lui dire c’est juste parle-moi de toi, ta vie, tes ambitions tes chagrins, tes espoirs.

Ce que j’aurais dû lui dire c’est que je ne comprends pas que l’Occident chrétien découvre ses coreligionnaires d’Orient. Car oui , l’ignominie se déroule sous nos yeux actuellement à Gaza et  l’impunité de la communauté internationale est insoutenable mais qu’au même moment les chrétiens d’Orient subissent une inquisition au nom de l’islam dans un silence monstrueux …

Mais je n’ai rien dit de tout ça. Je lui ai juste dit : « Oui, tu as raison ».

Je sentais une volonté de me jauger de sa part.

Savoir si nous étions du même moule avec les mêmes instincts, les mêmes opinions, les mêmes souffrances … Les mêmes ennemis.

Moi perso, Gaza, Israël, les juifs et le sionisme j’en sais trop rien, mais je suis convaincu qu’en 2014 ils sont tous condamnés à vivre ensemble.

Que tous les « ismes » devront revoir leurs ambitions à la baisse, car ils sont trop souvent à l’initiative d’horreurs inhumaines.

Je refuse de beugler les mêmes gammes, tout en étant convaincu de me distinguer des autres. J’ai besoin de hauteur, de me désaxer pour mieux appréhender, de solliciter mon pathos par moments et de l’isoler par d’autres

Mais l’unique certitude que j’ai c’est que la connerie humaine perdure.

Je cautionnerai toujours la résistance du peuple palestinien au même titre que la résistance de tous les peuples opprimés sur cette terre.

Il est 12 h30 , le garçon nous apporte notre plat je sens sa cheville frôle délicatement mon genou sous la table, c’est agréable.

Elle sourit, moi aussi.

Je découvre à cet instant une autre personne, plus en confiance.

Je découvre aussi qu’il faut du temps et que le temps est un luxe de nos jours.

Même si je me sens aussi perdu qu’elle. Comme deux mouettes qui se baladeraient en plein cœur de Bruxelles.

On a beaucoup de choses à se dire, il faut juste du temps.

Zmagri


« Le grand Klezmer » (2ème partie)

jud isl

-Amale : « Papa, je te présente Cohen Rosenberg ».

Pas la moindre hésitation à avoir, ma réaction sera scrutée et analysée dans les moindres détails pour le restant de mes jours. Mais comment alors, comment réagir face à l’annonce que ma fille fréquente un juif.

-Amale : « Et nous allons nous fiancer ».

Wow, wow, wow doucement, je suis encore calé sur le Cohen Rosenberg qu’elle me parle déjà de fiançailles et puis de mariage et puis quoi ! Mes petits-enfants porteront le nom de Rosenberg. Allah y Hdina !!( Que dieu nous préserve !)

Ils vont tous me juger autour de cette table et au passage le Rosenberg a volé la vedette à mon beau mur fraichement peint …

Vite, il faut que je dise quelque chose, ma fille est là devant moi et attend un signal, un geste, un truc quoi.

Que vais-je pouvoir dire, identité tu es où merde aide-moi là !

-identité : « Je vais t’aider, écoute moi bien : Tire ton plan ! ».

-Moi : « Et wa tozzzzzzzz 3lik !».

Je dois dire ou faire quelque chose. Je ne veux même pas regarder ma femme qui vient de se lever en disant :

« Soyez le bienvenu Cohen, tenez installez-vous ».

Voilà, ça c’est neutre :

-Moi : « Oui, soyez le bienvenu Monsieur comment vous dites … ? ».

-Cohen : « Cohen Monsieur… Amale m’a beaucoup parlé de vous ».

-Moi : « Si c’est pas mignon ça… ».

– Moi à Yuba : « Dis bonjour à notre invité, il s’appelle Cohen tu as entendu C O H E N ! ».

-Yuba : « Oui, Ba j’avais compris … »

J’étais piégé, chez moi et piégé !

Et pour je ne sais quelle raison, la première pensée venue se figer sur mon lobe frontale était PALESTINE ! Je me sentais palestinien.

Pourquoi j’en sais trop rien… Faut que je bouge d’ici, faut que je sorte de cette table.

Je me suis rendu à la cuisine, j’ai chaud ou plutôt non je dois marcher. Pourquoi elle me fait ça … ? Pourquoi ma fille chérie, mon troisième œil à moi pourquoi … ?

Comme rattrapé par un élan de solidarité panarabe, incohérent et vide de sens, moi le fils d’un berbère du Rif, je m’interroge sur le quand dira-t-on, celui qui vous maintient dans une léthargie intellectuelle, abandonnant toute individualité au profit des idées dominantes. Un vrai mouton de Panurge fidèle à son auberge !!

A cet instant présent, je ne suis ni marocain, ni belge mais je me sens palestinien, pierre à la main face à un char de Tsahal intimement convaincu que ce caillou perforera le blindage du thank et éclatera la tête de son pilote. Après, quoi j’aurai sûrement les couilles de retourner à table et de le foutre à la porte le Rosenberg.

Putain, en plus il cumule : Cohen et Rosenberg !! Elle aurait au moins pu choisir un sépharade, ça passe mieux.

Je vais faire quoi, je dois faire quoi … ?

-Identité : « Ah,AH, AH, ».

-Moi : « Mais tu es là ? Tu te marres bien j’espère ».

-I : « Malek ? ». (Qu’est-ce que t’as ?)

-Moi : « Mali ?? (Ce que j’ai)Y a Benjamin Nethanyahu chez moi à ma table ou t’ 9oli Mali ?? Rak Mreda fi rassek ntina ? ». (Et tu me demande ce que j’ai, tu es malade dans ta tête toi !)

-I : « Calme toi chuuuttt, Calme toi ».

-M : « je sais ce que je vais faire, où est-il ? ».

-I « Quoi donc »

-M : « Le cd de Marcel Khalifa tiens, je vais lui envoyer des décibels qui vont lui faire exploser chaque synapses ».

-I : « calme toi, et retourne à table ».

-Ma femme : « Tu as besoin d’aide… ? ».

-M : « Non, j’arrive, tout de suite ».

-Cohen : « Besoin d’aide Monsieur Bouziane »

Merde le voilà, il est devant moi le regard sur et la démarche respectueuse. C’est toujours comme ça au début.

-Moi : « Merci, c’est gentil, je vous rejoins de suite ».

-Cohen : « Très bien, on vous attend ».

Il retourna dans le jardin.

Je me suis approché de la baie vitrée, en prenant soin de ne pas me faire repérer, je les vois tous autour de cette table, face à mon beau mur fraichement repeint …

Acculé par la pression du moment, je me révèle encore à moi : fuyard et peureux …Mais pas aujourd’hui, l’événement à trop d’importance pour fuir !

Une sorte de sagesse intérieure, une voix qui ne m’est pas inconnue, une voix clairvoyante me dit :

« Mais au fait pourquoi je me fais ça ??? »

Oui, pourquoi, je m’inflige ça, alors que pour être honnête, je m’en moque.

Pourquoi, avons-nous ce mépris du juif… ?

Pourquoi, pourquoi, pourquoi …

Pourquoi ce mépris m’aveugle et m’interdit ce moment que je devrai savourer en famille.

Je dois pisser …

En me rendant aux toilettes, j’ouvris ma brayette et comme touché par la Grâce, mon sexe me rappela que nous avions beaucoup plus à partager avec le judaïsme que je ne pouvais l’imaginer.

« Regardez vos bites mes chers et regardez vous ensuite ! »

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Le bruit de l’urine sur la paroi du wc me détend, je fais des cercles en pissant , comme lorsque j’étais gosse et pour faire chier ma femme je laisse la lunette rabaissée …

Je finis par m’assoir sur le pot et me plonge dans une réflexion, de celle qui fige l’espace temps. Je suis en transe, en » hyperaccuité « . Des phrases arrivent en masse près du goulot de mon cerveau, ça se bouscule aux portes :

« Convaincu que l’antisémitisme est un concept occidental, le sens étymologique du terme mériterait qu’on s’y penche sérieusement.

Le judaïsme est inhérent à notre culture … Alors c’est quand que ça a merdé ?

La convention Béclard (1863) qui accorda un statut privilégié aux juifs du Maroc.

A cela vous rajoutez, la période coloniale de la France au Maghreb et le fameux Décret Crémieux (Algérie) qui octroya la nationalité française aux juifs d’Algérie.

Et aussi et plus frais encore dans nos esprits : Un certain 23 mai 1967, jour à partir duquel l’armée israélienne mit moins de temps que Dieu eu besoin pour créer le monde pour anéantir la coalition des armées arabes.

La fracture est surement liée à un de ces facteurs, mais lequel ??

Israël, sionisme et Judaïsme sont-ils réellement un bloc homogène …?

Se poser la question, fait-il de nous des antisémites ?

A qui profite ce flou gaussien ?

C’est alors que je me suis rappelé ce nom d’un célèbre dissident juif marocain antisioniste originaire de Tanger, Abraham Serfaty. Je me suis rappelé aussi des débats auxquelles j’avais pu assister à l’UPJB (L’Union Progressiste de Juifs de Belgique) dans lesquels des Belges de confession juive remettaient en cause la politique d’expansion de l’Etat isréalien allant même jusqu’à manifester auprès de la communauté musulmane de Belgique lors de la guerre qui opposa Le Hezbollah à Israël.

Qui est responsable de notre « antisémitisme » ?

Qui est responsable de ce schisme entre Musulmans et Juifs au Maroc.

Le sionisme ? L’intégrisme religieux ? L’Etat marocain ? L’agence juive ? …

Comment sommes-nous passés de voisins à ennemis intimes ?

Je me rappelle de cette vieille cassette audio de Cheikh MouiZo (chanteur juif marocain) que mon père écoutait lorsque nous faisions de longs trajets.

Je me rappelle que ce judaïsme est porteur d’une des plus grandes souffrances que connut l’humanité ces derniers siècles.

Enfin je me rappelle de Magalie, cette charmante Magalie avec qui je suis sorti quand j’étais jeune … Mais ça je le garde pour moi !

Ma fille fréquente un juif et alors, je vais me rendre à cette table et faire sa connaissance et me défaire enfin de ce boulet communautaire avec lequel je me suis toujours senti en conflit ! »

J’ai la marque de la lunette des wc sur l’arrière des cuisses, je tire la chasse et bénis toutes les forces de l’univers, d’avoir inventés ce lieu magique : LES TOILETTES !

-Moi : « Yuba , Yuba , aji a Wouldi, ntina wouldi …”( Yuba , viens mon fils, toi tu es mon fils ).

-Yuba : « Oui, Ba ».

On se regarda dans les yeux, il s’approcha de moi lentement, très lentement et arriva en face de moi.

-Yuba : « Ba, … Ba , elle est heureuse … Ne gâche pas tout ! ».

Je le pris par les épaules, j’ai regardé mon fils droit dans les yeux et je lui ai dit.

-M : « Je sais ».

Tout s’apaisa vraiment, dans mon esprit de con aux préjugés infondés sur tout et sur rien.

J’avais comme besoin de l’aval de mon alter égo masculin : mon fils, c’est amour de bonhomme à la lucidité candide.

Et c’est aussi à ce moment précis que j’ai jeté mon regard sur la photo de mon père, celle qui est accrochée sur la cheminée. Je lui ai dis au fond de moi-même, avec cette assurance qui a tant fait défaut dans ma vie :

-Moi « Ya l’Walid, je serai un bon beau-père ».

-Mon père : « 3arraf a wouldi » ( Je le sais mon fils)

Nous retournâmes nous assoir dans le jardin.

Cohen : « C’est du beau boulot le mur »

-Moi : « Oui,merci ! C’est de la bonne peinture la marque « Levis » »

Et toute la table se mit à rire. Et pour une raison que je n’ose m’avouer, ma fille Amale est venue me prendre dans ses bras et d’une voix tremblante me dit dans le creux de l’oreille

-Amale : « Je t’aime Ba, je t’aime si fort »

Et, elle se mit à pleurer … De bonheur je suppose.

Comme je suis un émotif qui s’ignore, je l’ai serré très fort puis l’ai mise dans les bras de ma femme, chacune de ses larmes me blessèrent profondément et me renvoyaient l’image de ce que je suis …

Ça, il n’y a que votre moitié ou vos enfants qui peuvent vous le faire sentir.

L’ambiance est à présent bénie par une convivialité nouvelle, celle de notre nouvelle tribu.

-Yuba : « Ba, j’ai comme l’impression qu’aujourd’hui tu as marqué beaucoup de points… J’ai aussi une grande nouvelle à t’annoncer».

-M : « Hop, je te coupe fiston, laisse-moi savourer chaque nouvelle pleinement ».

Dans ma tête, je me suis dit, mais qu’est-ce qu’il va m’annoncer celui-là qu’il est gay et que son petit ami est algérien :).

Dans le fond peu m’importe, j’ai appris aujourd’hui que seul le bonheur de ma progéniture dépassait de loin tous ces stigmates d’un pathos incrusté dans la moelle. Et me suis rappelé ces recommandations de mon regretté père.

-Mon père « Tba3 L’9alb Inssane 7ssen ma T’ba3 din awla l’assal » «(Suivre le cœur des gens est préférable que suivre leurs religions ou leurs origines).

Mon père cet artiste !

-Cohen : « 3andi noukta ». (J’ai une blague).

Merde, il parle Darija (dialecte marocain) en plus.

-Cohen : « Je vous rassure je ne parle pas l’arabe , seulement 2 ou 3 phrases qu’Amale s’est acharnée à m’apprendre ».

-Moi : « on est tous impatient de la connaître ».

C’est à ce moment-là qu’on sonna à la porte. C’est ma belle-sœur Hafida.

Avant de poursuivre, vous devez savoir qu’il y a certaines personnes pour ne pas dire la plupart, de ma belle-famille que je ne peux sentir. Ceux qui savent tout et qui ont toujours un avis sur un tas de sujets, sans avoir pris la peine ne serait-ce que de se renseigner. Ceux qui sont porteurs de l’indice de » labélisation » du Halal et qui se sont autoproclamés prêcheurs, sauveurs d’âmes.

C’est ce genre de personne qui m’ont poussé, ma femme et moi à nous installer en dehors de Bruxelles.

Et comme des vieux instincts, ça ne se perd pas, je me retrouve à nouveau poussé par cette hypocrisie flagrante mais accommodante : Je me suis levé pour l’accueillir.

Attention, la main ou la bise, est-elle avec son mari ou est-elle seule ?

Yuba prit la bouteille de vin et s’apprêta à la ranger au sol, quand je lui lança

-Moi : « Wow , Ach kat 3mal, S7ablek Fi l’maghrib f Ch7ar Ramadan awla ? Khali di kchi fo9 Tabla !” ( Qu’est ce qui te prend, tu t’es cru au Maroc en plein mois de Ramadan, laisse cette bouteille sur la table !)

Curieusement, ma femme qui l’aurait fait ne broncha pas, faut dire qu’avec ce qui venait de se passer elle ne pouvait pas piper un mot.

Hafida : « Salamou3aleikoum »

-Moi : « Ahlan, nhar kbir hada , Guelssi , guelssi … ». (C’est un grand jour , assied-toi)

-Amale : « Salam Khalto » (Bonjour ma tante)

-Yuba : « ça va Khalto » (ça va ma tante)

Et là, Amale me regarda …Comme pour me lancer le test.

-Moi : « Hafida , je te présente Cohen le futur fiancé d’Amale »

-Hafida : « Aaaa, et wa mabrouk » ( Aaaa , et bien félicitations)

Un » mabrouk » qui sent le » mabrouk » du protocole, celui qu’on lance à son pire ennemi le jour de l’Aïd.

Elle s’installa, et se mit en mode observation. Ce qu’elle ignorait c’est que j’étais aussi en mode observation et que la moindre allusion bancale sur Cohen allait me faire péter un câble.

Et comme le rosé sous le soleil ça tape sur la « cabessa » (tête en espagnol), fallait surtout pas me faire basculer de mode. Qu’elle me laisse en mode cool sinon, walla ça va chier !!

Je me suis retrouver dans une situation insolite, je venais de me découvrir tolérant et vraiment tolérant et comme pour tester cette nouvelle compétence le Tout Puissant m’envoyait une épreuve. Celle de devoir assumer face à « mes semblables » que j’assume pleinement ma position adoptée à l’instant.

La suite, la prochaine fois.

Zmagri


Racisme à la marocaine

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Un petit, tout petit texte qui mériterait d’être long pourtant.

Depuis quelques jours, de nombreuses publications traitent du «racisme au Maroc».

Ce racisme est implicitement institutionnalisé chez nous.

Ce racisme, celui que Nelson Mandela découvrit avec effroi lors de sa visite au Maroc, alors sous Hassan 2, est présenté par bon nombre de têtes aux chapeaux coniques comme étant l’expression de notre culture …

Celle que les Marocains véhiculent consciemment, car le racisme est inscrit dans le patrimoine makhzénien …

Le Maroc est le premier pays à avoir reconnu les Etats-Unis ! Aime-t-on crier à tout va ! Oui certes, ce dernier fut aussi l’un des principaux pourvoyeurs d’esclaves vers le Nouveau Monde. (Cela, c’est écrit en tout petit, tout petit.)

Mais aujourd’hui, notre société marocaine du pays et de la diaspora est-elle raciste ?

-“Tbronziti maa rassek , wouliti draoui” “Tu as bien bronze, on dirait un esclave”

Alors vous ne voyez toujours pas ?

-« Chouf aroussa zouina wakha Kahla » « Regarde la mariée, elle est belle bien qu’elle soit noire »

Ne me dites pas que vous n’avez jamais entendu ce genre de phrases …

Mesurons l’ampleur de notre racisme avec honnêteté, celle du malade qui prend conscience de sa pathologie et qui a le choix, soit de la combattre, soit de s’y résigner.

Oui, au Maroc nous sommes majoritairement racistes, oui il y a de l’antisémitisme à revendre, oui il y a dans notre société un système de castes informelles et des privilégiés qui viennent renforcer ce racisme.

Certaines plumes tentent de justifier cette ignominie, accordant à l’interjection « aazzi » une définition tolérable. C’est quoi ce délire !!

D’autres accusent la bourgeoisie marocaine de vouloir paraître, en portant ces revendications d’égalité raciale.

A mon humble avis, il ne faut rien attendre de la bourgeoisie marocaine ou si peu, tant que cette dernière sert de rustine à ce système féodal et archaïque, système qu’elle reproduit dans son intimité.

En plus d’être le premier islamiste du pays, le roi et sa troupe de gais lurons sont les premiers racistes du pays. Je vous passe les détails que représente la « négritude » à l’intérieur du palais.

La « négritude » des Marocains … Tiens, ce serait un excellent sujet de thèse universitaire. Comme je le disais dans un de mes précédents textes, trop de Marocains ont un solide problème avec leur propre « négritude ».

Je me rappelle de ce mariage… La mariée, une splendide marocaine métisse à la peau d’ébène s’était fait grimer le visage en blanc par la « ziyana » (maquilleuse) . Un vrai visage « de Pierrot au clair de la lune », tableau burlesque qui se dressa là, sous mes yeux. Cette maquilleuse autoproclamée (comme elles le sont souvent) avait oublié les mains … Et là, c’était vraiment comment dire … Cheeelllllooouuuu comme truc. Une espèce de face d’aspirine avec les mains du « père Fouettard ».

Pourquoi ce délire de vouloir blanchir une peau qui ne l’est pas… ? C’est alors que mon cours d’histoire vint me titiller le cerveau et me rappela que sous, je ne sais plus quel Louis (XI, XII, XIII, XIV, XV , XVI, peut-être même sous tous les Louis), le fait d’avoir la peau un peu bronzée vous assignait au rang du bas peuple, celui qui était exposé au soleil dans les champs à la corvée.

Sommes-nous devenus aussi rétrogrades que l’était la société française de cette époque ?

Alors je me suis une fois de plus confessé :

-J’ai grandi dans une ambiance raciste. Oui, Monsieur !

-Dans une société raciste avec des racistes qui étaient convaincus qu’ils ne l’étaient pas. Oui, Monsieur !

– Avec aussi des victimes du racisme, les « racisés » qui à leur tour l’infligeaient aux autres comme une sorte d’exutoire de leur souffrance de « bougnoule » Oui Monsieur !

Je me suis même récemment pris la tête avec un ami. Sa mère est marocaine et noire, je lui ai dit, en voyant la photo, qu’elle est noire et j’ai perdu un ami …

Pourquoi ? Allez lui poser la question !

Nous sommes racistes avec nos semblables, pourtant nous n’aimons que nous …

Et comme dernier exemple que j’assimile comme une forme de racisme dans notre société, c’est celui de la femme marocaine qui lorsqu’elle épouse un Européen « l’oblige » à se convertir sous peine de ne pas pouvoir l’épouser …

Ne riez pas cela existe encore, oui cela existe qu’un mec qui s’appelle Bertrand face fi d’une partie de lui-même en se rebaptisant Bilal, pour que la famille de sa moitié daigne le regarder …

Oui, que ce même Bertrand par amour ou que sais-je se fasse circoncire à 27 ans, pour qu’enfin la famille de sa moitié daigne le regarder, car incapable d’assumer face à notre société que Bertrand est catholique et qu’il aime leur fille.

Une femme au Maroc ne peut se marier qu’avec un homme de confession musulmane ou juive (les 2 religions reconnues par la Constitution marocaine).

Je ne comprends pas cette attitude suprématiste face aux autres, que je traduis encore et encore comme étant une forme de racisme !

Les exemples sont multiples et franchement, ils mériteraient qu’une plume plus assidue que la mienne en fasse l’analyse afin que nous puissions avoir une esquisse de réponse crédible face à ce douloureux constat.

Pour finir, sur cette surprenante campagne antiraciste au Maroc je suis tiède voir gelé, car tant qu’elle ne remet pas en branle toute la société marocaine dans ses plus hautes sphères « culturelles », elle ne sert à rien si ce n’est qu’à bousculer gentiment certaines consciences en mal de sensations.

Zmagri


Le grand Klezmer.

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J’ai eu 58 ans et pour me redonner un coup de jouvence, je me suis fait promesse de repeindre la façade arrière de notre maison comme pour prouver à ma femme qu’il y a toujours de la ressource dans ce corps de méditerranéen.

Il fait beau et comme nous partageons tout, j’ai réveillé mon fils aux petites heures pour qu’il supporte les railleries d’un grincheux qui se donne l’illusion que la tâche l’enchante.

Il a 19 ans, l’âge bête qui peut se prolonger un bon moment chez les hommes si ’ils n’y prennent pas garde.

Nous l’avons prénommé Yuba, en hommage aux origines rifaines de mon regretté père qu’il n’a jamais connu.

Amale, ma fille, c’est la réussite par excellence, la perle de ma vie. Celle qui par sa seule présence efface tout et laisse place à l’allégresse.

Elle termine cette année ses études de droit international, parle couramment 4 langues et tient de son père assurément :).

Elle passera dans l’après-midi, il paraît qu’elle doit nous annoncer quelque chose de « grand ».

J’enfile mon short et mon Sweat pour faire jeune et dynamique, ce que je ne suis absolument pas et direction la cuisine où l’odeur du thé à la menthe me réconforte dans cette marocanité si chère à mes yeux et la voilà devant moi, ses cheveux d’or et ce regard qui perce, m’offrant ce qu’elle concède uniquement à celui qui a su entretenir notre flamme durant toutes ces années… Ce sourire ! Je peux me vautrer dans la prétention de temps à autre, ça me fait du bien et puis j’écris ce que je veux … 🙂

Ma femme … Notre histoire mériterait à elle seule 100 textes, tant elle fut et demeure une route où nous nous sommes aimés et aimons toujours un peu plus, même nos périodes de crises puent l’amour à crever.

-Ma femme : « Alors les hommes, il est déjà 9H et je ne sens toujours pas l’odeur de l’acrylique et Hiya Rjel (A ces hommes).

-Moi : « Tu ne sens toujours pas l’acrylique, mais moi je sens que j’ai de la peinture à l’huile sous pression à extraire … 😉 »

Oui je sais, c’est lourd mais ça marche.

Elle me regarde comme pour me dire que c’est une riche idée mais que le castard risque de débarquer d’une minute à l’autre.

-Moi : « Laisse Hbiba (Chérie), après la peinture je te fais une livraison :). »

-Ma femme : « d’accord mon bébé ».

– Moi : « Tarma dielli (mon petit cul à moi) ».

Ah, te voilà enfin, yallah rejoins-moi dès que tu termines ton petit déjeuner, je vais déjà installer le petit échafaud.

-Moi : « Chérie, je vais prendre la petite théière avec moi au jardin ».

Et me voilà, devant ce mur à repeindre, ce putain de mur à repeindre , ce putain de putain de mur à repeindre.

-Ma femme depuis la cuisine : « Chéri tu veux du miel avec tes Baghrires (Crèpes marocaines) ».

-Moi « Oui ,merci ».

Ce putain de mur, pourquoi j’ai proposé de faire ça aujourd’hui … Ah oui je voulais que les deux femmes de ma vie soient fieres de moi.

-Moi : « Yuba, on commence par le haut du mur, fiston ? ».

-Yuba : « Papa, c’est plus simple par en-bas ».

-Moi : « Et hiyaaa, t’es bien le fils de ton père, partisan du moindre effort ».

-Moi : « Ok, on commence par le bas et ramène nous un peu de musique ».

-Yuba : « D’accord papa , mais on met pas tes trucs du Maroc ».

-Moi : « On met ce que papa veut écouter et quand on aura terminé tu mettras ta musique ».

« T’es toujours aussi enfoiré toi … »

-Moi : « Ah te revoilà, toi. Mon identité chérie que j’aime et que je déteste à la fois »

-Mon identité : « Alors, premièrement tu imposes à ton fils de t’aider pour un travail que tu as proposé de faire et en plus tu lui imposes ta musique à écouter, mais t’es un vrai dictateur ».

-Moi : « Oui, c’est vrai … Je vais régler ça en 2 secondes ».

-Moi : « Yuba …. Yuba ».

-Yuba : « Oui Ba ».

-Moi : « Ramène de la musique et file je m’occupe de faire le reste ».

-Yuba : « T’es sur Ba ? ».

-Moi : « Oui fiston, il fait beau t’as pas une copine à aller voir Awla ? »

– Yuba : « Non, je vais plutôt m’entrainer avec la voiture pour le permis de conduire ».

-Moi : « C’est ça file, elles viendront plus facilement avec une voiture … »

Et il s’en est allé, me laissant seul avec mon identité et le mur à peindre.

– Moi : « C’est bizarre mais je le vois jamais avec des filles lui, je vais en parler à sa mère ».

-Mon identité : « Pourquoi, qu’est-ce qui te fait peur ? »

-Moi : » Rien … »

-I : « T’es sur ? »

-M : « Certain même. »

-I : « Et si il est gay ton fils ?? »

-M : « Ah ben ça … »

-I : « Ah ben quoi ? »

-M : «Ah ben il l’est peut être. »

-I : « Arrête je vois bien que ça t’emmerde ».

-M : « Au lieu de dire tes âneries, viens plutôt m’aider. »

-I : « Tu sais bien que je ne peux pas, je suis imaginaire … »

-M : « Alors aide moi en me parlant de truc gai … Enfin marrant quoi on s’est compris. »

-I : « Et comment va la belle Amale ? »

-M : « Elle viendra cette après-midi et je veux qu’elle soit fière de son père ».

-I : « Elle le sera, fais- moi confiance ».

-M : « Pourquoi tu dis ça ? »

-I : « Tu verras, je te laisse. Bon boulot ! »

Je me suis donc attaqué au mur et en 2H de temps c’était réglé. Pour faire dans l’impeccable, c’est ma femme qui a choisi la couleur et j’avoue qu’elle s’y connait, le résultat est parfait.

-Ma femme : « Waw, mon homme à moi ! »

Voilà comment remonter dans l’estime de sa douce Messieurs.

-Ma femme : C’est magnifique

-Moi : « Ça te plait ? »

-Ma femme : « C’est toi qui me plait bébé. »

On sonne à la porte, ça doit être ma fille chérie.

-Amale : « Papa chéri,c’est mon papa à moi . »

-Moi :  » Aji 3and Baba (Viens là chez papa) ».

C’est curieux mais je lui parle souvent en arabe elle, va falloir que j’explique ça à mon identité, elle a des réponses à tout.

Amale : « Waw papa c’est toi qui a repeint ça ? »

-Moi : « Oui ma grande. »

-Amale : « Seul, yuba ne t’a pas aidé? »

-Moi : « Oui tout seul ! »

-Amale : « Viens là je te fais une grosse Boussaaaa ».

Je suis monté me doucher et j’ai mis ma chemise du papa cool, celle avec les palmiers à la Miami Vice. Elle est bien large et cache la petite bedaine de celui qui ne se refuse rien.

Ça sent le repas, du poisson et comme il fait beau, ma femme a sorti la table au jardin pour qu’elle puisse tout en mangeant complimenter sa moitié en contemplant le beau mur fraichement repeint. Ça va être une après- midi superbe !

Yuba est revenu, le repas est lancé et ma fille m’a ramené une belle bouteille de vin.

-Amale : « Tiens papa, je sais que tu préfères le rouge mais j’ai pris du rosé vu la belle météo ».

-Moi : « Les Celliers de Meknes …Excellent choix ma grande ! ».

Oui, il m’arrive de boire du vin et mes enfants le savent. J’ai toujours préféré à l’hypocrisie sociale, la candeur de vie.

Nous voilà donc à quatre réunis autour de cette table chaleureusement achalandée par les soins de ma femme.

-Amale : « Papa . »

-Moi : « Dis-moi ma fille. »

-Amale : « Je dois t’annoncer une grande nouvelle. »

-Moi : « Ahh, enfin. D’autant que j’ai le sentiment qu’autour de cette table je suis le seul à l’ignorer n’est-ce pas ? »

Ma femme : » Oui c’est vrai. »

Moi : « Même toi fiston, hein? »

Yuba ne répond pas. Il est bizarre depuis un petit moment d’ailleurs…

-Moi : « Wa 9olli A benti ? (Dis-moi ma fille ?)

Elle regarda sa mère qui fit signe que c’est le bon moment.

C’est à ce moment-là que je compris qu’il y a comme quelque chose de troublant qui se trame autour de moi. Je me sens comme gentiment dupé. Pourtant, je pense être un papa cool, j’ai la chemise à palmier, je bois du vin, mes enfants ont grandi sans contraintes… Qu’est- ce que j’ai loupé ? A côté de quoi suis-je passé ?

Dans ces états de panique je sollicite mon identité chérie.

-Moi à mon identité : « Alors, que se passe-t-il autour de cette table ? »

« Ecoute-moi bien » me dit-elle.

-Moi : « Je suis ultra-concentré comme tu le vois. »

-I : « Quoiqu’elle te dise, promets moi juste d’être à la hauteur. »

-Moi : Qu’est-ce que tu me fais là, qu’est-ce que vous me faites là … ?

-I : « J’ai dit promet moi juste d’être à la hauteur ! »

-Moi : « …OUI ! »

-I : « Tu me le promets vraiment ? »

-Moi : « Oui, oui tu me connais quand je dis oui c’est oui ! »

I : « C’est parce que je te connais que j’insiste. »

-Moi : « Amale, tu peux tout dire à papa. »

-Amale : » Voilà papa, j’ai quelqu’un dans ma vie « .

-Moi : « Mais c’est magnifique, ça fait longtemps, pourquoi nous ne l’avons jamais rencontré,… Où est-il ? … Il est là ? »

-Amale : « Oui papa il vient d’arriver. »

-Moi : « Et wa jibou y tghada m3ana. ( Dis lui de venir manger avec nous.)

Elle regarda sa mère encore une fois qui acquiesça.

Amale se rendit à la porte. Pendant ce temps, alors que Yuba me servit un grand verre , je dis à ma femme .

« Mais qu’est-ce qui se passe ? »

Elle me regarda avec ce regard de celle qui est face à l’inconnu, celle qui ne maitrise pas la réaction à venir. De celle qui espère ne pas s’être trompée sur l’homme qu’elle a épousé.

-Amale : « Papa »

-Moi : « Oui »

C’est alors que je le vis enfin. Il est grand, trop grand même pour être de chez nous …

-Amale : « Papa, je te présente Cohen Rosenberg ».

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La suite la prochaine fois


Nostalgique d’un soleil que je n’ai plus jamais connu.

ob_529b06_olivier-rifElle me fait des crises à nouveau la coquine.

Le drame du déraciné c’est que l’herbe dans laquelle il pousse ne sera jamais assez riche pour lui.

Ma psy m’écoute parler, lorsque je commence je ne m’arrête plus. Entre confusion, mélange et découverte je me perds dans mon jardin, elle intervient juste pour baliser et m’avertir des redites, car oui je radote beaucoup.

Et voilà que mon identité, vous savez celle qui me fait des crises de jalousie dès que je la délaisse un peu, la revoilà pointer du nez dans ces tumultes qui paraîtront futile pour certains et essentiel pour d’autres.

-« Ramasse tes affaires et vient vivre à la maison, on doit se parler. » Lui dis-je .

C’est ce qu’elle a fait.

Depuis je partage tout avec elle, même ma brosse à dent.

Seul bémol, ses ronflements la nuit, je n’arrive pas à m’y faire… Qu’importe.

Je vous la décrit vite fait :

Elle est comme moi, la clarté en plus, elle m’assure qu’elle a déjà tout réglé dans sa vie. Bien évidemment je ne la crois pas !

Sa présence me rassure un temps, puis lorsque nous discutons de moi, car oui, nous parlons exclusivement de moi, elle déblatère des théories qui viennent réconforter, rassurer cet homme qui se fuit indéfiniment.

Ah oui, elle déteste ma psy.

-Elle : « Pourquoi tu vas la voir ».

-Moi : « C’est toi qui me l’a conseillé, dois-je te le rappeler ».

-E « Je sais, mais pourquoi ? En as-tu vraiment besoin ».

-M « Je ne sais pas, mais je me suis promis d’aller au bout du processus ».

-E « Elle est comment ? ».

-M « J’en sais rien, elle est comme elle est, une belge».

-E « Mmmmmm ».

Ce que je n’arrive toujours pas à comprendre pas avec mon identité, c’est que c’est une femme, plutôt mignonne. Elle a investi ma bulle, rien ne la dérange vraiment dedans.

« Alors, depuis la dernière fois qu’est-ce qui a changé ? » Me dit-elle.

-Moi : « Pas grand-chose, je dors je mange je boulotte … »

-Elle : « Vraiment »

-M« Oui »

Nous sommes en mars et j’aime ce mois, car il désamorce l’hiver en théorie (sauf en Belgique), les journées sont plus longues et le moindre rayon de soleil optimise votre humeur. Les oiseaux gazouillent pour de vrais et le vent du nord cède sa place à la douceur, pas encore assez franche à mon goût, mais c’est un bon début.

-E« Il parait qu’on fête les 50 de présence marocaine en Belgique »

-M« Oui, c’est plus tôt bien non ? »

-E« Mais t’as rien compris ou t’es con ».. (On a un langage plus que familier)

-M« Explique moi ».

-E« Tu trouves qu’il y a quelque chose à fêter ? Ton père est mort comme un palmier dans un jardin d’hiver, ton frère s’est shooter à se faire claquer la carotide, ta mère ne jure plus que par Al-Jazeera tes sœurs font mines d’être heureuse et ton autre frère à les nerfs à vif. Et tu trouves que c’est « la fête ! ».

-M« Ben et alors, tu crois que si on avait été au bled ça se serait mieux passé »

-E« Allo, la terre il y a quelqu’ un …La vie c’est Belgique ou Maroc ? Pourquoi tu ne rêves pas d’ailleurs ? Pourquoi tu réponds religieusement au schéma de vie qui s’offre à toi … Je t’ai connu moins discipliné ! »

-M« Mais qu’est-ce que tu veux dire par là ? »

-E« Ce que je veux te dire Al Bourro (Ane en espagnol), c’est qu’il n’y a de vie épanouie que si l’épanouissement se révèle être indispensable, qu’il devienne le moteur de toutes tes entreprises qu’il ne nécessite que les efforts que tu consens lui donner ».

-M« Mais … ».

-E« Y a pas de mais !! ».

-M« Mais laisse-moi en placer une ».

-E« Non, on est pas chez ta psy là, c’est moi qui parle ».

-M« Wow,, calme très chère amie ».

-E« Que je me calme, tu n’es pas sérieux j’espère , ça fait des années que tu es trop calme et que tu attends le terreau fertile pour bouger tes fesses ».

-E« Et côté cœur, ça va ? ».

-M« Ben ça s’éclaircit ».

-E« Pfff, t’as rien pour toi franchement ».

-M« C’est que là j’ai besoin de calme, une belle et sereine période de calme ».

-E« Je vois et ça me va parfaitement ».

-M« Tu serais pas encore occupée à me faire ta crise à la con ».

-E« Non, tout ce qui m’importe c’est de te voir heureux ».

-M« Et je ne le suis pas ? Pourtant je devrai, non ? ».

-E« Ca commence ».

-E« Bon je me couche, je prends le côté de droit du lit ».

-M« Oh, non en plus de ronfler tu me piques ma place »

-E« Et oui, continue à dormir et toutes tes places seront prises par d’autres … »

-M« Bonne nuit »

-E …

-M« Tu pourrais répondre … Ca y est tu ronfles déjà… Tezzzz »

C’est alors et seulement alors, que je me suis rendu au salon et que j’ai pris l’album de famille. En le feuilletant j’ai vu un homme sur une photo mal développée et dont les taches d’oxydation sur les coins me rappellent que j’ai intérêt à la numérisée au plus vite. En l’observant avec attention je me suis vu, moi Mohamed Bouziane né le 3 mars 1930 et mort en 2004.

Qu’est -ce que c’est ce délire encore …?

« J’aurai du vous parlez mes enfants, j’ai choisi d’immigrer et personne ne pouvaient faire autrement, j’avais faim dans tous les sens du terme et je voulais que la vie me permette d’offrir à ceux que j’aime le droit de pouvoir rêver.

Je voulais vivre moi aussi, je ne peux le nier… Qu’est-ce qu’on a ri !

Alors qu’au Maroc, j’aurai vu les « autres » m’écraser comme ils le firent et le font toujours aujourd’hui. J’ai donc suivi ma bonne étoile qui ne pouvait se révéler à moi qu’une fois le détroit traversé.

J’ai immigré comme mes frères de classe, pour marcher d’un pas franc sur cette terre, d’où je viens rien n’était fait pour me retenir.

J’ai trouvé le meilleur ici, parfois le pire mais c’est tout de même pour un meilleur que cette Belgique m’a vu vivre car le pire ici est surmontable.

Je vous ai donné ma force et ma jeunesse en guise d’affection ; je ne pouvais, je ne savais vous donnez plus que ce que je n’avais jamais reçu et je ne mesurais pas que c’est tout ce que vous attendiez. Un père affectueusement présent.

Tiens, une photo de ma femme, elle sourie pour rien même dans l’ultime nécessité. Nous savoir à l’abri et au chaud suffisait à l’apaiser.

Et toi Saïd …

Saïd, mon fils, la drogue t’as offert tout ce que tu ne pouvais trouver à la maison, pardonne-moi wouldi (mon fils), pardonne ton père de n’avoir su être là.

J’ai le chagrin de celui qui sait que ça ne sert plus à grand-chose, le chagrin de l’olivier centenaire assistant au balai des générations sous ses yeux et qui est pris d’affection pour tous ceux qui le quitteront un jour.

L’immigration est une chance à bien des égards mais demeure une déchirure dont la plaie reste ouverte sur plusieurs générations. L’immigré et sa descendance n’auront pas le luxe de sédentariser leur identité, ils devront conjugués avec et c’est tant mieux.

Tout ne va pas si mal tout compte fait.

Et toi qui écris ce texte, n’oublie jamais que rêver est la plus belle manière de vivre.

Je vous aime. »

-« On va s’arrêter là pour aujourd’hui » me dit la psy.

Je me lève, quitte le petit salon dans lequel elle reçoit, tiens on a même dépassé l’heure sans qu’elle ne me facture plus.

Peut être que la chance commence à tourner.

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« Tu es magnifique. »

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Dormir, dormir encore …Puis se réveiller.

La fuite a souvent des relents de lâcheté, vous savez cette lâcheté paresseuse.

Je dors encore et encore et redoute le réveil car il sera violent, déterminant.

Spectateur de ma vie dont le scénario se résumerai en 1 page tapé en gros caractère.Un scénario sans vraiment d’intrigue où l’on a du mal à cerner le protagoniste.

Une enfance insouciante, une adolescence enivrante et un âge adulte qui refuse de se manifester. Mais une colère qui persiste et qui ne trouve aucun moyen de s’atténuer.

« C’est bien, au moins tu identifies tes soucis » me lança un ami.

C’est bien, mais ça ne résout pas grand-chose et comme les choses ne sont jamais simples, je suis en plus habité par ces tourments identitaires d’une recherche de soi oú le moi occupe une place prédominante ne laissant aucune place à toute autre considération.

Dormir et encore dormir, ça ira mieux au réveil. Alors je dors et demeure spectateur de ma vie et de celle des autres.

De plus, je sens poindre le nez d’une aigreur croissante qui affecte ma perception de ceux qui m’entourent. Un grincheux qui n’est même pas vieux c’est à la fois anachronique et chiant.

Trop vite lassé de tout et tout le temps.

Les gens sont cons car ils se croient différents. Je suis con alors ou pas assez.

La vie c’est quoi … ? 5 jours semaine de labeur pour un court répit. Deux jours pour le bonheur quand celui-ci ne s’enfuit … ? C’est quoi ce bordel.

Il manque de la lumière et ma peau absorbe cette morosité.

Devant une glace on ne peut se mentir et bien moi j’y arrive ou du moins j’essaye … Lorsque soudain :

Lui-« Qui es-tu, que veux-tu, te donnes tu les moyens pour y arriver ? »

Moi-« Putain c’est chiant, je vais dormir ça sera plus clair au réveil. »

L-« Chaque minutes passées est morte à jamais, qu’as-tu fait le dernier quart d’heure ? »

M-« Relis plus haut, je dormais ».

Jusqu’au jour où même dormir devient très compliqué et c’est à ce moment précis que des mécanismes aussi tordus qu’immatures se mettent en place un peu comme un groupe électrogène lors d’une panne de courant. Cela fait 20 ans que je suis en pilotage automatique. Que j’attends un été sans fin, sans fausses notes et que mes projets trouvent celui qui pourra les porter.

L-« D’ailleurs c’est quoi tes projets … ? »

M-« C’est bon, tu le sais bien, enfin … J’en sais pas trop, je vais dormir ».

L-« Non, attends s’il te plait. Attend et écoute moi, je n’ai pas beaucoup de temps à t’accorder, j’ai d’autres spécimens de ton genre à secouer ».

M-« Mais qui es-tu toi …? Dieu … ? »

L-« Même pas et là n’est pas la question. »

M-« Mais t’es qui ? »

L-« Arrête de fuir et écoute moi. Tu as peur ? »

M-« Oui. »

L-« De quoi ? »

M-« Je ne sais pas. »

L-« Réfléchis. »

M-« Je ne sais vraiment pas. »

L-« Peu importe quelles seront tes peurs, dis-toi juste qu’elles sont là pour que tu les surpasses … Personne ne meurt de peur. »

M-« ça c’est de la couillonnade, c’est tout ce que tu as en stock ? »

L-« Quelles sont les origines de ces peurs. »

M-« … C’est moi. »

L-« Tu as peur de toi ? »

M-« Je pense…Ou plutôt j’ai peur de me voir réellement, tel que je suis vraiment, déshabillé de toute carapace. »

L-« Mais tu es magnifique. »

M-« Merci … J’ai une certaine maîtrise intuitive et je sais que tu dis ça pour me réconforter. »

L-« Non, tu ne sais rien et tu es magnifique.»

M-« Je ne pense pas. »

M-« Bordel, mais t’es qui au juste … ? »

L-« Là n’est pas la question. »

M-« Si c’est pas Dieu, c’est quoi, un genre de moi imaginaire qui surgit à chaque passage à vide dans ma vie. »

L-« Non, même pas. »

L-« Tu es en bonne santé ? »

M-« Je pense que oui, mais une sorte d’hypochondrie s’est invité depuis peu comme si ce n’était pas déjà assez compliqué comme ça. »

L-« Tu es égoïste … »

M-« Je pense que si je ne l’étais pas tu le saurais. »

L-« 🙂 Oui, je le saurais. Mais tu ne l’es que parce que tu dors trop ».

M-« Oh oui, je dors trop. Je tente par là de figer le temps qui lui file à toute allure. L’enfoiré ! »

L-« Oui, l’enfoiré … »

M-« Mais toi, parle-moi de toi. »

L-« Arrête de fuir, dernière sommation. »

M-« Ok, mais que veux-tu que je te dise de plus : Je suis un mec paumé qui recherche le bonheur, une super vie, un super job et une super nana et un super tout , sans me soucier de savoir si oui ou non je suis à la hauteur; c’est humain non ? Un mec qui se persuade que la réussite nécessite trop d’effort et préfère se coltiner à l’échec. Un mec qui a quitté la course depuis longtemps, empruntant des chemins de traverses dans lesquels il s’est perdu. Un mec désappointé, lassé, angoissé que même le plus optimiste des babas cool en deviendrait dépressif. Un mec qui se vautre dans une complaisance insolente. Un mec qui se cache dans ce brasier de l’indifférence et qui s’y brule les doigts, préférant à la prise de conscience la douleur. Un mec qui dort et dort encore, putain de sommeil qui ne vient plus dans ce dédale pourtant si clair, la ligne est droite, en témoigne le sillage au sol et il n’y en a qu’une ! Non moi je préfère les tortueux virages, les boucles à l’infini ! L’empathie à fait place à l’égocentrisme qui lui a fait place à une fureur de vivre frelatée, insipide...

Un jour il fera beau et de cette chaleur naitra un nouveau moi sinon à quoi bon. Un jour je serai ce pourquoi je suis et plus encore.

Un jour je me réveille … Et je t’écris.»

M-« Mec … ? T’es encore là … ? »

L-« … »

M-« Mais t’es qui ??? »

L-« … »

M-« Papa … ? … C’est toi … ?»

-« … »

-« … »

« Tu es magnifique. »

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A mon père parti il y a dix ans mais présent plus que jamais.


« La vraie de vraie … » (Suite et fin)

ob_63e049_la-toute-premiere-foisImage retouchée du livre « La toute première fois » de Lauren Strasnick, Albin Michel

 

 

« Cheftek far7ane had sba77… »(Tu as l’air heureux ce matin!)

« ça va A Yima, ça va … » (ça va maman, ça va…)

J’ai 17 ans et ça y est !

Je remonte dans ma chambre après un entrainement de football et me replonge dans cette si délicieuse et inéluctable soirée de la veille.

J’ai rencontré une super nana qu’une amie d’une amie m’avait juré de me présenter.

Elle est aussi plus âgée que moi (décidément) et nous nous retrouvons dans une soirée à Bruxelles près de la place Ste Catherine. Elle est métisse, des yeux clairs et danse comme une reine le funk, le zouk et le raï.

Le son est bon ce soir : Blackstreet, BBD, 2 Close … (Pour les connaisseurs)

On passe la soirée à danser et comme d’habitude une bagarre éclate, mettant un terme à la fête.Trop de testostérone dans une surface limitée remplie de nanas, ça finit souvent par éclater, mais pas de la meilleure des manières.

On se retrouve à la rue vers 0H30, plus de bus pour rentrer, on va se la jouer à pieds.

Comme pour rajouter une tension dramatique à la scène, le ciel se couvre et un orage éclate, on se prend la douche de l’été du siècle. La pluie nous trempe, lui rajoutant une allure encore plus désirable.

En passant par la place Rogier, on s’est embrassé sous ce ciel ténébreux comme si tous les Dieux versaient des larmes d’affection face à ces 2 ados, libres de s’aimer et de le vivre. Arrivés chez moi, mon père est devant la télé marocaine à fond de bal et le reste de la famille assiste à un mariage dans le quartier.

Il ne fallait pas faire chier mon père avec ces histoires de mariage. Il trouvait déjà pénible d’assister à ceux de ses propres rejetons. Son argument fétiche était de dire que l’ambiance des mariages d’aujourd’hui n’avait rien à voir avec la simplicité et la chaleur authentique de sa jeunesse.

Mon père ce nostalgique … Je crois tenir de lui sur ce plan !

J’ouvre doucement la porte.

-« Viens! »

-« T’es sur ? »

-« Mais oui t’inquiète. »

On file le couloir à la vitesse V V prime, on grimpe au deuxième et s’enferme tous les deux dans ma chambre.

A peine la porte de celle-ci fermée que mon père m’appelle. Je descends, en prenant le soin de virer mes vêtements trempés par la drache et d’enfiler mon pyjama, je me présente à mon père en mode « tu m’as réveillé, je dormais ».

-« N3am A Ba » (Oui Papa).

-« Fayn kounti ? » (Où étais-tu ?).

-« kount na3ass » (je dormais).

-« Kounti na3ass … ? Yek » (Tu dormais … ? Ah bon).

Dans ma tête, je me dis :

« Merde, ne me dis pas qu’il a capté, que l’odeur de son parfum nous a grillé ».

Mon père, me regarde avec un sourire étrangement rassurant.

Suivi d’un interminable blanc sonore.

-« Ewa rja3 t n3ass deghia ». (alors retourne te coucher vite)

-« Khassek chi 7ajja a Ba ? ». (Il te faut quelque chose papa)

Il me sourit.

-« Ma Khssni wallou a Ouldi , Khssni ghir l’Hna , Chouf ila mamak khalatli chi 7ajja »

(Il ne me faut rien fiston, seulement de la quiétude, regarde si ta mère m’a laissé quelque chose à manger)

Je file dans la cuisine.

-« Ba9i L’A3dess a Ba ». (Il reste des lentilles papa).

-« Arra chi Zlafa a Ouldi » (Fais-moi un bol fiston)

Je lui prépare ça en un temps record en n’ oubliant pas de garder une portion pour ma belle qui doit commencer à s’impatienter dans ma chambre.

-« Chokran a wouldi ». (Merci fiston).

-« Bssa7a a Ba, sba7 3ala Kheir ». (Santé papa, a demain matin).

“Aji”.( Viens là)

“N3am”( Oui)

-“Yek labass ?” (Tu es sûr que ça va ?)

-“N3am a Ba juste 3ayane”( Bien papa, juste fatigué)

-“Wakha, sir , sir …”( D’accord, allez file).

Je mets ma main au feu qu’il a tout capté, mais à cet âge-là l’insouciance qui, venait de mon slip, me donnait l’illusion que je bluffais comme un roi.

Je rentre dans ma chambre, avec mon plateau de lentilles. Elle est couchée sur mon lit en sous vêtement. Je vais avoir besoin de fer et ça tombe bien, les lentilles sont là !

On avale ça à 2, c’est mignon avec du recul.

L’A3dass, c’est un plat très populaire, un peu à notre image.

Elle venait de La Louvière, une ville wallonne anciennement industrielle.

Son père était italien et sa mère portugaise (originaire d’Angola).

-« C’est bon, on dirait un truc de chez nous » me dit-elle.

Je vais l’emballer sans même l’emmener au resto et avec un bol d’A3dess … 🙂

On termine, on rigole, on s’embrasse …

Et là, le stress monte …

Elle me dit : « J’ai envie de toi ».

Je lui répond :« Euh, j’ai pas de capote ».

-« On s’en fout ».

-« Oui, c’est vrai on s’en fout ».

Je me sentais prêt ce soir-là, alors au diable la prévention.

On s’embrasse encore, en se déshabillant.

Et toujours dans ma tête,

-« C’est ce soir mec, déconne pas, assure bordel de merde ! ».

-« On a pas deux occasion de faire bonne impression, alors assure !! Pense pas et file ».

Ça y est, je suis dedans, elle est plus expérimentée que moi et moi je découvre en laissant croire que je le suis autant qu’elle.

Elle a surement du le sentir …

Je suis en train de me faire dépuceler par une beauté et je n’ose même pas le lui dire.

Il fait calme, très calme et je jouis tranquillement, elle en redemande mais moi je m’endors la banane en bouche car ça y est, j’ai fait l’amour.

C’était sain et beau, moins bon qu’on ne me l’avait vendu, mais c’était … propre.

On s’est endormi enlacé. Le monde pouvait s’effondrer autour de nous, on s’en moquait.

Je pouvais sentir les pulsations de son cœur contre ma poitrine et son regard envoutant se mariait parfaitement avec la rougeur de ses joues. Quelle belle sensation.

Elle me dit des mots dont seules les femmes ont le secret, des mots qui rassurent et qui s’accordent avec l’image que je me faisais d’un homme.

Je lui demande :

-« ça t’as plu … ? »

-« Ouiiiii, mon ange à moi ».

Vive les femmes, vive l’amour, vive la vie …Et vive l’A3dess !

On se caresse, je rigole, elle aussi.

Cela paraitra anodin pour certains, mais parler de sexe chez nous, c’est comme dévoiler un secret de famille le soir de Noël.

Le sexe s’apprend en parfaite autarcie chez les mecs, pour les filles ça s’apprend à base de sous-entendus tellement sous-entendus qu’on s’y perd. Pourtant, si je me réfère à mes sœurs, elles ont dû subir un lavage de cerveau au « Dettol » depuis leurs 12 ans afin qu’elles soient prêtes et les meilleures des mariées pour la fête, après le soir ,tire ton plan mais ne nous fait pas honte grosso merdo.

On baise trop sans faire l’amour et on croit faire l’amour tout en se faisant baiser.

On a bien évidemment tous un rapport particulier avec la sexualité, il est empreint de pathos de rapport à l’autre et de rapport avec son propre corps.

Que nous reste-t-il, si ce n’est ces moments de vie, ces moments de partages et d’émotions ?

Plus grand-chose.

J’ai besoin de plus que le rapport charnel, je me découvre cérébral, voire féminin dans mes caresses.

-« Tu es belle », lui dis-je .

-« Merci »

-« Merci ».

-« Merci ?? »

-« Merci bella ! ».

Le lendemain matin, je briefe ma sœur Nabila que je ne suis pas seul, elle rigole de bonheur. 10 minutes plus tard, elle monte dans ma chambre avec un plateau pour le petit déjeuner, du jus d’orange, du thé des Rghayefs (crêpes marocaines).

Elle rigole avec ma belle, elle rigole avec moi, on passe la matinée dans ma chambre. Nabila parle de moi et ça l’amuse.

-« Vous ferez des enfants magnifiques … »Dit-elle.

-« Wow wow Nabila, j’ai 17 ans … »

Et c’est là que je me rappelle qu’on l’a fait sans protection.

-« Merde ».

Mais, je suis comme hypnotisé par l’air car cet été a quelque chose de particulier.

Je prépare mon sac de foot et me rend sur le terrain avec la plus belle supportrice.

Sur le chemin, je voulais lui dire mes craintes pour la capote, la grossesse etc.

Cela ne voulait pas sortir et comme pour m’aider, elle me dit :

-« Ne t’inquiète pas ce n’est pas la bonne période et pour ce qui est des MST( Maladies Sexuellement Transmissibles), je ferai un test dans 3 mois ».

Dans ma tête : je ne comprenais pas ce que voulait dire « ce n’est pas la bonne période »…

Mais je fis mine de comprendre.

Le lendemain, au retour de l’entrainement, ma mère :

« Cheftek far7ane had sba77… ».(Tu as l’air heureux ce matin!)

« ça va A Yima, ça va … » .(ça va maman, ça va…)

« 7iyana 3lik » 🙂 🙂 ( intraduisible, si vous trouvez une traduction fidèle n’hésitez pas)

C’était donc ça, faire l’amour …(Fin)

 


Les premières fois.

ob_5aa099_topelementIl fait trop doux cet hiver et Bruxelles en a plein le cul de devoir ressortir ses tenues estivales, rangées depuis peu, tout en gardant à l’œil que l’air polaire sera bien au rendez-vous, un petit contretemps mais ne vous en faites pas !

Et comme c’est le premier texte pondu en 2014, j’aimerai vous parler de la première fois ou plutôt des premières fois.

Du sexe et oui encore et toujours du sexe, car chez nous aussi il y a DU SEXE.

Les premières fois, car c’est comme ça que cela s’est passé.

Les femmes m’ont toujours fasciné, la douceur et l’exaltation de leurs verves déstabilisent encore le faux Don Juan qui m’habite.

16 ans

On rentre d’une soirée :

-« Allez vas-y.

-Attends.

-Mais tu ne bandes pas.

-Mais si, qu’est-ce que tu dis, attend 2minutes.

-Mais non tu ne bandes pas (léger rire).

-Merde, elle fait chier elle en fait !

-Tu veux que je te suce.

– Euh wai wai , j’adore.

-Mais tu ne bandes toujours pas.T’es sur que tu as déjà coucher avec une femme ?

-Bien sûr, qu’est-ce que tu dis.

-Viens dans mes bras. »

-Ça va venir…Ça viens, ça viens dépèche-toi …

– Ça y est ?…

-Et non .On a trop bu et moi quand je bois tu sais , quand …Enfin… tu m’as compris?

– Mon chou dors ça ira mieux.

J’étais pétrifié et ça, elle l’ avait bien compris.

Elle me plaisait beaucoup pourtant, mais plus âgée de deux ans et à 16 ans, ça vous parait énorme et ça rajoute une pression qui m’a plombé.

On s’est endormi.

Elle a été gentille, compatissante et n’a jamais rien dit à personne et pour ça je lui en suis reconnaissant, ça m’aurait flingué.

Le lendemain matin, je décide d’avoir une sérieuse discussion avec mon sexe.

-« Qu’est-ce que tu m’as fait toi hier !! »

Et comme le matin, c’est l’afflux sanguin de ces messieurs , il apparait vigoureux et fier,je la regarde cette verge capricieuse.

« Et wa dabba 3ad fé9ti al mossiba ! » (Et c’est maintenant que tu te lèves espèce de catastrophe !).

J’ai 16 ans et j’ai la trouille des femmes.

Pourtant le sexe m’obsède, les femmes m’obsèdent, l’amour m’obsède.

Mais mon corps a décidé de prendre son temps.

C’est là que mon pote turque Ercan a joué le rôle que tous les bons potes doivent avoir dans ces moments là.

Ercan est d’origine turque, c’était un ami du quartier, sa famille avait fait fortune dans le textile et dans le mobilier à Bruxelles.

Plus âgé que moi de 3 ans, c’est un gros baiseur, un vrai.

A 20 ans, il avait une panoplie de maitresses dont certaines marocaines, car il avait une affection particulière pour elles.

Il m’en a raconté de bonnes et d’autres plus inquiétantes, mais ça sera pour une autre fois.

Il me dit :

-« Ce soir je monte en Hollande pour acheter à fumer, viens avec on passera à Anvers après ».

Pour ceux qui ne savent pas ce qu’Anvers signifie dans l’état d’esprit d’un jeune puceau de 16 ans j’explique :

Anvers ce n’est pas que les diamantaires juifs, le port ou Rubens.

Anvers c’est aussi le paradis du sexe. Tout un quartier aux éclairages fluos rempli de femmes qui ne demandent qu’à vous chérirent, au prorata de la somme que ces quidams auront la gentillesse de leur accorder.

Le quartier, non loin du port, est peuplé d’accents venus d’un peu partout de par le monde.

Russe, latino, arabe, néerlandais, français …

On monte donc d’abord à Rosendaal (Pays-Bas)

On va au coffee-shop (sorte de bar à cannabis en toute légalité) « chez Hamid », un marocain de Tanger. Véritable spécialiste et alchimiste de la plante sacrée.

On fume et on fume encore comme si la vie partait.

On picole et on picole encore comme si la vie partait.

Défoncé comme un employé anglais après licenciement au bord de la Tamise et prêt à s’y jeter.

On reprend la route dans la Audi 80 d’Ercan, musique Turque à se faire péter les tympans et les poches pleines d’amour pour ces Dames d’Anvers qui n’attendent plus que notre venue.

Ercan, lui il kiffe les filles de l’est et à juste titre, des beautés sorties tout droit du jardin d’Eden par dizaine.

« -Alors ? Laquelle » me lance-t-il.

je lui réponds : » Pour moi ? »

« -Bien sûr pour toi, je t’invite frangin. »

Et là, mon regard tombe sur un diamant taillé, probablement dans le quartier des diamantaires anversois.

Elle me fait les yeux doux, des yeux sans un soupçon d’arrogance dont font preuve la plupart de ses collègues.Les yeux de celle qui vous souhaite vous, car c’est elle qui vous a désigné.

-« Putain c’est une bombe celle-là en plus elle prend pas n’importe qui, j’ai déjà testé et avec moi, pas moyen. »

Flatté comme un paon, je me dirige vers la vitrine, elle l’ouvre et avec un accent slave me dit :

-« Alors chéri tu t’es perdu. »

-« Oui, mais là je crois que c’est bon, j’ai retrouvé mon chemin. »

Je rentre.

Abé (frère en Turque) Wayyyaaaaouuuuuuuu Bsa7aa (Santé) , me lance Ercan !

On monte dans un petit studio cosy.

-« C’est quoi ton petit nom », me dit-elle ?

J’invente un faux prénom.

Tu es quel âge ?

J’invente un âge. (La prostitution étant « tolérée » en Belgique, les clients doivent, au moins, être majeurs, ce que je n’étais pas encore).

Elle a 24 ans et est Tchèque.

Pour l’occasion , j’en ai 20 et je m’appelle Farid.

Pourtant, je puis vous assurer qu’à l’âge de 16 ans, j’en paraissais bien 14.

Nous voilà donc allongés, nus sur le lit.

Elle est angélique, des yeux bleus, un teint soleil, des cheveux lisses noir et un corps à ressusciter Jean-Paul 2.

Merde, je panique encore mais qu’est-ce qui se passe ?

Elle parcourt mon corps de baisers, et se dirige vers la zone où tout se complique et commence une fellation en prenant le temps, par un tour de passe passe, de glisser sur mon sexe désespérément apathique, un préservatif qu’elle avait au préalable mis en bouche.

Au bout de 10 minutes, rien n’arrive, rien ne vient …

-« Calme toi,chéri, tu veux faire quoi ? »

-Euh … ?

-« C’est pas grave on a tout notre temps et en plus tu me plais ».

C’est très flatteur, mais je n’arrive toujours pas à « édifier » .

Pourtant, lorsque je vous dit qu’elle est belle, c’est pas qu’elle est belle, elle est beeeelllllllleeeee !!!

Et là, elle s’approche de ma bouche et me dit toujours avec cet accent succulent.

-« J’ai envie de t’embrasser ».

-Euh … (dans ma tête : « maladie, sida, etc clignotaient comme à Las Vegas.)

-« Je peux vous… euh te prendre juste dans mes bras ».

-« D’accord mon amour ».

Je suis resté 10 minutes dans cette position, on a parlé d’elle, de sa vie … Je voulais la prendre avec moi et faire le tour du monde.

Je voulais être son sauveur, son amant, son homme.

Elle avait encore la moitié d’un joint dans le cendrier, on l’a fumé à deux et on a ri.

Elle m’a expliqué sa vie, sa petite fille restée au pays et la maison qu’elle y faisait construire.

-« Pourquoi, tu fais ça ? »

Dans ma tête, ça ne voulait pas s’entendre. Une aussi belle femme.

Comme j’étais encore qu’un petit adolescent, elle me répondit en anglais/arabe cette fois ci :

« -I love money, habibi » (j’adore l’argent mon chéri).

Elle avait du en voir de toutes les nationalités.

Mais je pouvais tout lui pardonner et me casser avec elle et vivre d’amour et d’eau fraiche.

Ensuite je lui ai dit merci « Chérie », on s’est dirigé vers le lavabo à côté du bidet et elle m’a lavé,sans se presser.

Je me suis rhabillé et en descendant les escaliers, elle me lança « Farid », je mis un certain temps à réagir.

-« Toi, tu es quelqu’un de gentil« .

Moi, je lui réponds que j’espère qu’elle arrêtera ce boulot, elle ajouta :

-« Incha Allah ».

On sourit, je descends et je quitte ce nid douillet.

La transition avec l’extérieur est violente. Au loin j’entends une voix familière.

-« Alors ? » S’exclame Ercan, bouteille de vodka/orange en main, qui m’attendait et avait déjà tiré son coup, « elle est super bonne Abé. »

Je lui réponds :

-« Oui, elle est terrible ».

« -Qu’est ce que t’as , t’es amoureux ou quoi ? »(éclat de rire)

– T’es fou ou quoi , moi amoureux d’une …pute.

Et pourtant et pourtant …

J’étais complétement saoul et déchiré au THC ce jour là, mais je pourrai vous décrire chacune des secondes passées avec elle en un tome aujourd’hui.

Elle restera inscrite à jamais, quelque part dans mon cervelet.

Sur le chemin du retour, plus de musique et Ercan a eu droit à une version plutôt macho/édulcorée.Mais je suis sur qu’il ne m’en voudra pas.

Et moi je ne sais pas encore ce que c’est que faire l’amour, mais je m’en fous.

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Fin 1er partie


J’ai rechaussé mes ADIDAS depuis et il n’y a plus « d’autres ».

ob_91d7b5_il-570xn-484275721-3kb7Ma soeur est en colère, elle pleure car le poste convoité était en deçà ses compétences et malgré cela il lui a été refusé.

« Suite à un examen attentif de votre dossier nous sommes au regret de vous annoncer que nous ne pouvons donner une suite favorable à votre candidature.

Nous avons examiné attentivement votre dossier, bien que celui-ci réponde aux exigences de l’employeur nous avons porté notre choix sur un collaborateur dont le profil nous semble plus opportun. »

C’est qui, qui a pondu le premier ce genre de tournure de phrase ?

De cette forme d’hypocrisie est née la « réponse type », celle qu’on vous balance, sourire aux lèvres et dont l’intention implicite est qu’on aimerait se débarrasser de vous à moindre coût.

Il est 15h je suis adolescent et j’ai rendez-vous à la salle de mini-foot, on joue contre un club flamand de Boutersem et on est chaud.

Je vais me venger sur le terrain.

Notre équipe était composée majoritairement de Khoroto (belges d’origine marocaine) ou d’enfants d’immigrés d’ailleurs et chaque match de football ou de mini-foot ne se limitait pas simplement à une compétition sportive, c’était plus que ça, nous marquions avec nos « ADIDAS SAMBA » un acte politique d’affirmation de soi.

Sur le terrain, on ne pouvait s’autoriser une erreur car l’idée de la défaite nous plongeait encore plus dans ce sentiment de dominé face aux « autres ».

Oui, car nous c’était nous et eux, ben c’était « les autres » …

En revanche, chaque victoire était diablement savourée, nous sommes là et avions bien l’intention de le faire savoir.

Jusqu’au jour où des hommes, sont venus nous dire que le chemin de leur mosquée était plus court que celui du terrain de foot.

J’ai rangé mes ADIDAS et perdu quelques amis.

Au soir, on parle encore de nous au Journal Télé. Depuis quelques jours les quartiers populaires connaissent des troubles depuis le parvis St Jean Baptiste à Molenbeek-St-Jean.

Un énième contrôle d’identité tourne au vinaigre et la jeunesse d’origine marocaine réplique.

Des émeutes ont lieu dans plusieurs communes de la capitale et le politique prend enfin conscience que la 2ème génération a de fortes chances de rester en Belgique.

Je ne suis pas d’une humeur violente, mais je suis sorti avec mes amis brandir ma carte d’identité jaune (Carte réservée aux belges d’origines marocaines et turques, les espagnols possédaient une bleue et les italiens avaient une autre couleur dont je ne me souviens plus) pour crier mon indignation.

We zijn belgie, nous sommes belges les amis.

J’ai vu des cocktails Molotov, des charges policières matraques et boucliers à la main, des maisons barricadées, des parents dépassés et des jeunes accrochés à leur seul et unique certitude : leur identité.

J’ai vu un souffle spontané d’une génération à la recherche de leaders propres et intègres.

Le mouvement dura une grosse semaine et les conséquences auraient pu, me semble-t-il nous être plus favorables si nous étions plus encadrés, plus conscients aussi.Ce que nous souhaitions vraiment, c’était juste être pareil à nos semblables, vous savez ceux que nous considérions être comme « les autres ».

Comme derrière tous les mouvements de foule, il y a souvent en embuscade, prêt à bondir pour récupérer cette énergie disparate : La religion, la politique ou la religion au service du politique.

En bouquinant sur l’histoire de notre immigration, en discutant avec des acteurs de cette histoire j’ai mesuré l’ampleur de l’arnaque.

Arnaque dont les conséquences pourraient se traduire aujourd’hui par les expressions suivantes : Le vote ethnique (qui peut être débattu, j’en conviens) et la visibilité politique et médiatique d’une certaine minorité .

Bref comme dirait le briscard du boui boui d’en face « du persil sur le steak ».

Je me suis replongé dans ma mémoire de bambin et me suis souvenu d’une soirée à l’ULB aux allures un peu clandestine d’un comité à l’écart du système. La salle était pleine à craquer.

C’était des marocains qui organisaient à leur manière l’immigration à travers la culture et le savoir et dénonçaient le régime marocain emmené par Hassan 2 durant les années de plombs.

Ils parlaient avec dignité de nous et de notre avenir, ils préparaient notre élite, notre « inteligencia ».

Il y avait des familles, des jeunes khorotos aux allures de rockeurs du thé et de la bière.

Il y avait aussi des groupes de musique qui chantaient la nostalgie du soleil et l’amour du surréalisme.

Il se passait quelque chose, j’en suis sûr mais quoi, je peine encore à le cerner.

Mes amis aussi y étaient, dont certains étaient des royalistes par tradition, d’autres des amazighs au sens étymologique du terme (des hommes libres).

On passait de l’aliénation à la révolution.

Pour harmoniser cette bouillabaisse marocaine, la Belgique a pu compter sur l’aide et le renfort des mosquées tenues par les mêmes hommes qui m’ont éloigné de mes ADIDAS.

Certaines de ces mosquées servaient souvent de relais au régime marocain.

De la religion au service du pouvoir, l’histoire se réécrit sans cesse sans tirer les leçons du passé.

Ils nous ont eus et plus encore.

Ces mosquées pouvaient à leur tour aussi compter sur le soutien indéfectible des politiques belges qui comprirent très vite qu’il y avait là un nid potentiel d’électeurs. Ces politiques ont pris conscience qu’en plus d’être « de gentils bosseurs », les marocains sont des industries à bambins qui seront les votants de demain. L’amorce des fondements du vote ethnique en Belgique, peut être ?

Face au pouvoir d’un divin au service de … les précurseurs d’une élite en devenir n’ont pas fait le poids.

Nous sommes orphelins des soirées de l’ULB.

Aujourd’hui, certains de ces orphelins, vivent un imaginaire sublimé aux antipodes d’une réalité. Dans cet imaginaire Karl Marx et Nietzsche donnaient la messe à des brebis libertaires post 68.

A choisir, j’aurai été l’une d’entre- elles.

La transition à bel et bien eu lieu, nous sommes passés d’un collectivisme « conscientisant » à un individualisme exacerbé, vide de sens aux référents plus saugrenus qu’improbables.

De Brel, Moustaki , Brassens, Lemchaheb, Ghiwane à Sharia For Belgium … Waw !! Et le tout en moins de 40 ans ! Il n’en faut pas plus me diriez-vous.

En février prochain, nous commémorons les 50 ans de présence marocaine en Belgique, l’heure est idéale pour faire un bilan décomplexé avec ceux qui ont cru, avec ceux qui sont déçus et avec ceux qui savaient.

Débattre enfin sur les toutes les affaires : Rapts parentaux, le statut des binationaux, l’affaire Arrass, la double peine etc, cela pourrait franchement aider à clarifier cette psychose identitaire.

Et comme on balance entre ce refus constant du politique belge d’agir là où pourtant il se targue d’être d’une clarté irréprochable et l’ infatigable volonté du régime marocain à vouloir nous asservir et abrutir craignant qu’une conscience venue du nord ne déstabilise encore plus un régime vacillant. On s’éternise dans ce flou gaussien .C’est ça aussi avoir le cul entre deux chaises.

J’ai rechaussé mes ADIDAS depuis et il n’y a plus « d’autres ».

Aujourd’hui nous ne pouvons plus nous interroger sur ce que nous sommes, car Nous sommes !

Nous devrions plutôt nous interroger sur ce qu’ils étaient et pourquoi « sont-ils devenus » ?


Elle me fait des crises la coquine.

ob_8f99c7_emprunte-digitaleJ’étais heureux aujourd’hui, je marchais avec de la campagne ensoleillée plein la tête puis, comme une vieille blessure qui vous rappelle que vous n’en êtes pas vraiment guéris, je me suis souvenu que mon code barre n’était pas aux normes.

Mon identité a besoin d’assurance, elle me fait des crises la coquine.

Elle me demande avec qui j’ai passé ma journée et pourquoi je ne lui consacre pas plus de temps …

Et ce soir je me suis fait promesse de lui parler sans concessions.

Comme demain c’est congé, je me suis roulé dans l’herbe sacrée avec comme fond musical un morceau de Nass El Ghiwane et comme je parle avec mon identité quoi de plus opportun que : « Fine Ghadi biya Khouya » pour accompagner cette séance introspective.

Je ne vais pas pouvoir résoudre tous les méandres ni toutes les vicissitudes ni même toutes les turpitudes de la question …Mais promis je serai sincère, c’est un bon début et comme je souffre de dissonance cognitive je me dis, Oui c’est un bon début.

Le racisme.

-La Belgique est pluriel , Monsieur … ?

-C’est cela.

-Et bien moi je préfère rester au singulier.

C’est toujours comme ça, raciste de merde !

De toute façon, ils te niqueront toujours la gueule.

Le racisme belge est moins couillu que celui de nos voisins de la république.

Il n’en est pas moins présent, il s’affiche plus discrètement , plus hypocritement , plus tactiquement …

Moi j’ai toujours su qu’on ne nous aimait pas, qu’on dérange et que ma belgitude s’arrête là où celle de l’autre commence.

Ma marocanité c’est un peu pareil, c’est juste un peu plus compliqué car elle est intimement liée à un pathos douloureusement épicé.

On y trouve des sons, des odeurs, des liens indéfectibles et même du sexe, aussi bizarre que cela puisse paraître.

Le racisme est le rempart avec lequel je me suis construit une forteresse, un tas d’excuses renvoyant à votre humble serviteur l’illusion que la spéculation de l’échec potentiel n’est finalement qu’un symptôme de la pétoche.

La peur de l’échec donc, la peur de l’inconnu et enfin la peur de l’autre.

Le stéréotype du raciste lambda évoluant dans un environnement bleu marine est bien connu, celui des « racisés » est de la même essence mais est moins confessé.

Je suis un bougnoule partout, je le sais et alors quoi qu’est-ce qu’il y a ????

Racisme subit ou racisme infligé ?

En rentrant chez moi, je passe par l’épicerie me prendre du salami et une bouteille de Fanta , car boire du Coca-Cola c’est aider Israel … Moi je suis pas un traitre, je ne bois que du Fanta … 🙂

Putain 2,50€ la bouteille , sale crevard de Chleu7(berbères du sud marocain), wallah les Chleu7 c’est pire que Lihoud (Juifs), si un jour il y a une attaque aux armes chimiques à l’échelle planétaire, les seuls qui pourraient y survivre c’est les Chleu7, déjà ils sont petits comme des « Minimoys » et en plus je suis certain qu’ils ont dû certainement penser bâtir une ville souterraine pour les moins d’1mètre 40 où ils seront à l’abri avec tous leurs chaudrons remplis de pognon.

Une ville de chleu7 où ils pourront se niquer la gueule entre eux.

En sortant de l’épicerie, je croise mon pote Trésor.

Je sais pas si vous l’avez remarqué mais les congolais ont des putains de prénoms :

Trésor , Bijou , Espérance …

Mais celui qui décroche la palme de platine c’est : Fetnat

C’est troublant comme prénom, c’est juste la contraction de « Fête Nationale ».

A part s’habiller avec des couleurs qui flasheraient un canari et à boire de la bière, ils ne servent à rien.

Putain en plus ils chlinguent les blacks, avec leurs cheveux en mousse, leurs poissons séchés qui fouettent la bouffe pour chat.

Et il y a les Pakistanais des night-shop, qui ont créé une langue à eux : « le Paki ». Personne ne sait la parler mais tout le monde la comprend.

Font chier ces pakis qui passent leur nuit sous halogènes bon marché à s’en mettre plein les fouilles.

Ils te font regretter l’envie de t’acheter à bouffer à 4h du matin.

Déjà ça pue, ensuite ils t’explosent le « bestame »( Porte-monnaie) ces enculés avec leur tarifs abusés.

Et les gaouris (Blancs, occidentaux), c’est pas mieux, je me suis toujours senti supérieur à eux, ça doit être lié à un sentiment de vengeance du au passé colonial au Maroc. Bien que je ne l’ai pas vécu, je les encule tous ces bâtards !

-Allo !

-Bonjour

-C’est pour l’annonce de l’appartement.

-Oui !

-Est-il toujours libre ?

-Oui !

-Vous êtes Monsieur?

-Bouzian ( En prenant soin de retirer le E de la fin car sinon ça sonne outre-Méditerranée , Bouziane et c’est mort à l’avance, cherche même pas).

-Bouzian , Bouzian vous êtes belge Monsieur ?

-Oui

-Oui, mais êtes -vous Belge Belge ou Belge …?

-Oui, je crois , enfin je sais plus …

-Monsieur nous avons eu des problèmes avec des … Enfin vous comprenez.

– Ewa Sir 3and Mok , Kemcha d Khra Tfou 3lik A zebi (Va chez ta mère, sale vieille merde, je te crache dessus )

-Pardon ?

-Non, c’est rien Madame. Au revoir Din Dymek !

-… Au revoir Monsieur.

Y a pire que d’être cocu de sa femme, c’est qu’elle vous trompe avec un gaouri !

Tfouuuuu , avec leur bite en forme de trompe de fourmilier et leur odeur de jambon.

C’est mort bitch, un gaouri t’as touchée, tu resteras sale toute ta vie, Khlia Sel3a ! Wa daba 9awoud.(Marchandise de merde ! Maintenant dégage).

C’est tellement bon de lui mettre ça dans la tronche mais ça ne dure pas longtemps et ça évite aussi toutes les remises en questions.

Et au Maroc alors c’est pire.

A Tanger, ils t’ont foutu que des flics noirs, 3aziBalala qui ne savent pas terminer une phrase sans lâcher un Dinmouk .

« Déjà ici on dit DinDyimek et pas Dinmouk, Ya l3abid. ( esclave)

Ensuite se balader en uniforme avec un étui vide, c’est ringard Ya l’7mar.( Espèce d’âne)

Safi ils t’ont donné un costume et tu te sens plus, »pov type ».

Les marocains ont souvent un sérieux problème avec les noirs et les noirs marocains ont souvent un problème avec leur propre « négritude ».

Dites à un(e) noir(e) marocain(e) qu’il (elle) est noir(e) et vous entendrez des choses telles que, « moi non je suis pas noir, je suis juste bronzé(e) … » Un complexe qui mérite que des anthropologues s’y penchent.

« Redescends d’où tu viens bâtard, mais bien dans le sud genre Mali ou Sénégal ».

Et il y a les feujs (Juifs), alors eux ils décrochent le césar en titane !

Mais chuuut , moi je dois encore manger …

Raciste jusqu’au bout des doigts, peut-être même un peu plus que les autres.

Autant l’être bien avant de le subir, la pilule passe mieux.

Merde, le Maroc n’est pas qualifié pour le mondial au Brésil, tezzzz !

Mais l’Algérie y sera … Fuck !

La Belgique aussi !!

D’ailleurs la Belgique est dans le groupe de l’Algérie

Fuck, Fuck , Fuck !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Bordel, les choses sont toujours compliquées !

Je ne regarderai pas ce match de merde de toute façon.

Je vous emmerde tous au final.

Et là, je suis occupé à chier sur mon trône où c’est moi le boss.

Les pas comme moi je vous emmerde, comme aux échecs, j’anticipe c’est tout !

Le « racisé » veillera souvent à l’infliger à autrui.

Le raciste est souvent qu’un « ex-racisé » …

Mais alors qui de l’œuf ou de la poule a commencé ?

Qui a eu peur en premier…

Et entres-nous alors… ?

Entres-nous, c’est un peu moi contre toi mais toi et moi contre l’autre.

On a du racisme à revendre et il est plutôt bon marché, vu le paquet de frustrés qui nous entoure.

Vu qu’on justifie notre échec par la seule et unique présence de l’autre. Ça réconforte le temps d’une clope, le temps de trouver un autre coupable.

La chanson tourne en boucle :

« Ana Ga3 bnadem n bghi …. (Moi, j’aime tout le monde).

Ana man sit bLadi (Je n’oublie pas mon pays).

Ana man sit douari (Je n’oublie pas mon village).

Ana man sit 7iyati « (Je n’oublie pas ma vie).

Voilà ce qui nous rassemble vraiment.

La culture.

Sans culture, le racisme trouve un terreau fertile où il plonge ses racines, comme une crotte qui vous colle la semelle et qu’il est impossible de déloger.

Sans l’art et la culture, nous sommes voués à notre perte, c’est con dit comme ça, moi ça me paraît si évident.

Cet élément fédérateur qui de par sa force harmonise l’humain dans cette transe qu’il nous procure sans fin, pourrait être à lui seul une des définitions de la vie.

La culture devrait être logée au rang de pouvoir, car quiconque la maîtrise domine un pan considérable de la société.

« Donner leur de la culture de merde, cela vous évitera bien des ennuis ».

Enrichissez-vous de celle des autres car il n’y a d’humanité que dans le partage et dans l’apprentissage sur notre prochain. Nous demeurons l’égal de notre orgueil tant que nous ne pouvons le surpasser.

Voilà, chère identité, c’est une bien petite porte que j’ouvre aujourd’hui, il y en a beaucoup d’autres.

Continue à m’ harceler, je te promets de te parler plus souvent.

Hommage à tous les « racisés », ne devenez pas raciste. Armez-vous plutôt de culture authentique et contaminez-vous.

« Je viens de terminer de chier, j’ai tiré la chasse et j’ai fait un génocide de merde … Encore du racisme ! »

 » Certains passages du texte ne sont qu’humour de mauvais goût j’en conviens. »

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On ne parle pas de politique chez nous …

ob_0e43b39bc1352034674e3a13681f1378_roi-du-maroc« -Monseigneur est beau …

-Est-ce que vous pensez vraiment ce que vous dites.

-Bah, je flatte. » (La folie des grandeurs)

 

On ne parle pas de politique chez nous, enfin si on en parle mais on ne parle pas de la POLITIQUE.

Celle qui détient les rênes du pouvoir, celle vers qui tout abouti : Le palais et le makhzen.

Aujourd’hui je suis ce jeune militant, des étoiles pleins les yeux et des aspirations pour mon pays, nous sommes en 2011.

En sortant de chez moi pour me rendre à la manifestation, mon père le regard fier me glisse en m’embrassant : « Tu es devenu un homme A Wouldi »(Mon fils).

Je suis ce jeune militant, le cœur rivé vers Carthage qui se dit : « et pourquoi pas nous« .

Plein d’espoir et d’amour pour ce Maroc que j’aime, ce soir je vais mourir.

2 heures après le début de la manifestation, je suis conduit au commissariat.

Ils ont couru pour m’attraper et il a bien l’intention de me le faire payer le moustachu huileux au regard à la croisée de la haine et de la perversité.

Je suis roué de coups à terre et l’un d’eux m’éclate la tempe entrainant ma mort.

Nous sommes en 2011, je suis mort et je ne verrai jamais mes compatriotes marcher la tête haute.

Louange à Dieu, Louange à Monseigneur,

Monseigneur comme je suis mort je n’ai plus peur … Comme je suis mort je me donne le droit de vous parler.

Après cette séance de torture écourtée dans laquelle l’un de vos barbouzes assermentés m’a tué et n’aura malheureusement pas le luxe ni le loisir de souiller mon rectum, pas de mon vivant en tout cas.

Tout est devenu clair dans mon esprit, à vrai dire ça a même toujours été le cas.

Monseigneur, les sempiternels conformistes se succèdent vous blanchissant de tous soupçons quand à ce qui se passe à l’ombre des palmiers dans le plus beau pays du monde.

Leurs chants sont insipides et leurs argumentaires sont creux.

Monseigneur, si il y avait encore de la graisse à palper dans mon cerveau, j’aurai peut-être pu encore entendre ces chants avec lesquels vous êtes plébiscité à chacune de vos manifestations inutiles. Non, mon cerveau est à la diète de la connerie et est aussi svelte qu’un marathonien.

Le Makhzen et les vôtres ont bien compris qu’un peuple instruit est une menace.

Mais tandis qu’ils font semblant de rester ignorants, le peuple est en train de gagner la guerre.

Voyez-vous Monseigneur j’ai été nourri à l’amour et à la dignité.

A l’amour, celui de mes amis, ma famille et même celui de mes ennemis.

Voyez-vous Monseigneur, je ne suis plus de ce monde et je n’arrive toujours pas à vous aimer, pourtant on a beau avoir le cœur chargé de rancunes, il parvient toujours à humaniser celui qui nous offense.

« …Sur les images dorées

Sur les armes des guerriers

Sur la couronne des rois

J’écris ton nom»

Mon cœur aime la liberté, il n’a pas de place pour les courbettes et ces » succulents » baisers aux mains qui faussement vous dérangent.

Comme chez nous les murs ont greffés des yeux aux oreilles, ils viendront chercher tous ceux qui, comme moi refusent de dire OUI, ils enfermeront tous ceux qui préfèrent courir une journée parfaite sur la terre plutôt que de supporter la soumission.

Monseigneur qu’est-ce la liberté pour vous ?

Je suis mort aujourd’hui et ils l’annonceront probablement dans quelques jours à ma famille et vous Monseigneur, oui vous, dans un élan inattendu m’offrirez des obsèques car Monseigneur ne peut être mauvais, vous êtes notre roi sauveur. Pourtant même mort, je n’arrive pas à vous aimer.

Dans ce Maroc où les parvenus écrasent les déshérités

Dans ce Maroc où le foutre des pervers a plus de valeur que des revendications de justice sociale.

Dans ce Maroc où la féminité candide est trop souvent brusquée.

Dans ce Maroc où il vaut mieux être né sous le bon nom.

Dans ce Maroc où, vous Monseigneur utilisez la religion comme moyen de légitimer votre place dans ce simulacre d’état de droit.

Dans ce Maroc ankylosé par votre féodalité humiliante.

Vous avec le makhzen, cette entité obscure qui vous utilise comme symbole.

Monseigneur, ma mort vaut bien ce coup de gueule … ?

Vous m’avez tué ce soir et je prie le Seigneur pour qu’il ait pitié de vous car sauf votre respect, moi je n’y arrive plus.

Vous avez souillé tout ce que vous touchez et vous le savez et comme le machiavélisme est une sorte de label familial, vous avez vidé de toutes substances humaines l’art populaire, celui qui pousse à une certaine conscience, celui qui fait de nous des individus libres.

Monseigneur, qu’est-ce la liberté pour vous … ?

« Sur chaque bouffées d’aurore

Sur la mer sur les bateaux

Sur la montagne démente

J’écris ton nom »

Vous avez tout acheté même ce qui n’était pas à vendre et lorsque vous n’y parvenez pas alors votre visage apparait au grand jour. Il est vil, tortionnaire et lâche.

Grattez vos cols blancs et mettez de l’ordre dans vos rangs, » les soudoyés » impayés seront vos pires ennemis.

Makhzen ou monarchie je me fous de savoir qui est responsable, vous demeurez les responsables et les ennemis des libertaires qui sont morts, qui meurent et qui mourront. De leur sang versé sur la terre sacrée jailliront des effluves arc-en-ciel au nom de la liberté.

Je vous souhaite, Monseigneur, des insomnies à vous rendre fou et que la chair de votre chair vous regarde avec mépris, mépris avec lequel vous nous traités.

La justice triomphe toujours et vous le savez mais vous fuyez et cela vous essouffle.

Jusqu’au jour où votre pouls se fera moins harmonieux, moins régulier et que l’heure du rappel sonnera, regardez bien au-dessus de votre épaule je ne serai pas loin.

Vous voilà, Monseigneur …

Vous voyez Monseigneur comme ils se bouffent dès votre départ, regardez au fond de leur conscience vous n’y verrez que du dédain à votre égard.

En ce jour de deuil, seule votre mère vous pleure vraiment Monseigneur.

Votre mort fût douce comparée à la mienne.

Mais sachez qu’ici on ne triche pas Monseigneur, ici on n’achète pas.

Maintenant que nous sommes égaux et que je vous ai tout dit, je vous laisse Monseigneur, ils viennent vous chercher et n’ayez pas peur. Aujourd’hui vous êtes devenu un homme.

« Et par le pouvoir d’un mot

Je recommence ma vie

Je suis né pour te connaître

Pour te nommer

Liberté « 

Paul Eluard, Poésies et vérités, 1942

 

« La critique wakha mais faut pas déconner !

A sidi, encore une chose à vous dire :

J’ai ouvert les yeux dans un pays où s’exprimer n’est pas punissable et où le sens de la critique est perçu comme une forme d’intelligence. »

Mais ça, ça sera pour une autre fois.


Une goutte d’eau dans l’océan de l’ingratitude des hommes

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On croit toujours que c’est le premier amour, surtout adolescent. A chaque fois c’est comme la naissance d’une nation. Comme une virgule mal placée qui change le cour d’une phrase et qui vous ouvre les yeux sur la réelle puissance des mots, la réelle puissance de la vie.

– » On se connait ! »

-« Non ».

-« Maintenant si.  »

C’est d’un mauvais, mais d’un mauvais et pourtant elle répond.

Merci de tolérer les heures qui viennent où je vais déblatérer inepties sur conneries, mais promis je le ferai avec humour.

Elle est belle, pleine de féminité et chacun de ses sourires est une nouvelle victoire.

On commence par les traditionnelles questions :

Première question : « Tu es marocain ? »

Deuxième question : « Tu es né ici … ? 🙂 ». Classique de chez classique.

Par l’affirmative à deux reprises, nous entamons donc cette parade qui nous plonge le temps qui nous est accordé dans la dimension planète love ou même la cheminée de la déchetterie de Bruxelles a un certain charme.

Il fait beau cet hiver, j’ai 18 ans et je crois que je vais découvrir l’amour.

Au bout de 15 minutes, je veux être son essentiel, sa moitié, son tout.

Elle adore rire, du coup je la fais rire comme pour nous évader.

Comment ai-je fait pour vivre sans elle ?

Notre discussion pouvait débuter :

« -Tu pries ? »

« -Non. »

« Moi, mon mari sera un bon musulman. »

« -????? »

-Euh je te le souhaite.

-C’est quoi un bon musulman?

-C’est quelqu’un de bien, qui craint Dieu, qui prie et qui a la foi …

2 jours après c’était fini.

-« Tezzzz ».

Pas assez musulman peut-être mais surtout pas de voiture pour la faire vraiment rêver.

Elle finira par se marier avec un belge qui a du se convertir et s’est fait circoncire à 26 ans. Au moins il y a une justice …

Malgré cette circoncision post-maturée, sa famille à elle, ne l’acceptera jamais.

Alors pourquoi en arriver à cette négation de soi ?

Pourquoi imposer à l’autre ce que nous refuserons qu’il nous impose !

Qui a raison, qui veut avoir raison, qui croit avoir raison ?!

« Critiquer n’est pas condamner, c’est comprendre la réaction qu’adopte l’autre là où vous auriez réagi autrement. »

Moi je la veux marocaine, Kholota qui se lache (Kholoto ou Kholota est le terme attribué aux belges d’origine marocaine à l’instar des beurs en France). Qui trouve le bon milieu, l’alchimie parfaite entre terroir culturel, humanisme, ouverture d’esprit et grâce sensuelle. Qui les manie avec classe et fierté comme une danseuse de flamenco.

Je veux qu’elle soit parfaite sans se soucier si moi je le suis. « Clairement macho ».

Mais il y a cette part de machisme justement dosé avec lesquelles composent les méditerranéennes. Une sorte de pacte tacite entre la femme et l’homme qui trouve ses limites dans un cadre fixé par ces Dames et heureusement. Conscientes qu’à l’abri de tous, elles tolèrent maternellement que nous leur versions le soir, dans leur robe, des larmes d’enfant roi.

Nous restons des enfants en qui elles croient.

Elles font de nous des hommes et parfois au détriment de leur propre féminité.

Femmes, nous savons qui vous êtes et c’est aussi pour ça que nous vous aimons.

Et ici c’est pareil, c’est juste qu’on est trop à l’étroit. On a besoin d’air, de sortir le ghetto de notre cerveau. Et c’est souvent une femme qui nous donne la force et le courage de le faire.

Et puis il y a elle …

Elle est joliment marocaine, les yeux clairs, des petites taches de rousseur, un teint naturellement ensoleillé. Une douceur dans ses mots, un regard envoutant.

Elle sait qui je suis, comment et pourquoi.

Patiente, à chaque fois au coin de la rue c’est elle qui me regarde, je la regarde une seconde.

« Waw… »

Je suis trop timide pour faire le premier pas, trop con aussi.

Les mecs du quartier sont insensibles à cette suavité, mais moi je sais.

Des fois je la croisais devant la porte, raclette à la main le pantalon légèrement remonté, je la regardais nettoyer et c’est beau. C’est elle !

Voir une femme qui nettoie, ça plait à beaucoup d’hommes, c’est universel, voir une femme qui nettoie toutes connotations machistes à part, c’est un foyer rassurant, voir une femme qui nettoie ça me replonge encore dans ce statut d’enfant.

Je la trouvais belle au naturel et elle le savait.

« Pourquoi tu ne viens pas me parler » me dit-elle ?

Et là, le con dans toute sa splendeur lui répond :

« Qu’es ce que t’as … j’ai rien à te dire ».

Voilà ce que l’adolescent post-pubère a répondu face à celle qui le rendait dingue depuis des années.

Le con … Depuis, je recherche celle qui comme elle me fera swinguer les intestins.

Car j’aime cette féminité, au parfum de fleur d’oranger, au sourire radieux d’un doux matin.

Je veux que chez moi, ça sente le cumin et la coriandre et que ce sourire ne quitte jamais cette bouche.

Ma vie est bourrée de fautes d’orthographe, il me faut un correcteur, je veux que ce soit elle.

J’admire cette dignité avec laquelle ces femmes se battent au quotidien.

Messieurs les branleurs nous sommes des lâches qui s’ignorent et elles ont la décence d’éviter de nous le rappeler, elles ont la décence de nous aimer, elles ont la décence de nous élever.

Renaud disait dans Miss Maggie : « … ce n’est pas d’un cerveau féminin qu’est sorti la bombe atomique et pas une femme n’a sur les mains le sang des indiens d’Amérique… »

Le monde a besoin des femmes et chez nous peut-être plus encore.

Considérez ce papier comme une ode pour la femme et particulièrement pour la femme marocaine, en évitant de me vautrer dans « le misérabilisme victimaire » d’une femme marocaine constamment oppressée entre le poids de la société et du patriarcat, ça je le laisse pour Envoyé Spécial.

Et en lisant déjà certaines qui me diront, « mais moi je suis épanouie et libérée et articule aisément tradition et modernité dans ce Maroc en mutation » … Pffffffffffff !

Je parle de celles qui souffrent la tête haute dans l’indifférence totale.

Je parle de ces femmes mulets qui transportent à la sueur de leur front des paquets qui dépassent souvent leur propre taille du côté de Sebta.

Je parle de ces filles condamnées à épouser leur violeur. Une normalité déconcertante qui a poussé plus d’une à se donner la mort.

Je parle de l’injustice d’un système qui légifère sur base de préceptes religieux inégaux.

Moudawana mon cul ! La moudawana c’est comme une couverture mutuelle multi-risques, il n’y a que celles qui peuvent se la payer qui en bénéficient.

Je parle d’un poids qui écrase, qui froisse toutes expressions de féminité en l’accusant d’être l’œuvre du malin.

Je parle de ces femmes qui sont bonnes de mère en fille et qui restent des spectatrices du bonheur des autres.

Je ne supporte pas l’exploitation de l’homme par l’homme et encore moins de l’homme sur la femme.

Je veux dire mon profond respect aux prostituées, catins, putes, 9hab (pute en dialecte marocain), qui servent de soupapes dans des sociétés ou la frustration sexuelle est mère de tous les vices. Qui nous connaissent, nous les hommes, nous vendant leurs corps et plus encore.Leur humanisme, c’est un diamant brute.

Pardonne l’homme qui devient fou, il scie le matelas sur lequel il couche, se tire une balle plutôt que de prendre son pied. Il se cache à chaque montée d’émotion et se sent profondément seul dans sa carcasse.

Pardonnez ces fous de l’obscure, qui déshumanisent les Livres accusant le cuir chevelu, une poitrine ou un bout de cheville, d’invitation à la débauche.Cela ne peut-être obscène que dans les yeux d’un pervers.

Pardonnez-nous, ils ne savent pas ce qu’ils font.

Je reviens sur cette beauté, cette amazone des bas quartiers au coin de ma rue.

Elle aurait fait de moi un homme et elle aussi détriment de sa féminité, je le sais. Quand on aime dans le sud, on aime avec ses tripes, c’est puissant, ça peut faire mal.

Pourtant je ne lui ai plus jamais parlé, je me suis contenté de la regarder grandir.

Jusqu’au jour où j’ai assisté à son mariage du haut de mon balcon …

Elle a l’air heureuse et le con que je suis lui en veut.

Ce papier est une goutte d’eau dans l’océan de l’ingratitude des hommes.

 

 

« -Monseigneur est beau …

-Est-ce que vous pensez vraiment ce que vous dites.

-Bah, je flatte. »

Mais ça, ça sera pour une autre fois.


Partout où brille le soleil d’Allah (2ème partie et fin).

ob_c44a7c_pid-870354-61650a64-415e-11e3-89b1-6f224fddecf1-wViolente douleur stomacale liée au stress, j’ai passé les 3 heures de vol recroquevillé sur moi-même à me replonger dans des souvenirs, ceux que j’ai partagés avec mon frère.

Et comme nous volions vers le Maroc, je me remémorais toutes les anecdotes cocasses de voyages.

Le bled, il en avait été plus au moins dégouté depuis l’histoire du fameux mariage arrangé avec ma cousine Salima.

Une combine tractée entres les parents, qui d’une part voulaient sortir la fille de la misère offrant un nouveau pont entre là-bas et ici et d’autre part stabiliser Saïd qui découvrait les débuts de l’excitation de son métabolisme cérébral.

Un mariage qui se solda par la plus grande crise que notre famille connut.

L’avion est plein, il fait chaud je regarde à travers le hublot et je vois Saïd …

« J’ai fait le con frangin, … Je vous aime »

Reviens …

Ma mère et mon père sont assis devant moi.

Moi je suis assis à côté de mon grand-frère Mohamed.

« Mohamed … ? »

« Hum … »

« Non, rien »

« Dis-moi »

« Rien, Mohamed, je vais dormir »

« Ok, mets ta tête sur mes épaules et dors, on a une longue journée »

Ce que je voulais lui dire, c’est qu’il arrête la drogue ! Je voulais lui dire que ce n’est pas bien, je voulais le prendre dans mes bras et lui dire : « Tu vois ce que ça fait ! »

Mais rien du tout, je me suis enfoncé dans mon siège et je l’ai regardé.

Mohamed à mon père :

« Ba wach 3ami Abslam ghadi 7dar l’ Gnezza ?» (Papa, est ce que l’oncle Abslam sera présent aux funérailles ?)

Mon oncle Abslam était « Cheikh », l’équivalent d’un genre bourgmestre, et comme tous les représentants du pouvoir au Maroc, c’était un voleur et mon père le haïssait.

Mon père :

« Sma3ni mezziane, ma Khsna sda3 , ndefno Khak bi salam ou bla Sda3 , Wach fhemti awla la ??? »

(Ecoute, je ne veux pas de boucan, nous enterrons ton frère dans la paix et sans boucan. M’as-tu compris ??)

« … »

« Wach fhemtini !!!!! » (Est-ce que tu m’as bien compris !!!!!)

« Wakha Ba , bla ma t 3asseb » (Oui papa, ne t’énerve pas )

L’oncle Abslam, ce bâtard a juste dépouillé mon père, avec l’aval des autorités.

La parcelle de la terre de mon père avait déjà été vendue 2 fois et par une entourloupe makhzénienne, notre maison , cet « illustre représentant » l’a tout simplement volée, en tronquant les papiers de manière éhontée.

Mohamed :

« Fils de pute … le fils de pute ! »

Ma sœur Kenza :

« Ewa safi Mohamed »

« Chouff » me parle pas toi, si je vois sa gueule ou ses gosses … Je l’encule ce fils de pute ou « n’lssa9 Din Dyemeh fil 7ayt » !!! ( et je vais coller sa mère contre un mur !)

Mohamed est très très nerveux

Ça y est, atterrissage …

3 h plus tard, la famille s’est réunie dans la maison de ma grand-mère à Melloussa près de Tétouan.

Il y avait la famille sincère, la famille hypocrite et la famille « Viens là que je te gratte tout ce que je peux ».

Il y avait des cousins, des cousines, des amis d’amis. Des visages jusqu’ici encore jamais vus.

Le corps est arrivé à la maison.

On s’apprête à lui faire la toilette mortuaire avec mon père, mon frère et l’oncle Mohamed.

L’oncle Mohamed représentait à mes yeux le Maroc dans toute sa marocanité.

Un homme juste, dignement pieux qui avait une noble qualité, celle de vous sortir des phrases qui vous travaillent l’esprit des années durant.

Un homme qui marchait la tête haute, le regard vif du sage, qui du haut de son âge était d’une humilité déroutante.

Il fumait le Sebssi (une sorte de pipe à kif) et adorait la nature. Un marocain comme seul le Maroc pouvait fabriquer.

Il appartenait à la confrérie des Aissawa et m’emmenait, alors gamin, dans leur soirée de transe infatiguable au son de la Raïta du Tbal et du Bendir (Trompettes et tambours typiques du Maghreb).

Mon père l’adorait et moi aussi.

La toilette mortuaire est un moment que j’ai appréhendé mais qu’il n’aurait fallu que je ne rate à aucun prix.

Une tradition belle, d’union, de fraternité et d’égalité.

Nous étions 4, à lui donner de l’amour par ce geste profond et si authentique.

C’était beau, fort et intense. Et dans son linceul blanc, Saïd est beau.

La maison est encerclée, le cortège funèbre va bientôt démarrer.

Et c’est à ce moment précis que je me suis fait cette réflexion :

« Mais pourquoi va-t-on l’enterrer ici … ? »

Pourquoi, putain de merde on va l’enterrer ici ! »

Autour de moi je ne connais personne ou si peu.

Où sont les meilleurs potes de Saïd, il est ou Diégo « portugais » qui jouait de la basse dans un groupe près de place Annessens ? Ses potes du mini-foot, sa copine Nathalie, qu’on a laissée en pleur à Bruxelles sans réponses, sans explications.

Où sont-ils bordel ?

Vous êtes qui vous ?? Pourquoi vous chialez, vous ne le connaissiez même pas.

J’ai besoin de me retrouver, Mohamed tu es où ??

Il porte le cercueil avec des cousins, il pleure de rage et de colère.

« Kenza , Nabila ? »

Elles sont au fond du cortège funèbre car, selon la « tradition », les femmes ne peuvent pas entrer dans le cimetière lors de la mise en terre !

« C’est quoi ce bordel ! »

Et là, j’ai pété un plomb, je ne contrôlais plus rien.

« Saïd !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! ».

« Putain Saïd !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! ».

« Lâche- moi toi, me touche pas ou je t’éclate ! ».

Je me suis rué vers le cercueil comme pour le sentir une dernière fois, je l’ai serré si fort en hurlant son nom.

Des personnes ont tenté de me faire lâcher prise.

Certains demandaient à mon grand-frère de me calmer, il ne les écoutait pas, il m’a laissé vivre à ma manière, il m’a laissé lui dire adieu et menaçait quiconque qui tenterait de me faire écarter de mon frère.

Je lâche le cercueil, je les laisse, en sortant du cimetière je vois l’attroupement de femmes en marge de la cérémonie funèbre.

Je me retourne et redescends vers la maison.

Je vomis, je rentre, monte sur le toit, on entend encore d’ici les récitations coraniques funèbres.

Je me couche sur le sol encore chaud.

Et je me laisse aller avec cette question qui commence à m’obséder. Pourquoi l’a-t-on enterré ici !

C’est à mes parents qu’il aurait fallu poser cette question. Je ne voulais pas le faire, je n’osais pas le faire.

Mes sœurs en parlèrent avec ma mère et comme d’habitude, ses réponses furent :

« Il faut le faire, c’est comme ça, c’est Hallal, c’est un sol pur pour les musulmans, c’est le sol de nos ancêtres … ».

Par contre, mon père aurait pu accepter qu’il soit enterré en Belgique. Il s’était armé d’un laïus qui clouait le bec à tous.

Du genre : « Partout où brille le soleil d’Allah, tu reposeras en paix ».

Balaise mon père, « cet artiste qui s’ignore » !

De retour sur ce toit, il fait très chaud et le vent souffle, comme pour soulager, il souffle comme pour effacer.

« Je veux faire de l’économie au gaspillage et que mon passage sur terre SOIT !

J’ai envie de vie, de vie autour de moi.

J’ai envie de déshabiller nos coquilles, je veux du vrai, de » l’authentiquement » vrai.

Je veux de l’amertume utile, qui grandit celui qui la goute.

Je veux être parmi les présents.

Je veux organiser une cabale contre le défaitisme et signer un contrat sur le pessimisme.

Je refuse d’être victime et « ne mourrais pas en gibier … »

Je veux que mes ennemis m’aiment.

Je veux que la drogue m’aime comme Saïd l’a aimée. Je veux qu’elle m’aime en me préservant d’elle et qu’elle préserve ceux que j’aime… qu’elle se shoote la gueule et qu’elle crève cette pute !

Je veux du soleil dans les vêtements.

Je veux que le passé se charge de mon futur.

Je veux rentrer chez moi, et je veux ramener le corps de Saïd avec ! »

 

«- Salut, on se connait ?

– Non

-Maintenant si … »

Mais ça, ça sera pour une autre fois ! »


Blondin, qu’est ce que tu as fait …(1ère partie)

 

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Moulana N’ss3a w Ridda9 , Wa3la Bab Wa9ifine …

… Ya Ar7ame Ra7imine … (chant funèbre marocain)

Ce mardi 29 juin à 11h, Saïd mon frère est mort d’une overdose d’héroïne seul dans sa chambre.

Ce mardi 29 juin marqua un tournant décisif, ma vie sera peut-être merdique, mais elle sera sainement merdique.

Tout commença par un cri jusqu’ici encore jamais entendu, celui de ma mère qui s’arrachait les cheveux en descendant les escaliers .Puis mes sœurs et mon père et nous voilà, à 6 autour de ce corps encore tiède, regard crispé qui fixait le plafond.

Ma mère entonnait une sorte de chant funèbre, ou les paroles semblaient improvisées sur le moment et ponctuait chaque couplets par des :

« Ya wlidi , Wa Wlidi, wa Wlidi » (Mon fils , mon fils …)

Mon père répétait sans cesse :

« Inalillah wa ina ilayhi raji3oune » (A Dieu nous sommes et à Dieu nous revenons) qu’il accompagnait de versets coraniques.

Mes sœurs en pleurs, moi pétrifié et mon tout grand frère (Mohamed) coucher au sol, à côté du corps de Saïd, le serrant contre lui et lui disant dans le creux de l’oreille :

« Mais qu’es ce que t’as fait blondin, mais qu’es ce que t’as fait Saïd … » (blondin était le surnom de Saïd car il était le plus clair d’entre-nous, ses cheveux devenait blond au soleil. « Blondin » c’était aussi le nom de le Clint Eastwood dans le bon la brute et le truand, mes frères étaient de vrais fans de ce film).

Je ne sais pas combien de temps cela a durer, je ne sais pas à quelle heure exactement les premiers voisins arrivèrent pour les condoléances, je ne sais pas à quelle heure ni qui de Kenza ou Nabila (mes deux sœurs) ont prévenu l’ambulance.

Je sais que mon frère est mort, et que nous sommes tous les six réunis autour de sa dépouille le pleurant à cœur ouvert.

Ma sœur Kenza me prend dans ses bras, je me serre contre elle, mais je suis incapable d’expulser le moindre mot.

Mon père nous regarde, avec ce regard qui ne le quittera plus jamais, celui d’un homme sur le point d’enterrer son fils.

Ce mardi 29 juin mon frère est mort et je ne sais rien dire, ni rien faire …

Je m’approche du corps avec une émotion qui me noue la gorge, me glace le sang. Mon père me tient l’épaule, on s’abaisse à deux …

« Saïd … Saïd … Saïd, qu’es ce que t’as fait ? » lui dis-je.

Je fixe son visage et le temps semble s’être arrêté. Je crie au fond de moi-même, je crie de rage et de colère, j’en veux à tout le monde !

Je lui en veux, j’en veux à mon père avec lequel ses relations étaient au point mort, j’en veux à mon frère de l’avoir laissé seul, je m’en veux de ne pas être passé dans sa chambre, je nous en veux à tous et pour la première fois j’en veux à Dieu en lui exprimant ma colère face à ce rappel prématuré !

On sonne à la porte, des femmes en blanc pleurent, la nouvelle s’est répandue très vite.

La cuisine est prise en main par les mères du voisinage.

Ma mère fait syncope sur syncope et est entourée par mes 2 sœurs, mon frère et mon père ont disparu.

Moi je suis seul, entouré mais seul, mes amis du quartier, les Suarez, les algériens, toute la rue est là puis arrivent, les tantes et oncles, les cousins et cousines.

J’ai froid, pourtant il fait chaud, j’ai soif non faim, en fait je veux dormir.

A partir de là je ne me souviens plus.

Quelques heures plus tard mon père et mon frère débarquent à la maison le visage froid, le visage de l’insensible trop préoccupés pour se laisser submerger par l’émotion.

Ils viennent de régler l’administratif, on décolle dans 2 jours pour rapatrier le corps à Tanger.

Le soir, nous nous rendons tous à la Mosquée, je prie mais je suis toujours en colère contre Dieu et dans ma prière, je Lui parle et après ma prière je Lui parle encore et encore mais rien n’y fait,Il n’arrive pas à me consoler.

Passant de la colère à la tristesse de l’incompréhension à un fatalisme relatif, je suis épuisé, excusez-moi je dois dormir.

Le lendemain matin au réveil, durant 1 seconde qui m’a paru une éternité, je croyais ferme que tout ça n’était qu’un mauvais rêve … Puis, réalisant que c’est bien vrai, c’est un nouveau choc qui vous revient en pleine tronche.

Je ne souhaite qu’une seule chose, c’est me rendormir, pour fuir à plus tard.

Je me réveille et descends, la maison est pleine des tantes, des oncles des amis pleurent, m’embrassent, je file à la cuisine, les femmes n’ont pas dormi. Elles ont cuisiné toute la nuit avec ma mère.

La période funèbre chez nous s’étale sur 40 jours, durant lesquels les gens viennent adresser leurs condoléances .Même dans cette tragique événement, ma mère voulait faire et faire encore plus, pour ne pas qu’on dise ceci ou cela.

Il faut c’est comme ça, il faut faire car la maison ne désemplit pas.

Les « 9alb Sukar » (Sucre en gros morceaux), les bottes de menthe et autres condiments que l’on apporte traditionnellement à ces tristes occasions remplissent le couloir d’entrée.

Je dois voir mon père, ou est-il ?

Le voilà, devant la porte.

« A Ba yalla n’tmechaw chwiya » (Papa, viens faire un petit tour)

« Wakha,Yalla Wouldi » (D’accord, allons-y mon fils)

On se mit à marcher dans un silence « particulièrement bavard »… Durant cette marche pas un mot, pas un seul, ne sortis de nos bouches. On marchait, il fait chaud , je n’osais pas le regarder. On marchait et on se parlait la bouche fermée.

J’en ai eu la certitude, lorsque de retour à la maison, il ouvrit la porte me regarda dans les yeux et eut ce léger sourire. Je compris que l’on s’était compris, ce fut la discussion la plus intense de ma vie.

Qu’est ce qu’on s’est dit…? Beaucoup, beaucoup de choses …

Tout ce que je peux vous dire, c’est que ce jour-là j’ai ressenti l’essence de la sensibilité de mon père.

« Mon père cet artiste. »

Ma mère était trop prise par les lourdes taches « qu’elle s’auto-infligeait. »

« Yema … »(Maman)

« A wouldi … Fik Jou3 »(Oui , mon fils… tu as faim)

“La a yema” (Non maman)

“ Mchi t’rte7 chtito , ghada …( Va te reposer demain nous …)

« La a yema chouffi fiya » (Non maman regarde- moi)

« khalini fi had se3a, a wouldi » (laisse-moi pour le moment, mon fils)

Hermétique ou trop à fleur de peau, je ne voulais pas fuir ce que je considérais comme être essentiel, voir vital pour entamer notre deuil familial. Je voulais donner et recevoir des marques d’amour.

Ma sœur Kenza, assista du coin de l’œil à cet échange avec ma mère, elle s’approcha de moi avec l’assurance de celle qui a tout saisi et qui me sentais un peu perdu avec ma propre mère. Elle me prit moi et ma mère dans ses bras .Ma mère s’effondra sans pleurer dans nos bras, elle rendait les armes, lâchait prise … Ma grande sœur Nabila nous rejoint. Que ça fait du bien !

Nous étions à quatre et nous entamions notre deuil :

« Allah y Ghatikoum Bel Rda, ya wouladi » (que Dieu vous bénisse mes enfants)

“Ou ntina, ila chouftek kat 7adi had l’moussiba ….!!” (Et toi (en s’adressant à moi) si je te vois toucher à cette saloperie….)

“Safi yema, safi yema” (C’est bon maman (ne t’inquiète pas))

C’est là qu’avec certitude, je puis vous assurer que mes parents comprenaient parfaitement, que mon frère décédé se droguait et que c’est l’overdose d’héroïne qui a eu raison de lui.

Pour les gens du voisinage qui le savaient pertinemment par contre, mon frère est mort d’une crise cardiaque … C’était comme ça, il y a des choses que tout le monde sait mais feint d’ignorer…

Pourquoi, cette overdose ?

Pourquoi ce mal-être ?

Pourquoi la drogue ?

Quelques années plus tard je me suis construit une explication.

Ça n’est pas l’explication, c’est simplement mon explication que je vous livrerai dans un prochain papier.

Il est tard, je monte dans ma chambre, je m’adresse encore une fois à Dieu en lui disant que là ou il avait failli mon père,ma mère, mes sœurs et mon frère avaient réussi.

Notre deuil familial pouvait se faire, mais pour moi ça sera sans lui.

Je m’endors, car demain on part tôt au Maroc pour le dernier voyage de Saïd.

 

« marhbabikoum fi matar Tanger Boukhalef »

(Bienvenue à l’aéroport Tanger Boukhalef)

Fin 1ère partie


Laissez-moi seul …

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-« Qui a fait ça !!! »

-« C’est pas moi Madame ! »

-« Tu mens, tu mens Stéphanie et Pierre ont dit que c’est toi ! »

-« Dans ma tête, en mon moi profond, « Et wa Mchi T’Khraa 7ta Ntina ! » (Va à la merde toi aussi!). »

J’ai 12 ans, « sur dopé » par cette énergie juvénile à profusion qu’il m’est impossible d’évacuer complètement tant elle foisonne. Jusqu’au jour, ou elle finit par exploser dans mon slip !

Ça y est je suis homme !

Depuis cette extraordinaire éruption, je savoure la solitude, je me délecte de l’isolement bien à l’abri du regard de tous, à jouer avec mon meilleur ami du moment.

Je commence à mesurer La mission qui nous incombe sur cette terre et me surprends à regarder mes voisines avec la tendresse du « male » en devenir.

C’est dans cette période merveilleuse sur le plan émotionnel que mon réel premier rendez-vous avec la connerie humaine a eu lieu.

On est en classe, en 1ère secondaire tout excité de quitter la cours des petits ou nous étions Grands et de rejoindre celle des grands ou l’on se sent moins petit.

Le matin, j’imbibais mes vêtements avec l’after Shave de mon père, qui s’en rendait bien compte et qui faisait exprès d’en parler à ma mère en ma présence.

Mais ma mère, c’est mon bouclier humain, mon « Ban Ki-Moon » à moi. Dès que mon père voulait me donner la raclée, qui était souvent bien mérité, elle s’interposait avec grâce et subtilité comme une résolution onusienne, que mon père, lui au moins, mettait un point d’honneur à respecter.

C’était d’ailleurs, dans ces rares moments que l’on pouvait apercevoir un geste de tendresse entre-eux. Une main sur le front de mon père ou sur son épaule :

« Et wa safi fhem rasso … Fik Jou3… ? » (Calme toi, il a compris … As-tu faim ?)

Et ça marchait toujours, doublé du fait que j’étais le dernier de la famille, chouchou de mes sœurs qui me couvaient anormalement.

Je dis ça car elles en avaient chié avec mes deux grands-frères et j’aurai attendu logiquement de leur part, une attitude plus revancharde sur la junte masculine, à mon égard, que du contraire !

Mes frères avec moi, c’était selon l’humeur. Il y avait une faible différence d’âge entre- eux et ils étaient inséparables et redoutables.

Il ’y a pire qu’un homme qui n’a pas peur de mourir, c’est 2 frères qui n’ont plus peur de mourir.

Enroules, bagarres, prison. Ils ont marqué au fer le quartier avec notre nom de famille.

Trop instables pour tomber dans le grands banditisme, et trop humain pour devenir criminel.

Ils excellaient dans « La petite frapperie ».

Ils voulaient faire de moi un homme avant l’âge mais ça c’est une autre histoire !

Chaque matin donc, je partais toujours plus tôt de chez moi pour l’école et au coin de la rue, je rejoignais Manu (Manuel) «l’ Espagnolito » que je connaissais depuis les bacs à sable et avec lequel nos 2 familles s’étaient tissés de liens profonds.

Ma mère et la sienne bossaient dans la même société de nettoyage, son père et le mien prenaient souvent le thé au café « Andalous » du quartier, une sorte de café marocain à l’ambiance andalouse dans lequel on pouvait si l’on penchait l’oreille, savourer le parler typiquement « Chamali » (du nord du Maroc) emprunt de darija, de berbère et d’espagnol.

Et ses frères se défonçaient la gueule avec les miens, dans la cour intérieure à l’entrée de la casa des Suarez.

La famille quoi …

A cinq (mes deux frères et les 3 grands frères Suarez),ils avaient déjà extorqué tous les dealers du croissant pauvre à Bruxelles.

(Le croissant pauvre est cette appellation donnée aux communes bruxelloises qui forment un croissant sur la carte de Bruxelles : Ces communes sont : Molenbeek-Saint-Jean, Saint-Gilles, Schaerbeek, Saint-Josse Ten-noode, Anderlecht).

Marrant comme appellation … Non ?

Ces communes abritent les quartiers populaires et je vous le donne en 1000, nous vivions dans l’une d’elles.

L’histoire de l’immigration espagnole bruxelloise à croisé l’histoire l’immigration marocaine. Des liens logiques de par le passé colonial de l’Espagne au Maroc d’abord, puis de par son implantation géographique dans la capitale belge. Croisé, oui mais dont l’évolution prendra un parcours différent du nôtre.

Les andalous, c’était un peu des marocains d’Europe, les habitants du nord marocain des espagnols d’Afrique …

Ils étaient forts présents et actifs dans mon quartier et tenaient un centre culturel, qui servait aussi par la même occasion de façade pour écouler la came.

Organisés en véritables corporations de corps de métiers (Plomberie, Chauffagerie, électricité …) et majoritairement imprégnés par cette conscience politique des « ROJO », les rouges, les communistes quoi.

Le pays sortait du régime fasciste emmené par « le Caudillo de España por la Gracia de Dios ! » (Le guide de l’Espagne par la grâce de Dieu, lisez le Générale Franco) et l’Espagne commençait à parler, à lever la tête, commençait à vivre …

Revenons à mon meilleur ami du moment, avec qui je passais des heures et des heures planqué avec un magazine de lingerie ! Il me fallait si peu pour être heureux.

Des moments d’évasion idyllique accompagnés de petites morts qui durent le temps d’un couple inspiration/expiration.

Les femmes m’obsédaient. Ce que mon ainé d’une dizaine d’année, Saïd, a très vite compris et interprétait justement mes disparations intermittentes.

« Et wa Khalé Zenéta t’Rte7 Chtito … A l’3afrit ! Rak Mbl’i Fi l’Pakha Awla ? »

(Laisse ta queue se reposer un peu petit 3afrit, t’es obsédé par la branlette ou quoi ! (3afrit intraduisible 🙂 ).

Il me disait, que pour ce qui était des femmes :

« Ne t’inquiète pas elles baisent toutes et au plus elles te diront qu’elles ne couchent pas au plus tu peux te dire c’est une « 3afrita! » ».

Moi, je ne pouvais me référer qu’ à ce qu’il disait, on a tous chercher après son coach sexuel à cet âge-là , le mien c’est Saïd et c’était mon grand-frère …

-« Qui a fait ça !!! »

-« C’est pas moi Madame ! »

-« Tu mens, tu mens Stéphanie et Pierre ont dit que c’est toi ! »

-« Dans ma tête, en mon moi profond, « Et wa Mchi T’Khraa 7ta Ntina ! » (Va à la merde toi aussi!). »

Un vol de plumier en classe et ça y est, les têtes de turc c’étaient moi ou Jamel ou Bilal.

Lorsqu’on est gamin on ne comprend pas vraiment le racisme, mais on sent que ce qui est en train de se passer est anormal, on se sent diminué, vulnérable, impuissant et ça vous marque à vie !!!

« C’est pas moi, Madame je vous ai dit que je n’étais même pas là »

« Toute la classe sera privée de récréation tant que parmi ces 3 coupables il n’y en a pas un qui veuille bien se dénoncer ».

Personne ne bouge et je savais que c’était ni moi ni Bilal ni Hicham.

-« c’est pas nous, Madame !!! »

Mais quand la classe se transforme en espace de non Droit ou 20 élèves et une psychorigide qui détient l’unique vérité vous fixent, vous êtes seuls même à 3 et prêts à vous dénoncer malgré votre innocence.

« C’est moi Madame ! »

Manuel s’avança, le beau plumier en main et le déposa sur le bureau.

« Es-tu sur que personne ne t’a obligé à faire ça Manuel »

« Non, Madame »

« Mais pourquoi l’as-tu fait alors ? »

« Je ne sais pas »

Manu, nous regarda l’air désolé avec ce regard de compassion du fils de l’immigré qui sait …

Sur le chemin du retour, on parla peu mais je retiens cette phrase :

« Tu sais, si ce n’était pas vous qui aviez été accusés, jamais je me serai donné, Ombré ! »

Mon pote Manu !

Je le regardais rentrer chez lui, et priait pour que la raclée du père Suarez soit courte et pas trop dure tout en sachant que sa mère aussi était son « Ban Ki-Moon » !

Pressé de rentrer chez moi, pour un interlude en solitaire avec mon phallus.

J’arrive dans ma rue, ma mère à la fenêtre m’attendait, elle me jeta une chaussette avec une pièce de 10 Fb (Franc Belge).

« Jib l’Coumerra ou Fel Fel 7mar » (Apporte une baguette et du poivron rouge)

Ceci ne fera que retarder mon passe-temps favori du moment.

Boulangerie et vite l’épicerie, en rentrant à la maison, mon père devant la télé :

-« Chaa3b Al Aziz » ( Peuple bien aimé).

-« Tfou 3lik a L’9ard, Allah y 3tek L’9té3a » (Je te crache dessus espèce de singe, que Dieu te donne le silence éternel).

Ma mère dans la cuisine avec mes sœurs préparent à manger.

Mes frères dans leurs chambres et leur ambiance … « Stupéfiante ».

Tout va bien, tout va pour le mieux, je m’en vais prendre une longue, une très longue douche car me voici « mon ami » !

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“Moulana Nss3aw Redda9, Wa3la el ‘ Bab Wa9ifine Ya A R7am Ra7imine “ (Chant funèbre marocain)

Mais ça, ça sera pour une autre fois.


Et si on essayait la gentillesse ?

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T’es marocain , dit-il…? (d’un air condescendant).

Je t’emmerde A l Khraa (Espèce de merde).

Ce matin, je m’en souviens comme si c’était hier, une de ces matinées suffocantes d’un mois de juillet à Tanger.Le Charki (Le mistral local) avait du faire la bringue la vieille et du coup avait du mal à se lever.Comme il faisait super chaud, ma mère à eu la « riche idée » de cuir des « Chfenjj »(Beignet marocain).

Moi, je me préparais pour une sortie plage avec mes potes de Bruxelles, virée à « Playa Blanca » avec ma chicha et ma chechiya !

A Tanger, même le quartier de Bruxelles prenait les vacances au même endroit.

(Bruxelles étant composé de beaucoup de belges d’origine marocaine de cette région du Maroc)

Tanger c’est un peu comme l’excroissance d’une commune bruxelloise, du coup tu te tapes plus de 2500 km pour retrouver les mêmes Salamou3aleikoum Fayen A l’Aise ou quoi ! ( Seul les belges peuvent comprendre).

Au bled, c’est très simple les français restent entres-eux, les belges entres-eux pareils, les hollandais entres-eux pareils… etc

Et tous ce beau monde venu du nord faisait front face aux locaux …

-T’es marocain, dit-il… ? (D’un air condescendant).

-Je t’emmerde A l Khraaa (Espèce de merde)

Voilà comment s’est clôturé ma dernière discussion avec un marocain de là-bas, un bledard comme on les surnomme ici.

Cet usage du langage impropre et outrancier je le pratique lorsque la coupe est pleine et que je n’ai pas l’énergie suffisante pour m’investir dans une discussion sereine !

-Avant de poursuivre, une petite mise au point s’impose :

« Je ne suis pas là pour me faire des amis ».

Ça devait être un de ces marocains » pas comme les autres », petit bourgeois des cercles nantis de casa ou Rabat et qui n’ont souvent de marocanité que le prénom …Et encore !

Lorsque ces gens vous parlent du Maroc, il y a comme un décalage entre ce qui sort de leur bouche et ce que vous en tant que Z’magri (c’est le nom attribué aux marocains de la diaspora par les bledards ) avez vu du Maroc.

« Non, t’as plus rien de marocain toi , t’es un Z’magris, tu penses plus comme nous et t’es pas capable de boire l’eau du robinet au Maroc sans choper la chiasse! »

-« Je t’emmerde Al Khraa et wai chui un Z’magri ! »

Ils nous détestent, ça tombe moi aussi !

Je vais peut-être dire ce que beaucoup de Z’magris pensent si bas au fond d’eux-même qu’ils ne parviennent plus à l’entendre.

Les Z’magris détestent les gens du bled , ils peuvent pas les sentir avec leurs airs de parvenus et leur ignorance qui frise la débilité.

« Maghrib Zouine walakin moula77oum Ziiirrrroooo » (Le Maroc est un beau pays , c’est les marocains qui craignent).C’est ce que vous pouvez entendre le 1er septembre de chaque année dans les quartiers.

Et vous pouvez être rassuré, les bledards nous détestent aussi, eux qui ne voient en un(e) Z’magri(ya) qu’une « opportunité », wallou , rien de plus , une putain d’opportunité pour sauver leur gueule de la merde dans laquelle ils baignent, car ils n’ont plus le courage de l’affronter de face!

Comme je vous l’ai dit je ne suis certes pas là pour me faire des amis.

Le complexe du Z’magris c’est un peu comme le complexe de toutes les immigrations mais avec cette petite touche marocaine en plus : La schizophrénie !

Le complexe du bledard en revanche … Alors là ça relève de la pathologie clinique profonde.

Une thérapie de groupe à l’échelle nationale et sur 2 générations pourrait, peut-être les soulager!

Les rapports entre diaspora et bledards sont néants ou si faux, ça cligne trop des yeux pour être sincère !

Mon père me disait : « Koul m3a nssrani ou 7di rassek min marroki » (Mange avec l’européen et méfie toi du marocain ! »

C’est hard …! Il devait avoir ses raisons.

Problèmes de successions, héritages spoliés,malversations bancaires, injustices flagrantes et autres sont le lot de nos parents ou grand-parents au Maroc qui sont très souvent analphabètes.Pourtant ils mourraient pour le Maroc tellement leur amour pour « Ard el Watane »(La mère patrie) est enraciné profondément dans leurs codes génétique.

Leur rêve ultime, pour beaucoup, est de se reposer une dernière fois le regard vers la Mecque ensevelis dans le sol de leurs ancêtres.

C’est que le besoin, la nécessité au bled peuvent pousser l’humain à faire des choses qui ne sont pas très louables.Plus de famille qui tienne quand on a faim.Ton propre frère te nique la gueule et avec le smile de circonstance!

Plusieurs guérisseurs insomniaques de la connerie ont établis des théories aussi fadas les unes que les autres pour stigmatiser le Z’magri au Maroc.

Du genre : Les Z’magris viennent pour frimer avec leurs voitures, ils ne respectent pas les lois, ils sont arrogants et critiquent toujours tout, comparant le Maroc à l’incomparable, mal éduqués, ils n’ont plus rien de marocain …

Alors de vous à moi, je suis sûr que vous avez déjà entendu au moins un de ces arguments. Messieurs, Dames les Z’magriyaaaaaas

De l’autre côté, les bledards avaient plutôt la cote Outre-Méditteranée.

Quelqu’un de là-bas, dans l’esprit des parents, c’est maintenir le contact avec une certaine authenticité, un bout de là-bas ici. Une crédulité qui mériterait qu’on s’y penche, car elle suppose que nos parents considèrent déjà leurs propres progénitures en perdition identitaire, coupée de tous liens culturel avec le terroir sacré.Alors que cette dernière face aux belgo-belges usent de tous les stratagèmes possibles et imaginables pour marquer leurs différences et brandissent l’identité d’origine à tout va.

Par l’échec de l’ancrage ici et là-bas, beaucoup déambulent tels des corps sans têtes à fleur de peau , ce qui sourit à tous les extrêmes.

Complexe… Non ? Attendez donc ! Là où ça devient tordu c’est au bled.

Les Z’magris font tout pour se rattacher à la mère patrie une fois au bled, mais l’autre, celle de la Belgique, France, Hollande, etc … Ils s’impatientent toute l’année mais de retour de vacances jurent, souvent, que ça sera la dernière !

Et ça, ça profite à qui alors ?

Ça conforte juste les bledards dans leurs dénominations affabulatrices avec lesquelles ils excommunient définitivement le Z’magri et cela permet aux Z’magris, de se venger du haut de leur tour d’ivoire occidentale.A demi-fier, car nous sommes conscients que ce que nous pensons et disons sur les bledards nous le subissons bien souvent ici !

C’est humain, et tellement humain vous ne trouvez pas ?

Ce derby Z’magris/Bledards ne parlera probablement pas à tout le monde.De même, je suis lucide que certaines tournures de phrases cruelles vont hérisser les cheveux de certains, accablant l’auteur de ce billet d’humeur par tous les quolibets made in Maroc :

« Le traitre » ou alors « ça ne peut être qu’un algérien qui se cache derrière ces caractères » …

Alors, donnez-vous à cœur joie !

Et dans ce dictionnaire de l’immigré marocain, j’aurai dressé volontiers ces points :

Un Z’magri 1ère génération c’est comme un marocain Chaabi (populaire) hors du Maroc.Dont le coeur bat ici mais le regard est en permanence rivé vers là-bas.

Un Z’magri 2ème génération, c’est « Fight club » en premanence, le coeur bat ici et le regard est rivé ici mais en coins de l’oeil encore là-bas.C’est aussi Dieu merci je suis né ici!

Un Z’magri 3ème génération a comme principale difficulté, d’affirmer que le pays dans lequel il vit est sien. Son coeur et son regard sont ici.Son référent identitaire est là-bas quand ça le chante et ici quand ça lui sert!

Un bledard c’est comme … Du Canada Dry, ça à le look du champagne, ça pétille comme du champagne mais c’est une putain de limonade !!

Un bledard c’est sauve qui peut je me noie, tends moi la main Dieu seul te le rendra car moi j’ai autre chose à faire … A Sahbi dielli ! (Mon ami ).

ça souffre de part et d’autre mais pas pour les mêmes motifs, ça se reconnaît et depuis ça s’apprivoise à distance.

Ils se démarquent en permanence !

C’est un peu je t’aime moi non plus !

Ils se projettent avec dédain, se regardent en chien de faïence et se confortent de leurs positions en se disant : « Hamdoullah que moi je suis pas toi ! ».

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-« Et ça, c’est qui l’a fait !!! »

-« C’est pas moi Madame ! »

-« Tu mens , tu mens Stéphanie et Pierre ont dit que c’est toi ! »

-« Dans ma tête, en mon moi profond, « Et wa Mchi T’Khraa 7ta Ntina ! » (Va à la merde toi aussi!). »

Mais ça, ça sera pour une autre fois.