Florian Ngimbis

Le kongossa n’est pas mort

Chers amis,

Le kongossa n’est pas mort. J’ai basculé sur une autre plateforme, car je réserve celle-ci à un usage que vous découvrirez dans les jours qui viennent.

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Peace la famille!


Je suis camerounais, je suis Energie noire et obscure

Pixabay.com

Jeune, j’ai vécu à Nanga-Eboko, je me souviens que cette ville qui n’avait pas encore la chance d’appartenir au giron présidentiel (allez dire !) était une espèce d’agglomération poussiéreuse enclavée où en saison sèche la couche de poussière pouvait atteindre plusieurs centimètres avec ce que cela avait comme conséquences sur la santé et l’hygiène. Je me souviens de ma première attaque de conjonctivite, souvenir douloureux…

Une polémique naquit durant ce contexte de sous-développement extrême. Il se disait dans le kongossa que la municipalité avait décidé d’électrifier un certain axe, mais que les sorciers du coin réfractaires à toute forme de développement s’y opposaient et menaient des actes de guérilla sorcière dans le but d’empêcher l’aboutissement du projet. Surpris, j’ai demandé à mes cousins en quoi l’électrification d’une zone pouvait mettre à mal la pratique de la sorcellerie… Je me suis entendu répondre que le passage des lignes de haute ou moyenne tension provoquait des interférences qui empêchaient les avions nocturnes, oui les avions des sorciers de décoller ou les faisaient se crasher en plein vol.

Woye ! J’ai fermé ma bouche. Nanga étant une de ces villes où ne pas croire à la sorcellerie pouvait vous faire passer devant le tribunal inquisitoire de la société. Bref, comme je l’ai dit, j’ai juste fermé ma bouche.

Mais ces derniers temps, mes croyances ou non-croyances en la matière sont sérieusement mises à mal. Oui oui ! quand je regarde les faits et gestes de notre société de fourniture d’électricité, mes frères, je suis convaincu que la sorcellerie existe.

Issue des multiples viols de notre secteur de l’électricité, viols qui lui font à chaque fois changer de nom pour que nous oubliions, Eneo que j’ai rebaptisée avec amour Energie noire et obscure est presque toujours sur le devant de l’actualité mais pas pour les raisons que l’on croit.

La spécialité de cette entreprise semble être de faire parler d’elle dans tous les domaines, sauf celui auquel elle est dévolue. Nous autres camerounais, pauvres naïfs avons cru que la fin de AES Sonel signifiait la fin de l’obscurité. Que non!

La réalité est là, bel et bien palpable : aujourd’hui, autant, sinon pire qu’avant, Eneo a repris le flambeau de « clignotant officiel de la République ».

Avec Eneo, la vie est une espèce de suspense perpétuel dans lequel les moindres tâches du quotidien se font la peur au ventre : travailler, se relaxer, se marier, boire une bière, regarder un match de foot. Tchak ! Tel un djinn malfaisant Eneo nous rappelle que noir c’est noir et qu’il est illusoire de vouloir le contredire.

Même la population de notre Yaoundé qui criait sa joie après chaque retour de l’électricité a cessé de hurler. Oui la nouvelle donne de coupure voudrait que chaque retour soit momentané, suivi de très près par une autre coupure plus douloureuse que la précédente du fait des espoirs vains qu’elle a suscités. L’alternance tant réclamée revue et corrigée. On parle bien de courant alternatif non ?

Les équipes de Eneo sont très performantes hein ? Comment ne pas saluer leur équipe de communication qui fait preuve d’un dynamisme sans pareil. Au milieu des blackouts prolongés, Eneo a décidé de vraiment communiquer.

Réunion de service

Equipe de production : les gars nous sommes dépassés. Nous ne pouvons plus fournir de l’électricité en continu.

Moi (caché sous une table) : mais démissionnez même non.

Equipe de communication : mouf ! on démissionne au Cameroun ? Bon les gars ! On va vous aider en prévenant les gens. Nous allons désormais balancer des bulletins et avis de coupure sur notre site

Moi : mais… on va lire ça comment s’il n’ya pas de courant ?

Equipe de communication : Mouf ! Il ya aussi les SMS non ?

Moi (caché dans un placard) : mais… on va recharger les télés…

Equipe de production : Mouf ! c’est qui ça même ? Bravo la com’ ! C’est vrai que le gars qui appuie sur notre interrupteur de coupure a déjà chopé un panaris, mais c’est bon, on vous fera remonter l’info chaque fois c’est-à-dire tous les jours.

C’est ainsi que, bien que nous marchions dans la vallée de l’obscurité et de la transpiration, nous sommes constamment prévenus par des avis de coupure. Nos amis si professionnels sont même allés plus loin. Sur leur page Easy Light, ils en sont à demander aux abonnés de choisir le jour où ils voudraient être privés d’électricité. C’est important pour les mariages et autres célébrations non ? Pour le travail quotidien ? Bof ! On s’en fout ! l’Emergence, c’est en 2035 hein ? Que nous travaillions ou pas.

Oh oui ! Eneo a compris les limites de la démocratie et nous impose la dictature éclairée : plus besoin de faire le choix difficile entre la peste et le choléra. Nous vous offrons Ebola, mais c’est à vous de nous dire quand vous voulez qu’on vous l’inocule.

Toujours dans sa quête de buzz négatif, Eneo nous gratifie en ce moment d’une actualité croustillante : un article du média Le Monde Afrique nous apprenait récemment que L’unique millionnaire camerounaise du scandale HSBC est « une de ces étranges « femmes au foyer ». Lydie est l’épouse d’un haut responsable du fournisseur d’électricité AES Sonel, devenu Eneo Cameroon. Alors que les Camerounais subissent toujours les fréquents délestages, Lydie dispose de trois millions de dollars déposés sur son compte ouvert en juillet 2002 ».
J’ai entendu les gens hurler au loup, mais soyons réalistes. Il s’agit d’une femme visionnaire. Si mon épouse bossait dans une entreprise qui coupe le courant aux gens plus qu’elle n’en fournit, dans quoi j’investirais ? Les bougies ! Les groupes électrogènes chinois, au pire, le solaire ! Mais bon, vendre les bougies pour trois millions de dollars… Attendons que la justice, pardon, son substitut l’Epervier se penche sur son cas. Mais comme l’oiseau d’Etoudi semble fonctionner aux piles ces derniers temps, il va falloir attendre longtemps.

Au moins, nous sommes heureux de savoir que tout va bien du côté d’Eneo, car ses employés semblent conscients du sort d’envoûtement « electricitus mediocritus »  qui les lie ont opéré une « Retraite stratégique de la Direction marketing communication d’Eneo Cameroon au Centre spirituel Jean-Paul 2 de PK 21 à Douala 5e » la semaine dernière.

Même si le terme « Retraite stratégique » m’a fait penser à une débandade en mode « Nous ne sommes plus là! », j’ai quand même apprécié cette initiative. Nous sommes des Bantous non et quand quelqu’un te dépasse tu portes son sac. Quand ton travail te dépasse, tu portes tes pieds et tu pries. C’est mieux que d’aller chez les marabouts non ? C’est mieux que d’accuser le président non ? C’est mieux que de s’accuser soi-même non ?

Donc quand j’ai vu nos amis d’Eneo engoncés dans leurs tee-shirts vert malchance accepter de se « couper de tout pendant 4 jours » (en même temps ce sont des experts en coupure) je me suis dit woye ! Affaire d’électricité, seul Dieu nous sauvera.

Bon, ça c’est en théorie hein, car parmi les engagements de ceux que j’ai pu lire, nulle part je n’ai vu « travailler à ce que les délestages se terminent ». Forcément, vu que dans le discours officiel ils n’existent plus.

C’est la vie hein ? Coupez tout, Dieu illuminera les siens. Mais je vous le répète mes amis, en 2015 il est plus facile pour le Nigeria de vaincre Boko Haram en six mois qu’à Eneo de fournir l’électricité en continu pendant six heures dans mon quartier. Ce n’est pas la sorcellerie, c’est parole d’Evangile.

Amen !


Je suis camerounais, je hais Charlie

Paris, le 11/1/2015 Photo RFI

Cher camerounais, cher frère,

J’avais prévu mon retour au blog ce jour, mais je n’avais pas prévu les circonstances de ce retour : mon pays qui grâce à la vidéo d’un terroriste réalise enfin qu’il est plongé dans une guerre. Guerre contre des bandits qui se parent du drapeau de l’islam pour perpétrer les actes les plus ignobles au Nigeria voisin et dans le nord de notre pays. Et puis cette déferlante « je suis Charlie » qui a envahi le monde au point de devenir un événement que les livres d’histoire et les rétros ne manqueront pas de citer.

Evènements pas du tout liés, du moins de façon directe, mais pour lesquels je t’ai entendu hausser le ton. Je t’ai entendu sur les réseaux sociaux, dans les taxis, dans les marchés, dans les bureaux, je t’ai entendu hurler ta haine des islamistes de Boko machin, je t’ai entendu hurler ton amour pour ton vert rouge et jaune. Je t’ai entendu hurler ta déception vis-à-vis des journalistes de bar et autres péroreurs du dimanche qui t’ont dit que cette guerre n’en était pas une, qu’elle était une rébellion contre ton Roi, grand chantre d’une paix qu’il te vend élection après élection sans que tu aies connu de guerre avant.

Je t’ai entendu hurler ta haine de cette France que tu dis être derrière Boko Haram. Punching ball que tu frappes rageusement tous les jours au lieu de monter sur un ring.

Je t’ai entendu crier contre ces présidents africains qui sont allés dans des tenues noir corbeau faire acte de contrition là-bas, dans ce pays froid quand ils se taisent sur les drames chauds chez eux. J’ai été assourdi par ton indignation. J’ai écarquillé les yeux quand tu t’es cru obligé de hurler que tu n’étais pas Charlie. Mais je te comprends : la télé qui comble tes soirées est la leur et tu as dû râler devant tes séries décalées à cause des nombreux « breaking news ».

Oui ! Je t’ai entendu hurler et tu sais ce que j’ai fait mon frère ? J’ai ri.

J’ai ri, car je me suis souvenu que toi camerounais pendant les événements au Burkina tu as ri de ton peuple, si amorphe, si pathétiquement broyé depuis trente-deux ans et si différent de ce peuple burkinabè si courageux. J’ai ri de ton ignorance. Tu as oublié ceux qui ont lutté et versé leur sang pour que tu puisses te réclamer de ce Cameroun durant la guerre d’indépendance!

Tu as oublié ceux qui dans les années 90 ont péri pour que tu profites de cette liberté d’expression que tu galvaudes.

Tu as oublié qu’en 2008 les tiens sont morts dans les rues du Cameroun au nom de revendications aussi simples que le droit à une vie plus décente.

Tu as oublié qui tu es, d’où tu viens et t’alarmes d’aller droit dans le mur ? Je ris.

Tu as oublié, parce que toi, recroquevillé dans ton petit coin de paix tu préfères vivre par procuration. Tu hais Charlie et comme je te comprends ! Au milieu de cette planète entière rassemblée à Paris au nom d’un crime aussi barbare qu’inutile, tu as compris que tu n’étais rien, que tu ne comptais pour rien malgré la présence et les pleurs des Rois africains voisins, versés au nom d’une notion qu’ils ignorent.

Moi qui croyais la solidarité africaine, aurait-elle désormais élu domicile chez les autres?

Tu as vu une quinzaine de morts prendre en otage ta liberté de pensée, te contraindre à plier l’échine devant le flux d’information, devant ta liberté si chère de ramer à contre-courant. Et tu as refusé d’être Charlie.

Tu t’es souvenu des milliers d’assassinats de Boko Haram, des corps que personne n’arrive à compter à Baga. Des villages camerounais rasés, des milliers de tes compatriotes déplacés. Tu t’es souvenu de ces corps de frères et voisins militaires rentrant incognito après avoir fait le sacrifice suprême.

Tu t’es souvenu du bouffon invité par un de tes frères africains qui t’a craché à la figure que tu n’étais pas assez entré dans l’histoire. Tu as hurlé, parce que tu as constaté que même dans l’actualité, tu n’étais pas assez entré.

Tu as hurlé que tu n’étais pas Charlie, oui je sais, quand tu as été Ebola ce n’est pas toi qui as décidé. Mais souviens-toi que tu n’as jamais été la Sierra Leone, tu n’as pas été le Sud- Soudan. Tu n’as pas été Boko Haram, tu n’es pas le Nord-Kivu !

Mais qui t’empêche d’être à défaut de Charlie, toi-même ?

Tu te sers des réseaux sociaux pour faire des guerres que tu ne peux assumer dans la réalité. Tu te sers des médias pour honnir salir et faire chanter. Tu as oublié d’être celui par qui vient le changement, te contentant trop souvent de te laisser porter par un courant qui t’entraîne vers des récifs à la vue desquels tu hurles à la mort au lieu de saisir le gouvernail de ton pays.

Ton patriotisme et ton panafricanisme ne sont que les socles de ta haine qui justifiée ou non est elle-même vaine. Tu ne construis pas, n’essayes que quand on t’y contraint, caché derrière tes cris d’orfraie et tes boucs émissaires : l’Etat, le gouvernement, la France…

Et toi alors ? Oui toi !

Tu as oublié d’être celui qui vote. Tu as oublié d’être celui qui surveille son vote, tu as oublié d’être celui qui réclame des comptes. Tu as laissé à ceux sur qui tu tapes de temps à autre le soin de tout gérer. Tu savais qu’ils échoueraient. Mais tu avais besoin d’avoir les mains propres pour leur taper dessus.

Tu as oublié d’être celui qui réclame de l’eau potable, de l’électricité, des soins décents, encore moins celui qui les cherche là où on veut les enfouir. Tu hurles et puis tu passes à autre chose.

Mais tu n’as jamais oublié d’être Eto’o, encore moins d’être les brasseries du Cameroun lors des tentatives d’augmentation du prix de la bière. Est-ce là ton histoire ?

On t’a dit que la politique ce n’était pas bien. Que manifester c’était faire de la politique. Que le fouet de la police devait te faire peur. Tu as dit ok et tu n’as hurlé que réfugié chez toi ou derrière le clavier de ton ordinateur.

Dans la foule que tu as vue à Paris, tu as vu les voleurs de leur République aux premières loges, tu as vu ceux dont le discours haineux stigmatise tous les jours ceux de ta race. Tu as vu ceux pour qui tu ne seras chez eux qu’un immigré, tu as vu ceux qui ont mis ton continent à feu et à sang au nom de guerres censées établir la « démocratie ». Tu as hurlé « Je ne suis pas Charlie ! » au lieu de te souvenir des paroles de Cheikh Amidou Kane : « Allez chez eux apprendre l’art de vaincre sans avoir raison ».

Je ris quand tu hurles vois-tu ? Parce que tu sais qu’aucun hurlement n’a jamais empêché une caravane de passer.

Tu essaies de ne pas être Charlie, je ne le comprends que trop bien. Mais ceux qui ont fait de toi un charlot sont ici et tu leur as laissé ton pays, fermant ta gueule à chaque fois que tu peux leur rappeler de te respecter, mais pire tu as baissé tes bras si robustes qui te permettraient d’abattre un édifice pourtant pourri de bas en haut.

Ne t’offusque pas, je ne te juge pas, car quand je parle de toi, je parle de moi.

Eh oui ! Tu as compris que tu n’étais pas Charlie, mais ma question est de savoir si tu réalises que tu es le Cameroun.

Peace !

PS : Pas de stress, je sais qu’à défaut d’être Charlie, bientôt nous serons la CAN. Je sais pouvoir compter sur toi pour ça.  Comme toi,  « Je suis la CAN » enfin, jusqu’à ce que les Lions se fassent dompter…

Peace again!


Je suis camerounais, j’étais chez Um Nyobè

Ceci est mon centième billet de blog.

Je l’ai rêvé différent, je l’ai pensé atypique, mais je ne l’imaginais pas ainsi. Durant ces quatre années à pianoter sur le clavier de mon ordinateur, j’ai été à chaque fois hanté par le syndrome de la « course dans le sac ». Courir dans le sac signifie qu’on fait une chose en vain. Écrire, déverser rage, fiel, miel, rire à longueur de billets est bien mais devient lassant quand après quatre années de construction d’une identité numérique et de fédération d’une communauté, on n’arrive pas à capitaliser dans le réel tout ce qu’on a acquis.

Et puis il ya eu cette date, le 13 septembre 2014. Date qui m’émeut chaque année car elle représente le jour où en 1958 Ruben Um Nyobè , homme affublé de tous les noms, mais père indiscutable de notre indépendance, a été froidement assassiné par la France, « mère-patrie » coloniale et ses alliés camerounais.

Devant ma télévision, j’ai assisté à la parade des cons, oui la danse des sorciers que les descendants de son parti ont effectué sur sa tombe. Habillés de la tenue rouge-noir souillée de leur incompréhension de ce que furent les idéaux qui ont sous-tendu la création de cette entité, ils ont réussi à se battre pour une histoire de tendance. Enfants maudits se réclamant d’un héritage dont ils ne perçoivent même pas la richesse.

Et c’est comme ça qu’entre deux tweets et sous l’effet de trois Castel, j’ai lancé l’idée d’organiser un pèlerinage à Eséka là bas sur la tombe du Mpodol, le porte-parole de tout un peuple.

Parler des blocages? Parler des moments de doute? Pourquoi? Le Cameroun est un pays de projets, un pays en projet où les gens aiment les projets quand on les présente, mais disparaissent quand on passe à la phase exécutoire.

Au delà des soucis liés à la logistique et à l’organisation, c’est l’incompréhension et cette forme larvaire d’autocensure qui caractérise mon peuple qui m’a blessé: Euye Mbom! Tu pars sur la tombe de Um Nyobè? Tu es dans l’UPC? Tu es opposant?

– Allo, Flo?

– oui mama

– Ton père vient de te voir à la télé. il paraît que tu organises un pèlerinage à Eséka. 

– Ah oui. C’est vrai. Il a dit quoi. 

– Rien. Il a attaché sa bouche, a croisé les bras et il s’est mis à secouer ses jambes comme le jour où il t’a fessé parce que tu avais bu son whisky.

Puis un départ le 12 octobre. Un dimanche pluvieux. La peur au ventre. Peur de l’échec. Peur de se retrouver seul sous cette véranda devant Camtel. La morsure horrible des coups de fil d’annulation à la dernière minute… Je stresse.

Mais pour rien. Car à mon arrivée au lieu d’embarquement je les trouve debout devant moi. Ils ont bravé pluie, froid, insécurité pour se retrouver à 6h30 à la Poste! Je suis tout ému devant ces silhouettes qui redonnent un peu de couleur à la grisaille matinale.

Ils sont aussi là bas à Douala un peu mois d’une dizaine mais bien présents, sous la pluie. Nous sommes une vingtaine au total à avoir confirmé les inscriptions et à répondre présent! Great!

Yaoundé c’est l’histoire d’un départ manqué à cause d’un véhicule bloqué. D’un Papy Bikanda qu’il faut attendre parce qu’ayant confondu Camtel et Camair (la bière hein?). D’un arrêt de dernière minute pour avoir oublié d’acheter les cadeaux à offrir à Mme Um, veuve du héros qui a accepté de nous recevoir. Tout se fait, vite. Ma seule crainte étant qu’une liane tombe face à moi en train de porter un sac de riz au carrefour Afan Oyoh : euye! Ngimbis donc ton travail là c’est le bambè?

Nous partons. Qui sont-ils? De jeunes gens. Pour beaucoup on ne s’est jamais rencontré, mais nous avons un point commun: les réseaux sociaux, lieu exclusif de recrutement. Des profils divers: informaticiens, juristes, étudiants, chômeurs, cinéastes, enseignant… Chacun avec une pointe d’originalité, comme Jason « le plus jeune » qui dort car sorti de boîte de nuit quelques minutes auparavant seulement.

Jonction à Boumnyébel avec ceux de Douala.

Pause gésiers et autres à Boumnyébel

 

Après 40 kilomètres d’une route riche en nids de poule nous arrivons en cortège à Eséka. Ville-village, vide, c’est dimanche tout le monde est allé prier. Direction le cimetière de la Mission.

Arrivée au cimetière

La tension monte, mêlée d’excitation, On veut y être rapidement. Puis le choc: le cimetière est un champ non entretenu, des herbes hautes, des tombes défoncées.

Tout serait recouvert si les upécistes n’avaient pas débroussaillé un espace autour de la tombe lors de leur passage. Nous découvrons les lieux avec stupeur. La tombe est là sous un arbre. Muette, solitaire, grise dans le vert environnant. Sur le coup, je wanda!

Le champ dans lequel est enterré le père de l’indépendance

Nous n’avons rien prévu mais les choses s’enchaînent naturellement. Bergeline notre guide parle. Puis Ulrich, le jeune historien prend la parole. Quelque chose le pousse on le sent. Il parle et déroule sous nos regards la fresque complexe de cette histoire oubliée, peu connue, galvaudée. L’histoire d’un homme, d’une cause. Les visages se crispent quand il évoque l’épisode du corps de Um Nyobè traîné à l’arrière d’un véhicule de Boumnyébel à Eséka et ainsi défiguré.

Ulrich Tadadjeu en plein cours d’histoire

 

Puis, un à un chacun se sent obligé de parler. De remercier le mort, de demander pardon, d’avouer son ignorance, de s’indigner. Ce sont les coeurs qui parlent.

Mais je ne perds pas le Nord hein? Mes radars kongossiques ont tôt fait de détecter des présences: nous ne sommes pas seuls. Depuis quelques minutes, des rôdeurs nous observent et certains pianotent sur leur téléphone. Cinq minutes plus tard, un officiel débarque. Chemise rentrée dans le pantalon façon sapeur congolais. Il est flanqué d’un type qui d’après sa carrure doit être son tchinda plutôt que son garde du corps: nous sommes face à Monsieur l’adjoint au Maire. Les pèlerins eux continuent de s’exprimer, immortalisés par la caméra de l’équipe du cinéaste Rostand Wandja.

Bergeline en pleine discussion avec l’Autorité. Tsuip!

Je chuchote à l’oreille de Bergeline: va lui parler stp!

Pourquoi tu m’envoies?

Pour deux raisons: 1- tu es une femme, avantage psychologique. 2- tu as dit dans le car que ton petit nom c’est Kabila non? Va alors faire la rébellion là bas.

ça discute. Il est question d’autorisations, de « se signaler » blablabla. Foutaises! (je l’ai juste pensé hein?)  Nous sommes dans un cimetière et Um Nyobè n’est la propriété de personne, sinon de son pays. On rappelle l’altercation du 13 septembre. Dans l’herbe git une seconde gerbe, écrasée. La gerbe des perdants.

Dans certains partis ils organisent des combats de gerbes. La perdante…

Mais bon Bergeline calme le jeu et sort la phrase magique: « ce sont des étudiants, ils ne font pas la politique ». Sourires de part et d’autre. Ah! mais c’est bien! Tout le monde se détend.

Plus d’une heure plus tard, On clôt la visite par la photo de famille. Un dernier regard à la tombe et on dit au revoir au Mpodol, immobile dans son linceul de béton gris.

Escale au carrefour suivant. Devant le monument à la gloire du Mpodol. Monument représentant sa descente à la gare d’Eséka en 1952 de retour du sommet de l’ONU où il défendit avec force la cause de son Kamerun. Monument de la discorde aussi et symbole de la récupération de l’image de Um Nyobè. Ce qui m’intéresse ce n’est pas le monument, mais les gens. Ils nous regardent étrangement, semblant se demander ce que nous faisons là. Des passant ralentissent, des vendeurs sortent sur le pas des boutiques, un type à moto lance « Um Nyobè va griller vos appareils là! » Sa phrase se perd dans le vent de l’accélération…

Le monument au second plan

Retour à Boumnyébel chez Mme Um où nous avons prévu d’organiser le déjeuner. Là encore le choc. Au lieu d’une vieille décatie et impotente, c’est une mbombo debout sur ses deux jambes qui s’avance vers nous. Une mbombo qui nous souhaite un « malo malam » chaleureux. On expédie la remise des cadeaux, il ne s’agit pas d’un don, donc, pas de clic clac misérabilistes.

Son salon, austère. On veut qu’elle nous parle de l’homme qui fut son mari. Elle, veut savoir pourquoi nous sommes là. On lui explique que nous sommes en quête de réponses, en quête de compréhension et que nous avons initié un tour des lieux symboles de l’histoire de notre pays. Qu’on a commencé par son époux, car il le vaut bien.

Photo de mariage bien visible dans le salon de Mbombo Marthe

Causerie. Gaëlle Tjat, Samuel Iyabi et papy Bikanda sont les interprètes improvisés. Les questions fusent. Elle nous parle de l’Homme à travers elle. Obligé d’intervenir. ça va trop loin et certaines réponses tordent son visage de souffrance comme au jour où elle a vécu les faits. « Le maquis ne se raconte pas mes enfants, il se vit ». Nous ne sommes pas venus faire du voyeurisme. On temporise.

Repas. Au milieu de la table du festin, un okok légendaire. L’okok bassa’a, l’okok des origines (chauvinisme culinaire hihihihi!)

Photo de famille. Elle serre les deux mains de chacun à tour de rôle: « ma porte vous est toujours ouverte mes enfants ».

Mbombo Marthe Um au centre. Née en 1926

Nous repartons, sous le magnifique soleil qui ne parvient pas à rendre belle cette bourgade dont le développement semble s’être arrêté des décennies auparavant.

Accolades. C’est le départ. Nous sommes venus épars, nous formons désormais une famille, unie par la soif de compréhension et de changement.

Nous prenons des rendez-vous. Des initiatives voient le jour. On échange des titres de livres, de lieux de discussion, de débat. On est parti. Au carrefour d’avant le péage les deux cars prennent des directions opposées. #RememberUmNyobe la page est tournée, mais ce n’est que le début du livre…

Pause cassimango quelque part après Mapan

Pourquoi?

Nous ne sommes pas allés à Eséka donner des leçons. Nous n’y sommes pas allés en tant que comité scientifique chargé de reécrire l’histoire. Nous y étions même sans programme définitivement arrêté.

Nous y sommes allés pour trouver dans le passé les clés de compréhension de notre présent. Nous avons en regardant le père de l’indépendance gisant dans un coin de broussaille compris pourquoi ladite indépendance vaut ce qu’elle vaut. Nous sommes allés à Eséka chercher dans un coin de brousse des denrées rarissimes dans le Cameroun actuel: courage, probité, engagement, force. Un cocktail indsipensable pour redresser notre pays. On rêve peut-être mais qu’il est doux ce rêve… Ce n’est pas ça qu’on nous a légué, ce n’est pas ça qu’on veut laisser…

Merci à tous ceux qui ont contribué à la réussite de cet événement. Merci à l’association Yes Africa et au Collectif des Blogueurs Camerounais.

A bientôt pour la suite.

crédits photo: Gaëlle Tjat, Papy Bikanda.


Je suis camerounais, je suis [in]fidèle

© humourdabidjan.net

Les Camerounaises me font rire. Elles sont obnubilées par cette histoire de fidélité au point d’en faire leur Saint Graal, leur quête existentielle. On dirait que pour une femme, la vie ne vaut pas la peine d’être vécue si son gars, lui est infidèle. Et parfois dans les kongossa, je les entends décréter urbi et orbi « mon gars je le tiens, il ne tente même pas ! ».

Je ris mesdames. Moi, Florian Ngimbis, grand marcheur devant l’Eternel, je fréquente des hommes de toutes les catégories : amoureux, petits amis, concubins, maris et j’ai fait une découverte qui dans un pays sérieux me vaudrait le prix Chantou de sociologie : le Camerounais fidèle n’existe pas.  Ne me sortez pas le truc con du « faut pas généraliser ». Ici, on parle d’une tendance pas d’individus.

Ce billet a pour objet de vous faire perdre vos illusions mesdames. Vos illusions sur la fidélité, car le Camerounais fidèle est le Camerounais qui ne s’est jamais fait prendre. C’est le manipulateur, expert en mensonge, duplicité, tromperie, jonglage, cryptage au plus haut niveau.

Conscience zéro

Première leçon mesdames : sachez que le Camerounais ne considère pas l’infidélité comme une déviance. Enfin, c’en est une vis-à-vis de son couple, mais pas vis-à-vis de la société. Oui, pour nous autres Camerounais, un homme n’est rien sans sa ndjomba, son deuxième bureau, son chat mort, son piano, sa panthère,  RIEN ! Et autant vous mesdames êtes reconnues comme épouses ou petites amies officielles, autant dans l’entourage de votre mari, concubin ou petit ami sa ndjomba a un titre officiel et est connue d’eux, car forcément appelée à les rencontrer dans les soirées et autres évènements où il la traîne. Et ça n’empêche pas ses amis et collègues de vous donner du Madame Untel hein ? Sans aucun remords : pas de crime, pas de problème de conscience.

Et un, et deux, et trois zéro !

Ce n’est pas seulement le qui veut hein ? Encore faut-il le pouvoir ! Tout autant que la polygamie, les ndjombas coûtent cher. Donc, mesdames, plus votre « chou » pèse en termes de C fa, autant il est fort en multiplication ndjombaïque.  Jadis, quand la bantouité rencontrait l’argent, le cocktail qui en résultait, c’était un foyer polygamique. N’est ce pas les Blancs sont arrivés avec la religion et tout le toutim et ont mis dans la tête des gens que la monogamie c’était le progrès ? Je ne me vante pas de l’avoir découvert, mais cette théorie pourrait expliquer la naissance du concept de ndjomba.

Les femmes ont crié et interpellé le progrès pour condamner la polygamie. Le bantou en stratège a récupéré des éléments de ce progrès pour en faire des armes redoutables.

Le téléphone portable

Le téléphone est l’arme absolue du bantou. C’est la base de données de ses ndjombas et le moyen de liaison le plus rapide. Vous imaginez ce qu’il fallait comme logistique avant, quand il n’en existait pas ? La souffrance pour organiser un rendez-vous  galant avec une ndjomba dans un hôtel à Emana alors qu’on vivait à Mvan ? Vous imaginez ? L’attente dans une chambre prépayée alors que la gourgandine est peut-être encore de regarder son feuilleton ou a décidé de ne pas bouger ? Vous imaginez les AVC?

Autre chose : les gars efficaces savent une chose : éviter les SMS. Toute trace écrite est dangereuse. Et les télégrammes de cette diplomatie du cœur peuvent fatalement tomber entre les mains d’un Bradley Manning. Les smsleaks dans un couple ça fait mal hein ?

Le Camerounais a aussi un cryptage téléphonique de ses contacts féminins. Les femmes sont parfois paranoïaques au point de jeter un œil sur votre téléphone quand il sonne à portée de regard. Hein ? C’est qui la Charlène là ? Mais le bantou dispose de méthodes de cryptage :

Masculinisation du prénom (Charlène devient « Charlie ») suivie d’une lettre témoin, N comme « ndjomba » ou P comme « petite » genre « Charlie P. »

Remplacement du patronyme de la ndjomba par le nom de votre lieu de rendez-vous habituel (Charlène devient « La cachette Bar »)

Ou alors le truc le plus simple : utiliser tout simplement le nom de la ndjomba à la place de son prénom. Charlène Atangana devient « Atangana » tout court. Homme ou femme ? Bien sorcier qui le devinera.

Je recommande fortement la dernière astuce… Mieux qu’Enigma…

La voiture

Un autre élément du progrès qui aide le bantou infidèle, c’est la voiture. Considérée comme un signe extérieur de richesse, j’entends souvent des lianes se vanter : « Mon gars a la voiture ».

Je ris ! La voiture hein ? Sachez mesdames que dans la guerre asymétrique que les hommes vous livrent, la voiture est un moyen de frapper partout, rapidement et sans trace. Un bantou, un vrai gars qui  a la voiture peut vous dire le matin au petit déjeuner « Au revoir chérie je m’en vais travailler », prendre la route de Soa au lieu de celle de son bureau, se vautrer dans le lit d’une étudiante, aller manger le kanga à Mbalmayo l’après-midi avec la ndjomba, rentrer sur Yaoundé, la déposer à Soa vers 18 heures et vous dire vers 20 heures avec une mine fatiguée : « Le travail là est dur hein chérie ! ».

Le petit beau ou cousin

Et puis les femmes détestent les amis célibataires ou non maqués. Les gars comme moi, censés « entraîner » leur moitié et leur « donner des filles ». Laissez-moi rire ! Un bantou n’a pas besoin de son ami pour avoir une ndjomba. Surtout que si son ami est un tireur d’élite, il sait qu’en l’envoyant au front, il pourrait livrer la bataille et s’accaparer du trésor. Un vrai bantou  a toujours un larbin, un tchinda du quartier qui est son « petit de confiance », son rabatteur, son 10. Oui madame le petit que tu envoies payer les factures d’électricité là, ton mari l’appelle aussi souvent pour autre chose. Et puis même, parfois le petit beau-frère, oui, ton petit là qui glande à la maison est le meilleur ami de ton mari et son rabatteur.

Pourquoi il trahit sa sœur ? Vous rigolez j’espère ! Sa sœur qui n’a jamais l’argent là ? Qui l’insulte tous les jours là ?

Eteins la lumière d’abord !

Il y a un spécimen de couples (j’en connais) qui ne font pas de trucs « bizarres » au lit. Ces couples, souvent ceux des jeunes premiers bamilékés qui invoquent très souvent une pruderie formulée ainsi : mon frère ! Tu veux que ma femme me fasse ça ? Avec la bouche qui embrasse mes enfants ?

Ayaaaaaa ! Mesdames, je vous pitié si vous en faites partie ! Parce que votre mec là, si droit, si prude, ce qu’il ne veut pas que vous lui fassiez là, je vous jure qu’il ya toujours une autre là dehors qui le lui fait  et bien!

Quelques conseils pour la route

Oubliez le truc de l’anneau nuptial mesdames, il n’a pas sauvé Gollum, il ne vous sauvera pas. Le bantou, le vrai dit hoha à sa ndjomba qu’il est marié. Du coup, il n’a pas à jongler sur deux tableaux, la seule qu’il jongle c’est vous !

Oubliez les aussi les interrogatoires musclés là ! Un bantou camerounais ment sans cligner des yeux.

Il est capable de résister à un interrogatoire de la Gestapo sans se dédire, car il a compris que pour bien mentir il faut toujours faire reposer son mensonge sur un socle de vérité. Ainsi, s’il est allé chez sa ndjomba à Soa, y a mangé, puis forniqué, à la question « où étais tu ? » il répondra :

« Chez ma tante à Soa, malheureusement je ne l’ai pas trouvée, j’ai eu une crevaison et pendant qu’on changeait ma roue, je me suis arrêté à Dernier Poteau pour manger la viande de brousse. »

Il évite le coup de « je vais appeler ta tante » du « pourquoi tu as mis tout ce temps ? » et par la même occasion le piège de « pourquoi tu ne manges pas mon kpem, tu as mangé où ? » Au pire, la pauvre s’énervera : « Encore toi et la viande brousse ? Tu n’entends pas que Ebola est dehors ?

Quand j’expose tout ceci on me parle souvent de l’amour. L’amour dans tout ça Florian, qu’est ce que vous en faites ? L’amour hein ? L’amour pour un bantou est un mélange de dot versée, de mariage célébré, d’enfants reconnus,  scolarisés, de ration versée, de factures réglées, de devoir conjugal accompli à période plus ou moins fixe.

Madame si votre camerounais de mari vous fait tout ce que je viens de citer, alors dans sa tête oui, il n’est pas infidèle, il vous aime. Fermez les yeux sur les ndjombas, les dossiers, les bureaux. Vous êtes sa femme, l’aéroport comme vous dites, où l’avion qu’il est finira par atterrir après de multiples escales.

Ce n’est pas normal ? Moi quoi là dedans ?  Je n’ai envoyé personne être en couple avec un bantou, camerounais de plus. Donc à moins de faire votre vie avec un intégriste pentecôtiste, va falloir supporter, car dans ce pays, même les prêtres cocufient le Saint-Esprit…

Dieu est grand, mais camerounais n’est pas petit.

Peace !

 

 


Je suis camerounais, je prie contre Ebola

Please la Blanche, #GiveUSTheSerum (photo AFP)

Mes frères ! Comme la majorité d’entre vous, je suis avec attention la progression de l’épidémie d’Ebola sur le continent, comme la majorité d’entre vous – ne le niez pas- chaque jour, je serre les fesses en adressant une courte prière au Créateur : « Hé Dieu ! Qui fait Dieu fait qu’Ebola nous esquive ? ». Oui mes frères, Dieu est ce qui nous reste quand on a tout perdu. Je me méfie de ces histoires de sérum et de vaccins dits expérimentaux. Hein père ? Les Américains, en train de jouer les philanthropes ? Le pays dont les drones tuent des innocents tous les jours ? J’abuse peut-être mais je suis ainsi…

Mais croyez-le, je comprends les malheureux sans autre issue que la mort, obligés de prendre ces médicaments dont on nous dira bientôt des choses qu’on aurait dû nous dire avant de nous les administrer.

Il y a une catégorie de gens qui m’énervent hein ? Ceux qui passent leur journée à vous rabâcher les oreilles avec des mots optimistes sur l’Afrique. Du genre « croissance à deux chiffres », « avenir du Monde », blabla… les super optimistes qui depuis des décennies voient dans l’Afrique le « Continent de demain », « l’avenir de l’humanité ».

Laissez-moi faire mon pessimiste. Laissez l’avenir, voici comment je vois mon continent au quotidien : chaque matin, mes frères, j’allume ma télévision et j’entends le décompte morbide des morts d’un virus apparu sur le continent depuis 38 ans ! Je ne rigole pas.

Depuis tente-huit ans

Depuis trente-huit ans, un virus apparaît épisodiquement, tue des gens, disparaît sans que les premiers concernés, les Africains, aient une vraie stratégie pour le combattre !

Depuis trente-huit ans on attend que les labos européens, trouvent un remède, depuis trente-huit ans on attend que le CDC, la Croix-Rouge, l’OMS et MSF viennent gérer des crises qui emportent amis, parents, proches.

Depuis trente-huit ans on en est à crier au complot, comme pour le sida, comme pour Boko Haram : « C’est les Blancs qui ont inventé l’affaire là ».

Qu’ils trouvent un remède ou assimilé et c’est reparti : « Pasto nous avait bien dit que c’était leur virus ! Le vaccin là sort d’où ? » ceci dit, on court à la mosquée prier !

Quand ça se complique on en est à créer des campagnes pour leur demander leur sérum, oui messieurs les Occidentaux #GiveUsTheSerum ! Comme si depuis trente-huit ans qu’Ebola sévit en Afrique, les Occidentaux avaient attaché les mains des Africains et lobotomisé leurs chercheurs au point de les empêcher de trouver un remède. Comme pour Boko Haram, on en est à chercher outre-mer le remède à un problème qui sévit en Afrique.

Si on n’est pas en face d’un cas concret de sous-développement, pire, de pauvreté spirituelle, dites-moi ce que c’est ?

Dans les années qui viennent, quand ce virus trouvera enfin remède, car oui il trouvera, j’imagine ce dialogue entre les capitalistes des sociétés de production de vaccins et nos Etats dans le rôle de la Fourmi :

Mais que faisiez-vous durant trente-huit ans ?

Nuit et jour à tout venant, je chantais #GiveUsTheSerum

Vous chantiez ? J’en suis fort aise

Eh bien payez maintenant ou mourrez !

Et on payera. Et ce sera un nouvel axe d’aide au développement, de « Coopération ». Comme pour l’électricité, comme pour l’eau, comme pour tout…

Des habitudes du Moyen Age

Depuis trente-huit ans, on se demande, mais où sont-ils donc ces chercheurs africains ? En Europe me souffle-t-on dans l’oreillette.

Où est cette recherche ? On me souffle que les gens ne mangent pas à leur faim et on va parler de financer la recherche ?

Mes frères ! Où sont nos laboratoires ? Je ne les vois pas. On me souffle qu’il suffit d’ouvrir les yeux pour voir cette floraison de labos de produits « éclaircissants »…

Hé Dieu ! C’est toi qui nous reste, toi et nos yeux pour pleurer. Oui, j’ai envie de pleurer quand j’entends le gouvernement camerounais donner aux gens le sempiternel conseil :  » Lavez-vous les mains avec du savon « . Mais en donnant ce conseil, il serait judicieux que le même gouvernement nous donne les chiffres concernant l’approvisionnement de notre pays en eau courante. Là mes frères, on va bien rire puis aller se laver les mains dans le Mfoundi.

C’est hallucinant, mais ce pays me fait penser à mon voisin, celui qui s’est acheté une voiture de luxe, une Lexus, mais qui n’a pas prévu que les voitures se rangent dans un garage. Mon voisin qui a fait venir un neveu éloigné du village pour dormir dans sa Lexus, qui elle-même dort sur le trottoir devant sa maison. Le neveu antibandits, je l’appelle.

Je ris.

On vit en 2014 avec des habitudes du Moyen Age. A voir comment les Camerounais vivent, on se demande s’ils n’ont pas envie d’abréger leurs jours, de partir rapidement, bref, d’en finir :

On a les pisseurs fous qui croient que même en centre-ville, touffe d’herbe et mur riment avec pissotière.

On a les tenanciers des bars qui ne comprennent pas que tout autant que les tables, les toilettes sont des lieux à entretenir. Ces tenanciers de bars qui nous font pisser en apnée tellement ça pue dans leurs antres pleins de germes.

On a ces braiseuses de poisson qu’on a envie de gifler lorsqu’elles mettent du plastique sur leur brasero pour présenter leur poisson. Du plastique qui fond doucement pour aller assaisonner le poisson d’effluves cancérigènes.

On a nos vendeurs de soya, cette délicieuse viande braisée qui l’emballent dans du papier encore poudreux du ciment qu’il a contenu, oui, du ciment ! Si ça se trouve, ça fortifie le goût de la viande.

On a ces marchés puants et sales où les gens vendent des vivres par terre, au nom de « ça va passer dans la marmite, le feu tue tous les microbes ». Et puis même hein ? « La saleté ne tue pas l’homme noir ».

Prions, fort, très fort, car Ebola est à nos portes

Résultat des courses, alors qu’on met devant l’opinion publique la menace d’Ebola, on parle peu du fait qu’en 2014, le choléra, oui le choléra a déjà tué près d’une centaine de personnes dans le Nord sur près de 1 500 cas décelés jusque-là. Oui, comme ça, sans qu’il y ait une catastrophe particulière à part l’absence d’adductions d’eau et de latrines… Sans qu’on soit au Moyen Age…

Prions mes frères, car en 2014 au Cameroun, on peut avoir un iPad, une montre connectée, la télé par satellite, mais mourir sur une table d’opération à cause d’une coupure de courant ou choper une maladie nosocomiale parce que l’hôpital n’est pas alimenté en eau !

Oui, prions mes frères ! On n’est toujours pas parvenu à éliminer le malheureux moustique vecteur du paludisme qui tue des milliers d’enfants chaque année. Au lieu de ça, on attend les sous de la Fondation Bill et Melinda Gates au nom desquels on fait danser Petit pays et X-Maleya. Comme si crier « Ayooooé Malaria ! » a déjà tué un seul moustique dans l’histoire de l’humanité.

Oui, prions mes frères ! Pour ces milliers de femmes qui meurent chaque année de complications liées à l’accouchement, l’Iford parlait dernièrement de 6 000 décès, prions pour que ce chiffre ne soit pas vrai mes frères.

Prions, fort, très fort, car Ebola est à nos portes. Il frappe, impatient de retrouver ses cousins, palu, sida, choléra… Endurcissez vos cœurs mes frères, prions pour qu’il passe, avec sa malchance et ses morts. Prions beaucoup, mes frères, car on a d’ores et déjà notre lot quotidien de problèmes. On n’a pas demandé de supplément.

Prions pour que l’Emergence promise arrive vite. Vu qu’elle soignera tous les maux du Cameroun : bêtise, corruption, mal gouvernance, absentéisme au sommet, peut-être que dans le package les grands sorciers du Renouveau incluront Ebola.

A défaut de la science, je le déclare mes frères, au nom de la Castel, Ebola esquivera le Cameroun !

Amen !


Je suis camerounaise, je suis une panthère

Qui va se négliger ma copine?

Certaines femmes me détestent. En bloguant, je suis très souvent tombé sur des représentantes de l’autre sexe, le prétendu faible, qui ne se cachent pas pour me faire savoir qu’elles haïssaient le ton machiste, sexiste et limite misogyne de mes textes. Je serais un mâle en mal de domination (le jeu de mots est de moi hein?) qui cache ses petites couilles derrière des textes pourris. Hé Dieu! On insulte ta créature tu te tais?

L’une des raisons de ce matraquage  est le fait que je persiste à appeler les femmes « lianes ». Terme moyenâgeux selon ces amazones, guerrières du genre qui y voient une connotation que moi-même « l’inventeur » je ne perçois pas. Les critiques hein?

Liane n’est pas un mot péjoratif, j’ai voulu mettre dans ce terme tout le bien que m’inspire la femme camerounaise, douce au regard comme au toucher, souple quand elle est verte, rigide quand elle est sèche, mais qu’on aime peu importe son état. Mais ne croyez pas que je veuille être gentil, la liane a son pendant négatif: la panthère. Oui laissons un peu les lianes et à travers cette chronique animalière, découvrons le félin le plus redoutable de la jungle camerounaise.

De l’espèce panthera, de la sous-espèce panthera negra, la panthère camerounaise n’est pas forcément noire. En effet, l’utilisation d’une gamme de produits « éclaircissants » peut très vite la transformer en panthère couleur fanta-coca. Idéal, car dans la jungle camerounaise, les mâles raffolent de la couleur blanche… Signalons néanmoins que nous devons cette mutation génétique aux laboratoires Biopharma, Nobel du cancer en vue…

Une panthère est une femme intéressée, une camerounaise qui chasse le gibier le plus pervers du monde: le mâle plus ou moins fortuné. Non reconnaissable à son pelage, comme nous l’avons mentionné plus haut la panthère se reconnaît plus à ses attributs et accessoires qu’à autre chose : smartphone Samsung ou Iphone dernier cri, tablette haut de gamme pour se mirer, Louboutins interminables, sacs à main hors de prix aussi grand qu’un conteneur, mèches de toutes les nationalités sauf camerounaise, la panthère est branchée! Pas forcément belle mais avec du style. Le dénominateur commun de tout son attirail étant le fait qu’elle n’ait rien payé et se soit tout fait offrir. La devise de la panthère pourrait être « Qui va se négliger ma copine ? ».

Comment savoir qu’on est en face d’une panthère? Le caractère de cet animal se révèle très tôt. Dans la cour de la maternelle déjà, la panthère mange le pain de Toto son petit camarade de classe et garde le sien pour plus tard. Au lycée, la panthère fait faire ses devoirs par Mboutman contre un sourire, en fac la panthère convainc Mougou de faire ses TD. Votre panthère de voisine vous fait porter son régime de plantain sous le soleil pendant qu’elle est sous l’ombrelle. Des signes précurseurs qui laissent deviner le futur caractère de l’animal qu’on a en face de soi.

En couple la panthère, ne paie rien, « tu es l’homme non? Il faut payer, même si je travaille! »

Au travail, la panthère se contente d’entrer dans les bonnes grâces du patron et d’exister à travers lui : Gervais, pardon, le patron a dit que tu dois…

Ambitieux, avide et dénué de tout scrupule, c’est un animal à sang froid. Oui, capable de croquer le bendskinneur (ah oui une moto équivaut à 3 000F de recette journalière, ça peut servir pour l’achat de vernis hein?) comme le milliardaire le plus fortuné (demandez à Eto’o), la panthère ne rit pas, sauf quand on la paie pour. Potiche qu’on sort et qu’on traîne dans des soirées sélect ou ennuyeuses, la panthère captive le regard, fascine, tue. Elle est partout où il faut être, car elle a des proies partout où il faut. Concerts hors de prix, soirées VIP et hautement sélect, la panthère, vit et croque la vie avec son bantou de compagnon.

Sur les origines de l’animal les théories abondent mais jusqu’à présent aucune n’est assez crédible pour expliquer comment de femme forte et garante de la stabilité de la société, la camerounaise a muté à l’état de panthère. Des légendes racontent que dans des temps anciens, bien qu’absente des débats masculins, c’est la femme qui façonnait dans l’obscurité d’une cuisine ou d’une chambre à coucher les paroles que son mari prononcerait en plein jour. Personne ne sait comment cette même femme s’est retrouvée de nos jours à l’état de pot de fleur sur pattes, de panthère, sûrement la faute à la Fecafoot, ils sont coupables de tout ces gens-là.

Les institutions en charge de la faune sont par ailleurs inquiètes, car la nature dans le souci d’équilibrer les choses a engendré une mutation des hommes. En effet, certains mâles sous le coup de la fascination panthérologique se réveillent un matin avec une seule idée : fuir au plus vite l’envoûtement de l’animal. Certains, les célibataires, atteints du syndrome bamiléké enverront de toute urgence une photo d’eux au village pour que leur mère leur recrute une jeune vierge procréatrice. Les autres, les mariés rentreront tout simplement dans le giron de leur femme, pagnes Wax dans une main, bijoux dans l’autre en chantant « me voiciiii, chérieeeee, me voici comme un enfant »

Délaissée, la panthère aura deux réactions déterminées par la façon dont elle aura géré son gibier :

Si au-delà des Louboutins, tenues de luxe, resto chics et autres gadgets, la gourgandine aura su mettre des fonds de côté et investir dans un commerce rentable ou se dégoter un job grâce aux relations du pigeon, elle n’aura qu’on commentaire: « un chien vert comme ça! Il me donnait même quoi ? ».

Si par contre, abandonnée à son tourbillon de luxe et de vampirisme fiduciaire, la belle se retrouve privée d’eau à cause de la fermeture du robinet de F  Cfa, ce sera le début d’une longue action en justice: sit-in devant le domicile du gars avec des pancartes portant #BringBackMesFesses #BringBackMesSeins. Accompagnées de la phrase-slogan : « il m’a perdu le temps ». Hé oui! Messieurs, la location de vagin coûte cher à Yaoundé!

Pour finir, il faut relever que la panthère est anthropophage, elle mange ses congénères. Dans toutes les affaires impliquant des femmes, on ne l’entend pas parler du statut de cette dernière. On n’entend pas des femmes dignes de ce nom frapper du poing sur la table pour réclamer une quelconque dignité dans leur traitement. Viols, dot, veuvage, politique du genre, excision, repassage des seins, privation de liberté, on n’entend ni ne voit les femmes faire bloc, ni les panthères rugir. Juste des miaulements épars : « Aka! Quand elle mangeait, c’était bon, maintenant il faut supporter! » Etat de choses qui fait dire aux scientifiques que l’espèce aurait encore muté, on ne parle plus de panthère, mais d’esprit de panthère, donc, transmissible.

La jungle camerounaise situe son émergence d’après les sorciers qui la dirigent en 2035, mais il y a fort à parier sur le fait que si la femme camerounaise compte sur l’homo camerounus pour la rendre émergente, celle-ci aura lieu autour de 3035. Qui vivra jusque-là nous dira si dans la foulée la panthère camerounaise aura été classée espèce protégée. Réflexion machiste peut-être, camerounaise sûrement.

« Brise ta chaîne ou endure la, ne tire pas dessus » Jean Rostand [Pourquoi? bah parce que ton homme dort]

Réalisé en collaboration avec National Géographic

Dédié à Stéphanie M. une « féministe » sur le retour qui nous a insultés trop vite.

Texte et scénario Florian « le misogyne » Ngimbis

Peace mes lianes!


Le retour du kongossa

Chers lectrices, chers lecteurs de Kamer Kongossa, toutes mes excuses pour le long silence. Entre les contraintes professionnelles et le froid de Yaoundé qui congèle les célibataires comme moi, difficile de trouver le temps d’écrire. Néanmoins, Août signe le retour de nos billets, croustillants ou non.

Pour la rentrée lundi prochain, on va s’attaquer à des félins via « Je suis camerounais, je suis une panthère ».  A lundi!

Peace!

 

Le kongosseur


Je suis un Lion indomptable, je ne pars pas au Brésil

Volker Finke porte drapeau de facto

Je vais encore parler de foot. Coupe du monde oblige. Depuis quelques jours, le pays revit un scénario que nous autres avons appris à connaître lors des compétitions internationales. Grincements de dents, grèves, histoires de primes… Bref, du cinéma autour de la grande mangeoire qu’est devenu le football au Cameroun.

Coup de tonnerre hier lorsqu’on apprend que notre équipe nationale, oui les Lions Indomptables themselves ont refusé d’embarquer sur le vol qui devait les mener au Brésil. On apprend que la grogne fait date, que la veille, après le match d’au revoir contre la Moldavie, les gars ont refusé de prendre le drapeau des mains du Gouvernement et que comme en 1884 sur le Plateau Joss, c’est un Allemand qui a dû recevoir l’étendard vert rouge et jaune.

Cris d’orfraie, on tire sur ces lions cupides. Avides d’argent.

Je ris.

Pourquoi lorsqu’on parle de patriotisme, on en demande toujours plus aux sportifs, aux musiciens et autres artistes et non au fonctionnaire lambda ou au dirigeant x ? C’est simple : leur aura et leur talent ne sert qu’à cautionner le vol de hautes personnalités cachées dans l’ombre et qui les utilisent comme des marionnettes pour servir de caution à leur cupidité, leur avidité, leur malhonnêteté. Créateurs de richesses qu’ils ne mangent pas, voilà leur « devoir ».

Quel industriel camerounais parce que milliardaire laisserait quelqu’un s’emparer de son bien dans ce Cameroun ? Quel ministre parce qu’assis sur des monceaux d’argent acquis de façon plus ou moins licite laisserait quelqu’un s’accaparer de « son cinq francs » ? Œil pour œil, dent pour dent, les lions ont compris la leçon.

Patriotisme ? Je ris ! Au Cameroun les patriotes sont d’honnêtes gens mais pauvres et méprisés. Quelles valeurs de probité et de moralité cultiver quand les personnes adulées dans la société sont de respectables voleurs à col blanc ou blanchi, voleurs connus de tous et encore plus respectés pour cela ?

On demande du patriotisme aux Lions ? Minalmi ! Durant ce mondial, même les employés de la CRTV regarderont le match sur les chaines étrangères eu égard à la qualité pourrie de leur image qui ressemble plus à un film des années 70 qu’à autre chose. Et les commentaires…

Patriotisme ? Je ris ! Le MINFI a été obligé de signer une note la semaine dernière pour obliger les fonctionnaires en mission à emprunter prioritairement notre compagnie aérienne CamairCo quand ils font semblant d’aller travailler à l’étranger. Ah ! Comme on les comprend ! Quel patriotisme pourrait résister  au luxe et au champagne de la première Classe de Air France ?

Le sacrilège du drapeau remis à un étranger ? Je ris. Dans ce Cameroun, eau, monnaie, électricité, bois, sous-sol, pétrole, port, chemin de fer, qu’est ce qui n’appartient pas à ces étrangers ? Et même cette équipe d’un pays « indépendant » éternellement coachée par un « blanc ». Que n’a-t-on pas cédé, jusqu’à notre amour propre, et pour quel résultat ? Comme on dit, tu dors, ta vie dort et le voisin dort sur ta femme.

Plus sérieusement, je me pose des questions :

Les Camerounais ont-ils inventé le football ? Non.

Les primes sont-elles une exception camerounaise ? Non.

Le Cameroun n’est-il peuplé que de personnes incompétentes incapables de gérer ce malheureux secteur du football ? Non.

Alors qu’est-ce qui fait que depuis des décennies, les questions relatives à la gestion de l’argent du foot en général et des primes octroyées aux footballeurs en particulier posent tant de problèmes ? Sorcellerie ? Non, le vol mes frères. La corruption. Les détournements. Chaque fois dans ce pays, que pour une raison ou pour une autre on met des lustres à résoudre un problème, chaque fois qu’on semble dans l’impasse en termes de solutions, chaque fois qu’on se demande pourquoi le simple bon sens ne vient pas mettre fin à une situation ubuesque, oui chaque fois que ça arrive, c’est le signe que quelque part, des gens dans l’ombre entretiennent un flou artistique destiné à leur remplir les poches et à consolider leur emprise sur un secteur.

La Coupe du monde ? Je ris quand j’entends les gens en parler comme d’un rendez-vous majeur, une « vitrine » pour notre pays et blablabla. La réalité est plus dure et on doit l’assumer : vaste réseau d’immigration, gouffre à fric pour l’administration, délégations fantômes, budgets imprononçables pour emmener des concubines dorer sur les plages de Copacabana. Tant pis pour les naïfs qui persistent à croire que le football n’est qu’un sport, un jeu. Les vampires de l’ombre eux ont compris. Supermarché pour les uns, opium pour les autres et nous le petit peuple, on crie, on danse, on ferme les yeux comme toujours.

On pourrait polémiquer sur le montant des primes. On pourrait polémiquer sur plusieurs aspects de cette histoire d’ailleurs et sur les écarts de conduite de ces Lions que je ne prétends pas défendre. Mais c’est l’arbre qui cache la forêt ! Et cette tendance qui consiste à dire que les Lions manquent de patriotisme, et « n’ont pas pitié des caisses de leurs pays » est une affabulation, montée de toutes pièces par ceux qui sont de vrais prédateurs pour ce pays.

Au moment où j’écris ceci, je me doute bien qu’ils iront au Brésil nos Lions (ils sont finalement partis NDLR), car comme à chaque fois, on aura un plan, un émissaire qui sur « Hautes instructions du Président de la République » se ramènera avec une valise de fonds. On gérera le pays comme on le fait depuis toujours, dans l’urgence et non sur la durée.

Allez les Lions ! Buvez la bière ! Sortez le soir, battez-vous avec vos concubines, et puis réclamez votre argent. S’il ne sort pas, refusez d’embarquer. S’il sort, embarquez et allez vous promener au Brésil et rentrez le premier tour achevé. Ce faisant vous n’aurez rien fait d’exceptionnel, vous serez les dignes monstres du système qui vous a créé. Nous on fait pareil, on boit on danse, et on n’a même pas le courage de nous plaindre comme vous. Eau, électricité, télévision, on paye, on ne voit rien, on se tait. Il y a quoi ? On joue le jeu.

Peace !


Je suis camerounais, je déteste Idrissou

En me réveillant mercredi dernier, j’ai trouvé un peuple camerounais énervé. Dans la rue, dans les taxis, dans les bureaux, il n’y en avait que pour un homme : Idrissou Mohamadou. Joueur de l’équipe nationale de football, notre ami Idrissou a eu un seul tort, lors du match de préparation des Lions contre le Paraguay, le Cameroun, mené à la marque réussit à obtenir un penalty qui, transformé, lui permettrait de revenir au score.

Voilà Idrissou, ignorant du caractère dangereux de sa décision qui décide de tirer le penalty. Un proverbe chez nous dit « la malchance dépasse la mort ». Comme quoi il vaut mieux mourir qu’être malchanceux. La malchance attendait Idrissou au tournant, ou plutôt, au bout de la godasse. Tributaire d’une prestation médiocre (doux euphémisme) durant le match, notre frère voulait sans doute se rattraper. En l’absence du grand 9 Samuel Eto’o notre sauveur, tireur officiel de penaltys, de corners, de coups francs, Idrissou du haut de son ancienneté sûrement (je ne vois rien d’autre) récupère le ballon et voilà notre champion qui s’élance, tire et voit son shoot dévié par le gardien paraguayen.

Fin de match quelques minutes plus tard et dès le soir même, le quidam est livré à la vindicte populaire et celle des médias : à mort Idrissou le « loupeur de penalty ». Le peuple ivre de sang et de rage face aux prestations d’une équipe bancale et sans fond de jeu réclame la tête du jeune homme. A mort ! A mort ! J’ai ri hein. J’ai vraiment rigolé. Les contradictions du peuple camerounais me surprendront toujours.

Jamais dans un pays l’expression « opium du peuple » n’a eu autant de sens. Parfois j’ai envie de me dire que cette histoire de football encore plus qu’ailleurs est une espèce de sorcellerie qui a hypnotisé tout un peuple au point de lui faire perdre tout esprit critique et même la raison. Les exemples abondent hein ? En 2005, j’ai vu des gens ivres de colère rechercher le domicile de Womé Nlend (pas pour le féliciter hein ?) dont le seul tort avait été de louper un penalty synonyme de qualification pour la Coupe du monde.

En 1998, j’ai assisté avec étonnement à la chasse aux « Blancs » suite au refus un but de Omam lors d’un match de Coupe du monde contre le Chili. L’arbitre était blanc, donc, à mort ceux de sa race. J’ai même halluciné en 1994 quand j’ai vu le peuple camerounais manifester dans les rues à cause de la non-sélection de Ndip akem Victor ! Du coup, je m’interroge : que se passe-t-il dans ce pays ? Voilà un peuple, à qui on coupe le courant sans prévenir, un peuple qui meurt aux urgences du fait de l’absence de quelques C fa, un peuple qu’on mâche, broie, écrase sans qu’il ose ne serait-ce qu’élever un petit aïe de douleur légitime, un peuple coutumier des abus et des injustices d’une minorité qui a pris en otage ses richesses, sa justice, sa liberté.

Oui, voilà un peuple qui souffre, mais se tait… pour n’ouvrir la bouche que lorsqu’un Idrissou loupe un penalty. Non ! On se fiche des délestages sauvages, des morts aux urgences des abus, mais non ! Idrissou ne doit pas louper un penalty ! Debout enfants de la patrie ! Le jour de lynchage est arrivé. Lynchons ce vampire ! Massacrons-le ! louper un penalty ! Lors d’un match de préparation ! Pour un Mondial dont nous ne franchirons sûrement pas le premier tour ! Ah non ! Cela ne se peut pas ! Même en empruntant une dizaine.

Camerounais de tous bords, indignez-vous ! On a soif, on peine à se laver. Il n’y a pas d’électricité, Internet court moins vite qu’une tortue, les opérateurs téléphoniques font de la surfacturation à ciel ouvert, le détournement est le sport du pays le mieux partagé, mais non, ne nous en émouvons pas, laissons leur une chance, en 2035 ça ira. Pour l’instant, inquiétons nous de ce football qui va mal. De ces penaltys qu’on loupe. Là réside le mal de notre époque. Les trains peuvent partir en retard, les avions de Camair-Co oublier les bagages, les bus tomber en panne en plein « axe lourd ». Non on ne se plaindra pas, ce sont des choses qui peuvent arriver. 

La police peut nous tracasser pour des affaires de carte d’identité, les rues de nos villes peuvent être parsemées de nids de poule, le planton lambda peut bloquer un dossier important, ça va. On gère. Et puis hein, notre roi est sur le trône depuis trente-deux ans et jamais au grand jamais, durant les élections il n’a tiré à côté ! Notre roi marque toujours. Il faut suivre l’exemple ! Ne nous plaignons pas. Payons nos factures sans rechigner, payons nos impôts sans demander dans quelle poche ils finissent, ni à quoi ils servent, votons sans demander quel candidat profitera de notre vote, mais jamais au grand jamais ne tolérons un penalty loupé. On peut supporter les voleurs à col blanc, les criminels économiques, les coopérants-vampires, les sangsues de la fortune publique, mais jamais ne tolérons un Idrissou dans nos murs.

Quelqu’un m’a dit mon « frère ! Laisse ! C’est un envoûtement collectif », mais des fois, je suis d’avis comme un de mes aînés que tant que le prix du maquereau et de la bière resteront stables, la « paix » sociale ne sera jamais ébranlée dans ce pays. Notre fameuse paix, absence de guerre, mais avec les chiffres d’un pays en conflit. On me souffle dans l’oreillette que le prix de la bière aurait d’ailleurs été revu à la baisse, vous voyez hein ? Assia Idrissou! On aura moins de délestages lors de la Coupe du monde. Même le gouvernement sait qu’on ne peut tolérer les délestages à cette période. Donc, ne viens pas mettre du sable dans notre tapioca, passe avec ta malchance.

Peace!


Je suis camerounais, j’aime AES Sonel

Il y a quelques jours je me suis réveillé au son d’une nouvelle stupéfiante. Jésus, le Nazaréen, celui par qui tout a commencé serait apparu dans un domicile quelque part à Yaoundé. En amoureux du kongossa, j’ai pris mon bâton de pèlerin pour l’aller voir, je n’ai rien vu. Bon, on m’a dit qu’il me fallait des lunettes de vision céleste. Qu’il fallait que je regarde non avec les yeux physiques, mais avec les yeux de la foi. Apparemment ma foi était diaboliquement basse du coup au lieu de la figure altière de notre Seigneur, je n’ai contemplé qu’un mur plein de moisissure. Je suis rentré chez moi déçu. Car oui j’avais espéré un miracle.

Je me demande pourquoi les gens vont chercher si loin des miracles. On a pourtant dans notre société des entités qui à l’instar du Christ font des miracles tous les jours. Moi mon Jésus s’appelle AES Sonel la compagnie camerounaise/américaine de fourniture d’électricité.

Si! Si! Les miracles effectués par AES vont au-delà du paranormal.

Suite à un envoûtement il y a quelques années, nos dirigeants qui soit dit en passant sont prisonniers d’un sortilège d’inertie depuis une trentaine d’années ont choisi de céder la compagnie nationale d’électricité à un consortium américain: AES.

Que ne nous a-t-on pas promis?AES Sonel, à défaut de multiplier les pains, a promis de multiplier les mégawatts. On a dit amen.

A défaut de chasser les démons, ils ont promis de chasser l’obscurité. Alléluia!

A défaut de changer l’eau en vin, ils ont promis avec leur disciple le gouvernement d’utiliser le formidable potentiel hydrologique du pays pour produire de l’électricité. Amen!!!

Ils ont fait ce qui se fait de mieux au Cameroun, les grandes annonces. Sur le modèle de notre Roi, AEs nous a pondu les grandes Illuminations. Un tourbillon d’annonces censées servir de prélude à une vraie révolution énergétique. Centrales thermiques par-ci , mégawatts par là, déficit à combler blablabla. La plupart d’entre nous se voyaient déjà dans un Cameroun changé, éclairé, industrialisé.

Depuis lors on a découvert l’envers du discours, et les béatitudes selon AES-Sonel nous sont apparues dans toute leur splendeur.

Heureux les pauvres en électricité, car le Royaume de l’obscurité est à eux.

Heureux les électrocutés, car ils seront dispensés de douleur.

Heureux les aveugles, car ils posséderont le pouvoir dans l’obscurité.

Heureux les assoiffés et les affamés, car ils seront rassasiés de bière chaude et de nourriture avariée.

Heureux les mougous, ils payeront des factures d’entretien de compteurs à l’arrêt.

Heureux les médecins, leur travail sera simplifié grâce aux coupures de courant pendant les interventions.

Heureux les chauffards, ils seront dispensés de feux de signalisation

Heureux les voleurs et les agresseurs l’éclairage public deviendra obsolète.

Heureux êtes-vous Camerounais quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement que vous industrialiserez votre pays en 2035 grâce à l’électricité.

Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux : c’est bien ainsi que vous ont persécuté la Camerounaise des eaux, Orange, Camtel, CamairCo et tous les autres sorciers établis dans ce pays.

Et ils ont tenu parole!

Ah! Qu’ils sont beaux ces week-ends calmes et reposants ces week-ends de délestage. Pas de télé, pas de radio, pas de lumière, pas de bruit. Le farniente!

Ah! Les fêtes avec AES Sonel. Grâce à eux, je replonge en enfance, avec ce fameux jeu des chaises musicales. Vous vous souvenez? Musique, puis on coupe et le malchanceux n’ayant pas pu s’asseoir est éliminé. C’est ça les fêtes avec AES-Sonel. Que du bonheur!

Ce que j’aime moins, c’est leur slogan. Je ne sais pas d’où vient ce « energizing Cameroon » si loin de leur travail, leurs missions, leurs objectifs.

Je verrais bien un « AES Sonel, Obscuriting Cameroon » ou un « AES Sonel, l’obscurité vue autrement ». Le nom de leur site est plus proche de la réalité. « aessoneltoday.com »  Oui l’électricité au jour le jour. Ne vous souciez pas de demain, si vous avez déjà l’électricité aujourd’hui, chantez et poussez des cris d’allégresse. Amen!

La minute science. (musique en fond sonore façon « c’est pas sorcier »)

Le saviez-vous? Grâce à AES-Sonel, il a été démontré que le couple vent+pluie= coupure de courant. Oui, personne ne sait comment ils ont réussi à énoncer ce théorème, mais son application au quotidien nous a permis d’en vérifier la véracité. Oui oui, dès les premières gouttes, que dis-je? Dès les premiers nuages noirs dans le ciel camerounais, les techniciens de AES Sonel réglés comme des coucous suisses nous coupent le courant. Physique élémentaire selon certains : l’eau et le courant ne font pas bon ménage.

AES a réussi un autre exploit, nous faire regretter la Sonel. L’ancêtre au moins avait le respect des autorités hein? On coupait le courant dans tout le pays, sauf à Yaoundé et à Douala. AES-Sonel ne respecte personne. Le courant part partout.

Néanmoins il ne faut pas voir ça dans le mauvais sens, notre chère compagnie d’électricité a redistribué les cartes sociales. Oui, le Cameroun est un, l’obscurité est une. Plus de pauvres, plus de riches, plus de classes sociales. Bastos, Miniferme, ambassades, bidonvilles, on coupe pour tout le monde. Ce n’est pas beau ça? ça me donne des envies de gueuler l’Internationale.

AES-Sonel nous apporte joie et bonne humeur. Chaque retour de courant plonge la ville dans l’euphorie. Ces cris, tout droit sortis de milliers de poumons pour célébrer le retour de l’électricité. Il n’ya que Eto’o qui fasse mieux.

Et puis que voulez-vous? AES nous fait tant rigoler des incongruités de ce pays, tiens comme dernièrement. Ils doivent être nombreux les Camerounais qui en lisant dans les journaux que le gouvernement voudrait se lancer dans un projet de construction d’un tramway à Yaoundé ont ri. Oui, intéressant jusqu’à ce qu’on se rappelle que tramway là, ça fonctionne à l’électricité. C’est pas amusant ça? Pas sûr qu’on ait consulté notre chère Compagnie avant ça.

Nous devons remercier notre compagnie. Comment leur en vouloir d’ailleurs? Ils nous le répètent chaque jour: nous aussi nous souffrons des délestages! Oui AES souffre, on peut le constater quand en allant payer une facture, on s’entend répondre par la caissière: « Vous ne pouvez pas payer hein? il n’y a pas de courant ». Euye!

Oui à l’image du Christ nos chers compatriotes de AES Sonel ont décidé de souffrir des délestages avec nous. Ils ont choisi de s’infliger ce chemin de croix dans l’obscurité, la rage, l’incompréhension.

Comme nous, ils ont décidé de manger en se demandant le temps passé par la nourriture dans un frigidaire éteint.

Ils ont décidé de regarder les matchs en priant pour voir tous les buts.

Ils ont décidé de se faire opérer en priant pour qu’une coupure n’abrège pas l’opération.

Ils ont décidé de se tourner les pouces au bureau en attendant que le courant daigne revenir

Ils ont décidé de vivre dans un Cameroun tournant au ralenti, sans lumière, sans énergie.

Ils vont même très loin dans ce désir d’immersion hein? Parfois tout leur staff délaisse les bureaux climatisés de leur siège pour aller dans nos bidonvilles faire les beaux devant les caméras de Canal 2. Ils nous présentent leurs têtes à la télé, l’air de dire: vous voyez? Nous sommes des humains comme vous, nous transpirons!

Nous devons les remercier. Nous devons, nous incliner devant l’efficacité de ces gens chers payés pour un travail aussi obscur. Et d’ailleurs ils nous le disent tous les jours hein? Ils ne sont pas les seuls responsables. L’Etat du Cameroun en tant qu’actionnaire a aussi sa part de responsabilité. Mais bon, c’est l’histoire de l’humanité: quand on dit Ali Baba et les quarante voleurs, tout le monde retient le nom d’Ali Baba, les autres voleurs sont des inconnus cachés dans l’ombre.

Et puis comment ne pas applaudir leurs efforts. Easy Light. Ou comment payer l’électricité dans une agence en ligne. Heu… oui sur Internet, heu comment utiliser Internet quand on n’a pas de courant ? Bon, passons.

La vie n’est pas facile hein? Même pour AES-Sonel, ils ont besoin de temps. De beaucoup de temps. L’an 2035 est encore éloigné.

Et puis, l’électricité c’est comme le Christ hein? ça fait plus de deux mille ans qu’on attend son retour, qui mourra de quelques décennies d’attente de plus?

AES-échec, AES-ndèm, AES-obscurité, arrêtez avec ces sobriquets ridicules. Rien ne marche dans ce pays à part les bars, pourquoi en vouloir à notre innocente compagnie? On peut certes avoir des envies de meurtre en avalant une bière chaude, mais bon, ça arrive…

Arrêtez tout autant de dire que AES-Sonel sabote la marche vers l’émergence hein? Construisez d’abord les usines, on verra comment les alimenter en électricité ensuite.

Ah! AES-SOnel, quand les Camerounais marchent dans la vallée de l’obscurité et de la chaleur, ils ne craignent aucun mal. Ils savent qu’à deux heures du matin, l’électricité reviendra. Quand ils seront endormis. Et le jour, pas besoin d’électricité, il y a le soleil , pour éclairer la stupidité de nos dirigeants et l’échec de tout un système.

Amen!


Je suis camerounais, je vais me marier

La femme c’est combien ici? Augmentez le prix! On va acheter!

Quand j’étais gosse, ma mère m’a fait lire la Bible dans son intégralité. J’ai détesté les radotages de prophètes aux noms étranges là, j’ai rigolé de Samson le premier (et sûrement pas le dernier) homme berné par une liane. Job alias Akaomanga l’ancien riche, Jésus le super héros qui fait du waterwalk , version aquatique du moonwalk. Bref, c’était bien. Mais, j’ai tiqué sur cette partie de la Genèse où Dieu endort l’homme et crée une femme, puis ce fameux verset « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair ».

Je suis certain que ce verset est le début de la majorité des problèmes de l’humanité. J’ai un proche parent, qui vivait tranquillement sa petite vie et qui du jour au lendemain a décidé de quitter non pas son père et sa mère, mais sa tranquillité pour aller faire une seule chair avec sa bien-aimée. En un mot comme en mille : mariage.

Un matin. J’essaye de justifier mon salaire au bureau. Coup de fil : ma mère. J’ai envie de laisser sonner. Ma mère qui m’appelle à cette heure, c’est soit les « ton père a fait ceci », soit les « ton père n’a pas fait pas ceci ». Bref, une interminable séquence de lamentations. Bon, je décroche.

Mater : tu sais que ton frère Mboutman se marie bientôt ? Il doit aller demander la main de sa go dans un mois.

Moi : euye !

En une décision, matérialisée par une phrase, le destin de Mboutman venait à son insu de basculer du côté obscur de la force.

Quel est ce conditionnement psychologique qui fait qu’un mec à peine sa situation financière stabilisée n’a de réflexe que la recherche de l’instabilité ? Ne me sortez pas vos « le mariage c’est la stabilité » machin, je fréquente des hommes mariés, et même quand ils rient on a l’impression qu’ils pleurent.

Le mariage en réalité est une oasis dont les puits sont asséchés. Comme si ça ne suffisait pas, pour y parvenir, il faut traverser un désert parsemé d’embûches dont la principale a pour nom la dot. Donc, quand j’ai entendu mariage, j’ai compris dot.

Coup de fil une semaine plus tard : mon père, le grand sabitou manitou. Le grand-amiral convoque les troupes. Réunion de crise au domicile familial. Ce qu’il faut savoir c’est que l’amour c’est un homme et une femme, mais le mariage c’est une affaire de famille hein ? Donc, toi le gars qui décide de te marier, tu as rang de spectateur, les choses étant gérées par le chef de famille, ton père ou un oncle influent.

Réunion.

Le Pater : Mboutman!

Mboutman : Paaa !

Le Pater : elle est de quelle région ta bien-aimée ?

Mboutman : Eton

Moi+mes frères+ le chat : euye !!!

Ceci n’est pas du tribalisme hein, mais ce qu’il faut comprendre c’est que le tissu ethnique camerounais est tellement dense et divers qu’il importe de savoir l’ethnie d’origine, car de cela dépendra la dot.

Pour le coup, ce n’était pas une bonne nouvelle. Les Eton ont de jolies fille, mais de larges poches.

Mboutman devant nos mines renfrognées nous sort le laïus des gars naïfs : « Ils savent que je sors à peine de l’école, je me cherche encore » blablabla. J’ai eu envie de lui dire mouf ! On t’a dit que le chasseur demande l’âge du pangolin avant de le tuer?

Dans la réalité, l’ennemi (oui la famille de la fille) dispose d’une cellule de Renseignement qui étudie le profil du prétendant, sa famille (antécédents de sorcellerie ou pas ?), ses acquis, ses ambitions, les perspectives de rentrées financières. S’il dispose d’un milliardaire dans sa famille, ce n’est pas le jour du mariage que l’adversaire le découvrira. Rien que le nombre de zéros sur le montant de la dot prouvera l’efficacité du Renseignement.

La bataille de toqué toqué

Le toqué toqué encore appelé tocage en référence à l’action de toquer à la porte est la cérémonie de vol durant laquelle le prétendant vient affirmer ses ambitions et le père de la fille donner ou refuser son accord de principe pour l’union.

Le tocage de Mboutman était particulier : Mboutman et sa go ont déjà un enfant. Les gars de maintenant hein ? Bref, tension palpable. Le père n’a toujours pas digéré l’affront. La mère cause avec ses sœurs, « tu ne peux pas élever l’enfant et l’oiseau vient picorer » Massa ! La mère là sait même qu’on comprend l’Eton ?

Nos agents de renseignement nous avaient prévenus : il dira oui, mais il faut lui graisser sa langue.

Le père inspire, expire. Pour éviter qu’il respire trop longtemps en oubliant de parler, on glisse une enveloppe. Il  dit deux phrases, soupire, se tait, on fait signe à mon frère qui rapproche le respirateur : une autre enveloppe. Ainsi de suite, l’oxygène, pardon, l’argent aidant, le père parle. Au point que pour éviter qu’il parle trop, on est même obligé de le couper avec une autre enveloppe.

Aussitôt l’accord de principe obtenu des messagers juchés sur des coups de fil téléphoniques Orange et MTN galopent jusqu’au village : préparez les listes, on a « un gibier » dans la besace.

Opération dotarossa

Quelques mois plus tard : coup de fil du grand-amiral. Réunion de crise : la liste de la dot vient d’arriver.

En pauvre naïf, notre ami Mboutman croyait trouver dans sa dot des choses simples et symboliques : pagnes, kolas, huile, vin. Ils y étaient tous, mais en plus il y avait des incontournables, porcs, chèvres, sacs de riz et aussi des demandes pour le moins étranges : appareil photo numérique de 16 Mpixels (adjéwa !), Modem internet Camtel haut débit (tu ne connais pas la route de Camtel ?) moto de marque Nanfang (on vous encourage à devenir bendskinneurs?)… Sans oublier de rondelettes sommes en liquide.

La liste des belles-mères aussi m’a fatigué. Au milieu des marmites « macocotes » des filets d’oignon, pagnes « SICAM » et autres, se retrouvaient des demandes comme « une douzaine de caleçons » ou « une douzaine de chaussures ».

Moi : mais papa je dis hein ? La symbolique du caleçon dans la dot chez les Eton c’est quoi n… ?

Un regard de Mboutman m’a fait taire. Faut pas énerver les gens énervés.

A l’issue de la lecture, discours de mon père. On aurait dit de Gaulle le 18 juin 1940. Sauf qu’il n’était pas question d’armes, ni de résistance, mais d’argent, de nkap. Les millions réclamés par les Eton devaient être versés pour maintenir l’honneur de la famille. Quelle famille ? Un gars part chercher les problèmes nous on paie ? Mais bon, je ne l’ai pas dit hein ? Les résistants fusillent les traîtres.

Après avoir promis chacun une quote-part dont j’ai prononcé le montant les larmes aux yeux, le grand-amiral a levé la séance. Lors du prochain conseil d’état-major, il sera question d’élaguer la liste de l’ennemi, et dans un jeu de « donne! Je ne donne pas! » l’amener à réduire de façon drastique ses prétentions. « Surtout en termes de caleçons » ai-je appuyé. Mon argent n’achètera pas de caleçons aux Eton !

Mais cette guerre est usante hein ? Mon frère Mboutman souffre déjà de stress post-traumatique. Il me confiait dernièrement que parfois la nuit il fait ce cauchemar où des vieux Eton le poursuivent tout nus en criant « donne-nous nos caleçons! ». Il m’avouait aussi que chaque fois qu’il passe devant un magasin, et qu’il voit des prix sur des appareils électroménagers par exemple, il ne peut s’empêcher de faire la conversion : ma femme vaut trois télés Samsung plus un réfrigérateur plus…

Le stress qui le rend vraiment malade l’affecte au point que parfois en contemplant les frasques de sa bien-aimée qui bien entendu n’a pas arrêté de rester femme avec ce que cela implique comme caprices, il ne peut s’empêcher de penser « je fais même tout ça pour qui non ? ».

Massa! Dire que le pauvre n’est même pas encore marié qu’il commence à perdre ses cheveux!

Le gars a failli tomber en syncope dernièrement quand on lui a appris que chez les Eton on dote parfois les enfants de sexe féminin nés hors mariage. Une brigade de terroristes envisage même déjà d’inclure la dot de la fillette dans la dot globale. Nous on ne négocie pas avec les terroristes, donc on prépare nos missiles antimissiles Patriot.

Bref, les négociations se poursuivent. Quand je vous annoncerai que je viens d’acheter un pardessus antipoussière, sachez que je vais assister à la dot chez les Eton. on ira avec les pagnes, les chèvres, les porcs, les oignons, mais wallaï! il n’y aura pas de caleçons dans nos bagages.

Courage mon frère! Votre amour triomphera de la bêtise qu’on camoufle sous le vocable « tradition ».

Affaire à suivre.

Peace!

 

 

 

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Je suis camerounais, j’aime la paix

Ce matin dans le taxi j’ai rigolé. J’ai vraiment rigolé.

Yaoundé, 8 heures.

Des grappes de Camerounais vont travailler ou font semblant d’aller travailler (j’ai un voisin qui met une cravate chaque matin et dit au revoir à sa femme pour aller jouer au PMUC donc…).

Un taxi. Cinq passagers. Plus le chauffeur.

L’autoradio braille. C’est RFI la radio africaine mondiale (je me suis toujours demandé ce qu’ils deviendraient si l’Afrique arrêtait de leur fournir toute cette matière…).

Le journaliste prend le ton alarmiste des mauvaises nouvelles qu’on répète depuis des mois, mais qu’il faut faire paraître nouvelles chaque jour :

Centrafrique, les exactions et les massacres se poursuivent dans le nord du pays, la population n’a toujours pas regagné les villages, la présidente demande le maintien de la force Sangaris.

Il y a un bouchon. On poireaute, comment laisser passer pareille nouvelle sans la commenter. !

Et c’est parti. Débat, débat, débat, et puis vient la phrase qui généralement m’énerve : « Heureusement que chez nous on a la paix ».

Akié ! La paix!

Cette histoire de paix me fatigue, me hérisse, m’énerve.

La paix à la camerounaise mérite d’être théorisée, conceptualisée, gravée dans la pierre pour les générations futures.

La paix à la camerounaise c’est l’absence de guerre, mais aussi l’absence de tout. Seulement, l’absence de guerre prime sur le tout.

Quand tu es Camerounais, citoyen d’un pays en paix, tu te lèves heureux le matin. Après une vingtaine d’abdos pour faire partir la bedaine fruit de tes excès  de eru, mbongo et autres espèces protégées, tu tournes le pommeau du robinet : pas d’eau, ok pas d’eau ? Pourquoi se plaindre ? Choisir entre l’absence d’eau courante et les massacres massifs de population ? Je choisis la paix, donc, je ne me lave pas.

Puis tu décides d’emprunter un taxi pour aller justifier ta pitance. Mais là, tu tombes sur la force Sangaris version camerounaise : Garde présidentielle surarmée, véhicules de guerre. Hein ? C’est quoi ? La Seleka serait-elle à nos portes ? Heu non, ils vont juste faire le pied de grue au bord de l’itinéraire présidentiel.

Tu te souviens que tu vis sur le chemin du Roi, et là, il doit aller boire du vin de palme dans son village ou alors présider un énième cinquantenaire d’on ne sait quoi. Pourquoi te plaindre ? Pourquoi ruer dans les brancards ?  Tu es mieux que les Centrafricains qui se font égorger non ? Et puis, la marche c’est bon pour ta bedaine non ? Donc, tu iras au travail à pied, au nom de la paix.

Pendant que tu marches, il peut arriver que tu tombes sur un attroupement : des pompiers qui distribuent de l’eau. Euye ! Tu prends peur : il se passe quoi ? Un Scud est tombé sur Yaoundé ? C’est l’état d’urgence ? Les anti-Balaka ? On te répond non : c’est la saison sèche, il n’y a pas d’eau. Si tu insistes, on te sert la phrase qui tue :  » ll n’y a pas d’eau parce qu’il n’y a pas d’électricité ». Que répondre à ça ? Au moins il n’y a pas non plus des corps en décomposition dans les rues. Tu as la paix, non ? Avale ta salive et marche.

Ah ! L’électricité ! Tout en marchant, tu viens de te rendre compte qu’il n’y a pas de bruit dans les bars qui déversent d’habitude des tonnes de décibels de grand matin. Tu comprends que AES SONEL a encore fait son travail : couper le courant. Tu demandes : qu’y a-t-il ? On te répond : « Un transformateur est tombé à Ngousso ». Euye! La chute d’un transformateur à Ngousso provoque une vague de silence à Odza ! Hum ! tu confirmes que l’effet papillon existe, tu es en paix avec les théories.

A pied, transpirant, dans cet environnement de paix, tu arrives finalement au travail, sous l’œil torve des snipers du Roi juchés sur les toits des immeubles. Tu te sens en sécurité. Ou plutôt tu essayes de t’en convaincre.

Et tu vis ta vie, comme ça, dans la paix quand il y a le courant le soir tu écoutes le discours de paix de ton Roi qui t’informe que l’émergence en 2035 se fera via les conducteurs de moto taxi. Tu ris, béat, heureux, et tu t’en vas boire une bière en remerciant le ciel de t’avoir fait naître dans un pays si pacifique.

La Paix. Je ris hein ? Je le disais dernièrement : ce n’est pas la pseudo tranquillité de notre pays qui m’inquiète c’est la fragilité qui constitue la base de cette « pax camerounia».

Ma ville Ongola que j’aime tant par exemple est  un exemple de ce qu’on pourrait qualifier de « vernis civilisationnel ». Si d’aventure il prenait envie à une quelconque Seleka de la bombarder il ne faudrait pas beaucoup de bombes pour qu’elle tombe hein ?

Une bombe à la poste centrale : la ville est coupée en deux. Malheureusement Yaoundé est une ville bâtie en étoile autour d’un centre névralgique : le rond-point de la poste centrale. Une bombe là bas et c’est le chaos. Ce n’est pas moi qui le dis, les déplacements du Roi qui choisit très souvent de barrer cet endroit le prouvent à suffisance.

Une bombe sur les transformateurs AES SONEL de Ngousso et pffft ! Plus de courant. Corrélation immédiate, plus d’eau. Comme  on nous le dit, pas d’électricité pas d’eau. Ne nous a-t-on pas révélé un jour qu’« un arrêt de la station [d’akomnyada] pendant cinq minutes peut provoquer des coupures d’eau dans certains quartiers de Yaoundé pendant trois jours » ? Lisez seulement ici.

Une autre petite bombe sur le maigre ruban qu’on appelle axe lourd Yaoundé-Douala , et hop ! Plus de liaison avec Douala. Encore que sur le coup, je préconise une maigre bombe sur le pont français à Edéa pour en finir aussi avec la voie ferrée. Il en faudrait plus pour en finir avec le pont allemand plus solide, mais j’ai confiance, une seule bombe et le français se couchera. Donc, plus de liaison avec le port, plus de liaison avec la Sonara, plus de carburant, bref, la fin.

Une chose est sûre ! Avec trois bombes seulement on peut mettre à terre les infrastructures de base : énergie, communications, eau, télécoms, mais ce ne sera pas suffisant pour en finir avec Yaoundé. Oui tant qu’il y aura des bars et des débits de boisson, cette ville ne tombera pas. Rien que pour en finir avec Essos par exemple, il faudra un tapis de bombes et pour chaque quartier, chaque bloc, chaque maison, chaque gargote, il va falloir se battre. Oui tant qu’il y aura de la bière, Yaoundé tiendra.

Et j’imagine notre Roi, après un bombardement, dressé sur un bendskin, ces motos qui sont, d’après son discours, l’avenir de la jeunesse camerounaise, tel Churchill en train de haranguer la foule, une Castel à la main : «Camerounaises, Camerounais, tant que la bière coule, le Cameroun respire !!! ».

Conducteurs de moto-taxi endormis sur leurs engins. Voici la Pax Camerounia.

Oui, c’est ça notre paix. La paix des Grandes Illusions. Pas de bombes, pas de couteaux, pas de Seleka, pas d’anti-Balaka, pas de Sangaris, juste la précarité, la maladie, les injustices, le chômage, les morts précoces, la galère, la corruption. Mais il ne faut pas se plaindre, sous peine de passer pour un insatisfait, un opposant qui veut troquer la bonne vieille paix contre l’anarchie, la guerre. Paix= Notre Roi, Changement=Chaos et guerre. La lobotomie parfaite!

Pourquoi devrions nous nous contenter du peu, du médiocre alors que la richesse de notre pays nous prédispose à être un peuple « en haut » comme on dit chez nous? Hein? Pourquoi?

Bon, malgré tout ça, il paraît qu’on veut atteindre l’émergence en 2035. Sans eau, sans électricité, mais avec la paix. Bon il faut quand même y aller. Sauf que comme je l’ai déjà dit, j’ai peur qu’en 2035 on se rende compte qu’« émergent » est le nouveau nom de la pauvreté et là, on se souviendra des menteurs d’aujourd’hui.

Peace !


Je suis camerounais, je soutiens Ebene Duta

Tandis que je somnolais dernièrement, j’ai entendu dans un grésillement radiophonique une nouvelle qui m’a fait écarquiller les yeux. La ministre des Arts et de la Culture, dont le seul travail semble consister à gérer  les histoires de droit d’auteur musical annonçait la création de deux organes pour faire semblant de régler l’interminable querelle autour de cette histoire : un comité de redressement et un comité de normalisation. J’ai ri hein? J’ai ri de rage et de pitié.

Un seul mot : ECHEC. L’échec de la mise sur pied d’une véritable politique culturelle au Cameroun. L’ échec d’un système dont les rouages pourris et larvés sont plus préoccupés par les questions d’ego et de corruption. Tout se passe comme si le droit d’auteur était né au Cameroun et qu’on ne pouvait s’inspirer de ce qui se fait ailleurs.

Le pire au milieu de cette cacophonie ce sont les « artistes » ces clochards qui quand on leur tend le micro ou la plume ont pour premier réflexe comme dernièrement de « remercier » le chef de l’Etat pour les trente ans de périclitation de leur catégorie sociale. Ne me demandez pas si je mens, lisez vous-mêmes.

Heureusement, au milieu de cette puanteur, il y a des jeunes qui font leur chemin, qui cherchent devant la faillite du système de nouvelles voies, de nouveaux modèles économiques pour émerger d’un environnement où les canaux de production et de diffusion sont rares à cause de la frilosité des investisseurs qui ne comprennent rien à la marche de ce pays.

C’est le cas de la bédéiste Joëlle Ebongue alias Elyon’s qui produit depuis quelques temps sur Facebook La vie d’Ebene Duta, en abrégé LVDD. Une série de minisodes loufoques qui regroupent sous formes de gags les mésaventures d’une jeune Camerounaise loin de son pays. Ebene Duta c’est la personnification du ndèm, de la loose, le tout enrobé d’humour, ce qui a le don de la rendre attachante. Forte de son succès sur les réseaux sociaux, Elyo’ns a décidé de produire 3 000 exemplaires physiques de « La vie D’ébène Duta ».

Elyon’s, comme moi, comme beaucoup d’autres fait partie de ces artistes qui ont trouvé dans le numérique et notamment le blog et les réseaux sociaux une plateforme pour faire connaître son travail. Une plateforme sur laquelle on ne triche pas, où le succès n’est plus le fait des accointances avec un obscur fonctionnaire, grand maître des subventions ou je ne sais quel éditeur amateur de « caleçon en bas, édition en haut ». C’est une plateforme où on est ce que l’on fait, car seul le public est juge et décide ou non de vous faire « vivre ».

Entreprise osée que de trouver des fonds pour mener à bien ce projet, mais que la popularité de son travail rend possible. Je soutiens fermement ce projet et appelle tous les amis des Arts et de la culture made in Cameroun (la vraie hein? Pas cette sorcellerie qui se passe dans les antichambres du MINCULT) à donner un peu d’eux mêmes pour soutenir le projet d’Elyon’s.

Il nous est possible d’esquiver cette culture du caniveau qu’on dit camerounaise par abus de langage. Il nous est possible de choisir ce que nous voulons lire, regarder, écouter rien qu’en le soutenant. Je vous exhorte à rendre possible la venue au monde de La vie d’Ebene Duta. N’en doutez pas, car en vérité en vérité, je vous le dis, il est plus facile de soutenir Elyon’s via un modeste mais, important don, que de faire couler l’eau, même sale dans les robinets de Yaoundé.

Le drame de notre pays n’est pas que nous soyons une bande d’incompétents sans talents, ceci n’est pas vrai. Non, le drame est que ceux qui ont le pouvoir décider, de renverser la vapeur sont justement les plus incompétents et les moins talentueux. Le but d’une initiative comme celle-ci est de changer ça. Ensemble on peut.

Découvrez le projet sur Ulule (le leader européen du crowfunding) et surtout donnez un peu de vous ici pour soutenir La Vie d’Ebene Duta, il ne reste que quelques semaines, mais on peut y arriver.

En plus d’être sécurisé comme paiement vous avez la garantie d’être remboursé si la somme espérée n’est pas atteinte hein? Moi ça m’a coûté 3500F Cfa, ce qui fait:

– Zéro bière au Yao-Ba avec regard méprisant de la serveuse (la petite  bière c’est 5000F là bas!!!)

– une (petite) bière au Black and White avec argent de dépôt pour le taxi en prime.

– 7 bières dans mon bar de quartier (et tu rentres à pied… dans le caniveau).

Bref, ça m’a coûté ça et je ne suis pas mort. Faites pareil, donnez!

Peace!

 


Je suis camerounais, je suis ambassadeur

Voici l’habit des anglos là! (Photo Alain Jocard. AFP)

Mettez un Camerounais n’importe où : Mars, Vénus, Pluton, peu importe, le bonhomme trouvera toujours le moyen de faire parler de lui. J’observe de loin (6000 km, c’est pas petit hein?) l’affaire Dieudonné qui fait couler tant d’encre chez nos cousins gaulois depuis quelques temps et malgré les quasi-injonctions de certains lecteurs de notre blog, j’ai pas jugé bon d’écrire là-dessus.

Donc, ceux qui ont cliqué sur ce lien à cause de la photo en seront pour leurs frais : je fais comme tout le monde : je surfe sur la vague du buzz pour faire passer incognito les vrais problèmes.

Le revoici sur les fuyards de Londres

Juste une chose avant de passer définitivement: pourquoi les Camerounais quand ils partent faire leurs choses là-bas chez les moukalas se sentent-ils obligés de revêtir l’habit des Anglos là? Il ya Dieudonné récemment, mais il y a aussi eu les fuyards lors des Jeux de Londres, vous vous souvenez?  Les Anglos du Nord-Ouest vous font dire que vous pouvez faire ce que vous voulez, mais si l’habit ne fait pas le Camerounais, au Cameroun, on reconnaît un Anglo à son habit.

Donc tandis qu’au lieu de me lancer dans les gauloiseries dieudonnesques, je poireautais devant ma page blanche. J’ai reçu la visite d’un ami ambassadeur. Il m’a dit Ngimbis, j’ai des ennuis. Et tandis qu’il me racontait ses déboires, je me suis rendu compte que j’avais matière à kongossa.

Bon, je fixe le décor.

Ambassadeur : camerounisme emprunté au français. On désigne par ambassadeur un Camerounais qui ayant été mordu par la galère du régime du Renouveau décide d’aller s’installer chez une femme, généralement nantie/aisée/fortunée. L’ambassadeur chauffe la maison en journée, chauffe le lit le soir et n’a de réel bien que celui qu’il avait en arrivant : son vieux complet demi saison.

Au Cameroun, le système conjugal se divise en deux groupes d’inégale importance : les maris qui partent prendre femme et la ramènent chez eux et les ambassadeurs qui quittent le chez eux et vont vivre chez leur « femme ». Voici leur histoire, enfin, je veux dire l’histoire du second groupe.

Généralement, l’ambassadeur est un type qui suit à la lettre la parole biblique : « L’homme quittera son père et sa mère [et son taudis] et s’attachera à une femme [et à son porte-monnaie] ». Qui pourrait lui en vouloir d’être chrétien?

Mais ce n’est pas facile hein ? Pour parvenir à avoir un poste à l’étranger, il faut persévérer. L’ambassadeur travaille. Ciblage de la proie, investissement de ses dernières économies dans une garde-robe soigneusement entretenue. Et puis il y a l’arme fatale : le verbe. Au commencement était le verbe, jamais phrase ne fut plus vraie. Si l’ambassadeur n’est pas diplomate de carrière, il est un baratineur né. Il parle, il ment, il se ment, et les plus forts mentent tellement qu’ils se retrouvent en train de croire à leurs propres mensonges. Dédoublement de personnalité, schizophrénie, du grand art quoi !

Puis il franchit un cap, il atterrit dans le lit de la concubine. Pas assez. Lui, il veut rester. Il veut profiter de tout à plein temps. De l’argent de poche généreusement versé, de l’alimentation dite moderne qui le change de son bâton de manioc constipant, du micro-onde, de la voiture, de l’écran plasma, de Canalsat, de la douche qui obéit comme par miracle quand on lui demande de l’eau, bref, son petit luxe. Du coup il applique la fameuse phrase : forniquer plus pour gagner plus. Et ça marche. On le présente partout comme « mon gars » et pour les chanceux « mon chou ».  (Je sais pas si vous avez remarqué, mais en 2014, les amoureux camerounais s’appellent « chou ». L’amour végétarien nouvelle tendance?).

Il a le devoir d’être un gars moderne, il fait des blagues intelligentes… quand il peut, se tait quand il ne peut pas. Il doit être capable d’embrasser la belle devant les gens, et ce même si elle n’est pas belle.

Et puis il ya les tests d’honnêteté.

Un billet de 10 000 francs Cfa faussement oublié sous l’oreiller. Si encore présent au retour +1

On lui confie l’argent du njangui à aller remettre à une copine. Si pas de détour par un bar +10

On lui confie la voiture. Si pas de « on m’a agressé, on a arraché » +1000

Et puis un jour, la sentence. Généralement aux aurores, après une nuit de transpiration suite à des jeux d’adulte : chéri, chou, pourquoi tu ne t’installerais pas ici ?

Une seconde de fausse hésitation. Et puis l’acquiescement façon question pour un champion : oui ! Je reste !!!

Ok chéri chou, voici de l’argent achète toi de vrais vêtements et vire moi la poubelle que tu as sur le corps là!

Le diplomate devient plénipotentiaire. Paresseux comme un chat, il se prélasse toute la journée dans un canapé, armé de son arme favorite: la télécommande, la fameuse zapette.

Traînant en caleçon dans l’appartement entièrement équipé de sa belle, il est logé, nourri, blanchi, son seul travail se limitant à  réchauffer la bouffe congelée que sa belle aura pris soin de lui préparer la veille. Mon chou, ton déjeuner est dans le frigo, je vais bosser.

Bref, ça c’était l’endroit de la médaille.

Le revers.

Il faut croire que tout ne va pas pour le mieux dans le monde des ambassadeurs. La belle n’est pas gentille tous les jours.

Moindre saute d’humeur, moindre mot plus haut que l’autre et l’ambassadeur risque d’être rappelé au triste souvenir de son origine. Il trouve alors sa vieille valise (celle qu’il avait en arrivant) posée sur le palier et semblant lui dire « mbom ! on rentre ».

Au lit, si au début c’était l’explosion, très vite l’ambassadeur se rend compte qu’il a obligation de résultat. Et quel résultat ! Très souvent la belle n’est pas belle, ce qui n’a aucune sorte d’emprise sur son appétit sexuel qu’elle compte assouvir par tous les moyens. Ou alors c’est une espèce de frigidaire sur pattes qui compte réveiller cette chaleur longtemps oubliée dans les bras de son Excellence.

Du coup, son Excellence vit une vie de vampire, somnolant en journée et se goinfrant devant la télé, chevauchant et culbutant sa génisse surchauffée durant l’interminable nuit. « Tu as mangé non ? Viens ici, moi je mange ma part ! ».

Dès lors, il lui faut des exutoires, car en plus d’être vigile le jour, il lui faut accepter de se coltiner son boulet dans des soirées où des gens parlent de choses qui ne lui disent rien.

Et puis il y a sa tablette Samsung cadeau d’arrivée sur laquelle sont marqués ses dix commandements.

  1. Quand mes amis viennent à la maison, pardon, tu t’habilles.
  2. Comme c’est moi qui cuisine, toi tu as le devoir de laver les assiettes.
  3. Si je te vois avec une fille, tu portes seulement ta valise (celle avec laquelle tu es venu), tu rentres chez toi.
  4. Quand je suis avec mes collègues, même si on te pose une question, pardon, n’ouvre pas la bouche.
  5. Le jour où ma mère vient ici, pardon, va boire une bière tu reviens après.
  6. Si l’une de mes connaissances te demande ton âge, fais comme si tu étais muet.
  7. Jusqu’à ce que je te trouve un boulot, si on te demande ce que tu fais, réponds « les affaires ».
  8. Je ne veux pas voir tes amis bandits ici.
  9. La nuit, tu dors si seulement je le décide.
  10. Je n’aime pas le plastique, donc dès demain, va faire tes tests de maladies vénériennes.

Voilà comment le paradis de notre ambassadeur se transforme en enfer douillet. Ses amis boivent ses bières apprécient son embonpoint, mais l’appellent gigolo en ricanant dans son dos. Il veut parfois recoller les couilles qu’on lui a sciées, mais quand il repense à la vie sans wifi, sans Canalsat et sans frigo plein, il se dit que tant qu’à vivre, autant vivre sans testicules.

Organigramme du corps diplomatique :

Les ambassadeurs de l’Union africaine (ils sortent avec les Noires).

Les ambassadeurs de l’Union européenne (ils préfèrent les Blanches).

Les ambassadeurs avec mission d’attachés culturels (ce sont des artistes).

Bonne année à tous mes amis ambassadeurs de par le monde. On se voit à la cérémonie de présentation des vœux, au palais présidentiel, l’année prochaine, si vous tenez jusque-là. Et je réitère ma position : je vous soutiens.

Peace !


Laissez les fesses de ma camerounaise respirer

Tout ce que Dieu fait est bon!

Ah! Mes frères! Quel drôle de pays que celui dans lequel nous vivons. Au commencement étaient les crevettes, les crevettes étaient dans le Wouri, les crevettes attirèrent les portugais. Dieu vit que cela était bon. Ainsi naquit le Cameroun.

Puis on eût les allemands, les anglais et les français. Ils vinrent, ils restèrent et puis partirent (ou presque).

Le diable jaloux, alla murmurer dans l’oreille de notre seigneur: « Seigneur regarde, dans un seul pays, ils ont le kouakoukou, le soya et ils auront Samuel Eto’o, fais quelque chose pour équilibrer les choses! ». C’est ainsi que Dieu après le Grand Berger nous envoya le Roi Lion, il vint et il resta. Mais il ne vint pas seul, au fil des années ou des décennies il s’entoura d’une foule d’anges/démons censés être ses ministres mais dont on ne sait jamais s’ils servent le bien ou le mal. La semaine dernière, on a appris par la très sainte Bible d’Etat, le quotidien Cameroon Tribune que sept anges de notre Roi avaient opéré une sortie médiatique aux frais de la maison de Dieu pour une conférence sur le thème: « Halte à l’indécence vestimentaire chez les jeunes filles », conférence insérée dans le cadre du lancement de la « campagne nationale de lutte contre l’indécence vestimentaire chez les jeunes filles ».

Oh mes bien-aimés! Oh mes brebis! Indécence. Un mot un concept avec lequel je suis d’accord. L’indécence a envahi ce pays. On la retrouve à tous les coins de rue, à tous les carrefours. Car de voir sept ministres de la république se réunir aux frais des deniers du culte, pour parler de mode et de vêtements, voilà l’indécence. Sept ministres parmi ceux dont les postes ministériels sont soit les plus amorphes soit les plus sujets à controverse trouvent néanmoins le temps de nous parler jupes et falbalas.

Alléluia!

Ô Inquisiteurs! Ô protecteurs non mandatés de la morale, laissez-nous tranquille. Sauvez-vous vous mêmes d’abord avant de penser à nous sauver. Sauvez l’éducation nationale de l’indécence de ces taux de réussite au baccalauréat ajustés et réajustés pour faire de nos universités des réceptacles de cancres. Sauvez la culture camerounaise madame la Ministre de la Culture, épargnez à nos yeux l’indécence de ces artistes clochardisés, de ces salles de cinéma inexistantes, de cette politique culturelle invisible. Sauvez la femme camerounaise madame la Ministre de la promotion de la Femme et de la Famille (grande initiatrice de ce sabbat), cette femme qui meurt des suites de violence conjugale dont vous ne parlez pas beaucoup, cette fillette dont les viols incestueux demeurent tabous, cette gamine dont on « repasse » les seins, cette nubile qu’on excise encore dans le Septentrion de notre pays, voilà l’indécence à combattre.

C’est valable pour tous les autres. Pour la soixantaine de ministres de notre pays qui n’arrivent pas à gérer vingt malheureux millions d’habitants.

L’indécence c’est nos quartiers sans électricité. Nos pompes sans eau. Nos hôpitaux/mouroirs.

L’indécence c’est Jean Paul Akono mendiant son salaire et s’éteignant à petit feu dans l’indifférence générale.

L’indécence c’est la route Mvog Mbi-Mvog Atangana Mballa bourbier malodorant que personne ne veut bitumer.

L’indécence c’est Yaoundé qui s’arrête parce qu’un seul homme passe.

L’indécence c’est nos héros oubliés. Le père de notre indépendance, oublié, célébré chaque année par une bande d’irréductibles.

L’indécence c’st notre culture à la rue, nos artistes, talentueux, mais exilés car méconnus chez eux.

L’indécence c’est notre jeunesse qui en troupeau compact frappe aux portes de l’immigration.

L’indécence c’est de voir la population d’éléphants de tout un parc animalier exterminée par des hordes de braconniers étrangers en toute quiétude.

L’indécence c’est notre forêt séculaire pillée. Ces grumes qui ne nous enrichiront jamais et qui s’en vont là bas, chez les autres.

L’indécence c’est nos frontières, poreuses à souhait, nos compatriotes tués, enlevés par la Séléka, sans que les griots locaux daignent en parler.

L’indécence c’est notre sécurité sous-traitée via le colon d’hier, notre économie « APE-isée ».

Contemplez l’indécence de ces milliers de camerounais qui meurent de paludisme dans le septentrion parce qu’on attend que d’autres viennent à coup de millions massacrer un misérable moustique.

Quelle forme d’indécence n’avez-vous pas constaté dans la société camerounaise au point de vous attarder sur la moins visible de toutes?

Laissez la femme camerounaise tranquille. Laissez-la nous montrer ses fesses, ses seins, ses reins, ses cuisses. Elle les a beaux. Encore plus beaux que vos défroques de voleurs, que vos mines de courtisans, vos dégaines hypocrites.

Hypocrisie d’hommes de Dieu concupiscents qui bénissent le démon politicien et crachent les flammes de l’enfer sur la femme qui ose se pointer à l’église en talons.

Hypocrisie du violeur qui prétend qu’il viole parce qu’on l’a tenté.

Hypocrisie de la société qui veut transformer  un être humain en marchandise cessible de génération en génération

Hypocrisie, d’une classe politique qui n’arrive même pas à respecter une politique du genre que personne ne l’a forcé à établir.

Hypocrisie d’une masculinité qui ne s’assume pas. D’un peuple de couilles-molles qui se cache dans le troupeau pour draguer, derrière les convenances sociales pour aimer, derrière des conférences sans objets pour cacher son impuissance face aux vrais problèmes.

Ah mes frères! Moi Florian Ngimbis, quand je marche dans la vallée de Nlongkak, je ne crains pas le soleil qui braise mon crâne, la rareté des taxis ne m’effraie pas car, la vision de toutes ces compatriotes aux cambrures fantastiques  révélées par des jupes et des culottes au ras des fesses me rassure: pour le camerounais que je suis, la vie vaut la peine d’être vécue.

Quand je poireaute dans un taxi surchauffé et que les têtes des cinq occupants se retournent pour contempler la naissance des fesses d’une jolie gazelle qui exhibe son string sur le passage clouté, je me dis: ô seigneur! Regarde comme ils sont beaux les enfants d’un même père.

Alléluia!

Oui, corbeaux inquisiteurs qui voulez nous ramener des siècles en arrière, sachez que les kaba ngondo dont vous voulez affubler nos trésors ne sont pas d’origine africaine. De quel puritanisme vous réclamez-vous? Salem c’était hier!

Si vous voulez faire vos intéressants avec ce concept d’indécence, arrêtez donc tous ces vendeurs de films porno, qui étalent impunément des images obscènes sur les trottoirs de notre centre ville, créez donc une police du pipi qui amendera tous ces pisseurs qui croient que touffe d’herbe et mur riment avec toilettes.

Laissez ma camerounaise tranquille, vous hommes et femmes de peu de foi. Ôtez-nous l’espoir, ôtez-nous la bouffe, laissez les nids de poule se multiplier, pillez les caisses de l’Etat, construisez des châteaux à vos concubines,  mais laissez nous nos visions de corps à moitié nus, prémices d’un paradis à venir. C’est trop demander?

Ne dit-on pas que vox populi vox déi? Faites donc un référendum sur la question! Nous vivons dans un pays où l’espérance de vie dépasse rarement les cinquante ans. Laissez-nous profiter de la vie merde! C’est facile?

Tout ce que Dieu fait est bon. Il a créé ces jolis derrières, ces seins lourds et pointus, ces cuisses interminables, pourquoi les cacher? Pourquoi remettre en cause la Création?

Béni sois-tu Seigneur car, lorsque tu t’es reposé le septième jour, les chinois ont pris le relais et nous ont pondu ces délicieux vêtements qui dévoilent plus qu’ils ne cachent. On leur dit merci.

Je fais un rêve, qu’un jour, les camerounaises de toutes origines, kirdi, beti, bamiléké, bassa, sawa, bamoun, se promèneront ensemble en jeans taille basse, string au vent (ou pas) dans les rues éclairées de Mvog Ada, dans les ruelles goudronnées de Mbog Abang, je rêve de ce jour où elles feront des concours de t-shirt mouillés car il y aura de l’eau dans les robinets d’Efoulan.

Messieurs et dames de l’Inquisition, chers Torquemada, taisez-vous. Le chemin de Damas, celui qui nous mène vers l’émergence en 2035 est long. Laissez-nous l’arpenter dans la joie et la bonne humeur. Laissez-nous nos illusions. Laissez nous notre indécence. Laissez-nous nos lianes camerounaises, habillées ou non.

Et si vous n’avez rien d’intéressant à dire, taisez-vous et faites comme nous, contemplez , ces seins ces fesses, ces cuisses, ces dos si beaux et qui vont, fiers, libres et nus.

Amen!

Sermon de Sango Pasto Florian Ngimbis.


Florian Ngimbis à l’IFC de Yaoundé le 13 novembre

Salut les amis, ceci est une annonce. Le mercredi 13 novembre, j’anime une causerie littéraire en compagnie de Sami Tchak, Nicolas Fargues et Joseph Fumtim à l’IFC de Yaoundé. Le thème de la causerie est « Libérer les mots, pour en finir avec une littérature d’apparat ». La causerie a lieu à 15h30 et l’entrée est libre et gratuite (on vous connaît!).

Heu… la gueule que j’ai sur l’affiche ci-dessous n’est pas représentative de ma personne hein? Ne venez pas dire après qu’il y a tromperie sur la marchandise, c’est l’effet photoshop. J’espère que vous viendrez nombreux. A mercredi!

 


Je suis camerounais, j’aime mon Roi

Ce matin, j’ai reçu le coup de fil d’un ami de Bamako. A part le fait qu’on ne se soit pas vu depuis des lustres, mon vieil ami voulait savoir comment va le pays. Ah! le pays va bien! Si le Roi était toujours là? Ah il va aller où? S’il avait pleuré pour ses « amis » journalistes français morts à Kidal. Ah! tout le monde n’est pas IBK dèh!

On a rigolé. Plus tard vers midi, je tombe sur un autre ami, il me dit: « Tonton, on est le 6 novembre ». Je lui réponds: « Moi quoi sur ça? » Comprenez: « C’est mon problème? ». Il me dit: « Mais Florian, depuis deux jours nos frères camerounais se ruinent en appelant le standard de RFI pour présenter leurs condoléances, nos frères ont changé leur photo de profil Facebook les représentant sur une plage de Kribi ou sous la tour Eiffel, pour la remplacer par le logo de RFI en souvenir des deux journalistes tombés à Kidal. Mais pourquoi ils ne portent pas le deuil du 6 novembre, jour d’accession de notre Roi L’immortel Duncan Mac Leod au trône camerounais? Jour funeste où le voile du développement s’est déchiré en deux. Hein? Pourquoi les camerounais portent le deuil des autres et pas le leur? »

J’ai ri hein? Franchement, il n’y a que les ignorants pour croire que le 6 novembre 1982 est une date funeste dans l’histoire de notre pays. Mais sérieusement, moi un enfant du Renouveau je vous le dit.

Que reprochez-vous à notre Roi? D’avoir réussi en trente et une années (chaque fois que j’écris ce chiffre, je suis tout de même mal à l’aise) à privatiser toutes nos sociétés d’Etat? Et alors? Ce n’est pas lui qui les a créées où est le problème? Celles qui ont fermé? Bah! c’était pour faire de la place.

Il y en a qui reprochent à notre Roi d’avoir réussi à tuer la classe moyenne camerounaise. Ignorants que vous êtes, il l’a recréée. Tous les voleurs de la République là, les détourneurs de fonds publics, ne forment-ils pas une classe de camerounais aisée?

Je vous interdis de parler de chômage. Notre roi a créé un tout un nouveau corps de métier. Si! si! Les débrouillards, vous croyez que ça existait avant lui? Ce que c’est qu’un débrouillard? Vous n’avez donc pas écouté Jean Miché Kankan? Ce que je vois je fais, ce que je ne vois pas je ne fais pas. Ce n’est pas un beau métier ça?

Et puis ne faites pas les malins hein? Vous seriez les seuls à ignorer cette pléthore de métiers créés par notre Roi?

Les métiers du Renouveau:

Le call-boxeur : vendeur de crédit téléphonique. Souvent très noir, c’est le soleil qui les a brûlés.

Le bendskineur: conducteur de moto taxi. Métier au taux de mortalité élevé. Possibilité de se reconvertir en arracheur de sacs à main la nuit.

Le sauveteur: vendeur de friperie. Bon côté du métier, houspiller les femmes d’autrui.

Le vendeur de tickets PMUC & Parifoot: vendeurs de tickets de jeu de hasard. A éviter en cas de claustrophobie.

Notre Roi a fait des choses extraordinaires. La Françafrique n’existe plus au Cameroun. Notre Roi, lui, parle d’amitié franco-camerounaise. Vous faites semblant de nous aider, on vous cède tout. c’est beau non?

Ah quelle réussite quand même! La démocratie. Ce long processus engagé voici des décennies. Ne parlez pas de lenteur hein? C’est difficile de démocratiser un peuple. Cinq ans pour parvenir à l’isoloir, cinq ans pour rendre les urnes transparentes, pareil pour avoir le fichier biométrique, pour l’encre indélébile on attendra « l’émergence en 2035 », c’est raisonnable non?

Ah! 2035, cette date à laquelle notre roi verra toutes ses Ambitions enfin matérialisées.

2035, cette année où le pays disposera enfin d’une autoroute.

2035, année où les coupures d’électricité disparaîtront grâce aux nouveaux barrages.

2035, année où l’eau ne sera plus une denrée rare dans les villes camerounaises.

Ah! 2035, quelle date de visionnaire! Et si d’ici là vous doublez la population du triangle national rendant de fait nulles ces avancées que nous auront mis 66 ans à atteindre ne vous plaignez pas hein? Et si en 2035, « émergent » est le nouveau nom du sous développement, n’accusez pas notre Roi hein? Vous attendrez dans ce cas 2070.

Moi je ne trouve rien qu’on puisse reprocher à mon Roi hein? Si vous êtes d’accord pour dire que la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a, pourquoi en serait-il autrement avec le plus vieux heu… je voulais dire beau président d’Afrique? hein?

Notre Roi a créé la paix. Comme ça! Sans avoir besoin de la moindre guerre pour justifier sa création, et alors? C’est de l’art non? Du pain et des jeux n’est ce pas ce que tous les peuples réclament? Bon, même si le pain se fait de plus en plus cher et de plus en plus léger, il y a quand même des jeux non? N’y a-t-il pas Eto’o? Le fou de notre Roi qui nous distrait si bien?

Vous vous plaignez du manque de salles de spectacle? De l’absence de cinéma dans la capitale? Mais il y a la bière non? Vous voulez quoi à la fin?

Certains camerounais disent qu’il n’y a pas d’eau à Yaoundé et la bière alors? On la fabrique avec de l’urine?

Pourquoi vous vous plaignez même? Moi je trouve que le pays va bien.

C’est vrai qu’on a le choléra de temps à autre, le palu,  qui, comme récemment, tue mille personnes dans le septentrion. Et alors? On parle de langues mortes est ce que c’est valable pour les maladies? Qui vous a dit qu’une maladie éradiquée sur le globe ne pouvait pas réapparaître quelque part? Vous voulez le M23 à la place?

On a une presse libre non? Lisez seulement les gros titres à la hauteur des enveloppes qu’ils touchent. On a des intellectuels qui ont tellement cherché dans le social que maintenant ils se préoccupent de l’anal, ce n’est pas un signe de réussite ça?

Le sport? Quel sport? Vous voulez des stades? Une politique sportive? Cf le paragraphe précédent: vous avez Eto’o, Iya est en prison, le reste importe peu.

La culture? Mais vous avez deux sociétés de gestion des droits d’auteur musical non? N’est ce pas le signe de la bonne santé de notre secteur culturel? La piraterie des œuvres de l’esprit? C’est une blague? Vous savez qu’on n’en a pas pas encore terminé avec l’éradication de la piraterie maritime? Les deux sont cousines hein? Attendez 2035!  En plus question culture, vous ne voyez pas comment notre grand parti forme des danseurs? Le pape vient, on danse en tenue du parti tout le long de son parcours, les voleurs viennent on danse, le Roi lui même part, on danse. Quelle structure peut offrir des stages si variés et si riches dans le secteur culturel?

Pour finir, je vais vous dire que les blagues idiotes ne sont pas du goût de tout le monde hein? J’ai entendu un illuminé dire dernièrement sur une chaîne de radio que le Lion du zoo de Mvog Beti portait le même nom que notre Roi. Il paraît que comme notre Roi il n’aime pas rester dans sa cage et que quand il s’échappe il ne fait même pas peur aux gens, parce qu’il n’a plus de dents qu’on le nourrit avec de la viande hachée, plus de griffes, bref, que même un chat est plus effrayant.

Je vous dit une seule chose: n’abusez pas de la liberté d’expression hein? On ne rigole pas avec un lion qui dort. Fût-ce depuis trente et un ans.

Joyeux anniversaire Majesté.

Peace!

Une de Cameroon Tribune ce matin de gloire