Warda

Zamanana, Zieurouges et Manga – épisode 2

Suite du conte sauce gasy…

Si un animal vous dit qu’il peut parler, il ment probablement. Mais s’il dit qu’il sait lire, et que c’est vrai ? Et s’il ne dit rien, mais se contente de lire ? L’animal-lecteur ne serait donc pas intrinsèquement menteur. Un animal non-menteur et doué de compétences humaines. Et encore, tout le monde au village ne savait pas lire avant le Grand Engloutissement… Donc Manga qui sait lire serait-il plus humain que les humains qui ne savent pas ? Alors, existerait-il une catégorie de créatures, entre l’homme et l’animal, au dessus des animaux, mais tout de même en dessous de l’homme ? Oui, les êtres magiques. Enfin, ce n’est pas tout à fait pareil. Manga était-il un animal ? Manga était-il magique ? C’était perplexifiant, même pour un mpsikidy digne de ce nom.


« Bon, c’est pas le tout, hein mais je dois aller à une réunion secrète du Conseil des Sages pour savoir comment terrasser Zieurouges. Tu peux rester ici autant que tu veux. »
« Je vais me gêner ! », pensa Manga, en pilant un gros coussin de cuir.
Il faisait mine de lire, et observait du coin de l’œil le mpsikidy s’envelopper dans un lamba, de manière à cacher complètement son visage, puis sortir avec une prudence extrême.
« C’est l’heure à laquelle commence la nuit debout-debout ! » pensa Manga.


Au pied du manguier, se tenait une quinzaine de silhouettes enrubannées de lamba, qui se tenaient à la distance réglementaire de trois pas les unes des autres. Le Grand Maître prit la parole : « Chers frères, nous nous réunissons… » Guévara lui coupa la parole : « Et sœurs ! » Le Grand Maître reprit « Chers frères et sœurs, Guevara, s’il-te-plait, si tu veux prendre la parole fais signe, chers frères et sœurs, donc, nous sommes réunis ici pour décider comment il faudra manœuvrer pour se débarrasser de Zieurouges. » « Haaaan !!! » fit l’assemblée. Après une seconde de suspens, il poursuivit : « Les graines sont formelles, c’est l’âme du manguier sacré qui nous délivrera ! » « Aaaah » , fit l’assemblée, soulagée de n’avoir qu’à concourir par soutien spirituel à ce terrible combat. Une main sortit d’un lamba. « Litchi demande la parole ! La parole est à Litchi ! » Litchi : « En somme, nous envoyons une créature magique en zigouiller une autre. C’était simple ! Et si on passait à la dégustation de mangues, maintenant que nous avons la solution ? » Murmure d’approbation. « Ravitoto a une question ! La parole est à Ravitoto ! » Ravitoto : « Grand Maître ! Il y a ici un nouveau frère ! » Les lambas se tournèrent vers un petit lamba avec deux oreilles pointues. « Bien… Quel est ton nom ? » demanda le Grand Maître « Miark ! » répondit le petit lamba. « Miark ? C’est un drôle de nom, ça… Mais pourquoi pas. Sois le bienvenu, Miark. » Un lamba qui peinait à couvrir une volumineuse chevelure demanda la parole. « La parole est à Valiha ! » Valiha : « Grand Maître, puis-je commencer à jouer les airs rituels ? » « Oui, Valiha, nous sommes prêts. », répondit le Grand Maître. Valiha s’installa au pied du manguier sacré, et dans un silence respectueux, commença par étirer ses doigts, mouliner des poignets, et se détendre le dos.


Soudain, venant d’un lamba qui clignotait bleu, blanc, rouge,  Celebration des Kool&the Gang vint troubler la cérémonie. « Je… Je suis désolé, je… J’ai oublié de mettre le mode avion ! », bredouilla Ravitoto. « Bounty, va ! », grommela Litchi. « Bon, si vous avez fini de vous crêper le chignon, on va pouvoir poursuivre. », dit le Grand Maître agacé. « Misogyne, va ! » grommela Guevara. « En voilà, une façon de parler au Grand Maître ! », s’indigna Baobab. « Fayot, va ! », grommela Zébu. « Miark ! », dit Miark pour dire quelque chose. « Eh ben, on prend ses aises, Nouveau ! », grommela Ravitoto. Valiha toussota : « Hem… Si je vous dérange… Dites-le moi… »


Les lambas se ressaisirent. Valiha commença à jouer, les lambas commencèrent à tourner autour du manguier, d’abord lentement, puis calquant leur démarche sur la musique de Valiha, avançant en cadence, de plus en plus vite, faisant des « Houh ! » et des « Hah ! » aux moments opportuns. Sauf Miark, qui se bornait à « Mouh ! » et « Miah ! », mais par politesse, personne ne le lui faisait remarquer. Ce n’est pas bien de se moquer de l’accent des étrangers qui font tant d’efforts pour s’intégrer. Baobab eut une distraction en essayant de deviner les courbes féminines de Guévara, qu’il apercevait de l’autre coté du manguier sacré, perdit le rythme, et par malchance, marcha sur le lamba qui se trouvait être devant le sien. Le lamba se tendit, ce qui sortit Baobab de sa rêverie, lequel leva brusquement le pied, ce qui donna un élan inattendu à son propriétaire. Le Grand Maître – car c’était lui – trébucha sur Miark, et se voyant projeté vers le manguier sacré les deux mains occupées à tenir son lamba, s’exclama : « Za me meurs ! »

« Haaan ! » fit l’assemblée, voyant que la trajectoire du Grand Maître était magiquement déviée, comme une banane par une tornade, et qu’il ne s’échouait pas sur mais à côté du manguier sacré. Le long Zébu se précipita pour aider le Grand Maître à se relever :  « Grand Maître, c’est un accident du travail, je suis formel ! » Cabossé mais bien vivant, le Grand Maître regagna sa place dans le cercle : « Tu es bien gentil, Zébu. Mais la magie est avec nous cette nuit, il faut continuer à danser. » Zébu regagna sa place, après avoir lancé un regard narquois de premier de la classe à Baobab, qui tapota son lamba pour dissimuler mal son agacement. Valiha n’avait pas cessé de jouer. Les lambas reprirent la ronde des « Houh ! » et des « Hah ! ». Le rythme s’endiablait, « houh ! Ha ! Ouh ! Hah ! »


Ô, toi, qui le manguier habites, houh ! Hah ! Trajectoires et chemins connais Houh ! Hah ! Dans la nuit, ta vue, sans limites ! Houh ! Hah ! Pour le nez, que Zamanana te supplée ! Que ton courage ne se délite, s’il paraît, par un mythe tragique, que fleuris sur un tas de fumier ! Houh!Hah ! Houh ! Hah ! Du combat sortiras victorieux, si pour toute arme, es heureux ! Houh ! Hah ! Houh ! Hah ! La lumière éclaire l’ombre, ainsi ont parlé les ancêtres ! Houh ! Hah ! Houh ! Hah ! Houh ! Hah !


La ronde dura encore jusqu’à épuisement général. Constatant les silhouettes avachies qui trottinaient sans grâce autour du manguier, le Grand Maître rompit le cercle. « Aaaah ! » fit l’assemblée, et tous commencèrent à se congratuler, comme une équipe de foot victorieuse. Tous s’assirent, et commencèrent la dégustation de mangues. Baobab prit un ton mielleux pour demander à Guévara de lui en éplucher une ; elle lui dit d’aller faire se cuire un œuf, mais en éplucha une pour Valiha. Zébu s’inquiéta de ce que la gloutonnerie de Litchi prive Manga, qui était le plus petit d’entre eux, amen, avant de s’apercevoir en riant que Manga était d’une habileté redoutable pour attraper les plus beaux fruits. Ravitoto demanda la parole : « Nous t’écoutons, Ravitoto ! », dit le Grand Maître, la bouche pleine. « Merci. Alors, voilà, je voulais vous dire que je suis désolé pour le téléphone, tout à l’heure, mais quand même, me faire traiter de Bounty, c’est plus fort que le roquefort ! » Silence gêné. Plus personne ne pensait à cet incident. « C’est quoi, le roquefort ? » demanda à mi-voix Litchi à Baobab, qui ne savait pas. « Miark ! » dit Miark, en poussant vers Ravitoto une mangue sublime qu’il gardait cachée pour son dessert. Derrière son lamba, le Grand Maître leva les yeux au ciel. Ça commençait à bien faire, il était temps de sonner la fin de la récré. « Bon, nous sommes tous fatigués, et une rude journée nous attend demain. Résumons ce que nous annoncerons demain au village : Manga, la créature vivant dans le manguier, avec Zamanana, doit se rendre jusque dans l’antre de Zieurouges pour la terrasser. Manga a un destin particulier, un secret entache sa naissance, et il faudra aussi le découvrir et le dépasser pour nous sauver tous. » « Amen ! » répondit Baobab, qui fit face à un silence outré, toussa, demanda pardon. Un sourire dans la voix, le Grand Maître poursuivit : « En vérité, je vous le dis, avant que l’abrutissement ne soit complet dans ce village, il faut que Manga et Zamanana s’acquittent de la mission pour laquelle les désignent les ancêtres. Ils partiront demain à la tombée du jour, et en profiteront pour déposer ce dossier de demande de subvention pour regarnir la bibliothèque municipale auprès de l’Institut Français. Ainsi ai-je dit pour ce soir ! » « Houh ! Hah ! » répondit l’assemblée, avant de se disperser.

Resté seul, Miark quitta son lamba au pied du manguier, redevenant ainsi Manga – comme personne ne s’en doutait – et grimpa se coucher. Regardant le village depuis son perchoir, il pensa « Ô rage, ô désespoir ! Ô engeance ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ? Et ne suis-je roussi dans les travaux manguiers Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ? » Alors qu’il se lamentait ainsi, une mangue pourrie, qu’il n’avait pas vu venir, s’aplatit sur son flanc. Alors, il rit, et s’endormit…


Zamanana, Zieurouges, et Manga – épisode 1

Conte sauce gasy.
A J.L. et sa fille, et à tous les Malgaches que je connais.


Zieurouges était un esprit mesquin en forme de femme. Le temps avait jauni les poils de son crâne, et ranci son haleine. Zieurouges s’approchait subrepticement des zenfants pour les zetouffer. Mais le village avait un ange gardien, Zamanana, la fille au nez très fin… Quand Zieurouges de trop près approchait, hargneuse, dans la nuit de charbon, Zamanana alertait le village en criant « Ça pue!  » et Zieurouges se sauvait en grommelant. Zamanana sauva ainsi des centaines et des centaines d’enfants d’une mort atroce. Et si Zieurouges détestait tellement les enfants, c’est que l’idée qu’ils profiteraient de la beauté du monde après elle lui était insupportable. Elle avait commencé par détruire les écoles, et manger tous les livres. Si les enfants restaient ignorants, ils deviendraient facilement des adultes imbéciles, assez débiles pour s’exterminer eux-mêmes, ce qui lui faciliterait grandement le boulot. Zieurouges avait quand même gardé quelques livres précieux, dont elle avait tapissé le fond de son lit, mais qu’elle ne lisait jamais. C’était juste pour le plaisir d’en priver les autres, et d’avoir pour elle seul un objet devenu rare et précieux. De son nid, elle voyait avec plaisir s’abrutir la population. Elle commença discrètement à grignoter la langue, en croquant un accent ici, une lettre là… Elle posa son gros cul sur les règles de grammaire. Tant et si bien qu’il devint extrêmement laborieux de lire des textes écrits, puisqu’on n’y comprenait plus rien. L’écrit commença donc à disparaître.

Un jour de grand vent et de Francophonie zarriva une étrange créature. Elle ressemblait à un gros chat, et son pelage avait une couleur de fruit pas mûr. Personne ne su nommer la créature. Tous les dictionnaires avaient disparu, et le village se situait dans une zone hermétique aux zondes internet. Alors, on l’enferma dans un graaaand sac de toile, et on l’apporta au mpsikidy. Ô mpsikidy! Cette chose doit-elle vivre ou mourir? La chose protestait dans le sac dans une langue inconnue. Les graines parlèrent. La chose devait vivre. Le sac poussa un soupir de soulagement. Ne serait-ce pas un maléfice de Zieurouges?  Murmures. On posa le sac aux pieds de Zamanana, attendant son jugement sans appel. Elle ouvrit le sac, et la chose fila se cacher dans un manguier. « Appelons la chose Manga, ça sera plus simple. »

Les jours passèrent, et Manga se faisait si discret, que les habitants l’oublièrent peu à peu dans son manguier. L’arbre devint sacré, mais sans pouvoir écrire son histoire, bientôt, on ne sut plus pourquoi. Les villageois venaient tout de même sous le manguier sacré quand ils avaient de grandes décisions à prendre. A haute et claire voix, ils posaient leur question à l’arbre. S’il ne se passait rien, l’idée était mauvaise ; ou alors, la réponse était non. Si l’entreprise ou la question étaient malveillantes, l’arbre arrivait toujours à envoyer des fruits pourris en pleine face du demandeur. Si la réponse était oui, une mangue descendait de l’arbre. La taille et la beauté du fruit donnait des indications supplémentaires. Lorsque la question était mal posée, une branche s’agitait. Ainsi, on ne demandait pas au manguier sacré « Est-ce que ma femme me trompe ? » mais « Ma femme m’aime-t-elle ? » ; non pas « Le maire est-il un voleur ? » mais « Le maire est-il honnête homme ? ». Il va sans dire que plus d’un et plus d’une ont tenté de faire abattre cet arbre de malheur, dont le maire catholique, qui s’insurgeait contre ces croyances de sauvages. Mais quelqu’un fit remarquer que depuis que le manguier était sacré – quand déjà ? – Zieurouges semblait avoir disparu… Murmures et hochements de tête. Le manguier fut classé au patrimoine local, et protégé ainsi des avides appétits des Chinois qui avaient rasé tout le bois de rose avoisinant.

Craignant tout de même pour sa vie, Manga ne descendait de son perchoir qu’à la nuit tombée. La consommation journalière de mangues avait rendu son pelage roux, et on aurait pu le prendre pour un renard. Chaque nuit, il allait porter les plus belles mangues de son arbre au mpsikidy, pour le remercier d’avoir lu dans les graines de lui laisser la vie sauve.

Mais Manga était triste. Il n’avait pas d’amis, et ne parlait pas la langue des villageois, même si il les comprenait. Et c’était bien ennuyeux, parce que les villageois parlaient souvent de Zieurouges, mais comment leur demander qui était-ce ? Par déduction, Zieurouge avait disparu quand Manga était arrivé, or Manga était arrivé par un vent de Francophonie… Donc, ce que le vent de la Francophonie apporte, il le reprend ailleurs… Manga devait en avoir le cœur net. Il prit son offrande quotidienne de mangues et se dirigea à pattes feutrées chez le mpsikidy. Il déposa les mangues devant la porte, mais au lieu de se sauver sur le toit pour guetter l’arrivée et le sourire du maître des lieux, il se roula en boule à coté.

Il attendit. Un bon moment. Il se sentit bête, et faillit partir, quand soudain, la porte s’ouvrit, et il vit sortir la belle Asha le cheveu en désordre, suivie du mpsikidy qui avait l’air tout émoustillé. Manga gloussa, puis glapit quand la belle lui marcha un bon coup sur la queue. Il faisait noir, « Une bête ! Une bête ! Là !!! », glapit à son tour la belle Asha. Manga profita de la confusion pour s’engouffrer chez le mpsikidy, qui cherchait à taton la lumière. « Ce ne sont que des mangues, de belles mangues, ma chère ! » « Je sais ce que je dis ! Il y avait une bête, là ! Peut-être même que c’était Zieurouges ! Haaaaan !! » Asha porta sa main à sa bouche, comme si le fait de dire le nom du monstre allait le faire venir. Caché sous le lit, Manga riait. « N’importe quoi, pensait-il. Dire « argent » n’en n’a jamais fait apparaître ! » La belle Asha détala vers sa maison, comme si elle venait de se souvenir qu’elle avait un mari qui l’y attendait. Le mpsikidy haussa les sourcils, écouta sa course se perdre dans la nuit, puis quand il ne l’entendit plus, se pencha pour ramasser les mangues, avec un sourire qui fit ronronner Manga. Il rentra, laissant la porte ouverte sur les étoiles, et posa les mangues sur la table. Il s’assit dans la pénombre, alluma une bougie, et pensant à la belle Asha, il rit. « Ô monde, il y a bien des choses qui ne changeront jamais. » Manga pouffa. Impassible, le mpsikidy dit « Qui que tu sois, homme ou bien ombre vaine, montre-toi. »

Un peu honteux, Manga avança doucement vers la table. « Ah, c’est toi ! Je savais bien que tu finirais par descendre de ton manguier. Il va falloir que l’on cause tous les deux, monsieur Oui-Non. C’est bien beau de dénoncer les élections truquées et les femmes adultères, mais tu me fais perdre des clients. » Ça alors… Le mpsikidy n’était pas amnésique comme les autres du village… « Allons, avance, Manga, que je te vois. » Manga s’approcha. Le mpsikidy l’attrapa, et l’observa à la lumière de la Lune, puis le posa sur ses genoux, et se mit à le caresser. Manga était un peu gêné d’être traité comme un vulgaire chat, mais il n’osa pas se montrer grossier avec celui qui lui avait sauvé la vie. « Tu as les yeux bleus, Manga, tu es une créature magique, précieuse… Tu as pris la couleur du feu, Manga. Il n’y a pas de hasard. Si tu es là, c’est pour nous débarrasser de Zieurouges. » En effet, il y a bien des choses qui ne changent pas, pensa Manga, vexé, mais il émit simplement un « Miark ! » courroucé.


« – Quel caractère ! Heureusement que tu n’es pas une femme !

– Pffffft !

– Tu as l’occasion d’être un super héros, et tu te débines! Quand je pense à tous ces jeunes désœuvrés, qui finiront trafiquants, maquereaux ou soldats…

– Pffffft ! »


Soudain, Manga vit ce qu’il n’avait jamais vu ailleurs dans le village… Il en resta sans voix, l’œil tout rond, comme un poisson très étonné. « Qu’as-tu vu, Manga ? », dit le mpsikidy, en suivant son regard. Incrédule, il alla chercher… une pile de livres. Manga fit tomber la pile, puis se mit à inspecter chaque volume, à en retourner certains du bout de la patte. « Mais… Tu sais lire !? » Manga lança un regard méprisant au mpsikidy puis continua ce qu’il faisait. Absorbé dans ses lectures, faisant des huit concentrés avec sa queue, Manga ne voyait pas le mpsikidy jouer des graines. Soudain : « Sais-tu Manga, où sont passés tous les livres ? » « Mrrrrark ? » répondit Manga sans décoller la truffe du volume qu’il lisait. La Chanson de Roland. « Zieurouges les a tous ou détruits ou mangés ou gardés pour poser son gros cul ! » Lever de truffe, à ce ton accusateur. Regard accusateur. Ah ? Zieurouges avait bouffé ou planqué tous les bouquins ? Comment se faisait-il, alors, qu’il y en avait ici ? « Attends , minute ! Je te vois venir ! Ne va pas m’accuser de fricoter avec Zieurouges ! Non mais si tu la voyais, en plus… » Manga lui adressait un regard perçant, tapotant La Chanson de Roland du bout des pattes. « Ma maison est immunisée contre les esprits malins… » expliqua le mpsikidy. Tapotement. « Zieurouges ne peut pas entrer chez moi… Toi, tu as pu entrer… » Pensant à la belle Asha, à madame le Maire, à la marchande de pain, à la voisine-la-plus-proche, à la vendeuse de tabac, Manga se demandait quels critères utilisait la maison pour déterminer qui était maléfique et qui ne l’était pas. La maison sembla rire. Mais il était vrai qu’il n’avait jamais vu ici les créatures qui rentrent dans les maisons pour jouer des tours aux humains…


L’art d’ « avoir piscine »

Ah, les repas de famille… Les repas d’ « anciens » du lycée Sainte-Gertrude, où vous arrivez assez content de vous même, et repartez dépité(e), convaincu(e) d’avoir raté votre vie, et d’infecter la surface de la Terre…
à N. , V. et les autres, qui par le partage raisonné d’expériences ont contribué à l’établissement de cette liste.


Bourreau des cœurs


« Alors, toujours célibataire? »
« Bonne année, hein, la santé, l’argent, le travail… et l’amour, hein, l’amour! C’est important, l’amour! »
« Ah, bah oui, ce soir, y a que des couples… hihihi du coup, avec toi, on est treize à table! Hihihi! »
« Tu sais, à nos âges… Il ne faut plus trop être difficile… »
« Mais (petite toux) tu sais, tu peux tout nous dire. TOUT. Nous sommes (petite toux) des gens ouverts… Nous pouvons tout entendre. »
« Et celle/celui-là, hein? T’en penses quoi? Une connaissance de Charles-Edouard… Belle situation… Y a du pognon… »
« Ça fait quatre ans! Naaaan… Si! Tu n’es pas venu(e) avec Axel(le)? … Ah… Ah, excuse-moi, désolé… »
« Je te présente Dominique, voilà, voilà… C’est amusant, héhé, vous êtes tous les deux passionnés de littérature! Bon je vous laisse, hein! »
« Je comprends pas, t’es plutôt pas mal, pourtant. »
« Les enfants m’épuisent! Je suis é-pui-sée! Mais tu ne peux pas comprendre… »
« Moi, à ton âge… »
« Les gens qui ne veulent pas d’enfants, ce sont des égoïstes. »
« Tu dois t’ennuyer, non?.. Non?? »
« Je ne voudrais pas insister, hein… Mais c’est arrivé comment? »
« Vous viendrez accompagné(e)? Non? Comment, ça, non?… Mais vous n’avez pas un(e) ami(e) ou quelqu’un qui voudrait la deuxième place?? »
« Bon, ben c’est raté pour le mariage en blanc! A ton âge… »
« Si tu savais comme nous sommes heureux! Heu-reux! »


Johnny Bigoud


à la maison
« Syrah Chêne Bleu, tu nous gâtes… Tu connais ça, toi? »
« Rhooo… Mais il ne fallait pas! Ça a du te coûter une fortune, et comme tu n’as pas beaucoup d’argent… »
« Chéri, tu te souviens de Martha? … Marcia, pardon. »
« Ah? Tiiiiens!!!! C’est… étonnant de te voir là! – sourire hypocrite – Tu vas bien? »
« Tu as vu? Touche… C’est du marbre… C’est beau, hein! On s’est fait plaisir! »
« Et là, je vous le donne en mille! Une fille-mère! J’allais quand même pas louer un appart à une fille-mère… De toutes façons, il n’y avait pas de baignoire, elle l’aurait lavé où, son gosse? Dans l’évier peut-être? »
« Ma robe? Elle vient de chez Trucmachin. C’est… C’est un peu chic, comme boutique, tu sais… »
« Ben, t’as qu’à bosser! Ahahah!!! Non, mais je rigole, je rigole! »
« Chérie, tu as encore acheté des nouvelles assiettes! Ah, je vous jure, on ne sait plus où les mettre! Tiens, ça t’intéresse pas, toi, de la belle vaisselle? Allez, ça nous fait plaisir, et puis, ça débarrasse! »
« Chef d’entreprise? Vos parents doivent être fiers. Et tu le vois souvent, ton frère? »
« Eh ben, t’es pas épais(se)! »
« Tu ne manges rien? C’est parce que je ne me souvenais pas de ton prénom? »
« Tu te souviens? Tu avais toujours le nez dans les bouquins, et nous, on était toujours au café. On a bien fait. Ahahaha!!! »
« Sont-ils fatigants, en face, avec leur musique de bamboulas, on ne s’entend plus penser! »
« Ah, les fonctionnaires, payés à rien faire! »
« Ah, tu ne manges rien, mais qu’est-ce que tu bois! Ahahah!!! Je rigole, je rigole… »
« Mais tu sors un peu, quand même? Tu as des amis? »
« Tiens, ça c’est ma carte. Hésite pas à m’appeler au bureau, un midi, si tu veux qu’on mange ensemble… J’essaierai de trouver un créneau… »
« Tu bosses dans quoi, déjà? Tu me l’as dit, mais j’ai oublié. »
« Oui… C’est pas mal. C’est pas mal, déjà, comme poste, pour quelqu’un comme toi. Enfin, je veux dire… Mais tu m’as compris. »
« Mais, alors… Tu connais Bidule??! … Incroyable… »
« Ah, il est bon, ce foie gras! C’est pas Labeypierre de Carouf! »
« Tu veux la fin de ma cigarette? Je la finirai pas. »
« Ils ont tout gratuit, ces gens-là! L’électricité, le loyer, la CMU, tout! Ah, on est bien, en France! »
« Pierre… Edwige, voilà… Marthe… – se rassoit, un verre à la main – Ah, zut, je t’ai oublié(e). Bon, tu sais où est la cuisine. Santé! »
« Tous ces faignants d’intermittents, ah, ben c’est sûr qu’ils iraient pas bosser sur les chantiers! Pourtant là y en a du boulot! »
« Oui, Lidl, c’est de la bouffe pour chien. Mais franchement, pour faire des gâteaux pour l’école, hein… ça va bien! »
« Où ça? … Et… ça va, le quartier? ça ne craint pas trop? »
« Chérie! Donne-lui les restes du rôti dans un tupperware! Mais si, mais si! C’est du veau, en plus. Tu en manges, ça, du veau! Allez, emporte ça. Tiens, prends le pain, aussi. Allez, on est entre nous, pas de salamalecs! … Ohohoh! Excuse-moi! Je voulais dire… Enfin, tu m’as compris! »
« Et surtout, tu passes à la maison quand tu veux! Bon, pas le mardi, Apolline a son cours de basson, et moi je finis tard, tard, tard! Jeudi, c’est bridge. Naan mais on a une vie de dingues! Mais passes nous voir, ça nous fera plaisir! Appelle avant, on fera un petit truc. »

L’éternel retour
« Si je passe par le centre-ville? Oh, heu… Avec qui es-tu venu(e), déjà? Bon, j’y vais, hein, il  est tard, déjà, et demain, je travaille, moi! »
« Ah, je suis désolé(e), Églantine et Aude-Hélène cherchaient quelqu’un pour les descendre en ville à une soirée, du coup, j’y vais avec elles… Je n’ai que quatre places, et comme il y avait déjà Antoine avec nous à l’aller… »
« Tu devrais demander à Selim – pouffement – je crois que vous habitez le même quartier! »

Dîner en ville
« Allô? … Oui, je suis désolée, je vais être en retard. Oui, figure-toi que je suis au commissariat… Pour porter plainte contre un c***rd qui m’a agressée en pleine rue, comme ça, pour rien! Je te jure! Le mec, il me saute dessus, et il se met à gueuler comme un putois juste parce que je suis sur une place handicapé! L’hallu totale! Non, mais moi, je me laisse pas em***der comme ça. J’ai son nom, et je porte plainte. Faut avoir un pète au casque pour gueuler comme ça dans la rue! Non, mais le pauvre mec, quoi! … Oui, ciao, à toute! »
« Alors, là, c’est the place to be! »
« Salut, Sophie, ça va? Ouais, super, la soirée! On est rentrés à 4 heures, je te jure! Mon petit frère/ma petite soeur? Ahaha! Non, non… C’est… Bon à plus! … Alors, elle, c’est la chargée de projet de Chkoufougne-Deufeudinde, une vraie connasse! Aaaah!!! André, ça fait plaisir de te voir! Tu vas bien? On se voit au théâtre, vendredi? Mon assistant(e)? Ahaha, non… C’est… Bon, à vendredi! … Alors lui, un chaud de la b*** tu imagines même pas! … Caro, super, ta robe! T’as fait quelque chose à tes cheveux? Tu es ma-gni-fi-que! Mon/ma stagiaire? Ahaha, non, c’est… Bon, je file, hein, tu sais ce que c’est, j’ai un rendez-vous dans 15 min avec le boss… Alors, elle, elle m’a piqué le poste de dir comm chez Souplex, je te laisse imaginer comment… Hervé! ça faisait longtemps! ça va? Ah, tu es avec Esther et Gil!? … Heu… Ecoute, j’ai besoin de voir un truc avec Hervé, alors, le prends pas mal, hein, mais… Prends ce que tu veux, et tu le mets sur ma note! Allez, c’était sympa de te voir! On se rappelle vite! »
« C’est tout? Tu plaisantes! Tu ne vas pas manger que ça! Prends au moins un menu! »
« Non, laisse, je t’invite. Si, si, j’y tiens. Je vais faire une facture. »
« On divise par deux? Super! Ah, ça tombe bien, j’ai tout juste assez en tickets restau! »

Savoir recevoir
« Il ne fait pas chaud, chez toi… On allumerait pas un peu de chauffage? »
« Ah, des verres à moutarde… C’est mignon… »
« C’est à toi, tous ces bouquins? … Mais, tu les as lu? »
« C’est bien, les trucs ikea, ça dépanne. On a refait un appart pour Antoine, qui entre à la fac, on l’a meublé avec ça. »
« Ohlala, faudra penser à faire les courses, hein! Au moins, on met pas une heure à choisir son yaourt! »
« Et tu n’as pas mis d’abat-jours? »
« Tiens! Tu sais jouer de ça, toi? »
« C’est simple. Mais tu sais, ce qui est sobre, c’est ce qu’il y a de mieux. »
« Tu écoutes France Culture? C’est bien, ça… »
« Y a pas de cendrier? Ah, tu ne fumes pas… »
« La photo, là, c’est tes parents? … Ils ont des têtes de braves gens. »
« C’est un lit, ça, ou un canapé? »


Bon, alors!


Vous avez le droit de ne pas perdre votre temps avec ces gens sans intérêt. Il n’y a aucune obligation légale à les fréquenter. Fuyez. De toutes façons, il y a de grandes chances pour qu’ils ne remarquent même pas votre absence. Seize the day. C’est le moment d’ « avoir piscine », et de trouver une bonne excuse – si besoin est – pour ne pas y aller. This is one more free service we offer.


Guide de survie intellectuelle en période électorale

2017, année de l’éloquence plus ou moins certaine, à fort risque de moisissures intellectuelles. Voici quelques mots en « A » pour en rire un peu, et à jeter négligemment entre la poire et le fromage, à un invité qui dirait des énormités, si vous êtes trop bien élevé pour lui faire frontalement remarquer.


 Amphigourique – Apotropaïque –  Amnésie – Amphibologie


Comme le disait notre bien-aimé Forest Gump, « N’est stupide que la stupidité », et avant d’étaler la mienne, je ne saurais que trop vous recommander la lecture attentive de la page du CorteX… Attendez, je vous vois venir…


Alors, non, non, (aucun lien, fils unique) le CorteX c’est :


Le CorteX est un collectif d’enseignement et de recherche en esprit critique et sciences. Il est né en 2010 à l’Université de Grenoble à l’initiative de cinq formateurs professionnels et a pour objectif de mettre à disposition les travaux de tous les acteurs – enseignants, chercheurs, étudiants – travaillant sur un sujet développant le critical thinking, l’esprit critique, quelle que soit leur origine disciplinaire.

(…) Ils préfèrent contribuer à de la publication publique, et ne donnent pas la priorité à la course de hamster des publications dans les revues à referees.


Tout ça pour dire – si vous en doutiez encore – que les « têtes d’ampoules » produisent des contenus tout à fait utiles aux citoyens que nous sommes, notamment pour développer des capacités de résistance intellectuelle face à ceux qui nous prennent pour des jambons. Voici donc un succulent « Petit recueil de 20 moisissures argumentatives pour concours de mauvaise foi », très utile pour décoder les discours politiques et patronaux.

Petit recueil de 25 moisissures argumentatives pour concours de mauvaise foi


Mais rev’nons zen à nos moutons


Amphigourique : est amphigourique un discours volontairement incompréhensible, obscur; un brin prétentieux, ridicule pour ceux qui le subissent; admirable voire impressionnant pour ceux qui y adhèrent. Les néologismes, les concepts plus ou moins creux chers aux élus et repris avec enthousiasme par les journalistes « amphigourisent » souvent les propos.


Les mots nouveaux créés par les événements, ou ceux que le caprice met à la mode, prêtent d’abord à la conversation de ceux qui s’en servent je ne sais quoi d’amphigourique et d’obscur qui leur donne une supériorité soudaine, ils paraissent profonds à ceux qui ne les comprennent pas. H. de Balzac, Les Mots à la mode,1830, p. 189.
(cité sur le site du CNRL)


Exemples :
« La co-construction par les acteurs locaux : la gouvernance locale de la cohésion sociale au service du pacte républicain. »
« Leurs spectacles échappent au témoignage pour mettre en jeu le processus de recherche et d’enquête en lui-même. »

Apotropaïque : est apotropaïque un objet, ou une formule dont le but est de conjurer le mauvais sort, d’éloigner les mauvais esprits, de se prémunir contre des influences maléfiques. En période d’élection, certains challengers auraient bien besoin de pouvoirs surnaturels pour convaincre l’auditoire de leur réelle volonté de transformation sociale positive.
Sur ce blog, on trouve une liste non exhaustive d’objets apotropaïques et de quoi ils sont sensés prémunir.


Amnésie : l’amnésie est fréquente en période électorale, et souvent, les candidats sont bien utiles pour rafraîchir la mémoire de leurs concurrents et vice versa. Parler de Nicolas Sarkozy serait du genre facile, et puis de toutes façons, il n’a pas dépassé le stade de la primaire. Il y a d’ailleurs bien d’autres sujets de recherche dans les autres partis. Le profil Facebook Jean Centre publie publiquement des études et analyses savoureuses sur le parcours des élus socialistes, qui tous prêts à s’engager du côté des « sans dents », oublient parfois que leur origines sociales, leur richesse personnelle et leur non connaissance du monde professionnel hors monde politique pourraient les rendre peu légitimes aux yeux des masses laborieuses.

Et Jean Centre de conclure ce – long – portrait par :


« Il déclare un patrimoine de 1.500.000 euros. Pantouflard, (petit) cumulard, professionnel de la politique depuis 20 ans, ses revenus le placent dans les 5% les plus riches, il pratique assidûment l’endogamie et est passé expert en manœuvres internes au PS. Et que vive la sociale… »


Je vous invite bien sûr à lire entièrement ce portrait d’Arnaud Montebourg et de vous délecter des autres portraits de socialistes que vous trouverez rassemblés sur cette page de La Rotative, site d’informations locales collaboratif, Tours et alentours. Comme tout site « non officiel » d’information, ce qui est posté sur la Rotative est parfois d’une qualité inégale, partisan, à charge, de mauvaise foi, cite insuffisamment ses sources. Mais aussi, les rédacteurs étant nombreux, anonymes pour la plupart, spécialisés pour certains dans des domaines précis, on y trouve également des contenus de qualité et qu’on ne lirait pas ailleurs.

Outre les mesquineries de bureau et les petits arrangements avec le FISC, l’amnésie permet d’oublier plus simplement l’Histoire. Surtout quand elle a un gout de « déjà vu ». Pour éviter le gout de « tout cuit », il est parfois utile de prêter une oreille attentive à ce que disent « les vieux »; et c’est pour cela que je recommande l’écoute des émissions de l’ANACR, (Association Nationale des Anciens Combattants et Amis de la Résistance) :

[Grille] Nouvelle émission : l’ANACR


Amphibologie : il y amphibologie quand il y a arrangement avec la syntaxe, ce qui donne, volontairement ou pas, un double sens au propos. Ainsi une phrase peut être comprise dans un sens, ou dans un autre. L’amphibologie involontaire est une faute de style – même si grammaticalement et bancale et correcte – qui rend le propos ambigu, peu clair, et révèle parfois des pensées moins assumées; on se rapproche du lapsus. L’amphibologie volontaire amuse les auteurs, et elle est très utile aux politiciens qui la manipulent bien, car elle permet de nier par la suite le fait d’avoir tenu un propos qui aurait choqué : « Mais, je n’ai jamais dit cela! C’est vous qui interprétez ainsi mon propos. Ce que je voulais dire, c’est… » … tout en ayant quand même dit ce que leurs partisans voulaient entendre.
Exemples : il croit cet homme menteur – c’est le fils de cet homme que vous avez vu . « Ces réfugiés ne peuvent pas passer la nuit dans cette cage d’escalier, c’est trop dangereux. »

Si le dîner se prolonge, et que votre smartphone a encore de la batterie, je vous recommande aussi les mots suivants. Décidément, notre langue est une source d’amusement inépuisable!


Anathème – Antanaclase – Anacrouse – Analogie –  Abnégation – Anacoluthe – Allégations


 


Cher Voisin…

Souvenez-vous, en décembre dernier, le blogueur camerounais Fabrice Nouanga publiait ce post hilarant sur ses voisins toxiques… Mais, puisque le Cameroun n’a pas le monopole des voisins casse-pieds et que la musique adoucit les mœurs, voici comment moi, j’entends dompter le  mien…


Cher voisin,


visiblement, vous avez des problèmes d audition, ce qui vous oblige à écouter de la musique à fond à des heures tardives. Puisque je partage ces moments musicaux avec vous par le truchement de mon plancher, je vous offre cette compilation composée avec soin. Il s’agit de mes morceaux de jazz préférés. Des vieilleries, et des artistes locaux plus ou moins émergents. Il y a aussi un peu de Carmen Miranda, Joséphine Baker, Mistinguette… Enfin, que des trucs péchus, quoi. Faites en bon usage. Je vous prépare une compilation de musiques du monde pour varier les plaisirs. Et si vous êtes bien sage, et que votre chien n’aboie pas tout le weekend, je vous en ferai une avec une sélection de mes productions radiophoniques. De ce que j’entends, vous n’écoutez pas Radio Campus Tours. Bien cordialement, la voisine du dessus.


PS :


PS: la porte d’entrée se ferme seule, il n’est pas utile de la claquer sauvagement.
PPS: Je crois que vous brûlez beaucoup, beaucoup d’encens. Ça sent parfois très très fort dans l’escalier. Tout le monde n’aime pas l’encens, particulièrement le monsieur du 3e (celui qui part travailler en bleu marine) Je crois qu’un boudin de porte pourrait vous être utile.
PPPS : le verre ne se met pas dans la poubelle jaune, même en 2017


La playlist


[à la demande générale]
Dorothy Asby with Frank Wess (harpe jazz) – Renaud Garcia Fons, Camp d’Argeles (jazz) – Werner Hasler&Kamilya Jubran (trompette&oud) – Harry Belafonte, Mathilda – Joséphine Baker, Sur deux notes – Mistinguett, Je cherche un millionnaire – Nitta Jo, Sous l’ombrelle – Aerophone, Souris de poche (jazz) – Steak, Steaxas (jazz) – Billie Holliday, Strange FruitMax Roach, Tryptich, Prayer, protest, peace (jazz) – Michel Portal, Burundi (jazz) – Dashiell Hedayat, Fille de l’ombre – Carmen Miranda, Tico tico– Cécile&Jean-Luc Cappozzo (jazz) – Claire Diterzi A quatre pattes – Reniss, La Sauce – L7, Masses are asses – Anne Sylvestre, Plate prière – Sun Ra


La Bonne Leçon – Chanson d’amour 2

Une amie qui joue de la guitare m’a demandé de lui écrire une chanson militante, à chanter le poing levé. Mais comme je fais rarement ce qu’on me demande, j’ai préféré écrire sur un sujet sur lequel je n’ai généralement rien à dire…


De la musique avant toute chose…


Avant de lire mon oeuvre, je vous recommande chaleureusement d’écouter cette chanson de Renaud, sinon vous passeriez à coté d’une référence majeure dans le refrain.


La Bonne Leçon


Tous mes potes se sont faits larguer.
En cet hiver, une hécatombe.
Tous mes potes se sont faits larguer
Et chacun pleure sa romb-
bière, à grand renfort de bière
« Eh Manu » fait l’effet d’une bombe
Tous mes potes se sont faits larguer
Leur colère, peine, douleur me plombent
Tous mes potes se sont faits larguer,
Amie, je suis psy et taulière

Celui à qui ça pouvait pas arriver
Main dans la main, fidèles et photogéniques
Mais « ma chérie » s’est barrée
Avec son frère et son fric
Celui pour lequel on est tous soulagés
Domina un peu hystérique
Qu’aurait bien fini par nous le castrer
Mais qui dit liberté, dit panique
Celui qui l’a bien cherché
Qui sur les blondes cachectiques
A un peu trop louché
Se retrouve seul et coule à pic

Tous mes potes se sont faits larguer.
En cet hiver, une hécatombe.
Tous mes potes se sont faits larguer
Et chacun pleure sa romb-
bière, à grand renfort de bière
« Eh Manu » fait l’effet d’une bombe
Tous mes potes se sont faits larguer
Leur colère, peine, douleur me plombent
Tous mes potes se sont faits larguer,
Amie, je suis psy et taulière

Disséquer, Passer en revue militaire
Tous ces instants de vie commune
Tous ces moments où il a fallu se taire
Tous ces efforts pour des prunes
Ingrate, elle continue sur son erre,
A un autre, elle tend déjà sa lune !
Mais non, on cherchait pas une seconde mère !
Mais non, on n’a pas de rancune !
Partie, l’amour devient mégère,
Et de vie, n’avons qu’une,
Aimer ne serait donc que guerre ?
Ou maladie auto-immune ?

Tous mes potes se sont faits larguer.
En cet hiver, une hécatombe.
Tous mes potes se sont faits larguer
Et chacun pleure sa romb-
bière, à grand renfort de bière
« Eh Manu » fait l’effet d’une bombe
Tous mes potes se sont faits larguer
Leur colère, peine, douleur me plombent
Tous mes potes se sont faits larguer,
Amie, je suis psy et taulière

J’allais commettre l’irréparable,
Et moi-même m’amouracher
ridicule ! – d’un sourire aimable
Les gars vous m’avez rappelée
Sur la voie carrossable
Adieu mièvreries, adieu corvée !
Vieille fille et détestable
Cent fois Je préfère rester
Les trouviez belles, charmantes, adorables
Maintenant perverses vous font pleurnicher
ô charmant célibat raisonnable
Pour celle qui pas même ne sait cuisiner !

Tous mes potes se sont faits larguer.
En cet hiver, une hécatombe.
Tous mes potes se sont faits larguer
Et chacun pleure sa romb-
bière, à grand renfort de bière
« Eh Manu » fait l’effet d’une bombe
Tous mes potes se sont faits larguer
Leur colère, peine, douleur me plombent
Tous mes potes se sont faits larguer,
Amie, je suis psy et taulière


Merci Solenne!


Alors, Solenne a chanté la chanson. Et puis comme c’est bien, je partage!


Germaineuh!


Voilà, pour conclure, une de mes chansons préférée de Renaud, que mon oncle me faisait brailler à un âge auquel je n’avais pas conscience qu’une lady ne boit pas de Kanterbrau.
« Germaine, chanson d’amour et d’eau fraîche » : voilà, pourquoi « Volapük, de radio et d’eau fraîche »…


A Tours, la fermeture du foyer Albert Thomas

Voici un endroit dont la mission était d’accueillir des hommes au chaud pour la nuit. A Noël, pour cause de gestion douteuse, le foyer doit fermer. Des hommes qui retourneraient donc à la rue, et des salariés au chômage.
A mes amis Africains, qui croient encore à la France El Dorado, je veux conter cette histoire…


Toujours la même musique


La misère des uns fait les discours des autres. Si je souhaite parler du Foyer Albert Thomas, c’est parce que cette situation me semble trop commune. Les associations comme la Fondation Abbé Pierre, Les Restos du Coeur, le Secours Populaire ne cessent de dire qu’il y a de plus en plus de personnes qui ont besoin d’aide pour simplement manger, dormir au chaud, se laver. Des milliers de personnes pour lesquelles être heureux, être aimé, être considéré, même en bonne santé deviennent accessoire, tant ils luttent pour simplement survivre. Oui, nous sommes en France, en 2017.

Cette situation, constante, ne devient préoccupante que lorsqu’il y a un enjeu politique. Dans cette histoire, j’ai vu sortir de l’ombre des hommes et femmes politiques locaux dont nous avions oublié l’existence. J’ai vu des gens s’alarmer, découvrir que dans notre ville de Tours, il y avait tant de personnes qui pouvaient potentiellement se trouver à la rue. Certains, heureusement ont connus un vrai « réveil citoyen ». J’ai entendu, aussi, en toile de fond, ces discours nauséabonds, qui voudraient trier et opposer ceux qui crèvent dans la rue, d’un coté les « bons SDF français » et les « mauvais demandeurs d’asile » qui viennent soit-disant « profiter » de notre pays. J’ai vu des hommes qui se battent pour garder leur dignité, et j’avais envie de faire entendre leurs voix.


Le 31 janvier 2016 : Radio Campus Tours au Foyer Albert Thomas


Le 31 janvier, nous étions 4 animateurs de Radio Campus Tours à nous rendre au Foyer, pour échanger avec les salariés et les accueillis. Voici l’endroit où vous pourrez écouter cette première émission :

Émission spéciale – Foyer Albert Thomas : le point sur la situation


12 février 2016 : Back to black


Le 31 décembre, nous nous rendions au Foyer Albert Thomas pour rencontrer les salariés et les accueillis, pour qu’ils nous exposent leur point de vue sur « la situation », c’est à dire la fermeture du foyer, le licenciement des salariés et les possibles solutions de « relogement » des accueillis.
15 jours plus tard, la polémique a enflé, le conseil d’administration de l’association qui gérait la structure – 60000€ de déficit – ne s’est toujours pas manifesté, tandis que plusieurs hommes et femmes politiques locaux se sont exprimés sur le sujet; le comité de soutien bénévole aux accueillis et salariés est sur le qui-vive. Mais eux, salariés et accueillis, qu’en disent-ils?

Revue de presse
Dans cet article du 11 janvier 2017, « A Tours le centre d’hébergement d’urgence fermé » sur le site de Libération, on prend pleinement la mesure de la dimension politique de l’affaire, et des intérêts contraires de chacun. Résumé très simpliste : la méchante mairie/préfecture de droite versus les gentils de gauche qui défendent les droits humains, dont des horribles militants rouges, couteau entre les dents. Deux socialistes s’expriment dans cet article avec pudeur, un membre du comité de soutien y dénonce les choix d’une mairie qui ne s’exprime pas, tandis que le porte-parole de la Préfecture s’interroge sur la responsabilité des salariés non diplômés -toujours actifs auprès des accueillis, avec ou sans diplôme – dans la gestion trouble du C.A. mutique laissant un trou de 60000€. C’est le seul article où on lit le nom des salariés et des accueillis et où on rapporte leurs propos.

Pour connaître plus précisément le point de vue de la mairie de Tours et de la Préfecture, il faut aller sur le site info-tours.fr : « Foyer Albert Thomas de Tours : ce n’est pas un collectif qui fait la loi »  On nous rappelle ici que la mairie de Tours est propriétaire des murs du foyer, qui devrait être fermé depuis le 26 décembre 2016, qui ne l’est pas, et qui selon m. Babary, n’est plus géré – par les autorités – et échappe à tout contrôle. Dans l’article de Libération, on lisait plutôt que le foyer était en quelque sorte « autogéré » et n’avait « jamais été aussi propre »… On apprend par ailleurs que dans ce foyer d’accueil de nuit – les accueillis ne sont pas censés y rester la journée, ils sortent le matin et reviennent le soir, c’est expliqué dans notre émission du 31 décembre – la représentante de la DDCS n’a pas pu rencontrer les résidents pour les recenser en s’y rendant un mercredi après-midi, et pis, qu’elle en a été empêchée – par qui?

On prend également conscience de la complexité de la gestion du « drame humain » – selon l’expression d’un élu socialiste cité dans Libération – selon le profil de la personne à la rue : demandeurs d’asile, réfugiés et SDF « commun » ne relèvent pas des mêmes dispositifs, et le « tri » aurait été mal fait à Albert Thomas, mais qui en est responsable? L’article rapporte aussi que les autorités n’auraient pas été alertées sur les graves dysfonctionnements administratifs qui ont mené à la liquidation du foyer. Or, dans notre émissions du 31 décembre, les salariés affirmaient avoir alerté sur la gestion hasardeuse des financements…

Enfin, dans cet article du 12 janvier 2016, sur le site 37° « Statu quo et manifestation pour le foyer Albert Thomas »  , on nous rapporte les positions de m. le Maire et de m. le Préfet, face à celles du collectif de soutien – composé de militants, qui ne sont pas les accueillis et les salariés. On y apprend qu’un repreneur devrait être trouvé pour le foyer d’ici un mois et demi. Et à la lecture de cet article, il semble que le foyer est occupé par des fauteurs de troubles – les membres du collectif de soutien – qui barrent l’accès à la représente de la DDCS, ce qui pourrait contraindre la mairie et la préfecture à passer par « la voie judiciaire » et » ordonner l’expulsion ».

Allons voir!
Étonnée par ces lectures, je me rends à nouveau sur place, pour rencontrer ceux qui semblent avoir disparu du débat : les salariés bientôt au chômage, et les accueillis bientôt à la rue.
Quand j’arrive au foyer, pas un bruit dans la rue, pas de banderole sur la porte, ni d’autocollant syndical. Je sonne, on m’ouvre simplement. Dans la cour, deux jeunes hommes du collectif de soutien préparent avec soin une banderole pour la manifestation de 18h.

C’est l’après-midi, et il n’y a pas grand monde dans le foyer, les accueillis sont sortis pour la plupart, selon le fonctionnement habituel des lieux. L’un d’eux me conduit au bureau où se réunissent les salariés. Ils viennent de lire l’article paru sur le site de 37° et sont partagés entre colère et dépit, de se voir mis en cause dans la « gestion trouble » du foyer, voire d’être taxés d’incompétence. Ils rassemblent leurs idées, pour écrire un communiqué, que l’on peut lire sur le site La Rotative : « Foyer Albert Thomas : réponse des salariés au maire et au préfet ».
Deux accueillis, déja rencontrés lors de notre première venue, acceptent simplement de répondre à quelques questions. On part s’installer dans une salle de réunion. Les couloirs sont calmes, propres; la cuisine bien tenue : on se demande presque où certains ont pu humer un rance parfum d’anarchie, dans ce foyer qui n’a vraiment rien d’un squat…

Parole aux résidents
Où deux résidents nous parlent de la visite « surprise » de la DDCS, qu’ils n’ont pas refusé de recevoir, mais n’ont pas pu renseigner puisque tous les accueillis concernés étaient sortis… comme l’exigeait le fonctionnement habituel du lieu…
Où l’on apprend que les résidents ne refusent pas de quitter le foyer Albert Thomas, pourvu qu’ils ne se retrouvent pas à la rue à nouveau, pas plus qu’ils ne s’opposent aux décisions de la Préfecture. Où l’on apprend que les résidents refusent d’entrer dans le débat politique, qui ne les intéresse pas.
Où l’on apprend que la vie suit son cours « normal » à l’intérieur du foyer : bouffe, calme, et sécurité.
Où l’on mesure combien la distinction entre « public traditionnel » et « public »… autre inquiète et blesse.
Où l’on apprend les événements à venir, samedi 14 : journée « portes ouvertes » au foyer 10h-18h, et événement avec La Barque

Paroles aux salariés
Après nous avoir proposé un café, c’est l’ancien directeur des lieux qui prend la parole, pour dire son exaspération.
Où l’on apprend que les SDF et les demandeurs d’asile n’arrivent pas « comme ça » au foyer, mais selon une procédure spécifique.
Où l’on apprend l’effet du démantèlement de la jungle de Calais sur les centre d’accueil.
Où l’on apprend qu’il n’y a pas vraiment d’endroit où mettre les non-SDF.
Où l’on apprend la défiance des autres associations vis à vis des gestionnaires de l’association du foyer, et que les salariés avaient déjà signalé des dysfonctionnements, que l’association gestionnaire avait été condamnée par les prud’hommes.
Où l’on mesure les effets de la loi du « 1er novembre » et que les accueillis non-SDF-français ne peuvent pas aller en CADA.
Et en conclusion : « On brasse de l’air! »

Douce France
Si vous êtes encore là, je vous propose une chronique littéraire pour vous détendre un peu : Résidents de la République, Marc-Alexandre Oho Bambé. Oui, on reste dans le thème!


[MONDOCHALLENGE] – La drague

La drague, c’est un filet pourvu d’un racloir pour pêcher à la traîne dans les profondeurs. Par extension argotique, c’est aussi la recherche d’aventures sexuelles et ses procédés de séduction… La drague, c’est donc une histoire de pêche et d’appâts. Ainsi, selon l’espèce visée, il faut choisir soigneusement le lieu où l’on déploiera ses filets, et même le type de filet utilisé. Si on ne pêche pas une morue comme…


« Pourvu » – Chanson d’amour

Gauvin Sers, nouveau talent de la chanson française, à qui on doit la chanson « Pourvu »… Mais comme d’hab, on cherche l’amour d’une femme parfaite… Alors Gauvin, je te réponds : voilà ma chanson qui cherche l’homme parfait. Na.

Commençons par écouter l’oeuvre :


Et maintenant, ma proposition :


Pourvu qu’il aille pas pleurer chez sa mère si je dis « FSER »
Pourvu qu’il soit pas pris d’une crise de panique si je dis « post traumatique »
Pourvu qu’il glousse pas bêtement, si je dis « subversif » ou « décadent »
Pourvu qu’il soit pas misogyne, et pas pédant…

Pourvu qu’il aime l’opéra autant que le cinéma
Pourvu qu’il aime les voyages, prendre du son, et les nuages
Pourvu qu’il soit pas trop cynique, et me trouve pas trop bordélique
Pourvu qu’il se dise pas, que mes ancêtres sont pas gaulois…

Pourvu qu’il aime Cavanna, et pas trop Hanouna
Pourvu que la fortune, ça soit pas seulement une question de thunes
Pourvu qu’il lise Sade dans son bain, et fasse pareil dans le mien
Pourvu qu’il soit émotif, et ça suffirait, l’esprit sportif

Pourvu qu’il écrive des lettres, et n’aime pas trop les prêtres
Pourvu qu’il s’arrête pas à mon pedigree et à la taille de mon nez
Pourvu qu’il rie avec moi, du triste monde, de lui, de moi

Pourvu qu’il soit pas trop mondain, qu’il ait toute une bande de copains
Pourvu que ça soit le genre de garçon, qui aime la voix de Gérard Darmon,
l’aventure où on part sans rien, et les vieilles chansons,
Pourvu qu’il soit pas trop terrien, aime les fleurs et les embruns
Pourvu qu’il chante sous la douche le matin,
Pourvu qu’il aime cette chanson, et les sushis au saumon


J’ai soif

Je meurs de soif près de la fontaine… Je pense à Villon quand je vois des mendiants devant les supermarchés, où tout est si en abondance, qu’on finit par le jeter…

Voici un extrait de La Ballade des Contradictions, de François Villon (non, pas Fillon), aussi appelée Ballade du Concours de Blois, puisqu’elle a été écrite en 1458 pour un concours proposé par Charles d’Orléans, seigneur de Blois. Elle commence par un vers du Prince poète, « Je meurs de soif près de la fontaine ».


Je meurs de soif auprès de la fontaine,
Chaud comme feu, et tremble dent à dent,
En mon païs suis en terre lointaine ;
Lez un brazier friçonne tout ardent ;
Nu comme ung ver, vestu en president ;
Je ris en pleurs, et attens sans espoir ;
Confort reprens en triste desespoir ;
Je m’esjouys et n’ay plaisir aucun ;
Puissant je suis sans force et sans povoir,
Bien recueilly, débouté de chascun.


Je meurs de soif près de la fontaine

Je pense à Villon quand je vois des mendiants devant les supermarchés, où tout est si en abondance, qu’on finit par le jeter. Je me souviens à Marseille, en 2013, avoir rencontré les Roms. A l’époque, ils étaient à la mode, et on parlait d’eux un peu partout dans les médias, qui les ont oubliés depuis, alors qu’ils sont probablement toujours expulsés d’un bidonville à l’autre, comme le sont les « migrants » aujourd’hui en vogue, et dont on se sert allègrement pour manipuler l’opinion publique, mettre des fascistes beuglant et gesticulant sur le devant de la scène, tout en laissant soigneusement dans l’ombre ceux qui ruinent le pays en ne payant pas leurs impôts, se servant grassement dans les caisses de l’Etat, exploitant de pauvres gens qui n’ont pas les moyens de se révolter.
Je crois qu’il est honteux d’établir une hiérarchie entre les pauvres. Je crois aussi que la seule chose importante à retenir, c’est qu’aujourd’hui, dans un pays comme la France, des enfants, des femmes, des hommes, des vieillards dorment dans la rue, ont froid et faim. Quelque soit leur couleur de peau ou leur provenance.

Voici le tout premier enregistrement sonore que j’ai fait en 2013, à Marseille, au moyen d’un appareil photo dont j’avais laissé le cache. Ça parle des Roms. Et le montage est un peu bancal 😉 #indulgence

Voici un reportage que j’ai fait le 31 décembre 2014, auprès de personnes démunies accueillies par des associations, la Fondation Abbé Pierre, et les Petits Frères de Pauvres. Bien que catholiques à leur fondation, ces associations viennent en aide à tous, sans distinction, et il n’est pas nécessaire d’être religieux pour y être bénévole ou en être bénéficiaire.


Je meurs de soif
Pour avoir échangé avec des mendiants, ils m’ont dit que la chose la plus terrible, lorsque l’on fait la manche des journées entières en plein soleil, c’est la soif. La sensation de lèvres gercées, qui deviennent comme papier à cigarette, et se déchirent, la bouche pâteuse, où la langue racle les joues sèches, cherchant un souvenir de salive, la gorge en feu, comme lors d’une de ces maladies provoquées par le froid.
J’ai éprouvé cette soif épouvantable lors d’un voyage au Maroc, après des heures de route qui ne semblaient plus finir, dans une vieille voiture qui nous cuisait, aux portes du Sahara… Arrivée à destination, à bout de forces, je me suis jetée sur le premier point d’eau que j’ai trouvé, et j’ai bu tout ce que je pouvais boire. J’ai immédiatement vomi tout ce que j’avais bu, me disant qu’il aurait été avisé de commencer par manger, et puis boire après…


Désert saharien


Près de la fontaine…
Un été, ma grand-mère mourrait à l’hôpital de Valenciennes. J’ai voulu être près d’elle. Elle était déjà entourée d’oncles et tantes. Et de mon grand-père. La navette reliant les gares de Tours et de Saint-Pierre-des-Corps, tôt matin, avait été supprimée, et il fallait prendre un autre train qui allait y passer. Cela n’était indiqué nulle part. J’ai raté – évidemment – le train qui partait de la gare de Saint-Pierre-des-Corps. J’ai raté les derniers mots de ma grand-mère.
Quand je suis entrée dans la chambre, les yeux clos, elle respirait la bouche ouverte, sur le dos, et je voyais, à sa langue rouge et sèche, que comme une plante, elle manquait d’eau.  Je lui ai apporté, de mon mieux, lui tenant la main et puisqu’on me le demandait – « Mais DIS quelque chose! » – quelques mots et chansons en flots doux et joyeux. J’ai eu, je l’avoue, au cours d’une de ces nuits à son chevet, ma main dans la sienne, la lâcheté de la supplier de ne pas me laisser seule. Elle est restée, jusqu’à ce que, tombant de sommeil, je lâche sa main. Quand j’ouvrais les yeux, elle partait, et je n’ai eu que le temps de serrer fort mon grand-père dans mes bras, que j’entendais pour la première fois lui demander, bouleversant et maladroit : « Tu n’as pas trop mal, ma chérie? »
Il faut chanter, chanter quand on a soif, quand on est triste, quand on est heureux, pour être toujours ensemble.



J’ai froid

Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été terrorisée par l’hiver et le froid, et il faut dire qu’ici à Tours, patelin à une heure de TGV de Paris, l’hiver commence en octobre, pour se finir en juin…

J’ai froid
J’ai grandi dans des maisons mal chauffées et, bien que je sois née à la fin du XXe siècle, je sais le poids du drap froid sur mon corps d’enfant en pyjama de pilou… (bon, je dois l’avouer, j’ai piqué cette phrase à Proust). J’ai eu un poêle à pétrole près de mon lit, j’avais peur qu’il explose, ou m’asphyxie. Mais comme les chaussettes de ski ne suffisaient pas à potentialiser l’effet de la tisane « nuit tranquille », il fallait bien se résoudre à laisser allumer le monstre en métal.
Il faut dire aussi que je n’y mets pas beaucoup du mien. Je souffre de la maladie de Raynaud, ce qui fait que tous les hivers, malgré trois pulls, un gros manteau, un bonnet, des moufles en peau, j’ai les doigts tous blancs et insensibles au bout d’un quart d’heure dehors. J’envisage de migrer dans un pays aux températures plus clémentes.


Summum
Je pouvais sembler rompue à l’exercice du froid, et pourtant, il y a quelques années, j’ai eu froid comme jamais… J’étais en apprentissage dans une clinique psychiatrique à 25km de chez moi, pour devenir infirmière. Le permis de conduire est un luxe – 36€  l’heure de conduite, mon budget hebdomadaire alimentaire – que de nombreux jeunes ne peuvent pas se permettre. Alors, j’allais tous les jours en scooter à la clinique. Je devais y être le matin pour 6h30. Je partais à 5h30 en plein hiver, quand il faisait -5°C, parce que quand j’arrivais à la clinique, je ne sentais plus mes mains, ni mes jambes, et c’est la lingère qui m’aidait à défaire mon casque, et à tourner la clef dans la porte du vestiaire. J’arrivais en avance, bien avant tous les autres soignants, parce que je passais mes mains sous l’eau chaude pendant un quart d’heure, et quand la sensibilité revenait, je pleurais de douleur. Il n’était pas question que mes collègues – surtout celles qui se moquaient de moi en trouvant ridicule à mon âge de n’avoir toujours pas de permis – me voient dans cet état. Je buvais des litres de café brûlant jusqu’à 9h environ, heure à laquelle mon corps commençait à vraiment se décrisper. A quinze heures, il fallait repartir. A la fin de la semaine, j’étais si fatiguée par le froid que je m’endormais sur mon scooter. Quand j’arrivais chez moi, je m’écroulais sur le canapé et m’endormais parfois avec mon manteau. Un jour, il neigeait si fort que les patients m’ont interdit de rentrer en scooter, et c’est un collègue qui m’a ramenée. A la fin de l’hiver, quand j’ai retiré mes trois pulls, les gens se sont aperçus que j’avais « fondu au soleil », et que cette silhouette plus fine m’allait bien. Il est vrai que contraindre son corps à puiser dans ses réserves de graisses en l’exposant à un froid extrême peut sembler un peu excessif… Mais pour un contrat en apprentissage où l’on est payé, dans la discipline qui vous intéresse, on est parfois prêt à quelques sacrifices. Étonnamment, je n’ai pas eu un seul rhume cet hiver-là, et 58/60 à la Mise en Situation Professionnelle du Diplôme d’Etat infirmier.

Mourir de froid
En psychiatrie, une fois mon diplôme en poche, j’ai croisé une jeune femme, qui avait été amenée aux urgences en état d’hypothermie grave. Par une nuit de température négative, elle s’était assise en tshirt sur un banc, avec l’intention de « mourir de froid ». Sa vie, ravagée par les malheurs et la drogue, lui était devenue trop difficile. Elle se disait « trop lâche » pour en finir autrement, et elle ne voulait pas imposer à quelqu’un d’autre de la décrocher si elle se pendait, ou de ramasser quoi que ce soit en utilisant une arme à feu. Ce pragmatisme du désespoir m’a toujours étonnée, et si elle avait su lire, je lui aurais volontiers prêté Cioran.
J’ignore ce qu’elle est devenue, si elle est retournée au froid de la rue, si elle s’est « endormie comme un bâton », si elle vit, si elle est heureuse. J’espère seulement qu’elle n’a plus froid.


Cinéma du froid
Jean Renoir – La Petite Marchande d’allumettes – 1928 – 29 min – muet
à regarder sur le site archive.org, où l’on peut télécharger légalement plein d’œuvres tombées dans le domaine public.

Inspiré du conte La Petite Fille aux allumettes d’Andersen, où une petite mendiante, qui n’arrive pas à vendre ses allumettes la nuit de la Saint-Sylvestre,  meurt doucement de froid dans la rue, après avoir craqué les allumettes pour se réchauffer, et faire apparaître un poêle, un dîner somptueux, et sa grand-mère, qui l’avait toujours aimée, et vient la chercher…


Grand-père
Il y a un an, mon grand-père était retrouvé mort de froid dans un terrain vague, après avoir disparu trois jours. Quelques mois plus tôt, il avait été victime d’une arnaque, s’était fait voler des chèques, et une forte somme d’argent. Il dormait avec un marteau sur sa table de nuit.
Les derniers mots qu’il m’a dit, au téléphone, peu avant de disparaître, c’était : « Ah, fais moi rire, Mélissa, tu sais, ce n’est pas très drôle, ici… » Je lui avais envoyé une bande dessinée, Cher Pays de notre enfance, qu’il n’a pas eu le temps de lire, et dans laquelle j’ai trouvé une carte qu’il m’avait écrite mais pas eu le temps de poster.
J’en ai voulu au correspondant du journal La Voix du Nord d’avoir décrit mon grand-père comme un vieux monsieur désorienté portant des chaussures orthopédiques, et de l’avoir fait passer pour un vieux gâteux qu’il n’était pas. J’en ai voulu au service de médecine légale -période de fêtes et état d’urgence aidant – d’avoir mis si longtemps à ne rien conclure et à nous rendre le corps de mon grand-père. J’en ai voulu aux policiers, qui n’avaient pas l’air de prendre très au serieux cette disparition, laissaient entendre qu’ils n’arriveraient pas à coincer les auteurs des vols et de la possible agression.
Mon grand-père avait un diplôme de technicien radio. Mon grand-père a toujours rêvé de retourner au Maroc. Mon grand-père devait être la voix du conte documentaire franco-marocain que je suis entrain d’écrire. A chaque fois que j’ai froid, je pense à lui. A chaque fois que j’allume la radio, je pense à lui. A chaque fois que je fais du vélo, puisque c’est lui qui m’a appris, je pense à lui.
Alors, pour lui montrer que je ne l’oublie pas, j’irai vivre un jour prochain dans un pays où il ne fait jamais froid…


Salim Hatubou – auteur comorien

Un auteur comorien, trop tôt disparu, dont la voix, de Marseille parcourait les rues…
La vie est faite de liens invisibles, si beaux… Mon ami photographe marseillais Jean-Pierre Vallorani m’a montré un travail photographique et poétique co-écrit avec Salim Hatubou. Encore sous le choc de sa disparition, il parle dans l’enregistrement que je vous propose, de leur amitié. Cet enregistrement est illustré par des chants de Bi Kidude, et des lectures de poèmes par un ami de Salim Hatubou, l’auteur malgache Jean-Luc Raharimanana, que j’ai rencontré à Tours, chez moi… Alors, Salim, je te lis mais ne te peux connaitre autrement que dans tes livres et dans le regard de tes deux amis, et je te dédie cette émission…

 

Bibliographie de Salim Hatubou
2004 – Recueil de contes ‘A Feu doux’ et ‘Contes et Légendes des Comores’
2006 – Roman – Hamouro
Comores – Zanzibar par Salim Hatubou et Jean-Pierre Vallorani


France : macho mouchkil !

Patrie des Droits de l’Homme. On verra pour la femme… Surtout au travail.
Rappel historique sur ce beau pays des « Droits de l’Homme » : en 1793, pour avoir osé rédiger « La Déclaration Universelle des Droits de la Femme et de la Citoyenne », réclamé le droit de vote pour les femmes, le droit de divorcer, Olympe de Gouges fut… décapitée par les… « Révolutionnaires ». #lose
(NB: lose et loose, c’est point pareil!)

Pour étaler ma science et glisser une de mes chroniques littéraires pour Radio Béton, radio rock associative de Tours, j’éprouve le besoin de dire que pour ce qui est des droits des femmes, notamment en terme de liberté sexuelle, l’illustre marquis de Sade (1740 – 1814) était plus révolutionnaire, que les révolutionnaires. Pour entendre la chronique, cliquez là-dessus. Oui, le site de la radio ne permet pas d’inclure cette oeuvre dans la page, et très curieusement, la même chronique publiée sur ma page soundclound a été purement et simplement… supprimée.


Pause Musicale
Claire Diterzi – à quatre pattes


En 2016
En 2016, en France, dans ce pays qui s’insurge contre la condition des femmes d’ « ailleurs », être une femme :
– C’est toujours être payée moins pour le même travail, à niveau d’études et compétences égaux.
– C’est devoir être excellente, là où un homme peut se contenter d’être bon, voire médiocre.
– C’est devoir « se faire belle » (pour plaire à qui?) ou au moins « faire un effort » pour ne pas déplaire (à qui?), et être souriante, gentille, séduisante, amusante, divertissante… mais surtout pas trop intelligente, sinon, #chiante.
– C’est  encaisser les remarques, regards dégueulasses moralement, avec peu de chances d’être soutenue, si on se plaint. #hystéro

Comme certaines femmes en ont marre – et même si on ne doute pas qu’il faudra des siècles pour que ça change, ah non, c’est vrai, les pays scandinaves… – les pages pour dénoncer ce qu’elles subissent au quotidien se multiplient. En voici deux :
Paye ton Taf : un Tumblr qui regroupe des témoignages de sexisme au travail, cocktail de phrases et situations réelles, fleurons de la beauferie masculine made in France.
– Chair collaboratrice : créée par des femmes travaillant à l’Assemblée Nationale, Sénat, Ministères, Administrations locales, suite à l’ Affaire Baupin, pour dénoncer les agressions, violences et pressions dont sont victimes les femmes politiques, là où devrait s’accomplir le devoir d’exemplarité.


Ma vie, mon oeuvre
Avoir ma première carte de presse en 2015 m’a coûté 3 mois d’arrêt maladie pour cause de harcèlement moral par un chefaillon auto-proclamé, qui ne voyait pas d’un très bon œil qu’une femme de 20 ans de moins que lui, plus diplômée que lui, plus – osons le dire – efficace que lui ait le culot de prétendre être journaliste, et n’entre dans aucun rapport de séduction. Mon dossier  pour la CCIJP a été sciemment bloqué, avant que je décide de l’envoyer moi-même après avoir récupéré les pièces administratives dont on m’interdisait l’accès. J’ai du faire face aux mails, appels, sms, courriers incessants, agressifs, insultants, menaçants. Cette personne a même essayé de contacter la SCAM – Société Civile des Auteurs Multimédia – pour se prétendre auteur de mes contenus radiophoniques. Et tout ça pour quoi? Je suis une femme, et je ne fais pas le café.
Le plus beau, dans ce genre de situation, c’est que le plus souvent, beaucoup de gens le savent, mais personne ne vous soutient. Ou presque. Et tout ça pour quoi? Il est communément admis que les femmes doivent s’écraser devant les hommes.

#FluctuatNecMergitur
Puisque j’écris ce post, mesdames, messieurs, c’est que je suis toujours là. Ce constat me met dans un état plutôt joyeux, je dirais même que j’écris ces lignes avec une satisfaction évidente. J’espère – mais c’est déjà le cas! 😉 – connaitre d’autres blogueurs/euses qui se battent pour les droits des femmes. Je crois aussi qu’il est stupide de comparer des situations qui n’ont rien à voir, pour en déduire que « Quand même, en France, il n’y a pas de quoi se plaindre. » En rhétorique, ça s’appelle… une moisissure argumentative.


C’est quoi ce titre?
Macho mouchkil : le sexisme ordinaire au Maroc. Voilà, à l’origine, ça vient de là.


Mes « gueulardes » préférées

Parce qu’il n’y a pas qu’à l’opéra que les femmes donnent de la voix, voici quelques sauvages, de France et de Navarre, pour se réjouir les tympans. Grrrls to the front!

Allemagne – Nina Hagen – 1979
En vérité, je vous le dis, la seule et unique raison que j’ai jamais eu d’apprendre l’allemand.
Contorsions faciales incluses.


France – Les Rita Mitsuko – 80’s
Catherine Ringer, sublime voix du duo les Rita Mitsuko ; son binôme est Fred Chichin. Je vous recommande leurs clips complètement déjantés ; ça change des lovers dans le soleil couchant…


USA – L7 – 90’s
Riot Grrrls! Girls to the front! Voici les L7, illustres représentantes de ce qu’étaient les Riot Grrrls – punk féministe – dans les USA des années 90. Vous pouvez aussi allez donner de l’oreille aux Bikini Kill.


USA – Sallie Ford and the Sounds Outside – 2007-2013
Tiens, bouge ton boule avec ça le matin, à 6h.


BONUS
France – Brigitte Fontaine

Bon, elle, elle ne gueule pas vraiment, mais elle est tellement extraordinaire, que je la mets quand même.

Je suis fière d’être une femme, et je suis fière de ces femmes qui osent être elles mêmes, se moquent des codes, ne veulent pas être seulement jolies, mais aussi être de vraies artistes, trouver leur style, leur voix et reconnues comme telles.


Les White Fat Bottomed Girls (filles blanches à grosses fesses)

Source de mal-être chez de nombreuses jeunes filles européennes, qui croient devoir ressembler à des salsifis pour atteindre un certain idéal de beauté, mériter l’estime de leurs proches, susciter la concupiscence chez le sexe opposé, la proéminence postérieure mérite que l’on s’attarde sur elle.
Soyons honnête. En France, lorsque l’on cherche un jean à un prix abordable, et que la Nature a voulu vous donner une face B* avantageuse, on approche du calvaire. Trop large à la taille, et une taille en dessous, on se demande si les coutures ne vont pas craquer si l’on se laisse tomber lourdement sur un fauteuil en skaï Ikea, un soir de lassitude. Quant au slim, il faut assumer, sinon, l’impression d’être boudinée risque d’empeser la démarche et de crisper le sourire. Notons quand même la petite révolution qui se produisit le jour où les fabricants de maillots de bain eurent l’idée géniale de permettre aux clientes d’acheter séparément le haut et le bas de leur maillot ; ce qui permit à de nombreuses femmes de ne plus échanger sournoisement dans la cabine d’essayage le bas fourni avec la taille M, avec celui de la taille L. Un petit pas vers le fait de ne plus être considérée comme une anomalie génétique et commerciale…

face B* : rendons à César ce qui est à César : j’ai trouvé cette belle expression dans Black Bazar, de Alain Mabanckou, où l’on trouve d’ailleurs un éminent fessologue.


Pour éclairer cette réflexion de haut vol, il convient de convoquer une spécialiste en la matière : la très géniale chanteuse Anne Sylvestre, qui donne dans la chanson à texte, toujours pleine d’humour :

L’étude de cette oeuvre,  dont on notera la richesse du vocabulaire et la pertinence du propos, montre que se depourvoir de formes donne une allure maladive aux chétives, et rend leur rapport aux bancs implexe et douloureux. Pour abonder dans le sens de Anne Sylvestre, regardons à présent cette vidéo de danse traditionnelle tahitienne :

De toute évidence, la grâce et la beauté de la danse est liée à la grâce et à la beauté de la danseuse, et l’on voit ici que Moena Maiotui ne s’habille surement pas en taille 0. Pour convaincre les sceptiques, regardons à présent cette vidéo où des jeunes femmes très minces et à la face B modeste tentent de « shaking their ass », sans résultat convaincant :

D’ailleurs, sur ce blog Ligne de Frappe, dédié à la culture Hip Hop et capharnaüm littéraire, on peut lire en trois parties un éloge de PAWGs, les Phat Ass White Girls. Puisqu’on vous le dit : #pride! Allez, puisque c’est Queen qui le dit :

Come on, once again! 😉

#Vocabulaire

Et pour terminer, plein de mots pour désigner notre partie charnue : fesses, cul, boule, oignon, arrière-train, noix, brioches, pétard, popotin, lune, derche, fessier, fessard, face B, croupe, miches, panier


[MONDOBLOG] à Antananarivo

Je suis la blogueuse sonore qui – parait-il – ne parle pas beaucoup, beaucoup… Comme d’autres font ça très bien, je préfère garder mes forces pour écrire ici, et partager sons et photos… 😉

Alors, déjà est-il bon de rappeler quel bon vent m’amène à Antananarivo – je dis « je », notez cette nouveauté qui, lorsque l’on est pétrie de « Le moi est haïssable » est une petite victoire – car j’ai la chance d’avoir été invitée par Mondoblog pour participer à une formation. C’est aussi l’occasion de rencontrer les blogueurs et de découvrir le sommet de la Francophonie. Si vous sechez un peu sur ce qu’est la Francophonie, vous pouvez lire l’article de Clara Delcroix, mondoblogueuse lycéenne de 17 ans : La francophonie, vous dites? C’est quoi?

Mais qui dit voyage, dit « voyage »… Le train partait à 6 heures. Vous conviendrez que dans un cas comme celui-là, mieux vaut ne pas se coucher. Le train SNCF avait du retard. Alors, j’arrête tout de suite les mauvaises langues qui diront « comme d’habitude ».  Allons, allons, ce n’est pas toujours vrai ; et le prix exorbitant des billets ne me donne plus trop l’occasion de mesurer ce phénomène. Je pratique donc la présomption d’innocence. Lecteur potentiel, voici pour toi en exclusivité mondiale un extrait sonore de ce voyage qui a débuté à 6h30 heure française pour s’achever sur le coin de l’oreiller, à plat ventre, toute habillée à 5h50, heure malgache.

A l’aéroport, je m’endors non loin d’un autre blogueur malien, Georges Attino, qui apprend le tamasheq, et dont le blog s’appelle Au Grin , « il se dit beaucoup de chose autour d’un verre de thé ». Je découvre à cette occasion que le grin est le lieu où on boit le thé, et où l’on discute. Je pense rêveusement au Green Bar de Lussas… Ma camarade de chambre est Sonia Guiza de Côte d’Ivoire, passionnée de cinéma, et qui entend bien promouvoir le cinéma ivoirien sur son blog Lagozi.

La vraie vie dans les livres…

Pour ne pas arriver complètement ignare à Madagascar, j’ai fait la seule chose que je sais faire : lire des livres et faire du son.  J’ai donc lu Jean-Luc Raharimanana et Johary Ravaloson (non, normalement, on ne dit pas « joari » mais plutôt « dzohar », je crois, mais personne n’est parfait…). Dans l’avion, j’ai lu Lucarne, de Jean-Luc Raharimanana, un recueil de nouvelles sombres, qui donnent à voir l’envers du décor de Madagascar ; la violence, le sang, et la nuit sous la pluie.
J’ai enregistré ces deux auteurs à Tours, Jean-Luc Raharimanana à l’occasion du Festival Plumes d’Afrique, et Johary Ravaloson à l’occasion d’une rencontre littéraire dans un café, proposée par l’association Touraine Madagascar, et animée par Jean-Luc Raharimanana. Avec ces deux enregistrements, je veux tisser une série d’émissions, autour de la littérature malgache, et plus largement, donner à voir Madagascar.
Voici donc le premier épisode de mon acclimatation littéraire :

Le séjour se poursuit, je rencontre Lucrèce, béninoise vivant au Sénégal, qui comme elle l’écrit sur son blog Lucrèce online, est une « technophile à temps partiel ». Et comme c’est la saison des orages et des litchis, nous ne coupons pas à la promenade annulée pour cause de déluge. Extrait :


Pour vos beaux yeux
Comme je ne boude pas le plaisir de faire quelques photos, et que je devine chez mon public potentiel une appétence pour le support visuel, voici donc un album photo que je garnirai au fur et à mesure.

Mondoblog à Tana
I
l n’aura pas échappé à votre oeil de lynx que ces photos sont carrées, et non retouchées. J’ai longtemps fait des formats paysage noir&blanc, puis ayant eu l’occasion de rencontrer le photographe marseillais Jean-Luc Vallorani, qui fait des formats carrés argentiques, j’ai testé, et adopté ce format. Curieusement, je trouve que ça « concentre l’action » visuellement, comme dans une nouvelle par rapport à un roman…


Dans le bus
Les trajets en bus sont une occasion de parler de nos blogs respectifs. Je découvre ainsi Choups raconte, par une malgache vivant à Paris. Et le blog de la malienne Fatouma Harber, qui donne des formations informatique et internet aux enfants, et milite pour l’accès au savoir.
Et lorsque le bus est pourvu d’un guide et de blogueurs curieux, ça donne ça :

Et pour poursuivre sur le thème des transports malgaches, voici un article très drôle par le blogueur malgache, Randriamialy sur son blog Lay Corbeille : La logique dans les noms de véhicules à Madagascar.


#JeSuisImmodium
Si ça se trouve, c’est à cause des litchis. Si ça se trouve, c’est à cause de la pluie. Si ça se trouve, c’est d’avoir bu l’eau du robinet. Si ça se trouve, c’est les courants d’air. Si ça se trouve, c’est la malarone. Si ça se trouve, les crevettes étaient pas bonnes. Si ça se trouve, c’est la viande de zébu. Si ça se trouve, j’ai le palu. Si ça se trouve, je vais me transformer en zébu et me faire voler par des Chinois qui me transformeront en brochettes…

medocs


« Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus. »

Ainsi parlait Pina Bausch. Comment parler de la danse à la radio ? J’ai donné la parole à trois chorégraphes dans mon émission Le Dahu, et je vous propose de les écouter parler d’une langue qu’ils réinventent constamment.

Au CCNT – Centre Chorégraphique National de Tours – Catherine Gaudet, artiste en résidence, et Thomas Lebrun, directeur du lieu.

Nadia Chevalerias : Responsable de la communication et de la coordination des accueils studio au CCNT,
Catherine Gaudet : chorégraphe de Montréal en résidence au CCNT, Heure Curieuse : présentation d’une étape de travail de sa prochaine création « ça viendra » : le public est invité gratuitement à voir, à s’étonner et à échanger avec l’artiste.
et Thomas Lebrun : Directeur du CCNT, présentation des liens entre le CCNT et Montréal, et de sa future création (novembre 2016) Les Rois de la piste.

 

Tal Beit Halachmi, compagnie Talita Koumi, Tours

itinéraire d’une danseuse d’Israël jusqu’à Tours… Création Progénitures d’après Guyotat…

Festival Ecoute Voir 2016

Francis Plisson, directeur du festival, et Radio Grenouille de Marseille, avaient demandé pour cette édition de participer à une émission en direct dans le cadre du festival, avec et en présence des artistes invités, et dont on a pu voir ou revoir le travail.

« En direct sur Radio Campus Tours, depuis le Volapük – salle de spectacle tourangelle, eh oui, c’est involontaire, mais mon blog à le même nom! – Alain Werner et MPW reçoivent les artistes et organisateurs du festival pour revenir sur les temps forts de cette 6ème édition. A la technique, Solenne Berger et Stéphane B. »
Extraits musicaux parcourant nos propos: Sébastien Rouiller – bande-son du spectacle Western – extrait de New Age, de Marianne Baillot, premier intermède chanté par Charlotte Plasse, composition pour voix a capella de Pierre-Yves Macet – extrait de Jass, performance captée à la Librairie Le Livre par Cyril Solnais – extrait voix et souffle, de Pourquoi Moi? d’Emmanuelle Raynaut – extrait de l’interview de Zimoun, à l’ESBA TALM, par MPW et Alain Werner, traduction Matthieu Roger – extrait Helène Rocheteau – La Nuit Manquante


ALPHA – Nouvelle prix Rock Attitude 2016

ALPHA est la nouvelle pour laquelle j’ai reçu le prix annuel Rock Attitude, décerné par la plus ancienne radio associative de Tours, Radio Béton. Le thème du concours était « Savants fous et fous savants ». Bonne lecture!

Bureau obscur et très secret, dans un lieu insoupçonné du commun des mortels. Il y a plusieurs écrans immenses ; des post-it sur toutes les surfaces qui s’y prêtent, couverts d’annotations incompréhensibles, dans une écriture porcine. S’échappant d’un ipod sur enceinte, son léger et compressé : La Belle Hélène d’Offenbach. Le Colonel lape son café deux ou trois fois, en aspire la mousse d’un mouvement de lèvres sonore, puis d’un air satisfait, se tourne vers Maxwell :

− Aucune chance.

− Je vous trouve bien catégorique !

La tasse vient de se poser sur le bureau. Maxwell, que ces succions caféières dégouttent, avait détourné le regard. Au bruit de porcelaine sur le plateau de verre, il tourne à nouveau son fauteuil vers le Colonel, d’un mouvement de pied lent et calculé. Le Colonel renifle d’un air sûr de lui, et poursuit :

− Vous pouvez élever le potentiel autant que vous voudrez, avec les tares Alpha et S4, aucune

chance d’émergence du clone.

− Il y a de nombreux contre – exemples, avec S4 !

Le combat de coqs est engagé. Resté debout, le Colonel toise Maxwell, qui semble engoncé dans son fauteuil de bureau en cuir. Assis, Maxwell toise le Colonel, qui semble engoncé dans son uniforme. Plissant légèrement les yeux, tandis que Maxwell remonte ses lunettes d’un index décidé, le Colonel poursuit :

− Bien sûr… Trouvez-moi ne serait-ce qu’un exemple pertinent de sujet qui, cumulant Alpha et

S4…

− Je suis sûr que c’est possible.

− … sans aucun auxiliaire Bêta, a émergé…

− C’est toujours possible !

− …grâce à son unique potentiel, de façon totale et durable.

− Faisons l’expérience !

Tous deux dissimulent tant bien que mal le plaisir et l’amusement que cette perspective leur laisse espérer. Maxwell replace soigneusement sa mèche de cheveux roux. Le Colonel voit à juste titre un affront à son crâne dégarni dans ce geste apparemment anodin. Il émet un claquement de langue, auquel répond un grincement de fauteuil.

− Vous aimez perdre à ce point ? Pourquoi pas, ça peut être amusant. Je gagne, vous arrêtez de m’emmerder avec l’arrosage de mon terrain de golf avec la réserve d’eau potable. Vous gagnez : vous aurez cette satisfaction au moins une fois dans votre vie.

− Vous êtes trop bon, Colonel.

− Je vous laisse chercher les hôtes idéals, mon cher Maxwell.

Du bout des pieds, Maxwell se fait rouler jusqu’à l’écran le plus proche :

− La base de données recense toutes les demandes d’insémination artificielle à l’échelle de l’Union Européenne ; on peut trier directement tous les S4. Et on se charge de leur fourguer un embryon Alpha HP.

Le Colonel, prenant appui sur sa canne, se dandine jusqu’à l’écran, et s’arrête à coté du fauteuil auquel il s’accoude :

− Prenons plutôt un S4/2 ou S4/1 ; avec un S4/4, ce n’est pas amusant.

− Bon, on part donc sur un S4 léger à moyen, et on évacue les S4 lourds. Un pays de prédilection ?

− On va prendre le plus banal : France, ville de taille moyenne.

− J’ai un profil correspondant à Tours, au centre du pays.

− Vous avez le profil des deux hôtes potentiels ?

  • Oui

Avec la mine réjouie de deux adolescentes faisant les soldes en ligne, Maxwell et le Colonel consultent les fiches transmises par les informateurs.

CODE . La Gloire de mon père. Hôte Bêta.S4-2

Taille moyenne, corpulence moyenne. Yeux gris, cheveux châtain foncé. Forte myopie. Enfant non désiré, il a failli être vendu à sa naissance à un riche couple de commerçants juifs stérile, qui louaient un fond de commerce à ses parents. A passé toute son enfance en pension chez des religieuses. Ancien de l’Armée de Terre. Plusieurs années au Tchad. Orthographe et culture générale indigentes, recalé quatre fois au baccalauréat. S’est engagé à l’issue de son service militaire ; puis a quitté l’armée suite au décès de son grand-père maternel, l’héritage lui a permis de monter un bureau d’études, dont la compétence est difficile à déterminer. Il s’en sert vraisemblablement pour détourner de l’argent. A fait plusieurs fois le coup de l’insolvabilité. Militant d’un parti d’extrême droite et directeur d’une chasse de parvenus. Misogyne, coureur de jupons et raciste. Haine particulière pour les Maghrébins et les personnes à la peau noire. Fort mépris pour la classe ouvrière -se considère comme appartenant à la classe des patrons – et les « intellectuels ». Nombreuses arrestations pour conduite en état d’ivresse, et excès de vitesse. Son amitié avec le préfet lui permet jusqu’à présent d’échapper à toute condamnation. Dépourvu de conscience morale, d’empathie. Humour exclusivement ordurier, raciste, à connotation sexuelle. Pas de second degré, inaptitude au raisonnement par l’absurde, difficultés à l’abstraction. Prend plaisir à humilier et maltraiter plus faible que lui. Obséquieux avec toute personne qu’il identifie comme un supérieur hiérarchique. Aime excessivement l’ordre et l’hygiène. Se croit au-dessus de toute loi, règle, ou règlement. Aime l’argent qu’il considère comme le pouvoir absolu et un but en soi. Aime le tape-à-l’oeil, phases d’humeur haute où il dépense des sommes colossales pour des objets qu’il abandonne par la suite. Considère les femmes comme des objets au service des désirs et des besoins masculins. A engrossé plusieurs de ses maîtresses, dont la secrétaire du bureau d’études, la charcutière du quartier, la femme d’un de ses employés. Ont toutes avorté en découvrant qu’aucune reconnaissance de paternité ne serait possible, ni vie de couple. Une pourtant, plus tenace que les autres, a déjà mis au monde un fils non reconnu ; c’est elle qui fait la demande d’insémination.

CODE . Le Château de ma mère Hôte Alpha.Tare Alpha.S4-2.

Taille moyenne, surpoids moyen, yeux marron, cheveux châtain foncé. Légère myopie. Femme ayant une quasi anovulation ; a eu recours au service de procréation assistée pour sa première grossesse. Elle était volontaire pour prendre un traitement novateur dopant la fertilité. Convaincue qu’un deuxième enfant ferait naître chez le père du premier un sentiment de paternité ; prête à tout pour avoir ce deuxième enfant, y compris l’insémination artificielle, y compris mentir sur le fait que le père n’a vu son fils que deux fois depuis sa naissance, y compris demander une mutation du Sud de la France où elle a son réseau familial pour « rapprochement familial ». Secrétaire dans un service public. Vie sociale pauvre, peu d’intérêt pour la vie culturelle et les sorties, bien qu’elle se plaise à se dire « littéraire », qu’elle a étudié le Latin pendant sept ans, ainsi que le Russe. Orthographe, grammaire et syntaxe excellentes. Un certain humour. Trouve l’abstraction ennuyeuse et pédante. Souhaite exclusivement un deuxième garçon. Comportement puéril, humeur changeante, capricieuse. Rêve de grandeur (Scarlett O’Hara), survalorise la beauté féminine. Futile et superficielle. Minaude beaucoup, aime les tenues voyantes et les accessoires. Extrêmement narcissique, bien que d’un physique quelconque. Se complaît dans des rôles de victime innocente, se plaint à tout propos. Thème familial : se définit comme un enfant non désiré – « ils me voulaient pas » – qui a toujours manqué d’amour, à laquelle sa mère a toujours préféré son frère cadet. Thème scolaire : était la plus jeune de sa classe à l’école et mise à l’écart. Thème social : rejetée par tous en tant que fille-mère. Toutes ces rêveries mélancoliques sont très théâtralisées, très excessives, voire fausses. Adepte des plans sur la comète et d’une secte. Est son principal centre d’intérêt et sujet de conversation. Mesquine et jalouse. Volontiers médisante et de mauvaise foi. Naïve, impressionnable et crédule ; s’est fait arnaquer à plusieurs reprises. Versant dépressif, revendique beaucoup, mais cède facilement. Forte inertie, agressivité passive. Le Colonel ronronne intérieurement. Maxwell oscille de droite à gauche dans son fauteuil.

− Bon, je crois qu’on tient le haut du panier. Pas besoin de chercher plus loin. Vous me faites un embryon tare Alpha – HP ; pour le labo, c’est XX – 140. Précisez-leur , la dernière fois ces abrutis ont interprété « tare Alpha » par XXX. Quant à HP, ils vont nous pondre un schizo, ou se demander si l’imprimante est en panne… Alors qu’ils clonent des neurones à longueur de journée… Quelle bande de branques !

Et pour lire la suite, demandez-moi! 😉