Jean Paul Soro

BAZIE DEROUTE LES MICROBES

Image utilisée à titre d'illustration
Image utilisée à titre d’illustration

Depuis quelques jours, le phénomène des microbes avait  pris de l’ampleur. Il ne passait pas un jour sans qu’on entende parler d’une agression des microbes. Tantôt c’était Yopougon, un autres Abobo , le jour suivant Attécoubé. En réalité ces mauvais garnements (Abidjan on les appelle les petits maudits) ne laissaient aucun répit à la population et aux forces de sécurité. Très souvent il y avait mort d’homme après leurs passages.  C’est donc après avoir été moi même été victime d’une agression (j’en suis sorti indemne grâce à la force de mes jambes) de ses microbes d’un autre genre que j’ai décidé d’écrire cette  aventure de notre héros national avec  ses microbes.

Comme vous et moi Bazié avait très peur de ses enfants gangsters  surtout que son nouveau lieu de travail  était situé dans la commune de yopougon non loin d’une pharmacie bien connue. Bazié devait chaque matin quitter Adjamé pour rejoindre yopougon en passant par la casse d’Adjamé.

Bazié avait perdu le sommeil à force de penser  et c’est la peur au ventre qu’il se réveillait chaque matin  pour rejoindre yopougon. C’est un de ses quatre matins que Bazié fit la rencontre de ses redoutables garnements. C’était un de ses matins où on se réveille le sourire aux lèvres et qu’on prend la peine de saluer tous ceux qu’on rencontre sur son chemin. C’est un de ses matins où on sent la vie devant soi. Mais revenons aux faits.

Voici donc notre héros national, marchant comme quelqu’un qui a ramassé une fortune. Le voilà donc marchant au virage de la casse d’Adjamé. C’est donc à ce moment là qu’une envie pressante le pris. Un envie qu’il ne pouvait pas s’amuser à reporter. La casse était le meilleur endroit pour se soulager. Pressé par son envie, il ne fit pas attention à un essaim d’enfants qui jouaient aux billes.

Alors que Bazié se soulage donc, un des garnements se détache du groupe , vient vers lui et lui dit « Eh mon vieux  pourquoi tu pisses dans notre yôrô. Tu vas payer notre droit 2».  Bazié fit la sourde oreille. Il se demandait comment répondre à un enfant si mal élevé. Le petit garçon qui devait avoir  12  ans se fit menaçant  « mon vié, faut pas chauffer mon cœur hein3 ». Notre ami ne pouvait supporter l’arrogance de ce petit garçon.

Il voulut donc lui donner une belle correction mais quand il leva la main pour le frapper, il vit que les autres garnements l’avaient encerclé. Apeuré  Bazié chercha du regard parmi les gens qui passaient à proximité une aide mais personne  ne voulut s’arrêter.  Bazié regarda ses agresseurs, ils avaient troqué leurs billes contre des objets coupants : machettes, bouteilles cassées, rasoir, brosses à dent effiler, couteau suisse.

L’un des garnements avança au milieu du cercle et ordonna à Bazié de se tenir tranquille sinon ils allaient le sôgô4. Son portable, son porte monnaie même la photo de sa petite amie n’échappèrent pas à ceux que Bazié venait d’identifier comme des microbes.

Bazié n’aurait rien fait si les microbes n’avait pas décidé de le piqué piqué. Quand il comprit que sa docilité n’allait pas le sauver , Bazié agrippa celui qui venait de le fouiller lui donna un bon coup de coude dans le dos qui le mit K.o . Les autres devinrent menaçants et foncèrent tous sur lui. Bazié sentit des brûlures sur sa peau mais aucune lame ne rentra dans sa chaire. Bazié se laissa tomber  comme mort. Les microbes le croyant mort se félicitaient « on a dja le vié môgô maudit là 6».

C’est à ce moment que Bazié se saisit du pied du microbe qui était devant lui, le souleva et se servit de lui comme  on se sert d’un gourdin et commença à frapper  les autres. C’était la débandade chez les agresseurs de Bazié. Il laissa tomber le malheureux qu’il venait de secouer et se mit à poursuivre  les autres. Mais point de microbes. Bazié satisfait de cette belle leçon donnée aux microbes continua son chemin.

La nouvelle de la victoire de Bazié se répandit comme une trainée de poudre. Sur le chemin de son lieu de  travail de Bazié la foule avait formé une haie d’honneur, on chantait les louanges de Bazié. Du sable jusqu’à  bel air (pour ceux qui connaissent Yopougon)  il n’y avait que la foule. Les jeunes filles aux beaux seins venaient se frotter contre le visage de Bazié. Pour une fois Bazié avait gagné sans problème.  Comme on le dit chez nous en chaque personne se cache un super héros.

 

1-Microbe : c’est un terme utilisé pour qualifier ces groupes de bandits qui agressent en plein jour dans les rues d’Abidjan. Ces sont des enfants âgés de 12 à 18 ans.

2 Eh mon vieux  pourquoi tu pisses dans notre yôrô. Tu vas payer notre droit » :Eh mon vieux, arrête de pisser sur notre territoire.

3-« mon vié, faut pas chauffer mon cœur hein » :Mon vieux ne m’énerve pas.

4sôgô :piqué

5piqué piqué : transpercé au couteau

6-« on a dja le vié môgô maudit là » : On a tué le mauvais monsieur

 

Jean-Paul  SORO


L’heure africaine

En Afrique  la notion du temps n’est pas pareille qu’en occident. Pendant que les Occidentaux sont pointilleux sur l’heure , les africains préfèrent gérer le temps à l’africaine…

 

Montre Rasta
Montre Rasta

 

Les origines de l’heure africaine

Un proverbe africain dit que quand la tête  se comporte mal, tout le corps suit le mouvement. Hélas ! Le retard est une culture en Afrique plus on se fait attendre, plus on se sent important. Les premiers à donner ce mauvais exemple sont nos dirigeants africains qui ont l’art du retard.

Quand j’étais à Korhogo en 1999 une éminente personnalité politique nous a fait attendre sous soleil et sous la pluie toute une journée. Il s’était présenté à son peuple bien aimé à 17 heures pour une visite qui devait avoir lieu à 09 heures. On avait trouvé cela normal. C’était une personnalité importante et non un citoyen lambda comme vous et moi.

C’est ainsi que de fil en aiguille cette pratique du retard s’est incrusté dans les habitudes des populations à tel enseigne que dans les rencontres officielles les maîtres de cérémonies se permettaient de dire

’ Mesdames et Messieurs nous prendrons un léger retard sur le déroulement de la cérémonie, vous savez c’est l’heure africaine’’.

Paraît-il que nos aïeux n’avaient qu’une notion vague du temps, ils se fiaient au soleil, au vent et à la lune. Ce qui faisait que leurs rendez-vous n’étaient pas précis dans le temps. Cependant cette théorie ne suffirait pas à expliquer le retard chronique des africains.

 

Les symptômes de l’heure africaine…

Quand on a un rendez- vous avec un africain il faut faire attention aux signes avant coureur du retard.   Quand on a un rendez- vous avec un africain son vocabulaire peut vous situer sur sa ponctualité. J’ai fait la remarque au fil du temps. Il existe une syntaxe commune à tous les retardataires chroniques.

Je travaille dans le domaine de l’audiovisuelle et donc j’avais une importante rencontre avec un collègue. Soucieux de la ponctualité j’étais au rendez-vous trente minutes avant l’heure fixée.

Exaspéré par le retard de mon collègue je l’ai appelé au téléphone, il me dit  « Allo SORO, je suis à côté ! ». Une heure après mon collègue n’était pas encore là, je l’appel de plus belle : «  Allo SORO, je suis bloqué dans un embouteillage mais je te jure que je suis à côté ». J’ai fait le pied de grue pendant une heure et demie pour voir mon collègue venir avec aux lèvres le sourire confus des retardataires :

«  Pardon, pardon !»

Le vocabulaire des retardataires est riche de ces mots  et expressions : « je suis dans un embouteillage », «  je suis à côté », « Je ne trouve pas de véhicule », « Mon téléphone est déchargé », la totale c’est celle là «  j’avais carrément oublié ».  Avant un rendez vous si votre interlocuteur vous sort une de ces expressions, il viendra en retard.

Un de  nos encadreurs au collège saint Charles Lwanga nous disait régulièrement que « La ponctualité est la politesse des rois ». Bref, il ya rien de plus intéressant que d’être celui qui est ponctuel. Quand on est ponctuel on a toujours l’avantage sur l’autre. Après tout on le dit dans nos causeries de quartiers les blancs ont l’heure, les africains ont le temps.


Bazié et le carême

Le mois de jeûne en Côte d’Ivoire est un mois de privation pour les musulmans. Un mois pendant lequel on est souvent obligés de jeûner quand on réside dans une famille musulmane. C’est l’aventure qu’a connu notre héros national Bazié, qui se voit contraint de jeûner mais comme toujours Bazié essaie de tromper tout le monde…

Pour les vacances scolaires, Bazié avait choisi la destination de Bouaké chez son oncle Bamoudjê, qui est un fervent musulman. Le séjour de Bazié chez son oncle coïncidait avec le mois de carême musulman. On le sait tous, c’est un mois de privation. On s’efforce de ne pas manger et de ne pas boire entre le lever et le coucher du soleil. Oncle Bamoudjè, en homme pieux, suivait scrupuleusement cette tradition religieuse et il mettait un point d’honneur pour que sa famille s’y mette aussi.

Ainsi du plus grand au plus petit, tout le monde était dans la danse. Voici Bazié qui pose sa valise et fait comme tout le monde. Le jeûne n’était pas vraiment la tasse de thé de Bazié. Il adorait se goinfrer à longueur de journée et il espérait avoir un traitement de faveur chez son oncle Bamoudjè qui le connaissait très bien. En plus, ces derniers temps il avait un appétit d’ogre.

Voilà donc notre Bazié chez l’oncle Bamoudjè. L’Oncle Bamoudjè l’informa que les temps étaient trop difficiles pour faire une cuisine spéciale pour lui : il fallait qu’il s’y mette. Les premiers jours, notre héros s’appliqua au carême.

Ah ! Que c’était dur. Le matin à 4 heures, Bazié ingurgitait le maximum de plat : Foutou à la sauce arachide bien épicé, des galettes d’haricots « tomso » en Dioula, de la bouillie de mil, du café. Ah ! Bazié mangeait comme un dromadaire qui fait sa provision. Mais tout cela ne sauvait pas Bazié des affres de la faim. Quand le soleil montait au zénith, le ventre de notre fidèle musulman criait, émettait des sons perceptibles à milles lieux. On aurait dit que le soleil pointait ses dards dans le ventre de Bazié. Il fallait trouver une stratégie sinon le séjour chez l’oncle Bamoudjè serait une catastrophe.

Eurêka ! Bazié venait d’avoir une idée de génie.

Désormais il allait se priver de nourriture et de l’eau mais à sa façon. Ainsi donc Bazié suggéra à l’oncle Bamoudjè de lui offrir une bouilloire à lui tout seul, une bouilloire spéciale, rien qu’à lui. Oncle Bamoudjè se félicita de cette demande de Bazié car pour lui, son hôte se transformait en vrai croyant.

Ainsi donc, Bazié avait sa propre bouilloire. Il pouvait mettre son plan machiavélique en route. Chaque jour après le repas de 4 heures, Bazié faisait une petite sieste comme le reste de la famille. Il profitait de ce laps de temps pour agir en secret. Dans l’après midi, pendant que tout le monde faisait le bain de prière, Bazié prenait sa bouilloire et allait derrière la douche et se mettait bien. Il sortait toujours de cet endroit l’air content et bavard. Bazié bernait ainsi tout le monde et même Dieu. Mais Attito Pkata1 a dit Dieu n’est pas gaou, c’est-à-dire que personne ne peut tromper le bon Dieu éternellement. Bazié allait se faire Hara Kiri2  .

Ce jour là, alors qu’un des fils de l’Oncle Bamoudjè avait pris la bouilloire de son père, l’oncle Bamoudjê, dans le besoin, emprunta la bouilloire spéciale de Bazié qui dormait.

L’homme s’installa et commença son bain de prière. Il ferma les yeux pour se laver le visage. L’oncle cria soudainement ‘’Ehi ! safroulaye cette eau est pimenté aidez –moi’’.

On vint au secours de l’Oncle Bamoudjè et tout le monde découvrit le pot au rose de Bazié. Ce petit malin buvait en réalité du Gnamankoudji3 pendant les heures de prières. L’Oncle fit appeler Bazié mais celui-ci était déjà loin. Il avait pris son baluchon. Après tout, on ne ruse jamais avec Dieu.

 

Attito Pkata : Chanteur ivoirien, il fait du Zouglou (rythme musicale de la Côte d’Ivoire).

Hara Kiri : Expression qui signifie que quelqu’un va se faire prendre à son jeu.

Gnamakoudji : Jus fait à base de gimgembre à la saveur pimenté.

 

 


Et si on avait notre propre monnaie ?

Il ya une chose qui suscite le courroux des populations dans les marchés et transports publiques de Côte d’Ivoire, c’est la question des pièces de monnaies épuisées par l’usage. Il ne se passe pas un jour sans que clients et commerçants (ou transporteurs et passagers) ne se bagarrent à se sujet. L’un accuse l’autre de lui refiler une fausse pièce et patati et patata…

Loin des discours panafricains sur le FCFA…

Le franc CFA est né le 26 décembre 1945, il signifie alors « franc des Colonies Françaises d’Afrique ». Il prendra par la suite la dénomination de « franc de la Communauté Financière Africaine » pour les Etats membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), et « franc de la Coopération Financière en Afrique Centrale » pour les pays membres de l’Union Monétaire de l’Afrique Centrale (UMAC).

Depuis lors les pays africains ont adopté le franc CFA pour remplacer les échanges traditionnels des populations (cauris ou nature). Le moins qu’on puisse dire c’est que cette monnaie a eu du succès auprès des peuples africains qui l’ont tout de suite apprécié. Cela étant dit, le désir de nos élites d’avoir une monnaie propre et africaine se fait de plus en plus sentir. On constate une certaine haine du franc CFA, elle est communiquée de divers façons aux populations qui commencent à regarder le franc CFA avec un regard suspicieux, les populations trouvent en effet désormais des défauts à cette monnaie héritée de la colonisation.

L’argent que l’on déteste…

Jamais des pièces d’argent n’avaient suscité autant de colère et de conflits, il s’agit précisément des pièces de 250, 500 et 200 Francs. Bien que ces pièces facilitent les échangent elles sont devenues indésirables à cause de leurs apparences. A leur émission sur le marché ces pièces de monnaies avaient été bien accueillies par les populations qui en avaient marre du grave problème de monnaie qui se posait à l’époque.Mais avec l’usage, les pièces de 250 frs sont devenues un boulet pour quiconque les possèdent. C’est comme être riche d’un trésor sur une île déserte. Personne ne veut prendre une pièce de 250 frs en échange de sa marchandise ! Un gérant de cabine téléphonique à Attécoubé (Abidjan) SORO N. affirme avec un peu d’amertume dans la voix ‘’ moi je ne prends plus les pièces de 250, regarde j’en ai plein dans mon sac et aucun client ne veut les prendre quand je les lui donne ».

250
Une pièce de 250 francs

 

’C’est vrai, certaines pièces de 250 francs sont lisses et finies, d’autres sont illisibles, seule le design permet de dire que c’est bien une pièce de 250. Mais le gouvernement n’a jamais interdit la circulation de ces pièces et c’est pour cela que je comprends mal la censure de cette pièce d’argent par les populations’’ explique Konan G., étudiant. La pièce de 200 francs fait l’objet du même traitement, quand elle est trop usée, on ne peut plus rien faire avec. Cette situation fait que le problème de monnaie refait sans arrêt surface et la vie devient difficile.

Les billets de banques qui froissent les humeurs

Il y a aussi les billets de banques dont l’allure vous enlève toute envie de les toucher tant ils sont sales. Des billets déchiquetés qu’on rattrape avec de la colle ou encore des billets à qui il manque un morceau. Certains billets portent la signature ou des griffonneries de certains utilisateurs. Ces derniers ignorent sûrement que l’argent est un bien public. Au vu de cette situation, les populations commencent à ne plus porter le franc CFA dans leurs cœurs et reprennent de plus en plus les mots des politiques anti- FCFA ‘’ et si on avait notre propre monnaie ? ‘’.

billets
Billets de banques fcfa

 

 

 

 

 

 


Election à l’Africaine

 

« C’est quoi une élection ?»  Il est difficile de répondre à cette simple question. La réponse varie selon le continent sur lequel on se trouve.

En Europe

Une élection cest un moment d’expression de la démocratie, c’est le libre choix, le libre arbitre. On vote le sourire aux lèvres et la conscience tranquille. On ne se méfie pas du sourire de l’adversaire, on n’insulte pas les personnes qui ont une autre opinion politique. Bref, chez les blancs, aller à une élection n’est pas signe de guerre. Il n’y a jamais ni d’échauffourées, ni de chaudes empoignades, et encore moins des morts.

En Europe le candidat propose et explique son programme. On le juge avant qu’on le vote.

En Afrique

C’est tout autre chose.

Une élection est organisée à la suite d’une concertation politique, il existe toujours une modification constitutionnelle à faire, un candidat qu’on souhaite écarter de la compétition ou encore une commission électorale à contrôler, un président du conseil constitutionnel à mettre dans sa poche. En Afrique, l’opposition se méfie toujours du pouvoir qu’elle soupçonne de vouloir tripatouillé les résultats. C’est l’occasion pour le politicien de promettre monts et merveilles aux populations analphabètes qui boivent leurs paroles truffées de mensonges.

 

BUREAU DE VOTE
Bureau de vote en Afrique

 

En Afrique, on n’explique pas son programme de gouvernement (personne ne s’y intéresse). On s’intéresse plutôt au nombre de billets de banque distribués, le nombre de repas offert, la clarté du sourire du candidat, le nombre de t-shirt partagés qui pèseront dans la balance. En Afrique ce n’est pas toujours celui qui gagne dans les urnes qui est proclamé président.

En Afrique on va voter la peur au ventre car la défaite de son parti est le début d’un chemin de croix parsemés de calvaire (exil forcé, arrestation arbitraire, destruction de biens, spoliation, humiliation). En Afrique une élection précède presque toujours une guerre, des morts et des blessés. C’est ce que les citoyens lambda appellent le 3ème tour.

 

Foule en colère
Foule en Colère

 

À quoi servent la commission électorale et le conseil constitutionnel dans une élection où personne ne veut perdre, une élection dont le résultat est rejeté avant même le début du processus électoral ? Ces structures ne servent à rien et gaspillent l’argent du contribuable pour rien.

 

« Qu’est-ce qu’une élection ? » Une élection c’est quand on met son bulletin dans l’urne. Le reste n’est plus de notre ressort.


La prison cadeau

Cette histoire que je vais vous conter est certes une fiction mais c’est le quotidien de tous les jeunes chômeurs. Certains jeunes face à l’adversité restent sur le droit chemin. D’autres, choisissent  d’être des brebis galeuses pour survivre. Cependant, il ya une petite catégorie qui n’a quasiment pas le choix.

Moni est avec son jeune frère Kader vivent  chez leur oncle qui a bien voulu les recevoir dans sa petite maison situé  dans un quartier mal famé d’Abidjan que tout le monde connaît sous l’appellation de Mossikro.  A Mossikro, la plupart des jeunes sont déscolarisés, beaucoup s’adonnent à la drogue et à la consommation de d’autres stupéfiants. C’est dans cet univers  malsain que les deux frères survivent. Depuis quelques jours, la tante avait diminué la ration conséquence ils ne mangeaient pas pour remplir le ventre mais juste pour le soulager.

PLAT DE RIZ
Un plat de riz gras

Trois jours après, la tante annonça que le sac de riz était vide. Chacun devait participer. Comment Moni et son frère Kader allaient participer ? Difficile pour Moni, il n’avait connu d’emploi, il ne savait même pas ce que ça faisait d’avoir son salaire. Bien sûre ; il faisait de petits travaux au quartier mais ce n’était pas pour faire ces petits-boulots qu’il avait passé 20 ans de sa vie à étudier.

Fatigué de réfléchir, il décide d’aller  faire cent pas pour se changer les idées. La faim le tenaillait mais il fallait qu’il oublie son ventre et ramener quelque chose à la maison.  Sa promenade, l’amena au bord de la route, il marcha un peu et s’assit près d’une dame qui vendait des ignames cuites. La dame le regarda, elle savait qu’il avait faim. Elle le regarda un long moment puis remua sa tête comme pour dire « le monde est vraiment injuste ».

Elle prit une igname dans la marmite, la déshabilla, la coupa en tranche, versa du piment d’un geste maternel, aspergea le tout avec de l’huile de palme puis mit l’ensemble dans une assiette en plastique. Le cœur de Moni se mit à battre la chamade enfin il allait apporter quelque chose à la maison. La dame le héla « hé petit ! »  Moni s’approcha à grand pas. La dame lui dit « pourquoi tu ne rentres pas à la maison ? Tu ne vois pas que tu fais fuir mes clients ! » .

 

Igname braisé

« Allez ouste ! » Elle le chassa. Moni se mit à courir  en pleurant tout en maudissant cette méchante dame. Soudain il entendit « voleur ! Voleur ! Attrapez-le ! » Moni voulut s’arrêter pour mieux voir ce voleur que l’on poursuivait. Mais une main vigoureuse l’agrippa. Moni se retourna et aperçu le policier la matraque au point et sans trop savoir pourquoi il dit ces mots «  Ce n’est pas moi le voleur ! » le policier le gifla et le traîna au commissariat.  Moni ne comprenait rien à sa situation. Au poste de police, le commissaire lui demande « c’est toi le voleur ? » non, répondit Moni. « Pourquoi tu courais » Parce qu’elle m’avait chassé. « Pourquoi elle t’avait chassé ? »

j’étais assis là et elle m’a dit que je faisais peur à ses clients. « Tu es donc un suspect » conclut le commissaire « Non, je suis innocent » réaffirma Moni. On enferma le jeune garçon en cellule. A la maison, son oncle et sa tante ne s’était même pas rendu compte de son absence. Ils étaient rentrés tard et fatigué. Le lendemain, on envoya Moni devant le commissaire. Il y avait une dame devant le bureau du commissaire. C’est la vendeuse de d’ignames. Elle a les yeux en larmes. Elle le regarde et le supplie en se mettant à genoux « petit, pardon rend moi mon argent, fais à cause de Dieu » « Je n’ai rien pris madame ».  Elle se lève et dit au commissaire «  c’est  son complice qui a l’argent ». Le commissaire  le regarde avec les yeux sévères « Où est ton complice ? »  « Je n’ai pas de complice commissaire » « Tu vis où ? » « A mossikro ».

Le commissaire se leva, frotta ses  galons, se rengorgea et  dit «  Donc tu es de ces petits bandits » « Non ! » « Tu vas payer 200 000  francs. Sinon tu vas  à la MACA». On ramena Moni dans sa cellule. Moni avait pu joindre son oncle mais celui-ci n’avait rien et ne pouvait faire face à cette dépense. C’est donc impuissant qu’on laissa déférer le pauvre Moni. Par la suite, comme il ne pouvait pas se prendre un avocat. On lui attribua un avocat d’office. Cet avocat ne défendit pas Moni au contraire il l’enfonça. On lui fixa une peine de 10 ans pour rien. L’emprisonnement de Moni donna le libre arbitre à Kader de rejoindre les jeunes délinquants du quartier. Il devait survivre avant que son grand-frère ne revienne à la maison. Une vie de plus gâché.

Jean-Paul SORO