mamadousaidoubalde

Guinee: Ebola, loin d’être vaincu

Vue du quartier Kountia CBA
Vue du quartier Kountia CBA

Entre les failles du système de riposte contre ébola et l’incrédulité de certaines personnes , le virus maudit trouve l’occasion de poser ses valises au quartier Kountia CBA. Kountia CBA est l’un des nombreux quatiers populeux de la banlieue Est de Conakry. Ce quartier, jadis mal connu , est depuis cette semaine sous le feu des projecteurs. Son actualité occupe la majeure partie des medias de la place. Pour cause , ce quartier héberge depuis peu , un étranger. Un étranger fort moins enviable. La fièvre hémorragique à virus Ebola. Ce virus qui sème, mort, panique et désolation en Guinée, au Liberia et en Sierra Léone depuis belle lurette semble vouloir élire domicile à kountia CBA avec une allure inquiètante. Allure d’autant plus inquiétante qu’à côté des pésanteurs sociales et de l’analphabétisme des populations, on note que les acteurs qui interviennent dans le processus de lutte contre ébola n’impriment pas toute la rigueur qui s’impose dans ce cas de figure. Beaucoup de faillles sont observées. Tenez! A Kountia CBA, un jeune est mort après avoir aux dires de ses proches dévéloppé quelques signes semblables à quelques symptômes du virus Ebola: Brusque élévation de la température du corps, fatigue, douleurs musculaires et surtout terribles maux de tête. Alertée, la croix rouge arrive sur les lieux avec plusieurs heures de retard. Elle examine le corps, prélève les échantillons , emballe la dépouille dans du plastique avant d’autoriser les popultions de l’enterrer sans attendre le résultats des tests qui , trois jours après ont confirmé que le jeune Souleymane Barry était effectivement mort d’Ebola. Faute de la croix rouge d’autant plus grave, que Kountia CBA va enrégistrer les jours suivants une cascade de malades et de morts d’ébola. Le cas de ce quartier qui se trouve à la limite entre la capitale Conakry et l’arrière pays est malheureusement illustratif de la gestion catastrophique dont la Guinée fait preuve en matière de lutte contre ébola.Malgré la construction de plusieurs centres de traitement et les millions d’euro apportés à la Guinée, on enrégistre chaque jour qui passe de nouveaux cas de morts d’ébola. Tout de même , il faut noter que les manquements de la croix rouge ne sont pas les seules causes de la propagation de la maladie. Cette propagation est aussi liée à des facteurs non moins importants. C’est entre autre : – le non suivi effectif des personnes contacts. C’est à dire des pesonnes ayant été en contact avec un cas d’Ebola dans les 21 jours précédents. Il n’est pas rare d’entendre qu’une personne suspecte a échappé à la vigilance des comités de veille. Ce qui du coup pose d’énormes difficultés dans l’élimination des chaines de contamination. -La négligence de certains medecins, qui dans certains centres de santé ou dans des cliniques de fortune utilisent pour des raisons peut être économiques une seule paire de gants pour plusieurs patients. L’autre facteur de propagation réside dans le non respect des mesures de prévention récommandées par l’OMS et les organismes spécialisés dans la lutte contre ébola. Notamment la coordination nationale de lutte contre Ebola, la Croix Rouge et Médecin Sans Frontière. A Kountia CBA comme partout en Guinée, les gens continuent à se serrer les mains en se saluant parfois dans l’insouciance la plus totale. L’utilisation des désinfectants , de l’eau chlorée et des autres produits conseillés à cet effet n’est pas totalement entrée dans les moeurs des populations. Pire, malgré la confirmation des tests, certaines personnes persitent pour des raisons le plus souvent irrationnelles, à attribuer les causes de ces multiples décès à des esprits maléfiques ou à de mauvais sorts jetés sur les nombreuses victimes du quartier. Illustration plus que parfaite du travail de sensibilisation et de communication qui reste à faire pour éliminer la chaine de contamination et vaincre la maladie. Autant dire que le problème est entier. Le pari pour l’heure n’est pas gagné. Vraissemblablement le terreau est encore bien fertile pour la propagation de la maladie. Raison de plus pour prendre des mesures d’urgence rectificatives .


GUINEE: DANS LA DYNAMIQUE DE L’ACHOURA, LES CHIITES CELEBRENT L’ARBAEEN .

Samedi 13 décembre 2014 .  Nous sommes à la Cimenterie , quartier de la banlieue Est de la capitale Conakry . Précisement dans l’enceinte de l ‘Université Islamique Chiite de Guinée.
Fruit de la coopération  guinéo-iranienne, cette université forme pour un cursus de 5 ans les étudiants à une compréhension plus approfondie et diversifiée  de l’islam. Formation basée sur  l’interprétation  du Coran, l’histoire islamique, la jurispridence islamique, la civilisation islamique, la philosophie islamique et autres.
C’est là, où tous de noirs vêtu (symbole de deuil) hommes, femmes, enfants , libanais et iraniens résidants  à Conakry se sont rassemblés à l’image des chiites du monde pour célébrer l’arbaeen . Autrement dit, le quarantième jour après l’Achoura. C’est à dire le quarantième jour après le martyr de Alhussein petit fils du prophète Mouhamad assassiné avec  72 de ses parents et compagnons en l’An 681 à Karbala en Irak par Yazid, le prince des Ommeyades. A rappeler que Yazid est le fils d’Abu Soufiane. Ce dernier avait persécuté le prophète et promis mille dinhar et 100 chameaux à celui qui lui apporterait la tête de Mouhamad. Promesse qui avait obligé le prophète de fuire   la Mecque .
C’est pour dénoncer donc ce qu’ils appellent le « Drame de Karbala »que les chiites venant de tous les quartiers de Conakry et environs se sont donnés rendez-vous dans ce lieu qui vraisemblablement est la fontaine à partir de laquelle coule la pensée du mouvement chiite de Guinée. Mouvement chiite qui de source bien informée semble avoir commencé avec le retour d’Iran, de  Syrie et de Liban de jeunes étudiants guinéens. C’était au début des années   1990 nous dit-on.
LE DECOR
Dans ce haut lieu du chiisme en Guinée, le décor était là dès 9 heures. Aux chants réligieux consacrés à la gloire de Dieu, alternaient des poèmes dédiés aux martyrs de Karbala que diffusaient des haut-parleurs installés dans l’enceinte.
Partout, sur de nombreuses bandéroles et affiches qui ornaient les murs, les piliers et les troncs d’arbre de l’université, on pouvait lire en lettres capitales arabes « Yâa Alhussein »   . c’est à dire oh Alhussein!
LES ORATEURS ET LES DISCOURS
les nombreux orateurs qui se succedaient à la tribune étaient pour la  plupart enturbannés à la « Khomayni ». Avec un gestuel et un ton teintés d’une forte dose d’orientalisme, les différents intervenants ont décris aux détails près et de façon pathétique les circonstances douloureuses dans lesquelles Alhussein et ses partisants ont été massacrés. Description qui plongea l’ensemble des fidèles (hommes et femmes confondus) dans des sanglots voire même des pleurs qui en d’autres circonstances et sous d’autres cieux auraient été perçus (surtout pour les hommes) comme signe de « Non Virilité ».
Interpellé sur la signification des pleurs, l’un des organisateurs  repond: » Pleurer Alhussein c’est perpétuer en quelque sorte une des traditions (Sunna) du prophète . Car sachant à  l’avance le sort physiquement macabre de son petit fils, il l’avait pleuré dès sa naissance en 626. »
En domptant tant bien que mal ses pleurs et ses  sanglots, l’orateur principal de la cérémonie vers la fin de son allocution a attiré l’attention sur la nécessité pour les fidels de se battre à chaque instant de leur vie pour incarner et défendre les valeurs morales et spirituelles pour lesquelles Alhussein a sacrifié sa vie.
Cheikh Mamadou Bailo Diallo a signifié à l’assistance que la meilleure façon de célébrer Alhussein au delà des pleurs , est d’oeuvrer pour l’avènement d’un monde plus juste où les droits de tous seront respectés. Quelque soit nos differences de race , de langue ou de réligion . Mais c’est aussi et surtout refuser comme Alhussein de se soumettre au joug de l’avilissement.
Après quoi, la cérémonie se termina par des prières et bénédictions pour le pays.


NORD NIGERIA: SOUS LA FOLIE DES DJIHADISTES.

Une fois encore il s’est exprimé.Il s’est exprimé en tappant fort.Il s’est exprimé en semant sur son passage comme il ya de cela cinq ans, morts, bléssures et désolations. Il s’est exprimé en utilisant le canal qu’il connait le mieux. La barbarie et la violence.
Il, c’est BOKO HARAM. Le groupe fondamentaliste, djihadiste que le monde en général et le Nigeria en particulier ont le malheur de connaitre. 120 morts et plus de 270 blessés. C’est le triste bilan de l’attentat suicide perpétré par ce groupe .
120 âmes innocentes qui ont payé de leur vie le prix de penser différemment. D’avoir compris différemment.D’avoir différemment compris et appliqué certains préceptes de l’islam . On était vendredi 28 Novembre 2014 dans l’enceinte de la grande mosquée de Kano au Nord du Nigeria. A noter que loin d’être un fait isolé ces actes audieux font désormais partie du quotidien de ce pays.
Sans conteste le fondamentalisme réligieux que prône BOKO HARAM est tel un cancer au sein de nos societés. Un cancer qui est entrain de gagner  du terrain non pas au Nigeria seulement mais partout où des étudiants revenant le plus souvent d’Egypte ou d’Arabie Saoudite s’installent pour ouvrir des écoles coraniques.
Profitant de la crédulité des populations et de l’irresponsabilité des dirrigeants politiques, ces » barbus »  parviennent petit à petit à arracher à travers un enseignement rigoriste et un discours le plus souvent vindicatif, les populations à l’islam modéré et tolérent qui, de tout temps a façonné leur personnalité et  cimenté leurs societés. Ce qui du coup remet sur la table, la problématique de l’enseignement islamique dans nos sociétés. Surtout la problématique du contenu de ces enseignements et des critères à remplir pour ouvrir une école coranique.
Car il est inconcevable que dans l’espace de quelques années d’étude dans ces écoles,des jeunes initialement doux se transforment en des intraitables fondamentalistes s’arrogeant le droit de tuer tout ceux qui ne les ressemblent pas. Ceux qui ne pensent pas comme eux.
En comparant l’esprit du coran, la tradition prophétique à l’attitude de ces groupes fondamentalistes djihadiste(BOKO HARAM,AQMI,Al chebab et autres), on voit clairement que ces mouvements sont à côté de la plaque.
Voyons. La principale source du droit musulman qu’est le coran interdit aux musulmans de s’entretuer.Le verset 92 de la sourate AN NISAA (les femmes)  l’atteste : Il n’appartient pas à un croyant de tuer un autre croyant.
Les 120 morts de la mosquée de Kano n’étaient ils pas des musulmans? Ne croyaient ils pas à la prophétie de Mohamed? Avaient ils tué quelqu’un pour subir ce macabre sort ?J’en doute fort.
Et pourtant, dans le verset 32 de la sourate Ma idah( la table servie), Dieu souligne en ces termes le danger pour une personne de tuer son prochain : … Quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes.
Toujours dans la sourate An nisaa en son verset 93, Dieu promet l’enfer à celui qui tuerait
intentionnellement un croyant.
Mais Dieu parle ici des croyants me dira t- on pour essayer de peut être de justifier les attaques contre les non musulmans.
Erreur! Si non, comment comprendre que le prohpète dont les partisans de ces idéologies obscurentistes prétendent perpétuer la tradition accepte de vivre avec des non musulmans dans un esprit de tolérence réciproque à Médine.
Qu’il plaise aux hommes de bon sens de constater alors l’ineptie de ceux qui pensent qu’actionner leurs bombes dans des écoles, des églises, des marchés, des mosquées leur ouvre directement les portes du paradis.
L’esprit de tolérence et de bon voisinage du prophète Mohamed à Médine montre qu’en dehors d’une situation de légitime défense tous les hommes, de toutes les croyances doivent vivre les uns à coté des autres , non pas les uns sur les ruines des autres.


Guinée : face aux défis du développement !

En Guinée chez moi, c’est le monde à l’envers. L’intellectuel qui devrait être le modèle de réussite pour tous est laissé à la traîne. Il mène une vie de misère qui laisse les jeunes perplexes quant aux possibilités de réussite qu’offre l’école.

Des écoliers en situation de classe
Des écoliers en situation de classe

5 octobre 2008. On était mardi.Premier jour de classe pour moi en tant qu’enseignant.
En ce matin pluvieux de Conakry, je devais dispenser un cours de français dans une classe du collège « Baba Cissé » : la 7ème. Les élèves étaient jeunes. Très jeunes. Entre 12 et 13 ans pour la plupart.
Pédagogie oblige, je déclinai mon identité et exprimai le souhait que chacun en fasse autant tout en précisant la profession que chacun voudrait exercer à l’avenir.
« Je veux devenir médecin, pilote… » pour les uns, « journaliste, ingénieur … » pour les autres.
Que ne fut ma surprise lorsque, arrivé au tour de Mouctar, celui-ci me dit : « je veux sortir de l’école, aller vendre à Madina» (le plus grand marché de Conakry).
-Sortir de l’école ?
-Oui.Me répondit-il. « Aller vendre, avoir beaucoup d’argent, construire de belles villas, acheter de belles voitures comme mon oncle ».
Je tente alors de le convaincre.
-L’école peut te donner tout.
Vaine tentative.
Calmement, il rétorqua : « L’école n’apporte pas grand-chose chez nous. Mon frère qui était pourtant brillant est au chômage.Il est encore sous la dépendance de ma mère et de mon oncle. »
Pris de court, je trouvais mieux de passer aux suivants.
A y regarder de près, on se rend compte que cette façon de penser n’est pas le propre de Mouctar seulement.Comme lui, de plus en plus de jeunes fondent moins leur espoir sur l’école que sur le commerce ou la pratique d’un métier quelconque.
Motifs.
Tenez ! A l’indépendance, la Guinée fut dirigée par Sékou Touré. Syndicaliste aux tendances autocratiques, il dût son ascension politique non pas à ses multiples diplômes mais à son militantisme, à sa qualité de mobilisateur et d’harangueur des foules. Pas besoin de rappeler que comme Fidel CASTRO et autres, le grand maître de Conakry pouvait tenir en haleine un auditoire de milliers de personnes pendant cinq heures d’affilée. Sans se lasser et sans lasser le public.

Ainsi pour asseoir son pouvoir, il recourut à des méthodes violentes: la méthode du complot permanent.Tout commença en 1960 avec le complot dit « des agents du colonialisme et intellectuels tarés » suivi en 1961 de celui des « enseignants ». Voilà qu’au fil des ans, le pays perdit les meilleurs de ses fils de cette époque. Des intellectuels de tout bord furent arrêtés, emprisonnés ou tués sur l’autel de ses caprices.
Dans un tel système de pensée unique, ces « pauvres » n’avaient pas compris que loin des critères de compétence, l’ascension politique ou administrative est assujettie au degré d’adhésion aux idéaux du chef. Ils l’apprendront à leurs dépens. Pendant ce temps, des fonctionnaires serviles, font la belle vie. Démontrant qu’en Guinée, le 1er de l’école n’est pas forcément celui de la vie.Ils sont nombreux ces fonctionnaires qui, faute de salaire consistant, ploient sous le poids des dettes. Beaucoup vont à la retraite sans avoir réalisé des choses à la mesure de leurs diplômes.

Conséquences : Aux yeux de certains élèves, ils sont tout sauf des modèles de réussite.La précarité dans laquelle ils pataugent ne rassure pas  quant aux possibilités de réussite qu’offre l’école. Dès lors, plus question de se triturer les méninges pour comprendre par exemple les théorèmes de Pythagore ou de Thalès. Einstein, Watt ou Pasteur sont loin de leur univers. Les plaisirs, les interrogations,la tristesse parfois la colère que suscitent les écrits d’Hugo, Senghor ou Césaire leur sont étranges.
L’injustice des pratiques politico-administratives les prédisposent-ils à mesurer à juste valeur l’importance d’un intellectuel ? J’en doute fort.
Pour eux, la réussite se trouve non pas dans un bureau mais derrière le comptoir d’une boutique. Car les belles villas des quartiers chics de Conakry( Kipé, Lambanyi…) sont pour la plupart la propriété des commerçants. Ceux pour qui voyager sur Paris, Bruxelles ou Dubaï fait désormais partie de l’ordinaire. Lors des cérémonies de baptême ou de mariage ils sont facilement identifiables. Non seulement par le luxe de leurs vêtements, voitures ou téléphones mais aussi par la considération qu’on leur accorde. Devant leur pouvoir financier, certains principes gérontocratiques sont négligés ou carrément battus en brèche.
Pas de surprise donc de retrouver Mouctar à Madina. Vraisemblablement il a commencé à faire fortune auprès de son oncle dans le domaine des produits cosmétiques. Ses cahiers, ses livres et les murs délabrés de son école sont pour lui de lointains souvenirs désormais. Sa seule préoccupation pour l’heure, me dit-il, est de comprendre mieux les rouages du marché afin de résister à la concurrence.