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Moi je mange ça! So what?

DSCN5008Le « truc » n’a pas de nom en français. Il n’a jamais foulé le sol français pour être baptisé autrement. Les douanes et aéroports occidentaux seraient hostiles contre « ce prétendu aliment qui ne contient aucun élément nutritif » et l’obligeraient toujours à rebrousser chemin. Certains même seraient allés, confus devant cette recette si chère aux Burundais, jusqu’à l’assimiler à un explosif. Enfilée dans quelques feuilles de bananerais, la spécialité a de quoi faire douter les agents de sécurité habitués à déterrer la cocaïne et les bombes artisanales des valises suspectes. « Ubuswage », l’appelle-t-on. Et de quoi est-il fait ? Rien de spécial : le manioc uniquement. Quelques jours dans l’eau pour rendre le tubercule, mi-cuit mi-cru, beaucoup plus malléable et le faire perdre toute acidité, suivi d’une transformation en pâte et le tour est joué (à ne pas confondre avec la pâte de manioc faite à partir de la farine). Sauf qu’il y laisse également presque tout son fer et son amidon nécessaire pour la santé.
Plus qu’un aliment, un symbole culturel. Une identité. L’« ubuswage » reste l’aliment le plus consommé dans la plaine de l’Imbo, près du lac Tanganyika. L’accompagnement n’est pas n’importe lequel : le ndagala. Une espèce de poisson qu’on ne trouve que dans les eaux du Tanganyika sur toute la planète. Ah ! Autre exclusivité made in Burundi, cette fois-ci prisée sur le marché international. Une raison de plus pour vous faire saliver, vous voyageurs et touristes lors de votre passage dans ce petit pays au cœur d’Afrique.


Samuel: la poubelle, son resto

Ce qu’est, parfois, être un enfant au Burundi…

Samuel
Samuel

Sa vie tourne autour de différents marchés de Bujumbura. Samuel, 5 ans. Toujours présent en short, dit-il. Un short qui connaît toutes ses misères. Un short hors du commun. Une fripe, à la couleur qui n’a rien à avoir avec celle originale suite à la poussière, qui garde sa marque par ses deux trous à l’arrière.
Samedi 11h. En bas du marché de Kinindo (sud de la capitale). Concentré, Samuel est à la « chasse » aux ordures, plutôt de la nourriture. Il fouille de poubelle à poubelle. La tâche n’est pas facile. L’odeur est désagréable. Mais visiblement le gosse n’en sent pas la gravité.
La faim ne le lui permet pas : « La nuit je n’ai pas mangé », lâche-t-il, les traits tirés. Il n’a pas le temps d’en dire plus. Dur ! Samuel n’a encore rien trouvé d’intéressant. Il est coincé sur une construction pleine de miettes de pain, de boite-emballages de sardine,…mais la pièce est fermée. Il regarde mais ne touche pas. Il « contemple » sa « nourriture » au travers de petites aérations de la pièce. Il fait glisser sa main courte. Peine perdue, il ne peut rien atteindre. Hélas ! Samuel décide de s’en aller poursuivre sa chasse ailleurs et je le perds de vue. La suite, c’est forcément le « copier-coller » de ce quotidien des enfants qui ont fait d la rue leur demeure . Glauque !


Et si les animaux burundais parlaient ?

Transport barbare de « nos » bêtes. Pas de loi, ni d’association pour bannir la pratique…

DSCN4748Ils boivent le calice jusqu’à la lie. Ils ne résistent pas. Ils n’ont pas la force de le faire. Ils, sont ces animaux, les uns attachés tel un sac de riz, sur un vélo, d’autres « enterrés » vivants dans des camions « Fuso ». Impossible pour eux de criailler. Même la gueule est ligotée. Poussées à bout par la douleur, la peau gisante de sang, pattes fracturées suite à la cohue régnant à l’intérieur de cette pièce de quelques mètres carrés derrière la cabine du chauffeur, ces bêtes savent de quoi l’être humain est capable.

Dans différents marchés des bovins, à Bujumbura et Ngozi (au nord du Burundi), la scène est terrifiante. Une dizaine de véhicules en file d’attente. Des bêtes prêtes à se battre refusant d’être embarquées. Elles ont le flair du malheur qui les attend. Des veaux, vigoureux, combatifs, guerroient de leurs deux cornes, lâchent leur colère. Ils se battent pour « un traitement décent », mais également, galanterie oblige, pour protéger les vaches vouées au même sort. La bataille parfois dure. Mais ils la perdent toujours et finissent par se retrouver entassés à l’intérieur du véhicule.

Les âmes sensibles, bouche bée devant un tel cynisme se noient dans un océan de questions : « N’y a-t-il pas d’organisations qui défendent les droits des animaux pour élever la voix? Pourquoi n’y a-t-il pas de loi interdisant cette pratique ?… ». Interrogation après une autre. Le comble, se désolent-elles, personne n’en sent le besoin. Car pour elles, «certes la destination de ces bêtes, c’est l’abattoir », mais, « qu’elles meurent en dignité ».


Burundi: après 2015, tout sera permis…

Pierre Nkurunziza, président de la république
Pierre Nkurunziza, président de la république

Mamane s’en est moqué dans sa chronique quotidienne il y a quelques jours avec la république des tambours à l’honneur. Les réseaux sociaux se sont enflammés. Tout le monde en parlait et en parle toujours : « Pierre Nkurunziza veut briguer un troisième mandat ». Toutefois, il ne s’est jusqu’à présent prononcé ouvertement sur ses intentions. Calme mais pas silencieux, il semble s’exprimer par les actes. Ejectant de son système tout danger potentiel susceptible de faire barrage au vote de la nouvelle Constitution, tel le cas de son ex premier vice-président Bernard Busokoza, qui lui donnerait le ticket de se présenter pour la 3e fois comme candidat en 2015, le chef de l’Etat est devant le plus cuisant des dilemmes de son règne. Le feuilleton me rappelle une leçon de mon professeur à la fac qui nous montrait la formule d’un « leader » qui parvient à imposer sa loi, oppressante soit-elle, malgré les jérémiades de ses gouvernés : ne jamais lâcher-prise et le peuple finit toujours par se résigner. Sauf que ce n’est pas un dogme. Mais si elle marche en 2015, en 2020 la tentation sera moins grande, et les tractations moins fortes. Le président de la république pourra se porter candidat pour un quatrième mandat sans trop de résistance. Si aujourd’hui les opposants politiques, la société civile, les confessions religieuses, la communauté internationale, …brandissent en premier lieu le respect de l’Accord de Paix d’Arusha, selon lequel : « Il (le président de la république) est élu pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels » (Accord d’Arusha, Protocole II, article 7, point 3), que diront-ils en 2020 ? Qu’enfreindra le chef de l’État en s’offrant 20 ans de pouvoir ? A mon avis, rien. La ligne rouge c’est 2015. Après, tout sera permis…


Burundi : Pierre Nkurunziza tenté par un 3e mandat (jugé anticonstitutionnel)

Pierre Nkurunziza
Pierre Nkurunziza, président de la République du Burundi, salué par un de ses Généraux.

Dur ! Dur ! Dur…pour tout leader. Quoi de plus mal que d’entreprendre et ne pas mener à bon port ce que l’on a commencé ? Voilà à quoi serait confronté notre cher président, Pierre Nkurunziza. L’Ecole fondamentale qui fait objet de critiques de toute part. Tiré à boulet rouge par ses détracteurs sur sa politique des travaux communautaires pris par ces derniers comme une propagande sournoise du parti présidentiel. Pierre Nkurunziza voudrait peut-être un mandat de plus, de trop pour certains, pour faire mieux, se racheter, récupérer certaines erreurs. Accordons-lui le bénéfice du doute !
Sauf que d’après l’histoire, de telles « bonnes » volontés finissent toujours mal. Laissons de côté la tentation de vouloir s’accrocher sur le fauteuil présidentiel causée par les vertiges du pouvoir. Et parlons développement. La seule motivation, l’on suppose, du chef de l’Etat de vouloir se représenter en 2015. Pour y voir clair, inspirons-nous d’autres pays africains, les plus huppés du continent, il n y a pas deux ans : l’Egypte et la Lybie.
Hosni Moubarak, à la tête du pays des pharaons pendant plus de trente ans. Il a tout fait. Il s’est donné pour rendre l’économie de son pays solide. A côté, Mouammar Kadhafi. Le peuple libyen n’a eu aucun problème du pain, de bonnes écoles et d’hôpitaux de qualité pendant quarante ans. Mais ces deux hommes n’ont jamais voulu qu’il y ait alternance politique. Leurs peuples ont souffert d’une dictature sans nom jusqu’à ce qu’ils disent : « ça suffit ! ». Conséquence : tout ce qui a été construit pendant ces dizaines d’années dans ces deux pays est en train d’être détruit dans une guerre civile, entre compatriotes, due à ce mauvais « legs » politique.
Revenons à nos moutons. A quoi servirait de développer un pays, de lui doter de tout sauf l’essentiel : la stabilité institutionnelle, si l’on est bien conscient que tôt ou tard l’on sera obligé de faire machine arrière, bon gré mal gré, et parfois au grand prix, pour régler ce qui ne l’a pas été ? Le moins que l’on puisse tirer de tout ça, c’est que l’on peut faire mal en voulant faire du bien. Et le plus grand des services que Pierre Nkurunziza puisse rendre au peuple burundais, ce serait de permettre à ce pays, qui a tant saigné, d’être stable démocratiquement et politiquement en favorisant l’alternance politique. Bref, laisser les autres concourir en 2015 !


Burundi : le drame des enfants de la rue

DSCN4304La situation ne cesse de défrayer la chronique : ces enfants laissés pour compte. Sans avenir. Devant une population « laxiste » ou désarmée, le phénomène ne cesse de s’amplifier dans différentes villes du Burundi…

Que faire ? Des reportages, des documentaires, des émissions passent au quotidien, des livres, peut-être, seront bientôt publiés. « Pourquoi un reportage de plus ? Que va-t-il changer ? Qui peut apporter plus sur ce plan? » Ces questions font partie, de celles qui hantent, chaque jour, certains journalistes. Mais il convient de tout faire, pour ces enfants qui ont fait de la rue leur pourvoyeur, leur royaume.

Il suffit de  passer juste cinq minutes assis, calme, en tournant ses regards dans différentes artères de la capitale Bujumbura, l’ampleur du phénomène vous incite à briser le silence, à donner ce que l’on a, à parler et écrire, écrire encore .

Dans chaque rue on peut voir des gosses, « souriants », grisés. Inutile de revenir sur leur accoutrement. Voix étouffée par la drogue, ils font déjà partie du décor de la ville. Personne ne semble s’inquiéter. Ce n’est plus un souci ! Entassés, la nuit, devant les studios de vente de « CD et DVD », la musique les occupe, les console, les façonne et les éduque. Un véritable refuge.

C’est Noël ! ils vibrent au rythme du morceau « Gloria », ensuite Emmanuel et les Bonyemes … Ils dansent et chantent sans aucune conscience du monde qui les entoure. Ils n’ont rien à foutre avec ce monde . L’avenir ? Ce n’est pas leur affaire. Tous là, à attendre un bus qui se gare pour forcer les fenêtres des passagers dans l’espoir de voir une petite pièce de cinquante francs Cfa tomber d’une âme sensible.

Comment sont-ils arrivés là ? D’où viennent-ils ? Inutile de leur poser une fois de plus la question. La réponse  est connue : « Mon père est mort. Ma mère a été récupérée par un autre homme qui m’a renvoyé dans la rue ». Autre version : « Mon père a chassé ma mère pour se remarier avec une autre femme. La marâtre me haïssait et ne voulait pas me voir, et j’ai fui ». Que dire de plus ?

Que faire pour sauver cette génération déchirée, brisée et abandonnée ? » Les plumes n’en peuvent plus…


Entre le Burundi et le Rwanda, où aimeriez-vous vivre ?

Les accidents qui rythment la circulation dans différentes routes de l’intérieur du Burundi font partie du quotidien. Derrière cette triste réalité, un débat jaillit : celui du respect des normes entre le Burundi et le Rwanda.

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Photo : Accident d’un camion « actros » sur la RN1.

Habitués ou anesthésiés ! Ces images chocs semblent n’étonner désormais personne : tel un camion cascadeur qui se retrouve, renversé, au pied de la montagne, pneus en l’air. Telle une voiture qui roulait à tombeau ouvert, qui n’hésitait pas de dépasser dans un virage, et qui s’est faite broyer, crûment, par un poids lourd. Et que dire de ces groupuscules, totalement à genoux, désemparés, qui assistent, regards brouillés par les larmes, les dernières convulsions d’un transporteur de charbon à vélo, qui a foncé tout droit dans un ravin, cherchant à saisir l’arrière d’un camion, histoire de se faire booster sur une pente. De ces tristes spectacles, les voyageurs y trouvent matière de débat pour « agrémenter » leur chemin.

Dans les bus, commentant les faits, des pics de phrases, comme pour rabaisser le Burundi afin d’élever son « faux jumeau » coulent à flot: « Qui peut oser rouler à une telle vitesse au Rwanda ? Le Burundi est un pays du laisser-aller ! » Certaines voix vont jusqu’à charger les chauffeurs qui ont fait du « gentil » Burundi, « aux lois jamais ou difficilement appliquées », la terre qui leur permet de rattraper le temps perdu au Rwanda « dur », où on connaît la vitesse max.
Des propos jugés calomnieux par ceux qui s’érigent en protecteurs de l’image du pays. Pour eux, pas question de rester indifférent devant une telle agression. Ici, avec une moue de mépris, leur réplique, parfois prise comme simpliste : « Toujours, toujours, le Rwanda ! Mais… qu’y a-t-il de mieux que la dictature ? » Et la riposte ne tarde pas : « Si le despotisme amène à la discipline, au respect des normes, où est le mal ? » Une réponse qui ne débouche que sur une équation, irrésolue si ce n’est ranimer les discussions: celle de savoir finalement l’endroit que l’on aimerait bien habiter entre les deux pays.

Et si la question vous était posée ?


Quelle excuse pour cette génération?

imagesCette fois-ci, grande est la convoitise des jeunes africains pour ceux de Kigali qui peuvent,désormais, surfer 24h sur 24, se renvoyer des rafales de sms via les réseaux sociaux sans visiter un cyber café, ou « googler » (si l’on pouvait dire ainsi) une leçon mal assimilée en classe. La capitale rwandaise vient de révolutionner le quotidien de ses citoyens en rendant accessible la connexion internet WI-FI, gratuitement, dans les places publiques.
Burundais que je suis, la bonne nouvelle pour mes voisins m’a, au premier coup, secoué. Mais, dois-je l’avouer, je n’avais presque pas la moindre idée de ce qui venait de se passer : libre accès à des milliards de livres pour les étudiants ! Que leur manque-t-il encore ? Peut-être le courage d’en profiter, ou pis encore, la conscience de ce privilège inédit. Comprendre qu’un étudiant rwandais, via son petit smartfone, peut se connecter à la bibliothèque mondiale, qu’il peut aller loin, très loin, dans ses recherches académiques, se mettre à la pointe d’une discipline qui le passionne, me permet d’affirmer, avec toute la prudence qu’il faut, qu’il n’y a presque plus de différence entre un étudiant de Havard et celui de l’Université Kist de kigali. Trop comme affirmation ! Mais à mon avis, rien ne vaut pour un jeune friand d’apprendre davantage, d’avoir accès à « tout ». Bref, toutes les cartes sont désormais dans les mains de la jeunesse rwandaise. A eux de jouer. Et comme disent les anglais : « this generation has no excuse ! ».

J’aurais aimé que cette chance soit donnée à toute la jeunesse africaine, particulièrement à mes compatriotes. C’est le moins que l’on puisse demander à nos dirigeants. Et l’on aurait moins de grognes, j’imagine, comme quoi tel est plus chanceux plutôt que tel autre. Le dénominateur commun serait le même : accès à tout, pour s’autoformer.