David Kpelly

La révolution presque cocasse des Togolais

Faure Gnassingbe EyademaUn lecteur du site Icilome.com (www.icilome.com), l’un des plus grands journaux en ligne du Togo où je signe des contributions, m’a écrit un mail ce samedi, me demandant pourquoi depuis le début des soulèvements au Maghreb, je n’ai pas encore publié un seul article pour faire un rapprochement avec notre pays le Togo, et exhorter l’opposition togolaise et tout le peuple à se soulever contre le régime illégitime, dictatorial, lâche et éhonté de Faure Gnassingbé. Depuis que je suis retourné en novembre dernier au Togo pour recevoir le Prix Littéraire France-Togo 2010, poursuit mon cher lecteur, on ne me sent plus à travers mes articles virulents. M’aurait-on corrompu à Lomé ? Ah, le cynisme de certains Togolais ! Lire la suite de l’article…


Ma haine s’appelle le Togo

 

Faure Gnassingbé

Depuis l’année passée, Ruth m’a toujours seriné. Son petit frère a un prof d’anglais togolais, dix fois plus sulfureux que moi, qui n’aime même pas parler de son pays, le Togo. Tout ce qui le lie désormais à son pays, affirme-t-il à ses élèves sans leur dire la raison, c’est son nom, qu’il changera d’ailleurs quand il en aura la moindre occasion, parce qu’il pense prendre la nationalité malienne. « Pourquoi n’aimez-vous pas votre pays, un pays qui vous forme si bien ? Ne veux-tu pas le rencontrer ? », me demande-t-elle toujours quand elle me parle de lui. Je lui réponds toujours par un sourire.

Il est très intelligent, très compétent, comme tous les vrais Togolais peuvent l’être au Mali. Jeune. La trentaine. Il a mis sur pied et dirige un grand club d’anglais qui rassemble des élèves d’une dizaine de lycées de Bamako. Il écrit des poèmes en français et en anglais et organise des concours de poésie pour les lycéens.

Si je veux le rencontrer ? Bah ! Les Togolais, surtout quand ils sont profs d’anglais, compétents et intelligents, et de surcroît parlent mal de leur pays, faut pas aller se jeter sur eux les trente-deux dents dehors parce qu’ils risquent de vous traiter comme un animal incomestible, vous foutre la plus grande humiliation de votre vie, quoi. Et, déjà par son nom qui m’a fait savoir de quelle région du Togo il vient ! Faut pas cacher certaines réalités, l’orgueil a toujours été notre péché mignon, nous les originaires du sud du Togo. Tu parles, on se connaît bien !

J’avais accueilli, le vendredi passé, avec joie, la carte d’invitation qu’il m’avait envoyée par Ruth qui lui avait parlé de moi, tentant coûte que coûte de nous rapprocher. Son club organisait une grande soirée dans une boîte de nuit bamakoise. Il m’y invitait.

Ruth accrochée, hélas, à mon bras – j’aurais aimé y aller seul, qui sait ?- je me présentai dans la boîte, samedi, autour de minuit.

Zaminamina hé hé, waka waka hé hé… Shakira qui ressuscite un vieux groupe africain pour la Coupe du Monde 2010. Déhanchements à vous donner des vertiges de petites lycéennes de dix-sept et dix-huit ans complètement dessinées dans leurs minis, à la grande joie de leurs petits amants hip-hopés… et sous les yeux avides de quelques vieilleries  – comme moi -, regrettant les années bonheur laissées depuis longtemps derrière. Ah, qu’on est heureux quand on est au lycée !

Ruth se faufila rapidement entre les danseurs et va s’accrocher aux bras d’un jeune homme tiré à quatre épingles assis avec  une jolie nana – une vraie malienne – à une table très bien garnie… C’était lui, donc !

– Mais, vous, je vous… euh, vous êtes…

Je ressemble à une vieille veuve devant la déclaration d’amour d’un beau jeune homme. Très étonné. Le jeune homme, suivi de sa belle minette, me tendant sa main que je serre mollement, est aussi étonné que moi, devant mon étonnement. Ruth et son frère sont aussi étonnés. Je continue de bégayer

– Vous aviez… Euh, vous étiez… Euh…

2001. Lycée de Tokoin, Lomé. Il était en terminale. On était en première. Mais on le connaissait. Presque tout le monde le connaissait sur le bloc de la série littéraire du lycée. Il était le président du club d’anglais du lycée. Le meilleur élève en anglais et en allemand de sa promotion depuis la seconde. Il parlait couramment, comme par magie, les deux langues vivantes. Il était notre référence. Notre idole. Notre dieu. Il avait obtenu le bac avec la mention Bien. Nous apprîmes qu’il avait obtenu une bourse pour le Maroc. Normal, comme la mention Bien au bac au Togo ouvrait normalement les portes du Maroc. Le noir du temps et de l’espace nous l’avait donc arraché. Je me suis toujours dit qu’il doit être en Occident dans un 3e cycle. Ou prof de fac…

– Euh, vous avez fait le lycée de Tokoin, non ?

– Oui, me fit-il en riant, vous me connaissez donc ?

Nous nous installâmes et commençâmes à bavarder en mina, notre langue maternelle, pour ne pas nous faire comprendre par notre entourage. Je le croyais au pire au Maroc, au mieux en Occident, que cherchait-il encore en Afrique, au Mali, avec ces élèves si tarés que même un âne n’envierait ? Qu’avait-il fait de sa bourse ? Je ne comprenais pas…

– Je ne suis pas en Occident, même pas au Maroc, mais là où tu me vois, au Mali. Je n’ai jamais obtenu cette bourse que m’offrait ma moyenne au bac. J’ai fait trois ans à l’université de Lomé, pour me retrouver avec un Deug II. J’ai jeté l’éponge après mon mystérieux échec à la licence. J’ai chômé pendant deux ans. Un de nos professeurs du Lycée de Tokoin m’a conseillé l’université de Bamako. Je suis arrivé en 2006, sans pouvoir m’inscrire, comme c’est trop cher. Trois cent mille francs comme frais de scolarité. De quoi payer un BTS au pays. Je me suis donc donné à l’enseignement et au Mali.

– Et que comptez-vous faire après ? ai-je demandé bêtement, toujours sous le coup de la stupéfaction.

– Après quoi ?

– Euh, je veux dire, quand allez-vous retourner au pays et…

– Ah, tu veux me parler du Togo ! Bon, ce que je compte faire, c’est de planter deux gosses à cette fille que tu vois – il me montra sa jolie gonzesse-, faire venir ma mère et ma sœur, et définitivement m’installer ici. Et vous ?

– Euh, je dois y retourner après mon master pour aller travailler, ai-je naïvement répondu comme si un travail me suppliait au Togo de venir le prendre, moi qui ai aussi connu deux ans de chômage après mon BTS.

– Ah, dévio loooooo – les enfants ! – Crois-tu que tu en trouveras, du travail, au Togo ? Ou nous ne parlons pas du même Togo ? me demanda-t-il en riant. Ou bien, on ne sait jamais, tu as quelqu’un en haut là-bas, hein, tu sais ce que je veux dire !

Oui, je savais ce qu’il voulait dire. Il voulait dire que le Togo n’a pas changé. Le Togo du népotisme qu’ont instauré Eyadema et sa sinistre bande n’a pas bougé d’un seul pas. Ce Togo qui l’a mordu, ce jeune homme si intelligent. Qui l’a définitivement dégoûté, et qu’il va jusqu’à la fin de sa vie détester. Je savais qu’il voulait parler de ce groupe d’idiots dix fois plus brutes que les animaux qui les ont engendrés, et qui ont transformé les entreprises publiques et institutions togolaises en poubelles qu’ils remplissent des vomissures qu’ils s’en vont chercher dans leurs crasseuses familles d’analphabètes.

– Savez-vous, lui fis-je en poussant un soupir de rage, c’est triste, mais il faut que nous…

– Il n’y a rien à faire, mon frère, ce que vous pouvez faire, c’est de vous accrocher à cette belle fille – il désigna Ruth-, faire venir vos parents, vos frères et sœurs, chercher la nationalité malienne pour le bien de vos enfants, et oublier. Tout oublier de ce Togo.

Il se leva, prit par la taille sa belle nana qui se jeta dans ses bras, se dirigeant vers la piste de danse, zigzagant sur les cris de Phil Collins qui hurlait Find a way to my heart. Je regardai Ruth qui me fixait en souriant.

– Vous vous connaissiez ? me demanda-t-elle.

– Oui, on a fait le même lycée. Et on est de la même région.

– Bizarre ! Pourquoi n’aimez-vous donc pas votre pays ?

Pour toute réponse, je lui tendis les deux mains qu’elle s’empressa de prendre, ayant compris que je voulais danser avec elle.


La pauvre page Facebook de Faure Gnassingbé

Faure Gnassingbé sur sa page Facebook

Prologue

Créés pour permettre aux internautes de se retrouver, rester en contact, et s’échanger des infos de par le monde, les réseaux sociaux, Facebook et Twitter surtout, deviennent au jour le jour de véritables outils de soulèvement et de  résistance des peuples. Ayant fait leurs preuves en 2010 en permettant aux internautes de mettre ensemble leurs voix pour exiger la libération de journalistes arbitrairement interpellés comme l’Ivoirien Théophile Kouamouo, ces réseaux sociaux continuent de faire parler d’eux durant cette nouvelle année notamment dans le cadre des soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte. Pour connaître l’effet que font ces véritables trublions sur les détenteurs des pouvoirs illégitimes dans le continent noir, nous interviewons, en qualité de blogueur pour Mondoblog, Faure Gnassingbé, président de la République togolaise, prototype du Président mal élu et rejeté par son peuple, qui se lâche complètement, et dit, sans détours, tout ce qu’il pense des réseaux sociaux.

Blogueur : Bonjour Monsieur le Président, en ces temps-ci où Internet commence sérieusement à rentrer dans les habitudes des peuples africains, pouvez-vous nous dire ce que vous pensez des réseaux sociaux, notamment Facebook et Twitter ?

Faure Gnassingbé : Hum, permettez-moi, Monsieur le blogueur, de vous dire que le seul réseau social que j’aime, que j’adore, c’est le Rassemblement du Peuple togolais, le parti politique que m’a légué mon père en mourant en 2005, et dont je suis très fier, même si aujourd’hui il existe en son sein des vieillards irresponsables que je demande nuit et jour à Dieu de tuer parce qu’ils me mettent les bâtons dans les roues et…

Blogueur : Euh, Monsieur le Président, Facebook

Faure Gnassingbé (serrant la mine) : Bah, écoutez, je n’ai pas l’habitude de mâcher mes mots, je vous dis donc sans détours que je n’aime pas Facebook et tous ces réseaux sociaux dont vous me parlez. Eh bien, comment voulez-vous que j’aime ces trucs-là à travers lesquels on ne fait que raconter des cochonneries sur vous, hein ? Pétez dans votre chambre, vous verrez sur le Net la page Facebook de l’association « Le pet de Faure Gnassingbé » avec des dizaines de milliers de fans, arrachez à un footballeur sa nana, c’est Twitter qui vous sabote au monde entier, détournez un tout petit milliard, c’est le fan club « Faure escroc » qui voit le jour sur le Net ! Non, je déteste ces réseaux sociaux, je maudis leurs fondateurs, parce que c’est du pur terrorisme, vous comprenez, hein, Facebook c’est comme Al Quaïda, ça vous la fout la trouille à chaque seconde. Imaginez qu’il y avait Facebook et Twitter en 2005, croyez-vous que j’aurais pu devenir président du Togo avec toute cette fraude et tuerie, hein. C’est Facebook et Twitter qui allaient montrer au monde entier les images des militaires rentrant dans les bureaux de vote et détalant avec des urnes, des militaires tuant les militants de l’opposition, mes milices et rares sympathisants bourrant les urnes des bulletins de mon parti… et jamais la France n’aurait pu avoir la force de m’imposer, parce que tous les peuples du monde auraient crié haro sur moi, pauvre baudet. Et puis, vous voyez, ma page Facebook m’a particulièrement humilié, figurez-vous que moi qui suis Président très longtemps avant Barack Obama je n’ai qu’à peine cinq mille amis, alors que ce petit métis prétentieux qui est élu il y a deux ans a plus de dix millions d’amis, le double de la population de mon pays. Quelle injustice, hein, mon Dieu ! Non, Facebook et Twitter, c’est de vrais opposants, vous comprenez, hein, ces réseaux sociaux sont pires que mes opposants. Mon opposition s’appelle Facebook.

Blogueur : Mais, Monsieur le Président, Facebook n’est pas seulement utile pour divulguer les coups bas des dictateurs, ça permet aussi de faire des rencontres intéressantes, décrocher de belles filles par exemple, vous n’aimez pas ?

Faure Gnassingbé (subitement détendu et souriant) : Ah là ! Fallait me le dire ! On peut donc rencontrer des miss, des Top modèles, des stars de cinéma sur Facebook, hein ! Figurez-vous, Monsieur le blogueur, que jamais aucune de ces têtes vides de conseillers qui m’entourent ne m’en a parlé ! C’est intéressant alors ! Vous voyez, le problème avec Facebook, c’est que vous n’arrivez jamais à avoir les amis que vous voulez, parce que quand vous leur envoyez des invitations, ils ne les acceptent jamais, et c’est des pestiférés dont vous ne voulez pas qui désirent vous ajouter à leurs amis. Figurez-vous qu’il y a deux semaines, en ouvrant ma  boîte électronique, je tombe sur ce message : « Facebook, Silvio Berlusconi souhaite vous ajouter à ses amis. » Dites-moi, n’est-ce pas le comble de la poisse, hein ? Je vais faire quoi avec ce vieux tire-sur-tout à la bite toujours tendue, hein ! Vous imaginez une amitié entre moi et Berlusconi ? C’est des mineures qu’il va me présenter tous les jours alors que moi j’aime pas les petites filles, je suis pas un pédophile, je suis pas un prêtre, voyons. Je redoute même le jour où ce sera Jacob Zuma qui m’envoie une invitation. Là ce sera la mort, parce que lui c’est pas des mineures qu’il va me présenter mais des séropositives. Vous voyez le danger avec votre Facebook-là, hein ?

Blogueur : Monsieur le Président, vous auriez donc pu exiger le blocage de ces réseaux sociaux au Togo si vous en aviez eu le pouvoir ?

Faure Gnassingbé : Bien sûr que oui ! Mais vous voyez, Monsieur le blogueur, ces réseaux sociaux c’est comme un sac de porc-épic, le porter est un problème, ne pas le porter en est un autre. Même si vous les suspendez, le jour où le peuple en aura plein le cul et se soulèvera, vous êtes foutu, c’est le cas du pauvre Ben Ali de la Tunisie. Heureusement que les Togolais c’est de petits poltrons, ils sont pas comme les Arabes, quand ils se soulèvent et que les militaires tuent un parmi eux, eh bien, hi hi hi, le reste s’en va se cacher. Ah, mes pauvrets !

Blogueur : Que faites-vous donc, Monsieur le Président, pour lutter contre ces effets très néfastes des réseaux sociaux pour votre pouvoir ?

Faure Gnassingbé : Très bonne question, je contrôle les militaires, parce que vous savez que c’est grâce à eux que je suis au pouvoir. Je ne leur permets pas d’avoir des comptes Facebook et Twitter, et je contrôle leur accès à Internet. Mais on m’a raconté qu’il y en a parmi ces vieilles brutes qui se cachent pour tchatcher sur Facebook, on m’a aussi raconté que certains parmi eux envoient même des lettres d’invitation à mes copines sur Facebook, mais, wallahi, le jour où je mettrai la main sur l’un d’eux, eh bien, c’est agban agbodji, c’est-à-dire je vais le chasser sur-le-champ. Comment pouvez-vous comprendre cette trahison de ces vieux hommes de caste qui veulent m’assassiner avec votre Facebook-là, hein ?

Blogueur : Monsieur le Président, quelle est la personne que vous aimeriez le plus avoir comme amie sur Facebook ?

Faure Gnassingbé : Michelle Obama, la femme d’Obama. Ah, je la kiffe grave, celle-là, voilà plus d’un an que je lui envoie des messages d’invitation sur Facebook mais elle répond jamais. Qu’elle peut être suffisante, celle-là ! On dirait qu’elle est blanche, alors qu’elle est noire, noire comme moi. Pauvre de moi !

Blogueur : Quelle est la personne que vous n’aimeriez jamais avoir comme amie sur Facebook ?

Faure Gnassingbé : Abdoulaye Wade, le président du Sénégal, car être l’ami d’un vieux vieillard, c’est rien que des tas de problèmes, le jour où il va être hospitalisé, vous êtes tenu de lui rendre visite, alors que moi j’aime pas l’odeur des hôpitaux, et quand il va défunter, eh bien, vous devez vous occuper de ses enfants et de sa femme, mais dites-moi, Monsieur le blogueur, je vais faire quoi avec une si vieille femme comme celle de Wade, hein ! Même Moubarak, qui dispute le record de vieillesse avec Abdoulaye Wade en Afrique, ne voudrait pas d’une femme de cet âge.

Blogueur : Merci, Monsieur le Président

Faure Gnassingbé : Merci, Monsieur le blogueur, mais avant que vous ne partiez, montrez-moi comment on peut avoir de belles filles sur Facebook. Si j’arrive à décrocher une gonzesse canon, eh bien, je procède à un remaniement ministériel et je vous bombarde ministre de la Communication, parce que je…

Epilogue

« David, mais, tu parles avec qui dans ton sommeil, hein, dis, il est huit heures et quart, tu vas pas en cours aujourd’hui ? »

Je sursaute sous la main froide de Ruth ma fiancée étonnée de me voir toujours dans les bras de Morphée à cette heure, et parlant avec un interlocuteur imaginaire. Ah, je rêvais donc !

1- Titre inspiré du titre, Le pauvre Christ de Bomba de l’écrivain camerounais Mongo Beti.


Je déteste les militaires, mon fils !

Les militaires, cauchemar des Togolais

« Donc tu veux me signifier que parmi toutes ces filles que tu encadres depuis maintenant deux ans, toute cette multitude de filles qui t’entourent, tu n’as trouvé personne à part une potentielle criminelle, hein ! Tu déconnes, mais alors tu déconnes vraiment, mon fils, en voulant me faire accepter ce choix démoniaque que tu crois avoir fait. Quel foyer peux-tu bâtir avec une femme qui va passer tout son temps à terroriser les civils, si elle ne veut les tuer pendant les périodes électorales, une femme que tout le monde montrera du doigt, maudira à son passage, une femme qui passera toute sa vie à semer larmes et désolation partout où elle mettra pied, hein ! Tu veux donc avoir des enfants avec un monstre, hein, c’est ce que t’a conseillé l’une de tes multiples crises de caprice ! Eh Dieu, j’ai donc passé toute ma vie à me vider de mon sang pour t’inscrire à l’école pour que viennes me présenter une analphabète comme femme ! Tu veux donc me dire que tu n’as trouvé aucune fille instruite, une fille normale, qui pourra te mettre en valeur, hein ! Mon fils, tu dois chercher une autre fille, celle-là, toi-même tu sais que je ne l’accepterai jamais, tu comprends, hein, jamais ! »

Le marteau avait déjà frappé la table. L’audience était levée. Je le savais pertinemment. Ma mère, Mère Marthe, ne sait jamais dire oui après avoir dit non. Cette fille ne passera jamais chez elle. Jamais ! Et Dieu seul sait que je peux commettre toutes les bêtises, sauf épouser une femme que n’aime pas ma mère. Mon amour de mère.

« Maman »

Ma voix tremblait légèrement, sous l’effet de la colère et du désespoir.

« … »

« Maman, tu es en ligne ? Tu m’écoutes ? »

« Je t’écoute, mon fils »

Posément, sans la laisser sentir la colère qui me broyait les entrailles, je commençai à lui expliquer ce qu’elle ne savait pas. Ce que nous ne savons pas là-bas chez moi, au Togo. Le militaire n’est pas un démon, un homme-cauchemar. Un militaire, ce n’est pas ces terroristes analphabètes que nous connaissons au Togo, ceux-là qui ont aidé feu Eyadema à martyriser le Togo pendant trente-huit ans, pour commettre le grand forfait en 2005 à la mort de ce dernier en intronisant dans le sang de milliers de Togolais son fils détesté et vomi par la quasi-totalité du peuple togolais, ces saoulards qui ne sont bons que quand ils jouent au loto ou défilent en lançant en l’air leurs couilles, ces malabars plus analphabètes que des gris-gris qui vous lancent « S’il te plaît ma frère, ton carte, tu es pris… » quand ils se substituent à la police pour vous arrêter devant votre maison la nuit…

Ma maternelle, comme presque tous les Togolais, n’avait du militaire que cette mauvaise image que nous ont donnée ces assassins au Togo, un homme non instruit et sans cœur qui tue et terrorise pour entretenir la dictature d’un tyran. Pour ma mère, le militaire c’est ce bourreau qui a assassiné à coups de gourdin son jeune frère, mon seul oncle maternel, en 2005 lors de la boucherie qui a intronisé Faure Gnassingbé notre petit vodou…

Et, pendant plus de quinze minutes, très calmement, le cœur tambourinant, je lui avais expliqué, à ma mère, que ce n’était pas le cas, que l’armée est une noble, très noble institution, l’une des plus nobles institutions d’un pays, que j’ai eu tout le temps de le remarquer ici au Mali… Que ce n’est pas un corps qui ne renferme que des brutes analphabètes comme nous le voyons chez nous, qu’on y retrouve des Bac+ 4, des Bac+5 et même plus, que même moi qui suis aujourd’hui dans le Marketing et la Gestion je peux un jour me retrouver dans l’armée… Que c’est le cas de cette jeune fille de vingt-trois ans que j’ai décidé d’épouser, celle-là qui a obtenu son Bac en Sciences exactes avec la Mention Bien à dix-huit ans, qui a été la meilleure de sa promotion durant ses quatre années passées en Sciences Eco à l’Université, et qui a décidé, après sa maîtrise, d’intégrer une école supérieure de l’armée malienne juste par passion pour l’armée… Que c’est une fille très gentille qui reçoit très civilement tous mes compatriotes, et très serviable tout comme les Togolaises, qu’elle ne demande pas de l’argent en désordre comme le font les jeunes filles maliennes parce qu’elle ne porte pas de basin riche, ne se maquille pas à outrance, qu’elle est simplette, tout comme les Togolaises, qu’elle sait aller chercher de l’eau à la fontaine tous les matins et souffler sur un feu de bois, tout comme les Togolaises, qu’elle est une vraie femme au foyer, tout comme les Togolaises, qu’elle n’est pas excisée, tout comme les Togolaises, qu’elle est…, qu’elle n’est pas, qu’elle est… tout comme les Togolaises…

« Maman, tu es en ligne ? Tu m’écoutes ? Ah, j’aurais d’ailleurs dû te le dire depuis le début, figure-toi qu’elle est chrétienne, chrétienne protestante comme nous. Ruth, qu’elle s’appelle, toi vois, hein, maman, Ruth, la bonne belle-fille de la Bible, Ruth dont tu aimes tellement l’histoire, maman. Son père, sa mère, ses oncles et tantes, toute sa famille est chrétienne, chrétienne protestante, comme nous. Nous récitons même ensemble des prières chaque fois qu’elle me rend visite. Ah, qu’elle aime prier pour toi, sa future belle-mère, et pour mes sœurs ses futures belles-sœurs, une vraie Ruth celle-là, une Ruth Ruth, tu vois, hein, maman, et… »

« Mon fils, ne m’énerve pas, tu sais très bien que je n’accepterai jamais une belle-fille militaire, une criminelle. Cherche une autre fille. Une vraie fille. »

Non, pas un militaire !


Papa Eyadema, le poète fessologue

 

Eyadema

Ah, quel mauvais Togolais que je suis, Allah ! Dire que je l’ai oubliée, cette date, cette date à nous Togolais, cette date qui se confond à notre destin de Togolais !

Comment le dire ? Le 13 Janvier passé, c’était notre date, la date de la libération du Togo. C’était notre fête de la Libération nationale. Quelle libération ? Eh bien, bande d’incultes, sachez que c’est le 13 Janvier 1963 que notre feu, regretté et reregretté, Gnassingbé Eyadema a libéré notre pays le Togo de la voie du développement qu’il avait empruntée depuis 1960 sous le père de l’indépendance, Sylvanus Olympio, pour le placer sur la voie, ô combien glorieuse, du parti unique, de la dictature, du meurtre, du vol des deniers publics…  en assassinant lâchement, non, glorieusement, ce dernier. Et ce jour qui marque le début du calvaire du peuple togolais, nous le fêtons avec joie, parce que c’est notre jour à nous. Nous avons le droit de fêter ce que nous voulons chez nous, c’est pas votre problème, bande de diffamateurs qui n’aimez pas notre cherissime Papa Eyadema qui vivra à jamais dans nos mémoires.

Figurez-vous donc que c’est ce grand jour, le jour de notre destin, que j’ai laissé filer depuis trois jours, sans l’avoir commémoré ! Crime de lèse-feu-Eyadema ! Bien, pour me rattraper, tard valant toujours mieux que jamais – même s’il vaut mieux ne jamais se marier que de le faire tard -, j’ai décidé de me rappeler notre bien-aimé père de la nation en publiant trois des plus célèbres anecdotes qui circulaient sur cet homme-mythe de son vivant.

Le poète fessologue

Papa Eyadema, raconte-t-on, avait une préférence très particulière pour les bobarabas, les nanas aux derrières bien dégagés, les Femmes-Himalaya. Et quand il se retrouvait dans sa couche avec une de ces dames aux grosses fesses, souvent arrachées à ses collaborateurs ou piquées pendant les séances d’animation qui jonchaient tous les coins et recoins où il mettait pied, il lui murmurait avant le début des hostilités : « Ô femme, fais-moi monter sur ta montagne de Sion, pour que je puisse voir dans la vallée, cette vallée pleine de merveilles et de surprises. Fais-moi monter sur ta montagne, pour que je puisse voir toute la beauté de Jérusalem. Car beaucoup de choses me répugnent ici-bas, et j’ai besoin de m’élever. Fais-moi donc, femme-élevation, femme-profondeur, monter sur ta montagne sainte. » Eh bien, pourquoi n’appréciez-vous pas cette brillante démonstration de rhétorique, hein, tas de jaloux ? Nous on fait la nique à Baudelaire, Lamartine, et même Hugo. Un clin d’œil à l’Académie Goncourt qui doit penser à honorer la mémoire de cet illustre poète baroque qui n’est inspiré que devant les paires de fesses, avant que nous ne formions nous-mêmes une Académie Goncourt au Togo pour le faire. On vous aurait avertis, tas de provocateurs. 

La modification des maudits 

L’équipe nationale togolaise de foot, reconnue pour sa médiocrité, venait de perdre un match contre un pays voisin sur un score humiliant. Quand la nouvelle fut rapportée à Eyadema, grand fan du foot, il piqua une colère d’enfer et hurla « Mais pourquoi l’entraîneur n’avait-il pas fait jouer Zidane, hein ! ». On lui fit savoir que Zidane n’était pas un joueur togolais mais français. « A quoi sert donc la coopération entre le Togo et la France, hein,  hurla le boss en donnant un grand coup de pied au ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, je maudis cette équipe et cette modification la suivra toute sa vie. » Un de ses ministres osa sa vie en lui faisant savoir que le nom dérivé du verbe maudire n’est pas modification mais malédiction. « Je m’en fous, vociféra Papa Eyadema sur les nerfs, modification ou malédiction, je maudis cette équipe »… Et la modification suit l’équipe nationale de foot du Togo, humiliation à la Coupe du monde 2006 en Allemagne, crash  en Sierra Leone en 2007, tragédie en Angola en janvier 2010, faux match contre le Bahreïn en 2010…

Les kilos de dix mille

« Vous voulez combien pour faire quoi, hein, vous voulez combien pour faire quoi, hein, donnez-leur cinq kilos, donnez-leur dix kilos… » Presque tout le monde connaît cette chanson au Togo. C’était, paraît-il, le refrain que fredonnait notre bien-aimé et regretté, dix fois regretté, père de la nation quand Untel venait lui annoncer qu’Untel lui avait dit qu’Untel aurait dit à sa femme qu’Untel voulait envoyer Untel l’assassiner, lui le président à vie du Togo. Le rapporteur, pour son exploit, bénéficiait donc, paraît-il, de cinq ou dix kilos de dix mille francs – les recettes du Port autonome de Lomé -, selon les humeurs du dictateur, euh, du père de la nation. Le supposé fauteur de coup d’Etat était traqué, arrêté, maltraité, enfermé, torturé puis assassiné… pour le bien-être de la nation togolaise. Dommage que personne n’ait pu informer notre cher regretté Papa Eyadema que les démons du Royaume des morts s’étaient entendu pour l’arracher ce 05 février 2005 pour aller rôtir à petit feu en enfer comme un poulet-bicyclette de la Rue Princesse, et permettre à son petit morveux héritier d’assumer ses envies de petit prétentieux looser.

Allez, on lève les coupes, pour le 13 Janvier ! Vive le 13 Janvier, vive la fête de la Libération, vive Papa Eyadema, euh, non, il est mort, mort les deux pieds en l’air comme une poule atteinte de grippe aviaire. Vive Bébé Eyadema, qui survit, qui vivote dans la lâcheté !

Eyadema


La promesse des astres

Michel Germaneau

Cette nouvelle, je l’ai écrite en juin 2010, quelques semaines avant l’exécution du Français Michel Germaneau au Sahel par les terroristes de L’AQMI. Je l’ai dédiée à sa mémoire au lendemain de sa mort en la publiant dans un journal togolais. Ces mots, chers frères, pour se souvenir de ces deux jeunes Français exécutés le 08 janvier 2011 par ces mêmes sinistres hommes qui ne méritent, il faut le leur souhaiter, que le pardon du Seigneur.

Fred Lacroix, assis sur une chaise sous le seul arbre qui ombrageait la cour, mains et pieds liés comme toujours quand il était hors de sa cellule, regardait les trois hommes, à quelques mètres de lui, assis sur des tapis, deviser dans leur langue. Cette langue qu’ils parlaient toujours entre eux. On eût dit qu’ils se disputaient. Un mélange, lui paraissait-il, de l’arabe et d’une langue africaine. Il ne la comprenait pas, cette langue qui entretenait le mystère devenu son compagnon depuis presque deux semaines. Et n’avait d’ailleurs jamais cherché à la comprendre. Car, ce qu’elle lui inspirait, cette langue, c’était une sorte de tristesse indescriptible, une tristesse qui ne rend pas triste mais qui remplit de pitié. Cette tristesse qui inonde l’âme, quand le cœur n’a plus la force de couver la haine et le dégoût.

Cependant, pour la première fois depuis leur rencontre, cette langue l’intéressa. Elle détenait la clé, la solution à l’énigme. Elle était devenue le devin qui devait lui prédire l’avenir. Ce que demain serait pour lui. Il  eût tout donné pour comprendre juste un passage, une phrase, un mot de cette discussion. Juste un seul mot lui eût suffi pour établir des hypothèses à partir de force interprétations, pour aboutir à une conclusion.

Il concentra toute son attention sur le trio qui faisait de grands signes de mains pour appuyer les mots, poussant tantôt des jurons tantôt des éclats de rire. Le soleil, affaibli et pâlissant, comme un combattant sentant son imminente défaite, illuminait les trois visages qu’il voyait de profil et qui se crispaient ou se détendaient selon la douceur ou l’aigreur de la voix.

Rien à comprendre dans ce cafouillage de mots qui se cognaient entre leurs dents et leur langue, sortaient presque décomposés, s’écrasaient dans le lourd silence qui pesait sur les lieux, avant de s’évanouir, loin, dans le vide, avec l’écho.

Ils parlaient de lui. Il le savait très bien. Ils ne pouvaient parler que de lui. Depuis leur rencontre, il était devenu le centre de leur vie, comme eux ils étaient devenus celui de la sienne. Ils ne vivaient désormais que pour lui. Ils pensaient pour lui, mangeaient et buvaient pour lui, ne dormaient pas pour lui… et ne pouvaient se parler que pour lui. Ils le lui avaient même dit le premier jour de leur rencontre : « Vous serez notre première victoire ou défaite. Par vous, notre combat vivra ou mourra. Vous voyez donc que nous sommes obligés de bien vous traiter, de vous consacrer toutes nos attentions. Ne craignez donc rien, vous êtes en sécurité et tout ira bien, pour vous et pour nous, inch Allah. »

Ils parlaient de lui. De demain. Ils commentaient la nouvelle. Mais comment ? Leur bonne ou mauvaise foi, Fred n’en savait rien. Ils avaient pourtant tenu leur promesse de bien le traiter durant les treize jours qu’il avait déjà passés chez eux, comme ils le lui avaient promis le premier jour. Ils avaient toujours été à son service, mettant à sa disposition, dans les plus brefs délais, tout ce dont il avait besoin : livres, cigarettes, rafraîchissants, amuse-gueules… tout sauf le téléphone. Mais feraient-ils encore preuve de cette bonne foi demain ? Etaient-ils différents de leurs pairs qui s’étaient toujours illustrés par leur cynisme et effronterie ? Etaient-ils plus honnêtes que ceux dont parlaient tous les médias internationaux sur fond d’avertissements et de menaces ? Eux si étranges malgré leur gentillesse apparente, exagérée, et presque inventée, sauraient-ils faire preuve d’humanisme ?

L’autre partie non plus ne le rassurait. Elle pouvait ne pas tenir sa promesse demain. Tout pouvait très facilement basculer. Dans le monde des politiques, tout bascule si facilement. Une saute d’humeur, un sursaut d’orgueil d’un des décideurs, et son destin serait scellé. Il n’avait rien de plus que ses trois compatriotes qui étaient passés par la même voie que lui. Les politiques avaient promis mais n’avaient pas tenu leur promesse. Sa petite vie ne pouvait pas pousser tout un Etat, un Etat fier de sa force et de ses stratégies, à s’incliner devant les revendications d’une bande de délinquants fanatiques sans lois… Ces messieurs des palais, bon chic bon genre, accepteraient-ils demain de perdre leur superbe en capitulant ?

Fred ne croyait ni en la superstition, ni en la géomancie, la magie, la numérologie, l’astrologie… et toutes ces autres manœuvres qu’il jugeait indignes d’un homme qui sait réfléchir. Cependant, ce matin, après la nouvelle qui lui fut apportée par celui qui, apparemment, jouait le rôle du caïd du groupe, il s’était surpris en train de demander un exemplaire du quotidien national. Il s’ennuyait avec ses livres et voulait jeter un coup d’œil à l’actualité du pays, avait-il menti. Quand le journal lui fut rapporté autour de midi par le plus jeune de ses compagnons qui s’était excusé de son retard, il ne regarda même pas la une qui affichait pourtant des titres très alléchants et sauta sur l’avant-dernière page, où se trouvait… l’horoscope. Il voulait connaître ce que lui prédisaient les astres ! La journée était, disaient les astres à travers le journal, à lui et à tous ceux qui sont nés sous le signe du Lion, une journée très capitale car elle verrait signer un accord très déterminant dans leur vie. « Des incongruités incohérentes comme toujours », avait-il murmuré en jetant le journal, malgré tous les efforts qu’il faisait pour y croire.

Mais il fallait y croire. Il fallait croire la voix des astres. Il fallait croire que demain serait un autre jour, un grand jour. Son jour. Les astres devaient avoir raison. Avant la nuit, les hommes politiques appelleraient. Ils comprendraient qu’ils ne devaient pas le laisser quitter éternellement sa famille restée chez lui, et qu’il n’avait plus revue depuis plus d’un an. Les hommes politiques, du haut de leur piédestal, comprendraient qu’il fallait fléchir devant cette bande de terroristes pour sauver sa vie. Ils appelleraient avant la nuit pour signer l’accord de sa libération. Promesse des astres. Et demain, il serait libre. Demain, il quitterait, pour toujours, ce coin perdu du Sahel qu’il avait rejoint depuis plus d’un an, après sa retraite, pour y monter une association de prise en charge des victimes du Sida.

Plût au ciel que les astres fussent de bons devins ! Demain, il parlerait à l’ambassade de France devant des dizaines de journalistes qui lui poseraient des tas de questions. Comment s’était-il fait kidnapper ? Comment avait-il été traité pendant les treize jours de détention ? Pouvait-il décrire les hommes qui l’avaient kidnappé ? Que lui disaient-ils ? De quoi parlaient-ils… Des questions et des questions, comme savent en poser les journalistes quand les terroristes libèrent un otage. Il se contenterait de répondre rapidement en gardant son calme, avant de s’envoler pour la France, auprès de sa famille, loin du Sahel, loin des terroristes…

Il sentit un léger frisson lui parcourir tout le corps. Les trois terroristes riaient aux éclats. Ils parlaient de lui. De demain. Car eux, ils n’avaient pas de souci à se faire pour demain. Ils savaient quoi faire si les prévisions des astres se révélaient fausses, s’il arrivait aux politiques de ne pas tenir leur promesse. Ils l’avaient averti depuis les premières heures du matin : « Monsieur Fred, nous venons de discuter avec des représentants de votre gouvernement qui nous ont promis de libérer notre frère Rachid emprisonné à Paris et payer la rançon que nous exigeons pour votre libération. Si demain, avant midi, l’heure de rigueur que nous leur avons fixée, ils honorent leur engagement en nous versant les 50 000 euros et en libérant Rachid, vous serez tranquillement libéré. Mais s’ils osent nous berner, nous vous égorgerons avant le soir, inch Allah. »

Bamako, le 10 Juin 2010

© 2010 – David Kpelly – Tous droits réservés


Une paire de fesses gratos pour Noël !

« Petit papa Noël, quand tu descendras du ciel, avec des paires de fesses gratos, n’oublie pas que j’aime aussi en consommer… »

C’est quoi ces paillardises que je suis en train de débiter, hein ? Eh bien, que chanter, que danser, après ce qui m’est arrivé, ce 24 décembre 2010, en chair et en os et vis-à-vis devant les clients comme on le dit chez moi là-bas au bled ?

Je m’étais consciencieusement préparé à passer ces fêtes de fin d’année dans un véritable pastis, un fiasco total, quoi ! Presque tous mes amis, mes compatriotes, sont descendus au bled, n’ayant pas pu réussir à me convaincre de les suivre. Déjà présent à Lomé du 22 au 26 novembre dernier, je ne peux, en un mois, descendre une seconde fois au pays alors qu’il faut avoir des couilles solides pour y aller. Toute la famille, les amis de la famille, les familles des amis… vous y attendent, vous êtes descendu de l’étranger, et vous avez des braises à n’en savoir que faire. On est toujours Bill Gates quand on revient de l’étranger. Ma dernière visite de novembre m’a coûté plus de cinq cent mille balles – une fortune ici – et je suis complètement crevé comme un militaire durant la seconde moitié du mois.

J’ai donc décidé, faute de pognon, de passer mes fêtes de fin d’année ici à Bamako. Je ne sais pas si je me le pardonnerai un jour. En décembre, Bamako rend malheureux un étranger chrétien qui a déjà fêté Noël dans un pays à dominance chrétienne. Les rares décorations, vous les croisez par hasard dans des supermarchés chics tenus par des Occidentaux. Pas de sapins décorés ! Pas de représentations de papa Noël dans les lieux publics et sur les grands bâtiments ! Pas de cantiques de Noël dont on vous sérine au Togo dès le mois de novembre ! Rien, parbleu ! On ne sent pas venir Noël à Bamako. Parce que Jésus, eh bien, le mec n’est pas considéré ici comme le Fils de Dieu, pas même comme Son cousin lointain, et sa naissance, on s’en tape comme une pute brésilienne du paradis.

Cerise sur le gâteau pour moi, euh non, nivaquine dans le venin, pas de gonzesse, au moins pour se permettre quelques petites gâteries à la con pour oublier la déception. Les filles de Bamako, comme d’ailleurs toutes celles de la nouvelle génération BCBG, les jetsetteuses, faut s’en méfier comme de la mort au mois de décembre, parce que même si elles ne fêtent pas Noël, le 31 décembre, c’est leur plus grand jour de l’année, et elles doivent s’habiller. Bien s’habiller. Vous comprenez, hein ! Et quand une fille de Bamako doit bien s’habiller, c’est comme la femme de Robert Mugabe qui doit aller faire du shopping en Occident parce qu’elle prétend avoir de si petits pieds qu’elle ne peut trouver ses pointures ici au Bled. Et ça coûte. Se chercher ou gérer une minette à Bamako au mois de décembre, c’est comme confier son argent à Bernard Madoff. On s’en sort complètement ruiné, fini. La meilleure solution, c’est d’inventer une histoire saugrenue pour créer un no man’s land entre vous et votre nana du 1er au 31 décembre, et reprendre les « mon bb, j t’adore… j’ai soif d’toi ma biche… » et toutes les autres imbécilités après la fête. Le truc est simple. Au soir du 30 novembre, froncez la mine quand elle vous rend visite, et quand elle vous demande la cause de votre mauvaise humeur, répondez-lui en grondant que vous êtes au courant de tous les textos qu’elle envoie à son ex toutes les nuits à votre insu – elles ont toujours un ex quel que soit leur âge -, et si elle essaie de se défendre, mettez-vous sur vos nerfs et demandez-lui de vous laisser tranquille jusqu’à nouvel ordre, après le 31 décembre donc. Mais attention, ça peut se révéler des fois dangereux parce que son départ peut être définitif ! Voilà comment j’arrive toujours à jouer au singleton le mois de décembre.

Le 24 décembre dernier donc, dans cette morose atmosphère de Noël sans Noël, j’ai décidé, déçu, contrarié, humilié, solitaire, d’aller me soûler la gueule comme un policier burkinabé à la fin de mois, et retourner me coucher ivre-mort, afin de passer la journée du 25 allongé dans mon lit avec une gueule de bois sans nom. Tous les moyens sont bons pour fêter Noël, surtout quand il n’y a pas de Noël à fêter.

L’ambiance était encore plus moche dans le bar que je ne l’avais imaginé. Quel réveillon, mon Dieu ! J’étais sur la quatrième bouteille quand j’entendis derrière moi :

– Bonsoir Monsieur, bonne fête de Noël, je peux m’asseoir ?

Je ne souffris pas le calvaire d’ouvrir les yeux, le parfum qui m’avait inondé m’ayant révélé à qui j’avais affaire. Dieu seul sait là où ces petites prostituées, d’origine nigériane surtout, s’en vont chercher ces parfums qu’on dirait piochés dans l’anus d’un cadavre.

-Monsieur, je vois que vous êtes chrétien, je le suis aussi, donc, si vous voulez, je peux vous faire un prix spécial pour Noël. Le toucher est gratuit et l’entrée à demi tarif.

Ça devenait intéressant. J’ouvris les yeux en souriant. Elle était vêtue, comme elles l’ont toujours été, d’une robe qui cachait à peine sa petite culotte. Une perruque de couleur bleue ou verte, ou grise, ou violette, je ne savais pas avec la pénombre, qui lui arrivait jusqu’aux épaules. Des bijoux de pacotille au cou et aux poignets. Je fis un rapprochement impossible entre elle et Rama Yade. Deux univers diamétralement opposés. L’indignité et l’humiliation d’un côté, toute la dignité de la femme et la classe de l’autre. Le monde est injuste !

– Oui, madame, vous dites quoi ? Elle s’assit, sans fermer ses deux battants, m’offrant, dans la pénombre, une vue directe, et en plongée, sur son monde intérieur.

– Je veux juste vous aider à bien fêter Noël parce que je vois un crucifix à votre cou et je sais que vous êtes chrétien. Je vous offre donc le toucher gratuitement, et l’entrée à la moitié du prix normal plus les frais de chambre.

Un chien qui voit un fantôme n’a plus la force d’aboyer, il s’efforce de pousser un sourd soupir, proverbe de chez moi. Je soupirai en la fixant, ébahi. Eh, mon petit pauvre Jésus, du sexe cru et de la chair gratuitement offerts pour fêter ta naissance !

– Tu veux une bière ?

– Non, mais si vous voulez vous pouvez me donner l’argent de la bière, je ne bois pas.

Je lui tendais, en la fixant tristement, un billet de mille francs, quand les haut-parleurs du bar, comme par enchantement, avaient commencé à chanter « Petit papa Noël, quand tu descendras du ciel… »

Ouais, mon sacré bizarre papa Noël ne m’avait pas oublié pour ce Noël super moche, le plus moche de toute ma vie, que j’étais en train de passer. Une paire de fesses à toucher gratos, à consommer à moitié prix, pour célébrer la naissance du Fils de Dieu ! Huuummmmm…

Joyeuses fêtes!


Mémé, tu dois mourir !

Mémé Gloria, quatre-vingt six ans, est morte dans un hôpital de Lomé, suite à une longue maladie, même si beaucoup de mauvaises langues ont affirmé et continuent d’affirmer que c’est la faim qui l’a expédiée six pieds sous terre. Bon, Mémé Gloria est morte. C’est d’ailleurs normal qu’on meurt à cet âge ! Que cherche-t-on encore en vie, ici au bled, sous les tropiques, dans cette crotte sans nom, après avoir bouclé quatre fois vingt prunes, si on n’est pas un vilain sorcier ou une sorcière sans vergogne qui tue les enfants pour sucer leur sang pour se maintenir en vie, hein ? Mémé Gloria est morte. Suite à une longue maladie, ou à cause de la faim, ou de la soif, ou par manque de pointeur – parce qu’à cet âge les mémés n’ont plus la chance de niquailler, les pépés, qui le peuvent encore, préfèrent aller se faire foutre au septième ciel entre des battants plus gras et tendres… Bon, trêve de calembredaines à la con, Mémé Gloria a défunté.

Mémé Gloria est chrétienne, comme la plupart des Togolais, comme au Togo tout le monde, ou presque, est chrétien… par défaut. Histoire de rester à la page, quoi ! Même feu Eyadema a été chrétien, même s’il paraît qu’il ne savait même pas réciter le Pater Noster, et que quand il partait à l’église pour célébrer le 13 Janvier, son jour préféré, le jour de l’assassinat de son prédécesseur le père de l’indépendance du Togo, il passait tout son temps à tourner la tête de gauche à droite comme un petit mauvais collégien tricheur, quand on récitait cette prière que doit connaître tout chrétien… normal… Bien, euh… ouais, Mémé Gloria est morte, et elle est chrétienne.

C’est connu, au Togo, comme au Ghana et au Bénin, un chrétien, qu’il soit normal ou anormal, ça ne s’enterre pas comme on enterre un chiot. L’enterrement d’un chrétien au Togo est un évènement, un évènement qui se fête comme cela se doit, comme Noël. Uniforme, musique, danse, alcool, sucrerie, rires, drague, baise… Argent. Tout ! Et je me rappelle encore combien j’enviais, jeune, mes amis qui avaient la chance de perdre une tante ou un oncle, et qui se voyaient offrir un complet cousu avec l’uniforme, avaient le privilège de vivre deux à trois jours de bamboula dans leur maison, alors que mes vilains et méchants tantes et oncles s’obstinaient à ne pas mourir !

Mémé Gloria est chrétienne et elle est morte. Comme tout orphelin togolais qui se respecte, ses trois enfants ont pleuré une fois qu’ils ont appris la mort de leur mère, même s’ils ne lui ont jamais rendu visite durant son hospitalisation de trois mois à l’hôpital. Ils n’ont pas de temps, et ils ont engagé une infirmière de l’hôpital pour la prendre en charge. Quoi de plus normal ! Faure Gnassingbé le Président en chair et en os le crie tous les jours, les Togolais doivent travailler pour faire développer le pays. Un pays, même si son président ne fout rien et passe tout son temps à niquer les gonzesses des stars de foot du pays, se développe par le travail de ses citoyens. Les enfants de Mémé Gloria étaient donc tellement occupés par leur travail pour développer la dictature analphabète, militaire et cinquantenaire qu’est le Togo, qu’ils n’ont pas pu rendre visite à leur mère avant sa mort. Et ils ont rapidement donné l’ordre d’évacuer leur mère à la morgue pour au moins trois mois, le temps de préparer l’enterrement.

Parce qu’au Togo, l’enterrement d’un chrétien, ça se prépare. Un cadavre chrétien est une marchandise, un titre de bourse, et il faut miser dessus. Il faut inviter les amis, les collègues, les proches, les amants, les ex, les ex des ex – parce que l’ami de mon ami c’est mon ami et non mon rival.

Mémé Gloria a fait plus de trois mois à la morgue, et ses trois enfants ont pris tout le temps d’inviter tous ceux qu’ils connaissaient et tous ceux qui connaissaient ceux qu’ils connaissaient, tous ceux dont ils avaient une fois entendu parler et tous ceux qui ont une fois entendu parler d’eux… Plus de trois mille invités. Plus de trois mille enveloppes donc, à raison de mille francs au moins l’enveloppe, parce que la Bceao ne fabrique plus de billet de cinq cents francs, et le plus grand pingre de la Terre ne peut glisser une pièce dans une enveloppe, surtout que la remise des dons se fait main-à-main. L’enterrement de Mémé Gloria va rapporter à ses enfants au moins trois millions, les dépenses ne pouvant pas dépasser un million. De quoi donner envie d’aller donner un coup de gourdin à la maternelle qui est là vautrée et qui vous tend toujours la main au moindre besoin !

Aujourd’hui, mémé Gloria va être enterrée ! Il est huit heures et la maison mortuaire commence à se remplir des invités qui vont faire leurs dons après la cérémonie d’enterrement. Les parieurs, euh, les orphelins, fredonnant les morceaux gospel que crachent les haut-parleurs installés un peu partout dans la maison mortuaire, font tout pour attirer l’attention de la foule sur leurs visages inondés de quelques difficiles larmes gagnées à coup de menthol. Il faut pleurer Mémé Gloria, elle va bientôt donner des fruits, enfin !

Il est dix heures, le lit de la défunte est prêt, et on commence à paniquer, car les membres de la famille dépêchés à la morgue pour chercher le corps de Mémé Gloria tardent à revenir. On s’apprête à téléphoner à la morgue quand une voiture gare devant la maison mortuaire. Un agent de l’hôpital où avait trépassé Mémé Gloria en sort tout en sourire. Il a une bonne nouvelle à annoncer. Une surprise. La surprise la plus agréable de l’année. Il ouvre la portière de la voiture en criant « Mes chers, votre grand-mère n’est pas morte, elle est bel et bien en vie, une de nos infirmières s’était trompée et l’avait confondue à une autre vieille qui lui ressemblait trait pour trait. Dieu soit loué. Gloire à Jésus ! ». Gloire à ton cul, mon vieux ! De quoi vous la bousiller votre vilain incompétent hôpital qui pousse des parieurs à miser sur la marchandise du corps de leur mère !

Mémé Gloria, bien habillée et en bonne santé, sort de la voiture en souriant et se dirige vers ses trois enfants n’arrivant pas à cacher leur pétrin. Ah, la sorcière ! Pas de corps donc à enterrer ! Pas d’enveloppes ! Pas de millions !

Les enfants de Mémé Gloria, qui viennent de voir les précieux millions leur filer sous le nez, ne font que pousser des soupirs de désespoir, regardant ébahis, devant une foule pétrifiée, leur vilaine et importune mère se diriger vers eux en claudiquant sur ses hanches dépiécées qu’elle refuse d’aller cacher dans une tombe.

Non, Mémé Gloria, Tu ne peux pas ne pas mourir, parbleu ! Ton retour n’est pas un retour triomphal, parce que les retours triomphaux, Eyadema qui en avait le secret a crevé depuis longtemps et son fils, se sachant tellement détesté par les Togolais, ne peut même pas oser aller se faire égratigner dans un crash d’avion pour se voir chanter par le peuple.

Mémé Gloria, tes fils ont misé plus d’un million sur la marchandise de ton cadavre, et tu ne peux pas le leur faire perdre. Tu es morte. Tu dois mourir. La seule option, ma chère Mémé Gloria, c’est de simuler une brusque attaque cardiaque, faire la morte, pour qu’on t’installe dans ce lit douillet qui t’est préparé, pour qu’on t’enterre, pour que les invités donnent les enveloppes, pour que tes fils récupèrent le million qu’ils ont misé sur ton corps.

Allez, ouste, Mémé Gloria, dans ta tombe… pour le bien de la bourse des cadavres au Togo !


Le Top 5 des Présidents africains les plus stylés

Les chefs d’Etat africains sont si détestés de leurs peuples que chaque fois qu’on mentionne leurs noms, on ne pense qu’à la dictature, la corruption, la prévarication, le meurtre, les élections volées… Ceci fait totalement ignorer certaines qualités non négligeables qu’ils ont, et qui n’ont jamais, hélas, brillé.

Je suivais, il y a quelques jours, le Journal Afrique sur TV5 en compagnie de deux potes du bled quand l’un d’eux lança en riant, quand on montrait un vieux chef d’Etat de l’Afrique occidentale plus chauve que le derrière d’un vieux singe et dont le nom m’échappe, «Sincèrement, c’est un peu ridicule mais il faut qu’un chef d’Etat soit un peu beau et/ou élégant, ça donne une bonne image à son pays, il n’y a rien de plus déshonorant pour un pays qu’un chef d’Etat laid, débraillé et de surcroît vieux. » Le débat s’ouvrit ainsi et après une trentaine de minutes, nous fûmes tous les trois d’accord sur le fait qu’il faut qu’un chef d’Etat, un bon, ait au moins une petite trace de beauté et/ou d’élégance, affaire de design et de look, quoi ! Nous procédâmes donc à la classification des cinq chefs d’Etat les plus beaux et/ou élégants que l’on puisse rencontrer dans le continent noir.

Le jury demande aux Présidents qui ne retrouveront pas leurs noms dans cette liste si fermée de ne pas lui en vouloir, de faire preuve de fair-play, et ne pas, ivres de rage, aller monter des rebellions contre leurs homologues élus.

Voici donc le procès-verbal de la classification des cinq plus beaux et/ou élégants chefs d’Etat africains, à l’issue de la délibération de notre jury autoproclamé.

1er : Blaise Compaoré (Burkina Faso), Mention Très bien, avec applaudissements du jury.

Arrivé à la tête du Pays des Hommes Intègres à la suite du lâche assassinat du bien-aimé Thomas Sankara, Balise Compaoré, même si son règne est aussi pourri que même le charognard le plus éhonté n’en voudrait pas, saute aux yeux par sa beauté et son élégance. Vestes taillées sur mesure, démarche ordonnée, verbe facile et beau style, très posé. Et, cerise sur le gâteau, le mec a une très belle femme, de quoi faire baver certaines premières dames qui, malgré leurs soins minutieux, pommades, perruques et bijoux de valeur, n’arrivent à ressembler à rien d’intéressant, et qui se réfugient désormais derrière la littérature en écrivant des livres pour se mettre en valeur.

2e : Mouammar Kadhafi (Libye), Mention Très bien.

Le guide de la révolution libyenne, le roi des rois d’Afrique, malgré l’image de terroriste-paria qui lui colle à la peau, est un beau gosse incontestable, malgré son âge avancé, comme d’ailleurs la plupart des Libyens, des arabes. C’est connu, le Guide est looké et relooké par les stylistes les plus chers de la planète Terre, et le résultat est palpable. Surtout quand on le voit bien brosser sa belle chevelure sur laquelle il dépose un petit chapeau. De quoi donner des idées de meurtre à Abdoulaye Wade qui depuis Mathusalem ne cesse de demander, sans succès, à Allah et au Prophète de lui faire pousser au moins une petite couche de cheveux sur la tête, pour aussi changer de temps en temps de look à travers la coiffure.

3e: Feu Gnassingbé Eyadema (Togo), Mention Bien.

Même si tu n’aimes pas la musaraigne, ne nie pas qu’elle sent plus mauvais que toi. Sagesse africaine. Eyadema, Koyaga pour certains écrivains, Yamatoké pour d’autres, tueur, dictateur, voleur d’élections qui est prêt à faire voter les bêtes sauvages au cas où les humains ne voudraient pas voter pour lui… Mais Eyadema élégant, très élégant, même s’il n’est pas aussi beau que Blaise Compaoré. L’élégance est une question d’éducation, comme le dirait l’autre. Et voilà le paradoxe d’Eyadema. Personne n’a jamais compris comment ce petit cultivateur et lutteur traditionnel, miliaire par la suite, bombardé subitement président à la suite de l’assassinat du père de l’indépendance du Togo, a réussi à cultiver autour de lui une si grande élégance. Ayant réussi à transformer sa démarche de vieux boiteux en démarche très classe, le Gnass sait très bien agencer les couleurs de ses costumes et cravates, croiser les pieds comme un homme vraiment cultivé, parler français comme un intellectuel en prenant tout son temps pour ne pas casser la marmite (faire des fautes). Et surtout avec ses cheveux bien gominés et si brillants ! C’est ce qui fait l’une de ses grandes différences avec son petit héritier Faure, qui malgré son jeune âge qui le rend si fier, ne fait que porter des vestes-boubous qui lui font ressembler à des comédiens ghanéens qui venaient nous divertir au Togo pendant notre enfance.

4e : Dénis Sassou N’Gesso (Congo Brazza), Mention Bien

A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Le Dénis ne doit pas normalement être si fier de faire partie de cette classification juste parce qu’il est du Congo, et tout le monde sait que quand on est congolais on est un sapeur. Des chanteurs aux écrivains, tous les Congolais, comme un héritage, savent très bien s’habiller et ne passent jamais inaperçus partout où ils passent. Véritables mordus des grandes marques, D&G, Prada, Versace, Armani… Allez rencontrer les personnages du géant Alain Mabanckou – super élégant lui-même – Moki, Préfet, l’Imprimeur, Fessologue… C’est d’ailleurs pour cette raison que Dénis Sassou N’Gesso, sachant très bien que l’élégance n’est pas une qualité rare dans son pays, a décidé de se recycler en écrivain, en publiant un bouquin portant une soi-disant préface de Nelson Mandela, un bouquin qui… Grrrrrr…

5e : Nelson Mandela (Afrique du Sud), Mention spéciale du Jury

En fait, le jury a décidé de faire figurer Madiba dans cette liste pour pousser les chefs d’Etat africains à changer et à ressembler au père de la Nation Arc-en-ciel. Parce que les chefs d’Etat noirs, aveuglés par leur mégalomanie, cherchent à figurer dans tous les palmarès. Il suffit qu’on leur dise que s’ils cessent de voler et les deniers publics et les élections, s’ils cessent de tuer leurs opposants, s’ils cessent d’assassiner les constitutions, on les classera comme le plus beau chef d’Etat de l’Afrique, eh bien, qui sait, mais alors qui sait, ils pourront changer ! Des remèdes si ridicules peuvent des fois guérir des maux très graves ! Comme cette pratique ridicule du bled qui stipule que pour empêcher un enfant de faire pipi au lit, il faut lui accrocher une grenouille autour des hanches !

Ps : La prochaine classification sera celle des chefs d’Etat africains qui savent bien danser. Le casting aura lieu dans une boîte de nuit ici à Bamako. Nous invitons donc tous les présidents africains à nous faire parvenir leurs dossiers de candidature à l’adresse faischier@yahoo.fr. Une visite médicale est recommandée parce que nous ne voulons pas de ces chefs d’Etat vieux et/ou malades qui cachent leurs maladies comme leurs couilles et qui ne les reconnaissent que quand ils sont dans leurs cercueils allongés. C’est pourquoi des présidents comme Mugabe, Abdoulaye Wade… qui tiennent à peine sur leurs hanches sont d’office disqualifiés et ne sont pas autorisés à présenter leurs dossiers, sauf s’ils arrivent à corrompre notre jury qui reste corruptible comme toutes les institutions africaines.


Cocu nickel

Souley, mon meilleur ami, s’est foutu les deux pieds dans une merde sans nom et je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer, parce que, wallahi, je l’avais bel et bien averti.

Les jeunes Togolais et Ivoiriens ont trouvé un dada ici à Bamako, taper dans le dos des Maliens, c’est-à-dire aller au pays des merveilles des femmes mariées en l’absence de leurs maris. Et Dieu seul sait le nombre de foyers que ces play-boys brisent tous les jours dans cette capitale si ouverte aux étrangers. Allez savoir pourquoi ces femmes, qui sont pourtant très choyées au foyer et à qui leurs maris n’hésiteront pas à aller décrocher les dents du Loch Ness si seulement elles en expriment le désir, se comportent de la sorte.

Personnellement, j’avoue que mes compatriotes togolais s’adonnent à ce jeu juste pour fuir leur responsabilité d’homme, payer avant de tirer un bon coup, parce que, faut pas faire, même les cadavres des Togolais ne sont pas prêts à donner un seul centime à une femme avant de monter aux septième et huitième cieux. Et à Bamako, comme d’ailleurs dans toutes les capitales africaines aujourd’hui, vaut mieux couper son monsieur-d’en-bas si on n’est pas prêt à débourser. Ah, ces gonzesses de la nouvelle génération ! La preuve ? Voici plus de deux ans que je suis ici, désoeuvré comme un fils mal-aimé ayant succédé à son père dictateur à la Présidence, sans jamais avoir eu l’occasion de câliner la plus crasseuse des minettes d’ici.

Mes frères togolais, disais-je donc, ont trouvé pour échappatoire de laisser les jeunes nanas et déverser leur insatiable libido sur de vieilles femmes mariées en quête de plaisir, qui ne demandent rien, et qui sont au contraire prêtes à tout leur donner jusqu’à la dernière fibre de leur petite culotte.

Tout commença avec un costume que m’amena Souley un soir, alors que j’étais occupé, comme toujours, à taper sur ma machine comme une secrétaire voulant être promue.

– Hé, grand écrivain, voilà un beau costume, tous les écrivains que moi je connais portent des costumes alors que toi je ne t’ai jamais vu avec un. Tu passes ton temps à porter ces trucs de coupé-décalé qui te font ressembler à une marionnette dans un marché de Cotonou. Tiens, je te vends ceci à dix mille balles.

– Souley, répondis-je en me redressant, ne me dis pas que tu commences maintenant à voler, hein, fais beaucoup attention parce que les gens d’ici tuent sur-le-champ les voleurs et…

– Je n’ai pas besoin de tes conseils, écrivain sans costume, garde tes conseils pour toi et donne-moi les dix mille balles. C’est un Hugo Boss original et c’est une mamito toute fraîche que je viens de décrocher qui me l’a offert. T’en dis quoi ?

– Quoi, Souley, m’étais-je indigné, veux-tu me dire que toi aussi tu vas commencer à sortir avec des femmes mariées, briser les foyers des pauvres Maliens et…

– Assez, monsieur le moraliste, coupa-t-il en riant, si tu veux donner des leçons de morale, va le faire chez toi là-bas à ces idiots qui se sont emparés de cette dictature militaire, analphabète et quarantenaire que vous appelez Togo. Tu n’as pas honte de laisser ton pays dans cette merde et venir dispenser tes foutus conseils à des honnêtes citoyens comme moi, hein. Donne les dix kolos. Je pris le costume qui était trop ample pour moi et lui donnai un billet de cinq mille.

– Souley, lui lançai-je quand-il sortait, fais attention à ce que tu fais, le jour où son mari t’attrapera, on te coupera en morceaux avant de t’expédier vers ta boucherie de pays.

Souley s’était effectivement accroché comme un pou à la femme d’un officier qui le bourrait tous les jours de billets de banque et de cadeaux. Il mit fin à son travail de cuisinier et passait ses journées devant la télévision que lui avait offerte sa maîtresse. Le soir, quand il arrivait chez moi sur sa moto que lui avait achetée la mamito, il m’amenait manger de la viande de mouton et boire de la bière. Il prit plus de dix kilos en moins de six mois et je finis par l’envier.

– Souley, lui fis-je un soir où on était au restaurant, faut que tu me cherches une.

– Quoi ? fit-il en me regardant souriant. – Tu sais ce dont je veux parler. Il explosa de rire.

– Monsieur le moraliste veut aussi bouffer cul de mamito. Pourquoi ne lances-tu pas un appel dans ces foutus bouquins que tu écris ?

Hier soir, j’étais toujours devant l’écran de mon PC quand mon sacré gigolo rentra, désespéré comme l’est actuellement Laurent Gbagbo hué et matraqué par le monde entier. Je ne l’avais plus vu depuis une semaine et je voulus lui poser des questions quand il explosa comme le Vésuve :

– Sais-tu qu’il vient de confisquer tout ce qu’elle m’a offert hein, sais-tu qu’il menace de m’emprisonner si je maintiens ma décision, hein ? Sais-tu qu’il a confisqué mon passeport et toutes mes pièces et que je ne peux plus voyager, hein ? Sais-tu qu’il me…

– Tu parles de qui ? Prends place, calme-toi et raconte-moi tout posément. Il ne se calma pas et continua en hurlant :

– Il peut me tuer s’il veut, je ne vais plus le faire et…

– Qui ? ai-je coupé, inquiet.

– Le mari de ma mamito.

– Il vient de te surprendre, n’est-ce pas ? fis-je en me redressant.

– Toi tu souhaites toujours ce qui est négatif, comment peut-il me surprendre ? C’est la mamito qui lui en a parlé. Ils m’ont eu, tu vois, hein, c’était un complot et…

– Quel complot, fis-je complètement perdu.

– Eh bien, l’officier s’était entendu avec sa femme pour que cette dernière se cherche un pointeur en forme parce que sa houe n’arrive plus à labourer. Tu vois hein, il ne démarre plus et sa femme était obligée d’aller se débrouiller dans le Hors Activité Ordinaire, HAO. Tu me saisis ? Elle faisait ça avec tout le monde et son mari en avait honte. Finalement, il lui a demandé de chercher un seul et vigoureux bouc qui pourra la satisfaire. Voilà comment elle était tombée sur moi avec la complicité de son mari. C’était lui qui lui donnait tout ce qu’elle m’offrait. Maintenant qu’elle devient trop exigeante et que je veux la laisser, elle en a parlé à son mari qui a débarqué chez moi ce soir avec deux policiers et a tout confisqué. Je ne peux plus continuer avec elle. Tu vois, hein ? Au début, elle était raisonnable et on faisait la chose simplement. Maintenant, elle commence par demander des accessoires que je ne peux pas lui offrir. Elle veut que je fourre ma langue dans son pays des merveilles, un pays qui a déjà vu sortir six gosses. Tu crois que je peux faire ça, moi ? Je suis garçon unique à ma mère et je vais devenir con si je fais ça. Elle veut tant de trucs que je ne peux pas faire et qu’elle et son mari me forcent de faire. Je suis musulman, après tout ! Wallahi, ils peuvent me tuer, mais je ne vais jamais le faire.

– Donc si je comprends bien, fis-je en souriant, le mari de ta maîtresse, ton rival, te force à coucher et faire des conneries avec sa femme.

– Je n’ai plus besoin de te le répéter, espèce d’idiot, fit-il en poussant un juron amer.

J’éclatai de rire comme une adolescente gâtée à qui on raconte des histoires défendues. Eh Allah, si tous les cocus de la Terre pouvaient être comme cet homme !


Le message de la mort

Plusieurs fois déjà, j’avais souligné aux potes que ce message, chaque fois que je le vois s’afficher sur l’écran de mon phone, me tend les nerfs. Pas facile de défaire le nœud au bout du pagne d’autrui, dit le proverbe de chez moi. Demander une faveur, c’est normal. Mais il faut savoir le faire. Donner n’est pas facile, quelle que soit la main qui donne, et celle qui reçoit. Le concepteur de ce message aurait dû remarquer que « Peux-tu recharger mon compte sur ce numéro ? » ne sonne pas toujours bien pour son destinataire, même s’il vient de l’être le plus aimé.

Il fallait au moins y insérer un petit « s’il vous plaît », juste pour la rhétorique.
« Le concepteur n’a pas conçu ce message en se référant aux humeurs de psychopathes comme toi. Ce message, c’est les nanas qui l’envoient à leurs gars, et tu sais bien qu’ici les fesses, on ne leur refuse rien, on les respecte, et elles n’ont pas de s’il vous plaît à demander à qui que ce soit. », m’avaient-ils toujours répondu.
Je déteste donc ce message, « Peux-tu recharger mon compte sur ce numéro ? », comme un peuple divisé et désespéré déteste le fils d’un dictateur devenu Président. Et à plusieurs reprises, je l’ai mise en garde, elle n’a pas le droit de me l’envoyer. Si elle a besoin d’une carte de recharge pour son phone, elle connaît très bien où cela se vend. Roméo et Juliette, Mamadou et Bineta, Abalo et Afi, oui. Je t’aime mon bébé, t’es ma source d’eau vive, la lumière de mes pas, mon souffle de vie… oui. Mais que chacun recharge son compte quand il en a besoin, parce que je ne suis pas Jésus pour porter la croix de qui que ce soit surtout en pleine crise financière sur fond de sécheresse.
Ce fut pourquoi je crus rêver quand je vis le message envoyé par son numéro. A vingt-deux heures, heure à laquelle elle sait très bien que je suis concentré sur mes textes comme un impuissant sur un film p… un film X, je veux dire. Cette fille me demandait de laisser mon ordi, me lever, aller dans une boutique chercher une carte de recharge de mille francs au moins, retourner chez moi, la gratter, prendre mon téléphone et lui envoyer le numéro de recharge, Terre et Ciel ! Pour ne pas m’enflammer, mon cœur étant toujours au four comme me le font toujours remarquer les potes, j’éteignis tranquillement mon téléphone et me concentrai de nouveau sur mes textes.
– T’as éteint ton téléphone juste parce que je t’ai demandé de me recharger mon compte, hein, crois-tu que…
Je fis l’effort de lever la tête et la voir, droite devant ma table de travail, les deux mains aux hanches, la mine froncée comme celle d’un militaire sur une photo passeport. Parle à mon cul, ma tête est malade. Je fixai de nouveau l’écran de mon ordinateur. Elle reposa la question, la voix plus menaçante avec en fichier joint un long juron. Lui répondre de la manière la plus polie.
– Oui, Mariam, j’ai éteint mon phone parce que je t’ai toujours demandé de ne pas m’envoyer ce message et…
– Je veux que tu recharges mon compte, c’est tout, ce n’est pas beaucoup te demander non ?
– C’est trop me demander, Mariam, parce que celle qui m’a mis au monde n’a jamais demandé quoi que ce soit à mon père sur ce ton.
– Eh bien, c’est désormais ta chère mère qui t’ouvrira son cul parce que tu ne me verras plus jamais chez toi, sale violeur.
Sale violeur ? Je m’en moque éperdument. Même de très grands cinéastes le sont, sans oublier certains papes… euh certains prêtres je veux dire. Mais que cette fille ouvre cette bouche puante pour parler de ma mère, Mère Marthe… de son cul ! Touché, poussy cat ! Je crus voir une pléthore d’étoiles filantes devant moi. La frapper à mort, la bousiller, lui labourer et relabourer le corps comme le font les milices du Rassemblement du Peuple togolais aux opposants après les élections volées… Vlan, vlan, vlan ! Trois claques bien épicées sur ce visage allongé de petite peuhle ! Pièce jointe, un grand coup de pied dans le ventre…
– Sors de ma chambre et sache que je ne veux plus jamais te voir ! Crois-tu que c’est pour une histoire de carte de recharge que tu peux ouvrir ta sale gueule-là contre ma mère ? Je te tuerai si je te vois encore ici, pute.
Ce fut une fille Larmes, une fille Gémissements qui sortit de ma chambre en courant. Et c’est quand je la vis disparaître que je réalisai le crime que je venais de commettre. Je venais, moi un étranger, de frapper une belle fille de Bamako ! Pour une histoire de carte de recharge ! Une de celles-là qui peuvent obtenir des cadeaux de centaines de mille juste en claquant les doigts ! Rédiger à la hâte mon testament si j’avais quelque chose à dire et avertir mes meilleurs amis pour qu’ils ne m’enterrent jamais ailleurs que chez moi, à côté de mon père, parce que je savais que je n’allais pas passer la nuit vivant. Les frères, cousins, amis, oncles… de Mariam allaient dans quelques minutes débarquer chez moi pour me rouer de coups de gourdins et de machettes, m’envoyer dans l’autre monde en douleurs, avant de repartir après avoir cassé tous mes meubles. J’avais touché à l’intouchable, et je devais être expédié six pieds sous terre… Ma mère, Mère Marthe ! Ecouter sa voix avant de fermer, définitivement, les yeux… J’allumai mon phone qui était toujours éteint. Ah, un message de Kadi, une belle étudiante que j’avais rencontrée la veille dans un resto. Quoi de plus chouette que de lire le message d’une belle fille avant de mourir ! « Peux-tu recharger mon compte sur ce numéro ? ».


Les filles UEMOA

Une heure trente minutes déjà à l’attendre ! Et les copains ont déjà appelé plus de dix fois, tout est prêt, il ne manque que nous. Et pourtant elle m’avait dit qu’elle passerait juste après la prière qui s’est achevée il y a plus de deux heures ! De quoi lui donner six gifles comme le fait un jeune président – très fort, paraît-il – aux vieux barons de son père qui l’entourent à la présidence de mon pays dont j’ai oublié le nom. Attendre une fille ! Celles-là qui chez moi sont prêtes à nous attendre par dizaines sous le soleil, bien que nous ne leur donnions rien – en espèces bien sûr ! Eh Allah, fasse que je retourne chez moi, dans la dictature familiale!

Souley mon meilleur ami rentre, dans un long boubou. Pieux muslim le jour de la Tabaski !

– Ah, le grand écrivain sans bouquins n’écrit pas aujourd’hui ! Il se croit sapé alors qu’il ne ressemble qu’à un instituteur retraité allant jouer au tiercé. Mon vieux, tu pars où comme cela le jour de la Tabaski, toi qui te dis chrétien et qui n’as ni Bible, ni Nouveau Testament, et qui n’es jamais allé, même en rêve, à l’église ?

– Je suis invité chez des amis musulmans et je dois y aller avec Mariam qui…

Il explosa de rire en se laissant tomber sur le lit à côté de moi.

– Tu l’attendras, ta Mariam, jusqu’au retour de Jésus et de tous les Saints qui paraît-il sont au ciel. Je t’ai dit de chercher une bonniche pour copine mais tu joues au grand play-boy alors que tu es plus laid que l’anus d’un mouton et plus pauvre que la sébile d’un mendiant noir de Paris. Ta Mariam est une fille UEMOA et elle est en train de tourner pour le moment dans la sous région. Ton tour va arriver tard. Très tard. Trop tard, mon vieux.

– C’est quoi cette histoire de fille UEMOA ? lui demandai-je en le regardant rire, ébahi.

– Eh bien, mon grand écrivain idiot, sache que beaucoup de filles d’ici pratiquent bel et bien l’intégration et la libre circulation des personnes et des biens d’en bas. Elles sortent simultanément avec des gars de tous les pays de l’UEMOA. Pour des intérêts différents. Les Togolais pour le chauffage de leur moteur, c’est-à-dire le choc, parce que tu sais que ça c’est notre spécialité, nos trucs-là sont bien durs, on nous met suffisamment d’eau chaude dedans pendant nos jeunes âges. Les Béninois pour la bouffe car la cuisine est la profession de prédilection des Béninois qui viennent ici, il paraît qu’ils préparent très bien et je me demande si ce n’est pas leurs gris-gris-là qu’ils mettent dans les plats parce qu’il ne faut pas blaguer avec ces sacrés voisins que nous avons. Les Ivoiriens et les Sénégalais pour l’habillement, tu n’ignores pas que les meilleurs brodeurs de ce pays et les patrons des plus grands salons de couture sont des Ivoiriens et des fois des Sénégalais, et ces filles se collent à ces tailleurs pour faire gratuitement des habits. Les Burkinabais pour le show en boîte de nuit et la bière parce que tu sais que ces échappés du désert qui se disent des hommes intègres ne savent rien faire à part boire et faire bombance en boîte. Les Nigériens pour leurs menus besoins de filles : montres-bracelets, colliers, autres parures… tu sais bien qu’il n’y a pas meilleur commerçant que ces Nigériens, les médjiras comme on les appelle chez nous, qui s’obstinent à multiplier par zéro tous les efforts de l’Unesco qui se tue chaque jour à leur demander d’étudier, ces sacrés petits foulanis que Mamadou Tandja avait voulu dissoudre après avoir dissout toutes les institutions de son pays pour s’accrocher au pouvoir. Les Maliens pour les chèques, comme c’est ce que valent ces vieux puceaux des bords du Djoliba qui se croient galants, bourrer les nanas de billets de banque sans même oser vouloir connaître la couleur de leur petite culotte. Mon vieux, tu vois donc ce qu’est une fille UEMOA. Elles font circuler librement tous les garçons de l’UEMOA sur leur territoire. Eh bien, c’est ce qu’est ta Mariam. Et aujourd’hui jour de fête, elle doit accomplir des missions dans tous ces pays de la sous région ouest africaine. Et si tu es vraiment intelligent, tu dois deviner ton rang ! Elle doit d’abord passer chez son gars malien pour le chèque, ensuite chez l’Ivoirien et le Sénégalais pour ses habits, puis chez le Nigérien pour les parures, avant de passer au restaurant chez le Béninois pour manger, partir après en boîte avec le Burkinabais. Elle ne viendra chez toi aujourd’hui qu’autour de deux heures du matin, pour se faire pointer. Mon vieux, va te déshabiller et garde ces habits pour les funérailles des hommes politiques de notre pays parce que j’ai rêvé cette nuit qu’ils vont tous mourir bientôt. Va reprendre ton vieil ordinateur et tes brouillons-là que même les mendiants les plus crasseux de ce pays n’accepteront pas pour se torcher le cul. Tu occupes, dans le programme de la fille UEMOA, la dernière place comme ta brousse de pays dirigé par des broussards, dans la sous région… Ah, si tu veux une bonne, je peux t’en chercher. Deux cents francs pour lui acheter une bouteille de coca et tu tires un coup bien sec. Qui dit mieux !


Afro découverte : Alain Mabanckou

Alain Mabanckou

Son nom n’est désormais plus inconnu dans le monde littéraire africain et même français. Il enchante et ses lecteurs qui se multiplient au jour le jour, et les critiques littéraires, et les journalistes. Présent sur presque tous les grands médias français, et dans de prestigieuses rencontres littéraires, il se distingue, au-delà de son incommensurable talent, par son goût pour l’élégance et la classe. Véritable glaneur de prix littéraires, il créé l’évènement à chaque nouvelle sortie et révolutionne, à sa manière, toute une littérature, toute une culture, tout un monde, toute une histoire.Alain Mabanckou, puisqu’il faut l’appeler par son nom, est aujourd’hui l’un des meilleurs écrivains francophones d’origine africaine – s’il n’est le meilleur. Vivant et enseignant actuellement aux Etats-Unis, ce natif du Congo Brazzaville a connu la reconnaissance mondiale en 2005  avec la sortie de son roman-évènement Verre Cassé (Seuil), véritable joyau ayant défrayé la chronique surtout en France et en Afrique, après plusieurs  romans publiés et quelques prix littéraires remportés dont le Grand Prix littéraire d’Afrique noire en 1999.

Le golden boy de la littérature africaine francophone moderne amorçait ainsi une aventure riche en couleurs et en honneurs. Un an seulement après la sortie de Verre Cassé couronné par plusieurs prix littéraires dont le Prix Rfo, le Prix Ouest-France Etonnants Voyageurs, Mabanckou décroche le prestigieux prix Renaudot, dont les lauréats sont encore rarissimes dans notre littérature, avec un autre roman-évènement, Mémoires de porc-épic (Seuil, 2006). Un essai à succès, Lettre à Jimmy, dédié à l’écrivain noir américain homosexuel James Baldwin paraît chez Fayard en 2007, suivi deux ans après d’un autre roman, Black Bazar (Seuil, 2009), une histoire qui va dans la même logique que Verre Cassé, où la truculence, l’ironie, l’autodérision dont font preuve les héros enchantent le lecteur. Son dernier opus, Demain j’aurai vingt ans, un roman à résonance autobiographique, paru dans la très prestigieuse collection Blanche chez Gallimard, fait partie des romans les plus remarqués de cette rentrée littéraire 2010 et a déjà été distingué par le Prix Georges Brassens 2010 !

Ce qui plaît chez Alain Mabanckou, c’est cette distance qu’il prend, dans ses œuvres si enracinées dans son Afrique noire, vis-à-vis de l’Afrique mythique que tentent toujours de peindre certains intellectuels passés de mode. L’œuvre de Mabanckou ne cherche pas à redonner une certaine dignité soi-disant bafouée à l’Afrique, mais fustige, sur fond d’ironie, à travers les mésaventures de ses personnages, une Afrique où la mal gouvernance, la corruption, la gabegie, les farces religieuses, les pesanteurs sociales, les considérations ethnocentriques et racistes… la misère sont devenues monnaie courante. Le pays de Verre Cassé, le héros du roman éponyme, avec un président ubuesque, louche et presque loufoque en dit long.

La dignité de l’Afrique, Alain Mabanckou n’a pas besoin de la défendre dans ses livres. Elle la lui donne au jour le jour. Ce Franco-congolais de 44 ans est convaincu que la dignité de l’Afrique, ce sont ses fils qui doivent la lui donner, et essaie de le faire, chaque jour que Dieu fait, avec sa plume. Ces prix littéraires qu’il remporte un peu partout dans le monde, c’est son Afrique qui bat en lui qui les reçoit avec lui, à son plus grand bonheur.

Espérons que les jurés du Nobel pensent un jour à lui. Qu’il soit le cadet du Nigérian Wole Soyinka sur la prestigieuse liste des écrivains de l’Afrique noire à avoir remporté le Prix Nobel de littérature !


Manavi et le faux marabout

Manavi et le faux marabout

Profession, boutiquier. Il vend dans une de ces petites cabines dix fois plus sales qu’un poulailler. Il est aussi marabout. En fait, on dit qu’il l’est. Aucune preuve pour l’affirmer à part son assiduité à la mosquée du quartier et quelques femmes, très sales, comme lui-même, ses clientes, je crois bien, qui lui rendent de temps en temps visite dans sa boutique qui, dit-on, lui sert également de lieu de travail. Trente ans à peine. En jeune marabout qui se respecte et qui respecte Allah et les hommes, il n’entretient aucune relation – particulière bien sûr – avec aucune femme. Comme il n’est marié ni devant la tradition, ni devant la loi, ni devant Allah. Très chaste. Il est très respecté et aimé dans le quartier. C’est un très bon musulman, dit-on de lui. On raconte même que beaucoup avaient déjà à plusieurs reprises suggéré de cotiser pour l’envoyer en pèlerinage à La Mecque, pour lui conférer le respectable titre d’El Hadj.

Il ne m’aime pas. Trop de filles me rendent visite, me reproche-t-il. Je suis un mauvais exemple, un très mauvais exemple pour les jeunes du quartier. Les Togolais et les Ivoiriens sont de mauvais exemples, parce qu’ils ne connaissent pas la pudeur, disent-ils. Ils sont prêts à marcher, en plein jour, dans la rue, main dans la main avec des filles qui ne sont pas leurs femmes. Il y en a même qui les embrassent sous les yeux des passants et d’Allah. C’est parce qu’ils acceptent le concubinage chez eux. Abomination ! Les jeunes Togolais et Ivoiriens sont des dangers pour les filles, leurs filles, disent-ils. Ils les détournent de la voie juste et les poussent à faire des cochonneries…

Il m’a interdit de venir faire des achats dans sa boutique depuis le jour où, voulant le payer, j’ai déposé une pièce de cinq cents francs sur son coran déposé sur le comptoir.

– Astafourlaï, avait-il crié, toi-là tu es malade ou quoi, hein, tu oses déposer ton sale argent-là sur le Livre saint ? Tu ne crains pas Dieu ? Toi-là tu es quoi même ? Vous les étrangers qui ne priez pas, ce n’est pas la peine.

J’eus un petit sourire, devant l’incongruité de la remarque, moi qui généralement utilise ma bible comme banque, y rangeant mes billets de banque. Quoi de plus honorable que de ranger des billets de banque, ces billets que le Père même nous a fait gagner à la sueur de nos fronts – ou de nos autres parties du corps, ça dépend, dans Son livre ?

– Euh, je savais pas que c’était le Coran, je croyais que c’était un roman que vous étiez en train de lire, fis-je en pouffant de rire, ne pouvant pas me retenir.

– Maudit sois-tu, qu’Allah ne bénisse jamais ta descendance, me hurla-t-il en manquant me gifler, ne mets plus jamais pied devant ma boutique, impropre.

J’avais carrément éclaté de rire, en m’éloignant :

– Qu’Allah te bénisse et fasse que tes descendants deviennent aussi de sales boutiquiers et marabouts comme toi, avais-je murmuré en riant.

Je n’ai plus jamais mis pied devant sa boutique. Jusque hier nuit.

J’ai fait le trajet retour, de la ville à ma maison, plus de trois kilomètres, à pied, comme tous les taxis que je hélais déclinaient mon offre. Mon quartier est réputé dangereux après vingt-deux heures. Les petits voleurs et braqueurs y font la loi toutes les nuits, chapardant antennes paraboliques et motos aux petits riches. Pour ceux qui connaissent Bamako, c’est l’un des quartiers les plus huppés et insécurisés de la capitale malienne, non loin de l’aéroport. Même la police s’est carrément désistée devant les prouesses de ces petits vagabonds laissés pour compte qui ont trouvé le vol comme seul exutoire à leur échec.

J’arrivais, essoufflé, devant ma maison, autour de minuit, quand je la vis, rapide comme l’éclair, entrer dans la boutique qui se referma subitement sur elle. Cela avait duré deux secondes au plus. Mais j’avais reconnu la silhouette dans la pénombre. Tout le monde la reconnaîtrait, cette silhouette, même dans un noir total. Elle était la seule fille qui boitait dans le quartier, ayant échappé de justesse à une polio qui avait manqué lui broyer les deux jambes quand elle avait à peine quatre ans. C’était ce qui me fut raconté sur elle. Manavi, je l’ai surnommée. Manavi ? Eh bien, pour ceux qui comprennent l’Ewé, ma langue maternelle, Mana signifie « Que je donne ». Et Manavi, c’est un petit surnom que j’ai inventé, et que je colle aux filles très généreuses qui n’hésitent pas à donner le meilleur d’elles-mêmes, au sens propre et figuré. Une fille qui donne, au sens figuré, vous savez ce que ça signifie déjà ! Tas d’hypocrites, faites pas semblant. Donc, j’ai surnommé la boiteuse Manavi, juste parce que généreuse, elle l’est, cette fille. Presque tous les phallus du quartier peuvent le témoigner. Courts, longs, gros, petits, poilus, pas poilus, pas-si-poilus-que-ça, droits, courbés, mous, durs… n’importe quoi, tu parles mon gars, la Manavi prend. Elle est née comme ça, dit-on d’elle.

Manavi dans la boutique de mon chaste marabout-boutiquier à minuit ! Y avait un très bon coup à jouer. Et pour un provocateur taquin comme moi, je ne peux chercher meilleure occasion pour m’amuser. Je me dirigeai vers la boutique où la lumière était éteinte, et commençai à frapper, très fort. Pas de réponse après cinq minutes. C’était très mal me connaître. Je redoublai d’efforts, cognant furieusement contre la porte. Un grognement me parvint, me demandant qui j’étais. Je fis des efforts pour rendre ma voix plus grave.

– Je vous cherche, marabout, c’est urgent, ma fille meurt et…

– Je ne reçois pas à cette heure, reviens demain.

– Mais elle risque de mourir, marabout, c’est moi ton cousin, ta nièce Aicha va mourir si tu n’interviens pas et…

– Tu risques de passer toute ta nuit là, parce que je sais que tu es un voleur qui cherche à me braquer, je ne vais pas ouvrir. Que ta fille crève, et qu’Allah ne la reçoive pas.

Il n’allait pas ouvrir. Mais je devais l’avoir. Absolument ! Mon premier cours du jour commence à midi. Je peux donc passer une nuit blanche et récupérer entre six et onze heures. Je m’assis donc sur une pierre à quelques pas de la boutique, jouant avec mon téléphone portable. Tout était silence. Mais je n’avais pas peur. Quand il faut provoquer, je suis prêt à tout… Plus d’une heure plus tard, la porte s’ouvrit. Légèrement. Et la boiteuse généreuse se coula dans l’obscurité pour disparaître derrière une concession. Le marabout-boutiquier vint devant sa boutique mais ne me remarqua pas dans la pénombre. Je toussai pour attirer son attention.

– Mais, qui est là, hurla-t-il en faisant un pas en arrière.

– Marabout, c’est moi le Togolais qui habite à l’étage, moi à qui vous avez défendu de venir dans votre boutique.

Il poussa un long soupir. De soulagement ou de rage ? Je ne sais pas.

– Toi-là tu fais quoi là-bas à cette heure ? Tu es un voleur ou quoi ? C’est toi qui frappais à ma porte ?

– Moi ? Non, fis-je en me retenant, je ne suis pas un voleur, je n’ai pas non plus frappé à votre porte, je suis là juste pour des enquêtes.

– Quelle genre d’enquête fais-tu à cette heure de la nuit ?

– Je mène des enquêtes sur les faux marabouts célibataires qui forniquent avec les petites filles du quartier la nuit, lançai-je en riant, me dirigeant rapidement vers ma maison, avant qu’il ne m’hypnotise avec une formule magique.


Afro découverte : Mahamat Saleh Haroun, un homme qui enchante

C’est connu de tous, le septième art africain francophone est encore loin, très loin d’être accompli. Contrairement à la musique, à la littérature et au sport où des représentants de l’Afrique noire francophone arrivent peu ou prou à s’imposer sur la scène internationale, notre cinéma végète encore dans les ténèbres et ses rares réalisations peinent à s’imposer dans les salles européennes – même celles françaises !

Plusieurs raisons peuvent expliquer ce retard dans l’essor de notre cinéma, mais les plus notoires sont le manque d’écoles de formation dans ce domaine, les pesanteurs culturelles propres à l’Afrique noire qui ne voient pas dans le cinéma – comme naguère dans le football, la musique et la danse – une profession qui puisse nourrir son homme, mais aussi – et surtout – le manque de moyens. Nos rares réalisateurs se sont toujours plaints de l’absence de producteurs, et surtout du soutien des Etats. Le résultat est palpable, et il faut le reconnaître, c’est la qualité dégueulasse des films africains – généralement des courts métrages, des sketchs ou des documentaires – qui n’arrivent pas à sortir des studios de nos chaînes nationales qui n’émettent que dans l’espace réduit de nos pays.

Cependant, dans cette désolante nébuleuse, émerge, comme toujours, un symbole, qui porte sur ses épaules, comme Atlas, tout l’espoir du cinéma du monde noir francophone, le Tchadien Mahamat Saleh Haroun.

Les cinéphiles africains n’ont pas encore oublié la date du 23 mai 2010 où le film, Un Homme qui crie – le titre est inspiré d’un vers du poète Aimé Césaire – de ce Tchadien né en 1961 et qui vit en France depuis 1982, a remporté le Prix du Jury au Festival de Cannes 2010. Déjà primé à plusieurs reprises pour ses films précédents comme Letter from New York City, Abouna et Daratt au Festival du cinéma africain de Milan et au Fespaco, le réalisateur tchadien, à travers cette récompense à Cannes, a eu la grande consécration après plus d’une quinzaine d’années de travail acharné et d’espoir – son premier court métrage, Maral Tanié a été réalisé en 1994.

Un homme qui crie a fait de Mahamat Saleh Haroun un homme qui enchante, qui enchante tout un continent qui cherche, qui cherche dans les constellations ses fils, les vrais.


Calixthe Beyala joue à la mauvaise perdante !

Dans un article intitulé, La femme qui nous offrira la Francophonie, nous avions soutenu la candidature de l’écrivaine d’origine camerounaise au poste de Secrétaire général de la Francophonie. Calixthe Beyala, avions-nous affirmé, malgré son manque d’expérience dans le domaine politique, avec sa fougue, son audace et sa vivacité, pourrait, au cas où elle serait élue, redonner vie à cette Francophonie moribonde qui est loin aujourd’hui d’être une plate-forme pour le monde francophone. Malheureusement, les choses ne semblent pas bien se dessiner pour l’auteur de L’Homme qui m’offrait le ciel, la France, son pays, soutenant Abdou Diouf, ancien chef d’Etat sénégalais et actuel Secrétaire général de la Francophonie, poste qu’il occupe depuis huit ans. Calixthe Beyala, pour tout dire clairement, n’a pas plus de chance devant Abdou Diouf que Ségolène Royal devant Sarkozy en 2007 en France ou Gilchrist Olympio devant Gnassingbé Père et Fils confondus depuis 1993 au Togo ! De quoi provoquer une crise de palu à la lionne indomptable mais qui n’est plus loin d’être domptée par un autre lion, celui de la Térenga ! Calixthe Beyala, pour protester contre son futur échec qui se voit maintenant comme le bangala entre les cuisses d’un Nègre, décide de se comporter comme les nuisibles et vils opposants africains, diffamer son adversaire ! Calixthe Beyala, sur Rfi ce 19 Octobre 2010, accuse Abdou Diouf d’être impliqué dans le dossier de la Casamance, même si nulle part les rapports ne montrent le nom de l’ancien chef d’Etat sénégalais ! Pour elle, un homme traînant, fût-ce de manière passive, un dossier aussi épineux sur la conscience ne peut pas être Secrétaire général de la Francophonie pendant douze ans ! Et là, Calixthe Beyala joue mal, très mal. Critiquer Abdou Diouf comme Secrétaire général de la Francophonie sans se baser sur son bilan à la tête de cette institution, mais son passé de chef d’Etat, c’est juste de la nègrerie, du pur désordre comme seuls les Nègres savent le faire. Calixthe Beyala peut, en bonne intellectuelle civilisée, déjà ingurgiter sa future défaite, s’associer avec Abdou Diouf – qui n’a pas démérité – pour remuer, selon ses termes, la Francophonie. Si elle a été capable de changer, comme elle l’a affirmé, les choses en France en faisant intégrer des Noirs – comme Rama Yade – dans la vie politique française, sans avoir été ni ministre ni diplomate, elle peut aussi, sans être Secrétaire générale de la Francophonie, changer cette institution qui selon elle – et elle a raison – manque aujourd’hui de visibilité comparativement au Commonwealth des anglophones. Tout bla-bla pour justifier ses prochaines piètres performances de candidate malheureuse relèverait du superflu. Si, comme elle l’affirme, un monsieur qui est impliqué dans un dossier comme celui de la Casamance ne peut pas être Secrétaire général de la Francophonie, quid d’une écrivaine criée de gauche à droite comme la plus grande plagiaire de tous les temps !


Afro hebdo : revue de presse du 10 au 16 octobre 2010

La crise interne qui secouait le principal parti d’opposition togolaise, l’Union des Forces de Changement, Ufc, mettant aux prises Gilchrist Olympio et son ancien Secrétaire général Jean-Pierre Fabre qui se sont pendant des mois discuté le leadership du parti après leurs congrès séparés a signé son épilogue avec la création par Jean-Pierre Fabre d’un parti politique propre à lui.

L’Alliance nationale pour le Changement, ANC, tel est le nom du nouveau parti d’opposition. Si beaucoup de Togolais, à travers des articles sur la Toile et les commentaires publiés dans les sites ont approuvé cette idée, l’ayant depuis le début de la crise au sein de l’Ufc réclamée, d’autres au contraire se posent des questions sur les innovations que peut apporter ce nouveau parti, et quelle stratégie fiable pourra-t-il mettre en place et que les autres partis politiques de l’opposition togolaise n’ont appliquée. D’autres encore se posent des questions sur le statut que revêtiront désormais Jean-Pierre Fabre et les vingt députés de l’Ufc qui le suivent à l’Assemblée nationale. Finiront-ils leur mandat sous les couleurs de l’Ufc qui n’est plus leur parti, ou seront-ils désormais des députés indépendants, ou encore évolueront-ils sous l’emblème du nouveau parti ?

Une autre facette de ce nouveau parti qui a défrayé la chronique cette semaine au Togo est son nom. ANC, comme l’ANC sud africain, l’African national Congress du très charismatique Nelson Mandela ! Certains Togolais ironisent sur cette ressemblance, alors que d’autres y voient un signe d’espoir.

En attendant que l’ANC du Togo ne suive les pas de celui sud africain et Jean-Pierre Fabre ceux de Nelson Mandela, les Togolais attendent la validation de la création de ce parti, suite au dépôt des textes fondamentaux au ministère de l’Administration Territoriale, conformément à la Constitution togolaise.

Sources: Togocity (www.togocity.com), Icilome (www.icilome.com)

Côte d’Ivoire: Début de la campagne électorale

La campagne électorale pour la présidentielle du 31 octobre en Côte d’Ivoire a débuté le 15 octobre dernier. Des douze candidats en lice pour le fauteuil présidentiel, trois partent favoris : Laurent Gbagbo, le président sortant, Allassane Dramane Ouattara et Henri Konan Bédié. Contrairement aux deux premiers candidats qui ont déjà fait leur première sortie respectivement à Man et à Abidjan, Henri Konan Bédié fera sa première sortie le mardi 19 octobre 2010.

L’enjeu de cette présidentielle est de taille car sa réussite sortira, peut-être, la Côte d’Ivoire, plate-forme incontournable dans la sous-région ouest africaine, de presque une décennie de chaos.

Source : Afrik.com (www.afrik.com)

Guinée Conakry : Foumba Kourouma prend le contrôle de la CENI

La présidente par intérim de la CENI, Hadja Aminata Mame Camara s’incline au profit du rapporteur de la CENI El hadj Foumba Kourouma qui prend la tête de cette institution chargée de s’occuper du second tour de l’élection présidentielle en Guinée Conakry. La cérémonie de passation de service s’est déroulée le jeudi 14 octobre 2010 dans les locaux de la Commission électorale nationale indépendante sise à Camayenne dans la Commune de Dixinn et a été présidée par le commissaire de la CENI, El hadj Amadou Oury Diallo, devant une dizaine de membres de l’institution qui avaient signé une pétition pour exiger la nomination d’une personnalité consensuelle à la tête de l’institution vue la contestation liée à la l’élection de Louncény Camara comme président.

Source : Koaci.com (www.koaci.com )

Burkina Faso : Thomas Sankara encore célébré par la jeunesse africaine

15 Octobre 1987-15 Octobre 2010. Vingt-trois ans maintenant que Thomas Sankara, affectueusement appelé le Che burkinabais a été assassiné. Comme chaque année depuis ce lâche assassinat qui a privé l’Afrique de l’un de ses plus dignes fils, la jeunesse africaine, qui s’est toujours identifié à ce héros, symbole d’intégrité et de dignité, lui a une fois de plus rendu hommage à travers plusieurs pays comme le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Togo, l’Espagne, l’Italie, la France, l’Allemagne, le Canada, la Suisse, le Sénégal…

Les mots de Thomas Sankara, comme une graine semée, continuent de fleurir, de mûrir dans le cœur de cette jeunesse africaine aujourd’hui à la recherche de repères. Thomas Sankara, c’était l’emblème d’une Afrique humble mais fière d’elle, humiliée mais digne, pauvre mais noble… Une Afrique diamétralement opposée à celle que nous font aujourd’hui ingurgiter les vieux caïmans de la mare abrutis par la françafrique comme Blaise Compaoré, Abdoulaye Wade, Paul Biya… et les petits morveux héritiers fils à papa en quête d’un nom comme Faure Gnassingbé, Karim Wade, Ali Bongo.

Source : Afrik.com (www.afrik.com)