Yao Kékéli Jean

Les élections 2016 en Afrique : entre heurts et essors

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Plus d’un demi-siècle nous sépare du discours tant historique et équivoque de la Baule de François Mitterand en Juin 1990. Ce discours sonnait le glas du parti unique et de la pérennité au pouvoir laissant l’espoir d’un renouveau démocratique. La chute de Blaise Compaoré en octobre 2014 suivi des élections responsables de novembre 2015, l’alternance au Nigéria en mars 2015, et dernièrement au Bénin en mars 2016 constituent des exemples patents d’une Afrique en mouvement. Notre propos ressortira de façon globale les traits caractéristiques de la comédie électorale 2015-2016 dans la plupart des pays africains et les points saillants qui ont posé le jalon d’un nouveau départ démocratique.

  1. La comédie électorale

La succession des élections des élections depuis l’année passée semble donner place aux arguments souvent désapprobateurs de mascarade électorale ou de « plaisanterie démocratique ». Pour nous, l’image d’une sauce concoctée avec divers ingrédients constitue la parfaite image des élections en Afrique. Les ingrédients peuvent être mesurées en grande ou petite quantité selon les pays mais la couleur externe de la sauce reste la même.

  • Dissensions de l’opposition

Un fait marquant de la période électorale est le réveil des partis politiques de leur sommeil dogmatique. En effet, c’est en Mai 2014, moins d’un an avant les élections présidentielles que l’opposition accepte de reprendre le dialogue politique avec le pouvoir pour des réformes politiques. Il en résulte une inertie politique voire un pullulement des partis politiques. L’élection présidentielle devient comme la crotte qui accueille la horde de mouches à l’assaut de leur substance. Pour des populations allant de 5 à 22 millions, on dénombre 14 à 28 candidatures. En tête du classement de IMANI Francophone, on trouve la Guinée Conakry avec 24 candidats sur un total de 124 partis politiques, le Sénégal, le Bénin et la Côte d’Ivoire , le Tchad avec 14 candidats à la course présidentielle.

De plus, on note dans cette comédie électorale, l’union et les fissions politiques qui se forment au gré des intérêts personnels et du désir d’alternance. Au Niger, le 27 Janvier dernier fut créé la COPA 2016 ( Copa 2016) réunissant 5 candidats de l’opposition décidés à gagner le second tour face au prédident Mahamadou Issoufou, le CAP 2015 pour l’alternance au Togo, et au Bénin, des coalitions d’hier qui vilipendaient la candidature de Lionel Zinsou change brusquement de ton. Cela démontre du manque de stratégie de l’opposition qui est souvent divisés par des intérêts particuliers. Dans nombre des pays de la sous-régions, « les partis politiques sont passés maîtres dans l’organisation de véritables calembours déguisés en alliances politiques, qui se font et se défont au gré des enjeux électoraux[1]. »

  • Réformes politiques avortées

Nombre de réformes déclenchées pour la transparence des élections n’ont pas été réalisés. Que ce soient les réformes constitutionnelles sur la limitation des mandats, le nombre de tours des élections ou les réformes institutionnelles des commissions électorales ou de l’audit du fichier électoral ont constitués de promesses vaines. Les exemples sont pluriels : l’adoption forcée d’une nouvelle constitution au Congo en faisant sauter les verrous de limitation d’âge et du nombre de mandats, les tentatives de Joseph Kabila pour demander un recensement électoral afin de briguer un troisième mandat, la mise à jour des listes électorales en Gambie en vue de purger l’arène politique des opposants trop zélés. En un mot, les réformes politiques sont mises en branle pour démarrer la machine de l’éternisation au pouvoir.

  • Une société civile faible

Au Togo dénommé CST (Collectif Sauvons le Togo), au Tchad avec le collectif Trop c’est trop ; l’Union des syndicats du Tchad, et au Burundi, la société civile cherche à dénoncer les difficiles conditions de vie sociale des populations. Entre « ville morte » et appels à boycotter les élections, les manifestations créent parfois des destructions de biens publics. La population n’arrive pas à discerner la différence entre leurs actions et celles des partis politiques. Cette confusion sur la scène politique porte atteinte à la démocratie et à l’efficacité des contestations.

  • Droits et libertés fondamentales bafoués

La violence politique est l’un des caractéristiques marquant du paysage électorale. Le Burundi actuel, les émeutes et attaques sporadives au Congo, l’emprisonnement des opposants en Gambie et les répressions militaires au Djibouti en sont les preuves. La presse est muselée par le pouvoir et le contrôle des réseaux sociaux et même la suspension de diffusion des télévisions internationales illustrent la crispation politique, la peur et le désir de contrôle du contre-pouvoir. Les leaders de la société civile arrêtés au Tchad, le retour difficile d’exil de Bénoît Koukébéné, vice-président de l’Union panafricaine pour la démocratie sociale constituent des entorses à la démocratie.

  • Le régionalisme

Les découpages ethniques ont une incidence sur les élections dans la plupart des pays africains. Certains présidents instrumentalisent la question ethnique pour conserver le pouvoir et les partis politiques de l’opposition aussi ont leur fief de popularité. Cette donne de région ou ethnie d’appartenance fausse la marche des pays comme la Guinée Conakry, le Togo, le Nigéria, la Côte d’Ivoire et le Mali vers l’alternance démocratique. Le régionalisme, l’ethnocentrisme et les haines nourries entre groupes ethniques ne rendent pas la tâche facile à l’alternance politique et à la responsabilité des citoyens.

  1. L’élan démocratique au Bénin, Burkina Faso

Les traits convergents qui caractérisent la marche démocratique au Bénin, Burkina Faso, Nigéria est sans doute la volonté du peuple de rompre avec le système existant jusqu’alors. Au Bénin, le peuple a mûri une responsabilité politique et est sorti exprimer ses suffrages contre le candidat Lionel Zinsou, à tort ou à raison surnommé le candidat de la France. Dans la sous-région ouest africaine, à part le Sénégal, le Bénin jouit d’une stabilité politique, en témoignent les élections apaisées et transparentes, donnant la place au débat politique. C’est l’insistance de la rue qui a forcé Blaise Compaoré à lâcher le pouvoir. Les jeunes, la société civile burkinabé (le balai citoyen) ont porté le flambeau de la contestation de la rue et lutter pour que les politiques respectent la constitution. Les images des burkinabè balayant les rues, nettoyant les lieux publics après les contestations est un message fort de la participation citoyenne. Les biens publics doivent être respectés et en aucun cas détruit pour servir quelconque intérêt d’alternance démocratique. Le référendum dernier au Sénégal pour la réduction de la durée du mandat à 5 ans est l’expression d’une intériorisation du fonctionnement des règles de la démocratie.

 

En définitive, un leadership politique responsable est le résultat d’une plaidoirie du peuple. Mais qui est ce peuple ? Ce sont les hommes et femmes éduqués et aguerris à la chose politique, c’est le citoyen lambda qui participe activement à la vie de la cité et s’intéresse à l’application des textes fondateurs, c’est la société civile responsable, ce sont enfin les partis d’opposition impliqués dans des politiques de développement. Seule l’éducation politique peut sauver les élections en Afrique.

 

AMEGBLE Jean Della Strada,sj

[1] Alan Akakpo et Mahamadou Camara, « CLASSEMENT : LA COMÉDIE DE LA DÉMOCRATIE EN AFRIQUE FRANCOPHONE » in www.imanifrancophone.org


Une enfance escamotée par « Dieu »

credit lapresse.ca
Crédit lapresse.ca

Ce beau jour ensoleillé sur le chemin du retour de l’école, Aya sifflotait joyeusement, tenant le bras de son grand frère âgé d’une dizaine d’années de plus qu’elle. Dans ce coin reculé de la terre camerounaise, on se connaissait tous. On vivait de l’agriculture et quelquefois de la chasse, mais les animaux devenaient rares, ou plutôt les hommes devenaient les animaux à chasser. D’une façon soudaine, on entend des cris qui peuvent vous acérer la poitrine. Ce n’est pas l’annonce d’un mariage, c’est la réaction du cœur d’une femme qui vient d’assister en réalité, à la liquidation de son mari qui tombe raide, mort. Celui-ci vient d’être décapité sous ses yeux par des hommes mi- cagoulés, en uniforme de militaires. Ce sont en effet les énergumènes de « l’armée d’Allah », le fameux Boko Haram. Ce cri n’est que le début d’une longue litanie de cris vociférant çà et là dans tout ce petit village. En un claquement des mains, les tentes se mettent à brûler, les hommes qui veulent résister abattus froidement. Les enfants sont regroupés ensemble et avant qu’ils ne se rendent compte de quelque chose, on les force à marcher et entrer dans la camionnette. Aya fait partie de ce groupe ; après un temps incalculable où le cœur bat la chamade et sert d’aiguille de montre, les hommes menaçants, agressifs les font descendre dans la forêt escarpée de Sambisa (faisant frontière entre le Cameroun et le lac Tchad) véritable labyrinthe composé de centaines d’îlots.

Les vrais dommages collatéraux

Comme toute histoire tragique, il est plus facile de raconter que de vivre le ou les moments sombres. Les raids de Boko Haram se font de plus en plus menaçants dans toute cette région nommée la région du bassin du Lac Tchad regroupant le Cameroun, le Tchad, le Niger, le Nigeria et la République centrafricaine. Cette région frontalière devient de plus en plus poreuse et facile à pénétrer. Les éléments de Boko Haram profitent pour contrôler les villages le long des côtes par des attaques sporadiques.

La terreur généralisée, la panique des coeurs

Bien que l’Etat camerounais ait pris des mesures pour freiner l’avancée du djihadisme sur ces terres, et que le BIR (la Brigade d’intervention rapide) ait une réputation très efficace dans le pays, il semble difficile d’endiguer la panique qui se répand dans le cœur des populations. Cette semaine encore, mardi matin, le village de Tchakarmari a été visé par des militants de Boko Haram. Ce village se situe au nord de la ville de Maroua, chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord. Au total huit personnes tuées et une centaine d’autres enlevées servant à la fois de bouclier humain et de renflouement des troupes. Le plus grand dommage collatéral de cette guerre dite non conventionnelle est le dégât psychologique des populations non seulement camerounaises, mais aussi nigérianes, tchadiennes. Consacrer la terreur comme liturgie de la guerre et utiliser des enfants, et surtout les filles comme armes de guerre. Le sens du « kamikaze japonais » perd son sens. Maintenant, du plus fragile sort la plus grande terreur et horreur, de la plus innocente chair sort des éclats de tonnerre. Que de paniques suscitées non seulement par des bombes qui explosent en tout lieu et en tout temps. Même les bases militaires sont attaquées (cf la base militaire camerounaise de Kolofata qui commençait à servir comme base militaire de la force multinationale des pays de la région). Le Cameroun et le Tchad considérés longtemps comme une zone plus ou moins sécurisée deviennent de plus en plus une zone grise. La tâche est plus ardue maintenant que la nébuleuse islamiste peut se procurer des effectifs en hommes et surtout femmes dans au moins trois pays ( Nigeria, Cameroun, Tchad). Cette capacité à transformer une personne inoffensive (femmes, enfants) en armes redoutables est le plus grand dommage collatéral causé à cette partie de l’Afrique. En plus, ayant déjà souffert de plusieurs revers, Boko Haram mise plus sur la frappe asymétrique c’est-à-dire des attaques rapides, à la bombe et incursions au même moment, mais en plusieurs endroits différents au cœur du pays. C’est ce que l’on appelle une nébuleuse, ou un dragon à plusieurs têtes. Cela crée la psychose généralisée. Au sein des populations, il existe nombre de sympathisants de Boko Haram qui infiltrent la ville et fournissent des renseignements à leurs chefs. Boko Haram a à la fois un visage et un fantôme. Dans les mosquées, les imams ont peur d’aborder la question par peur de représailles. Les parents aisés envoient leurs enfants dans les villes plus sécurisées. L’incapacité d’identifier son adversaire augmente la panique dans la zone, que ce soit au Tchad, au Nigeria, au Cameroun. Selon le reportage de Africatime, « Nous ne savons plus qui est qui. J’ai peur quand je marche, j’ai peur qu’il ne se passe quelque chose, qu’une bombe explose et qu’elle me tue. » Cette phrase illustre si bien la terreur, la peur sans objet que génère Boko Haram. C’est le plus important et grand dommage collatéral.

Un terrain déjà miné, une zone grise

Le second dommage collatéral des attaques de Boko Haram est en effet le changement de la nature de cette zone frontalière. Le bassin du lac Tchad est bel et bien miné, même après 10 ans, on continuera d’entendre les mines explosées dans cette région. En effet, le timing du réveil des dirigeants de la région a été long, lourd et pesant. On pensait que Boko Haram n’était qu’une affaire nationale et qu’elle ne susciterait pas de problèmes à toute la région. Fallait ne pas compter sur nos experts en sécurité et stratégie des gouvernements des pays limitrophes. Après l’ère Goodluck Jonathan, on essaie de se mobiliser plus rapidement. Mais la veine est déjà coupée, les traditions déjà ancrées dans les mœurs. C’est la tradition de la violence, du conflit. La violence qui mine cette région subsaharienne doit être considérée d’un point de vue global avec le conflit malien qui se perpétue à l’ouest, et le phénomène Boko Haram à l’est, les shebab au nord-est. Considérant cette zone large, il semble de plus en plus que la gangrène islamiste bouffe le continent de l’intérieur vers les côtes. L’intérieur est-il le maillon le plus faible ? Non, mais les circonstances permettent à ce que la secte se radicalise et crée la zone grise : la guerre civile en Libye qui continue d’être contrôlée par des groupuscules armés, l’Algérie au bord d’un ras-le-bol sociopolitique dû à une éternisation d’un président malade au pouvoir. Boko Haram n’est que le signe patent d’un no man’s land, un désert où la raison du plus fort est la meilleure.

Quelle lutte contre quel combattant de Boko Haram ?

La vraie contradiction au cœur de cette lutte contre Boko Haram est en effet la nature de ces combattants. Des mesures sont prises de tous les côtés pour lutter contre la nébuleuse : partenariat avec les chefs locaux, traditionnels, et les leaders religieux, contrôle des prêches dans les mosquées, interdiction de circulation des engins à deux roues à partir de 18 heures, association du Concile des imams et Dignitaires musulmans du Cameroun (CIDIMUC) pour éduquer les citoyens sur les dangers du radicalisme religieux et de la violence extrémiste, promotion de la tolérance religieuse, renforcement du partenariat avec les Etats-Unis et la France au sein du Partenariat transsaharien du contre-terrorisme, création de la Force multinationale conjointe (MNJFT), renforcement de la loi contre le terrorisme, raids et nettoyage de la région du lac Tchad, création du G5 dans le Sahel (Mauritanie, Niger, Burkina Faso, Tchad, Mali). Pour les mesures prises, elles semblent plus ou moins porter leurs fruits, mais elles ne s’accentuent pas sur les femmes et les enfants. En effet, le plus grand pourcentage de l’armée de Boko Haram est constitué de femmes et d’enfants. On ne doit en aucun cas oublier que le terrorisme est avant tout une guerre psychologique. Plusieurs mesures sont prises pour maîtriser la zone grise et repousser les assaillants, les éliminer ou les arrêter, mais la partie psychologique est négligée. Le plus grand dommage collatéral qu’est la terreur ou la psychose doit être traité. C’est à ce seul prix que les populations comprendront que la guerre contre Boko Haram est une guerre de tous.


Je suis l’Afrique perdue, Je suis mon propre échec, mon propre avenir

montage Jean
montage Jean

#JE NE SUIS NI A, NI B, NI C…

Loin de moi de continuer à faire une prose tant ma douleur est grande,

Aux sons de mes larmes et de mon écœurement sanglotant, JE SUIS MORT,

Je suis celui qui n’a point de visage mais qui pleure, celui qui n’a point de bouche mais qui crie,

Celui qui n’a point de bras mais qui brandit un drapeau qui n’est pas le mien,

Je suis celui qui n’a point de pieds mais qui marche sur une route étrangère.

Qu’est-ce que l’on n’a jamais vu ? Entendu ? Plagié dans cette Afrique perdue ?

Je suis celui qui aime nettoyer la maison des autres oubliant ma propre maison,

Je suis celui qui prend le nom d’un « autre » en oubliant mon propre nom,

Qui valorise le nom et l’identité de l’autre parce que depuis fort longtemps

Mon nom a été le nom d’un autre, mon identité est un emprunt,

Je suis la bulle vide qui se remplit de tout ce qui l’entoure, qui sert sans se servir lui-même,

 

Et voilà que nous saisissant comme un effroi et une chose extraordinaire qu’est la mort,

On nous livre en trois ou quatre jours des ras-le-bol des peuples « avancés »,

Oubliant les milliers d’enfants, de femmes et d’hommes qui tapissent sur les grandes routes nigérianes,

Quel paradoxe !!! tandis que d’autres marchent sur une route libre avec d’autres vivants,

D’autres ne marchent pas, ils sont étendus sans vie dans une moite froideur comme dans un abattoir,

Quelle liberté « d’expression » qui nous mène à privilégier le ridicule, le sarcasme, la provocation,

Quelle liberté qui tend à donner plus de priorité à des morts plutôt qu’à d’autres,

Quelle plume, quelle liberté pour encenser une certaine expression qui n’est plus qu’une impression,

Quelle liberté qui semble être liberticide et privilégie l’amour au lieu de la haine,

Quelle liberté qui est lent à comprendre que d’autres aussi puissent s’exprimer librement par les armes,

Quelle liberté qui tend à poignarder avec une plume et à attendre une certaine tolérance…

Quelle liberté, si cette liberté tend à désunir plutôt qu’à unir, à détruire plutôt qu’à construire,

Quelle liberté d’expression si on attend des autres une certaine attitude de tolérance,

Quelle attitude de tolérance si on ne cherche pas à panser la plaie mais à la huer,

La mort dans l’âme, je me rends encore plus compte que tous les morts n’ont pas la même dignité,

Que mon Afrique continue d’être la coquille sombre, noire qui est sans repères,

Je suis une Afrique sans identité, à la recherche d’une autre identité qui m’est refusée mais empruntée,

JE SUIS UN MOI QUI IGNORE QU’IL PEUT FAIRE SON « JE » ET GAGNER LA BATAILLE DE L’IDENTITE.

 

 

 

 

 


Leur Dieu est leur ventre

 

via aljazeera.com
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via pathogenperspectives.com

Communément appelé mortels, les hommes dirait-on sont à l’affût de la satisfaction et l’assouvissement des besoins primaires. Les idéaux de paix, d’amour, de liberté, de démocratie bien qu’ils occupent le sommet de la pyramide (de Maslow bien sûr) semble être un horizon voilé à peine atteint. Après avoir scruté tant le ciel à me demander pourquoi les hommes réfléchissent, développent les villes, cherchent à se protéger de la chaleur et du froid, j’ai compris comment toute la tête est mise à contribution pour assurer une place assise voir un royaume pour le reste du corps.

En tant que politologue, la situation au Burkina m’interpelle mais du fait de la crudité et de la fraîcheur des événements qui s’y déroulent, il m’importe plus de garder l’oeil ouvert et de scruter comme un veilleur la succession des évènements. Il n’est pas de mon ressort ici de faire la chronique de présidents déchus ou de présidents africains à déchoir dans les années à venir. Une leçon que je voudrais bien tirer des récents évènements au Burkina Faso, l’ebola en Afrique de l’Ouest est que le ventre tient toujours sa première place. Quand je parle de « ventre », il ne s’agit pas seulement d’intérêts économiques, de ressources minières, énergétiques.., il s’agit aussi de tout ce qui est le moteur de toute révolution (Burkina), le moteur de tout laxisme (Ebola). Au coeur de la révolution du peuple burkinabé, il ne faut point y voir seulement un élan de démocratie, une aspiration au respect des lois constitutionnelles, il faut voir le cri d’un peuple qui a faim, qui cherche à subvenir à ses besoins primaires. La latence des pays membres de la CEDEAO par rapport au virus d’Ebola ne dénote qu’une préoccupation du « ventre », c’est-à-dire du corps non atteint. Les pays vivent actuellement en autarcie pour se préserver d’une maladie qui gangrène une partie de la planète ou que dirais-je « du corps ». L’humanité est un corps tout entier que l’on ne peut dépecer sans provoquer une douleur généralisée. « Leur Dieu c’est leur ventre » et c’est ainsi parce que l’on se cantonne que sur une partie du corps « le ventre » en ignorant les autres parties. On a pensé enlevé une gangrène du corps burkinabè en chassant Blaise Compaoré mais le mal est plus profond, les racines plus encrées. On a pensé isoler certains pays africains d’une « sale maladie » des mains mais le mal est plus profond. La racine du mal se trouve dans l’identité d’une humanité égoïste. L’avenir nous le dira.


Apologie du corps : l’au-delà de l’homosexualité

Credit by www.ilovechile
Credit by www.ilovechile

D’aucuns le nomment turpitudes, d’autres droits de l’homme, d’autres encore légifèrent sur son universalité, d’autres financent et font des lobbyings terribles sur les Etats « africains » qui le diabolisent. Des discours ont fusé ça et là sur l’homosexualité, pour ou contre mais ce qui importe de comprendre et saisir dans ce monde est la conception du corps. Quel corps pour ce monde qui exalte le plaisir et veut atténuer la souffrance ? Pour moi, une chose est claire, notre regard sur le corps humain va conditionner notre conception. Ma conception à moi est que le corps va à sa perte en déifiant le plaisir. (discours contre et au-delà de l’homosexualité)

Au nom de quel plaisir, au nom de quel trou dans le corps doit-on légaliser et universaliser l’homosexualité ? Au prime abord, on valorise la prostitution, le plaisir à grande intensité, le summum et ce par les gadgets, les tenues sexy, les sites pornographiques, les stars toutes nues. On soutient que pour intensifier le plaisir, on peut utiliser la bouche, le vagin, l’anus. La nourriture n’a plus son monopole dans la bouche, on peut l’utiliser à d’autres fins. L’anus n’évacue plus seulement les déchets, il peut servir à fortifier l’amour. C’est le 1er degré. Vous allez me rétorquer que c’est leur corps à eux, ils sont adultes, consentants et bien c’est dans ce consentement qu’on déifie le corps, on veut atteindre le plaisir et puis après ???

Deux hommes ou deux femmes s’embrassent, découvrent leur attachement, cherchent à rester ensemble ; découvrant que leur plaisir peut être aussi dans l’éducation des enfants, ils ou elles pensent adopter. Le corps a certainement perdu sa valeur aussi bien dans leur pensée ou esprit que dans leur pratique. Le corps ne contient que du plaisir, faisons tout pour y répondre.

De l’avortement à la naissance in-vitro, on veut éviter au corps la souffrance. On veut le rendre heureux. On n’oublie qu’il nous appellera un jour à la tombe. Et même à la mort, on pense qu’on peut enterrer ou mieux incinérer aujourd’hui et aller au boulot demain. Tout est réglé pour que l’homme profite pleinement de son vécu. La souffrance est vite oubliée, il ne faut plus être en peine, il faut vivre. Et Quelle vie ? Une vie qu’on voudrait imposer à tous, légaliser et servir sur un plateau d’éthique ou de valeurs au nom d’un soi-disant droit de l’homme : l’homme n’a-t-il pas le droit de disposer de son corps comme il veut ?

Eh bien, faut-il reconnaître et légaliser le vol parce que certains le font ? Faut-il laisser se suicider les gens (l’euthanasie) simplement parce que le plaisir du corps n’est plus là ?

Derrière vos discours, votre aliénation à une culture hybride et aliénante du corps, c’est le devenir de la souffrance et donc de la vie qui est en jeu. La vie n’est pas que plaisir, jouissance, elle est épreuves, courage, défi, engagement pour la bonne cause. Le devenir de l’homme africain en dépend. Dis moi comment tu vois ton corps, je te dirais qui tu es!!!!


La fièvre électorale d’avant 2015 en Afrique de l’Ouest : perspectives et vérités

Messieurs les Excellences

Il demeure flagrant de constater que dans notre continent Africain, les élections demeurent et continuent de demeurer non seulement un enjeu de vie ou de mort mais aussi une affirmation du sentiment d’éternité. Autour des élections se forme une machine très complexe d’opposants et de parti traditionnel au pouvoir, de tractations et de stratégies rusées, de réflexion et d’actions. Tout cela peut être représenté sous l’image connotative et réelle d’une fièvre avant la maladie elle-même. L’année 2014 ne vient que de débuter à ses premières heures mais il semble qu’elle est déjà achevée vues toutes les projections et assurances que posent les acteurs politiques dans ce futur proche. En Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Nigéria (Février 2015), au Togo et même en Algérie, il est évident de sentir les soubresauts causés par la fièvre des élections. Les véritables questions sont occultées : il ne s’agit plus de s’interroger sur le bilan de ces actions passées, de faire le point sur le parcours en tant que chef d’Etat ! Non ! Il s’agit de vaincre et de gagner par tous les moyens. « Gagner ou Gagner », le verbe « perdre » n’existe pas dans le langage politique. Il importe pour nous de faire une analyse comparée de la période préélectorale dans trois pays à savoir le Togo, la Côte d’Ivoire et le Burkina afin de saisir la phénoménologie et la relativité du « sentiment d’éternel pouvoir » dans ces pays.

 

La logique du pouvoir : Gagner ou Gagner

Une caractéristique principale de la période préelectorale est la violence des mots, la violence des manigances, une violence polie, cachée qui s’extériorise dans la période post-électorale. D’une manière générale, telle est le point convergent qui rassemble ces pays et présidents frères : le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Togo. L’actualité du Burkina Faso est un exemple patent. Le président Blaise Compaoré ayant déjà brigué 4 mandats veut se présenter à l’élection de 2015. L’article 37 de la Constitution burkinabè (une copie conforme et plate de la Constitution française) limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs à raison de 5 ans par mandat. En effet, après des modifications de la durée du mandat (7 ans à 5 ans) en 2000, le président s’est encore présenté deux fois en raison d’une non-rétroactivité de la loi c’est-à-dire qu’une non application effective de cet article modifié qu’après son 2ème mandat. Le 21 Mai 2013, 81 députés contre 46 ont voté la création d’un Sénat dans le but de créer une Chambre de représentants à la solde de ses intentions. A suivi un mouvement de colère, des manifestations d’opposants dans l’ensemble du pays pour protester contre cette loi. La logique du gagner semble être un virus qui papillonnent la vie des chefs d’Etats africains. Malgré la démission (fictive ou pas) du parti au pouvoir (Congrès pour la démocratie et le progrès) de 75 de ses affidés (conseillers, ministres) pour créer un parti politique le MPP (Mouvement du Peuple pour le Progrès, l’heure est toujours aux pourparlers, aux vaines médiations. On se demande si une médiation doit se tenir d’autant plus que la vérité ici n’est point subjective, elle ressort des textes sur lesquels le pouvoir a prêté serment et juré de défendre. Et la farce des hommes noirs continue. C’est le pays ami (la Côte d’Ivoire) qui envoie ses hommes de main « renouer le dialogue entre les anciens camarades, les démissionnaires, les responsables et autres chefs des partis politiques. » Pour paraphraser un dicton, l’erreur d’un homme est tolérable, mais la solidarité dans l’erreur est diabolique. La médiation est devenue l’arme pour légitimer l’intérêt des plus forts. La médiation interne piétine du fait simplement du non-lieu de cette médiation. Je pense qu’en Afrique, nous devons avoir honte de parler de médiation quand le médiateur est partial ou qu’un acteur de la médiation s’est déclaré hors-jeu de par l’incohérence de ces actes. La farce continue de durer en Afrique, et je ne sais au prix de quels intérêts, l’arrêt d’un régime presque éternel peut être un tort pour un pays. Quant au Togo, c’est la limitation du mandat présidentiel qui bouillonne les consciences. Le parti au pouvoir laisse moisir le vague article 59 de la Constitution Togolaise sur le nombre de mandat présidentiel. « Le président de la République est rééligible ». C’est dire que Faure Gnassingbé souffre moins des violents maux de tête pour réfléchir sur son lendemain politique plutôt que celui de son homologue Blaise Compaoré. Les maugrées et bourdonnement d’une alliance de l’opposition qui peine à se former ne l’inquiète en aucun point.

Bref, c’est le temps des alliances politiques. Durant la première partie du mandat, les partis de l’opposition rejettent les résultats des élections présidentielles. Ils appellent aux fraudes électorales et à la révision des voix ; la seconde partie consistera à critiquer le pouvoir en place sans réellement mettre en place des structures capables d’aider le peuple à sortir de la misère : en ce sens, leur presse privée et média auront tous les thèmes et critiques à resasser ; dans la seconde et dernière partie du mandat, on dirait que le climat politique est devenue une course à relais : les partis de l’opposition cherchent tant bien que mal à réunir leurs forces déjà usées à de vaines logorrhées. En Côte d’Ivoire, le FPI de Pascal Affi N’Guessan  cherche à créer son bloc unique mais peine à fédérer les 14 autres partis à la même cause. Et ceci à cause du quota d’intérêts que chaque parti gagnera à la victoire.

Un scenario pareil au Togo où les partis radicaux de l’opposition comme l’ANC ont adopté une tradition de marches et manifestations en scandant « Faure must go !!! 50 ans, c’est trop, 10 ans, ça suffit ». les meetings se succèdent chaque samedi ralentissant les affaires économiques du pays (grand marché). Le rouge est la couleur de rigueur et les imprécations des mamans Femen ( Femen togolaises) pourront suffir à éliminer le parti  au pouvoir UNIR. C’est dans ce climat politique délétère qu’est lancé un « Appel des patriotes » faiblement entendu par les différentes forces de « l’alternance ». il s’agit de créer une coalition dont le programme sera de « définir le projet de société, ainsi que la répartition des rôles, voire des postes, après la conquête du pouvoir». Le front pour l’Alternance peine encore à se former surtout après la large victoire du pouvoir aux dernières législatives.

Diviser pour mieux régner, construire l’illusion par les projets

La fièvre électorale ne comporte pas seulement des enjeux politiques. L’argent est le nerf de la guerre. L’économie est la grosse part de l’iceberg. Il s’agit de frapper les consciences, de montrer que le pays se développe, et accueille les investisseurs. Il semble qu’avant les élections, la terre tremble et des infrastructures sortent miraculeusement du sol. En témoignent les grands axes routiers qui traversent Lomé, « la mise en œuvre de programmes pour l’emploi des jeunes, l’amélioration des finances publiques, le Fonds National de Finance Inclusive permettant la création d’AGR » (Activité génératrice de revenus.) A Abidjan, les chantiers sont énormes : un troisième pont Henri Konan Bédié pour la ville d’Abidjan reliant les zones sud de la ville à Marcory au Nord(projet initié depuis 1999), l’échangeur de la Riviera II appelé échangeur moderne de trois niveaux, la construction de 2000 logements sociaux. L’heure est à la reconstruction, à la réhabilitation, à la séduction des investitsseurs et ce serait bien ingrat voire inimaginable d’abandonner le pouvoir en plein milieu de l’action !!! Mais quand même !!! En plus si des enjeux géostratégiques et militaires dépendent du maintien d’un président qui a déjà fait 22 ans au pouvoir et qui sait manier la carotte et le bâton pour calmer djihadjistes et islamistes, mutins et milices, opposants et partis au pouvoir, QUELLE BETISE POURRIEZ-VOUS AINSI COMMETTRE EN LE METTANT DEHORS ? L’Afrique de l’Ouest continue de souffrir de la farce d’opposants frivoles et de présidents à vie. C’est avec pleine adhésion que je réponds à cette citation de Machiavel : « Le but du prince est de conquérir le pouvoir, de le conserver et de rester en vie ». Et la farce continue….


Bangui la Coquette à Bangui la Roquette ( Acte I, Scène I)

 

combattants
credit Photo rue86.com

Etat-type de la Françafrique, la République centrafricaine fut dans les années 1970 l’objet des discussions et reportages des télévisions françaises. On se rappelle comment la France a pris une large part dans la politique intérieure et le sacre de l’empereur Bokassa 1er, grand ami de Charles de Gaulle. D’autre part, l’histoire de la Centrafrique montre un peuple qui a tellement souffert de la violence et de la répression coloniales jusqu’aux conflits internes, aux coups d’Etats répétitifs et de l’insécurité croissante provoquée par les diverses milices ou groupes rebelles dans le pays. Beaucoup de plumes et d’écrits célèbres peignent et continuent de peindre l’histoire « dramatique » de la Centrafrique. Loin de continuer dans cette mouvance pessimiste, nous dégagerons autant que possible une analyse du conflit centrafricain à travers 4 grands points : les acteurs du conflit centrafricain, les éléments déclencheurs, les causes profondes, les conséquences et les logiques d’action. Au sortir de cette analyse scientifique, nous élaborerons une démarche ou stratégie de sortie de crise.

Les acteurs du Conflit centrafricain

Les acteurs internes

Le gouvernement centrafricain de François Bozizé : Parvenu au pouvoir par les armes le 15 mars 2003 par le renversement de son président Ange Félix Patassé, le général François Bozizé fut pendant longtemps l’homme qui imposait le silence aux mutineries fréquentes à Bangui et déjouait les tentatives de coup d’Etat. Devenu rebelle lui-aussi en exil, aidé de ses alliés tchadiens, Bozizé s’empare aisément du pouvoir étant donné sa popularité dans l’armée centrafricaine. Cette armée centrafricaine contient en elle-même les germes d’une auto-destruction : une armée mi-rebelle, mi-républicaine, une armée non professionnelle formée d’un melting pot d’ex-miliciens réinsérés, d’ex-combattants frustrés qui n’ont pas été gradés, une armée prête à défaire de sa loyauté pour la recherche de l’honneur, de la gloire et de la richesse étant donné les coups d’Etat et les mutineries de 1996 et 1997. Soulignons que l’histoire militaire de la Centrafrique fait état de 300 milices libyens en plus de la garde présidentielle dénommé FORSIDIR ayant assuré la sécurité de l’ancien président Ange Félix Patassé. De même, le mouvement rebelle Mouvement de Libération du Congo de Jean-Pierre Bemba (MLC) a aidé Patassé à conserver le pouvoir. Mais à sa prise de pouvoir, les forces ayant aidé Bozizé à prendre le pouvoir (composé de forces tchadiennes) ne bénéficiant pas de rémunérations se sont servis en pillages, viols et exactions sur la population. Bozizé avait à sa solde deux bataillons d’infanterie territoriale (BIT) en plus de la garde présidentielle composé d’éléments de l’ex-Unité de Sécurité Présidentielle de Patassé. Il appert que l’armée centrafricaine hérite d’une indiscipline notoire encouragée par le non-paiement des salaires des militaires. Les FACA ou Forces Armées Centrafricaines ont plus été des forces à la solde d’un président plutôt qu’une armée républicaine malgré les réformes initiées par la France.v

La pléthore de groupes rebelles : les petites milices et groupes rebelles pullulent en Centrafrique. Du MLC de Jean-Pierre Bemba aux rebelles de l’Armée de Résistance du Seigneur LRA de Joseph Kony en passant par les petites milices tchadiennes ou libyennes, les mutins de l’UPS ou de la Garde présidentielle, il est à remarquer que le climat d’insécurité est favorable à leur épanouissement, leurs exactions.

La Séléka : qui veut dire « Union » ou « Coalition » en Sango regroupe en son sein des partis politiques, des ex-combattants de la crise de 2007/2008 qui n’ont pas été réinsérés selon les accords de pacification. Composés à la fois de mutins qui ont pris les armes contre Bozizé en 2004 et des rebelles provenant du Soudan (conflit du Darfour), ce groupe de rebelles avec Djotodia à sa tête avait sévit dans le Nord-Est du pays, dans la ville de Birao. Ce groupe rebelle s’appelait l’UFDR (Union des Forces démocratiques pour le rassemblement). La mutinerie fut arrêtée à temps en fin d’année 2006 par l’Armée française. Et sous l’égide des Nations Unies, il fut signé une amnistie pour l’UFDR et le gouvernement. L’accalmie ne dura point puisque la rébellion qui avait fait son quartier général au Nord multipliait exactions, pillages, vols et viols sur la population. Cherchant à faire entendre leurs voix sur l’inapplication des accords de paix de 2007, les factions armées (soudanaises, tchadiennes, centrafricaines) se mirent en branle le 10 Décembre 2012 et conquirent Bangui 4 mois plus tard.

LRA : Signalée en Centrafrique depuis 2008, l’Armée de Résistance du Seigneur de Joseph Kony est un puissant maître de l’Ouest de la Centrafrique. Cette Armée a déclaré la guerre au président ougandais Yoweri Museveni et s’est replié dans les localités centrafricaines de Ligoua, Kourouko, Gassimbala, Koubou, Gougbéré, Dindiri, Kamou, Ndigba où elle a mené divers attaques. Echappant au contrôle de l’Armée soudanaise et même des forces centrafricaines, cette faction mène des raids dans les zones fertiles et prospères afin de se ravitailler en nourritures. Ainsi, elle provoque un isolement des grandes villes comme Obo situé à plus de 1200 km de Bangui dans la préfecture du Haut Mbomou, à la frontière avec le Soudan et la RDC.Les rebelles de la LRA sont signalés aussi à Birao en septembre 2010.

MLC (Mouvement de Libération du Congo) du chef de guerre Jean-Pierre Bemba sévissait déjà depuis 1998 dans le Nord de la RDC. Suite à l’appel du président centrafricain Ange-Félix Patassé, les rebelles du MLC vont réprimer dans le sang la tentative du putsch du général Kolingba en Mai 2001 et de Bozizé entre Octobre 2002 et Mars 2003. Ils furent l’objet de nombreuses exactions dans le pays et sont accusés depuis 2008 de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Leur présence réelle dans le bourbier centrafricain exacerbe les divisions et la concurrence entre groupes armées.

Les anti-balaka : mot dérivé de la langue française « anti balle AKA »  c’est-à-dire des jeunes portant des gris-gris pour se protéger des balles des fusils AK 47 utilisés par les éléments de la Séléka, il devient contradictoire voire illogique de penser comme la plupart des médias français que ce sont des « anti-machettes. » Il en ressort que même les informations concernant des anti-balaka comme des milices regroupant seulement des chrétiens sonne totalement faux malgré les attaques et affrontements opposant les « musulmans » ou les commerçants aux chrétiens. En Centrafrique, affrontements entre chrétiens et musulmans n’est que l’aboutissement d’une confusion entre musulmans et combattants du Nord d’une part et entre musulmans et commerçants d’autre part. Le conflit centrafricain continue d’être instrumentalisé et exacerbé par une presse occidentale qui semble évoluer dans les catégorisations : Nord/ Sud, chrétiens/ musulmans ; nomades/ sédentaires. La Séléka regroupe plutôt des jeunes de Bangui et surtout des villes de l’intérieur qui s’organisent en force d’auto-défense contre toute agression de la Séléka. Loin d’être une nouvelle force et seulement chrétienne, ces groupes de jeunes se sont toujours formés en Centrafrique afin de se protéger de la violence récurrente des milices et groupes armés dans le pays. Il faut noter qu’il existe un clivage entre les centrafricains du Nord (qui se considèrent plus tchadiens et professent l’islam sunnite de l’espace saharo-sahélien et parlent arabe) et ceux du sud (qui furent victimes des razzias esclavagistes). Face à une population qui se réclame du christianisme (25% de catholiques –le père de l’indépendance était un prêtre Barthélémy Boganda en 1938- 25% de protestants) 15% de l’Islam et surtout 35% de l’animisme, il serait préférable d’opter plutôt pour l’hostilité de la population de Bangui qui subit viols et pillages de la part des rebelles « musulmans » alors que les commerçants( pour la plus part nordistes, tchadiens) ne sont aucunement dérangés. Cela explique les débuts des forfaits des milices anti-balaka qui cherchaient à se nourrir par le pillage des boutiques des riches commerçants de la ville.

Il a été ainsi recensé jusqu’alors 14 groupes armés[1] des milices ou factions tchadiennes, ougandaises, les Janjawid soudanais qui pillent et volent et considèrent la Centrafrique comme une « Dar Kouti » c’est-à-dire une terre des esclaves ; les Seigneurs de la guerre. Tout cet enchevêtrement de factions armées complexifient l’architecture interne des forces en présence et rend encore plus difficiles les enjeux et intérêts de ces forces.



[1] Patrice GOURDIN, « République Centrafricaine : géopolitique d’un pays oublié » in diploweb.com, Oct 2013.


les 12 heures de l’horloge 2013

 

credit Photo: Vit Paroulek
credit Photo: Vit Paroulek

 

Il est d’usage dans cette humanité passante de faire l’évaluation-bilan d’une période parcourue. Souvent ce bilan est fait à tort tout simplement parce qu’il s’inscrit dans une tradition apocalyptique. Selon cette tradition, la fin d’une année coincide avec les fins dernières, la fin de l’humanité et comme certains aiment affirmer : «  à la fin de la vie, on voit dérouler devant soi le film complet de ses actes sur la terre. » Loin de proroger à une tradition ridicule qui ignore que chaque jour est une fin en soi, nous aimerions vous livrer à travers ces lignes un mémorial des grands moments qui ont jalonné l’histoire de notre monde en termes de conflits, de géopolitique ou de relations internationales. Chaque page de l’histoire est écrite par les hommes puissants et c’est la force qui fonde le droit dans ce monde malgré les tentatives pacifistes naissantes. Ceci est un hommage à tous les hommes, femmes et enfants qui sont tombés, qui tomberont à cause de la puissance des hommes. L’histoire de l’année 2013 confirme la thèse de la légitimité des forts sur les faibles, des riches sur les ignorants-riches, les armes sur la paix. Tant que les hommes ne comprendront pas que c’est la force qui fonde le droit, la puissance et la violence qui légitime le pouvoir et que la vraie liberté n’est que sacrifice de soi et d’une noble cause, il subsistera toujours des organismes humanitaires pour ramasser les corps, des puissants pour distribuer des armes, des peuples qui s’affronteront à mort pour un combat qui n’est pas le leur.

 

 Décembre 2013 : Tandis qu’au Sud de l’Afrique, un vieillard meurt cloué par le poids de l’âge, au centre de l’Afrique des enfants, des femmes et des hommes sont assassinés à cause de la violence des hommes. Le 05 décembre, des affrontements ont eu lieu à Bangui et à Bossangoa entre des combattants ex-séléka et des jeunes regroupés en milices : les anti-balaka. Cette crise centrafricaine a tellement fait couler d’encre de telle sorte que le facteur religieux constitue désormais un enjeu important. Soi-disant chrétiens contre soi-disant musulmans s’affrontent ; des chrétiens arborant des amulettes animistes ravagent, pillent et saccagent les boutiques de commerçants musulmans. Une guerre aux intérêts stratégiques et économiques très importants pour la France, le Tchad et même le Cameroun. Le diamant et le pétrole  centrafricain creusent l’appétit des pays frontaliers en proie aussi à des crises internes. Il semble que Janvier 2014 soit néfaste pour le centre de l’Afrique (Soudan, Sud-Soudan, Centrafrique, RDC et par extension l’Egypte.

Leçon : On peut tuer le coq, mais on ne peut empêcher le soleil de se lever.

Novembre 2013 : le 03 novembre, une gigantesque tempête (Typhon Haiyan) passe au-dessus des îles Philippines, du Vietnam, du Laos, et le Sud de la Chine provoquant plus de 4000 morts, des dizaines de milliers de personnes souffrant de la faim, forcé à boire l’eau non potable. C’est la plus grande tempête jamais survenu au monde et doté d’une force très violente. L’environnement a encore une fois eu le dessus sur l’homme. Les catastrophes naturelles deviennent de plus en plus nombreuses du fait de l’exploitation anarchique de l’environnement et de l’émission des gaz à effet de serre. Ces émissions sont pour la plupart causées par les industries des pays développés qui cherchent à maximiser leur profit au dépend d’une quelconque préservation de l’environnement pour les générations futures.

Leçon : Quiconque taquine un nid de guêpe doit savoir courir.

 

Octobre 2013 : Bilan le plus macabre de l’année obtenu en haute mer suite à l’indifférence et à la haine des hommes : 366 morts au large des côtes d’Italie, près des terres de Lampedusa le 03 Octobre. En effet un chalutier, prenant à son bord des somaliens et Erythréens fuyant leur pays, a été rongé par le feu en pleine mer causant la mort de plus de la moitié des 500 personnes, et cela sous l’œil indifférent des autorités de Lampedusa et des gardes côtes. Même si des secours furent envoyés pour secourir les derniers mourants, il existe en Italie une loi qui prévoit l’expulsion immédiate des migrants « illégaux » : c’est la loi Bossi-Fini. Une loi xénophobe qui fut adoptée par le gouvernement Berlusconi en 2002 introduisant le concept de « délit d’immigration clandestine ». Cette mondialisation de l’indifférence selon les termes du Pape François est une honte pour l’humanité qui légifère des lois afin de marginaliser et de provoquer la mort des catégories les plus faibles et les plus pauvres de la société.

Leçon : « La culture du bien-être, qui nous amène à penser à nous-même, nous rend insensibles aux cris des autres, nous fait vivre dans des bulles de savon. Elles sont l’illusion du futile, du provisoire, illusion qui porte à l’indifférence envers les autres, et même à la mondialisation de l’indifférence. » Pape François.

 

Septembre 2013 : Dans la nuit du 28 au 29 Septembre, à 1 heures du matin, des assaillants de Boko Haram entrent dans 4 dortoirs des garçons et fusillent sans ménagement tous ceux qui y dormaient. La fusillade n’épargne personne que ce soient ceux qui prennent la fuite ou tentent de se réfugier dans les salles de classe ou à l’extérieur. C’était dans un collège agricole de la ville de Gujba à 30km de la ville de Damaturu dans l’Etat de Yobe au Nord Est du Nigéria. Un bilan de 44 morts, 4 blessés et 18 disparus. Ce massacre communément appelé le massacre de Gujba fait partie d’une longue série d’attentats et d’assassinats perpétrés par les membres de la secte islamique Boko Haram. La notion de Dieu en Afrique plus particulièrement au Nigéria devient entachée tellement de sang des innocents de telle sorte que l’on se demande si Dieu veut nous sauver ou nous voir mourir. « Doit-on tuer au nom de Dieu » et au nom de quel Dieu ?

Leçon : Quelque soit l’ébullition de l’eau, elle ne pourra enflammer une maison.

 

Août 2013 : suite à un reportage clandestin sur le conflit Syrien, des journalistes (toujours eux) du journal Le Monde ont ramené des échantillons de sang, d’urine, de cheveux prélevés dans la région de Jobar faisant état de l’utilisation des gaz chimiques au cours des combats. Le 21 Août, une attaque chimique près de Damas est directement attribuée à l’armée syrienne. S’en suivra une crise diplomatique au sein des Nations Unies entre le parrain des forces de l’opposition (les USA, la France, la Grande Bretagne) et le parrain de Bachar Al Assad. La France (toujours elle !!!) veut intervenir illico presto sans vérifier de manière impartiale les auteurs de l’attaque. Le bilan de morts dépend du camp qui le diffuse. C’est à la fois une guerre médiatique et géostratégique. Pour ou contre l’intervention de l’OTAN ? L’humanité a frôlé une troisième guerre du golfe. La crise diplomatique USA-Russie a mis en haleine le Moyen Orient mais a atteint son accalmie après l’annonce de la Russie d’envoyer des experts des Nations Unies s’enquérir sur le terrain syrien de la réalité des faits.

Leçon : Le serpent a beau être petit, on n’aventure jamais le doigt dans sa bouche.

 

Juillet 2013 : Un an après l’élection de Mohammed Morsi, président civil élu au pouvoir en Egypte après la chute de Hosni Moubarak, un coup d’Etat militaire a été mené par l’armée égyptienne sous le commandement du général Al Sisi en prétendant faire valoir le ras-le-bol d’une soi-disant population ayant marre du président qu’elle a elle-même élu aux suffrages présidentielles en Juin 2012. Ce 03 Juillet, l’Egypte sombre dans un vaste mouvement contestataire : à la suite du printemps arabe, c’est l’hiver arabe qui s’annonce. Affrontements entre les partisans du Président déchu et ses adversaires, violentes confrontations entre les deux camps ont eu lieu dans plusieurs villes égyptiennes telles que le Caire, Alexandrie, Fayoum, Minya. Le coup d’Etat se transforme en une chasse aux sorcières (les Frères musulmans). Entre arguments de dictature au pouvoir, de confiscation des postes gouvernementales aux Frères musulmans se glissent des enjeux d’hégémonie salafiste au détriment d’un pouvoir chiite. L’armée en Afrique se fera le porte-parole de gré ou de force d’une population qu’elle torture quand cela lui prend. Il n’en demeure pas que l’indiscipline des armées africaines est le lot d’une déchéance profonde de nos Etats.

Leçon : L’ autorité, comme la peau des lions et des léopards, est pleine de trous.

 

Juin 2013 : le leadership américain se renforce sur le continent africain par cette célèbre visite du président américain Barack Obama au Sénégal, en Afrique du Sud et en Tanzanie. Cette visite de 8 jours à partir du 26 Juin 2013 montre qu’au-delà des quatre piliers de la stratégie des Etats-Unis en Afrique subsaharienne : (1) renforcer les institutions démocratiques ; (2) stimuler la croissance économique, les échanges et les investissements ; (3) faire avancer la paix et la sécurité ; et (4) promouvoir les possibilités et le développement, c’est l’hégémonie américaine qui s’amplifie sur le continent avec une augmentation des intérêts économiques et géostratégiques, une implication effective dans la fourniture d’équipements militaires (drones, armes) dans la lutte contre le terrorisme. Il faudrait noter que cette visite a aussi comme enjeu véritable l’appel aux Africains à respecter l’une des conditionnalités aux dons ou prêts de la Banque Mondial : le droit des homosexuels. Le hasard et la générosité ne fait pas partie du langage des relations américano-africaines ou europafricaines.

Leçon : Quand le chat n’a pas faim, il dit que le derrière de la souris pue !

 

Mai 2013 : Le savez-vous que chaque 25 Mai, il est fêté la Journée Mondiale de l’Afrique ? Mais quelle Afrique me demanderiez-vous ? C’est l’Afrique debout, qui se réveille grâce aux bons soins de l’AUF (Agence Universitaire de la Francophonie), l’Afrique de l’assistanat, l’Afrique qui développe son secteur éducatif « éducation de qualité pour tous » à travers des projets comme IFADEM (Initiative francophone pour la formation à distance des maîtres) organisé par l’AUF et l’OIF dans les pays comme la RDC, le Bénin, Madagascar, Burundi…. Le 25 Mai, on célèbre plutôt l’Afrique lourd de son passé francophone, on continue de déifier une culture « supérieure » à la nôtre, une culture où la liberté sexuelle constitue un droit inaliénable. « Notre culture est celle de la Francophonie !!! » Mangeons et buvons à la santé d’une véritable communauté francophone. Et c’est avec point d’étonnement que L’Agence universitaire de la Francophonie s’est activée pour la réouverture en septembre 2012 des trois principales universités en Côte d’Ivoire (Université Félix Houphouet Boigny, Ex Codody, Université Nangui Abrogoua, ex Abobo-Adjamé, et Université Alassane Ouattara, ex Bouaké), après deux années de fermeture. L’Afrique est la meilleure télévision de diffusion de la culture francophone…… plutôt française.

Leçon : Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur.

 

Avril 2013 : le 23 Avril, l’illicité est reconnue licite, l’illégal légal, le pervers vertueux. L’homosexualité quitte le rang de maladie psychique pour entrer dans le rang de la normalité humaine. Eh bien, comme ce sont eux qui décident de ce qui est bien ou mal pour « la démocratie » ou mieux les valeurs démocratiques dans le monde et plus précisément dans la France-Afrique, le Parlement Français adopte à la majorité le mariage homosexuel et l’adoption d’enfants. A partir de ce jour, le combat est engagé pour taxer d’homophobie tous les pays qui vont à l’encontre de ces lois. C’est bien évident que la vertu d’une loi dépend de celui qui l’adopte mais une loi est vicieuse quand elle fait fi d’une conscience morale. De la perte des valeurs, le monde a commencé à sombrer dans la déification et la légitimité des contre-valeurs.

Leçon : La vérité peut se promener toute nue, mais les mensonges doivent être habillés.

 

Mars 2013 : le lundi 25 Mars, la Séléka qui s’est fait entendre par des victoires éclatantes sur les forces fidèles à François Bozizé a pris le pouvoir sous le commandement de Michel Djotodia. La mère France qui avaient des militaires dans le pays se sont donnés comme mission de protéger leurs intérêts (compatriotes, richesses, entreprises…). C’est le début d’un chaos qui ne dit plus son nom. Les hommes, femmes et enfants sont abattus comme des animaux, le pays replonge dans son train-train quotidien de guerre. François Bozizé échappe in extremis aux rebelles qui franchissaient son palais. En représailles, le Conseil de Paix et sécurité de l’Union africaine a suspendu la participation de la Centrafrique à l’organisation. Beaucoup de voix s’élèvent pour condamner le coup d’Etat mais sur le terrain on distribue des armes aux rebelles, on joue une feinte neutralité. Même la FOMAC s’implique malheureusement à patrouiller aux côtés de la Séléka. L’habitude du chaos fait son bonhomme de chemin

Leçon : Le cafard a beau se rouler dans la cendre, le coq le reconnait toujours

 

Février 2013 : Le lundi 11 Février 2013, le pape Bénoit XVI à l’âge de 85 ans annonce devant le consistoire réunis au Vatican sa démission à partir du 28 Février : « Après avoir examiné ma conscience devant Dieu, à diverses reprises, je suis parvenu à la certitude que mes forces, en raison de l’avancement de mon âge, ne sont plus aptes à exercer adéquatement le ministère pétrinien. » Une première dans l’histoire de l’humanité d’autant plus que la tradition montrait des papes qui gouvernaient la barque du Christ jusqu’à leur dernier souffle. Ainsi s’ouvre pour les chrétiens, le monde politique et les relations internationales un paradigme nouveau. La démission du pape aura une incidence importante non seulement sur la manière de servir le peuple de Dieu (l’appel à l’humilité) mais aussi la manière de gouverner les hommes de ce temps (la contingence et/ou l’inconstance du pouvoir)

Leçon : La vie nest pas juste mais exacte car elle est le reflet exacte de tes pensées et des croyances.

 

Janvier 2013 : Le Vendredi 11 janvier 2013 à 10 h 30,  lors de ses vœux au corps diplomatique, François Hollande indique que la France répondra, aux côtés de ses partenaires africains, à la demande des autorités maliennes, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. L’Opération Serval était depuis jeudi soir sur le sol de Bamako. L’avancée fulgurante des djihadjistes vers la capitale a entrainé une telle efficacité et rapidité de déploiement des troupes françaises déjà en place au Burkina Faso depuis des mois. Le paradoxe réside dans ce double jeu de pyromane et de pompier joué par la France : d’une part, armer les islamistes en Libye contre Kaddhafi et d’autre part chercher à arrêter leur progression au Mali.

Leçon du mois : On s’attaque au serpent qui sort à l’improviste, avec le bâton qu’on a à la main.

 

 


La mort de Nelson Mandela, quel intérêt pour le citoyen du monde et les relations internationales ?

Crédit Keystone
Crédit Keystone

 

Drapeaux virevoltants dans tous les sens, frénésie populaire, sursauts et euphories galopantes, tambours en branle, discours éminents des personnalités, émotions vives et saisissantes, branle-bas de sympathie sur les réseaux sociaux, élans de gratitude et d’ovations, tollé général dans les quatre coins du globe,  c’est avec grand intérêt et ahurissement que nous avons suivi les derniers moments de la vie et de la mort de Nelson Rolihlahla Mandela. Il importe pour nous dans cet article non pas d’auréoler un personnage clé de l’histoire du monde, mais d’analyser tous ces hommages,  discours de sympathie des hommes de toute race blanche, jaune, noire, rouge. Même après sa mort, Nelson Mandela semble « rassembler » les nations, être une occasion historique de communion des peuples, races, religions. La remémoration nostalgique d’un passé glorieux devrait plutôt influencer les actions et engagements du futur . Loin de scander un « sancto subito » (saint maintenant), il serait intéressant de mieux analyser l’impact de ce combattant de l’égalité des peuples sur la scène internationale, ensuite le statu quo ou l’immutabilité de l’ordre international et achever sur la carrure d’un vrai « mandeliste ».

Mandela, leader du monde ‘libre ‘

Rappelons-le brièvement que les relations internationales font état des rapports complexes entre les Etats, acteurs traditionnels de la scène internationale. Ces relations, de nos jours font intervenir des acteurs non-étatiques qui complexifient l’arène internationale. Des individus éminents influençant l’histoire jusqu’aux agents religieux (Dalaï Lama, papes,..), tribaux, familiaux, les réseaux sociaux et des acteurs politiques contribuent à décentraliser une politique internationale liée aux Etats. En ce sens, Mandela en tant qu’individu nous intéresse au plus haut point non pas parce que sa mort rassemble des chefs d’Etat aux divergences politiques et idéologiques avouées ou non, mais pour le sceau d’un monde libre de préjugés raciaux, ethniques et idéologiques dont il a marqué l’histoire. Pour Mandela, “I have fought against white domination and I have fought against black domination. I’ve cherished the ideal of a democratic and free society in which all persons live together in harmony and with equal opportunities. It is an ideal which I hope to live for and to achieve. But if needs be, it is an ideal for which I am prepared to die” (Je me suis battu contre la domination blanche et celle noire. J’ai entretenu avec affection l’idéal de la démocratie et d’une société libre où tout le monde pourra vivre en harmonie et avec d’égales opportunités. C’est pour cet idéal que je vis et veut atteindre. Et c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir si besoin se fait sentir.) C’est dire que les motivations profondes qui animaient Mandela dès les débuts de sa carrière d’avocat c’est-à-dire les idéaux de liberté, de démocratie et ensuite d’artisan de la non-violence, de l’acceptation de la différence de l’autre n’ont pas seulement été des intérêts privés mais sont devenus, par le truchement de son combat de tous les jours, une réalité plus ou moins évidente en Afrique du Sud. Il est intéressant de voir comment il a transcendé les races, les religions etc. Mandela a eu le mérite d’avoir incarné dans sa personne et dans son peuple des idées de non-violence, de paix, de liberté, de négociation par la parole plutôt que par les armes. La défense des droits des Noirs, la reconnaissance de la cohabitation entre plusieurs races ne fut pas seulement ce pourquoi il aurait voulu mourir, mais aussi ce pour quoi il voulait que son peuple se batte. C’est le mariage consommé entre son idéal et les aspirations du peuple sud-africain. C’est l’immanence et la parfaite dissolution de l’intérêt idéel et même socio-économique de Mandela dans les aspirations de bien-être du peuple qui nous amène à qualifier l’homme Madiba d’acteur rationnel des relations internationales. D’où cette citation de Mandela dans son ouvrage Un long chemin vers la liberté : « Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine, des préjugés et de l’étroitesse d’esprit. » Quels doivent être en conséquence le bouleversement qui doit être opérer sur la scène internationale ?

L’immutabilité de l’ordre international

La scène internationale est le manifeste même d’un hiatus entre le dire et le faire, les discours et les pratiques subséquentes, les idéaux et les faits. En écho au discours de Barack Obama, on pourrait dire que nombre sont les chefs d’Etat qui rendent hommage au héraut de la démocratie, de la liberté et de l’égalité des hommes mais ne respectent pas les droits de leurs peuples, les oppriment et même instrumentalisent les différences ethniques, religieuses pour se maintenir au pouvoir. Combien sont légions les exemples de chefs d’Etat qui confondent leur autorité au pouvoir politique. L’Etat est devenu plus qu’un héritage, un legs familial voire clanique, l’Etat est devenu le destin d’un personnage auréolé par ses affidés et son cercle vicieux d’amis politiques. De la Gambie et du Bénin où les présidents Yaya Jammeh et Yayi Boni sont obnubilés par des coups d’Etat fictif qui tenteraient de les enrayer de la scène politique jusqu’aux vieux baobabs du Cameroun Paul Biya, du Burkina Faso Blaise Compaoré et du Zimbabwé en passant par des présidents-rebelles en Centrafrique, on pourrait dire que l’Afrique contient en elle-même les germes de sa propre contradiction.

D’une manière générale, les chefs d’Etats ont salué la mémoire d’une icône, d’un combattant infatigable de la liberté, de l’égalité et de la non-violence. Jusqu’à quand encore l’Afrique héritera-t-elle de chefs d’Etats qui banalisent les droits de l’homme et de la femme, discriminent un groupe ethnique au détriment d’un autre, manipulent l’opinion publique ? Jusqu’à quand les chefs d’Etat useraient de leur pouvoir pour tripatouiller les élections parce que «  le peuple a besoin de lui ? ». L’heure n’est point aux pleurs, aux larmes et aux gémissements ni aux discours élogieux, encenseurs, dithyrambiques et apologétiques sur Mandela. L’heure est pour les Africains de pleurer sur leurs chefs d’Etat et pour les Chefs d’Etat de pleurer sur leur peuple car la répression occasionnant craintes et répressions est dépassée. Le glas de l’ère Mandela a sonné dans le but de célébrer main dans la main la cohabitation du pauvre et du riche, du puissant et du faible, du noir et du blanc, du religieux et de l’athée. Cette ère Mandela repose sans aucun doute à notre avis sur les hommes de ce monde vu la démission et le faillibilisme des chefs d’Etat.

La carrure du vrai mandeliste

A voir la sympathie sur les réseaux sociaux, l’empressement avec lequel les « facebookeurs » changent leurs photos de profil en mettant la photo de Mandela, on croirait tout de suite que Nelson Mandela s’est multiplié en des milliers de Mandelistes dans le monde. Une chose est de scander, d’ovationner et de soutenir à force d’arguments ce que Mandela est, ce qu’il a fait, une autre chose est de l’incarner non pas dans les photos mais en réalité. Combien notre monde a-t-il besoin d’actuels et de futurs Mandela et non point des chroniqueurs et des griots à la sauvette ? La vague qui secoue le monde actuellement avec la mort de Mandela s’estompera avec l’année 2013 sans doute et les médias auront de quoi se moquer de nous dès qu’ils auront une autre nouvelle à mettre sous la dent. Les média ont tendance à soulever une frénésie et à la faire taire. Aussi, il est important de savoir celui qui est « le maître de mon destin et le capitaine de mon âme. » Est-ce l’engouement populaire autour de Mandela ou les documentaires vus ici où là sur toutes les chaînes du monde ou plutôt est-ce la conviction personnelle que Mandela a vécue et est mort pour une cause que je dois incarner ?  Le monde juste, égalitaire où la famine, les maladies, les armes tendent à se taire pour faire place à la tolérance, l’acceptation de la différence de l’autre ne pourrait advenir que de ma propre responsabilité. Aux propos de Mandela, j’ajouterais bien « je suis le maître de notre destin, le capitaine de notre âme. »

Le contraste qui apparaît quand la Miss France 2004, une métisse très belle Flora Coquerel succombe à de subtiles invectives racistes alors que ces mêmes français rendent hommage à Mandela. Il demeure pertinent que le temps avant et après Mandela est ponctué de mauvais augures. Mais ces augures s’empireront si la xénophobie dans le monde remplace les idéaux de tolérance, d’égalité ethnique. La balle est dans le camp du citoyen du monde.


L’Afrique au sommet de Paris : un sommet de trop ?

credit RFI
credit RFI

 

Qualifiées dans les débuts par le terme péjoratif de Françafrique, les relations internationales entre la France et l’Afrique sont loin d’achever leurs soubresauts. Du 6 au 7 décembre, certains chefs d’Etat africains rendus intègre aux yeux d’une « soi-disant communauté internationale » se réunissent pour discuter- je dirais- entendre ce que leur partenaire légal ou légitime a préparé comme speech sur les thèmes de paix et sécurité en Afrique, Partenariat économique et développement, changement climatique. C’est une belle initiative, mais elle n’ est pas la première. D’un côté, nous sommes actuellement au 26e sommet , sommet réuni par la « mère patrie », de l’autre une Afrique avec comme devise « obligation de moyens, mais pas de résultats ». « Gendarme de l’Afrique » ou « Mercenaire de l’Afrique » ? La réalité montre des interventions musclées en Côte d’Ivoire, au Mali, en Centrafrique et en Libye ces dernières années. On dirait que la politique de défense de la France a intégré le pré carré africain. Il serait pour nous opportun de faire une relecture critique des sommets déjà tenus dans ces mêmes cadres, les enjeux qui sous-tendent ce sommet, et enfin les défis que doivent relever les Africains pour un monde plus sain et durable.

La France au secours de l’Afrique

Conviés au 26e sommet à Paris, les Etats africains peinent à assurer leur propre sécurité. L’année 2013 a été marquée par un retour en force du terrorisme nigérian, une résurgence et montée des violences au Mali, au Congo, en Centrafrique. Il faut noter que depuis 1998, la France appuie l’Afrique dans ses efforts de consolidation de la paix. En effet, le premier sommet Afrique- France fut ouvert à Louvre cette même année suite à la montée des hostilités dans les deux Congo et la France eut comme initiative d’accompagner les Etats africains à travers la mise en place d’un programme Recamp (Renforcement des capacités des forces de maintien de la paix). Elle a participé à la création et la formation des écoles nationales à vocation régionale de sécurité[1] (ENVR). Le dernier sommet de Nice en 2010 a permis à la France de former 12 500 soldats africains afin que « l’Afrique s’approprie peu à peu sa défense. » Au-delà de l’appui pédagogique, elle offre à l’Afrique un appui logistique et humain. En 2013, on peut dénombrer 4 000 hommes initialement au Mali, 1 200 hommes à déployer en Centrafrique sans compter les milliers d’hommes repartis dans les bases militaires disséminées au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Gabon, en Centrafrique. L’Afrique a donc toute l’assistance dont elle a besoin pour résoudre ces conflits. Mais la réalité en est tout autre : de sommet en sommet, de conflit en conflit, la France fait preuve de sa nécessité de protéger ses nombreux intérêts en Afrique, des intérêts économiques, géopolitiques et géostratégiques. On comprend pourquoi elle est l’un des défenseurs attitrés et le relai des besoins et préoccupations de l’Afrique dans les grands lieux de décision économique et politique comme le Conseil de sécurité de l’ONU, le FMI (Fonds monétaire international) , le Conseil de l’Union européenne, le G8 ou le G10.

Le signe sous lequel ce 26e sommet est placé doit éveiller notre attention sur la présence unique de la France sur le dossier Afrique. Elle semble être abandonnée par ses partenaires européens ou plutôt elle semble affirmer son droit sur ce dossier. L’essentiel est que trois axes sont maintenant très liés et ressortis dans le sommet du 6 au 7 décembre : la paix, la sécurité et l’économie et l’environnement. Les enjeux sont de plus en plus déclarés. Il s’agit de promouvoir une paix durable en Afrique, de préserver la nature et les ressources parce qu’elle est le continent de prédilection d’un avenir économique réussi. Cette destinée de l’Afrique, cette noblesse future et les potentialités existantes à préserver pour sauver toute l’humanité semble être le point saillant d’une ruée de la France en Afrique malgré les critiques. Le sommet de Bamako en décembre 2005 se fit l’écho de ce renouveau futur du continent et montra comment « la vitalité, la créativité et les aspirations de la jeunesse africaine » constituent les socles sur lesquels la démocratie, la paix peuvent être construites. Face au « bien » que l’Europe et la France semblent voir dans le destin futur de l’Afrique, quels défis importants l’Afrique doit-elle relever pour résoudre ces conflits et amorcer un développement ?

Pour une Afrique plus pacifique et émergente

Il serait faux de soutenir que l’Afrique n’a point de capacités pour faire face aux crises qu’elle rencontre. De la formation des armées républicaines en passant par l’aide des forces panafricaines de maintien de la paix (Misma, Misca), les réformes du secteur de sécurité dans les pays aux appuis logistiques, humains des puissances européennes, le trafic des armes, de la drogue, le terrorisme et la piraterie maritime, les rebellions armées continuent de secouer le continent. Bien que des mécanismes de résolution des conflits ont été mis en place par les Nations unies pour faire face aux crises violentes en Afrique, il est temps pour les Africains qu’ils soient leaders ou non de construire la société à travers des mécanismes de prévention de conflit. Les interventions militaires ou la réforme du secteur de sécurité sont nécessaires certes, mais elles ne résolvent que la partie visible de l’iceberg. La capacité d’anticipation et de prévention des conflits doit miser sur le renforcement des capacités des communautés locales à faire face aux menaces de chômage, de famine. La paix en Afrique n’est plus possible par le haut, elle doit commencer par le bas, par la mobilisation des forces vives de la nation : la naissance d’une pléthorique d’ONG en Afrique ne doit pas être l’occasion de cultiver l’assistanat, mais d’innover, de créer des nouveaux secteurs de l’emploi par exemple dans le rétablissement du droit dans les familles, la propreté du quartier, de la ville. Il serait intéressant de voir que le peuple se soucie de son propre avenir sans compter sur une élite politique décevante au moyen de la création des pôles sociaux susceptibles de réformer les services publics, l’éducation, la santé. Attendre toujours de l’Etat, accepter que la sécurité et la paix soient seulement aux mains d’une petite armée c’est faire preuve de dissidence. La population civile doit reprendre en main son propre développement, elle doit comprendre que la faillite de l’Etat ne doit en aucun cas entraîner sa passivité; mais plutôt son secours. C’est à travers la création de ses opportunités, à la possibilité de travailler ensemble pour endiguer les lacunes de la gouvernance politique que le peuple africain peut assurer son propre développement. La tâche devant nous est donc ardue et ni la France, ni les autres partenaires économiques ne le feront à notre place dans un contexte de libéralisme économique.



[1] Il en existe 16 dans 10 pays africains : Cameroun 3, Mali 2, Sénégal 2, Benin 2, Gabon 2, Guinée équatoriale 1, Togo 1, Burkina Faso 1, Congo 1, Niger 1


Une 3ème guerre mondiale évitée ?

Dix ans se sont écoulés depuis que le programme nucléaire de l’Iran réveilla la folie meurtrière et hégémonique des diverses puissances. Vingt-et-unième puissance économique mondiale, deuxième producteur mondiale du pétrole, l’Iran de par sa position géographique et stratégique dans le Moyen Orient menace les intérêts de plusieurs puissances. Son programme nucléaire était un moyen de faire face à la montée de ses ennemis puissants dans la zone et hors de la région persique. Suite à l’accord « historique » conclu sur le nucléaire à Genève le dimanche 24 novembre dernier, il serait intéressant d’analyser les forces et alliances en présence, les enjeux de différentes puissances dans cette zone immensément riche en hydrocarbures.

L’Iran, une puissance « belliqueuse »

Le dernier usage de la bombe atomique lors des frappes de Huroshima et Nagazaki et l’équilibre des puissances pendant la guerre froide dû à l’acquisition par les deux parties russe et américaine des bombes nucléaires ont conduit à créer en 1957 sous l’égide des Nations Unies une Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) qui aura pour rôle de favoriser et d’encourager l’utilisation pacifique de l’énergie atomique dans le monde. Il faudrait lutter en faveur d’ « atomes pour la paix » en d’autres termes il s’agit de travailler sur l’uranium pour produire l’énergie électrique plutôt que l’arme nucléaire.

 

L’Iran bien qu’ayant ratifié le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 1970, donne du fil à retordre à l’AIEA pour la conduite d’inspections de ses centres nucléaires. En effet, depuis la mission américaine en 1978, la guerre Iran-Irak en 1980, l’Iran cherche à renforcer sa position militaire dans la zone. Il faut rappeler qu’elle est à majorité chiite et qu’elle est en perpétuelle tension avec ses voisins sunnites comme l’Arabie Saoudite, le Qatar, la Turquie. L’Iran est aussi le principal allié du Hamas palestinien en lutte contre Israël. L’Iran procure au Hamas des combattants du Hezbollah, un appui financier et politique. En déclarant ouvertement la destruction d’Israël, l’Iran a déclaré en quelque sorte la guerre et cherche à renforcer son bouclier militaire à travers le programme nucléaire. Ce programme nucléaire soutenu à l’origine par les USA (1950- 1960) pendant la guerre froide constitue de nos jours un bâton dans les roues pour l’hégémonie de l’axe israëlo-américain. L’Iran avait soutenu que son projet nucléaire était dirigé à des fins pacifiques en vue de fournir plus d’énergie aux villes iranienne, de libérer les ressources pétrolières et de booster l’économie. Mais la difficulté de contrôle des centrifugeuses iraniennes et leur dissimulation dans des refuges souterrains va entrainer une vague de contestation contre le programme nucléaire de l’Iran en 2002. Des sanctions économiques, des embargos sur le pétrole vont s’abattre sur l’Iran afin de l’affaiblir économiquement et de diminuer l’enrichissement de l’uranium.

L’Iran a l’intention sans doute  la volonté de posséder l’arme atomique comme son ennemi 1er Israël malgré le Traité de Non-Prolifération des armes nucléaires. Tandis que les pays détenteurs de l’arme atomique comme la Russie, les Etats-Unis, le Royaume Uni, la France, la Chine, la Russie sont autorisés à entretenir ou moderniser l’arsenal automatique, les autres pays non signataires comme le Pakistan, Israël, Corée du Nord mènent des recherches classées « secret défense » pour entretenir ou moderniser l’arsenal automatique. Cela semble dire que la possibilité de continuer des recherches en armes nucléaires dépendra du parrain possible qui te supporte, tout étant question de la réalité des relations internationales : les plus forts font office de loi et gouvernent les plus faibles. C’est suivant ce principe que l’Iran modernise sa puissance nucléaire afin de faire face à toute invasion israelo-américaine ou de faire entendre sa voix dans le Moyen-Orient. Cette puissance nucléaire lui permettra de diversifier ses sources énergétiques, de développer la capacité de l’industrie pétrolière. Pour les occidentaux, enrichir l’uranium pour des « utilisations pacifiques » n’est que la face apparente d’un grand projet nucléaire américain à usage militaire nationale.

« Les 5 +1 » ou la Nouvelle alliance du Conseil de Sécurité.

Il a été suivi ces derniers mois la scission politique et le blocage diplomatique américano-français et russo-chinois sur la question syrienne. Il serait aussi d’un grand intérêt de souligner combien la Russie est l’un des partenaires fidèles des grands pays pétroliers de cette zone. L’accord sur le nucléaire iranien signé le dimanche 24 novembre dénote la capacité de dissuasion des Occidentaux. Il a été obtenu que l’Iran continue à enrichir son uranium à moins de 5% et qu’une « joint commission » soit mise en place pour inspecter les centres nucléaires iraniens. Bien que cet accord traduit plus une stratégie de domination sur un pays anti-occidental qu’une manière de juguler la prolifération de l’arme nucléaire, il est important de souligner combien les puissances européennes useront de tous les moyens possibles pour affaiblir ses ennemis. Ces accords ont amené les USA à adopter une politique plus diplomatique que belliqueuse afin de faire de l’Iran un de leurs alliés dans la région. Les USA, soutenus par Israël qui dès l’abord voulait envoyer des frappes sur l’Iran, ont changé leur diplomatie de punition en un rapprochement stratégique. Pour les USA, un Iran plus modéré peut contribuer à jouer un rôle positif dans la région. L’Iran a en effet son mot à dire dans la guerre en Syrie, en Irak et en Afghanistan. Dans cet accord conclu, les Américains annoncent de manière sous-entendue la reprise des relations diplomatiques entre l’Iran et les USA et même un possible retour de leurs entreprises sur le marché iranien.

Quant à la France, elle avait une position très radicale sur le programme nucléaire iranien. Elle voulait une vraie diminution de l’enrichissement de l’uranium iranien qui permettrait de concilier les critiques du Congrès américain et limiter les capacités de nuisance d’Israël. La France cherchait à mettre un terme au nucléaire militaire iranien et à opérer la distinction entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire. Mais c’est avant tout la naissance d’un « général-diplomate » François Hollande qui ressort de cet accord influencé par la France.

 

Israël et Arabie Saoudite, ces perdants

Une chose à retenir dans cette région du Moyen-Orient, c’est la capacité pour deux « ennemis » de s’allier pour combattre un « ennemi commun ». On dirait qu’avec l’accord de Genève sur le nucléaire iranien, l’Arabie Saoudite risque de perdre une partie de sa puissance dans la zone d’autant plus que la levée de certaines sanctions économiques va permettre à l’Iran de le rattraper économiquement. Il faut signaler que l’Arabie Saoudite à majorité sunnite et wahhabite cherche à établir au Moyen-Orient un axe sunnite pour contrer l’avancée du chiisme iranien. L’Iran demeure encore le géant qui seul peut opposer une résistance à l’Arabie Saoudite. De plus, avec cet accord, l’Arabie Saoudite semble perdre le privilège de principal allié et filleul des USA.

Quand à Israël, la tension est vive. Benjamin Netanyahou a crié au scandale, à une erreur historique parce qu’Israël est le premier Etat qui risque d’en pâtir devant une puissance nucléaire comme l’Iran. De plus, les relations Israël- Etats Unis n’arrangent plus les choses d’autant plus qu’Israël maintient un avis radical sur le programme nucléaire iranien. Le gouvernement de Obama prône des voies pacifiques à la résolution de la crise palestinienne alors qu’Israël complique les discussions en exécutant des projets de constructions sur les terres palestiniennes. Actuellement le ton dur qui existe entre ces deux alliés entraine une radicalisation de la position belliqueuse d’Israël dans la zone et même une non-reconnaissance de cet accord. C’est dire combien l’obtention de cet accord a créé plutôt un grand perdant Israël qui a la réelle intention de faire capoter coûte que coûte le programme nucléaire iranien à cause de sa forte stratégie militaire dans la zone.

Après avoir fait taire l’Iran, c’est au tour de la Corée du Nord d’être sous le courroux des grandes puissances. C’est la preuve que les grands frères font la loi et donnent les armes à ceux qui luttent pour eux plutôt qu’à ceux qui veulent être comme eux.

AP/ Richard Adrew
AP/ Richard Adrew


La sécurité en France-Afrique : entre farce et sommets

crédit photo: abidjan.net
Crédit photo : abidjan.net

 

Depuis l’implosion et l’assassinat de Kadhafi en octobre 2011, l’Afrique de l’Ouest et celle du Sahel sont confrontées à une recrudescence des violences et de l’insécurité sur le Vieux Continent. Malgré les réformes du secteur de sécurité en Côte d’Ivoire, au Mali et l’avènement d’une démocratie bancale en Libye, il est temps pour « Mère France » de couver ses œufs économiques en Afrique, de sauvegarder ses intérêts. La sécurité intérieure de la France est devenue plus que liée à sa filleule de toujours l’Afrique au point que menacer l’Afrique, c’est menacer le territoire français. Entre le chaos des milices basées en Libye et en Centrafrique qui sème la zizanie et crée une zone grise en Afrique et le sommet de sécurité du continent encore réfléchi sur les parvis de l’Elysée, quel pas s’avère nécessaire pour une Afrique plus pacifiée ?

A quand la sécurité sur le Vieux Continent ?

Que dire d’une actualité qui taxe l’Afrique de continent le plus vulnérable au Monde ? Bien qu’exagérée, l’actualité nous montre un tableau assez sombre. Entre l’enlèvement du numéro 2 des renseignements libyens Ali Zeidan et l’invasion-expédition du commando américain pour extirper l’un des barbus djihadistes Abous Anas Al-Libi, le vide sécuritaire se creuse. De la même manière que l’Etat malien peine à sécuriser le Nord, l’Etat libyen a octroyé sa fonction régalienne de sécurité du territoire aux différentes milices.

Plusieurs milices ou groupes armés contrôlent les alentours de Tripoli et se vouent une haine féroce. Des civils armés à bord de pick-up munis de canons antiaériens cherchent à prendre le contrôle de la capitale. A cela s’ajoutent une police et une armée formée d’anciens miliciens, de combattants à la volée qui n’ont reçu aucune formation. C’est le même tableau qu’on retrouvait en Côte d’Ivoire et même actuellement avec des miliciens qui faute de jouer à des attaques armées sporadiques contre des barrages ou postes de gendarmerie se sont mués en véritables bandes de coupeurs de route.

Des morts, on en compte depuis la Libye jusqu’au Nigeria en passant par le Niger, la Mauritanie, la Côte d’Ivoire, la Centrafrique et le Mali. Loin d’exiger une armée blindée jusqu’aux dents qui assure la sécurité totale sur la terre de nos ancêtres, je voudrais attirer notre attention sur le détournement de la mission de ces forces de l’ordre. Les chefs d’Etat ont transformé les forces de sécurité et de défense en milices privées pour les servir ou plutôt leurs intérêts. Ceux qui doivent sécuriser l’Etat deviennent ceux qui le menacent.

En Côte d’Ivoire, au Togo, j’ai pu voir combien les citoyens ont une peur psychologique devant un treillis militaire. Le soldat est devenu plus symbole de menace que symbole de protection. Sa mission est de confirmer son patron-président au pouvoir. Le citoyen est un mal nécessaire, une cible à éliminer pour servir l’intérêt de la « nation ». Tabasser est le mot d’ordre, obéir est la seule solution. Comme un troupeau qui suit son maître, la réforme du secteur de sécurité a été une longue formation (Côte d’Ivoire, Mali) qui a fait somnoler beaucoup de dignitaires militaires et bailler d’autres. La force fonde le droit, celui qui a la mitraillette se fait respecter. En conséquence, la Patrie-défenseure des droits de l’homme et de la sécurité de « ses » compatriotes va venir à la rescousse de l’Afrique.

La France, gardienne de l’Afrique

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Crédit photo : abidjan.net
Valls et IBK
Crédit photo : AFP

 

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En 2010, il est recensé 224 831 Français installés en Afrique. Trois ans plus tard, il est possible qu’on dénombre avec les départs et entrées environ 225 000 Français. Et pourtant, les médias occidentaux clament que l’Afrique est plus instable que jamais. Elle est instable, mais hospitalière vu la dernière tournée du ministre de l’Intérieur Manuel Valls. Après le Sénégal, la Côte d’Ivoire, c’est au tour du Mali de le recevoir. La farce continue en Afrique et continuera toujours d’autant plus qu’un ministre de l’Intérieur français est systématiquement accueilli par les présidents !!! Depuis quand nos ministres africains sont reçus par François Hollande dont l’emploi du temps est chargé ? Valls est reçu en audience par Macky Sall, Alassane Ouattara, et Ibrahim Boubacar Keita.

On remarque bien que cette visite est stratégique d’autant plus que ces pays accueillent les plus importantes bases militaires françaises en Afrique de l’Ouest. Le comble dans la visite en Côte d’Ivoire, c’est que l’on profite de la présence de Valls pour souligner les « relations de confiance » ou le lien « naturel » qui lie la France à la Côte d’Ivoire et exprimer la gratitude du Chef de l’Etat pour la sécurisation du territoire ivoirien par la France à travers une décoration de « Commandeur de l’Ordre national de Côte d’Ivoire ».

Et la farce continue. L’ambassadeur français a même plus de poids et d’entrées à la présidence ivoirienne que quiconque. En retour, 500 armes légères seront offertes par Paris contre le « grand banditisme » pour réformer le secteur de sécurité. La sécurité est plus efficace quand elle est assurée par la France, croirait-on. Du terrorisme au grand banditisme des routes en passant par les trafiquants de drogue, la France réitère sa politique sécuritaire à travers un plan Sahel piloté depuis Dakar. France-Afrique, franc de l’Afrique, c’est un cocktail bien préparé par Valls que servira son patron François Hollande au sommet de l’Elysée pour la paix et la sécurité en Afrique. La plupart des Etats francophones sont déjà au garde-à-vous et prêts à suivre leur mentor. Pendant ce temps, des Africains se débrouillent eux-mêmes pour garantir leur propre sécurité.

La sécurité de l’Afrique par les Africains.

La sécurité en Afrique plus spécialement en Côte d’Ivoire est dans les mains des petites agences de gardiennage. « Bravo 1 à Bravo 2 » entend-on dans leur talkie-walkie. Les habitants ont mis leur confiance plus dans le treillis jaune que dans le treillis militaire.  Au niveau continental, les dissensions politiques entre les grandes puissances militaires comme le Tchad, l’Algérie, le Nigeria, l’Afrique du Sud et la course au leadership ne favorisent même pas la création d’une véritable force africaine. En conséquence, aucune décision n’est prise sans le négociateur France ou le vrai guerrier des nombreux trafics d’armes, de drogue. Les pays africains ont tant à gagner à se réunir, à allier leurs forces militaires. Entre corruption et trafic de toutes sortes, chacun veille sur son grain. La jungle a pris le dessus et il vaut mieux avoir la force pour rester en vie. Quel enfer de plus pour nous rendre plus vulnérables devant l’immensité des menaces grandissantes !!!


Cri de détresse de l’environnement et tragédie humaine

Crédit AP/ Bullit Marquez
Crédit AP/ Bullit Marquez

Hommage et Compassion à toutes ces victimes martyrs de nos actions néfastes sur Mère Nature.

Face à un environnement de plus en plus rebelle, l’homme demeure impuissant et inefficace. La prévision météorologique n’est sans doute pas la solution convenable pour circonscrire et contrôler les catastrophes naturelles qui s’abattent sur la planète. Le rechauffement de la planète s’accompagne des désastres inimaginables dans l’une ou l’autre partie du globe. En témoignent le dernier passage du supertyphon Haiyan dans les Philippines qui auraient fait 10.000 morts. Que doit-on comprendre de ces fatalités naturelles dont l’origine est loin d’un decret divin mais plus proche de l’action des hommes ?

Réchauffement climatique et raison humaine

Les onze dernières années (1995- 2006) figurent parmi les plus chaudes de la planète. La température moyenne s’est élevée de 1,8°C et atteindra 4,5°C d’ici 2100. L’humanité dans un souci de développement économique a d’une manière excessive épuisé la nature et hâté sa destruction. La croissance galopante des pays industrialisées et en voie d’industrialisation s’accompagne d’une émission très forte de gaz à effet de serre, de la combustion d’énergies comme le pétrole, le charbon, le gaz naturel qui polluent non seulement l’environnement mais entraîne d’autres conséquences néfastes sans précédent comme le réchauffement climatique. Malgré tous les accords signés en 2005 (le protocole de Kyoto) pour réduire les gaz à effet de serre néfaste pour la survie de la planète, l’Espagne a augmenté ses émissions de 50% depuis 1990, l’Australie de 30%, le Canada de 22%. La Chine quant à elle bat le premier record d’émission de gaz à effet de serre. Les USA ont même refusé de signer ce protocole qui selon eux limite leur développement économique. L’histoire retiendra que l’économie, le développement se développera au détriment du social, de l’homme et de son environnement. La boutade de Descartes sur l’homme en tant que « maîtres et possesseurs de la nature » est loin d’être le cas. L’homme a privilégié l’économie et la croissance qu’il a oublié sa propre survie et la survie de son environnement.

Vers une éthique de l’environnement : le développement durable

Les manifestations de la rationalité technologique sont patentes : le typhon en Philippines, de très fortes cyclones tropicaux, l’augmentation du niveau de la mère, de fortes inondations au Mali, au Togo à cause de la fonte des glaciers, l’évidente avancée de la mer dans le Golfe de guinnée. A tout cela s’ajoute ces dernières semaines l’observation minutieuse qu’a fait Elites d’Afriques cette dernière semaine : l’insalubrité grandissante du quartier de Bè à Lomé, le site le plus pollué du monde à Agbogbloshie à Accra où sont stockés des déchets de toute nature. Il importe que l’africain et surtout le citoyen du monde soit de plus en plus conscient de son action sur la planète. L’apocalypse en Philippines, les raz de marée, les séismes dans d’autres parties de la planète sont entièrement dus à notre insouciance et notre indifférence notoire sur notre environnement. La terre a été tellement polluée qu’elle demande maintenant réparations pour dommages et intérêts. Les simples gestes comme « jeter des sachets par la voiture, uriner à temps et à contre-temps dans tous les coins, mettre des feux de bois et brûler des tas d’ordure sans précaution » sont amplifiés à l’échelle mondiale en catastrophes naturelles. Le développement durable nous convie à respecter notre écosystème, à permettre aux générations futures d’hériter d’un environnement sain en évitant tout geste visant à détruire l’environnement. Il demeure qu’il reste beaucoup à faire pour créer des usines de recyclage en Afrique en vue de résoudre le problème de l’emploi et de pacifier la nature. Notre vie en dépend.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


La faim du M23, fin et suite ?

Le M23 via radiookapi.net
Le M23 via radiookapi.net

L’instabilité notoire au Nord-est du RDC remonte dans l’histoire, une histoire servie avec un cocktail d’intérêts géostratégiques, économiques et politiques. L’histoire de la postcolonie retiendra ce groupe de réfugiés hutus fuyant les atrocités du génocide Rwanda afin de s’incruster dans cette partie de l’Afrique dont le sous-sol est riche à la fois en colbat, en or, en zinc, manganèse, coltan et pierres précieuses. Cette région est taxé de « zones grises » par les politologues du fait du fourre-tout de factions armées, de viols, meurtres, assassinats qui polluent et gangrènent la quiétude des populations depuis la prise du pouvoir par Laurent-Désiré Kabila. Acculé de deux côtés de la frontière par l’armée rwandaise et ougandaise qui lorgnent de l’œil les richesses et espèrent un contrôle sur l’est de la RDC, la pacification est loin d’une « victoire » sur le M23. La suite de notre analyse montrera combien la pertinence des milices armées dans l’Est du Congo ressemble à un dragon à sept têtes des légendes chinoises. Le mal est plus pernicieux que l’on y croit.

 

Depuis le 06 mai 2012, la faction armée ayant fait défection et refusé l’accord de paix de Kinshasa signé le 23 mars afin d’intégrer les forces armées républicaines (FARDC) rejoignent la rébellion. Ils se dotent de tous les moyens militaires mais aussi médiatiques. Leur propagande même se fait via leur page facebook qu’ils entretiennent pour diffuser leurs faits d’armes. Leurs premières offensives furent à la fois fulgurantes et rapides : les localités de Jomba, Chengerero tombent autour du 1er Juillet 2012 après avoir repoussé les renforts de l’armée nationale à la fin mai. L’armée nationale est instable d’autant plus que de nouvelles vagues de défections viennent renforcer les rangs du M23. L’ONU sentant un chaos sans précédent dans la zone envoie la MONUSCO afin d’imposer la paix, empêcher l’expansion des groupes armés dans l’est, les neutraliser et les désarmer. D’autant plus qu’une viande avariée ne peut être assaillie par une seule mouche, de même d’autres acteurs non étatiques comme les milices Maï-Maï et le FDLR se sont invités à la table des hostilités. Entre négociations, trêves, reprises des armes, l’homme, la femme, l’enfant habitant cette zone sordide est accablé de toutes sortes de maux : des chirurgies volontaires (manches longues, manches courtes), l’imposition des armes aux enfants, les viols, assassinats stratégiques. La liste est longue. En quelques jours, Goma est pris, l’armée prend la poudre d’escampette devant de petits voyous organisés. Quelle splendide et ridicule image !!!!

Deux remarques à retenir : La guerre est cyclique et très contagieuse. Elle est comme un gaz qui s’évapore par tous les trous possibles. En effet, le génocide rwandais de 1994 n’est point fini, elle s’est déplacée simplement sur les frontières voisines du Nord-Est Congo. Le Tsutsi Sultani Emmanuel Makenga dirige la branche militaire du M23 d’autant plus que l’armée rwandaise cherche à chasser de son sol ses réfugiés hutus et tsutsi, foyer possible d’une rebellion, le M23. Peut-on dire alors que la fin du M23 est arrivée comme s’empresse de dire les médias ? Sont-ils tous morts ou ont-ils pris la fuite comme les fois dernières pour revenir en force ? L’Africain oubliera toujours de retenir l’histoire. Même si des combattants ont été chassés du pays dans la nuit du lundi 4 au mardi 5 novembre, la loi de la physique newtonienne rappelle que la nature a horreur du vide. N’empêche que des groupes d’islamistes radicaux comme l’ADF-NALU (opposition ougandaise) et d’autres milices se cachent dans les collines du Tshanzu ou ailleurs afin de semer la zizanie et de somaliser la zone.

Tant que les grains de maïs seront au sol, les coqs se battront toujours. Le Nord-Kivu est loin d’être apaisé, s’en suivra certainement une course à la richesse qu’elle soit politique ou militaire. Les richesses ont tellement attiré les pays de la zone (Rwanda, Ouganda) et les litiges frontaliers avec l’Angola à propos du pétrole maritime sont loin d’être achevés. Un grand travail demeure : une armée divisée, des voisins jaloux, des rebelles disséminées, des populations affaiblies et abattues par des décennies de guerre. Quelle sécurité pour l’Afrique en général et pour nos pays en particulier ? la question demeure.


Etats africains, bergers ou mercenaires?

Nairobi via afrique-voyage.net par Jean
Nairobi via afrique-voyage.net par Jean

Un article signé d’un philosophe Boris Flaminia 

La sécurité est un besoin moteur constitutif même de la nature humaine. Etre à l’abri des aléas et dangers de la vie, de son environnement est une exigence qui tient son origine de la nature humaine. C’est donc l’instinct de conservation que l’homme a en commun avec les animaux. Mais les hommes, êtres raisonnables à la différence de l’animal, réunis en groupe, en collectivité avec leur semblable donc en société, ont  pris des dispositions nécessaires pour leur vivre ensemble et pour orienter  et circonscrire les actions et les agissements de tout un chacun dans la répression et la censure des passions et actes qui se retourneraient contre la liberté des personnes et qui mettraient en danger leur sécurité. L’ensemble de ces dispositions est incarné par l’État à qui tous reconnaissent la légitimité d’assurer leur sécurité et de veiller à leur bien-être. Tel est le devoir de l’autorité étatique envers ses fils et filles : l’état, berger. L’autorité apparaissant comme cachet spécifique du social. Mais, force nous est de constater dans notre contexte africain une perversion dans cette vocation fondamentale de l’État qui est devenu le premier danger et le criminel exposant la vie de ses citoyens et citoyennes plutôt que de la préserver : l’état, mercenaire. Qu’est-ce l’État ? Qu’entendons-nous par insécurité civile ? Comment l’État en est-il arrivé là ? Y a-t-il des raisons pour mettre en mal la sécurité ? Comment concevoir la conversion du berger en mercenaire ? Au nom de quoi en fait ?  Que proposons-nous ? Ces différentes questions vont guider notre analyse et nous aideront à mieux cerner notre sujet. Loin de prétendre à une expertise, ce qui ne ressort pas de notre habileté, notre réflexion va juste se résumer en une méditation de ce que nous constatons et vivons dans le contexte africain en matière d’insécurité, c’est-à-dire affectant le bien-être et le vivre ensemble des civils dont la responsabilité incombe à l’État.

                                                                                          I.            Qu’est-ce que l’État ?

  1. A.    Définition.

Selon Hobbes, l’État « est une personne dont les actes ont pour auteur, à la suite de conventions, mutuelles passées entre eux-mêmes, chacun des membres d’une grande  multitude, afin que celui qui est cette personne puisse utiliser la force et les moyens de tous comme il l’estimera convenir à leur paix et à leur défense commune »[1]. Carré de Malberg à son tour définit l’État comme suit : « Une communauté d’hommes, fixée sur un territoire propre et possédant une organisation d’où résulte pour le groupe envisagé dans ses rapports avec ses membres une puissance suprême d’action, de commandement et de coercition ». De ces deux définitions, nous pouvons ressortir des éléments qui rendent compte d’un État : un territoire, un groupe d’hommes vivant sur ce territoire, une organisation du groupe et la puissance ou la force pour assurer la paix et la défense de chacun dans sa relation avec son semblable. C’est à partir de ce moment que nous pouvons parler d’un  État comme fruit d’un accord ou contrat entre les hommes dont ils confient la mise en forme à l’un d’entre eux ou à un groupe de personnes d’une part et l’exercice de la force naturelle de domination pour le bien de tous d’autre part. Ainsi émerge la sécurité comme point saillant de l’existence de l’État. La paix et la sécurité en vue du bien-être de tous devient plus que jamais une condition urgente et nécessaire de l’existence d’une entité étatique.

  1. B.     Sa finalité.

Les hommes réunis en collectivité avec une organisation et des normes bien précises du nom d’État ont en vue un but ou une finalité bien orientée. Pour Hobbes, le but de l’État est d’assurer « la paix commune et la sécurité »[2]. La sécurité civile, c’est-à-dire la protection des personnes et des biens contre les caprices malveillants d’autrui est la fonction de l’État selon Locke. Parvenus à ces affirmations, ces auteurs nous permettent de poser la sécurité et la paix comme finalité originaire et originelle de l’État contre toute violence et tout danger.

  1. C.    Les moyens de cette finalité.

Pour maintenir la sécurité et la paix, l’État a donc recours à des moyens tant internes qu’externes. Sur le plan extérieur, l’État dispose du droit international effectif, une autorité mondiale et des sanctions efficaces, ainsi que de la diplomatie et de son armée pour assurer la sécurité de ses citoyens. Sur le plan intérieur, une justice efficace dans un État de droit et la police/l’armée permettent à l’État de garantir la sécurité et la paix des citoyens et de leurs biens ainsi que la sécurité du bien commun. Le recours à un corps secret de renseignement tant extérieur qu’intérieur est une possibilité usuelle de l’État en vue de cette finalité.

                                                              II.            Qu’entendons-nous par insécurité civile ?

Par insécurité civile nous entendons les expériences de victimation [3]que subissent les uns et les autres dans notre contexte africain. Du moment où les mesures de protection des personnes et des biens sont défaillantes exposant ainsi la vie des personnes aux malveillances et à la méchanceté d’aucuns, nous parlons d’insécurité civile où la violence et son contingent de malices meurtrissent et portent des coups funestes et désastreux  à la quiétude, à l’harmonie existentielle ainsi qu’à la dignité de  l’homme. C’est dans cette orientation compréhensive que notre figure « …état, mercenaire » se trouve dessiner dans son contour significatif.

                                  III.            État source d’insécurité civile : État, mercenaire ou berger ; constats et bilan.

L’État de par sa vocation et son inspiration première est appelé essentiellement à assurer la sécurité de ses fils et filles en les préservant des violences et actions de nuisances de quidam. Cependant, le bilan et le constat en face desquels nous nous trouvons dans le contexte qui est le nôtre remettent fortement en cause et décrient de façon véhémente l’altération et la corruption intervenues dans cette vocation fondamentale de l’État qui devient source d’insécurité pour ses habitants. Un mercenaire plutôt que berger. Il ne prend pas les moyens nécessaires et sine qua non pour rassurer et protéger les personnes et les biens de sa patrie, mais s’érige en fin de compte en bourreau de ses citoyens. La sûreté fond dans une inefficacité ruinant la vie des personnes. Il suffit d’écouter les nouvelles relayées par les médias provenant des différents contextes africains et de constater les expériences odieuses vécues par-ci et par-là pour se mettre à l’évidence des traitements infâmes dont fait l’objet la population africaine et devant lesquels l’État se trouve incapable. Des crimes politiques, la criminalité, des assassinats crapuleux, des forces de l’ordre devenues des pilleurs éhontés  et des brigands menaçant ainsi la sécurité civile, des répressions ignobles et sanglantes policières, des agressions traumatisantes, des guerres au cours desquelles les hommes sont torturés et les femmes violées par des entités et institutions qui sont censées les protéger contre toutes atteintes à leur personne.  Les forces publiques représentant l’organe de maintien de la sécurité de l’État se permettent d’ouvrir le feu sur des hommes et femmes qui réclament  le respect de leurs droits. Ces forces de l’ordre sont aussi les mêmes à organiser des opérations de vol et de braquage. Bref, des actes contre la sécurité des civils, voilà paradoxalement leur raison d’être. L’État dans ces différentes circonstances et situations s’est illustré par une présence oppressante et menaçante contre la vie de ses citoyens. Il devient dès lors le loup pour ses fils et filles qui finissent par perdre confiance en lui et finissent par se déplacer à la recherche de la quiétude. Ces expériences horribles et cruelles devant lesquelles l’État est démissionnaire justement parce qu’il en est le commanditaire représentent ce que nous voulons désigner du nom d’insécurité civile. C’est ce que nous associons à la figure de l’État, mercenaire qui s’accroche davantage à ses intérêts les plus égoïstes que de penser à l’intérêt général de la nation qui est censé être au-dessus de tout.  Pour emprunter cette allégorie biblique, l’État devient ce mercenaire qui sacrifie et mange ses brebis plutôt que de veiller sur elles et d’en prendre soin comme ce berger bon qui n’est pas près à perdre aucune de ses brebis. Ainsi est-il évident que celui qui dispose d’un privilège considérable et magnanime est exposé à la grande tentation d’utiliser ce pouvoir ou cette autorité au détriment de la collectivité et non à son profit.

 

                 IV.            Analyse causale de cette insécurité civile.

Devant un tel tableau sombre, quels facteurs indexés? Ici nous voulons faire part des mobiles qui peuvent en notre entendement élucider le dysfonctionnement du système étatique. En ce qui concerne ces causes, nous pensons substantiellement à ce que Hobbes a appelé l’imperfection institutionnelle. Ces désordres sécuritaires ne sont que le fruit des failles ou des imperfections logées à l’intérieur même de l’État comme corps. Et c’est justement ces imperfections qui fragilisent le système étatique. Au nombre de ces imperfections nous avons, l’égoïsme, la recherche de ses intérêts personnels, la mégestion, l’indiscipline au sein des forces publiques et pourquoi pas le tribalisme que nous marquerons mieux dans la suite de la réflexion en se référant au cas de la Centrafrique parce que nombre sont les pays et les institutions humaines rongées par cette métastase identitaire. Nous nous contenterons juste de ce cas qui nous semble mieux parlant. Sous d’autres cieux, l’organe sécuritaire, c’est-à-dire la police et l’armée, n’existe presque pas parce qu’il n’est pas pris en charge ni organisé par l’appareil étatique. Des agents de l’ordre qui ne sont pas rémunérés sont laissés à la merci de tous les moyens désordonnés et illicites pour vivre et survivre. Comment faire pour vivre et survivre  peut les entraîner sur n’importe quel sentier bon ou mauvais. Ils sont donc conduits par les évènements à se payer eux-mêmes sur le terrain pourvu qu’ils trouvent de quoi faire vivre sa famille. La politique sans conscience de certains politiques pour se maintenir au pouvoir et conserver leur système est aussi à l’origine de cette situation d’insécurité civile où les citoyens qui décrieront les manquements et insuffisances de ce gouvernement se feront réduire au silence. L’autorité ou la puissance qui se retourne contre le bien-être de ses citoyens est la plus infâme des perversions qui puisse advenir. Et c’est à ce phénomène que nous assistons en Afrique.

                                                        V.            Etude de cas.

Pour notre étude de cas, nous avons choisis la R.D.C, le Mali et la R.C.A. Dans ces trois contextes africains nous allons essayer de rendre compte de la responsabilité de l’État dans le phénomène d’insécurité civile.

  1. A.    La R.D.C[4]

La République Démocratique du Congo est un contexte longuement miné par les guerres de toutes sortes. Un pays sous l’emprise d’un chaos face auquel l’institution étatique reste jusqu’à nos jours incapable d’entreprendre une action pour y mettre fin. L’État a perdu toute sa crédibilité parce que complice de ces tragédies. Viol des femmes, pillages, braquages, tueries cruelles, assassinats, vol, arnaque, chef de gangs, les forces de l’ordre et publiques y trouvent leur pleine participation. Le manque d’organisation, d’encadrement, de formation requise et adéquate  des forces publiques et leur non-prise en charge y sont fortement prononcés. Le comble reste le phénomène de gangs dénommé « les koulouna ». Ces gangs se sont distingués et se distinguent encore superbement dans les crimes les plus barbares que notre monde ait connus et connaît. Que fait l’État en la personne des forces de l’ordre et de sécurité congolaise pour endiguer ? Aucune mesure à ma connaissance jusqu’alors bien que ces forces soient au parfum de toutes ces abjections. Femme enceinte éventrée, doigts ou bras coupés, taillade sur le corps des personnes vivantes…etc pour ne pas rentrer dans les complications dramatiques que prennent certaines rencontres, telles sont les signatures par lesquelles ils s’identifient. Notons par ailleurs l’hyperporosité frontalière qui expose les habitants aux fréquentes attaques externes. C’est notamment la partie Est du pays, foyer interminable d’affrontement où la dignité humaine est agenouillée dans l’inhumanité et l’animalité.

  1. B.     Le Mali

Par un coup de force, l’organe de sécurité plonge le pays dans un tumulte insécuritaire, tribal et politique difficile à maîtriser. Face à la menace d’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique), l’armée organise un push pour prendre la direction de cet État et la confie à des civils de leur choix. Loin de résoudre le problème de sécurité dont est instigateur Aqmi[5], ce putsch au contraire a fait balancer la partie nord du Mali entre les mains de cette organisation criminelle et terroriste arabe qui n’a pas tardé à proclamer l’indépendance de cette partie qu’elle s’est taillée : la république d’AZAWAD. Cette bévue expose une partie de la population malienne sinon toute la population malienne sans défense aux hostilités des djihadistes[6] qui n’ont que pour préoccupation, l’imposition de la charia (en arabe sharî’a). L’État une fois encore échoue vis-à-vis de son devoir envers sa population en l’exposant aux invasions et aux malveillances d’autrui.  Heureusement ce désordre a pu être maîtrisé grâce au concours de l’armée française et d’autres forces auxiliaires africaines : les forces, tchadienne, Nigérienne, Togolaise…etc. L’armée malienne pouvait-elle, à elle seule venir à bout de cette attaque ? L’évolution de la situation après putsch nous a démontré son incapacité. Du fait de sa situation géographique, la menace djihadiste plane et continue de planer sur le Mali que nous espérons ne se résoudra pas très tôt de s’endormir sur ses lauriers que de monter la garde et de mettre à jour son dispositif de défense et militaire.

  1. C.    La RCA[7]

La litanie  d’évènements tragiques et la débâcle frappant l’ordre social centrafricain à la suite du coup d’État orchestré et perpétré par la SELEKA sont des éléments qui viennent justifier davantage l’État, mercenaire. Les faits auxquels nous sommes confrontés même après la prise du pouvoir difficile et l’accession légitime au pouvoir du chef de rébellion Djotodia, mettent davantage en relief le caractère mercenaire de cette institution étatique qui s’est illustré et qui continue de s’illustrer par son incapacité à assurer la sécurité des fils et filles de la Centrafrique sinon à les cribler des actes et gestes les plus haïssables. C’est presque une répétition traditionnelle dans ce pays que d’accéder au pouvoir par coup d’État. De l’insatisfaction d’aucuns s’en suit le renversement qui loin de satisfaire toutes les attentes possibles se trouve gommer à son tour par le refrain renversant. Il nous apparaît approprié de faire ressortir un élément qu’il nous faudra considérer pour une bonne appréhension de notre problématique. Il s’agit d’une manière de faire qui maintient l’impossibilité d’une cohésion sociale encouragée par le politique, le pouvoir étatique qui se montre complice par ce fait. Les séries de renversement et de coup d’État comme moyen pour accéder au pouvoir qui permettez nous tend à devenir un modus vivendi usuel dans l’arène politique de ce pays depuis des décennies sont essentiellement nourris en profondeur une volonté et un désir ennemi d’une société qui se veut cohésive et paisible : c’est la tendance manifeste des règlements de compte. Cet instrument est dès lors manipulé par le politique au profit de son clan et de sa tribu au détriment des autres groupes ethniques non gouvernants. Enfermé dans ce cercle vicieux du retour de la balle à l’envoyeur, il urge d’éclater ce cercle dans lequel tournoie ce peuple. Et pour une première fois, qu’un vaillant combattant armé depuis son tréfonds à ses membres de PARDON fasse exploser ce cercle vicieux au sein duquel tourbillonne vertigineusement le visage de l’humanité éblouit dans sa souffrance afin d’engager ce peuple sur une demi-droite vertueuse où la rationalité politique se chargera de coordonner les différents points de cette société vers le plus grand bien de tous.

                                                                        VI.            La sécurité comme gage de développement du continent africain.

Plus que jamais le continent africain a besoin de la sécurité et de la paix pour travailler et s’inscrire au chapitre du développement. Et du moment où ses fils et filles peinent sous le fardeau qu’est l’insécurité ainsi que leurs biens afin de travailler à cette croissance, le continent aura du mal à décoller parce que fort surchargé de poids existentiels difficile à porter. Ce n’est pas en émaillant notre quotidien de braquages, de guerres, de répressions sanglantes, d’assassinat, de délinquance en un mot de différentes composantes de l’insécurité civile que nous allons émerger. Les énergies ne peuvent être canalisées vers le développement que dans la sécurité des citoyens et des biens qu’ils ont produits et produisent. La paix et la sécurité des uns et des autres sont une des causes et conditions du développement et plus fort encore pour l’Afrique qui en a plus que besoin. Sinon à quoi servirait-il de bâtir un édifice pour qu’il soit ruiné et démolit dans les instants qui suivront ? Ceci vient souligner à quel degré la conscience de l’insécurité rampante peut porter un coup dur et sérieux aux initiatives, aux dynamismes de progrès et aux déterminations des personnes, des particuliers ainsi que des collectivités.

                                                                                                                             VII.            Quelques approches et souhaits.

Comme contribution et espoir pour venir à bout de cette situation dramatique d’insécurité civile nous préconisons essentiellement une réforme institutionnelle. L’État dans toutes ses institutions et entités qui le représentent doit travailler en vue de répondre à sa vocation première qu’est la garantie de la sécurité et de la paix. Penser à bien former la force publique, la mettre dans des conditions nécessaires pour qu’elle puisse bien faire son travail, rémunérer ses efforts, la prendre en charge, la doter surtout d’une conscience droite autonome qui lui permet de penser par elle-même et de faire la part des choses à l’abri de toute manipulation. Mieux structurer et organiser l’organe de sécurité. Lutter efficacement contre la délinquance et l’indiscipline au sein des forces de l’ordre. Éduquer et former par la punition. Promouvoir la « tolérance zéro » en dissuadant autant que possible les actes de violence.

Conclusion

Ainsi, le but de notre analyse n’est pas de diaboliser l’État ni de prêcher pour sa déposition. Nous sommes juste parti d’un constat de décadence à la cadence infernale dans laquelle la responsabilité de l’État se trouve pleinement affirmée. Incapable de maintenir la sécurité des civils, l’État se révèle comme une menace pour la vie de ses citoyens. Il serait dès lors souhaitable et mieux pour tous que l’État retrouve sa vocation première en se souciant davantage du bien-être de ses habitants tout en prenant les mesures et les moyens adéquats et sine qua non. C’est à partir de ce moment donc qu’il se réaliserait comme État. Entre temps comme le remarquait un contemporain, notre monde ne périra pas à cause du mal que font les uns et les autres même si leur responsabilité est inscrite dans la chaîne causale de cette catastrophe mais surtout et à cause de ceux qui les regardent faire ce mal sans mot dire et sans rien faire. C’est essentiellement ce cri du cœur qui nous habite quand nous rédigeons ces lignes qui se formulent comme un SOS en faveur de l’homme et de la femme abandonné come un agneau parmi les lions prêt à le dévorer. Jusqu’à quand ces cris de détresse seront entendus ? Où l’homme noir a-t-il abandonné son sens de solidarité et d’assistance, son altruisme, son souci  par lesquels il se caractérise?  Où est Boganda ? Où est Patrice Lumumba ? Où est Thomas Sankara ? Où est Mouammar Kadhafi, le guide du grand Jamahiriya[8] ? Où sont-ils ces vaillants illustres hérauts des justes causes qui ont dédié leur vie à arracher la concorde, la libération et l’épanouissement pour les siens ? Y a-t-il des raisons de croire en un avenir radieux pour notre mère Afrique dont les conditions vont de mal en pis au jour le jour ? Sa déchéance n’est-elle pas imminente ? Plutôt que de sombrer dans le pessimisme, nous croyons qu’il n’est absolument pas trop tard pour renverser la vapeur. Car, le dit-on celui qui perd le courage qui suppose l’espérance a tout perdu. Ce ne sera pas le cas des africains nous le souhaitons vivement. Eux qui savent se battre pour leur délivrance. Enfin, la question reste de savoir si la sécurité civile à elle seule suffit pour rendre compte de la raison d’être de l’État. Est-il plus que la sécurité ?

 

Boris Flaminia EDOH

 



[1] T. Hobbes, Leviathan, p.288-289.

[2] T. Hobbes, Leviathan, p. 287-288.

[3] Expérience réelle de violence et de l’insécurité.

[4] République Démocratique du Congo

[5] Al-Qaïda au Maghreb Islamique

[6] De Djihad : « Guerre sainte » pour la propagation et la défense de l’islam.

[7] République Centrafricaine

[8] Un terme inventé par le colonel Kadhafi et signifiant en arabe « État des masses ».

 


Boko Haram : d’un terrorisme mystique à un terrorisme atypique

carte Nigeria par Jean via Wikipedia
carte Nigeria par Jean via Wikipedia

 

Depuis que le vaudou nigérian et le terrorisme se sont donné les alliances en 2003 soit dix ans de mariage dans le Nord-Ouest nigérian, les heurts se succèdent aux meurtres, les corps sans vie s’étendent des universités jusqu’aux églises, des commissariats jusqu’aux marchés. Le chaos fait la loi, la charia fait la foi. Le bras de fer qui se forge entre le gouvernement et ce sous-franchisé d’AQMI au Nigéria dépasse les limites de la raison pour concilier mysticisme et terrorisme. Quels sont les raisons politiques d’une exacerbation du djihadisme nigérian ? Quels sont les types d’actions ou de stratégie mène ce groupe terroriste pour affirmer son originalité dans la région Ouest africaine ?

Peuplé d’une dominance musulmane au Nord et partagé entre plus de 250 groupes ethniques (les Yoruba, les Ibos,  les Haoussa, les Foulani), le Nigéria est en proie à un fort taux de chômage, une pauvreté croissance et une élite politique corrompue et des disparités régionales très prononcées. Sur les 36 Etats que composent le Nigéria, 12 sont situés dans la région Nord mais ressentent les conséquences de la fracture socio-économique. Les ressources pétrolières se localisent au Sud et depuis qu’en 2000, le régime en place à Lagos renferme une coloration chrétienne à sa tête, Goodluck Jonathan, le Nord se radicalise dans l’application de la charia.

En 2012, Boko Haram ou le Livre interdit respecte un agenda très chargé : le renversement du pouvoir en place, l’établissement d’un Etat islamique et l’application rigoureuse de la charia, un rejet de l’enseignement perverti par l’occidentalisation. Pour respecter cet agenda, les combattants de Boko Haram usent des stratégies de la tradition djihadiste comme les attaques ciblés des commissariats et polices, les attentats, les exécutions des étudiants. L’image macabre que traine Boko Haram dans son sillage semble correspondre à des sacrifices humains sur l’autel d’Allah. Pour eux, tuer, semer le chaos, appliquer la charia n’est pas le seul moyen de parvenir à leurs fins mais aussi il semblerait que les amulettes qu’ils arborent dans leurs combats allient à la fois syncrétisme et fanatisme, anthropophagie et sacrifices humains. Nul n’est sans ignoré le grand trafic de membres humains que connaît le Nigéria avec une population estimée à 170 millions d’habitants en 2012.Malgré leur rejet de la modernité, les membres de cette secte utilisent des motos pour exécuter leurs missions. Entre Juillet 2009 et début février 2011, Boko Haram a revendiqué 164 attaques, attentats-suicides. Les derniers faits d’armes de la secte montre la stratégie d’un Djihad défensif : attaquer les musulmans modérés qui n’appliquent pas la charia d’autant plus que le Coran est la référence à la fois sur le plan politique, militaire, économique, idéologique et religieux. Aux 42 morts d’un lycée dans la province de Maidiguri le 17 Juin dernier, aux 44 morts dans l’attaque de la mosquée de la ville de Konduga le 13 Août et les quarantaines de morts dans l’attaque d’un dortoir des étudiants le 29 Septembre dernier, il appert que Boko Haram conquiert de son originalité tant par sa stratégie guerrière que par ses fondements politiques.

Boko Haram est le filleul d’une classe politique gangrenée par la corruption, la course au pouvoir. Le Nigéria est doté d’un pouvoir central regroupant les deux grandes confessions religieuses : les musulmans et les chrétiens. Soit le président est chrétien et le vice musulman ou vice-versa. Cela a conduit à une configuration confessionnelle du gouvernement même fédéral de telle sorte que déjà en 2000, la charia était appliquée dans les provinces du Nord mais d’une manière peu radicale. Le paysage politique qui se formait au Nigéria a exacerbé les hauts faits de ce groupe terroriste. L’histoire du Nigéria retiendra qu’en 1984, les conflits entre les sectes islamiques (Izala, Tidjaniyya, Qadiriya, Maitatsine) ont engendré des centaines de victimes. Du président Obasanjo (1999) au musulman Umaru Yar’Adua en 2007 (décédé le 5 mai 2010) et enfin au chrétien Goodluck Jonathan, le gouvernement central de Lagos a toujours du mal à régler la question. Le djihad de Boko Haram semble être un djihad non plus défensif (contre les musulmans modérés) mais un djihad ayant pour cible surtout les commissariats et postes de police. Et ce, à cause des répressions militaires très brutaux dans le bastion de Boko Haram, l’Etat de Yobe et de Borno. Soutenu avant par le gouverneur Ali Moddu Sheriff de l’Etat de Borno pour son élection en avril 2003, Boko Haram fait face désormais à la réfutation de leur parrain politique. En réponse, le groupe concentre ses opérations sur des policiers, des dirigeants politiques et des imams et leur source de financement par les attaques de banques.

 

Décidément, une ambiguïté ressort de la stratégie de Boko Haram : refuser l’occident et la modernité qui l’accompagne mais utiliser les moyens modernes (motos, montres, argent, banques) pour appliquer la charia. C’est pour dire que la charia est en elle-même problématique puisque même ceux qui se donnent le devoir de l’appliquer ne s’accordent même pas. Toutefois, la doctrine du fou au fou (doctrine qui consiste à répondre à l’adversaire terroriste par les mêmes moyens qu’ils utilisent : meurtres, assassinats) tend à exacerber les violences entre l’armée (forces de sécurité) et Boko Haram (forces d’insécurité).


L’Afrique de l’Ouest, l’Eldorado des narco-trafiquants

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Durant les premières années de ce second millénaire, un phénomène assez subtil devient plus récurrent sur la côte atlantique de manière générale et dans le golfe de Guinée en particulier. La sous-région est assiégée par les cartels de drogue de l’Amérique latine et de l’Asie. C’est la face cachée de la menace sécuritaire en Afrique de l’Ouest, l’effet domino du jihadisme au Mali ou des bases dormantes en Côte d’Ivoire, au Burkina, en Guinée. Des 452 saisies de cocaïne enregistrées dans 11 aéroports européens de 4 pays, à savoir, l’Allemagne, la Belgique, la Suisse et la France entre juin 2006 et septembre 2007, au total 26 % provenaient de l’Afrique. Le comble de cette manigance antisécuritaire pour les Etats africains, c’est la collaboration voire l’implication directe des militaires ou forces de sécurité dans ces trafics de drogue. Notre analyse se portera sur les derniers évènements de cette année au Sénégal et en Guinée-Bissau concernant l’ampleur du trafic des drogues. Il faut noter que la presse n’en parle qu’à compte-gouttes à cause du cachet secret qui scelle ce trafic. Quel regard peut-on porter sur ce phénomène qui met plus en péril notre système sécuritaire déjà livré aux mains des jihadistes ?

La Guinée-Bissau est l’un des grands pays relais et de trafic de drogue dans la sous-région. La Guinée-Bissau est classée dans la catégorie des narco-Etats par l’Office contre la drogue et le crime des Nations unies. C’est une plaque tournante en Afrique de l’Ouest pour toutes sortes de drogues : la cocaïne provenant d’Amérique latine, l’héroïne d’Afghanistan et du Moyen-Orient, les drogues synthétiques des laboratoires nigérians. Le 2 avril dernier, deux narcotrafiquants débarquent à l’aéroport de Bissau . Ils ont été accueillis par le contre-amiral en retraite José Américo Bubo Na Tchuto. Lors de cette négociation  pour l’envoi de cocaïne sud-américaine vers la Guinée-Bissau, les trois hommes sont arrêtés à bord d’un yacht battant pavillon panaméen dans le port de Cacheu à 120 km au nord de la Guinée-Bisau. Les deux narcotrafiquants étaient plutôt des espions de la Drug Enforcement Administration (DEA) qui cherchaient à démanteler un réseau qui aurait pu, d’une part, approvisionner les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en armes -dont des missiles sol-air portables -, de l’autre, permettre aux FARC de faire transiter de la cocaïne vers la Guinée-Bissau où elle aurait été stockée avant qu’une partie ne reparte vers les Etats-Unis. Le contre-amiral fut longtemps l’un des importants personnages du régime bissau-guinéen. La cocaïne lui a permis de se remplir les poches et de financer le coup d’Etat raté en août 2008 dirigé contre le président Joäo Bernado Viera. Il va sans dire que le trafic de drogue en Afrique s’accommode d’un crime organisé d’autant plus qu’en 2009, les barons de la drogue ont voulu se débarrasser du président Vieira qui est devenu gênant dans leurs affaires et pour faire revenir leur fidèle serviteur Na Tchuto. Aussi depuis le coup d’Etat de 2012, il y a une recrudescence des activités du cartel au moyen d’avions privés et de bateaux au large des côtes guinéennes. On ne s’étonne pas que l’économie de ce pays soit soutenue par le trafic de drogue.

Quant au Sénégal, les récents évènements montrent l’implication des hauts cadres de la police de Dakar dans les trafics de drogue. Un commissaire de police Cheikhna Sadibou Keita, ex-directeur de l’Office central pour la répression des trafics illicites de stupéfiants (OCRTIS) a été entendu par la justice sénégalaise à propos du trafic de drogue qui mine sa police. Il est accusé par un trafiquant nigérian Raymond, de lui avoir remis de la drogue pour la commercialisation. En fin 2007, c’est au moins 2, 4 tonnes qui ont été découvertes à M’bour sur la côte au sud de Dakar. Le Sénégal est aussi le pays d’origine du plus grand volume de cocaïne saisie sur des liaisons aériennes commerciales entre l’Afrique occidentale et l’Europe de janvier 2006 à mai 2008;  il est aussi l’un des pays où le trafic international aérien est le plus intense de la région. Avec 434 kg saisis lors de 105 opérations, il précède même le Nigeria. Le record des passeurs de drogue est remporté par  le Nigeria (29 %), du Cap-Vert, (22 %), et de la Guinée-Bissau (15 %) et enfin 2 % Sénégal.

Les forces de sécurité et de défense des Etats africains sont gangrenées par le fléau de la corruption, du trafic de drogue et des crimes organisés qui sapent l’indépendance de nos pays. Aussi si la sécurité de nos Etats ouest-africains est mise à mal par ceux qui doivent plutôt la maintenir, quel devenir pour nos Etats en péril ? En conséquence, les Etats ouest africains sont de plus en plus près à faire appel à la mère poule France pour assurer la sécurité de nos Etats. Cette aliénation sécuritaire montre notre démission et notre collaboration à une défense minée de l’intérieur.