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CAN2017: Le roi de la jungle intronisé « Empereur de l’Afrique »

Cette histoire est dédiée à tous les lions, lionceaux et leurs descendants

Le Lion Indomptable

Un jour le pharaon voulut étendre son règne, civiliser le continent
Imposer le hiéroglyphe, construire des pyramides partout
L’Afrique subsaharienne était jusque-là sans routes, ni électricité, avec beaucoup d’arbres. Une vraie jungle quoi. Mais une jungle avec son roi : le lion.
Comme tout monarque, Sa Majesté opposa une farouche résistance à l’idée de céder son territoire.
La guerre fut déclenchée mais ne dura qu’1heure 30 min.
Pharaon et son armée furent engloutis, écrasés par l’armada de lionceaux
Tous les autres animaux de la forêt, dans leurs cachettes pendant la bataille, sortirent ainsi un à un.
Les panthères, les léopards, les éperviers, les éléphants, mêmes les hirondelles qui suivaient tout de très très loin, de leurs nids, vinrent tous célébrer la victoire. Ils s’agenouillèrent et intronisèrent leur roi : l’Empereur de l’Afrique, et le baptisèrent : Lion Indomptable !

 


Chuuut ! Ici deux enseignants abandonnés

Ils sont à deux, deux enseignants perdus, abandonnés dans les collines du nord-est du Burundi, en province Ruyigi, commune Gisuru. Pourtant, ils n’en sont pas conscients ! Avec leurs craies, ils semblent être les gars les plus heureux de la planète.

Assis, les écoliers suivent attentivement le cours de calcul            Photo: AGB
Assis, les écoliers suivent attentivement le cours de calcul Photo: AGB

Première impression : Un hangar hors d’usage, ou plutôt un poulailler abandonné. A l’intérieur, des visages innocents, des regards luisant, de petites voix angéliques, qui écossent les cinq voyelles de l’alphabet. Une école ? Rien pour le prédire. Il faut vérifier. Oui, c’est l’Ecole Primaire Nyakwibereka. Devant, deux héros. Deux enseignants qui ne voient rien de ces conditions de travail insupportables. Deux hommes qui ont choisi de boucher les oreilles aux altercations assourdissant après t’avoir aveuglé. Deux braves qui n’ont rien à foutre d’un pays qui marche à l’envers en fermant les robinets d’essence juste au moment où le baril s’arrache gratuitement. Au final, deux intrépides bien conscients que le pays a toujours la pépie des fils patriotes, et qui se donnent corps et âme pour en produire quelques-uns dans une salle qui n’a ni porte, ni fenêtre, sans parler de banc pupitre, avec des écoliers qui ignorent carrément à quoi ressemble un livre de lecture, qui se bricolent à l’africaine un tout petit support pour poser leurs fesses. Avec une chose en tête : rattraper le programme. Chez eux, pas de week-end. C’est un luxe de Bujumbura. « C’est le seul jour favorable pour être en avance », vous expliquera Ezéchiel kagina, l’un des deux enseignants. Les passants sont émus, parfois fâchés. Les uns s’inclinent, saluent ce courage inédit mais qui n’enlève rien à la colère des esprits chagrinés épinglant le laxisme des autorités, d’une politique d’éducation-la gratuité des frais de scolarité et le nouveau système d’école fondamentale-qui risque de tourner en fiasco.

Ici le reportage en langue nationale (le Kirundi) réalisé sur ladite école par les journalistes de l’Hebdomadaire Iwacu:


Les trois grands péchés récents du pouvoir de Bujumbura

Affaiblir le cercle des généraux, un limogeage qui ne devrait pas, un emprisonnement mal pensé, voici les trois grandes erreurs récentes, commises au mauvais moment, qui risquent de coûter cher au régime Cndd-Fdd.

Les militants du Cndd-Fdd en plein meeting.                Crédit photo: Iwacu
Les militants du Cndd-Fdd en plein meeting. Crédit photo: Iwacu

Toucher les Généraux

Ce fût un coup de tonnerre. Et c’est le fameux grand cercle des généraux qui a été touché, vexé, diminué et enfin affaibli. Nul n’ignore le poids que pesaient l’ex patron du Service National des Renseignements Adolphe Nshimirimana et l’ex chef de cabinet à la présidence Alain Guillaume Bunyoni dans le parti et dans tout le pays en général récemment touchés, quoi qu’ils fussent réputés pour « intouchables ». Leur départ semble avoir levé le voile sur le mythe Cndd-Fdd. Un parti jusque-là qui n’avait, visiblement, rien perdu de ses instincts de guérilla. Un journaliste se posait la question dans les colonnes de l’hebdomadaire Iwacu si l’aigle (emblème du parti présidentiel) ne serait pas en train de perdre ses plumes. Si, peut-être! Dans la mémoire collective, il ne représenterait plus la même force qu’hier. Et l’éviction des deux grosses pointures y serait pour quelque chose.

Limoger Niyombare

Il venait de prendre les rênes du service des renseignements. Trois mois après, un rapport accablant tombe. Le Général allait franco en demandant au président de renoncer à ses intentions de briguer un troisième mandat. Entre nous, que pouvait faire le chef de l’Etat ? Le limoger. (Je le soutiens). Sinon comment allait-il gouverner étant en conflit ouvert avec le chef de sa police ? [Le service national des renseignements= police présidentielle]. Mais là aussi, rien n’a été gagné. Le linge pouvait se laver en famille. Ils ont préféré l’étaler dehors. Soit. Godefroid Niyombare a été limogé. Personne n’ignore ce qu’il représente au sein du parti et dans le pays. C’est aussi un ancien guerrier de l’ex mouvement rebelle. Désormais, il est le symbole de ceux qui aspirent au changement au sein du Cndd-Fdd. Et le chef de l’Etat s’est créé plus d’ennemis dans son propre camp. La bataille la plus dure à gagner.

Emprisonner Bob

La pire des bourdes du pouvoir de Bujumbura. Il n’aurait pas dû. Pour les prochaines élections, l’attention portait peu sur la candidature du président, la question était plutôt de savoir si le peuple pourra dire « Non » à un « mandat de trop ». Là aussi, plus de doute. Le peuple est capable. Les détracteurs du pouvoir peuvent dire merci au grand « M » à celui qui a mis le directeur de la Radio Publique Africaine en tôle. Les récents manifs, du jamais vu au Burundi, lors de sa libération ont dégrisé les esprits.

Trois grosses erreurs que Bujumbura avec un pouvoir, qui, clopin-clopant, tente de prouver sa force, n’aurait pas dû commettre à deux mois des élections. Il reste à savoir si l’évasion de la prison d’Hussein Radjabu, ancien patron du Cndd-Fdd, qui défraie la chronique, n’apparaît pas comme première retombée des trois gaffes susmentionnées.


Time is money : les Burundais l’ont compris

C’est la grande leçon que les Burundais peuvent tirer, à leurs dépens peut-être : le temps perdu ne revient, et ne reviendra jamais. Jamais ! Et faut-il l’avouer, le temps est désormais la plus grande richesse au petit pays Cœur d’Afrique qui a aujourd’hui droit à un fleuve d’infos. Avec un job qui donne du fil à retordre aux journalistes : faire le tri entre quoi traiter et quoi laisser tomber. Normal : le Burundi approche son grand rendez-vous, les élections.

Choisissons donc!

Nous avons eu le temps de célébrer le retour triomphal du journaliste Bob Rugurika qui avait été incarcéré injustement. Il a été accueilli par une foule en délire. Du jamais vu au Burundi !

Nous avons consacré un moment à commenter les destitutions en cascade des mauvais élèves du système Cndd-Fdd. Mais arrêtons-nous sur un fait, ou enfin sur un homme. Ce général qui aurait brisé le mythe en demandant au chef de l’Etat (les deux ayant fait le maquis ensemble) de ne pas briguer un troisième mandat. Un mandat contre tout, contre l’ensemble de l’opinion nationale, contre la loi…
Aussitôt nommé, aussitôt limogé : le général Godefroid Niyombare, conscient qu’il ne fera pas long feu à la tête des services secrets, savait que time was money. En trois mois, il vient d’entrer dans l’histoire par son « Non » un grand « N » au mandat de trop. C’est au moment où d’autres se battent pour avoir une séance rattrapage de cinq ans de plus aux dix ans déjà brûlés. Comme quoi le temps était du vent. Non. Time is money !


Ma lettre de félicitations à Robert Mugabe

Apres son discours à la Nation, Robert Mugabe chute suite à  une marche ratée
Après son discours à la Nation, Robert Mugabe chute après avoir raté une marche.

Sa Maj…plutôt Monsieur le président,

J’ai suivi avec attention les dernières tractations qui ont fini par vous porter à la tête de l’Union africaine. Contrairement aux mauvaises langues qui ne voient rien en vous que le despotisme, l’ivresse du pouvoir, moi j’ai décelé le talent de grand leader qui vous habite bien avant, quand je proposais aux Français de vous prendre comme alternative à François. Ils ne m’ont pas écouté et ils en font les frais. Certains ont fait grise mine, d’autres m’ont tout simplement pris pour un cinglé ne comprenant pas d’où je sortais une telle proposition. L’histoire vient de me donner raison. Vous avez mieux, toute l’Afrique Monsieur le président.

Quant à ceux qui ironisent sur votre récent pas raté pour finir en dégringolade, je vous assure que ce n’est autre que la jalousie de la presse. Une presse qui ne fait que scruter le moindre faux pas afin d’en faire une affaire d’Etat, le scandale de l’année…C’est d’ailleurs cette presse même que vous avez eu le courage et la sagesse d’empêcher de travailler librement dans votre pays pour limiter les dégâts.

Sinon, Monsieur. le président, s’il est des voix qui ne reconnaissent toujours pas vos prouesses en leadership, outre mon soutien, vous pouvez aussi compter sur les chefs d’Etat qui veulent s’offrir allègrement un troisième mandat cette année. Ils savent à l’avance ce que sera la position de l’Union africaine dont la direction vous est honorablement confiée.

Courage Monsieur le président !

Longue vie à Mugabe !

Vive l’Afrique !


Tout est politique ! Même le foot. C’est l’actu qui m’a tordu

Fan de foot. D’habitude, je ne rate pas une grande compétition comme la Coupe d’Afrique des Nations. C’est la grande fête pour le continent noir, le grand rendez-vous pour nourrir l’actu mercato par de nouvelles étoiles montantes. Mais cette fois-ci, j’ai porté atteinte à mon intégrité émotionnelle en ne regardant que quelques rencontres. Sinon, comment se délecter de ce joli spectacle quand tu es tout le temps mitraillé de mauvaises nouvelles, précisément de ce compatriote, un collègue, Bob Rugurika, directeur de la Radio publique africaine, emprisonné pour ses révélations fracassantes sur l’assassinat des trois sœurs italiennes ? Mettons de côté « regarder », il devient de plus en plus difficile pour un journaliste burundais de « penser foot » aujourd’hui.

J’ai failli rater le grand match

Il faudra un tweet héraut pour ressusciter mes instincts footeux, d’un média qui, d’habitude, n’est pas trop fan de l’actu africaine.

Chez nous, on ne rate pas un si grand match. Le lion qui rugit pour dégommer tout cru l’éléphant ? On ne résiste pas. J’ai dû chambarder tous mes programmes pour être tranquille devant l’écran de télé à 20 heures pile (heure de Buja). Le coup d’envoi lancé, je tourne les yeux, change de chaîne, me lamente… Où est Alex Song ? Ekotto ? Eto’o, lui, je savais. De nouveaux visages sur terrain. Mon verdict tombe sur le champ : cette équipe va être lynchée. Une minute, cinq, quinze… de très belles combinaisons. Pas de guerre des ego, les insultes, parfois coups-de-poing entre coéquipiers, c’est de la vieille histoire. Le groupe m’épate. « Gare à ma Côte d’Ivoire ! » la phrase me tourmente. Je serre les fesses. Puis une mouche me pique.

Aïe ! L’actu locale me rattrape : je pense à notre classe politique qui nous crée des histoires depuis des décennies, qui semble avoir échoué à aller au-delà de l’ego pour penser l’intérêt général, qui a du mal à concevoir un projet de société pouvant tirer le peuple burundais de la misère qu’il endure depuis plus d’un demi-siècle. Et mon cœur murmura en lui-même : « Tout est politique. Si jamais le tsunami qui a balayé les vieux lions du Cameroun pouvait passer chez nous pour mettre sur la touche ces vieux dinosaures pour permettre au sang nouveau de circuler ».


A Buja, nous avons tous raison

Embouteillage sur embouteillage. Les différentes artères de la capitale du Burundi sont inondées de voitures pendant certaines heures précises. Un vrai casse-tête. Au-delà des « nouveaux riches » qui font accroître le nombre de ces engins, un symptôme d’un grand cancer qui ronge nos âmes s’y cache.

 

En plein coeur de Buja
En plein coeur de Buja

Pointez-vous aux différents carrefours de Bujumbura le matin vers 8 heures, midi, et soir vers 18 heures, vous comprendrez une chose : tout le monde est pressé, et vous rentrerez avec un constat : tout le monde a raison. Une spécialité de Buja (Bujumbura pour ses fils et ses amis). Sinon que dire de ces dizaines de véhicules qui passent des heures à nous casser les tympans par des klaxons interminables, criant à qui veut les entendre, tentant de se frayer du chemin par tous les moyens, passant par les trottoirs des piétons, prêts à sauter faute de pouvoir dépasser, le respect du code de la route, ou plutôt le respect d’autrui, étant devenu une vieille histoire, démodée, digne que pour nos aïeuls.

L’iceberg

Ouais, c’est peut-être la partie visible d’un grand malaise, un désordre qui nous habite, nous hante, nous tourmente pour enfin exploser dans de petits détails qui passent parfois inaperçus. Je pointe cette pratique qui s’érige de plus en plus en une culture, cet égoïsme qui nous fouette tous quand on cherche à être servi en premier au guichet de la banque même si l’on est dernier à franchir la porte d’entrée.
C’est  cette loi du moindre effort qui nous guide quand nous faisons grise mine, jaloux, de voir notre collègue promu au boulot alors que nous sommes conscients qu’il fait mieux que nous.

J’épingle ce désordre qui se révèle dans certaines banalités : ces petits emballages de chewing-gum qui jonchent les rues malgré les poubelles publiques érigées dans pas mal d’endroits. Cette police, plutôt ces policiers-il ne faut pas globaliser-qui vendent les permis de conduire au lieu de faire passer le test aux futurs conducteurs, comme le dit la loi, afin de nous éviter cette cohue des véhicules qui ne savent plus lequel devrait passer en premier, bousillant ainsi notre temps.

Au final, c’est cet ego, cette médiocrité, ce manque de sagesse, ces calculs spéculateurs qui nous tordent, nous faisant tourner en rond, que je dénonce. Si seulement nous pouvions…Bujumbura serait…


« La guerre, c’est tout ce que j’ai à vous offrir »

Devant ces 90 jeunes « rebelles » (bilan officiel) sacrifiés pour une cause jusque-là inavouée, dans un affrontement avec l’armée régulière au nord-ouest du Burundi, il ne me reste qu’une chose : la prière.

Les jeunes, « le Burundi de demain », nous rabat-on les oreilles sans cesse. Mais les voilà immolés sur l’autel des intérêts qui sont loin, très loin, d’être les leurs.

Pourtant, on nous les montre capturés sur le champ de bataille. Chacun tête baissée, confus, symbole de la traîtrise… Malheur aux vaincus ! Mais on n’a jamais vu ceux qui les envoient sur le front, les seigneurs de guerre, les maîtres-chanteurs qui ne chantent pas… qui ont, peut-être, les moyens d’offrir mieux : un travail, une chance de poursuivre les études, au lieu de les laisser tomber, décapités et déchiquetés, sous les balles de l’armée nationale pour une cause floue que personne ne veut assumer.

Seigneur, pardonne à tous ceux qui sont en train d’offrir une pierre au lieu du pain, un serpent au lieu du poisson, car ils ne savent pas ce qu’ils font ! Amen !

 

 


Non, non, et non au bizutage dans nos universités!

Les portes de l’Université du Burundi sont fermées depuis peu. Les étudiants sont en grève. Pour cause, juste une histoire de bizutage qui aurait mal tourné entre étudiants de ladite université et ceux de l’Institut Supérieur des Cadres Militaires. Encore un couac qui ne fait qu’amplifier mes réticences.

UBQuoi de plus rabaissant que le bizutage? Quel épisode le plus avilissant, humiliant que ce passage (devenu) obligé pour ces étudiantes novices, têtes baissées et rasées, embarrassées dans les rues de Bujumbura, au nom du « grand », « respectueux » et historique baptême, cher à la seule université publique, l’Université du Burundi ? Quelle expérience la plus exécrable pour un jeune étudiant que de se faire tabasser, cracher dessus, par ceux censés te protéger, pour la simple faute d’avoir franchi les portes de l’université ? Rares sont les moments où j’affiche carrément ma prise de position. Ici, dois-je le dire tout haut, c’est le ras-le-bol. Je me sens obligé de le vomir, ma capacité de digestion ayant tiré sa révérence.

Qui sont les artisans du bizutage?

Les anciens ? Trop simpliste. Disons « poilissimes », comme ils se nomment. Et que veut dire le mot ? Ne me posez pas la question. Eux-mêmes ne font que tourner les yeux au lieu de se définir. Certains tentent une explication se référant aux fameux poilus, les soldats français, de la première guerre mondiale. Faisons simple et plantons leur décor: une armada de gars qui travaillent le plus sur le paraitre, dégageant un air frimeur partout sur leur passage. Toujours en chemise longue manche, jamais en pantalon jeans perçu comme une tenue des sans scrupule, marchant toujours à pas de tortue en l’honneur d’un slogan populaire : « le poilissime ne court jamais même si ses intérêts sont en danger »,…Bref, une génération dans la geôle de la nostalgie, de l’illusion, se prenant pour les lauréats de l’époque coloniale pour qui tout (bon boulot, belle voiture, maison qui fait rêver…) les attendait impatiemment à la sortie de l’université. Mais comme la vie est impitoyable, c’est au bout du tunnel, que l’on réalise qu’on a perdu quatre ans dans des futilités, n’ayant jamais eu l’occasion d’apprendre comment créer par exemple sa propre entreprise, petite soit-elle, pour défier ce fléau du chômage qui risque de mettre à genou toute cette jeune génération, les « poilissimes » y compris.

P.S : le Burundi n’étant pas une île, voici quelques témoignages de ce qui se passe aux quatre coins du monde :

Magloire Zoro (Ivoirien, étudiant en Egypte) : « Bonjour Frangin. Là où je suis en Égypte, il n’y a pas de bizutage, c’est une Université qui forme les cadres africains. J’ai posté un lien à propos sur mon mur. Tu peux voir la vidéo pour te faire une idée de l’Université. Et avant ça, j’étais dans une Université privée à Abidjan (UCAO) où il n’y a également pas de bizutage. J’étais aussi parallèlement dans une Université publique en Côte d’Ivoire. Là-bas, il ne s’agissait pas tellement de bizutage, mais c’était plutôt une perpétuelle pratique d’intimidation opérée par la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) sur tous les étudiants qui n’épousaient pas leurs idées. Tu en as entendu parler j’espère ! Cette psychose a duré jusqu’à la récente crise postélectorale qui a permis de faire le nettoyage du système académique… »

Juscaëlle Iradukunda (Burundaise, étudiante en Italie) : « Ici, on ne pratique pas le bizutage. Plutôt quand je suis arrivée pour la première fois, on m’a présentée mes professeurs pour qu’ils sachent que j’ai des difficultés de langue, ne parlant pas l’Italien,…Vraiment ces histoires de bizutage n’existent pas ici. »

Une étudiante, Burundaise, qui évolue en Europe (elle a requis l’anonymat) : « Oooohh. Quand l’année commence, tu arrives et tu entre directement dans ton bloc. Il n y a rien de baptême pour les nouveaux à l’instar de ce qui se passe au Burundi. »


Qui peut prétendre fêter noël comme eux?

IMG-20141224-WA0002C’est noël. Mieux : dans la capitale Bujumbura, au Burundi, c’est le moment de franchir certaines limites : s’offrir le meilleur des vins même si ce n’est pas évident pour le minerval des enfants au mois de janvier. On s’en fiche. C’est noël. Il faut faire comme les autres. Le qu’en dira-t-on à l’africaine. Il faut aller rendre visite le voisin, même pour le moins sociable. Et surtout, une pratique finalement universalisée et médiatisée, il faut organiser un Noël pour les enfants : boire, manger, jouer pour enfin chanter et danser. Sauf qu’au village, je n’ai jamais vu cela.

Pourquoi ?

Pour eux, les fils du village, noël, c’est chaque jour ou jamais. Eux qui ignorent tout sur le père noël et sa magnanimité d’offrir les cadeaux partout. Mais qu’importe ? Ils n’ont pas les bonbons et les gâteaux à déguster, pourtant à chaque minute qui passe, ils partagent tout, même rien : la misère, la joie qu’offrent ces patates douces parfois cachées dans ces culottes aux yeux grandement ouverts par derrière laissant respirer allègrement les fesses. Sont-elles de leurs champs culturaux ou pas ? Cuites ou crues ? Ce n’est pas leur problème. Ils préfèrent d’ailleurs les grillées. Ce sont celles-là, vous diront-ils, qui revigorent le plus, pour affronter le quotidien du village : escalader les collines à la recherche de l‘eau potable après les cours, les « d à d » (devoirs à domicile) restant une affaire des citadins, jouer au foot même sans ces indispensables grolles édentées, parfois faire la cuisine,…

Chez eux, au village, le noël c’est chaque jour. Et personne ne peut prétendre le fêter comme eux. Normal ! Ce sont des anges.


Heureusement que je ne suis pas président !

Fauteuil présidentiel
Fauteuil présidentiel

Limpide: en Afrique, si l’on sait comment un président accède au pouvoir, seul Dieu peut dire de quelle porte sortira-t-il. Et notre continent regorge d’assez de patriotes pour cracher, éructer, vomir sur ces indéboulonnables qui s’incrustent à vie au pouvoir. Parfois le châtiment est fort. Kadhafi pourrait le témoigner. Mais on peut toujours poser la question à Blaise, Ali, Moubarak,…pour savoir ce qu’est se faire expectoré par son peuple explosant sous le joug de la dictature. Et visiblement, je suis le seul (et j’accuse le coup) à être l’avocat du diable.

Vous savez quoi ? Offrez-moi ce cortège des dizaines de voitures, bling-bling, alors que je n’avais rien au départ, puis venez me rappeler que je suis à la fin de mes mandats constitutionnels (tout en précisant que chez nous il n’y a que deux classes : les riches et les pauvres. Et pour être parmi ces premiers, il faut d’abord être politicien. C’est l’unique voie, apparemment). Chantez mon nom dans toutes les cérémonies, tel un dieu à qui on rend un culte, affichez mon portrait partout, même si je n’ai rien foutu de mon règne, et hasardez-vous à me demander d’organiser un scrutin transparent et inclusif, qui risque de me mettre à la porte. Offrez-moi une immunité, qui me protège de toutes les foudres de la Justice malgré les affaires louches de grande corruption, d’assassinat,…qui trainent derrière mon nom et présentez-vous pour me raconter ce blabla d’alternance politique, de respect des principes démocratiques. Hm ! Heureusement que je ne suis pas président ! Et puis, rappelez-vous : tout le monde n’est pas Sankara, encore moins Mandela.

 


Prions pour que Mandela ne sache rien !

Nelson Mandela
Nelson Mandela

Il y a une année Madiba partait.

Le ciel s’obscurcissait au-dessus de la nation arc-en-ciel. Le monde pleurait le départ d’un héros.

Le monde entier célébrait la grandeur d’esprit d’un homme qui contre vents et marées a pu donner une très belle leçon d’unité.

Il y a une année,  presque tous les chefs d’Etat africains, du pire au moins mauvais, promettaient, pour ne pas dire juraient, de garder, de protéger cet héritage, ô combien précieux, qu’est l’unité entre fils de l’Afrique.

Mais il a fallu une année seulement pour tout passer à la trappe de l’oubli.

Une année seulement pour montrer au monde, que tous les beaux discours du 5 décembre 2013, jour de décès de Nelson Mandela, n’étaient que démagogie.
Une année seulement pour laisser se volatiliser, comme ça, le grand héritage de mzeh (vieux en swahili).

Une année seulement pour que les esprits soient de nouveau envahis par la désunion.

Oui, une année seulement…

Une chose, tout au moins, une seule : Prions pour que Mandela ne sache rien !

 

 

 


Au Burundi, vaut mieux Whatsapp que la police

323985_462685727083559_766208862_oTout part d’un voleur. Plutôt un homme aux allures d’un boss, avec une belle bagnole en plus, pris après son coup raté de vol d’un p… de téléphone mobile. Un escroc, voilà. Sans tourner autour du pot. Comme tout arnaqueur, au départ, il jurera par tous les dieux, tentant de clamer son innocence à qui veut l’entendre, malgré le fait qu’il ait été pris la main dans le sac. Et pourtant, une phrase suffira pour qu’il s’incline, qu’il confesse et qu’il se livre complètement : « Nous allons mettre ta photo sur Whatsapp ! »

Visiblement rodé en coup fourré, n’ayant plus peur de la police, le voleur déguisé se retrouvera à genoux grâce à de simples flashs de smartphones.

Quelle folie des TIC? Mais ce coup de théâtre susmentionné ne reste qu’un cas pêché dans un océan d’épisodes beaucoup plus délirants. Que dire de ces vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux, mettant à nu la vie privée des personnalités publiques parfois, ou les dérives de moments intimes entre groupes d’amis. Sauf qu’entre eux, il y a toujours une taupe pour filmer en catimini, télécharger ensuite et enfin partager sur Whatsapp.

Mais au-delà de ces extravagances, l’on peut saluer cette conscience qui s’installe petit à petit.Tout le monde fait désormais gaffe à ses gestes, craignant de faire les délices des sans scrupules qui prennent n’importe quoi pour alimenter la toile. Mais l’on peut déjà dire bravo à Whatsapp qui arrive désormais à mettre de l’ordre, sans matraque, ni menottes, encore moins du gaz lacrymogène, là où la police burundaise a du mal.

 


Élections de 2015: du « qui perd gagne » à la burundaise

Lors de l’enrôlement des électeurs pour le scrutin de 2015
Lors de l’enrôlement des électeurs pour le scrutin de 2015

 

De la Commission Electorale Nationale et Indépendante, en passant par l’opposition, c’est visiblement du raisonnement à l’envers en ce qui est de la préparation des élections.

C’est le jeu le plus simple, rentable, facile à apprendre, à jouer. Et pourtant il est pratiquement le seul à donner du fil à retordre aux Burundais, qui, apparemment, n’y voient que des étincelles. Mais sa logique est simple : réfléchir à l’envers. Aux sceptiques de se glisser dans les méandres de la cuisine interne de la CENI pour découvrir la formule de sa recette électorale : « rassurer pour enfin décevoir ». La technique ayant marché en 2010. Souvenez-vous des applaudissements de toute part vis-à-vis d’une commission consensuelle entre le parti au pouvoir le Cndd-Fdd, et l’opposition, suivis par après, hélas, du boycott de la même opposition au scrutin, des discours dubitatifs des membres de la Commission, des accusations graves de trucage des résultats,…

Et aujourd’hui le jeu, lui, est resté le même, seul la formule a, peut-être, changé: décevoir pour surprendre après. Et que voit-on ? Contestation de l’opposition dès le début du processus, une CENI plus que jamais controversée, qui vient de voir presque tous ses partenaires (société civile, partis politiques,…) se retirer de ses branches provinciales(CEPI) et communales (CECI), irrégularités pour ne pas dire des fraudes dans l’enrôlement des électeurs,…Pire, la grande coalition de l’opposition, l’ADC Ikibiri, vient de demander à la CENI de démissionner.

Même l’opposition

Non ! Ce n’est évidemment pas la spécialité de la CENI. En 2010, la même opposition, comme c’est du « qui perd gagne », s’est retirée de la course et le Cndd-Fdd, le parti au pouvoir, a tout raflé. Aujourd’hui, non seulement elle reste fidèle au raisonnement à l’envers en laissant faire la CENI, elle vient d’échouer de se mettre ensemble pour tenter de battre le parti au pouvoir.

Mais bon, comme c’est du « qui perd gagne », c’est, peut-être, la meilleure des cartes. Sauf que dans les faits, le jeu semble tourner au profit du camp adverse, le parti aux affaires, le Cndd-Fdd.

 

 

 


L’Afrique, toujours incognito

C’est mon premier constat avec deux journées à La Haye où je suis invité par le gouvernement néerlandais en tant que blogueur journaliste africain. Objet : comprendre le fonctionnement des instruments juridiques internationaux telles la Cour pénale internationale, la Cour internationale de Justice et la Cour permanente d’arbitrage.

En plein coeur de la ville de La haye
En plein coeur de la ville de La haye

Un Européen qui ignore tout sur le Burundi ? C’est normal. On digère. Mais…toute l’Afrique ? Quand même ! Là, j’ai éclaté. Une histoire aux épisodes interminables. Tout commence dès mon atterrissage à Amsterdam ce dimanche 16 novembre 2014. Jeune Africain qui nage dans un océan d’Occidentaux. Je joue le fils de la maison. Je serre les dents. Je pose peu de questions, je sais où se positionne mon chauffeur de taxi. Destination : mon hôtel, dans la ville de La Haye. Curieux, dans les autoroutes d’Amsterdam, assis sur le volant de son taxi plus confortable que les meilleures bagnoles de Buja, je dis vrai, le chauffeur lance la conversation.
Where are you coming from ? Son anglais titube comme le mien. C’est mieux. Le jeu est équilibré.

Moi : Burundi

Chauffeur : Where?

Moi : BU-RU-NDI ! J’ai envie de lui casser les tympans. Il reste gentil, ne réagit pas, et une idée me traverse l’esprit. J’enchaîne : Do you know Burundi ?

Chauffeur : No !

Moi : Is it the first time that you hear about Burundi?

Chauffeur : Yes !

Moi : What ! Il n’a peut-être pas entendu bien la question. Elle est mal formulée, oui. Les mots sont mal choisis, oui. Le niveau d’anglais n’est pas fameux, mais il a dû saisi l’essentiel me dis-je. Je repose ma question, pas de changement. Un peu choqué, je cherche une référence pour lui donner une idée de ce qu’est le Burundi. Voilà. Un nom surgit de ma petite cervelle : « Le Rwanda ! » Le chauffeur hoche la tête. Je tourne les yeux, gratte ma tempe. Et la réponse fuse : « Where people killed themselves ? ». Il ne savait visiblement que ça sur le Rwanda. Un coup de froid dans le dos, la phrase me froisse. Et le taxi arrive. Heureusement. J’ai quitté la voiture, bourré d’interrogations dont la principale : quelle image avons-nous donnée au monde ?

Même la Côte d’Ivoire ?

Comme chaque journée va avec son épisode. Mes amis ivoiriens m’offriront une belle occasion de rire un peu. C’est un peu méchant de ma part, mais…
Nous voici dans un magasin électronique devant une caissière pour régler les factures. Et cette dernière lance la conversation. Devant elle se trouvent des Africains qui parlent tout sauf l’anglais. Elle pose la question : « Are you in visit ? »
Les Ivoiriens : Yes. We come from Côte d’Ivoire. J’essaie de rectifier en soufflant dans les oreilles de l’un d’eux : « Dites Ivory Coast ». Il ne m’écoute point. « C’est la Côte d’Ivoire monsieur ! ». Ok. Je me calme. La caissière n’entend que du chinois tout comme mon chauffeur de taxi la veille. Cinq minutes plus tard : « Ivory Coast ! ». J’avais raison finalement. Sauf que la jeune fille, aux apparences d’une Indienne, ne sait visiblement rien, rien du tout, sur l’Afrique. Elle se rabat sur son ordi pour « googler » la Côte d’Ivoire. Mes amis essaient, tout comme moi avec mon chauffeur de taxi, de l’aider. Mais eux, ils ont de quoi présenter : « Drogba ! » « Who ? », rétorque la fille. « Didier Drogba ! » En Afrique tout le monde connaît Didi non ? Pourtant aucune info sur la star du foot européen de la part de la caissière. Et j’avais envie de lui demander : « Pourquoi moi je connais Van Persie, Arjan Robben, supporte Ajax d’Amsterdam dans mon petit coin à Buja? » Je digérai cette découverte, mais je rentrai cuit, mes amis ivoiriens grillés.

On attend le troisième épisode…

 

 

 

 


Mon cher Burundi, ne rate pas encore ta chance stp!

Encore une nouvelle tempête sur l’Afrique. La première, des années 60, étant passée pour balayer les colonisateurs. La seconde, un vrai ouragan cette fois-ci, qui est parti du nord pour faire escale à l’ouest (on attend la prochaine destination) est en train de faire un coup de balai à la tête de certains Etats pris en otage par le « colonisateur local ». L’ère du « printemps arabe » est révolue, aujourd’hui on rime déjà sur un probable « printemps noir ». Qu’est-ce qu’on n’entendra pas avec cette Afrique qui, visiblement, a du mal à comprendre que les mêmes causes produisent les mêmes effets ? Que n’inventera-t-on pas avec ces pays aux présidents qui ne tirent jamais des leçons de ce qui se passe chez leurs voisins ?

Mon pays

Les échos du Burkina se sont répercutés tout de go sur le Burundi. Fallait-il faire autrement ? Non. On s’y attendait. Le petit pays au cœur de l’Afrique était, à quelques exceptions près, dans la même situation que le pays des hommes intègres, tous avec des présidents tentés par un mandat jugé de trop. Un de mes billets écrits il y a quelques mois n’a apparemment pas besoin d’être actualisé pour parler de ce que risque « mon » pays en cas de forcing.

Faut-il encore attendre 50 ans ?

Un recul. Si le Burundi devait regretter une chose, c’est la mort du prince Louis Rwagasore en 1961, le héros de l’indépendance. Le pays a perdu la boussole, les chicaneries politico-ethniques ont pris place, la loi de la jungle s’est installée où le plus fort, sachant appuyer sur la gâchette que les autres, s’emparait bon gré mal gré du pouvoir. Cinquante ans d’enfer. Il vient de nous falloir un demi-siècle pour enfin avoir une autre opportunité de faire un nouveau départ. Le pays a un président élu démocratiquement. 2015, il aura fait dix ans à diriger le pays. Mais comme la « mathématique politique » a fini par devenir une science non exacte, personne ne sait plus s’il s’agit de deux mandats ou un seul. Tout en précisant tout de même que la loi souligne que cinq ans valent un mandat.
Mais au-delà de ces péripéties politiques, où tout le monde joue le con, comme s’il ignorait la finalité d’un tel jeu, une chose est sûre : une occasion en or de se remettre sur les rails pour bâtir un Etat de droit, prospère et démocratique vient de se présenter devant le Burundi. Quel président osera se laisser traverser par ce démon de s’éterniser au pouvoir si celui actuel a respecté les règles du jeu ? Mais tout se jouera en 2015, l’année charnière. Si on rate la chance, peut-être qu’il faudra encore attendre 50 ans voire plus pour espérer une aubaine pareille. Mais dans l’entre-temps, l’on pataugera encore dans nos futilités de politique sans vision, d’une économie qui ne fait que régresser… Et je ne sais pas qui l’on blâmera cette fois-ci, parce qu’il faut toujours trouver un bouc émissaire. Glauque.

 

 


J’ai fait un rêve : j’étais président !

Dans ma langue maternelle, le kirundi, le titre se traduit ainsi : Naraye ndarota ndi perezida !

1990446_cortege-sarkozyQuelle folie ? Moi, président, président de la République ! Quoi ! J’hallucine ? Non, je rêvais. Heureusement. Mais quel cauchemar au juste ? Une nuit burlesque, chargée, bourrée de fictions pourtant inspirées de la réalité, peut-être. Naturellement ça faisait des années sans commettre une bourde pareille. Rêver de la façon…me retrouver les poches pleines de billets de banque alors que je n’ai même pas un compte bancaire. Oôô… enfance quand tu nous tiens ! Ne me dites pas que je suis seul à avoir joué les Bill Gates pendant le sommeil pour me retrouver le matin, hélas, dépourvu d’un seul billet de cinquante francs bu (environ 1 centime d’euro) pour me faire ne serait-ce qu’un chewing-gum.

Et cette fois-ci, ma folie avait franchi le Rubicon. Me voici au palais (je sais même pas comment je me suis retrouvé là). Bâton de commandement au creux de ma main droite, accueillant hôtes de marque, dirigeant le Conseil des ministres, m’offrant quelques voyages, réprimant parfois les voix discordantes qui torpillent mon action tels les médias et la société civile… le quotidien d’un président quoi ! U’see ?

Quitter ou rester ?

Jusque-là, je me la coulais douce. Mais les années passaient, se succédaient, les unes après les autres. J’étais un président, mais pas un roi. La fin de mes mandats approchait. Je devrais lâcher, oui, quitter le pouvoir. C’était dur. Très dur. Je devrais faire un choix. Mon dilemme, ma situation finalement très inconfortable, faisait la Une des journaux, ma tête, qui faisait la tête, caricaturée. Mais je continuais à résister. Et pourtant mon intérieur n’arrêtait de souffler par une voix douce, inévitable et irréductible, le plus gênant des conseils : « Se maintenir au pouvoir, violant ainsi la Constitution sur la limitation des mandats, va certainement détruire les fondements de la démocratie pourtant acquis au prix du sang de mes compatriotes ». De l’autre côté, les sirènes du pouvoir sifflaient très fort m’appelant à m’accrocher. Pire, mon entourage avait tellement gaffé que quitter comme ça allait signer la fin de la récré pour enfin comparaître devant la Justice.

Mais il fallait faire un choix. Quitter ou rester ? Malheureusement mon réveil sonna, je me suis levé d’un bond, et l’histoire s’arrêta. Hélas…

P.S : Je n’ai jamais su pour quel pays j’étais président. Peut-être mon pays le Burundi, ou le Rwanda je ne sais pas, ou encore du Congo-Brazzaville… Tous étant dans la situation décrite. Mais bof…ce sont les aléas des rêves.

 


Je fus bègue, je sais ce que ça fait

Je pensais que l’histoire était définitivement enterrée. Et voilà ce 22 octobre, journée mondiale sur le bégaiement, vient de la déterrer. Je fus bègue.

Que de douleurs, de frustrations, d’angoisse quand tu veux parler et que les mots se cassent au niveau de la gorge pour finalement sortir en syllabes isolées. Voilà la déconfiture que j’ai vécue pendant plus de 20 ans. Ça me prenait parfois 10 secondes, 30, voire 1 minute juste pour dire « Maman ». Mmmmmmm…parfois je m’arrêtais par là. Je souffrais, je frappais le mur, me tournais, me retournais, pour forcer la dernière syllabe. Des fois ça marchait, d’autres fois pas.
Les camarades d’école étaient toujours là, n’arrangeant en rien les choses. Ils riaient, raillaient, me coupaient parfois la parole, fatigués de mes histoires jamais racontées jusqu’au bout. La frustration grandissait, et la peur de s’exprimer ne cessait d’enfler.

La peur ?

Oui. C’est le plus redoutable des monstres. Je garde toujours la mémoire de mes deux premières années à la fac, perdu au fond de l’amphithéâtre noir de monde d’au moins 150te étudiants, ne pouvant pas lever le petit doigt pour poser une question au professeur. J’avais été suffisamment la risée de mes camarades et je ne voulais plus ou ne pouvais plus, m’aventurer à élever la voix en public. Mais j’avais une astuce : attendre que le professeur passe au travers des rangées pour enfin poser ma petite question en toute discrétion. Et ça marchait. Je ne bégayais même pas dans ces moments.

C’est fini maintenant

Comme pour m’étouffer, bégayer fut un grand couvercle interne à mon épanouissement. Ironie du sort : de nature je suis un peu volubile. Un autre caractère aurait arrangé peut-être l’affaire. De surcroît, par passion et par conviction, à l’université je me suis retrouvé dans différents clubs d’échange et de réflexion. Il fallait parler, organiser des conférences, bref m’affronter et faire face à ma peur et à « mon » handicap. Le choix était clair : soit me dire  » Je suis bègue, c’est un sacré problème d’élocution et de communication qui me bloquera toute la vie   » ou faire fi de ce bégaiement. J’ai opté pour la seconde option. Heureusement d’ailleurs. La peur s’est volatilisée. Les railleries de l’entourage, mes frustrations, ne pesaient plus, et ça n’a été qu’une question de jours pour m’en sortir une fois pour toutes.

En définitive : Si, l’on peut surmonter ses peurs. Si, l’on peut guérir du bégaiement. Si, ce handicap peut devenir une vieille histoire. Tout est question de choix, de hardiesse, de détermination, de conviction, ou de « foi ferme », dixit les chrétiens.