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Tchüss, Berlin.

Je m’en vais l’âme chiffonnée, j’emporte avec moi la nostalgie, ce feu sacré qui nourrit la création artistique, pour peu qu’on sache le recueillir.








Nuits de crystal

Il y a huit mois, un ami s’est donné la mort à Berlin. Cet article est l’hommage que je n’ai pas pu lui rendre plus tôt, faute de mots, mais aussi un texte sur une réalité de la vie berlinoise. Ici, il est souvent plus facile de perdre pied qu’ailleurs. 

Il y a deux ans, je sous-louai ma chambre pour un mois d’été à un ami d’amie. Le garçon qui habita mes pénates était Suédois, il travaillait comme maquilleur dans un grand magasin, il avait un contrat de travail et il payait rubis sur l’ongle – il ne m’en fallait pas plus pour décider qu’il serait le sous-locataire idéal. Appelons-le Lars.

Je n’avais pas pu rencontrer Lars avant qu’il ne s’installe, aussi entamais-je une conversation sur Internet avec lui. Il était drôle, plein d’allant. Il avait un sens de l’humour coquin et nous partagions la même passion pour Absolutely Fabulous. On s’était promis d’aller danser en club ensemble à mon retour.

Il partageait l’appartement avec ma colocataire chilienne. Ils s’étaient liés d’amitié et passaient leurs week-ends à faire les quatre cent coups, si bien que j’ai fini par m’inquiéter de l’état de mon appartement ; mais on m’assura que tout était en ordre et que la fête se passait essentiellement au Berghain, où Lars avait pris, selon mes amis, ses quartiers généraux. Il travaillait dur toute la semaine et devenait « un vrai monstre de teuf », d’après les dires de ma colocataire, dès qu’il reposait ses pinceaux à blush le vendredi soir. 

Après l’été, je rencontrai enfin Lars dans une soirée privée. Il était déjà passablement ivre, nous dansâmes ensemble en riant et en échangeant des blagues débiles. Je le soupçonnais d’être un peu défoncé, mais qui ne l’est pas à Berlin ?

Peu à peu, l’activité Facebook de Lars, qui était intense, commença à me troubler. Aux photos survoltées prises pendant des fêtes hautes en couleur succédaient, au grand dam de ses contacts, de brefs posts qui dénonçaient la nullité de Berlin, le vide absolu de cette existence de fête et de manque d’ambition, l’impossibilité de se faire de vrais amis dans la capitale allemande. Quelques heures plus tard, d’autres posts suivaient, vantant la douceur de vivre à la berlinoise, la liberté et la tolérance sexuelle de la ville, etc. Bientôt, les montagnes russes virtuelles de Lars me fatiguèrent et je cessai de les lire.

On se croisait de temps en temps le soir. Il était de plus en plus tatoué. Il commença à botoxer ses lèvres. Son visage se couvrait de piercings. Il construisait une identité berlinoise, lui qui venait d’arriver de Stockholm. Il plongeait dans la vie nocturne sans prendre la moindre précaution. Ma colocataire m’avoua à rebours qu’il avait toujours des party drugs sur lui, à l’époque où il occupait ma chambre. Mais lors des soirées que j’ai passées auprès de lui, rien ne transparaissait vraiment du mal-être profond qui le dévastait.

La nuit berlinoise lui offrait le pire et le meilleur à la fois. Le meilleur : le droit d’être gay, ouvertement et avec fierté, la chance d’écouter la musique qu’il aimait, de se vêtir comme il l’entendait sans subir les quolibets des coincés qu’il détestait en Suède. Le pire : des drogues dures, très dures, disponibles à chaque instant, et de plus en plus violentes. Le meth avait fait son entrée dans sa vie par la porte de la fête, dans un certain milieu gay, disait-il, qui s’éclatait de plus en plus à goûter aux cristaux de la défonce. Beaucoup d’entre nous étaient abasourdis : pour nous, le meth, c’était Breaking Bad, une saloperie de trailer trash, pas une drogue de la fête.

Ses posts Facebook prirent des couleurs sinistres. Il se mit à insulter la ville et les Allemands, avant d’admettre que de toute manière, il n’y avait nulle part au monde où il se sente chez lui. Ses confidents se sentaient démunis ; ils l’entourèrent avec soin. Malgré cela, Lars s’enfonçait dans la nuit aux éclats de crystal crados, à l’insu de tous ses vrais amis. Une fois, je le croisai au Berghain dans un état alarmant, presqu’incapable de parler. Il me jurait qu’il n’avait rien pris et qu’il s’amusait comme un petit fou. Je n’étais pas assez proche de lui pour le forcer à rentrer chez lui. Ses amis de la nuit étaient là, qui me regardaient avec des yeux vitreux et torves à la fois. Je quittai le club une demi-heure après, trop troublée par cette vision pour pouvoir vraiment m’amuser.

Deux mois après cette entrevue nocturne, sa meilleure amie le retrouva inanimé dans son appartement. Il avait attendu qu’elle parte en week-end chez ses parents pour commettre l’acte qu’il avait préparé pendant des mois avec tant de soin. Il avait gardé des doses de meth mortelles chez lui et se les étaient administrées. L’hommage que lui rendirent ses amis fut magnifique, chaleureux et tendre. Lui qui croyait n’être pas aimé l’était profondément. Mais tous ses proches me confirmèrent leurs soupçons : Lars voulait partir depuis longtemps. Son enfance avait été un cauchemar indescriptible : à 13 ans, il avait été héroïnomane. Je n’arrivais pas à en croire mes oreilles.

Je n’ai jamais vu de crystal meth et je ne saurais dire à quoi ressemble quelqu’un qui en subit l’influence. Ce que je peux dire, c’est que je n’oublierai jamais le regard de Lars cette nuit-là au Berghain. Il y avait tant d’amour et de tendresse étouffées dans ses yeux, mais quelque chose était déjà très loin, quelque chose de léger et de gracieux – son sens de l’humour – s’était perdu. Il était déjà parti et me regardait depuis la lisière d’un monde inconnu, un monde qu’il a choisi en pleine conscience dans un acte qui m’est inacceptable.

Le lendemain de sa mort, j’ai regardé ma chambre en l’imaginant y déambuler ; je le voyais se coucher dans mes draps, peut-être lire un bouquin la tête calée contre mon oreiller. Sur cette chaise, avait-il posé son jean avant d’enfiler un pyjama ? Sur la table de nuit, avait-il laissé ses pinceaux de maquilleur ? Je ne pensais pas à la drogue. Je pensais à Lars qui aimait Absolutely Fabulous et qui venait d’arriver à Berlin avec un contrat de travail et l’espoir d’une nouvelle vie. Je pense encore à lui. Personne n’a rien pu faire et c’est sans doute là le plus intolérable.




Les vilains Grecs et l’Europe désemparée

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J’ai demandé à mon amie Ourania Lampsidou, journaliste grecque, de nous expliquer sa vision de l’écroulement de son pays au sein de l’Europe

La Grèce est et a toujours été un Etat dysfonctionnel et en même temps, une sorte d’Etat-providence d’un genre unique, copié sur le modèle français. Cet « étatisme » grec a longtemps dominé l’histoire du pays, en particulier après la Seconde Guerre mondiale et la guerre civile de 1944-1949. Les couches les plus dynamiques de la société grecque – parmi eux, les jeunes – choisirent une carrière dans l’administration et non dans l’entreprenariat, et préférèrent la sécurité de l’emploi à une liberté risquée. Les élites n’occupaient pas seulement les plus hautes fonctions au sein du gouvernement, mais aussi de puissants syndicats et confréries. Ainsi, la plupart des corps professionnels se tournèrent vers l’Etat pour y trouver de l’aide. Paradoxalement, l’Etat fut bien souvent aussi la source de leurs problèmes. Ce dilemme s’aggrava encore lorsque l’Union européenne accrut son hégémonie économique et financière en Grèce.

Bien que, pendant les soixante-cinq dernières années, le gouvernement fut aux mains des partis conservateurs et sociaux-démocrates, les élites en place étaient piégées dans un cercle vicieux. Elles gardaient les citoyens sous une étrange tutelle ; les citoyens, en échange, soutenaient les hommes politiques qui leur avaient promis de répondre à leurs besoins et à leurs aspirations et, la plupart du temps, à leurs fantasmes et à leurs illusions. Finalement, les citoyens devinrent de simples votants, qui récompensaient ou punissaient les politiques selon le nombre de faveurs qu’ils leur accordaient et ne se souciaient plus du tout de leurs programmes ni de leurs projets pour le pays.

Sans réelle grande bourgeoisie sur laquelle s’appuyer, ces élites politiques grecques n’ont rien à offrir, à part un patriotisme fondé sur d’anciennes gloires et un nationalisme qui, bien souvent, remplaça à tort le sens civique et l’activité économique. Ces élites politiques n’ont pas créé de richesse, ni d’industrie commerciale, ni de technologies, ni de sciences, ni de culture moderne et n’ont pas la caractéristique de base d’une classe supérieure : le réalisme. Elles ne s’inquiétaient que d’un seul et unique programme, toujours le même : soigner une classe moyenne patriotique dont l’Etat était le principal pourvoyeur, une classe moyenne qui n’a jamais appris à prendre des initiatives et qui ne s’est jamais vue comme un rouage de la mobilité, de la réforme et du progrès sociaux.

Au moment où la Grèce s’était isolée, coupée de tout ce qui se passait en dehors de son territoire, elle cédait à toutes sortes de théories du complot et devint un cas particulier d’auto-admiration, ignorant l’esprit de Voltaire : « Je n’ai pas besoin d’ancêtres si j’ai des idées et des principes ». (Paradoxalement, les Américains – les Anglo-Saxons – furent plus proches de cette pensée).

Sans nul doute, la Grèce a ses singularités, mais nous pouvons affirmer que bien de ces caractéristiques sont communes au reste de l’Europe et qu’elles sont relatives aux débuts de l’histoire européenne, à savoir le XIXe siècle – le siècle qui définit la mentalité européenne moyenne. Sauf cas particulier, l’Europe tente de se débrouiller aujourd’hui en utilisant l’élan de ses anciennes gloires, dans un monde pourtant profondément transformé, et tente de relever les défis du XXIe siècle avec les outils du XIXe siècle. C’est ainsi qu’elle devient la première victime de la mondialisation. La foi dans l’Etat-nation, dans la langue régionale et la religion est toujours profondément enracinée. Parce qu’elle est une foi basée sur des mythes fondateurs, elle ne peut se dissoudre et faire place à de nouvelles réalités.

Les « hommes sages » de Bruxelles, incapables de parler directement d’un ordre qui a cessé d’exister depuis longtemps, se réfugient dans un langage administratif et technocratique, parfaitement incompréhensible pour une personne moyenne. Et ce citoyen moyen devient la proie des forces les plus extrêmes, les plus irréelles et parfois les plus sombres, qui le réconfortent avec la promesse d’un billet de retour pour le bon vieux temps d’une Europe qui a eu le luxe de se considérer comme le centre du monde et de disposer du reste de la planète. Les mythes ont toujours été plus forts que l’Histoire elle-même.

Même si la Grèce était expulsée de la zone euro et de l’Union européenne, l’Europe devrait toujours répondre à la question, plus large, de sa perte d’autonomie. Elle devrait voir plus clairement – surtout l’Allemagne – qu’elle crée en permanence les fondations de l’euroscepticisme, du mysticisme, du chaos et de la paranoïa.

A PROPOS DE L’AUTEUR : Ourania Lampsidou, journaliste, est née à Athènes en 1954. Elle a travaillé pendant plus de trente ans pour les meilleurs journaux et magazines grecs en tant qu’analyste pour des chroniques sur les affaires étrangères. Elle fut conseillère du ministre de la Culture grec sur la question de l’enseignement du grec moderne et enseigna, entre autres, à l’université de New York (NYU) aux Etats-Unis. En 2014, Ourania Lampsidou a publié « L’autobiographie de mon père », un hybride entre une autobiographie et une biographie. 

Illustration de Rachel van der Nacht


Refuges européens – Le monde d’hier

 

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Illustration de Rachel van der Nacht

Comment la lecture d’un grand auteur germanophone peut raviver le souvenir de l’étincelle européenne et d’un monde dédié à la paix et à l’entente des peuples, en ces temps de crise des migrants et à l’heure de l’effondrement de la Grèce.

Berlin, en tant qu’officieuse capitale politique de l’Europe, a deux crises majeures à gérer en ce moment : les migrants et la Grèce. La seconde est en train de se faire zapper méchamment par la première et pourtant, toutes deux raniment une xénophobie ensommeillée et la question, cruciale, de la solidarité dans l’espace européen.

J’aurais pu aller voir les migrants dans leurs refuges temporaires à Berlin et vous rapporter ce que j’y aurais vu, comme je l’ai fait il y a quelques années. Mais je me suis trouvée, cette fois, désemparée face à l’ampleur de la catastrophe. Tous les Allemands sont déjà au front pour les accueillir, la machine de la solidarité berlinoise semble s’être une fois de plus mise en marche. Et tant mieux.

Cependant, elle ne devrait pas faire oublier que nous sommes environnés de racismes latents prêts, eux aussi, à sortir de leur placard à la première sonnette d’alarme tirée. Nous voyons bien, en France, La Le Pen se démener avec son incroyable talent démagogique, que certains commencent à trouver « pas si con » (horreur).

Je me suis remise à lire Stefan Zweig. Zweig était autrichien, mais c’était surtout un immense Européen, un convaincu de la toute première heure, bien avant même que l’idée d’une union n’existe. Zweig connaissait l’Europe sur le bout des doigts. Voyageur insatiable, il sillonnait l’empire austro-hongrois comme la France et l’Angleterre, à la recherche de poètes et d’artistes. Quand la Première Guerre mondiale éclata, il était l’un des très rares intellectuels à louer encore la paix et l’entente des peuples à une foule enivrée de haine pour ses voisins. Les horreurs de la Seconde Guerre mondiale achevèrent ce qu’il restait de son optimisme et de sa foi en l’Europe. Il se suicida en 1942. Le chantre de la « supériorité morale du vaincu », comme il le disait lui-même, a raconté sa vie bouillonnante, passionnée, idéaliste, enivré par la beauté du monde dans Le monde d’hier, son dernier ouvrage.

Il est bien triste que Zweig n’ait pas vu l’Europe de l’après-guerre et son amour affermi de la paix. Mais que dirait-il de notre Europe des années 2010 ? Une Europe économique régie par les lobbies, le fric sale et les entreprises libidineuses, une Europe politique serrée à étouffer dans l’étau de l’austérité et de la règle absolue, imposée par Merkel et ses larbins ?

Je n’ai rien à vous raconter de neuf sur la crise des migrants. C’est pourquoi je lis Le monde d’hier en tâchant de trouver, dans le plus bel ouvrage pacifiste et épris de l’Europe qu’il m’ait été donné de lire, des lumières pour guider mes réflexions. Ce qui s’est passé hier dans le monde de Zweig – deux guerres absurdes, deux monstruosités – se passe désormais aux portes de l’Europe. Dans les livres du passé se cachent des réponses et des éclairages inattendus. Mais pour l’instant, peut-être comme vous, je suis démunie. Les bras ballants. On a à peine le temps de penser. Que faire de toute cette vie qui se jette désespérément à notre cou ? Avez-vous, vous aussi, vos lectures pour tenter de comprendre le présent ? 

J’ai choisi d’illustrer cet article par un dessin magnifique et saisissant de Rachel van der Nacht, une Française installée à Berlin qui va collaborer avec moi sur ces pages. Merci Rachel !


Les fantômes volants de Tempelhof

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Le hall d’arrivée de l’ancien aéroport de Tempelhof

Il aurait dix étages souterrains, des couloirs secrets menant directement au Reichstag, et une gare clandestine. Désaffecté en 2008, l’aéroport de Berlin-Tempelhof nourrit les légendes urbaines les plus intrigantes. J’ai eu la chance de le visiter aujourd’hui. Un voyage fascinant au temps d’Hitler, de la Guerre froide et des stars du cinéma classique hollywoodien

Tempelhof. Autrefois, un aéroport en pleine ville ; aujourd’hui, le terrain de jeu préféré des amateurs de cerfs-volants et de saucisses grillées. Mais Tempelhof a bien plus à offrir que des pistes d’atterrissage sans avions. Ses bâtiments, construits sur ordre d’Hitler, sont devenus un lieu de mémoire absolument passionnant, à visiter sans faute, afin de mieux comprendre l’histoire mouvementée de la ville.

Ceux qui se plaignent aujourd’hui que Berlin soit « brutalement » devenue le repaire des hipsters du monde entier connaissent d’ailleurs mal leur Histoire. Comme le rappelle notre guide à Tempelhof (un garçon de Montréal fort bien instruit sur la question), Berlin attirait déjà toute l’Europe branchouille des années 1920. Cabaret, théâtre, cinéma (les célèbres studios de Babelsberg), jazz : c’était à Berlin qu’il fallait aller quand on avait le goût de l’art et des aspirations cosmopolites. Un aéroport s’imposa vite comme une nécessité absolue.

Tempelhof ouvre en 1923 dans un vaste champ en pleine ville. Quelques baraques en planches et des avions riquiqui par rapport aux standards contemporains suffisaient à assurer le transport des Européens avides de culture. Mais, en 1934, Hitler décide de retaper la petite aérogare pour en faire un aéroport digne de son projet urbain mégalomane, Germania, comme une quarantaine d’autres bâtiments de Berlin.

Sous la direction de l’architecte Ernst Sagebiel, le nouvel aéroport est achevé en 1941. Une bonne blague, quand on sait que Tempelhof est le troisième plus grand bâtiment du monde en termes de surface au sol, et que Berlin lutte actuellement pour finir à grands efforts son aéroport moderne. En dépit de son architecture à la terrifiante élégance nazie, Tempelhof ne servit pas d’aérogare pendant la Seconde Guerre mondiale. Non. Hitler avait une meilleure idée : enfermer des milliers de travailleurs forcés et de prisonniers de guerre dans les hangars afin de leur faire monter des avions de chasse, à raison de 16 heures de travail par jour et six jours de labeur par semaine. En dépit de cette histoire malheureuse, je dois bien avouer que ces fameux hangars, ensuite utilisés par les Alliés, sont un véritable bijou architectural.

A la chute d’Hitler, les Français, les Anglais et les Américains se sont en effet emparés du joyau nazi et en firent non seulement un aéroport commercial, mais une base aérienne militaire, une ville dans la ville avec terrain de squash ou de basket pour les soldats, crèche, bureaux de banque et de poste, et… l’arrière-plan glamour de photos légendaires, à l’arrivée des stars de cinéma pour le festival de Berlin.

Loren, Sophia - Schauspielerin, Italien/ undatiert

Sophia Loren à Tempelhof, 1959 (source : site web de Tempelhof)

Le hall d’arrivée de Tempelhof est d’ailleurs une merveille cinématographique, avec ses escalators qui semblent taillés dans le verre, son restaurant suspendu des années soixante et son horloge qui nous fait remonter le temps. Bien dommage que la visite ne s’y attarde pas et qu’il faille y passer à toute vitesse.

Il faut dire que le monde souterrain de Tempelhof est, lui aussi, plein de secrets que notre guide doit nous raconter. L’aéroport possède plusieurs étages enfouis. Nombre d’entre eux abritent quelques-uns des trois cents abris anti-bombes que recèle Tempelhof. La lueur d’une lampe torche dévoile un détail émouvant : sur les murs des sinistres abris souterrains ont été peints, dans les années quarante, des scènes d’un livre de Wilhelm Busch, racontant des histoires connues de tous les enfants allemands. Une manière comme une autre de leur faire oublier qu’au-dessus de la tête, leur ville se faisait bombarder à tout va.

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Surprise dans un abri anti-bombes de Tempelhof

Ces souterrains alimentent tous les fantasmes sur la Seconde Guerre mondiale et la Guerre froide. Tempelhof est en effet un délice pour les amateurs de livres d’espionnage. Qui sait vraiment aujourd’hui combien de souterrains inconnus s’y cachent? La CIA avait bel et bien ses quartiers à Tempelhof pendant la Guerre froide et y pratiquait l’espionnage. Et même si notre guide est sceptique quant aux mille légendes urbaines qui circulent à propos de lieu, force est de constater que certains couloirs vous fichent délicieusement la frousse. Le Filmbunker, par exemple, qui contenait les archives de la Luftwaffe et était caché par une porte et un escalier secrets, est absolument spooky avec son béton noirci par l’incendie qui le ravagea à la fin de la guerre.

La visite de Tempelhof se déroule en allemand, mais vous pouvez booker une visite en anglais. Les guides sont passionnants et fort bien informés. La visite est assez sportive : deux heures à pied dans un aéroport immense, pourvu de nombreux escaliers. 

J’ai pu faire cette visite grâce à l’application Get your Guide, qui permet de réserver très facilement depuis votre smartphone ou votre ordinateur. Get your Guide offre un bon rayon d’activités et de visites adaptées à votre séjour à Berlin et ne s’adresse pas seulement aux touristes : si vous êtes Berlinois, vous pouvez tester les visites à thèmes précis sur le IIIe Reich ou sur le Kreuzberg alternatif avec des guides vraiment pointus.