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Gilbert Diendéré : la mémoire du régime de Blaise Compaoré

L’arrestation du général Gilbert Diendéré suscite de l’espoir chez beaucoup de Burkinabè. Au-delà de l’affaire du récent coup d’Etat manqué, les Burkinabè espèrent aussi voir la lumière sur d’autres dossiers pendants comme ceux de Thomas Sankara et de Norbert Zongo.

Le général Gibert Diendéré ! Même aux arrêts, l’homme suscite de la crainte pour les uns et des interrogations pour les autres. A lui seul, il détient un pan important de l’histoire récente du Burkina Faso.

Il détiendrait des informations sur plusieurs évènements que le pays a connus. Mais l’homme s’est toujours caché derrière son silence légendaire.  Ce qui est évident, pour avoir été le « bras droit » de Blaise Compaoré depuis longtemps, cet homme est une mine d’informations. Si l’on exploitait cette mine, on mettrait certainement la lumière sur beaucoup de dossiers pendants au Pays des hommes intègres. C’est un témoin clé des périodes révolutionnaires et post-révolutionnaires au Burkina Faso. « En août 1983, quand Thomas Sankara a proclamé la révolution, ils étaient trois officiers à ses côtés : Blaise Compaoré, Jean-Baptiste Lingani et Henri Zongo. Diendéré était le cinquième homme. En retrait certes, mais déjà au cœur du système », écrit Jeuneafrique.

 

Les quatre hommes forts de la révolution d'août 1983
Les quatre hommes de la révolution d’août 1983

Il est suspecté d’avoir des informations qui peuvent clarifier l’assassinat du chef de la révolution burkinabè. Le général Gilbert Diendéré, lui-même, a donné « sa version des faits » dans un livre de Ludo Martens (Sankara, Compaoré et la révolution burkinabè, EPO, 1989). « [Nous avons été prévenus] que Compaoré, Lingani et Zongo seraient arrêtés ce soir. […] Notre réaction a été qu’il fallait arrêter Sankara avant que l’irréparable ne se produise. […] Sankara tenait comme toujours son arme, un pistolet automatique, à la main. Il a immédiatement tiré et tué un des nôtres. À ce moment, tous les hommes se sont déchaînés ». Ce n’est que sa version.  Deux ans après, le capitaine Henri Zongo et le commandant Jean Baptiste Boukary Lingani sont accusés, à leur tour, d’avoir ourdi un complot pour éliminer le président Blaise Compaoré. Ils ont été passés par les armes le 19 septembre 1989.

D’ailleurs les avocats des parties civiles du dossier Thomas Sankara étaient convoqués le 17 septembre 2015 pour « prendre connaissance des conclusions des rapports de l’expertise balistique et de l’autopsie après exhumation des restes présumés » de l’ancien président. C’est la date du coup de force. Mais la mise aux arrêts du général peut faciliter l’avancée des enquêtes et lever le voile sur l’assassinat du président Thomas Sankara.

Après le coup d'Etat le général et ses soldats n'ont se sont pris aux médias
Photo J.Lompo le général et ses hommes avant l’échec du coup d’Etat

L’autre dossier, c’est celui du journaliste Norbert Zongo et ses trois compagnons. Là le général n’est pas directement impliqué. Mais étant donné que ce sont des éléments de l’ex-régiment de sécurité présidentielle qui ont mené l’opération macabre, il pourrait avoir des informations précises sur ce crime.

Mais ce n’est pas seulement sur ce genre de dossiers qu’on l’attend. Le fidèle parmi les fidèles de Blaise Compaoré peut avoir des informations aussi sur des crimes économiques ou autres malversations. C’est pourquoi certains pensent qu’il pourrait mettre en cause même certains membres du gouvernement de la transition ou des politiciens.

« J’invite la jeunesse à rester calme, à taire leur passion parce que Diendéré va nous éclairer, Diendéré va parler et il faut qu’il parle. (…) S’il disparaît, ce sera un pan entier de notre histoire qui va être enterrée. Même Blaise ne peut pas répondre à la place de Diéndéré. C’est le détenteur de l’histoire de notre pays. Si Diendéré parle, je pense que beaucoup de gens vont fuir ce pays. Que ce soit ceux qui sont dans le gouvernement de la transition ou ceux qui sont dans les partis politiques, beaucoup de gens vont fuir », soutient Valère Somé.

Alors on attend que le général Gilbert Diendéré parle. Mais pour l’instant, l’homme est accusé, entre autres d’ « atteinte à la sûreté de l’Etat», de « collusion avec des forces étrangères pour déstabiliser la sécurité intérieure », de « meurtres, coups et blessures volontaires, complicité de coups et blessures  et de destruction volontaire de biens ». En tout, celui qui s’est mis à la disposition de la justice burkinabè doit répondre à onze chefs d’accusation.


Burkina Faso : le nouveau lexique spécial coup d’Etat

Le lexique des Burkinabè s’est agrandi. Des mots que vous ne verrez jamais dans un dictionnaire : « Diendériser », « Ablasser », « Léoncer »… Mais au Burkina, ces mots ont actuellement un sens profond.

Tout en relayant les informations du putsh sur Internet, les internautes burkinabè ont tourné en dérision les acteurs de cette crise. Le tout-puissant général, a certainement eu pour son compte.

Ainsi la « diendérise » ou « diendérade » signifie désormais au Pays des hommes intègres « une grosse connerie sans pareille » comme un « coup d’Etat bête ». Les internautes ont créé aussi le verbe « léoncer ». Comprenez par-là « dormir » ou se reposer « s’assoupir pendant un événement important ». Je crois que ce mot fait allusion à Léonce Koné, vice-président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Celui-ci se serait assoupi lors de la rencontre avec les médiateurs de la Cédéao. L’autre star de ce nouveau lexique à la burkinabè est Achille Tapsoba. Ce dernier, membre du bureau exécutif national du CDP, a été arrêté par des manifestants alors qu’il serait en train de gagner le Ghana, pays voisin du Burkina. En fait il voulait « fuir ». C’est ainsi qu’« achiller » est devenu synonyme de « fuir ». Même si l’intéressé nie toute tentative de fuite, le verbe est créé.

Publication prise sur Facebook. Le tout nouveau dictionnaire ''LE PETIT ETALON'' est disponible aux éditions la RESISTANCE. Vous y trouverez des chroniques, des proverbes et surtout de nouveaux concepts. Il est gratuit – à Editions la Resistance-Burkina Faso.
Publication prise sur Facebook.
Le tout nouveau dictionnaire  »LE PETIT ETALON » est disponible aux éditions la RESISTANCE. Vous y trouverez des chroniques, des proverbes et surtout de nouveaux concepts. Il est gratuit – à Editions la Resistance-Burkina Faso.

Ce ne sont pas seulement les partisans du coup d’Etat qui ont inspiré les internautes. Ablassé Ouédraogo, du Faso autrement, en a eu pour son compte aussi. C’est vrai que depuis un certain temps ses sorties médiatiques laissaient à désirer. Sur les antennes de Rfi, le « Moagha » a soutenu l’amnistie pour les putschistes. Ce qui a enrichi le nouveau lexique des Burkinabè : « ablasser », signifierait « dire des stupidités ». Même les mots militaire et civil ont changé de signification. Désormais, il faut comprendre par « militaire » une personne ayant des armes, mais ne sachant pas s’en servir. En revanche, un civil  burkinabè est un « militaire très courageux », mais ne disposant pas d’arme. Les premiers sont accusés d’avoir mis du temps avant d’intervenir dans la crise alors que les seconds sont loués pour leur courage. Même les médiateurs de la Cédéao ont inspiré les internautes pour l’enrichissement du lexique burkinabè.  Ainsi « yayiboniser » =   faire une promesse que vous ne tiendrez pas et « mackysalliser » = ne pas dire la vérité. Le président Yayi Boni avait annoncé « la bonne nouvelle » dès le 18 septembre en parlant du projet d’accord. Ce projet d’accord a été rejeté par les populations. Ça y est ! Maintenant vous aussi, vous connaissez le nouveau lexique au Faso.

Mais chers lecteurs, c’est juste pour s’amuser après une semaine de folie. Une semaine pendant laquelle nous avons été beaucoup diendérisés et pendant laquelle on n’a pas pu léoncer comme on voulait. Au contraire on a passé le temps à achiller devant les éléments du RSP. Ceux qui sont venus aider nous ont yayibonisés. Ils nous ont même mackysallisés. La semaine était dure à telle enseigne que certains d’entre nous ont commencé à ablasser. Mais aujourd’hui, tout est en train de rentrer dans l’ordre. Je peux maintenant léoncer tranquillement.

 


Coup d’Etat au Burkina : Le CND tente de museler la presse

Plusieurs médias ont reçu la visite des éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) dès l’arrestation des autorités de la transition. Ces médias, notamment les radios ont été sommées de cesser toute émission. Ces décisions semblent donner raison à ceux qui croient que le Conseil national pour la démocratie (CND) veut faire taire les médias nationaux, souvent dans la violence.

Après le coup d'Etat le général et ses soldats n'ont se sont pris aux médias
Photo J. Lompo Après le coup d’Etat le général et ses soldats s’en sont pris aux médias

 

Faire taire toute voix discordante. C’est l’objectif visé par ceux qui tentent par tous les moyens d’annihiler l’action des médias. Après l’arrestation des autorités de la transition, les médias ont été les premières cibles de musellement du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) et le Conseil national pour la démocratie (CND). Tour à tour, ils ont procédé à une fermeture systématique des stations de radio. Surtout celles qui condamnaient le passage en force du RSP. Omega FM, Radio liberté, Ouaga FM, Savane FM pour ne citer que celles-ci, ont été forcées de cesser d’émettre.

Cette fermeture est souvent accompagnée de violence. C’est le cas de la radio Oméga FM où après fermeture, « les soldats ont mis le feu aux motos de certains journalistes », selon un animateur de la station radio. Pour m’assurer de la véracité de l’information, j’ai appelé un journaliste de cette station qui m’a confirmé, encore sous le choc que, quatre à cinq motos ont été brûlées.

Dans un communiqué, l’association des professionnels des médias a d’ailleurs condamné cette attitude. « Ils font irruption dans certaines radios et télévisions de la capitale où ils ont déjà fait arrêter manu militari les émissions, brutalisé certains journalistes ou confisqué leur matériel de travail. A la radio Oméga FM, ils ont même incendié les motos du personnel avant de quitter les lieux », explique l’association. Ouaga FM, Savane FM ont aussi connu des incendies.

La « radio de la résistance »

C’est dans ce contexte de fermeture presque totale des stations radio, qu’une autre est née: la radio de la résistance. Elle a été créée au deuxième jour du soulèvement du peuple burkinabè contre le coup d’Etat.Personne ou très peu de gens savent où elle est localisée. Dans la clandestinité, elle émet sur 108.0 FM. Durant toute cette journée, elle diffuse les messages de la résistance notamment les déclarations du président du Conseil national de la transition (CNT), Shérif Sy.

Le CNT fait figure d’Assemblée nationale puisqu’il regroupe les députés de la transition. En l’absence du chef de l’Etat, Shérif Sy, président du parlement intérimaireappelle toutes les composantes de la population à rejeter et à résister face à la forfaiture du RSP. La radio de la résistance, comme son nom l’indique, est dès lors la voix des résistants. La voix de ceux qui disent non au coup d’Etat et appellent au rétablissement du gouvernement et aux autres institutions de la transition.

Mais hélas ! Cette voix a aussi été coupée. La radio de la résistance a cessé d’émettre depuis samedi 19 septembre 2015.

La revanche des réseaux sociaux

Journalistes, activistes et autres « résistants » prennent leur revanche sur internet. La radio Oméga a pu renaître de ses cendres sur la Toile. Facebook et Twitter sont donc devenus les nouveaux canaux par lesquels, on informe et l’on s’informe.

Même si certaines de ces informations sont difficiles à vérifier, les réseaux sociaux demeurent, à l’heure où je trace ces lignes, le moyen le plus adéquat pour s’exprimer librement. Et le peuple burkinabè en profite pour contourner la censure du général et de ses bidasses. Les images de la mobilisation dans les autres villes, les déclarations à la résistances sont continuellement diffusées sur les réseaux sociaux.

Ouahigouya, Fada N’Gourma, Bobo-Dioulasso, Gaoua etc. Toutes les localités du pays montrent leur engagement et détermination contre le coup de force.

 


Situation au Burkina : le Coup d’Etat confirmé par le CND

Un homme en tenue militaire du Régiment de sécurité présidence (RSP) annonce la dissolution du gouvernement et des autres institutions. Il annonce aussi la création d’un Conseil national pour la démocratie (CND).

Le Gl Diendéré est annoncé à la tête du CND
Le Gl Diendéré est annoncé à la tête du CND

« Aujourd’hui 17 septembre 2015, les forces patriotiques et démocratiques alliant toutes les composantes de la nation et réunies au sein du Conseil National pour la Démocratie (CND) ont décidé de mettre un terme au régime déviant de la transition », a déclaré l’officier sur les antennes de la télévision nationale. C’était attendu depuis l’annonce de l’arrestation du président du Faso, de son Premier ministre et deux autres ministres. Ce que l’on redoutait vient de se confirmer. Le coup d’Etat vient d’être annoncé par un officier en tenue du Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP). L’homme annonce la dissolution des institutions du gouvernement de transition, le Conseil national de la transition (CNT) :

  • Premièrement, le Président de la transition est démis de ses fonctions –
  • Deuxièmement, le gouvernement de transition est dissous –
  • Troisièmement, le Conseil national de transition est dissous –
  • Quatrièmement, une large concertation est engagée pour former un gouvernement qui se dévouera à la mise en norme politique pour aboutir à des élections inclusives et apaisées

Ce Conseil national pour la démocratie accuse la transition d’avoir détourné la révolution des objectifs du peuple burkinabè. « Instauré à la suite de l’insurrection victorieuse du peuple des 30 et 31 octobre 2014, le régime de transition s’est progressivement écarté des objectifs de refondation d’une démocratie consensuelle ». « La loi électorale, taillée sur mesure pour des individus et décriée par les instances et les hommes de droit, se dresse alors comme un outil de négation des valeurs de notre peuple, fondées sur l’esprit de justice, d’équité et de tolérance », a-t-il poursuivi. Le CND voudrait également rassurer la communauté régionale et internationale, les partenaires au développement de sa détermination à respecter les accords qui engagent le Burkina Faso.

Il demande le soutien du peuple burkinabè : « Le Conseil national de la démocratie appelle tous les Burkinabè à soutenir activement et massivement, dans un esprit de tolérance, le processus de reconstruction engagé dans le calme, la discipline et le travail ». Pendant ce temps dans les médias internationaux, responsables politiques et de la société civile appellent le peuple burkinabè à la résistance. Il faut sauver le peuple burkinabè disent-ils en substance. Et pour cela ils appellent leurs militants, leurs partisans à rester mobilisés.

Sur la télévision nationale, des communiqués du CND annoncent la désignation du Général Gilbert Diendéré comme président, l’instauration d’un couvre-feu, la fermeture des frontières et appellent les secrétaires généraux des ministères à assurer les affaires courantes. Gilbert Diendéré est un proche de Blaise Compaoré, ancien chef d’Etat major particulier de la présidence. Il est aussi proche du président du CDP, Eddie Komboigo. Pendant ce temps, les courses poursuites continuent dans les rues de Ouagadougou et les coups de feu se font entendre dans les quartiers au moment où nous traçons ces lignes.


Burkina : une menace de boycott plane sur les élections

Décidément l’actualité politique évolue très vite à Ouagadougou. Alors que je me penchais sur les favoris de la présidentielle d’octobre 2015, une nouvelle est tombée. Le Conseil constitutionnel a déclaré inéligibles aux législatives plusieurs candidatures du parti de Blaise Compaoré et de ses acolytes.

Ils sont arrivés au siège de leur parti avec un air détendu, l’esprit serein. Certains prenaient le temps de faire le V de la victoire face aux caméras de médias étrangers présents. Mais en réalité, cette victoire n’est plus à l’ordre du jour au Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Ils viennent de recevoir un coup de massue sur la tête. A telle enseigne que les visages n’ont pas tardé à se fermer. Le Conseil constitutionnel a déclaré inéligibles aux élections législatives une quarantaine de candidatures de l’ex-majorité. Et les déclarations qui fusent ne sont pas de nature à apaiser la situation.

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Le CDP réfute la décision du Conseil constitutionnel et menace de se retirer des élections.

« Si nos membres exclus des élections ne sont pas réintégrés, nous n’irons à aucune élection. Nous n’avaliserons pas une opération de transmission du pouvoir maquillée en élections ». C’est en résumé, ce qui ressort de la déclaration liminaire du groupe du 9 avril, lue par Achille Tapsoba du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP).

Parmi les exclus deux candidats qui briguaient aussi la magistrature suprême : Gilbert Noël Ouédraogo, chef de l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) et Eddie Constance Komboïgo à la tête du CDP.

Le CDP ne compte pas rester sans rien faire. Selon les membres du parti présents à la conférence de presse, ils mèneront des actions dans les jours à venir pour que leurs candidats soient réintégrés. Si le Conseil constitutionnel semble ne pas avoir pris en compte la décision de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), l’ex-parti au pouvoir met son dernier espoir dans les mains de la communauté internationale. « Nous lançons un appel aux chefs d’Etat de la Cédéao et à la communauté internationale à faire respecter la décision de la Haute Cour de justice de la Cédéao ». Au plan national, ils mobilisent leurs militants contre cette décision : « Nous appelons nos militants à refuser avec détermination cette dérive très grave à notre démocratie », ont-ils déclaré.

Enfin, le Congrès pour la démocratie et le progrès envisage de lancer une campagne de désobéissance civile sur toute l’étendue du territoire national. « Nous appelons nos militants de même que tous les défenseurs de la démocratie, sur toute l’étendue du territoire, à entreprendre toute action entrant dans le sens de la désobéissance civile », a annoncé Achilles Tapsoba.

Reste à savoir si avec cette situation, les proches de Blaise Compaoré peuvent encore mobiliser des troupes. Qui est encore prêt à prendre des risques pour le CDP. A moins d’un mois de l’ouverture de la campagne électorale des élections couplées législatives et présidentielle, le pays a plus que besoin de calme et d’apaisement.

 


Présidentielle au Burkina : les favoris, les faiseurs de roi et les tocards

Dans un pays où le cheval est un symbole important, il n’est donc pas étonnant ni outrageux de faire une comparaison entre la course à la présidence du Faso et la course hippique. Après avoir fait partir l’homme fort, Blaise Compaoré, les Burkinabè se préparent à élire un nouveau président le 11 octobre 2015. Ils pourraient choisir parmi 22 candidats si toutefois toutes les candidatures sont validées. Mais comme au pari hippique, tous les candidats n’ont pas les mêmes performances. Il y a donc des favoris, des faiseurs de roi et des tocards.

La course pour la présidence du Faso est lancée après le départ forcé de Blaise Compoaré
La course pour la présidence du Faso est lancée après le départ forcé de Blaise Compoaré

1. Les favoris

Zéphirin Diabré de l’Union pour le changement (UPC), créée seulement en 2010. L’ancien chef de file de l’opposition a le mérite d’avoir réorganisé l’opposition pour dire non à la mise en place du Sénat et à la modification de l’article 37 de la Constitution. Ministre du Commerce, de l’Industrie et des Mines de Blaise Compaoré entre 1992 et 1994, Il a par la suite occupé des postes importants à l’international : directeur Afrique et Moyen-Orient d’Areva (2006-2011), directeur général adjoint du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), à New York, de 1999 à 2006. « Zeph » est considéré comme le candidat favori.

Rock Marc Christian Kaboré. Il se présente sous la bannière du Mouvement pour le peuple (MPP). Pendant le règne de Blaise Compaoré, il a occupé l’important poste comme premier ministre et a été président de l’Assemblée nationale . C’est en janvier 2014 que Rock Marc Christian Kaboré, Salif Diallo et Simon Compaoré ont quitté le navire Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) pour créer leur parti. Ils sont considérés comme ceux qui ont participé activement à asseoir la domination de l’ancien parti au pouvoir. Ils ont réactivité leurs anciennes bases et il faudra compter avec eux pour cette présidentielle.

2. Les faiseurs de roi

  • Ablassé Ouédraogo, du Faso autrement. Sauf surprise, y compris pour lui-même, il ne sera pas élu. Mais il pourra être utile aux autres candidats en cas de deuxième tour. Il a été ministre des Affaires étrangères et occupé des postes internationaux.
  • Eddi Komboïgo est le candidat du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), l’ancien parti de Blaise Compaoré. Eddi Komboïgo est perçu comme un candidat par défaut. L’homme serait un ami intime de Gilbert Diendéré, ancien chef d’état-major particulier et bras droit de Blaise Compaoré. En dépit de la situation défavorable, le CDP pourrait quand même jouer un rôle important en cas de second tour.
  • Gilbert Noel Ouédraogo est le candidat de l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) (ADF/RDA). Le parti de l’éléphant a perdu sa force dans les évènements des 30 et 31 octobre 2014. Fils de l’ancien premier ministre Gérard Kango Ouédraogo, à 46 ans Gilbert Noël se présente pour la première fois après avoir soutenu la candidature de Blaise Compaoré à deux reprises.
  • Ces deux partis alliés n’ont peut-être plus la force de conquérir le pouvoir, mais ils peuvent aider à le conquérir.
  • Me Bénéwendé Stanislas Sankara de l’Union pour la renaissance/ Parti sankariste (UNIR/PS) sera probablement faiseur de roi. Il s’est fait connaître en défendant les dossiers sérieux comme ceux de Thomas Sankara et de Norbert Zongo. Ayant activement participé à la lutte contre la modification de l’article 37, il est en mesure de rallier des électeurs, mais pas en nombre suffisant pour le conduire au palais présidentiel. Sa tentative de regrouper les autres partis sankaristes autour de sa candidature a échoué. Il pourrait bénéficier du soutien de Mariam Sankara, la veuve de Thomas Sankara. Il a déjà été candidat aux présidentielles de 2005 et 2010.

3. Les tocards

  • Adama Kanazoe. Membre de l’Alliance des jeunes pour l’indépendance et la République (AJIR), trentenaire,il est appelé à jouer un rôle important dans un proche avenir. Mais cette année, la course sera très difficile pour ce jeune étalon.
  • Issaka Zampaligré est un candidat indépendant. Sauf séisme, ce cinquantenaire ne devrait pas terminer premier de la course à la présidence du Faso.
  • Françoise Toe, Victorien Tougma, Salvador Maurice Yaméogo partent d’ores et déjà perdants pour cette élection. Candidats indépendants méconnus ou de partis politiques peu connus, ils pèseront peu, même en cas de jeux des alliances.


Deux anciens dignitaires de Blaise Compaoré mis aux arrêts au Burkina

Jérôme Bougma et Jean Bertin Ouédraogo sont transférés à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (Maco). Ces anciens ministres de Blaise Compaoré sont accusés de détournement de deniers publics et d’enrichissement illicite.

Ils avaient déjà été interpellés en avril 2015, mais relaxés pour vice de forme. L’ancien ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité, Jérôme Bougouma et l’ancien ministre des Infrastructures, du Désenclavement et du Transport, Jean Bertin Ouédraogo ont été arrêtés et transférés à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (Maco) le 14 août 2015. Le troisième, Arthur Kafando ancien ministre du Commerce qui devrait aussi être entendu par la Haute Cour de justice ne s’est pas présenté. Il aurait quitté le pays.

 

Ces anciens ministres sont accusés de détournements de deniers publics et d'enrichissement illicite
Ces anciens ministres sont accusés de détournements de deniers publics et d’enrichissement illicite

Ils sont tous accusés de détournement de deniers public et d’enrichissement illicite. Jérôme Bougouma, ancien ministre de l’Administration du territoire et de la Sécurité est accusé de détournements de deniers publics et d’enrichissement illicite portant sur la somme de trois milliards de francs CFA. L’ancien ministre des Infrastructures, Jean Bertin Ouédraogo est accusé de  détournement de deniers publics et enrichissement illicite portant sur 1.000.000.000 FCFA ». Les charges retenues par le Conseil national de la Transition contre l’ancien ministre du Commerce, Arthur Kafando sont : « faux et usage de faux, détournement de deniers publics portant sur la somme de 78.865.595 FCFA ». Ils risquent 5 à 20 ans de prison s’ils sont reconnus coupables des faits qui leur sont reprochés.

En avril dernier, ils avaient été relaxés parce que les membres de la Haute Cour de justice, la seule habileté à juger les anciens ministres sur des faits commis dans l’exercice de leur fonction,  n’étaient pas installés. Mais cette cour composée a été installée le 17 avril 2015.

Ces trois personnalités du régime de Blaise Compaoré ne sont pas les seuls. D’autres dossiers seraient en cours contre d’autres dignitaires dont Blaise Compaoré lui-même et son premier ministre Luc Adolph Tiao. Ils sont accusés de  « coups et blessures volontaires, assassinats et complicités de coups et blessures et d’assassinats ».

 


Le président maintient Zida au poste de premier ministre

Son message était attendu des Burkinabè. Le suspense n’a pas trop duré, il a pris fin le 16 juillet. Le président Michel Kafando a tranché en faveur du premier ministre Isaac Zida dans la crise qui opposait ce dernier au Régiment de sécurité présidentielle (RSP).

Le premier ministre Yacouba Isaac Zida va rester à son poste jusqu’à la fin de la transition. C’est du moins, la décision que le président, Michel Kafando, a prise après les travaux du cadre de concertation des sages.
Le président du Faso a, ainsi, maintenu Zida en dépit de la pression de ses frères d’armes qui exigeaient le retrait de tous les militaires du gouvernement de transition. Il a estimé que le retrait des militaires du gouvernement mettrait à mal la transition. Et saperait le processus de transition à trois mois des échéances électorales.
Il a par ailleurs opéré quelques remaniements au sein du gouvernement. Le ministère de la Défense qui était jusque-là détenu par le premier ministre reviendra au président du Faso lui-même. Le ministère de l’Administration territoriale et de la Sécurité, détenu par Auguste Barry, un autre militaire proche de Zida sera divisé en deux : un ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation, et un ministère de la Sécurité. Ces remaniements éviteraient, les militaires frondeurs à avoir à exécuter les ordres de ceux qu’ils contestent.
Et le président d’appeler les militaires à plus de responsabilité. Il a déclaré : « Je le dis tout net, il n’est pas juste que pour des intérêts divergents, notre armée nationale dont c’est la mission de protéger la paix au Burkina Faso, en vienne à être le perturbateur de la paix au Burkina Faso. Où est donc cette armée nationale, cette armée modèle à laquelle on se réfère tant dans les missions de maintien de la paix à l’extérieur ? ».
Cela va-t-il calmer les militaires ?
Rien n’est moins sûr. Jusque-là, aucune raison objective des exigences de RSP n’a été communiquée. Donc difficile de savoir si cette décision du président Michel Kafando va leur plaire ou pas. Ce qui est sûr, l’armée était partie prenante du processus de transition tripartite. A savoir les partis politiques, la société civile et l’armée. Ce sont ces trois entités qui forment le gouvernement de transition et le Conseil national de la transition qui fait office d’Assemblée nationale. Le retrait d’une entité de ce processus ne ferait retarder les élections prévues le 11 octobre 2015 et miner la transition.
Le parti de Blaise Compaoré s’était aligné immédiatement derrière le RSP amenant certains à conclure qu’ils agissent ainsi pour le report des élections. Ce qui permettra à l’ancienne majorité de mieux se préparer pour les élections. Si cela est avéré, c’est que dans quelques jours nous aurons encore d’autres revendications. Le président dans son discours a précisé que, les militaires par leurs agissements, ont mis la transition en péril trois fois en huit mois. Ce qui va croire à certains que les bidasses du RSP agissent sous l’ordre des gens qui n’ont pas intérêt à ce que la transition achève sa mission.

Photo_afriquenewsinfos Le président Michel Kafando va jouer encore le médiateur dans cette crise.
Photo_afriquenewsinfos
Le président Michel Kafando maintient Zida à son poste de premier ministre pour sauver la transition.

 Un contexte tumultueux
Cette décision intervient dans un contexte où la Cédéo demande à l’Etat du Burkina Faso de recadrer l’article 135 du code électoral qui « exclurait » beaucoup de personnes. Le président a assuré que le Burkina sera respectueux de ses engagements internationaux. Mais les proches du président déchu ne réjouissent pas pour autant. Les dignitaires de l’ancien régime : Blaise Compaoré et une douzaine de ses ministres sont mis en accusation. Le Conseil national de la transition a adopté une résolution portant accusation de détournements de deniers publics, enrichissements illicites, et même assassinats et complicité d’assassinats.


La Cédéao condamne le Burkina pour son nouveau code électoral

Les partis politiques de l’ancienne majorité crient victoire. La Cédéao (Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest) a jugé le nouveau code électoral du Burkina exclusif notamment en son article 135. C’est ce texte qui empêchait les personnes ayant soutenu Blaise Compaoré dans sa volonté de modifier la Constitution de se présenter aux élections à venir. Une victoire à relativiser tout de même.

La Cour de justice de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest a jugé que le nouveau code électoral du Burkina « exclusif ». Le verdict qui est tombé d’Abuja dans la matinée du 13 juillet 2015 sonne comme une victoire de l’ex-majorité avec à sa tête le parti de Blaise Compaoré, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP).

Le nouveau code stipulait en son article 135 que « toutes les personnes ayant soutenu un changement anticonstitutionnel qui porte atteinte au principe de l’alternance démocratique notamment au principe de la limitation du nombre de mandats présidentiels ayant conduit à une insurrection ou à toute autre forme de soulèvement» ne pouvaient participer aux élections à venir.

Cet article excluait donc toutes les personnes qui ont soutenu Blaise Compaoré dans sa tentative de modification de l’article 37 de la Constitution pour se représenter. Cette disposition a été attaquée par 7 parties de l’ancienne majorité et 13 personnalités auprès de la Cour de justice de la Cédéao.  Le 13 juillet 2015, la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest a estimé que le Burkina Faso est en « violation flagrante des droits de l’homme, des libertés d’opinion, y compris politiques, notamment  la liberté de participer aux élections et d’être élu ». Les ténors des partis de l’ex-majorité peuvent donc se frotter les mains. Car ils pourraient participer aux élections présidentielle et législatives du 11 octobre 2015.

Décision ambiguë

La Cour de justice de la Cédéao ne demande pas au Burkina Faso d’abroger la loi, juste la limiter. « Elle précise que des restrictions peuvent exister mais qu’elles ne peuvent concerner que les dirigeants de l’Etat qui étaient au pouvoir au moment des faits ». Alors que dans le camp CDP, l’on se réjouit, du côté de la défense, on prend acte. « Ce qu’on nous demande, c’est simplement de recadrer la loi, pour qu’il n’y ait pas d’exclusion massive » explique l’avocat de l’Etat du Burkina Faso, Me Guy Hervé Kam.

La décision de la Cedeao fait des heureux dans le camp de l'ex-majorité
La décision de la Cédéao fait des heureux dans le camp de l’ex-majorité

Il faudrait néanmoins préciser le terme « les dirigeants au pouvoir au moment des faits ». Si les ministres de l’ancien régime sont des « dirigeants au pouvoir au moment des faits », (alors que la partie n’est pas totalement gagnée pour certains), Djibril Bassolé, ancien ministre des Affaires étrangères de Blaise Compaoré serait donc exclu des élections. Et si les députés ayant soutenu la tentative de modification de la Constitution sont des « dirigeants au pouvoir au pouvoir au moment des faits », alors le candidat du CDP nouvellement investi sera exclu.

Cette décision intervient à trois mois des élections présidentielle et législatives. Mais aussi dans un contexte d’investiture de différents candidats à la présidentielle du 11 octobre 2015.

 

 


Burkina Faso : la crise perdure entre Zida et le RSP

Les négociations pour trouver une sortie de crise favorable entre le régiment de sécurité présidentiel (RSP) et le premier ministre Yacouba Isaac Zida n’ont pas encore abouti. C’est ce qui ressort du discours du président Kafando adressé à la nation.

La crise perdure entre le premier ministre Yacouba Isaac Zida et ses frères du RSP. Et la médiation entreprise par le président Michel Kafando n’a pas fait bouger les lignes. Chacun est resté campé sur ses positions. Le président a tenté de réconcilier les deux parties, mais « Hélas ! Je suis au regret de le reconnaître, tous ces contacts ne m’ont pas donné la certitude que les différents protagonistes étaient prêts à accepter ce compromis dynamique qui puisse amener à l’apaisement social », a-t-il reconnu .

Le président Kafando fait donc appel aux sages pour régler ce différend qui menace la transition au Burkina Faso. Un cadre de concertation des sages est mis en place. A l’exemple du Collège des sages,  il est composé de personnes de grande moralité dont le dénominateur commun est la sagesse, la probité, l’amour de la patrie. C’est à l’issue des travaux de ce conseil que le président prendra une décision.

Sauver le pays du chaos

Le président Michel Kafando préconise le dialogue pour une sortie de crise. Mais il estime que le consensus social sur lequel est fondée la transition doit être sauvegardé et consolidé surtout à trois mois des élections devant conduire le Burkina Faso au retour à une normalité républicaine, et de souligner : « L’intérêt général c’est sauver le Burkina du chaos ».

Mais si les protagonistes ne savent plus c’est que le patriotisme, le président, prévient que : « Les fauteurs de trouble répondront devant l’histoire et évidemment, devant les juridictions internationales ».

Le président Kafando fait appel aux Sages pour une sortie de crise entre Zida et le RSP
Le président Kafando fait appel aux sages pour une sortie de crise entre Zida et le RSP

A quoi joue le RSP ?

Jusque-là, la transition a connu des manquements, mais rien n’avait aussi obstrué sa mission que cette exigence du RSP : la démission du premier ministre et tous les autres militaires du gouvernement de transition à trois mois des élections présidentielle et législatives. Comment une fraction de l’armée peut-elle vouloir influencer la politique d’un pays au point de remettre en cause un consensus national et soutenu par des instances internationales ? On sait que ce qui les inquiétait c’est la dissolution de leur régiment.

Les hauts-gradés doivent mettre de l'ordre au sein du RSP
Les hauts gradés doivent mettre de l’ordre au sein du RSP

Mais depuis quelque temps, il semble que cette dissolution n’est plus souhaitée. Alors pourquoi le RSP agit-il contre l’intérêt général du pays ? Point besoin d’être un analyste politique pour savoir que la démission du premier ministre ou la dissolution du gouvernement va compromettre la réussite de transition. Et malgré tout il y a des gens qui brandissent des armes acquises par l’argent du contribuable pour mettre en péril le pays.

Faut-il voir la main de l’autre sur cette affaire ? Rien n’est moins sûr. Pour les OSC, il est même évident que c’est un complot orchestré par l’ancienne majorité qui veut mettre en mal la transition et se repositionner.

Mais au point où nous en sommes, il est mieux de marcher d’un même pas. Du moins pour retrouver une situation normale. Ceux qui se déchirent, qui crient pour mettre en danger le pays ne réussiront pas. Cela a été un échec hier, pour ceux qui pensaient qu’il n’y a qu’une seule personne pour diriger le Burkina Faso.

 

 


Burkina : les militaires du RSP se font entendre encore!

Alors que le débat continue sur sa dissolution « pure et simple » ou sa transformation, le régiment de sécurité présidentiel a encore fait parler de lui. Les militaires de la garde présidentielle ont tiré en l’air le 29 juin 2015 pour manifester contre l’interpellation de trois de leurs camarades par la gendarmerie nationale.

Le régiment de sécurité présidentiel ne décolère pas. Ils se sont exprimés, comme d’habitude, depuis le départ de leur géniteur, le président Blaise Compaoré. Cette fois-ci, l’élite de l’armée burkinabè, s’insurge contre l’interpellation de trois de ses membres. Ce sont le chef de corps, LCL Céleste Joseph Coulibaly, les capitaines Dao Abdoulaye et Kaboré Flavien. Les auditions se sont tenues de 12 h à 16 h 30 sur la base d’une rumeur non fondée de projet d’arrestation du PM à son retour de Taïwan. Sur sa page Facebook,  le régiment assure que les raisons de cette audition ne sont pas fondées. Par ailleurs le RSP a voulu une fois de plus exprimer son ras-le-bol face aux voix qui s’élèvent pour sa dissolution.

Photo_Info.net Devant le Conseil national de transition, le premier ministre Isaac Zida avait déclaré qu'il n'était pas pour la dissolution du RSP
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Devant le Conseil national de transition, le premier ministre Isaac Zida avait déclaré qu’il n’était pas pour la dissolution du RSP

Le torchon brûle entre Zida et ses frères d’armes

Le mouvement de lundi n’est pas le premier. Déjà, en février, le corps le plus armé de l’armée burkinabè avait exigé le départ du premier ministre Isaac Zida suite à l’affectation de leurs membres dans d’autres garnisons. Mais comment la force sur laquelle Zida s’est appuyé pour prendre le pouvoir suite à la chute de Blaise Compaoré lutte aujourd’hui contre lui ? La réponse est simple. Le premier ministre s’est certainement attiré la foudre de ses anciens camarades en se disant favorable à la dissolution de ce corps lors l’anniversaire de l’assassinat de Nobert Zongo le 13 décembre 2014. Mais depuis, il a réaffirmé l’importance de cette entité de l’armée pour le pays.

Cette fois encore les militaires du RSP demandent le départ du premier ministre Isaac Zida et de tous les militaires du gouvernement de transition.

Le RSP représente aujourd’hui aux yeux de beaucoup de Burkinabè, l’instrument par lequel Blaise Compaoré a châtié son peuple. Les noms de certains membres du RSP reviennent dans des crimes commis pendant le régime notamment celui de David Ouédraogo, chauffeur de François Compaoré ou du journaliste, Norbert Zongo.

Photo_afriquenewsinfos Le président Michel Kafando va jouer encore le médiateur dans cette crise.
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Le président Michel Kafando va jouer encore le médiateur dans cette crise.

Médiation entre Isaac Zida et le RSP

Une fois de plus, le président de la transition, Michel Kafando, va essayer d’accorder les violons entre le premier ministre Isaac Zida et les frondeurs du RSP. Il est soutenu dans cette tâche aussi noble qu’urgente par l’ancien de chef de l’Etat, Jean-Baptiste Ouédraogo et de l’ex-chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré, le Gl Gilbert Diendiéré. L’avenir de la transition pourrait dépendre de cette médiation. Aujourd’hui le départ d’Isaac Zida et des autres militaires du gouvernement de transition ne ferait que mettre la transition en retard.

Faut-il dissoudre le RSP ou pas ?

La question passionne les débats au Burkina Faso depuis la fin du régime de Blaise Compaoré. Mais elle est difficile à trancher. Une dissolution réclamée par une partie de la population et certains mouvements de la société civile comme le « balai citoyen ». « Le balai citoyen » avait réaffirmé la nécessité de dissoudre ce mouvement il y a à peine une semaine. Cette problématique avait obligé le gouvernement à mettre en place une commission chargée de la question. Aujourd’hui le rapport de cette commission est sur la table du président. Mais il n’y a pas encore une action concrète.

Le RSP est aujourd’hui l’unité de l’armée burkinabè la plus équipée et la mieux formée. Pour cela sa dissolution pourrait affaiblir la sécurité du pays. A un moment où les groupes armés agissent dans les pays voisins, dissoudre le RSP reviendrait à faire disparaître le corps de l’armée. Pourtant ils sont nombreux à réclamer la dissolution cette entité de l’armée burkinabè. C’est pourquoi, d’autres pensent qu’il serait  mieux tout simplement de transformer ce corps de l’armée en une force antiterroriste ou à d’autres tâches et non celles de la garde présidentielle. Ce nouveau mouvement du RSP va raviver le débat sur la sa dissolution ou non ! Mais pour cela aussi il faut que le RSP sache qu’il est au service du peuple burkinabè et ne doit pas servir des intérêts d’individus aux intentions revanchardes. Le RSP doit comprendre aussi que la dégradation de la situation ne lui profite pas. Seule la paix profitera à tous.

 


Présidentielle 2015 au Burkina : Ablassé Ouédraogo déjà hors jeu

Ablassé Ouédraogo est l’un des candidats à la présidentielle d’octobre 2015 au Burkina. Mais sa dernière sortie médiatique a été plutôt une contre performance, pour celui qui veut diriger tous les Burkinabè. En prenant pour atout son appartenance religieuse et ethnique, il s’est attiré la foudre d’une partie de l’électorat burkinabè.

Il nous avait habitués à des envolées lyriques. Mais, cette fois-ci, l’ancien ministre des Affaires étrangères s’est « tiré une balle dans la tête ». Du point de vue politique bien sûr. Investi candidat de son parti, Le Faso autrement, Ablassé Ouédraogo a préféré mettre en avant son ethnie et sa religion pour accéder au palais de Kosyam. Selon lui, il a trois aouts principaux. « Je suis Moagha du plateau central, et les Mossis sont une forte composante du Burkina Faso. Je suis aussi musulman, ce qui n’est pas rien dans un pays où 70% des gens le sont également. Enfin, comme je vous l’ai dit, j’ai un vaste réseau de relations utiles dans le cadre de la diplomatie de développement que nous souhaitons mettre en place ».

Cette déclaration n’a pas plus à tous. On lui en veut pas d’être de l’ethnie moagha, ni d’être musulman. Mais pour quelqu’un qui aspire à diriger le Burkina Faso, qui compte plusieurs religions et une soixantaine d’ethnies, c’est plutôt mal pensé. En plus, le Burkina Faso est un Etat laïque. On ne peut donc pas se fonder sur de telles conceptions pour conquérir le pouvoir. Il n’est d’ailleurs pas le seul de l’ethnie moagha à se présenter à cette élection et ne sera pas non plus le seul musulman candidat à la présidentielle. De telles allégations sont de véritables poisons pour un pays comme le Burkina Faso. C’est pourquoi ces propos ont été condamnés par des citoyens de différentes religions et ethnies. Cela a contraint le « fils du paysan » à recadrer son intervention.

Ablassé Ouédraogo compte sur son appartenance ethnique et religieuse pour arriver au pouvoir
Ablassé Ouédraogo compte sur son appartenance ethnique et religieuse pour arriver au pouvoir

Mais comment Ablassé Ouédraogo, diplomate de son Etat, a pu tenir de  tels propos ? On ne peut pas dire que cela n’a pas été réfléchi avant d’être dit. Ce n’est pas fortuit. Non. Quelque part, je crois qu’il est convaincu de ce qu’il a affirmé. Il croit que pour être président du « Pays des hommes intègres », il faut être Moagha et musulman.

Si cela était avéré, il pouvait s’estimer heureux. Du moins, il aurait plus de chance de parvenir à Kosyam. Les principaux favoris de cette élection seraient d’office écartés. Roch Marc Christian Kaboré, du Mouvement pour le peuple (MPP), est Moagha mais il est chrétien. Zéphirin Diabré de l’Union pour le changement, est aussi annoncé comme favori à cette élection. Mais selon Ablassé, il ne passera pas puisqu’il n’est ni Moagha ni musulman. Bénéwendé Stanislas Sankara, porté par le front sankariste serait aussi écarté parce qu’il n’est pas musulman. Si l’on écartait tout ce monde, Ablassé serait favori. Mais hélas ! Le peuple burkinabè ne se laissera pas diviser par des propos d’hommes politiques qui se soucient plus du pouvoir que de la cohésion sociale, qui est gage de tout développement. Le pays est dans une situation critique et nous n’avons pas besoins d’autres crises fondées sur la religion et l’ethnie.

Il est temps que tous les candidats présentent comment peuvent faire pour sortir le pays de la pauvreté, au lieu de jouer sur la fibre religieuse et ethnique, source de conflit. En s’aventurant sur ce terrain, Ablassé s’est fait plus de mal que de bien. Il est un économiste et homme politique. Il a occupé successivement les postes de ministre des Affaires étrangères et de conseiller du président de la République, Blaise Compaoré, avant d’assurer les hautes fonctions de Directeur Général Adjoint de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Si, avec cela, il ne peut pas proposer un programme de développement pour le pays et préfère compter sur son appartenance ethnique et religieuse, alors ce n’est pas la peine d’être candidat à la présidentielle !

 


Burkina : le CSC va lever la suspension des émissions d’expression directe

Le Conseil supérieur de la communication (CSC) avait suspendu les émissions d’expression directe des antennes et des télévisions du Burkina. L’instance supérieure de la communication, au Burkina Faso, avait prétexté la recherche de la paix et de la cohésion sociale.

C’est une des décisions les plus impopulaires que le Conseil supérieur de la communication a prise depuis l’arrivée de sa nouvelle patronne, Nathalie Somé. L’instance de régulation a décidé de suspendre toutes « les émissions d’expression directe sur les radiodiffusions sonores et télévisuelles à l’exception des programmes portant sur la santé et ceux à caractère ludique, sentimental et culturel ». Et ce pour une durée de trois mois à compter du 7 mai 2015.

Cette décision a été motivée par « le souci d’assurer un climat apaisé et propice à la cohésion sociale en cette période sensible de la vie de notre pays ». Selon le CSC, en dépit de ses actions de sensibilisation auprès des animateurs, de nombreux dérapages ont été constatés à l’écoute de certaines émissions. Mais la mesure n’a pas été du goût des professionnels des médias et auditeurs. Plusieurs voix ont fait entendre leur désapprobation. L’Association des journalistes du Burkina par exemple, a qualifié cette suspension de liberticide.

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Le Conseil supérieur de la communication va revenir sur la suspension desémissions directes.

Après plusieurs concertations avec les promoteurs et acteurs des médias. le Conseil supérieur de la communication affirme que cette suspension sera levée. Le CSC a élaboré un projet de décision portant réglementation des émissions d’expression directe et un projet de charte de bonne conduite desdites émissions qui prennent en compte les propositions faites à l’issue de concertations.

Ces projets seront amendés et signés par les promoteurs et acteurs de médias. Tout cela doit être fait avant le 28 mai. Et le 30 mai, le CSC devrait procéder à la levée de la suspension.

S’il y a des radios qui ont péché dans la réalisation d’émissions d’expression directes, elles doivent être sanctionnées. Mais on ne peut sanctionner toutes les radios parce que certaines n’ont pas respecté les règles en la matière. Il est vrai que dans la réalité, beaucoup d’animateurs ignorent volontairement ou non les règles. Mais on ne peut sanctionner tous les médias pour les erreurs de quelques-uns.

Le projet de la charte de bonne conduite, que les promoteurs doivent amender, devrait créer un cadre réglementaire pour l’animation de ces émissions.


Smockey: « Après ta révolte, ton vote »

C’est le message de l’artiste musicien Smockey à la jeunesse burkinabè. « Après ta révolte, ton vote », est une campagne à travers laquelle le rappeur veut inciter les jeunes burkinabè à participer aux futures élections après avoir largement participé au soulèvement populaire d’octobre 2014.

Le rappeur Smockey veut encourager les jeunes à participer au choix des futurs dirigeants du pays. Pour cela, il les encourage à travers sa campagne dénommée « après ta révolte, ton vote », à s’inscrire massivement sur les listes électorales. On le sait, ce sont surtout les jeunes qui ont contribué à la chute du pouvoir de Blaise Compaoré.

Pour que cette lutte ne soit pas vaine, Smockey les invite non seulement à s’inscrire sur les électorales mais surtout à prendre part au choix du président et des députés le 11 octobre prochain. Les jeunes sont les plus nombreux de la population burkinabè, mais ils sont le plus souvent oubliés après les votes. Leurs préoccupations aussi.

Photo/lefaso.net L'artiste Smockey (micro) à l'annonce de sa champagne "après ta révolte, ton vote"
Photo/lefaso.net
L’artiste Smockey (micro) à l’annonce de sa champagne « après ta révolte, ton vote »

Ces élections, l’une des plus ouvertes depuis trente ans, sont donc une occasion pour les jeunes de faire compter leurs voix. A travers deux grands concerts « sans exclusions » à Bobo Dioulasso et à Ouagadougou, Serge Bambara (Smockey à l’état civil) a conscientisé les jeunes sur l’importance de leur vote. Il est soutenu dans cette initiative par d’autres artistes nationaux et étrangers.

Smockey est l’un des membres du balai citoyen. il a milité activement dans ce mouvement contre la modification de l’article 37 de la Constitution burkinabè. Ce qui donnait la possibilité à Blaise Compaoré de se représenter alors qu’il était au pouvoir depuis 27 ans.

Il a fait sortir son dernier album il y a quelques semaines. Un album largement influencé par la situation nationale. Son album de 31 titres, est baptisé « Pré’volution ». Connaissant son influence et celui du balai citoyen, cette campagne pourrait amener beaucoup de jeunes à, effectivement, s’inscrire pour participer aux votes de cette pré-insurrection populaire.


Burkina : interpellation de dignitaires du régime Compaoré

Après les mises en garde, le gouvernement de transition est passé à l’acte. Huit dignitaires du régime de l’ancien président Blaise Compaoré ont été interpellés par la police. Ils sont accusés entre autres, d’atteintes à la sûreté de l’Etat, activités politiques illégales, troubles à l’ordre public et incitations de troubles à l’ordre public, de malversations, de mauvaise gestion de projets.

Eux ce sont des proches de Blaise Compaorél, l’ancien président contraint de quitter le pouvoir en octobre 2014 alors qu’il tentait de modifier la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Aujourd’hui les membres de son gouvernement et certains cadres de son parti, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) ont été interpellés par la police. Parmi eux, il y a trois anciens ministres.

Salif Kaboré ex- ministre des Mines- et proche de François le frère du l’ancien présiden t-. est soupçonné de malversations et mauvaise gestion présumées à la Sonabel et dans certaines structures du ministère des Mines et de l’Energie. Il lui est reproché aussi l’octroi illicite de permis d’exploitation des mines, exploitation illicite de sites miniers et mauvaise gestion de projets.

Quant à l’ex-ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité, Jérôme Bougma, il a été interpellé pour malversations présumées dans les attributions de marchés publics, réquisition de l’hôtel Azalaï qui a été saccagé au cours de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

La troisième personnalité est Ouedraogo Jean Bertin conseiller politique du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Il a été arrêté pour surfacturations présumées et malversations présumées dans l’exécution des marchés de travaux publics. Deux ex- maires sont tombés aussi sous le coup de ces arrestations. L’ancien maire de Bobo, Salia Sanou, connu pour ses déclarations tonitruantes et sa fidélité sans faille à Blaise Compaoré ainsi que Adama Zongo, ex-maire de Tanghin Dassouri;.

Cette interpellation de 8 personnes intervient dans le contexte du vote du nouveau code électoral par le Conseil national de la transition (CNT). Un code que les partisans de Blaise Compaoré ne voulaient pas parce qu’ils écartaient pour les élections à venir, tous ceux qui ont soutenu ouvertement la modification de l’article 37 de la loi fondamentale qui a conduit le pays dans une situation difficile.

Selon les autorités policières, les investigations vont se poursuivre dans les jours à venir.


Grèves au Burkina: délestages et pénurie de bière en perspective

Le Burkina Faso est confronté à une série de grèves depuis plusieurs semaines. Différents secteurs sont concernés par ces multiples mouvements qui ont déjà occasionné une flambée du prix de la bière et des délestages à Ouagadougou.

Des travailleurs de différents secteurs d’activité ont entrepris des grèves pour améliorer leurs conditions de vie et de travail. C’est le cas des travailleurs de la Société de distribution de boissons (Sodibo) la Brasserie du Burkina (Brakina) et de l’Union des transporteurs et des routiers du Burkina.

L’heure de la grève semble avoir sonné au Burkina Faso. Après la grève pour la baisse du prix du carburant à la pompe, c’est autour de chaque secteur d’activité de battre le pavé. Ces derniers jours sont marqués par la grève des travailleurs de la Société de distribution de boissons (Sodibo), de la Brasserie du Burkina (Brakina et celle de l’Union des chauffeurs et routiers du Burkina Faso. Les chauffeurs et routiers observent une grève depuis le 30 mars 2015, et ce pour 48 heures. Ces derniers exigent le respect de la convention collective signée en 2010 et qui devait entrer en vigueur depuis le 1er janvier 2011.  Selon l’Union des chauffeurs et des routiers du Burkina, cette convention collective n’est pas encore appliquée. L’autre point de leur plateforme revendicative porte sur les salaires. Ils exigent un salaire d’au moins 75 000F CFA par mois, mais aussi la déclaration de tous les chauffeurs routiers à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Ce sont, entre autres, les raisons avancées pour bloquer le secteur des transports pendant 48 heures. Difficile pour les voyageurs de quitter ou de rentrer à Ouagadougou pendant cette période. Cette grève semble porter déjà des fruits puisque le gouvernement a annoncé que certains de ces points trouveront solutions.

Photo/Lefaso.net De nombreux passegers se sont vus refuser la sortie ou l'accès à la capitale, Ouagadougou
Photo/Lefaso.net
De nombreux passagers se sont vus refuser la sortie ou l’accès à la capitale, Ouagadougou

Ces multiples grèves ont de nombreuses conséquences sur la vie des Burkinabè.  Au-delà du report des voyageurs, la grève des transporteurs a occasionné des délestages à Ouagadougou. Du côté de la Société nationale de l’électricité (Sonabel), on s’inquiète déjà des conséquences de cette grève déclenchée ce lundi 30 mars sur toute l’étendue du territoire « les citernes ravitaillant la Sonabel sont à l‘arrêt et les centrales électriques sont en panne sèche, avec un risque d’arrêt total d’ici quelques heures si une solution n’est pas trouvée » a indiqué le site d’information lefaso.net

Les grèves répétitives à la Société de distribution de boisson et de la Brasserie du Burkina ont débuté depuis le 24 mars 2015. C’est une grève illimitée et les conséquences aussi ne sont pas les moindres. Selon le directeur de la Sodibo/Brakina les pertes se chiffrent à plusieurs centaines de millions par jour. « L’usine perd environ 500 à 600 millions de chiffres d’affaires par jour. Et c’est environ 150 à 200 millions de F CFA de taxes qui ne sont pas versées à l’Etat, chaque jour », a souligné Marc Pozmentier. A cela s’ajoute la rareté de la bière dans les lieux de vente. Plusieurs bars et « maquis » connaissent une rupture de bière. D’où une flambée du prix. A certains endroits la bière qui était vendue à 600F CFA atteint aujourd’hui 750 F CFA.  Alors que le mouvement des travailleurs de ces brasseries ne semble pas faiblir, certains se tournent déjà vers les pays voisins pour approvisionner leurs caves.


8 mars : des femmes qui luttent pour la sécurité économique de leurs familles

Nous avons célébré ce 8 mars encore la journée internationale de femme. On a évoqué, encore l’autonomie financière des femmes, l’accès des femmes à la formation professionnelle et bien d’autres thèmes en faveur de l’autre moitié du ciel. Mais on a très peu entendu la voix de ces femmes qui se battent chaque pour le bien-être de leurs familles.

J’ai vu des femmes qui se battent chaque jour pour sortir leurs familles de la misère. Elles sont loin des célébrations de la journée internationale de la femme. Ces femmes ne sont pas allées à faso parc pour danser ou chanter. Et pourtant c’est à elles que je pense en cette journée. Je les ai rencontrées dans une localité très éloignée de Ouagadougou : Tampendjoaga. Elles sont plus proches du Togo que de leur pays. Soutenues par une ONG, elles se sont réunies en groupe d’épargne et de solidarité pour faire face à la pauvreté.

Photos Ouaga.com La cérémonie officielle de la celebration a regroupé les différentes représentantes de femmes.
Photos Ouaga.com
La cérémonie officielle de la celebration a regroupé les différentes représentantes de femmes. Mais la voix des femmes n’est pas pour autant entendue

Chaque groupe d’épargne et de crédit compte entre 15 et 30 membres. Les activités sont orientées par un règlement intérieur qui définit les modalités des services et la vie du groupe en général. Les femmes choisissent le montant de la cotisation. Selon la présidente d’un groupe de femmes, « la somme collectée permet après de faire des crédits. Mais une femme ne peut prendre une somme supérieure à plus de trois fois sa cotisation. Le taux d’intérêt est de 5% ». Cette cotisation apparemment insignifiante, aide pourtant les femmes et même leurs familles.

Elles s’octroient des crédits, qui leur permettent de mener des activités génératrices de revenus. « Avec ces cotisations, nos conditions de vie ont considérablement changé. Nous arrivons à pourvoir à nos besoins et à certains de nos enfants notamment pour leur éducation », a rassuré Aminata, membre du groupe d’épargne et de crédit.

Pour la présidente de ce groupe, c’est toute la famille qui en profite.  Les femmes font de petites activités avec l’argent. Cela renforce même la cohésion de la famille. Elle a déclaré : « Avant il fallait chaque fois voir nos maris. Comme eux aussi ils n’ont pas tout temps de l’argent, on ne s’entendait pas. Maintenant nous en avons un peu de sorte à pourvoir aux petits besoins de la famille. Nous sommes contentes et nos maris aussi. Ils nous aiment plus en encore ».

Zénab est la présidente du groupement Tampendjoaga. Pour elle, les groupes d’épargne et de crédit sont une véritable opportunité pour le petit commerce des femmes. Les différents prêts permettent aux femmes de démarrer des activités génératrices de revenus. « Moi je vends des chaussures pour dames. Il y en a qui vendent des céréales, d’autres font de l’élevage, du dolo. Tout cela nous permet d’avoir de l’argent pour nous et nos enfants », a affirmé Zénab. Selon l’agent villageois, « il n’y a plus de femme qui ne fait, toutes les femmes font diverses activités rémunératrices ». Ces femmes ont donc pris la décision de ne plus attendre leur maris, non pas dans un esprit de concurrence mais de complémentarité. Et leur action est salvatrice pour elles-mêmes, leurs enfants et toutes leurs familles. Elles arrivent à subvenir aux besoins de leur famille soutenant ainsi leurs maris. Zénab, Marie, Alima, leurs noms ne vous disent rien. Vous ne les verez à aucune tribune, mais ce sont des championnes, au moins pour leurs familles respectives.


Politique : Il faut penser aux jeunes au-delà des élections

Les partis politiques ont pris d’assaut les différentes localités du pays depuis l’annonce des élections couplées législatives et présidentielle du 11 octobre 2015. Les jeunes constituent leur cible principale dans la quête de l’électorat burkinabè. Chaque parti dit mettre la jeunesse au centre de ses préoccupations.

Au Burkina Faso nous sommes dans une période où les jeunes sont adulés de toutes parts. Après les 30 et 31 octobre 2014, les jeunes burkinabè ont fini de démontrer leur capacité à changer le tournant de la vie politique du pays. Une démonstration qui a convaincu les politiciens que pour la conquête du pouvoir, il vaut mieux avoir la sympathie des jeunes. La fin de l’ère Compaoré s’ouvre sur une nouvelle qui verra des élections « plus ouvertes », où le gagnant n’est pas connu d’avance. Alors pour y parvenir, les états-majors des partis politiques vont de localité en localité à la recherche de partisans, de voix en vue de la présidentielle de 11 octobre prochain. C’est dans ce contexte que tous les regards ne tournent encore vers la tranche jeune de la population burkinabè. Chaque parti politique se fait l’avocat de la jeunesse. Même ceux qui ont bâillonné hier la jeunesse se présentent comme des « messi » pour sauver leur ancienne « proie ». Ceux qui ont contribué à réprimer durement les différentes manifestations des élèves et des étudiants se sont transformés en fervents défenseurs des jeunes. C’est dans cette période qu’on entend toutes sortes de plans, de politiques, de stratégies pouvant sortir la jeunesse de l’impasse dans laquelle elle se trouve : le manque d’emplois, la formation professionnelle, l’éducation. Certains diront même ils sont le parti des jeunes.

Les jeunes multiplient les marches après les elections pour la prise en compte de leurs préoccupations
Les jeunes multiplient les marches après les elections pour la prise en compte de leurs préoccupations

Il est normal et bien-pensant de placer la jeunesse au centre de sa stratégie de campagne étant donné que les jeunes constituent plus de moitié de la population. Mais il est encore mieux de penser à ces jeunes au-delà des élections. Une chose est d’être élu mais une autre est de travailler à l’épanouissement de toute la population burkinabè et des jeunes en particulier. Très souvent nos politiciens ne se souviennent de leurs promesses qu’à l’approche des prochaines élections. C’est là le malheur de la jeunesse burkinabè et même africaine. Elle ne sert aux dirigeants que pour les échéances électorales. La jeunesse pour eux, c’est juste un « bétail électoral». C’est avec respect et considération que ces politiciens vont vers les jeunes pendant les campagnes électorales, mais c’est par des gaz et des coups de matraques et même des réformes inappropriées qu’on les remercie. Les jeunes aujourd’hui attendent plus que de simples déclarations ou de plans. Il faut des actes plus concrets.

Il est donc temps que les dirigeants s’occupent de cette jeunesse qui, comme on le dit, est l’avenir de chaque pays. Une jeunesse mal formée, malade, et sans emploi ne peut contribuer au développement de son pays. Et la Camerounaise Marie Tamoifo Nkom l’avait déjà dit lors du 23e sommet Afrique- France : « Nous sommes dans l’urgence, dans l’obligation d’avancer. Si les politiques ne s’occupent pas de la jeunesse, le vent du changement, en contexte démocratique, conduira la jeunesse à s’occuper des politiques afin que les engagements aient un sens », avait-elle martelé à la tribune du sommet. Aujourd’hui encore beaucoup de pays africains sont toujours dans cette situations.