Vincent AGUE

« Attention aux reptiles ! » : quand les Béninois tournent en dérision les coupures électriques

Extrait d’une vidéo « Un serpent chasse les oiseaux sur une ligne électrique », par Debiles.

Ça fait mal, mais il vaut mieux en rire. Depuis quelques semaines, les Béninois subissent stoïquement et avec humour des coupures électriques devenues monnaie courante. Alors qu’ils auraient tant voulu passer à un courant stable. Tout ça, à cause des… reptiles.

Le directeur général de la SBEE, la Société béninoise d’énergie électrique, était pourtant assez sérieux quand il expliquait sur Radio Bénin le 17 février dernier, que les coupures du courant étaient par endroits imputables aux reptiles et autres animaux qui endommagent les installations électriques.

Depuis, sur les réseaux sociaux, les Béninois sont à leur tour assez inspirés dans l’humour pour commenter toute coupure du courant. Le scénario varie d’une publication à l’autre : un serpent qui bouffe les fils électriques ici, des geckos qui causent un court-circuit ailleurs ou encore, l’organisation d’une chasse aux reptiles…

L’humour appelle l’humour…

La publicité se passe de commentaires…

Blackout national

Jeudi 21 mars, peu après 22h, les plaintes sur Facebook comme dans les groupes de discussion sur Whatsapp permettent de comprendre qu’une énième coupure intervenue ce soir était en réalité générale à tout le pays. Un situation due à une panne survenue sur la ligne de transport de l’énergie du Nigeria vers le Bénin. Comme l’expliquera plus tard le directeur général de la SBEE  : “Nous importons notre énergie du côté du Nigeria”, rappelle M. Laurent Tossou. 

Mais avant cette réaction officielle, les plaintes teintées de railleries avaient foisonné sur les réseaux sociaux.

Hum, et si c’en était trop ? Apparemment oui !

Sous tension politique, hors tension électrique, c’est bon pour le moral

En pleine période période électorale, avec des législatives sous tension, les épisodes d’humour qui interviennent au rythme des coupures électriques sont certainement le moindre mal qui puisse décrisper les Béninois.

Rien que pour cette raison, on peut dire merci aux reptiles, euh, à la SBEE, pardon à l’auteur de la meilleure vanne dans cette affaire j’allais dire.

Oui, tenez, la dernière pour la route vers le stade de l’Amitié dimanche 24 mars… 

Les Eperviers du Togo sont avertis…


Collez la paix aux Français, ils n’en font pas trop de leur sacre au mondial !

L’équipe de France de football est championne du monde. Toute la France est en liesse. Grâce à ses puissants médias, le pays sacré en Russie ce 15 juillet 2018 fait retentir ses cris de joie hors de ses frontières. C’en serait de trop selon certains, qui en veulent aux Français pour leur trop grand orgueil. 

Ce billet a initialement été publié sur oeilvincent.mondoblog.org

Oui, les médias français n’ont cessé de nous rabattre les oreilles avec l’actualité des Bleus durant tout le Mondial. Oui, les journaux et les émissions de leurs télés et radios que nous suivons sous les tropiques ont toujours jugé utile de nous informer de la moindre anecdote liée aux joueurs de l’équipe de France. C’est aussi vrai que des journalistes français ont annoncé le sacre des Bleus avant l’heure. On en a été saoulé !  

Mais alors ! Serait-ce une raison pour crier haro sur l’équipe aux 15 joueurs d’origines africaines ? Serait-ce une raison pour souhaiter la défaite d’une équipe qui ne fait que jouer au football au même titre que les autres 63 nations présentes au mondial ?

On n’aime jamais assez sa patrie

Ces derniers jours les réseaux sociaux ont été inondés de ces messages dignes de malédictions à l’égard de l’équipe de France. Supporter une équipe est un choix individuel. De la même manière, il arrive qu’on déteste une équipe pour des raisons subjectives et assumées. Oui, oui, moi je ne supporterais jamais l’Uruguay à cause de la triste et célèbre main noire de Luiz Suarez qui a empêché le but ghanéen qui devait envoyer une équipe africaine en demi-finale du Mondial… en Afrique du Sud en 2010. Et l’édition 2018 m’a fourni une autre raison de ne pas supporter l’Argentine, pour le doigt d’honneur de Diego Maradona aux Nigérians…

Mais je ne trouverais pas agaçant que des citoyens de ces pays célèbrent à la folie les performances de leurs équipes nationales. Ceux qui espéraient qu’une équipe rabatte enfin le caquet aux Français auront été déçus. Leur torture psychologique, ils l’auront cherchée. Supportez ou détestez l’équipe de France comme bon vous semble, mais ne reprochez pas aux supporters de soutenir leur équipe ! Quand il s’agit d’aimer son pays, on n’est jamais assez patriote.

Chaque nation saisit toutes les occasions pour bien se positionner dans le concert mondial

La France, pour mille raisons, a certainement une image à soigner dans ses (anciennes) colonies d’Afrique. Est-ce pour cela qu’on devrait lui en vouloir sur tous les plans, y compris en sport ? La relation des Français avec leur pays relève de leur degré de patriotisme. Il est assez fréquent que les événements les plus douloureux comme les plus heureux fassent l’objet de surmédiatisation, au point d’agacer des Africains.

Mais que la France vende le rêve français à travers une hypermédiatisation de “l’affaire Gassama” ne devrait pas étonner, par exemple. Qu’elle célèbre avec faste sur plusieurs jours son titre de champion du monde, ne devrait pas non plus surprendre. Chaque nation saisit toutes les occasions pour bien se positionner dans le concert mondial. Et la France tient ici une énième occasion. Ne lui déniez pas le droit d’en user. Si vous pensez qu’elle devrait avoir le triomphe modeste, vous n’avez qu’à couper votre télé ou faire comme ceux qui vont simplement éviter les médias français pour un temps…

Dans l’espoir que ce soit prochainement votre tour de célébrer un titre de champion du monde, sachez que je me sentirai à l’aise pour dire à vos détracteurs de vous coller la paix. D’ici là, collez la paix aux Français ! Ils n’en font pas trop de leur sacre.


Collez la paix aux Français, ils n’en font pas trop de leur sacre au mondial !

L’équipe de France de football est championne du monde. Toute la France est en liesse. Grâce à ses puissants médias, le pays sacré en Russie ce 15 juillet 2018 fait retentir ses cris de joie hors de ses frontières. C’en serait de trop selon certains, qui en veulent aux Français pour leur trop grand orgueil. 

Oui, les médias français n’ont cessé de nous rabattre les oreilles avec l’actualité des Bleus durant tout le Mondial. Oui, les journaux et les émissions de leurs télés et radios que nous suivons sous les tropiques ont toujours jugé utile de nous informer de la moindre anecdote liée aux joueurs de l’équipe de France. C’est aussi vrai que des journalistes français ont annoncé le sacre des Bleus avant l’heure. On en a été saoulé !  

Mais alors ! Serait-ce une raison pour crier haro sur l’équipe aux 15 joueurs d’origines africaines ? Serait-ce une raison pour souhaiter la défaite d’une équipe qui ne fait que jouer au football au même titre que les 31 autres nations présentes au mondial ?

On n’aime jamais assez sa patrie

Ces derniers jours les réseaux sociaux ont été inondés de ces messages dignes de malédictions à l’égard de l’équipe de France. Supporter une équipe est un choix individuel. De la même manière, il arrive qu’on déteste une équipe pour des raisons subjectives et assumées. Oui, oui, moi je ne supporterais jamais l’Uruguay à cause de la triste et célèbre main noire de Luiz Suarez qui a empêché le but ghanéen qui devait envoyer une équipe africaine en demi-finale du Mondial… en Afrique du Sud en 2010. Et l’édition 2018 m’a fourni une autre raison de ne pas supporter l’Argentine, pour le doigt d’honneur de Diego Maradona aux Nigérians…

Mais je ne trouverais pas agaçant que des citoyens de ces pays célèbrent à la folie les performances de leurs équipes nationales. Ceux qui espéraient qu’une équipe rabatte enfin le caquet aux Français auront été déçus. Leur torture psychologique, ils l’auront cherchée. Supportez ou détestez l’équipe de France comme bon vous semble, mais ne reprochez pas aux supporters de soutenir leur équipe ! Quand il s’agit d’aimer son pays, on n’est jamais assez patriote.

Chaque nation saisit toutes les occasions pour bien se positionner dans le concert mondial

La France, pour mille raisons, a certainement une image à soigner dans ses (anciennes) colonies d’Afrique. Est-ce pour cela qu’on devrait lui en vouloir sur tous les plans, y compris en sport ? La relation des Français avec leur pays relève de leur degré de patriotisme. Il est assez fréquent que les événements les plus douloureux comme les plus heureux fassent l’objet de surmédiatisation, au point d’agacer des Africains.

Mais que la France vende le rêve français à travers une hypermédiatisation de “l’affaire Gassama” ne devrait pas étonner, par exemple. Qu’elle célèbre avec faste sur plusieurs jours son titre de champion du monde, ne devrait pas non plus surprendre. Chaque nation saisit toutes les occasions pour bien se positionner dans le concert mondial. Et la France tient ici une énième occasion. Ne lui déniez pas le droit d’en user. Si vous pensez qu’elle devrait avoir le triomphe modeste, vous n’avez qu’à couper votre télé ou faire comme ceux qui vont simplement éviter les médias français pour un temps…

Dans l’espoir que ce soit prochainement votre tour de célébrer un titre de champion du monde, sachez que je me sentirai à l’aise pour dire à vos détracteurs de vous coller la paix. D’ici là, collez la paix aux Français ! Ils n’en font pas trop de leur sacre.

 

 


#BeninMeetsTogo : blogueurs du Bénin et du Togo défendent l’intégration sur les réseaux sociaux

Photo de famille des participants au #BeninMeetsTogo le 5 ami 2018 à Ouidah (Bénin). Photo : Aphatal Cissé
Photo de famille des participants au #BeninMeetsTogo le 5 ami 2018 à Ouidah (Bénin). Photo : Aphtal Cissé

La ville de côtière de Ouidah, située au sud-ouest du Bénin, a accueilli samedi 5 mai 2018 des blogueurs du Bénin et du Togo pour un tweetup spécial sur l’intégration sous-régionale en Afrique de l’Ouest. 

Cette initiative des associations des blogueurs des pays avait pour objectif de promouvoir l’intégration ouest-africaine par l’usage des réseaux sociaux et de l’Internet en général. A l’origine, c’est la sauvegarde de la bonne relation entre le Bénin et Togo qui a motivé l’organisation de la rencontre. Il y a quelques semaines, des rumeurs propagées sur la Toile et appuyées par des images ont fait croire des Béninois présumés cybercriminels fuyant la traque dans leur pays sont poursuivis et tués par les Togolais dans le pays voisin.

Si la lutte contre le phénomène de la cybercriminalité est réelle au Bénin depuis le mois de mars (il y a eu des centaines d’interpellations par la police), la persécution des Béninois au Togo elle était bien une intoxication comme on le saura plus tard. Mais en quelques jours, la période la gloire des rumeurs ont fait monter la tension entre des pyromanes aussi bien du Togo que du Bénin (les uns répondant aux provocations des autres) qui sans retenue ont fait croire qu’une guerre était ouverte entre les deux pays.

Le tweetup bénino-togolais baptisé #BeninMeetsTogo devait alors des semaines après une fois l’accalmie installée, poser un débat serein sur la place des réseaux sociaux dans la l’intégration des pays d’une même région.

Mais la relation entre le Bénin et le Togo n’aura finalement été qu’un prétexte aux échanges qui ont aussi abordé la libre circulation des personnes en Afrique, la place des citoyens dans les politiques communautaires,…

Morceaux choisis

Pour lire plus que cette sélection de tweets, cherchez les autres publications toutes aussi intéressantes avec le #BeninMeetsTogo sur Twitter…

Vous tomberez certainement sur ces deux publications-ci que je ne saurais m’empêcher de vous faire voir:

  • La « bénédiction » du président en exercice de la CEDEAO, le président togolais Faure Gnassingbé

  • Et le repas intégré entre Togolais et Béninois

https://twitter.com/IamBaloGouN/status/992836137654935552


Blogcamp Bénin 2016 : un œil sur les insolites de la première journée

Blog camp 2016. Photo : Igor Koucoi @Msieursem
Blogcamp 2016. Photo : Igor Koucoi @Msieursem

La quatrième édition du blogcamp des blogueurs du Bénin en est à sa seconde journée ce dimanche 18 septembre 2016. La veille, l’événement a démarré et cette première journée s’est bien passée. Assez suffisant pour que Oeilvincent puisse raconter le côté « BlagueCamp ».

Le reporter de Oeilvincent arrive au Business promotion center de Porto-Novo qui abrite le Blogcamp, ce samedi matin un quart d’heure après 9h, heure prévue de la cérémonie d’ouverture. Dans un pays où le retard est presque normal, la ponctualité devient une exception. Exceptionnel pour lui donc de constater la mobilisation de nombreux participants déjà bien installés dans la salle. Les yeux rivés sur les ordinateurs et les smartphones. Pas étonnant quand même, non ? Surtout quand il y a une connexion wifi fournie par le sponsor officiel, Bénin Télécoms. L’attente sera un peu longue (au Bénin le retard, qu’il soit d’une minute ou de plusieurs heures, est un léger retard). Quelques minutes après l’entrée dans la salle des blogueurs du Burkina Faso et du Togo arrivés au Bénin, la cérémonie d’ouverture peut enfin commencer. Il sonne 10h passées de 10 minutes quand la présidente du comité d’organisation et le Président de l’Association des blogueurs du Bénin se résolvent à lancer l’événement en l’absence des « personnalités » invitées pour l’ouverture, qui n’ont pas fait le déplacement. On y va donc, c’est une affaire entre blogueurs, l’absence des « invités de marque » ne gêne pas. Awanabi Idrissou et Maurice Thantan prononcent leurs mots de bienvenue et de lancement. Le blogcamp peut commencer. Mais avant, les participants reçoivent leur kit, un ensemble de bloc-notes, stylo, et surtout d’un ticket restaurant (comme au campus, il s’agit ici de camp, on en est pas loin). Le tout dans un cartable. Sans oublier le tee-shirt.

La pause-café manquée

Prochaine étape prévue, la pause-café. Elle n’aura pas lieu. C’est donc avec surprise que votre reporter qui doit modérer le panel, première activité du camp, à lancer la discussion sur « Tics et bonne gouvernance ». Alors qu’il comptait sur la pause-café non seulement pour prendre son petit-déjeuner mais aussi pour briefer ses panélistes… Le hasard n’existe, finit-il par admettre. Pas grave, c’est passé, le débat s’est déroulé sans qu’aucun participant ne s’évanouisse.

L’heure du déjeuner sera respectée. Mais avant de passer à table, instant photo de famille des blogueurs qui ont arboré les tee-shirts. On découvre à l’occasion des styles comme celui des hommes qui se mettent tee-shirt sur chemise. Vivement une chronique de nos blogueuses mode sur ce look.

Les photographes font crépiter leurs appareils. Et le selfie, ce selfie à “histoire”.

Revenons sur la pause-café manquée et le faux bond des autorités invitées. Si ces dernières étaient venues, quelle excuse le comité leur aurait fournies pour expliquer l’impossibilité de prendre le café prévu dans l’agenda ?

Trois communications successives

“Éducation populaire au numérique”, c’est le titre de la première communication. Choix judicieux. Une sorte de formation de formateurs. C’est donc avec embarras que Médard Agbayazoun doit se lancer pour sa communication sur “Démocratie ouverte : quelle place pour l’open data ?”. Après le passage de Mathias Houngbo, Médard est censé appliquer tous les conseils donnés par son prédécesseur. L’a t-il fait ? Ce qui est sûr, il nous aura laissé croire que ses consultations sont “ouvertes”. Parce qu’il est un promoteur du logiciel libre !

Guillaume Djondo, lui, blogueur togolais, ne s’est pas permis une certaine liberté alors qu’il en était proche. Appelé à échanger avec ses les blogueurs sur “Tic et bonne gouvernance”, sa communication doit intervenir à un moment où la fatigue commence par gagner la salle. Il fait le constat et tente de nous réveiller. Comment ? Il nous fait croire qu’il va danser le nouveau titre de Toofan, “Téré-téré”. Hilarité de son public. La communication peut passer et bien se terminer par l’annonce d’une bonne nouvelle par la blogueuse mode Gloria Estelle : la danse promise par Guillaume Djondo ? Mais non ! Plutôt une pause-café, la fameuse retardataire.

“Blogueurs du dehors”

On va traîner les pas à rejoindre la salle après la pause-café. Révélation : votre reporter se demande si les types qui se permettent une longue détente sont des “blogueurs du dehors” réunis autour du président Maurice Thantan. Le petit groupe file droit en salle illico. Pour découvrir Romuald Djègbénou, agri-blogueur qui va démarrer sa communication sur “Blog comme outil de contrôle citoyen”. Lui, c’est un communicateur énergique : voix forte, occupation magistrale de la salle, questions au public, il désigne même des gens pour intervenir et exige des plus questions. Ah la passion, quand tu nous tiens ! Mais il sera obligé de s’arrêter pour laisser place au président Thantan qui prend la parole pour clôturer cette première journée. A bientôt !

 


Au Bénin, des “étudiants cacas” souillent l’université

« Insert brain her » signifie « insérez un cerveau ici ». Sans commentaire, à l’intelligent peu de mots. Source de l’image : the247analyst.wordpress.com
« Insert brain her » signifie « insérez un cerveau ici ». Sans commentaire, à l’intelligent peu de mots. Source de l’image : the247analyst.wordpress.com

S’ils n’ont aucun scrupule, pourquoi devrais-je m’imposer une certaine retenue ? Loin de moi la bassesse de répliquer sans élégance aux auteurs d’ignominies. Mais la gravité de l’acte posé m’a poussé à ne pas tenir de langue de bois.

Comme nombre de Béninois, j’ai été ému d’apprendre, au matin de ce mardi 16 août 2016, que des amphithéâtres de la première et plus grande université publique du Bénin, l’Université d’Abomey-Calavi (UAC), ont reçu l’épandage de matières fécales. Quelle horreur ! Je ne pouvais pas y croire au premier message qui m’est parvenu sur mon téléphone, car les rumeurs invraisemblables sont légion au pays avec la démocratisation de messageries instantanées (notamment via l’application WhatsApp). Honnêtement, si j’ai douté de la véracité de “l’info”, c’est aussi parce que je croyais que les responsables d’organisations étudiantes ne devraient pas en être capables. Hélas, j’avais tort. Ils ont bel et bien déversé des déjections sur les tables et bancs des salles de composition qui devaient accueillir les étudiants de la Faculté des Sciences et Techniques de l’UAC pour leurs examens. C’est la dernière trouvaille des meneurs de la lutte estudiantine. Ils font cela pour faire plier les autorités après deux mesures successives prises à l’encontre des étudiants de la Faculté des lettres : l’exclusion de 21 étudiants instigateurs de boycott d’examens et l’annulation pure et simple de l’année académique à ladite Faculté.

Depuis plus de deux mois, en effet, les délégués des étudiants ont bloqué la tenue des examens de fin de semestre à la Faculté. Celle-ci traîne à terminer l’année académique entamée très tard en mars. Un retard dû au prolongement de l’année précédente, corollaire d’un seul problème non résolu depuis l’année dernière : la suppression de la seconde session, qui permet aux étudiants des facultés de se rattraper après un échec à la première session.

Après une manifestation réprimée puis les deux mesures décidées par les autorités rectorales, les étudiants ne veulent pas en démordre. Les casses et incendies de voitures mais aussi des amphithéâtres qui ont eu lieu l’an dernier pendant le récurrent mouvement de grève “campus mort” avaient fait d’eux des vandales à maîtriser à tout prix, dont il faut surveiller les moindres gestes. Le campus est de facto devenu une garnison militaire dont l’entrée est gardée par des gendarmes depuis plus d’un an.

Les “héros” de la défense de la cause étudiante n’en ont apparemment pas conscience, au point de souiller encore plus une réputation déjà entachée.

Cause perdue

Le principal syndicat des professeurs essayait encore de défendre une cause perdue. Des voix s’élèvent, qui pour demander la clémence des autorités rectorales, qui pour appeler à une intervention du président de la République. Mais c’est par un acte insensé que les étudiants ont choisi de se faire remarquer. Dans une société béninoise où tout ce qui a trait aux excréments, notamment humains, est abordé avec une certaine gêne, une certaine réserve, il a pu paraitre logique dans la tête de “responsables” d’organisations d’étudiants, de manipuler des matières fécales, de les répandre dans des salles qui les accueilleront plus tard pour des examens, et d’en être fiers.

S’il était possible de passer ce malheureux événement sous silence pour ne pas porter un coup à l’orgueil de l’étudiant discipliné, studieux et conscient de son avenir, j’y travaillerais. Mais ce n’est n’est malheureusement pas possible. La nouvelle est partie, à chacun de la supporter ou de la rejeter comme il se comporterait dans un environnement répugnant.

Qui pour défendre encore l’indéfendable ? Au début du mouvement, j’avais, au cours d’un débat sur Radio Bénin, jugé légitime la résistance des étudiants. A présent, je peux me dédire. Je ne veux plus y tremper, ça sent mauvais.

Vincent Agué (facebook, twitter)

> Voir le reportage de la télévision nationale sur l’insolite 


Robert Mugabe va détrôner Toto sur la toile !?

Robert Mugabe au 12è sommet de l’Ua le 2 février 2002 à Addis Abeba.
Robert Mugabe au 12è sommet de l’Ua le 2 février 2002 à Addis Abeba. https://commons.wikimedia.org

Toto, les francophones connaissent ce petit personnage des histoires les plus tordues mettant en exergue la naïveté ou l’intelligence décadente de ce célèbre gamin jamais identifié dans la vie réelle. Son semblable, ou du moins celui à qui l’on veut tailler ce costume, n’est pas un francophone et il est aussi bien plus âgé et surtout identifié : Robert Mugabe. Les réseaux sociaux peuvent en témoigner depuis le Bénin.

Le nonagénaire président du Zimbabwé a sans doute, en bon vieillard africain, des pensées lumineuses sur toutes les questions existentielles, et les exprimer serait tout aussi facile pour lui. On sait combien il sait exprimer, avec éloquence et sans détour, ses prises de position souvent radicales. Mais est-ce suffisant pour croire tous les propos attribués à Robert Mugabe, fussent-ils empreints de sagesse (cela est relatif) ? Au Bénin, les habitués de Facebook sont familers depuis un certain temps de citations créditées Robert Mugabe. Le doyen des chefs d’Etat africains en exercice (par l’âge car le septuagénaire Jose Eduardo dos Santos avec ses 37 ans à la tête de l’Angola effectue actuellement le règne le plus long  en Afrique ) serait du coup perçu comme un autre Toto, voire un troll.

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Je ne suis pas aussi naïf ou enquiquineur que Toto, mais face aux propos attribués à Robert Mugabe, je me pose juste deux questions : dans quel contexte Mugabe aurait prononcé une telle phrase ? Mugabe ne parlant pas le français, quels sont les mots d’une telle autre citation en anglais, la langue officielle du Zimbabwe ?

Peut-être ai-je tort de vouloir prendre la défense de Robert Mugabe. Mais il se fait que je ne suis pas le seul à avoir une certaine réserve vis-à-vis des déclarations données pour dues au tribun “père de l’indépendance” de l’ancienne Rodhésie du Sud. Apparemment, le vieillard de chef d’Etat servirait de couvert à des phrases concoctées par des esprits malicieux qui éprouveraient une gêne à en assumer la responsabilité. D’autres personnes ont aussi fait le constat.

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Robert Mugabe n’est cependant pas le premier dirigeant africain objet de railleries populaires

Habitué des discours sans retenue, Robert Mugabe a certainement prêté flanc à la chose en plus de se faire ridiculiser par sa résistance à un pouvoir qu’il n’aura d’autre choix que de laisser un jour ou l’autre. Il avait déjà été la risée de la toile après que des images de sa chute suite à une marche ratée à l’aéroport d’Harare en février 2015 ont été publiées par certains sites. Une parodie s’ensuivit.

Robert Mugabe n’est cependant pas le premier dirigeant africain objet de railleries populaires. Que n’a-t-on pas entendu dire d’Eyadéma Gnassingbé, l’ancien président du Togo décédé en 2005 ? Les mille et une histoires racontées à son propos tendent souvent toutes à mettre en exergue sa non maîtrise de la langue de Molière… Un handicap qui ne lui pas cependant empêché de régner 38 ans à la tête de son pays (et même de continuer par régner même après sa mort car “très Faure” est-il… ).

Gnassingbé puis Mugabe, à qui le tour ? Qui sait, le non moins rigolo président gambien, Yahya Jammeh serait bon pour prendre la place. Tenez, par exemple, dans une interview au magazine panafricain “Jeune Afrique”, le belliqueux dirigeant, a justifié ainsi sa décision de prescrire le port de voile aux femmes de son pays : les femmes fonctionnaires laissent traîner des mèches chinoises ou brésiliennes dans des dossiers de l’administration. Pour y mettre fin, la parade est simple : imposer le port de voile… Voilà un autre comique, son cas sera probablement traité plus tard…

Vincent Agué (facebook, twitter)


L’Académie française se penche sur l’expression « muet comme Hissène Habré »

Hissène Habré a assisté impassible à son procès (Image modifié)
Hissène Habré a assisté impassible à son procès (Image modifié)

Avertissement : l’histoire que vous allez lire s’est passée dans la nuit dernière dans le énième rêve de son auteur qui a pris le soin de l’enregistrer pour la postérité. Vous pouvez, après lecture, si vous n’êtes pas comblé, vous procurer cet enregistrement vidéo pour vous en convaincre. Une seule condition vous est opposable alors : Rejoignez le narrateur dans son prochain rêve avec vos yeux bandés pour une observation décalée.  

Tchadiens, réjouissez-vous ! La langue française sera bientôt enrichie d’une nouvelle expression pas comme les autres en ce qu’elle comportera le nom de votre ancien président, Hissène Habré. Si celui-ci est inscrit dans le Dictionnaire Universel comme un nom propre d’homme politique africain, cette fois-ci c’est dans une expression ordinaire. Et ça c’est une évolution. Oui bientôt l’Académie française va homologuer l’expression “muet comme Hissène Habré”.

J’ai été témoin la nuit dernière dans la cour des Immortels de la cuisine très avancée qui nous offrira cette expression. Les derniers ingrédients pour la mise au point de l’expression sont en train d’être réunis. Tout est fin prêt, m’a confié l’un des cuisiniers  à pied d’oeuvre pour rôtir une carpe.

Les académiciens étaient à un moment plongés, les yeux tamisés par de gros bésicles, dans la lecture de leurs documents. Hors de leurs regards (je suis invisible), j’ai alors pu discrètement dérober la première mouture de la fiche sur l’expression en préparation. En fait c’est le mot “muet” qui connaitra l’ajout d’une expression contenant le nom de l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré. Une petite note d’histoire sur l’origine de l’expression devrait se réumer pour l’essentiel ainsi :

“…du nom de l’ancien président du Tchad, un pays africain. Il dirigea son pays du 7 juin 1982 à 1990, huit années pendant les quelles, plusieurs milliers de personnes ont été massacrés, torturés par une police politique. Chassé du pouvoir, le dictateur s’exile au Sénégal. Sur l’instruction de l’Union Africaine, l’organisation panafricaine regroupant les pays d’Afrique, le Sénégal accepta de juger l’ancien chef d’Etat pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture. Le procès ouvert le 20 juillet 2015, a d’abord été suspendu avant de reprendre le 7 septembre. Durant tout le procès qui durera jusqu’à février 2016 et même déjà pendant les auditions dans le cadre de l’instruction de l’affaire, le principal accusé, impassible, s’est plongé, en signe de protestation contre la procédure judiciaire, dans un silence jusqu’à perdre l’usage de …”

 

J’en étais à ce niveau de la note de présentation de l’expression quand je suis revenu à la réalité du monde des humains. J’ai alors saisi mon Petit Robert et consulté le mot “muet” censé contenir “… comme Hissène Habré”. Je n’y ai vu que les expressions “muet comme un poisson”, “muet comme une carpe”, “muet comme une statue”, “muet comme la tombe, “muet comme les pierres”. Pressé de voir mon expression ajoutée au dico, j’ai alors crié (moi je ne suis pas muet !) : mais jusqu’à quand vais-je patienter ? Question à laquelle la page ouverte du dico est restée insensible (poisson, statue, tombe et pierres sont restées muets).
Merde! je vais devoir m’en arrêter là, je dois vite décrocher mon téléphone. Mon informateur de l’Académie m’appelle ! Je retourne dans mes nuages pour glaner d’autres informations. A bientôt !

Vincent Agué (facebook, twitter)

 


[Fiction] Manifs contre la Loi Travail en France : 7 bons conseils d’un dirigeant tropical à François Hollande

Dessin d'une poignée de main. Hollande aurait besoin d'une main secourable
Le président français aurait-il besoin d’une main secourable face à la crise de la Loi Travail ? Dessin d’une poignée de main. Source : https://pixabay.com/fr/poign%C3%A9e-de-main-black-blanc-amis-23611/

[Fiction]

 » Ça se passe vraiment en France ? Ce ne sont pas des images d’une capitale africaine ?  » Ces questions ne seraient pas étonnantes si on se les posait en voyant à la télé les images des manifestations de Français contre la Loi Travail.

Les manifestations contre la loi de la ministre du Travail française, Myriam El Khomri, adoptée au parlement le 12 mai 2016, prennent de l’ampleur de jour en jour. Les syndicats se radicalisent et poussent le bouchon très loin pour faire le plus de mal possible afin de faire reculer le gouvernement de Manuel Valls. Leur trouvaille, le blocage des dépôts de carburant et des raffineries. Ils n’ont pas mal trouvé, car couper l’essence revient à donner un coup d’arrêt à l’économie, à rendre la vie difficile. L’énergie, c’est vraiment la vie !

Le président français et son Premier ministre sont-ils indifférents à ce spectacle qu’offre la France au monde ? Peut-être oui, peut-être non. Une chose est sûre, Hollande et Valls ne comptent pas fléchir. Mais jusqu’où sont-ils prêts à aller dans ce bras de fer contre une partie du peuple français ? 

Imaginez que François Hollande s’en remette à un de ses pairs africains pour se tirer d’affaire. Là au moins, il a intérêt à venir apprendre des choses par ici. 

La gestion des crises similaires à celle de la Loi Travail, les pays africains en sont spécialistes. Alors, Monsieur Hollande, voici quelques bons et généreux conseils d’un président tropical sensible à votre peine. “Oeilvincent” (mon troisième oeil) a pu scanner la première mouture de 7 astuces qui du reste ont déjà fait et continuent de faire leurs preuves partout sur le continent :

  1. Essayer d’abord d’interdire les manifestations ;
  2. Prendre la précaution de bloquer l’internet, les réseaux de communication ou les réseaux sociaux qui facilitent la mobilisation ; 
  3. Si malgré cela, les syndicats bravent l’interdiction, déployer policiers, gendarmes et soldats pour encadrer les turbulents (Nota Bene : le nombre d’agents de l’ordre doit être supérieur à l’effectif possible des manifestants) ;
  4. Une fois la manif enclenchée, faire un bain au gaz lacrymogène aux têtes brûlées ;
  5. S’ils ne sont pas dissuadés, il faut leur tirer dessus ; 
  6. S’il y en a qui ne prennent pas leurs jambes à leur cou, il ne reste plus qu’à les capturer et les conduire au poste pour explications et corrections. Il faut surtout viser les meneurs ; 
  7. Radier les agents publics solidaires des manifestations 

En voilà pour les premiers conseils élémentaires à François Hollande depuis les tropiques. Dans la même situation que le président français, mon dirigeant africain imaginaire aurait lui-même appliqué ces mesures d’une efficacité sans pareil.

Mais, à ces conseils, François Hollande répondrait logiquement : “Je veux bien mais les textes ne m’y autorisent pas, c’est impossible et même horrible”. Le bon conseiller qui veut secourir un homologue en situation délicate, pourrait alors, tout aussi logiquement, lui faire remarquer que les textes ne sont rien sans les hommes pour les faire respecter.

Hollande répondrait qu’il n’y peut rien car la loi protège des citoyens et l’autorité, si puissante soit elle, ne peut violer les droits de ceux-ci. Surtout qu’en tant que président de la République, il a le devoir de protéger les Français quels qu’ils soient. “Mais alors, rétorquerait l’imperturbable dirigeant tropical, pourquoi soumettre vos concitoyens salariés à la merci des entreprises ? Je vous souhaite vraiment de ne pas être contraint de renoncer comme cela avait été le cas du projet de révision de la Constitution. Là aussi déjà vous aviez décliné mon offre d’expertise en relecture concluante, et sans tambour battants, de la Constitution. Moi-même je dois mon maintien sur mon fauteuil à ma réussite en la matière comme bien d’autres de mes homologues du continent… Donc, mon offre de consultation gratuite reste valable, cher ami !” 

Conclusion, c’est la différence entre la France et certains pays de mon beau continent. Ici, la loi protège rarement les citoyens, l’Etat de droit attend encore la disparition de l’Etat de police avant de s’installer. 

Si Hollande ne veut pas des beaux conseils de mon président imaginaire, tant pis pour lui !

Vincent Agué (FacebookTwitter)


Ils savent utiliser WhatsApp, ils menacent mon métier de journaliste ?

Le 3 mai 2016 c’était la journée mondiale de la liberté de presse, les journalistes béninois et ceux du monde ont célébré leur métier. Moi aussi, je me suis senti à l’honneur car j’adore mon métier. Mais un peu trop fier, ne dirait-on pas ? Ne devrais-je pas revoir à la baisse mon orgueil de “producteur professionnel de l’information ?” Et pour cause, le développement du partage de l’information par…


Bénin, Congo et Niger : Un 20 mars 2016 différemment “démocratique”

Une femme glisse son bulletin dans l'urne pour le second tour de la présidentielle béninoise le 20 mars 2016 à Natitingou (Nord du Bénin)
Une femme glisse son bulletin dans l’urne pour le second tour de la présidentielle béninoise le 20 mars 2016 à Natitingou (Nord du Bénin)

Cela arrive certainement rarement. On savait que 2016 est une année amplement électorale en Afrique. Mais on ne pouvait pas imaginer que trois pays voteraient le même jour pour le même type d’élection. Ce 20 mars 2016 était jour d’élection présidentielle au Bénin, au Congo et au Niger, trois pays francophones d’Afrique. Ils votaient certes ce dimanche mais le contexte électoral n’était pas le même. Il y a avait élection et réélections

Bénin : Election

L’élection présidentielle béninoise était des plus ouvertes que le pays ait jamais connues. Le président sortant, Boni Yayi n’étant pas candidat, le jeu était très incertain. Même le candidat – le Premier ministre Lionel Zinsou – soutenu par la coalition politique au pouvoir et d’autres partis, n’était pas donné favori. Arrivé premier à l’issue du premier tour deux semaines en arrière, Lionel Zinsou affrontait Patrice Talon. Ce dernier s’était fait une réputation d’irréductible opposant de Boni Yayi alors même qu’il n’était pas monté sur la scène politique à visage découvert. L’homme d’affaires qui finançait la classe politique depuis 1995 a décidé de se porter candidat. Et avec son réseau, il a fait mal. Lors d’un inédit débat télévisé entre les deux finalistes, le peuple béninois a eu l’occasion  d’apprécier ces deux personnalités mais aussi de montrer à la face du monde que la transparence n’est pas un voeu dans les élections béninoises. Elle se manifeste aussi à la télé.


A l’issue du vote, Patrice Talon a remporté le duel avec Lionel Zinsou, le dauphin béni de Boni Yayi. C’est inimaginable en Afrique qu’un président qui finit 10 ans de pouvoir n’arrive pas à faire élire le candidat qu’il soutient pour sa succession. Mieux, c’est l’opposant radical de Boni Yayi qui gagne et confirme la “rupture”, le maître mot de cette élection. Le candidat malheureux ne tardera pas à reconnaître sa défaite et appeler le nouvel élu pour le féliciter.

Il ne pouvait faire autrement car les chiffres étaient connus de tous… grâce notamment aux moyens de communication mis à profit par un peuple vigilant. Oui, la société civile a veillé et même collecté les résultats au moyen d’Internet. C’était donc une vraie élection au Bénin en 2016. Tout le contraire de ce que le Niger et le Congo ont proposé à l’Afrique ce dimanche.

Congo et Niger : Réélection sans péril

Au Congo et au Niger ce 20 mars, il ne s’agit pas d’élection mais de réélection bien orchestrée. Le Congo votait pour le premier tour de la présidentielle qui opposait le chef de l’Etat sortant – Denis Sassou Nguesso qui ne sortira pas – à huit autres candidats. Le Président congolais est à la quête d’un nouveau mandat après 32 ans passés au pouvoir. Sa victoire est toute tracée depuis la révision réussie de la Constitution à cette seule fin. C’était le premier acte d’un scénario qui finira comme voulu. Comment ne pas présager d’une victoire du président candidat quand le scrutin est organisé dans un contexte “moyen-âgeux” ? Tenez, au 21è siècle, dans un pays qui se veut démocratique, le gouvernement coupe les télécommunications sous un fallacieux prétexte de sûreté nationale, le jour du vote ! Cela ne suscite que de l’indignation.

Au Bénin, une telle mesure ne passerait pas. A la veille du premier tour de la présidentielle, le gouvernement avait décidé d’interdire les téléphones portables dans les bureaux de vote. Un tollé s’ensuivit. La commission électorale qui seule est compétente va simplement désavouer le gouvernement au grand bonheur des électeurs et de la société civile. Mais de quoi a si peur Sassou Nguesso ? Avant le du vote, un des candidat, le Général Jean-Marie Michel Mokoko avait même été interpellé par le service des renseignements à plusieurs reprises… Tous les moyens sont bons pour organiser une réélection.

Au Niger, c’est la réélection de la honte qui déshonore ce pays. Le président en exercice veut rempiler. Ce 20 mars, il fait face au second tour de la présidentielle à Hama Amadou, emprisonné depuis novembre 2015, pour un délit de droit commun, la supposition d’enfant. L’opposant en prison lors du premier tour était arrivé 2ème. Pour le second tour, ses soutiens auront tout fait pour le faire libérer pour qu’il batte campagne, mais en vain. Il sortira de prison, pas pour se promouvoir mais pour aller directement en France se faire soigner. Pauvre opposant. Le président nigérien n’a pas voulu de lui sur le ring pour un combat à la régulière. Après sa réélection (sans péril), j’espère pour Mahamadou Issoufou de ne pas “triompher sans gloire”.

Vincent Agué


Le Bénin vote et hisse plus haut son orgueil démocratique

Un électeur dans l'isoloir de vote le 6 mars à Abomey-Calavi. Il était le premier votant, arrivé très tôt.
Un électeur dans l’isoloir de vote le 6 mars à Abomey-Calavi. Il était le premier votant, arrivé très tôt.

Dans un pays où la voix du citoyen lambda compte peu, ce dernier n’a réellement le pouvoir que le jour de l’élection. Et le Béninois sait toujours en saisir l’occasion. Ce dimanche 6 mars 2016, nous avons voté pour le premier tour de l’élection présidentielle. Une élection tant attendue avec beaucoup de passion. La campagne électorale avait emballé tout le pays, l’intensité des débats sur les réseaux sociaux en est une preuve.

Ce dimanche matin, le citoyen béninois que je suis était certes mobilisé pour le travail, la couverture médiatique du scrutin pour l’ORTB, mais j’ai avant tout exercé mon droit de vote entre deux prises de vue dans mon centre de vote. Je l’ai fait, et c’était la deuxième fois que je votais pour une présidentielle, avec émotion. J’ai senti que j’avais de la valeur, que ma voix comptait, ne serait-ce que pour ce seul jour de vote. Et je n’étais pas le seul. J’ai pu apprécier l’engouement de mes compatriotes à aller choisir qui ils veulent comme président de la République.

Je l’ai apprécié à travers notamment :

  • L’extrême ponctualité de certains au niveau des centres de vote.

C’est étonnant quand on sait que le retard est un trait caractéristique des Béninois. A 6 heures 30, dans un centre de vote, des électeurs étaient déjà présents et attendaient l’ouverture du vote.

Un poste de vote prêt avant 7 heures. Quelques électeurs sont déjà présents. Abomey-Calavi le 6 mars 2016.
Un poste de vote prêt avant 7 heures. Quelques électeurs sont déjà présents. Abomey-Calavi le 6 mars 2016.
  • Les files devant les postes de vote.

Même s’il y a des bégaiements dans les opérations, les électeurs patientaient.

Dès les premières minutes de l'ouverture du vote, des files d'attente se sont formées, à Sèmè-Podji, près de Cotonou.
Dès les premières minutes de l’ouverture du vote, des files d’attente se sont formées, à Sèmè-Podji, près de Cotonou.
  • La publication sur les réseaux sociaux par certains d’une preuve de leur vote

Même le jour du vote, les réseaux sociaux qui étaient fortement utilisés lors de la campagne électorale, ont été pris d’assaut par les facebookeurs et les twittos. Beaucoup ont montré leur pouce recouvert de l’encre indélébile, signe qu’ils ont voté.

J’ai voté! #vote229 #présidentielle2016 #Bénin

Posté par Sèmèvo Koucoi sur dimanche 6 mars 2016

Le seigneur nous accompagne jusqu’au bout!

Posté par André Dossa sur dimanche 6 mars 2016

  • L’appel au vote aussi

Le journaliste Déo Gratias Kindoho est plus qu’un activiste sur le web au Bénin. Il a invité ses compatriotes à aller voter.

T’attends quoi? T’entends pas ou quoi?

Posté par Deo Gratias Kindoho sur dimanche 6 mars 2016

J’ai surtout touché du doigt l’attachement du Béninois à son droit de vote à travers les plaintes d’un citoyen qui cherchait désespérément ce dimanche matin son centre de vote. Il m’a approché alors que je quittais un centre tout découragé : “Je n’ai pas ma nouvelle carte d’électeur, l’ancienne, je l’ai perdue et je n’ai pas de pièce d’identité. Est-ce que je peux voter ?”. J’avoue que je n’ai pas eu le courage de lui dire, au risque de le blesser, qu’il ne pourra malheureusement pas voter sans l’une de ces pièces qui lui manquent. Je lui ai donc laissé un faux espoir en lui conseillant de faire le tour des postes de vote et de toujours poser son problème. Le pauvre !

Ma conclusion, c’est que le Béninois insiste pour voter

Le vote s’est globalement bien déroulé partout au Bénin. Ce n’était pas gagné d’avance pourtant au vu des conditions de préparation du scrutin. Le contexte était peu rassurant. Mais à l’arrivée, les Béninois sont près de démontrer encore une fois qu’ils sont un peuple exceptionnel, celui qui lança en 1990 la vague de démocratisation en Afrique noire.  

D’ailleurs, le Béninois en est trop fier, la démocratie est un orgueil national dans mon pays. Gare à celui qui se hasardera à l’arrêter ici. Maintenant, j’espère que le choix du peuple soit respecté.

Vincent Agué (Facebook, Twitter)

 


Bénin : Lionel Zinsou, le retardataire qui rêve de la première place

Que dire encore en plus de tout ce qui a pu être dit sur lui depuis qu’il a décidé de briguer la présidence du Bénin ? Et même bien avant, quand sa candidature n’était encore qu’à l’étape des supputations, elle a fait couler beaucoup d’encre et des averses de salive sont tombées sur la scène publique béninoise pour dénoncer Lionel Zinsou. Vincent veut-il en remettre une couche ? Certainement pas. Mais ma réflexion ne vient pas non plus défendre l’intéressé. Dans une précédente réflexion je présentais Abdoulaye Bio Tchané et Pascal Irénée Koupaki comme les deux meilleurs candidats à la présidentielle de mars 2016 (Présidentielle 2016 : Bio Tchané et Koupaki, deux “cartésiens” qui veulent faire la politique autrement). Si je devais ajouter un troisième choix, Lionel Zinsou aurait eu ma faveur. Voici pourquoi je l’ai écarté.

Que ce soit clair, je ne suis pas de ceux qui fustigent l’ambition présidentielle de Lionel Zinsou sur la seule base de sa double nationalité ou sa nationalité française. Loin s’en faut, je ne suis pas raciste. D’ailleurs, j’aime les Blancs et Lionel Zinsou n’est pas un Blanc. Je vous étonnerais en vous disant que je n’ai jamais entièrement condamné la colonisation. C’est peut-être choquant, mais c’est la réalité et je l’assume. Dans mon pays, les exemples de gestion irresponsable foisonnent et suffisent à démontrer que nous avons mal négocié le virage de l’indépendance. Le Blanc nous a laissé les rails et les trains, nous les avons tués, le Blanc nous a construit des bâtiments qui tiennent debout depuis plus d’un siècle, pendant ce temps les édifices que les ingénieurs locaux ont réalisés tombent souvent en ruine quelques années après… Alors, je puis vous dire que je n’ai jamais considéré comme une insulte le célèbre discours de Nicolas Sarkozy à Dakar en 2007 selon lequel “L’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire” . En voilà pour la mise au point.

Je l’aime bien bien, mais…

Cependant, qu’est-ce que mon compatriote Lionel Zinsou vient-il chercher à vouloir devenir en 2016 président du Bénin ? D’où vient-il ? Son rêve date de quand ? Que sait-il de son pays ? Que savent ses compatriotes de lui ? Mes questionnements n’en finissent pas. Depuis que je me suis imposé un recul pour analyser la candidature du Premier ministre à l’élection présidentielle de 2016, je me suis rendu compte que cette ambition était inadmissible à l’heure actuelle. Pourquoi ?

Visiblement, Lionel Zinsou n’aurait pas été candidat à l’élection présidentielle s’il n’avait pas été bombardé Premier ministre au préalable par le Président Boni Yayi. Je n’insinue rien, je ne fais que répéter l’ancien patron de PAI Patners. Après le dépôt de sa candidature à la Commission électorale le 12 janvier 2016, il déclarait devant les micros et caméras :

“Je voudrais rendre hommage au Président Yayi Boni parce que s’il ne m’avait pas fait confiance en me confiant des responsabilités gouvernementales, aujourd’hui, au fond, je n’irais pas devant mes compatriotes avec le sentiment d’un soutien et de mettre mes pas dans son action”.

 

Opportunisme

Sans avoir à ce que nous sachions au Bénin, oeuvré aux côtés de Boni Yayi – même si l’on me vante sa fonction de conseiller à l’économie à distance pendant cinq ans – voilà donc M. Zinsou choisi par le président sortant pour lui succéder. Comme dans une monarchie. Et même si le chef de l’Etat sortant pouvait se permettre une telle initiative, Lionel Zinsou est-il le mieux placé ? Boni Yayi n’a-t-il pas eu des collaborateurs aussi compétents en mesure de lui succéder ? Singulièrement, il me plaît de mentionner son ancien Premier ministre et homme de confiance Pascal Koupaki qui l’aura servi avec loyauté  sept ans durant. Mais nous voici devant le fait accompli : Lionel Zinsou a été imposé (il n’y à qu’à écouter les proches du président pour s’en convaincre).

Il faut être honnête et reconnaître même quand on a de la sympathie pour lui, que M. Zinsou n’a pas été préparé à la gestion de l’Etat. Sans grande expérience de gestion publique, il débarque et se propose de nous diriger. Le comble, c’est que toute la machine politique du pouvoir, les cadres, les ministres, les directeurs de sociétés d’Etat et deux grands partis politiques sont à son service pour atteindre son but. Et cela énerve.

Lire aussi : Bénin : Lionel Zinsou ne bouderait pas le fauteuil présidentiel

On a le sentiment que le prochain président est déjà désigné par des gens qui n’ont pourtant pas le droit de s’arroger le pouvoir populaire et que ce qui est en jeu c’est la formalisation de cette désignation dans de simulacres d’élections. On est bien en face depuis plusieurs mois à une bataille entre l’Etat et certains citoyens. En ce que Lionel Zinsou est comme un candidat officiel porté par le gouvernement et ses soutiens et de l’autre côté, il y a les autres candidats. En somme le match n’est pas équilibré dès le départ. Une preuve en est que les moyens de l’Etat sont utilisés allègrement pour faire campagne. Les critiques des opposants et des activistes de la société civile n’ont apparemment pas fait fléchir le Premier ministre. Son véhicule de fonction officielle fait partie du cortège de campagne électorale. En tous cas, au premier jour de la campagne électorale, la 4X4 fonction de Lionel Zinsou a été remarquée dans la colonne de véhicules qui l’accompagnait dans ses activités politiques même si le candidat était à bord d’une voiture privée. Qu’à cela ne tienne !

Et la supposée télécommande de la belle Elysée  ?

Je n’en ai aucune preuve, je ne saurais donc pas dire d’emblée que la France en est pour quelque chose dans la candidature de Lionel Zinsou. Et ceux qui le pensent n’en ont pas les preuves. Je ne les soutiens pas. Seulement, une chose crève les yeux et paraît bien curieuse. Boni Yayi n’a jamais été aussi régulier à Paris chez François Hollande depuis la nomination de Lionel Zinsou à la primature… Quelle coïncidence bien compromettante ? Lionel Zinsou a beau dire que la France ne le soutient pas, il aura du mal à se faire croire. Le pauvre !

Sa force, sa faiblesse

Lionel Zinsou se veut un candidat du consensus. C’est d’ailleurs pour cela qu’il aura tout fait pour rallier à sa candidature trois grandes formations politiques qui s’étaient toujours combattues du Bénin. Ici ont dit qu’il “a frappé un grand coup”. Cependant, est-ce rassurant ? En cas de victoire, comment gérer les différents acteurs de la conquête du pouvoir ? S’en séparer et appliquer sa politique ? Ce serait un risque et malhonnête même car manifestement Lionel Zinsou ne peut rien sans les autres. Or il est démontré au Bénin que les présidents commencent par échouer dès qu’ils écartent les soutiens qui les ont porté au pouvoir. Malheureusement ou heureusement, Lionel Zinsou est porté par une coalition politique qui s’étend de jour en jour. Un signe d’adhésion populaire ? Je ne crois pas, je crains plutôt une ruée vers l’or.

En plus aujourd’hui, une partie de l’opinion béninoise croit que les carrottes sont cuites. L’élection présidentielle se prépare dans des conditions peu rassurantes. Certains y voient une pré-médidation. Les cartes d’électeur ne sont pas toutes apprêtées et on a dû reporter le srcutin initialement prévu pour le 28 février au 6 mars. Alors que les cartes n’étaient pas prêtes et distribuées, le responsable de l’institution chargée de cette tâche (Augustin Ahouanvoébla, député du Parti du renouveau démocratique qui soutient Lionel Zinsou) a pu déclarer à la télévision, que Lionel Zinsou devrait gagner dès le premier tour. Scandaleux, ont trouvé ces propos de nombreux observateurs. Pour d’autres, ce n’est qu’un aveu d’un plan préparé pour faire passer Lionel Zinsou par tous les moyens. Dans ces conditions, si effectivement Lionel Zinsou gagnait par un coup K.O. le pouvoir lui sera difficile à gérer. Ce n’est pas une malédiction, c’est une crainte justifiée.

« Il n’est pas si connu du public »

Lionel Zinsou, qui le connaît ? En tous cas pas moi, pas assez. Comme beaucoup d’autres Béninois. Même le secrétaire général du gouvernement l’a reconnu quand il annonçait en juin 2015 la nomination du Franco-Béninois au poste de Premier ministre. “Il [Lionel Zinsou] n’est pas si connu du public”, avait laissé entendre (par imprudence verbale) Alassani Tigri face au journaliste de la télévision publique qui avait réussi un coup ce soir-là. Le Béninois de la diasspora qu’est Lionel Zinsou est pourtant une chance pour ce pays. Sans vraie attache régionale parce qu’il a peu vécu au Bénin, il a l’avantage de ne pas être étiquetée comme le candidat d’une région précise dans un Bénin où le régionalisme est instrumentalisé par les politiques.

Le problème, c’est que Lionel Zinsou s’est révélé tard aux Béninois mais souhaite les diriger le plus tôt possible. Il s’agit-là certainement d’une volonté de servir son pays. Soit, mais je pense que nous gagnerions et lui-même y a intérêt, à accorder encore 5 ans à Lionel Zinsou pour faire ses preuves encore dans une fonction publique. Je serais le premier à lever le doigt pour appeler à voter pour Zinsou s’il se présente pour la première fois en 2021. Je pense qu’il aurait eu le temps de se préparer à la gestion du pouvoir. Cela dit mon commentaire ne choisit pas un président, seul le peuple béninois tranchera dans quelques jours.

Vincent Agué


Bio Tchané et Koupaki, deux cartésiens qui veulent faire la politique autrement au Bénin

A gauche, Abdoulaye Bio Tchané et à droite, Pascal Irénée Koupaki se présentent comme mon ticket présidentiel parfait pour changer le Bénin.
A gauche, Abdoulaye Bio Tchané et à droite, Pascal Irénée Koupaki se présentent comme mon ticket présidentiel parfait pour changer le Bénin.

Depuis le 19 février 2016, le Bénin est officiellement en campagne électorale pour la présidentielle du 6 mars prochain (ou par prudence, disons de 2016 parce qu’on n’est pas à l’abri d’un second report de la date). 33 candidats visent le fauteuil présidentiel que cédera le 6 avril le président sortant  après 10 ans de pouvoir. 33 candidats dont deux ont le profil idéal pour diriger mon pays.

Mon droit de participation au débat politique m’oblige à exprimer mes préférences dans le lot de candidatures. Mais pourquoi un journaliste doit-il se permettre d’exprimer un choix ? Parce que le journaliste est avant tout un citoyen libre de ses pensées. Quand il parle hors de son média employeur, on ne saurait lui reprocher de prendre position. Quelle est cette position ?

Le journaliste et citoyen béninois que je suis reconnaît à ses compatriotes candidats leur droit de candidature à la présidentielle. Mais la présidence étant pour un seul, je me dois d’opérer un choix. Parmi les 33 candidats ? Non, entre deux.

Abdoulaye Bio Tchané et Pascal Irénée Koupaki, le ticket de rêve

Voici deux cadres béninois, crédités de parcours similaires et surtout utiles à un présidentiable.

Abdoulaye Bio Tchané est connu pour avoir été notamment directeur Afrique du Fonds monétaire international, président de la Banque ouest-africaine de développement, ministre des Finances du Bénin…  Il brigue la magistrature suprême pour la deuxième fois après la tentative de 2011. Je trouve en lui une personne engagée pour son pays, prêt à servir, rassembleur  de tous les fils et filles du Bénin. D’ailleurs, l’unité nationale lui est chère chaque fois que je l’écoute. Autre chose et pas des moindres, c’est qu’il est téméraire, audacieux. Il fallait l’être pour oser se présenter contre son « frère » Boni Yayi du Nord en 2011. La rumeur dit qu’il aurait, il y a cinq ans, commis une erreur en se présentant à l’élection présidentielle alors que le président en exercice qui est de la même région que lui voulait rempiler. Les régionalistes auraient voulu qu’ABT n’affrontât pas Boni Yayi. Il l’a pourtant fait. Démontrant que sa volonté de servir son pays n’était pas négociable sur une table d’intérêts régionalistes. Ayant échoué, ABT se range dans l’opposition de façon constante. Il a pris une part active dans les marches citoyennes de fin 2014 à Cotonou pour réclamer l’organisation des élections locales et législatives. Lors de ces élections, son alliance politique, “l’Alliance pour un Bénin Triomphant” s’en sort avec deux députés. Deux élus qui se rangeront aussi dans le camp de l’opposition pour arracher la stratégique présidence de l’assemblée nationale. « Agir ensemble », tel est le maître mot d’ABT pour changer le Bénin.

Le défaut d’ABT (si c’est vraiment un), il se dit qu’il est idéaliste, trop rigoureux, cartésien… En termes clairs dans le langage béninois, il « ne sort pas l’argent ». Or pour gagner une élection au Bénin, cette donnée serait fondamentale car semble-t-il, le vote s’achète.

Le même « reproche » est fait à Pascal Irénée Koupaki (PIK). Lui, c’est le « dur », dit-on. On ne badine pas avec les principes chez PIK. Qui est-il ? Economiste-banquier, ancien fonctionnaire de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest , ancien directeur de cabinet du Premier ministre de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, ancien directeur de cabinet du Premier ministre du Bénin, Adrien Houngbédji, et ancien Premier ministre du Bénin sous le régime sortant. Avant ce dernier poste, l’homme revenu au Bénin en 2006 avait occupé successivement les fonctions gouvernementales de ministre du Développement, de l’Economie et des Finances, ministre du Développement, de la Prospective et de la coordination de l’action gouvernementale. Soit en tout jusqu’à août 2013, une expérience gouvernementale de plus de 7 ans. Calme, pondéré, méthodique, Pascal Irénée Koupaki passe pour un intègre. L’on a même pu dire – et je l’ai pensé aussi – qu’il était la « caution morale » du système Yayi. C’est l’homme qui faisait autrement, les journalistes béninois lui reconnaissent une certaine qualité qui est plutôt une exception au Bénin : la ponctualité. Chez PIK en effet, l’heure, c’est l’heure parce que le temps c’est de l’argent. Il ne le perd donc pas. Peut-on alors s’attendre à ce qu’un tel homme « perde » son argent à acheter la conscience des électeurs ?

C’est à juste titre (inconcevable à mon avis) que l’opinion colle à PIK, son caractère « pingre » si l’on considère que l’argent est roi en politique au Bénin. Et c’est à juste titre que l’homme se propose de reformater le logiciel mental du béninois par une « Nouvelle Conscience », autrement dit PIK veut développer le Bénin par une restauration des valeurs. C’est ce qu’il prêche depuis sa sortie inattendue du gouvernement à la faveur d’une inédite dissolution de son équipe par le président Boni Yayi en août 2013.

Autre trait de ressemblance entre ABT et PIK, le peu de « soutiens » d’hommes politiques derrière eux. Ces deux cartésiens qui veulent faire la politique autrement n’ont pas le plus grand nombre de partis politiques, de députés ou d’élus locaux qui portent leurs candidatures. Quand on sait les partis politiques marchandent le plus souvent leur soutien contre de l’argent, on n’est pas étonné de voir ABT et PIK se contenter de leurs équipes de cadres et amis. Mais le peuple, je l’espère, saura faire le meilleur choix.

Voilà pour la présentation de mes deux meilleurs candidats dans le lot des 33 qui lorgnent le palais de la Marina. Il serait insensé de ma part de me limiter à cette présentation sans faire le pas décisif, celui du choix. Je l’avoue, entre ces deux, il est plus facile de se retenir de faire un choix que de l’opérer. Je le ferai, et vous le saurez…

 

Vincent Agué


Bénin : « Soutien », la poule aux oeufs d’or des politiciens à l’occasion de la présidentielle

Meeting de soutien à un candidat dans un arrondissement près de Cotonou. (Image modififée)
Meeting de soutien à un candidat dans un arrondissement près de Cotonou. (Image modifiée)

Il paraît qu’il coûte des centaines de millions de francs Cfa, un soutien. J’ai bien dit « soutien », pas soutien-gorge hein ; cela s’entend non ? Même le soutien-gorge de la femme la plus riche de l’Afrique ou de la Première Dame de la République très très démocratique du Gondwana – je ne mentionne pas la Miss d’où que ce soit car les filles ont maintenant horreur du soutien-gorge paraît-il – ne coûterait pas une telle somme, n’est-ce pas ? Alors, ne faites de confusion.

De quoi s’agit-il plus sérieusement ?

Le Bénin s’apprête à élire le 28 février 2016 un nouveau président qui va succéder à Boni Yayi en fin de mandat. Ils sont officiellement 36 candidats – les plus sérieux sont moins nombreux que les plaisantins – à ne rêver que d’une chose : devenir président le 6 avril 2016. Et pour y arriver, il faut avoir des partisans – ce qui ne signifie pas qu’ils sont des électeurs – qui satisfassent leur orgueil, leur ego de candidat.

La valse des suscitations (d’aucuns diraient la filière des suscitations) est terminée. Elles consistaient pour des groupes d’individus à s’organiser et appeler un homme (le commanditaire de la suscitation) à se présenter à l’élection présidentielle, parfois sachant bien que ce dernier a déjà clairement affiché son ambition présidentielle. A cette occasion, des nouveaux acteurs politiques émergent et montent sur la scène comme s’ils entraient dans un moulin.

Lire aussi : Top 10 au Bénin : les célèbres formules des candidats à la présidentielle

Place maintenant aux soutiens

La campagne électorale n’est pas ouverte mais dans la réalité c’est comme si. Il n’y a qu’à suivre les médias au jour le jour pour constater que tout le pays est déjà sous l’emprise des propagandistes. Avant l’entrée en scène proprement dite des candidats, ce sont leurs lieutenants qui parcourent villes et campagnes pour déclarer soutien à leurs leaders respectifs. Chacun s’organise dans son terroir pour faire adhérer à la cause du candidat des groupes d’individus. A l’heure du rassemblement, un rendez-vous avec la presse en fait parce que sans le relais qu’en feront les médias il n’aura servi à rien et le candidat n’aura pas été séduit, le “président du comité d’organisation” délivre son discours ; il sera suivi par les représentants auto-proclamés des jeunes, des femmes, etc. Ne me demandez surtout pas si les messages écrits sont bien rendus ; on baragouine souvent un langage que seul le candidat est à même de déchiffrer. S’il arrive déjà à distinguer son nom, c’est que les lecteurs des messages sont assez bien instruits. Il n’est pas rare par exemple d’entendre dire “Léonel” en lieu et place de “Lionel”, du prénom du Premier ministre candidat du gouvernement à l’élection présidentielle.

Mais il y a aussi des cadres de l’administration publique, des directeurs généraux de sociétés d’Etat et d’autres fonctionnaires qui jouent les courtisans en allant déclarer leur soutien au candidat officiel, le candidat du parti au pouvoir. L’objectif est clair, il faut “faire un clin d’oeil”,  “des yeux doux” au candidat en pôle position pour qu’en cas de victoire, leurs postes soient sauvegardés ou qu’ils soient tout simplement promus. Généralement ces courtisans d’un nouveau genre ne sont même pas leaders d’opinion dans leurs quartiers.

Ce qui rend encore plus heureux les candidats, c’est de brandir les gros soutiens comme des trophées de guerre. Les grands mobilisateurs de foules sont courtisés par les candidats. Seuls les plus offrants parviennent à s’attacher les services de députés, élus communaux et locaux supposés populaires dans leurs circonscriptions électorales. A quel prix ? A coups de centaines de millions de francs Cfa, raconte-t-on. Une fois le “grand électeur” débauché, le candidat à l’enveloppe intarissable vit maintenant dans l’illusion d’une élection assurée, croyant tout bonnement que les populations sont des robots qui ne feront qu’exécuter la consigne de vote de leurs élus. Soit.

Le leader d’opinion acheté, lui aura fait une bonne affaire ; en bandit bienfaiteur, il jettera quelques jetons à ses militants pour les rassembler et déclarer le fameux soutien.

Mission accomplie pour lui si les reportages des télévisions mettent bien exergue l’entassement des foules qui ont répondu à l’appel argenté. Le candidat commanditaire en sera aussi satisfait, ignorant que la foule est différente de l’électorat.

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Le plus veinard des candidats peut aussi se permettre de faire le point des soutiens décrochés par ci par là. Si la carte de ses soutiens virtuels est large (à la taille du bulletin unique de vote, car ils sont 36 candidats quand même !), il décrète dès lors qu’il gagnera la présidentielle par K.O. En clair dès le premier tour. Depuis 2011 où l’actuel président a été réélu par un inédit Knock Out, ce terme est entré dans le vocabulaire politicien du Bénin…

Achat de conscience et chosification de l’électeur

La population se rassemble pour acclamer et faire des youyous en répétant des slogans ronflants pour prendre à la fin “l’argent gratuit” de la campagne électorale. Personne n’ignore plus au Bénin que les mêmes populations mobilisées pour un candidat un jour le seront le lendemain voire le même jour à une autre heure pour un autre candidat. Pour combien ? 2.000, 3.000, le maximum qui rend enthousiaste étant le billet de 5.000 fcfa. Mais les intermédiaires prennent leurs parts, du coup le “militant” ne recevra jamais la totalité de la somme pour laquelle il s’est déplacé, est resté sous le soleil pour inhaler la poussière et crié à en devenir aphone .

La presse, grand complice

Dans cette activité, un allié incontournable est sollicité : la presse. Les journalistes sont chargés de rendre compte des meetings et si possible d’en gonfler l’ampleur à la mesure des subsides qu’ils auront perçues et même s’il faut dans leurs papiers bafouer les règles du métier. Tenez, pour un rassemblement politique de moins d’une centaine de personnes en faveur de Tartempion candidat à l’élection présidentielle, ne soyez pas étonnés d’entendre le reporter de la radio ou de la télé ou encore celui d’un journal rendre compte en faisant une généralisation qui englobe toute la population de la localité où a eu lieu la manifestation politique. Sans oublier les qualificatifs dithyrambiques destinés à justifier le per diem (gombo, paquet, enveloppe, c’est-à-dire l’argent !) reçu qui truffent les titres et les commentaires des reportages. Et leur inspiration pour le vocabulaire de la com politique ne tarit point. Morceaux choisis :

Tchaourou (c’est le nom d’une ville) tombe dans l’escarcelle de X ; Parakou réaffirme son soutien indéfectible à Y ; Cotonou demeure la chasse gardée de Paul (aucun candidat ne s’appelle Paul) ; Le turbo de Tartempion avale la ville de ; Le train de Z gagne dix wagons (sans préciser le contenu des wagons !) ; La population de Calavi entièrement acquise à la cause de A ; Tout le département de … roule pour le candidat T;  Toute la vallée de l’Ouémé respire le nom de X candidat; Entre Cotonou et une telle candidate, c’est le “Je t’aime moi non plus” ; etc.

Après les déclarations de soutiens avec lesquelles les médias ne cessent de nous saouler, place bientôt à la campagne électorale officielle. Chacun prendra sa part de l’argent gratuit de campagne car beaucoup sont convaincus que les politiciens sont des richards. Alors on en profite pendant que c’est possible. Sinon après ce sera tard. Un artiste béninois a chanté : “Politiciens démagogues, quand est-ce que vous allez changer ? (…)” Ils ont un seul jour pour remercier les électeurs, le dimanche du scrutin et les autres jours de l’année pour les faire souffrir. Moi j’ai tout compris ! A bon entendeur, salut conscience citoyenne !

Vincent Agué


[HUMOUR] Présidentielle Bénin 2016 : et le nom porte-bonheur est…

JE SUIS CANDIDAT

Par Vincent Agué

Les candidats potentiels à l’élection présidentielle de 2016 au Bénin sont déjà une cinquantaine, si l’on en croit les réseaux sociaux, particulièrement animés par ce sujet. Nombreux et divers sont leurs noms, naturellement. Divers sont également leurs slogans, pseudos… Si l’élection présidentielle se jouait sur ces paramètres, qui l’emporterait ? Quels noms, slogans, pseudos, porteraient plus de chance que d’autres ? A quelques jours de l’ouverture du dépôt des dossiers de candidature, je les ai vus, de mon « troisième œil », débattre entre eux. Voici un compte-rendu des propos des uns et des autres.

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Patrice Talon

Je me sentirais honoré d’être Patrice, premier responsable de la PATRIE Bénin. J’agis déjà si bien à propos avec mes TALONnettes (de chaussures et de pantalons) dignes d’un président. J’ai déjà également dû tourner les TALONs pour m’exiler à Paris. A bien des égards, cela est un avantage car c’était sous le coup du TALONnement (acharnement) que je suis parti. Pour mes partisans, je mériterais bien d’être président. Mais, c’est peut être aussi mon TALON d’Achille, puisque pour mes adversaires, j’ai des casseroles, ce qui justifie qu’ils me TALONnent toujours et encore. De toutes les façons, je reste moi-même, je résiste car je suis un TALON (partie inamovible d’un carnet à souche, consultez vos dicos).

Pascal Irénée Koupaki alias PIK

Pour moi l’élection présidentielle de 2016 tombe à PIC(K). Je dois maintenant PIKER le pouvoir. Directeur de cabinet du Premier ministre Adrien Houngbédji, puis Premier ministre à mon tour, j’ai assez aiguisé mon PIC (instrument qui sert à creuser), tel un PIC (oiseau) au bec bien tranchant, pour PIKER avec précision en 2016 et remporter la victoire. Ce sera le PIC de ma carrière politique.  Mais, même si le palais présidentiel n’est pas un PIC (montagne au sommet pointu), s’y hisser n’est pas un challenge gagné d’avance. Un échec ne me surprendrait pas. Je pourrai toujours rebondir, car comme le dit en yoruba mon prénom caché, Mankandjou (ne te presse pas), je prends mon temps. 

Abdoulaye Bio Tchané, ABT

Je suis ABT, Abdoulaye Bio Tchané ; mais aussi président de l’Alliance pour un Bénin Triomphant, P-ABT donc. Je crois en mes chances de me voir appeler, dès avril 2016, président ABT, pour dire président du Bénin.

Eric Houndété

S’il était écrit que le prochain président du Bénin serait prénommé Eric, la question ne se pose plus. C’est moi. Si ce n’est pas Eric ce sera certainement quelqu’un d’autre. C’est qui LUI ? Bah  ça, ne cherchez pas loin ce que vous avez à portée de main, car je m’appelle aussi LOUIS. J’ai aussi un plan C. Si le prochain président ne devait pas s’appeler Eric ni LOUIS, il sera sans doute CAMILLE. Et lui CAMILLE, c’est encore moi. Demandez-moi de décliner mon identité complète et je vous répondrai Houndété Eric Louis Camille.

Sébastien Germain Ajavon

On ne gagne pas le pouvoir en un jour. Pour ma part, la fondation était posée il y a bien longtemps. Vous ne connaissez pas la Fondation ASG (Ajavon Sébastien Germain) ? Et ma fondation (comprendre au premier degré) est aussi ancrée dans le ventre des Béninois, à travers les poulets congelés que je leur vends.

Emmanuel Golou

« Dieu avec nous », voilà la signification du nom biblique Emmanuel. Les chrétiens le savent. Mes chers compatriotes béninois, je les sais très croyants. Les églises, mosquées, et couvents peuvent en témoigner. Emmanuel, Dieu avec eux désormais. Je suis là tout près d’eux. Ils me prendront comme chef de l’Etat.

Général Fernand Amoussou

En général on dit « Jamais deux sans trois ». Après Christophe Soglo et Mathieu Kérékou je serai le troisième général à diriger le Bénin.

Général Robert Gbian

Jamais deux sans trois, ça c’est vrai. Mais ce sera moi ce troisième cas pour confirmer la règle. Et voilà pourquoi : moi je me suis déjà essayé à la compétition électorale… pour devenir député et deuxième vice-président du Parlement. Alors, je suis plus expérimenté sur le terrain politique.

Lionel Zinsou

En plus d’être un Lion, le roi de la forêt, le seul candidat de taille (à tous les degrés) c’est moi. Si la présidence était logée sur une cime, mes presque deux mètres de taille seraient un avantage inouï. Avoir été Premier ministre et candidat de la coalition politique au pouvoir, ce sont sans doute d’autres avantages. Dauphin béni par mon président, je suis privilégié. Et quelle merveilleuse coïncidence que d’avoir un patronyme qui commence par Z, soit la lettre de l’alphabet que précède Y, l’initiale du président sortant Yayi Boni ! « Après Y, c’est Z donc après Yayi, ce sera Zinsou », crient mes partisans dans le pays. 

Mais Lionel rappelle un autre Lionel, dans un pays que je connais bien – la France – un Lionel d’un parti que je connais bien aussi : Lionel Jospin, candidat du parti socialiste français à l’élection présidentielle de 2002. Premier ministre au moment de l’élection, il avait échoué. Je veux bien croire que je ne connaîtrai pas le même sort. 

 


Ces filles “petites” qui font honte à la femme que j’aime

Deux jeunes filles dans le rôle d'hôtesses lors d'une opération de marketing à Cotonou. Attention : image retouchée
Deux jeunes filles dans le rôle d’hôtesses lors d’une opération de marketing à Cotonou. Attention : image retouchée

Dénoncer le vice, et vous lui fournissez le ferment pour s’enraciner. C’est vrai. Mais ce n’est pas une raison pour laisser passer le vice sans s’en émouvoir. Autrement l’on aurait trahi sa conscience et le regret d’après fait très mal. Je ne veux pas avoir à me mordre le doigt parce que je n’ai pas agi convenablement au temps opportun.

Que les filles et femmes qui liront ce texte me pardonnent. Je pense dire la vérité et l’on ne dit la vérité qu’à ceux qui sont chers à soi.  Très chères femmes, je vous adore trop pour ne pas vous dire la vérité.

C’est par un post sur Facebook que j’ai découvert le dernier clip de l’artiste camerounais Franko intitulé « Coller la petite ». Un texte posté par un écrivain béninois, Florent Couao-Zotti pour se désoler de son caractère obscène et dépravant. 

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Franko: quand la vulgarité éclipse le talent.Depuis quelque temps, est diffusé sur Trace et ses différentes versions,…

Posté par Florent Couao-zotti sur vendredi 23 octobre 2015

Je disais que dénoncer le vice peut avoir l’effet contraire. La prise de position énergique de l’écrivain m’a poussé à aller vérifier les faits sur You Tube. C’était vrai : une chanson vulgaire qui déshonore la femme. Les qualificatifs me manquent pour décrire l’horreur que je me suis forcé d’écouter et de regarder. J’ai arrêté la lecture de la vidéo avant sa fin juste après ces paroles du « colleur » : « ici tout le monde est fou ». A ces mots, j’ai poussé un ouf de soulagement. Il faut en effet être fou pour se permettre l’audace d’exécuter sans retenue des gestes peu pudiques non pas en à huis clos, mais dans un clip à diffuser à travers le monde et pour la postérité.  

Mais que nous arrive-t-il ? Pourquoi des femmes acceptent-elles satisfaire l’orgueil et le plaisir d’hommes « fous » au point de passer pour des choses, des objets maniables à volonté ? Pourquoi des femmes s’accommodent-elles sans gêne de ce terme dévalorisant de « petite » ? Ou bien est-ce moi qui suis fou ? Parce que le monde ces temps-ci marche sur la tête ? Je serais tenté de répondre par l’affirmative tant il semble que le mal est désormais ancré au titre de valeur dans l’opinion. Mais il faut oser essayer de  redorer les couleurs des moeurs de notre blason sociétal autant que se peut. Je félicite ici ce préfet camerounais qui a pris sur lui la responsabilité d’interdire la diffusion de la chanson de Franko. Mais j’ai bien peur que cela ait un effet contraire. Rappelez-vous : lutter contre le vice peut le développer.  

  Au Bénin aussi, c’est pareil 

Au Bénin aussi de nombreux clips d’artistes se révèlent plutôt être d’extravagants tableaux révélant leur malsain art de transgresser les mœurs. Et toujours avec les femmes danseuses au mauvais rôle. Décidément. Mais c’est ça qui passe en boucle sur les chaînes de télévision. Parce que, dit-on, « les gens aiment ça ». Pourtant, le goût de la foule est très souvent un indice du pire.   

En marketing c’est encore pire. Pour faire passer un produit, les femmes vous garantissent leurs services. Ce qui est bizarre, c’est que ce sont souvent des femmes responsables de la communication, du marketing qui orientent les actions de leurs « sœurs ». Elles connaissent le code, elles savent que l’exhibition des parties sensuelles, ça fait gonfler les chiffres d’affaires. Quelle honte !

Autre chose, ces « filles pots de fleurs ». Elles sont souvent recrutées pour être plantées lors de manifestations publiques où elles servent à donner de la couleur au décor. Ce sont en terme correct des « hôtesses ». Mais en réalité celles dont je parle  ne font rien d’une hôtesse normalement chargée d’accueillir, d’informer, de guider une personne, un groupe de personnes lors d’un événement.  J’ai pitié d’elles. Une fois j’en ai aperçu lors d’un événement à Cotonou, une qui, visiblement fatiguée et sans doute ennuyée, somnolait. A un moment donné, n’en pouvant plus, elle s’est simplement adossée au mur, les bras croisés, pour tirer un bon coup de sommeil. La pauvre !

Si on peut imputer au chômage, à la mauvaise éducation… et à bien d’autres raisons indépendantes de leur volonté, ces dérives de filles chosifiées, il faut aussi marteler que certaines sont responsables de ce qui leur arrive. Si une fille ne s’accorde pas une certaine dignité, ne se respecte pas, ne veut pas travailler, mais veut gagner l’argent facilement, qu’elle compte sur la petitesse d’esprit de certains hommes et la bassesse de certaines de ses aînées pour se faire humilier ; elle a toutes les chances de se retrouver à la merci de ceux qui détiennent le jeton.

Je m’en voudrais de finir sans rendre hommage aux braves femmes, celles qui ne chantent pas l’émancipation mais qui se l’approprient et osent pour réaliser leurs désirs.

 

Vincent Agué


Bénin : les écoles publiques en grève 4 jours sur 5 dans l’indifférence totale

 

Ce petit garçon qui fait ses premiers pas à l'école à droit à une éducation de qualité
Ce petit garçon qui fait ses premiers pas à l’école à droit à une éducation de qualité. Photo : V. Ague

L’école béninoise renoue avec les vieux démons. Quelques semaines après la rentrée scolaire, le 5 octobre 2015, la voilà plongée dans la détresse. Le 22 octobre, les syndicats de l’enseignement ont déclenché une grève pour réclamer notamment l’adoption de leurs statuts particuliers. Ces statuts devraient améliorer les salaires des instituteurs et des professeurs des collèges et lycées. Le gouvernement a consenti à leur reconnaître ces statuts depuis le premier trimestre 2015 et ils devaient en principe être signés avant la rentrée scolaire. En novembre 2015, les décrets d’adoption des fameux statuts ne sont pas encore pris. De quoi sortir les enseignants de leurs gonds.

D’une grève d’avertissement de deux jours, les enseignants sont  passés à trois jours d’arrêt de travail. Cet endurcissement a sans doute convaincu le gouvernement de convoquer un dialogue social qui a finalement mis les deux parties d’accord : le contenu des statuts est acquis et ils seront signés. Mais quand ? Seul le détenteur de la précieuse mine d’encre peut situer l’opinion. Il paraît que c’est le président de la République qui apposera sa signature sur les documents. Mais lui il s’est envolé pour Paris pour la préparation de la COP21 avant de rejoindre La Valette pour un sommet sur l’immigration. Ignorant que l’une des causes de l’immigration des jeunes Africains vers l’eldorado européen c’est la quête d’une meilleure vie. Et une meilleure vie pour la jeunesse, c’est à travers l’école qu’elle se prépare.

Les enseignants impatients, décident de radicaliser leur mouvement de grève. Pour mettre la pression maximale sur le gouvernement, ils passent à quatre jours de grève sur cinq. Les écoliers, élèves et lycéens des établissements scolaires publics ont donc rendez-vous avec leurs enseignants une fois par semaine, le lundi, et les autres jours ils sont laissés à eux-mêmes. Pas sûr que même ce seul jour de classe serve à quelque chose. Il est connu de tous au Bénin que les écoles et collèges publics mettent souvent des semaines à démarrer réellement les cours après la reprise des classes. C’est dans ces conditions, qu’une grève de quatre jours sur cinq intervient alors que des classes sont encore sans enseignants par endroit.

L’école publique en lambeaux

Quel péché l’école publique et les parents d’élèves moins nantis ont-ils commis pour mériter un tel traitement ? Qui est coupable du sort réservé à l’école publique ? Les enseignants ? Le gouvernement ? Ou les deux ? Disons les deux mais à des degrés divers, le gouvernement endossant la plus grande responsabilité. Parce qu’il lui revient de donner les moyens au personnel enseignant. Ce dernier met la pression depuis des mois. Il a menacé à plusieurs reprises avant que la procédure d’élaboration des statuts ne s’ébranle. Le gouvernement lui ne se décide que quand il est acculé de toutes parts. Il ne gère que les urgences. Une fois, un syndicaliste regrettait que le cadre formel de dialogue social n’ait jamais été convoqué en session ordinaire pour planifier quoi que ce soit. Le comité permanent de dialogue social s’est toujours réuni en catastrophe, dans la précipitation pour statuer sur une crise déjà en cours. Les syndicalistes ont alors compris qu’il faut atteindre le seuil de l’intolérable pour se faire entendre. C’est pourquoi ils poussent le bouchon très loin. Au grand dam des élèves et de leurs parents. 

Avec un système éducatif décadent qui produit de mauvais résultats aux examens nationaux (30,16 % au Bepc et 34 % au Baccalauréat 2015), il faut craindre que la grève méchante en cours ne conduise à de bien pires rendements scolaires. Surtout dans l’enseignement public.

L’école publique n’a pas bonne réputation au Bénin depuis quelques années. Régulièrement paralysée par des grèves, elle a fini par perdre son rang. Le privé l’a détrônée. Ici les cours démarrent le premier jour de l’année scolaire et il n’y a pas de grève.

Plus d’un mois après la rentrée scolaire, des écoles privées vont sans doute accueillir encore des élèves. A cause de la grève en cours,  des parents soucieux de l’avenir de leurs enfants n’hésiteront pas à « libérer » leurs progénitures du piège que constitue l’école publique pour les inscrire dans les établissements privés. Et les parents qui ne comptent que sur “l’école de l’Etat” vont eux prendre leur mal en patience et espérer, comme on le dit chez nous, que Dieu fasse son miracle. Ils auront beau se plaindre, il ne se trouvera personne pour écouter leurs légitimes lamentations. Car sous nos cieux, la question de l’éducation ne mérite pas un rang de priorité.

Depuis que la grève a commencé, les hommes politiques du Bénin n’ont pipé mot sur la crise. Ce qui les préoccupe, c’est comment ne pas rater leur gâteau des opportunités électorales liés à la présidentielle de 2016. Jamais ici l’on ne lève la voix pour opiner sur les réformes de l’école. Pourtant, c’est le socle du développement. Les grandes nations l’ont compris et investissent pleinement dans l’éducation. C’est à l’école qu’on forme l’esprit du jeune enfant, adolescent, adulte… de manière à l’aider à comprendre sa mission pour le développement de son pays. Si l’éducation est bâclée, le développement ne se fera pas par une tour de magie.

Mais il semble que la classe dirigeante n’en est pas consciente. En tous cas, elle ne fait montre d’un engagement sur ce plan. Et cela s’explique : les autorités ont rarement leurs enfants dans les établissements publics. Elles rendent l’école publique peu performante et ont l’intelligence d’inscrire leurs enfants dans les établissements privés. D’autres choisissent l’école française installée à Cotonou  comme s’ils étaient Français. Là, le succès est garanti contre de colossaux frais de scolarité. Les enfants d’autorités béninoises formés à l’école française ont sans doute – le chemin leur est préparé pour – la chance de subir une formation de qualité débouchant sur des formations universitaires de pointe. Et après, ils reviendront en remplacement de leurs parents, diriger le Bénin. En somme, les autorités elles ne perdent pas quand l’école publique est en grève. Puisqu’elles ne ressentent pas directement la crise.

Mais ce qu’on oublie c’est qu’un peuple mal éduqué est difficile à diriger. Si les futurs dirigeants sont mieux formés que ceux qu’ils vont diriger, ils n’auront pas la tâche facile.

A l’heure où les universités publiques tamisent par des critères d’excellence l’accès des nouveaux bacheliers aux études supérieures, rester sourd à la mort de l’enseignement de base est criminel.

“Ouvrez les écoles, vous fermerez des prisons”, a écrit l’écrivain français Victor Hugo. Que comprendre au cas contraire, si les écoles sont fermées ? Eh bien que les portes de tous les vices sont ouvertes. On peut bien imaginer toutes les choses inutiles auxquelles s’adonnent les élèves et écoliers pendant les quatre jours de grève. 

Sauvons donc l’école béninoise déjà malade du manque de moyens – certaines “classes” sont installées à l’ombre d’un fromager ! – du cycle infernal des grèves.

Vincent Agué