Conakry, à chacun son « 31 »

Embouteillages monstres, pétards, feux d’artifice, valse des vestes et des robes, les fêtards de Conakry, comme à l’accoutumée, ont célébré le 31 décembre 2010 dans l’effervescence. Ni la crise économique aigue qui frappe le pays, encore moins les prêches répétées et enflammées des imams n’ont dissuadé les fêtards.

Pourtant, ces deux derniers vendredis, les imams, dans leur sermon, ont désespérément rappelé que la Guinée est un pays à « 95% musulman » et que « 24 et 31 sont des fêtes chrétiennes ». Ils ont évoqué le supplice de Diahannama, Houtama, et Hawia qu’Allah réserve aux réfractaires. Les jeunes, puisqu’il s’agit d’eux, ont, dans leurs caftans de circonstance, sagement écouté ces terribles mises en garde divines. Le 31 décembre, ils ont passé outre et ont troqué leurs caftans contre des tenues ultra exotiques.

On a rivalisé d’élégance pour séduire son ou sa partenaire et se faire valoir. Costume-cravate et souliers pour les garçons, robe et talons pour les filles. Du côté de Kaloum et de  certains quartiers huppés de la capitale, on pouvait apercevoir des play-boys tirés à quatre épingles, « faroter » avec de charmantes ladies. Dans la haute banlieue, c’était plutôt un assortiment d’accoutrements et des couples dépenaillés. Des costumes anté-diluviens masquaient très mal des cravates démesurément longues, décrochées à la grille du marché central de Madina. Quant aux demoiselles, certaines ont voulu s’habiller « classe » avec des robes couleur arc-en-ciel  (rien à avoir avec l’autre) qui entravaient dangereusement leur démarche. Celles qui ont opté pour le «  New Look » arboraient des bodys, style DVD (Dos et Ventre Dehors). Leur corps, moulé dans un pantalon de la taille d’un intestin grêle, faisait ressortir leurs « avantages » à vous faire perdre le réseau ! Tenue idéale pour faire « Sautoka le mur » quand les parents s’assoupissent.

La rue, les bars, les restos et les discothèques étaient archicombles.  En couple ou singleton chacun a tenu à marquer de son empreinte l’année 2010 qui s’en est allé ; comme pour défier le sermon des imams. A cause de la galère, beaucoup ont cotisé pour organiser des soirées à domicile. Raccourci original pour sortir avec sa go. Certains mecs, pauvres comme des rats d’église, ont tout simplement éteint leur téléphone  sous l’avalanche des appels, évitant ainsi de perdre la face devant leur meuf.

En tout cas, qu’on soit de Kaloum ou de la haute banlieue, véhiculé (e) ou pas, cocu (e) ou couplé (e), on aura célébré le 31 décembre 2010, chacun à sa manière. L’alcool a même coulé à flots, obligeant plusieurs à rendre visite au garagiste ou, pire, au chirurgien.

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Auteur·e

limsow

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