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Les ‘’ Alludje’’ : Ces structures traditionnelles qui favorisent la paix et l’harmonie au Fouta Djallon

Traditionnellement la planchette est l’ardoise en bois sur laquelle tous les petits enfants apprennent les rudiments de la parole sacrée : le Coran .
La planchette est si importante que la classification sociale au Fouta Djallon notamment à Labé utilise une nomenclature lié à cet instrument .
De nos jours le nom ‘’Alluwaal’’ sert à désigner chacun des 4 groupes sociaux qui renferment les habitants de la cité et à chacun de ces ‘’alluwaal ‘’ correspond une des portes de la Mosquée fondée par Karamoko Alfa mo Labé au 18 ème siècle.
Chaque cérémonie cultuelle est l’occasion d’honorer ces 4 entités dont les rôles sont bien distincts au sein de la communauté.
Le premier de ces 4 ‘’Alludje ‘’ est ‘’Alluwaal Kalidouyabhe’’ littéralement la planchette des descendants de Kalidou l’aïeul des Diallo de Labé ainsi que de tous les descendants du patriarche Karamoko Alfa à Popodara ou encore Mali.
– Les Kalidouyaabhe
– Les Awlube (maitre de la parole traditionnels dont l’origine remonte au passage du conquérant Elhadj Oumar Tall sous le règne de l’Almamy Omar dixième souverain du Fouta Théocratique et père de Bokar Biro.)
– Les Kalibori
– Les Iloyaabhe
– Les Lawbhé
– Les Maa Sadjouma (descendant d’un ancien compagnon de Karamoko Alfa, ce nom désigne tous ses descendants aussi de nos jours)
Ensuite il y a ‘’Alluwaal Dow Saaré ‘’qui comprend :
– Les Ndouyebhe
– Les wolaarbhe
– Les sarambhe (familles Sarakolés installées au cœur de Labé et originellement venues faire du négoce)
– Les Diakabhe (descendants de Soumanfodé Diackaby l’un des deux marabouts qui ont aider Karamoko Alfa à juguler les forces surnaturelles qui entravaient l’érection des murs de sa mosquée)
– Les Garankebhee (descendants de l’autre des deux marabouts qui ont aider Karamoko Alfa à juguler les forces surnaturelles qui entravaient l’érection des murs de sa mosquée)
– Les maninkaabhe (personnes originaires de l’ancien Mandé établies à Labé par le truchement de l’histoire et du négoce)
– Les étrangers de passage.
En troisième position il y a ‘’Alluwaal Talibabhe ‘’, dérivé du mot arabe Talib signifie apprenant ou disciple ou encore élève en parlant du Livre Sacré le Noble Coran. Neuf groupes de familles composent cette entité :
– Les Ngueriyaabhe
– Les Mbalbhe
– Les Ndiobboyaabhe
– Les Nyogueyaabhe
– Les Houssanayaabhe
– Les Hammadiyaabhe
– Les Pateyaabhe
– Les Dikooyaabhe
– lesYilaabhe
Enfin nous avons ‘’Alluwaal’’ Adaadul Kabir ‘’ comprenant :
– les seleyaabhe
– les Ferobhe
– les Macinaabhe
– les Timbonkebhe
– les Djimbalaabhe
– les djembeleyabhe

il convient de souligner que dans cette quatrième entité ,les Djimbalabhe sont traditionnellement ceux qui sont habilités à prononcer les bénédictions conclusives d’une assemblée .


Baba Wouro: Témoin de l’histoire des peuhls du Fouta Djallon

En pular ‘’Baba wouro’’ signifie le maitre du troupeau lato sensu ce nom symbolise l’abondance et le prestige et l’histoire de cet instrument multiséculaire n’en est pas moins prestigieux.
Conçu en 1650 par un chroniqueur traditionnel Farba Hammady (Farba désigne les maîtres de la parole attitrés dont la connaissance fait l’unanimité et l’art de parler école AU Fouta Djallon).
Leur origine se confond souvent au passage du conquérant Elhadj Oumar Tall sous le règne de l’Almamy Oumar Barry dixième Almamy du Fouta et père des princes Alpha Mamadou Pathé et Bokar Biro.
Ainsi de père en fils l’instrument de Farba Hammady transitera par les mains de Farba Oumar son fils qui le léguera au sien Farba yaya Bendjou qui le laissera à Farba Keba qui à sa mort le laissera aux mains de son Garçon Thierno Yaya Sow qui berce jalousement l’ancestral instrument depuis un quart de siècle.
L’actuel gardien de ce patrimoine Thierno Yaya Sow nous a fait un petit laïus sur le nom donné à cette guitare traditionnelle : « partout où l’instrument a conduit les pas de mes aïeux ils ont rencontré de la bonne fortune et ont ramené des bœufs,car chez les peuhls rien n’égale ni ne surpasse le bœuf quant il est question de richesses . »
L’histoire dans sa course a vu parfois l’ancestral instrument de musique changer de costume et dans cette mutation la coutume exige l’immolation d’une vache de celle qu’on qualifie de rouge dans le terroir et dont la peau du front devra servir à faire un nouvel habit pour ‘’Baba Wouro’’.
Si des virtuoses de la parole ont laissé leur empreinte sur l’illustre instrument, celui qui aura sans doute vendu sa plus belle image est sans conteste Farba Keba son avant dernier usager car l’homme est l’auteur de grands classiques enregistrés et vendus aujourd’hui sous formes de cassettes.
Ces œuvres sont entre autre : récit de la vie de Bokar Biro Barry (dernier Almamy du Fouta),récit de la vie de Alpha Yaya Diallo (dernier roi de Labé encore surnommé par les griots ‘’Gallissa Sané’’ en référence des origines de sa mère princesse du Ngabou et fille du redoutable Dianke Waly’’,récit de la vie de Samba Gueladio héro peuhl dont les aventures sont innombrables et empruntes de courage et de témérité, mais aussi de nombreuses cantiques et louanges au Prophète Mohamed (PSL).
380 ans après sa conception ‘’Baba Wouro’’ est loin d’avoir achevé son cycle et s’impose comme un témoin vivant de l’histoire peuhle du Fouta Djallon de ses origines à nos jours.


La rançon de la honte

C’était lundi premier jour de la semaine, tout le monde ou presque s’affairait à rallier son lieu de travail pour les adultes et l’école pour les jeunes, oui tout le monde sauf le vieux Mory qui venait d’avaler un bol de bouillie de mais dont la cuvée le retenait encore sur sa chaise.
L’homme était un notable de ceux qui servent les citoyens à la mosquée, de tous il était respecté et écouté car pour tous il était un exemple de droiture et une référence qui accomplissait ces obligations religieuses à la mosquée quelque soit la météo.
Jusque là rien ,ni personne n’avait su ternir cette image de sage qu’il présentait.
Ce lundi donc ,la petite Fatou comme à son habitude déambulait entre les concessions, son plateau de beignets sur la tête ,elle racolait les clients. Tout juste 12 ans ,aurait elle été née sous d’autres cieux qu’elle devait être à l’école en ce moment , mais hélas, sa famille est analphabète de génération en génération et personne n’était prêt malheureusement à rompre ce maléfice .
Alors qu’il somnolait sur sa chaise ,Vieux Mory fut tiré de son sommeil par la voix chétive de Fatou « hein !! il n’est pas trop tôt pour déranger les gens ? » fit-il étouffant le reste de sa phrase dans la toison fournie de sa barbe.
Sans mot , Fatou poursuivit son chemin. Quelques pas plus loin, le vieil homme qui avait vu germer une mauvaise pensée dans sa tête la rappela en ces termes : « Fatou !reviens que j’essaye de tes beignets » pendant que Fatou heureuse de dénicher son premier client de la journée hâtait le pas pour venir à sa rencontre ,vieux Mory fit l’effort de se lever et pris la direction de sa chambre faisant signe à l’enfant de suivre. Sans méfiance, cette dernière la suivit et en un tour de bras sans qu’elle n’ait même eut le temps de réaliser ce qui lui arrivait la petite fille se retrouva sous le poids du sexagénaire qui explora son royaume d’enfance………..
Au retour Fatou se sentait engourdie et avait mal partout ,en plus le sang virginal entachait une partie de son pagne, c’est justement en remarquant cette tache de sang sur les habits de sa fille que dame Mariam eut des doutes et décida de s’enquérir de ce qui n’allait pas ,alors devant l’insistance de la mère sa fille raconta sa mésaventure.
Le sang de Mariam ne fit qu’un tour et elle poussa un cri inhumain avant de s’évanouir. …..
Le reste de la journée fut une sorte de deuil et il avait fallu un effort et une sensibilisation familiale monstre pour éviter à la jeune mère d’aller étrangler l’impudique vieillard.
Dans la famille de Fatou ,la joie avait fui et la vie était désormais un enfer que ponctuait les cauchemars nocturnes de la fille , les incessants pleurs de la mère et entre le ballet incessant des notables du quartier résolu à sauver la mise d’un des leurs et pas n’importe lequel.
Il fallait défendre un honneur, mais lequel ?celui du violeur en liberté que l’hypocrisie de ses pairs tentait de défendre ou celle de la famille dont une des siens était déshonorée ?
Il n’y avait-il donc personne en ce bas monde pour comprendre le malheur de cette enfant ?
Ce vendredi encore l’incessant ballet des notables se poursuivait dans la famille de Fatou et le poids du dernier groupe venu aux bons offices était susceptible de briser la résistance de la famille .
Ce groupe était constitué des deux premiers imams du quartier ,de deux muezzins, du député de la ville et du président du conseil de quartier et d’un vieux Gaoulo bref c’était le gratin de la société qui venait peser de tout son poids pour éviter à un des siens la prison et l’humiliation.
Les salamalecs se firent et en maitre de la parole Farba prit la parole rappelant les liens séculaires entre les familles composant le quartier et la quiétude qui y règne grâce à la solidarité avant de jouer sur l’aspect communautaire :
« vieux Oumar, nous venons chez toi en frère, le mal est fait et nous afflige tous , ainsi était le destin de notre fille ,mais pour clore ce débat qui n’honore personne nous avons décidé de trouver la valise et l’avons rempli de tissus et de bijoux et y avons adjoint une somme de deux millions pour le préjudice de quoi mériter le pardon et nous savons que tu ne sauras outrepasser notre décision commune ……….»
Le groupe sortit, les sourires étaient revenus sur les visages et le père lui même affichait désormais une mine plus détendue.
Puis le père fit appeler Fatou et sa mère ,il faut dire que la mère en 4 jours avait perdu le quart de son poids ,les deux répondirent à l’appel et sans cérémonie, de but en blanc l’homme annonça j’ai pu tirer profit de la situation : « une valise pleine d’habits et de bijoux et deux millions on n’aurait pas pu mieux faire hein !!!!!! »
La femme resta sans voix quelques minutes et hurla sa colère et surtout son impuissance laissant échapper des cris de bête écorchée, étouffée par la douleur elle finit par se lâcher s’adressant à son mari : « je ne te savais pas aussi lâche !Donc toi aussi rien ne compte à tes yeux que l’argent ?quel genre de père es tu pour monnayer ainsi l’honneur de ta fille ?ton honneur ?je jure devant Dieu que je n’aurais de répit que si je vois ce pervers de Mory sous les verrous ,s’il en réchappe je luis arracherai les c…….. avec mes dents….. » et vidée de sa colère si longtemps étouffée Mariam Sanglota et tomba dans les pommes laissant son mari désemparé et abattu . …….


Comme un signe du destin

Ce mercredi bien entendu c’est l’un des jours les plus importants de la dernière décade du ramadan, c’est la nuit du vingt sixième jour et traditionnellement cette nuit n’est que célébration et ferveur adorative jusqu’au matin
La veille déjà, c’est à dire le mardi j’avais passé une nuit blanche et la journée avait été lourde pour moi car je chancelais de sommeil.
Pour rattraper le coup je me résolus à faire une sieste le reste des heures de l’après midi jusqu’à la rupture et de continuer après jusqu’à minuit avant de prendre un bain d’aller au culte nocturne.
Il était presque 16 heures quand je me suis mis au lit et 18h 30 quand je sortis de cette léthargie, la tête moins endolorie que quand j’y entrais c’était déjà un pas de franchi pour compenser les cinq heures de sommeil que j’avais brulées .
Après la rupture ,je ne perdis que quelques minutes à discuter avec Rama, ma femme de projets qui m’animent et à regarder notre garçon roulant sa bouteille d’eau minérale mimant la conduite d’un engin en vrombissant à la mode du langage enfantin.
Pour la seconde fois de la journée à 20h , je me remis à dormir, la nuit à nulle autre pareil pleine la tête et résolus à aller louer le Seigneur comme toutes ces années à la même date, mais je voulais attendre le gong de minuit ,le temps pour moi de récupérer .
Au coup de minuit, je dormais à poings fermés et ne pus donc me lever comme je l’avais prévu ; un plus tard je fis un rêve dans lequel nous étions haut perché au sommet d’un gratte ciel qui dominait tout de son altitude en groupe et devant nous se balançait une corde de poulie si longue qu’elle pouvait me permettre de traverser de Kaloum à KIpé où j’étais car j’y ai reconnu des endroits que je connaissais et tout en rigolant je dis à mon groupe d’amis que moi j’allais traverser la ville accroché à cette corde ,ils ne voulaient pas assister à ce spectacle ,ils désapprouvèrent et je dus momentanément battre en retraite .
De retour à la maison ,l’idée ne m’avait pas abandonnée et seul avec la même corde qui me suivait suspendue dans le vide je me résolus à en finir , j’étais entrain de prendre de l’élan pour m’emparer de la corde quand ma mère apparut ,apeurée à l’idée de me voir sauter ,elle me dit pourquoi tu veux le faire, je n’ai pas de transport fis je gêné ,alors elle me dit laisse tomber vient que je te donne de quoi payer le taxi.
Je la suivis et en me remettant l’argent elle rajouta ce n’est pas la peine de sauter ,j’ai trouvé un travail de pompiste ,je crois que je vais commencer plutôt que je croyais.
Pompiste ?répétai je ?je ne comprenais pas comment une personne aussi pétrie de talents et d’expériences pouvait se retrouver à ce niveau tout d’un coup et avec autant d’humilité. Je n’ai rien contre le métier de pompiste mais je ne comprenais pas et du coup je sentis au réel ma tête moite de chaleur et fit l’effort de me lever et de faire mes ablutions mais surtout content que ce fut un rêve.
En sortant de la maison silencieuse à cette heure ,je marchais à pas feutrés pour ne pas déranger , quand je croyais que tout le monde dormais ,il y avait une personne qui ne dormait pas et qui priait en silence , c’était ma mère.
Encore en écrivant ces mots je ne sais pas le vrai sens de ce rêve mais je me dis que c’est un signe du temps pour que je puisse bénéficier des faveurs et bienfaits de la nuit du destin et je ne compte pas me faire prier.


Quand voyager devient une amere epreuve

La route est impraticable, 450 km serpentant entre d’énormes montagnes depuis la mangrove jusqu’aux contreforts du Foûta Djallon. La nature y est indéniablement belle mais le mauvais état de la route occulte tout ce charme. Il fallait rentrer à Labé car la nécessité s’imposait et il fallait braver la nationale et ses aléas, tantôt bitumée, tantôt dégradée, tantôt à l’épreuve des sillons creusés par l’eau qui reprend ses droits faute…