Guillaume DJONDO

La CPI : Une justice des vainqueurs ou des vaincus ? (Partie I)

Baptisée sous le qualificatif d’une : « Cour des Etats puissants sur les Etats faibles », la Cour Pénale Internationale, peut se voir un jour désertée par les Etats-parties ; mais cette possibilité, pourrait – on le dire ne tient qu’à un fil. Cependant, et pour l’heure, il faut estimer que jusqu’alors, elle demeure la dernière cour au plan pénal qui puisse mieux gérer la question liée à l’impunité dans le monde. Par conséquent, une rétrospective s’impose, quant à l’avènement et le rôle qui caractérisent cette cour.

Créé dans le but de lutter efficacement contre l’impunité et d’assurer une garantie des droits de l’homme, la CPI est une cour pénale universelle, qui a vu le jour suite à une adoption du Statut de Rome entré en vigueur en 2002. Son existence est donc, une réponse à la prévention d’une éventuelle répression des crimes odieux touchant l’humanité telle que les confirment les deux grandes guerres mondiales survenues sous l’ère du droit inter-étatique. Ceci dit, Ayse CERHELI qualifie cette naissance de la cour de l’odyssée du 21ème siècle. Certes, il faut remonter à l’histoire pour dire qu’elle est née sous les décombres des tribunaux militaires ad’hoc de Nuremberg et de Tokyo.

Ainsi, il faut rappeler de manière minutieuse que l’avènement de ladite Cour a reçu l’acclamation de toute la Communauté Internationale et par ricochet, un soutien fort de la part des Etats africains et quelques Etats d’Amérique-Latine. Au total on compte 34 pays d’origine africaine et 26 pays d’origine latine qui ont signé le dit statut pour son entrée en vigueur. C’est dire donc que la relation CPI-Afrique fut jadis heureuse surtout avec la condamnation du congolais milicien M. Thomas Lubanga  en 2009 par la CPI pour avoir enrôlé des enfants soldats lors des conflits. Ladite condamnation reçut l’approbation de tous les Etats qui ont démontré à travers ce jugement, leur réelle détermination à travailler de concert avec la Cour contre l’impunité. Dans ce sens, on qualifie donc la relation Afrique-CPI « d’une relation d’amour ». Cette dernière est saisie suivant une trilogie classique :

  • par un Etat-partie,
  • par les pouvoirs proprio motu du Procureur,
  • et une résolution du Conseil de Sécurité des Nations-Unies.

I – La CPI : une cour africaine ?

Ce sont les affaires kenyanes (Uhuru Kenyatta pour les violences survenues dans son pays), soudanaises (Omar El-Beschir pour avoir commis des crimes odieux mais n’est toujours pas encore inquiété), ougandaises, congolaises (Jean-Pierre Bemba récemment acquitté), libyennes ( Abdallah Senoussi pour les crimes odieux commis sous le règne de Kadhafi) et ivoiriennes (Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé pour les violences post-électorales de 2010-2011 ) qui ont déclenché aujourd’hui, la révolte de la plupart des Etats de la sous-région ouest africaine avec ladite cour.

En d’autres mots, il s’est manifesté « des relations de désamour » entre les dirigeants africains et le bureau du procureur de la CPI. Pour preuve on note cette déclaration faite par M. Jean-PING en 2009 qui écrivit : « la CPI est une cour crée uniquement que pour juger les Africains ». On s’interroge donc de savoir : la CPI dispose t- elle toujours d’un avenir propice, vu le désengagement actuel des Etats africains, qui lui font face en manifestant le désir d’un retrait général du statut de la CPI ?

II – La CPI : une mise en cause des actions pénales

De cette contestation générale de la CPI par les Etats africains, il en découle qu’une interrogation reste en suspens, encore : par exemple, sur quelle base la cour se sert – elle dans la compilation des éléments lui permettant d’enclencher une quelconque procédure pénale contre une éventuelle personne qui serait entrée dans le collimateur de la CPI ?

En l’occurrence, il faut préciser que ce sont les récents mandats d’arrêt émis par le CSNU à travers la Résolution 1790 contre la Lybie, celle de 1593 contre le soudanais Omar El-Beschir, la poursuite pénale engagée contre le Président kenyan Kenyatta qui conditionnent ainsi donc, la méfiance actuelle et un désaveu présent de la cour par les dits Etats. On a actuellement 29 affaires criminelles africaines pendantes devant le bureau du Procureur de la CPI.

L’autre question que l’on se pose : pourquoi le Bureau du Procureur de la CPI tarde à ouvrir le dossier syrien où sont perpétrés des crimes graves et d’autres affaires criminelles non-africaines qui sont restés jusqu’alors non résolus ? Avec toutes ces interrogations, le débat reste ouvert.

III – Afrique-CPI : Hypothèses de solutions envisageables :

L’hypothèse selon laquelle : « quand la politique entre dans le prétoire, le droit sort par la fenêtre » doit être réexaminée. Des hypothèses de solutions doivent être envisagées, en vue de décanter la relation « sous-tension » entre les dirigeants Africains et la CPI. Il s’agit notamment, pour :

  • la CPI d’inciter les Etats qui lui sont réticents à lui faire confiance même si la volonté étatique est le crédo à la prépondérance d’un Etat,
  • la CPI doit œuvrer pour une meilleure crédibilité de ses actions pénales en dotant de moyens efficaces et fiables ses équipes qui sont sur le terrain de l’enquête pénale,
  • la CPI doit pouvoir rationaliser ses saisines hors du continent africain : pourquoi ne pas réfléchir sur une possible mise en jeu de la responsabilité du Président SARKOZY, pour les crimes commis dans l’affaire libyenne, dont il serait visé pour inculpation ?
  • réformer l’article 27 du Statut de Rome dans le sens, où il faut prendre en compte la qualité officielle du Chef d’Etat ; c’est-à-dire qu’il appartient à la Cour de veiller à ce que les Présidents visés dans une certaine commission des crimes sus-titrés à l’article 5 du Statut de Rome soient admis à la retraite avant l’engagement d’une quelconque poursuite contre eux.

Mais, une polémique demeure autour de cette demande de réforme, puisque selon la conception africaine, le Chef de l’Etat est une forteresse inexpugnable et donc ne peut être ni l’objet de poursuite pénale ou judiciaire, ni de comparution devant une quelconque juridiction, nationale ou internationale. Pour ces motifs donc, la CPI se voit en droit d’y exécuter une obligation de juger ; Voir art.6 du Tribunal de Nuremberg.  Ainsi donc, il faut pouvoir faire le distinguo entre un Royaume et une République dans les systèmes politiques africains, afin d’éviter des dérives politiques.

La levée de l’immunité présidentielle ne doit se faire que quand les crimes imputés à un Président revêtent un caractère d’une gravité intense et sur intervention de preuves réelles et irréfragables pouvant toucher sa responsabilité. A contrario, le procès Kenyatta à la Haye était en soi controversé, d’une part, parce qu’il y avait une disposition faible de preuves suffisantes et concrètes pour inculper ce dernier du côté de la Cour, et d’autre part, du fait que la Cour a refusé de reporter les poursuites pénales engagées contre ce dernier, ainsi, appliquant à contrario l’art.16 du SR dénoncé par l’UA.

A très vite pour la suite !


Tentative de drague en amphithéâtre

Université de Lomé, en 2008… Les cours reprennent dans l’amphi 600, quelques jours après l’affichage des notes d’examen. Un excellent moment où toute la bande des lève-tôt, démarcheurs de place en amphithéâtre certifiés et agents commerciaux qui ont découvert le capitalisme très jeunes, ceux qui nous obligeaient à nous asseoir dans les escaliers ou suivre les cours depuis la fenêtre, a pris congé. Oui, on pouvait enfin venir tard et trouver une place. Les propriétaires de tous les sièges ont vidé les lieux. Un miracle !

L’amphithéâtre qui était plein à déborder trois mois plus tôt ne l’était plus. Les mauvaises notes attribuées lors du dernier examen aux étudiants juristes ont donné des raisons à plusieurs camarades pour passer quelques jours à la maison et décider de leur réorientation. Moment terrible !

Comment ne pas finir l’année universitaire sur un goût amer ? Fallait-il aller s’inscrire en géographie ? En allemand ? En sociologie ? Ou en anglais ? C’était bien l’inquiétude des étudiants de carrière, ceux qui changent de faculté et d’école chaque année. Il y avait à côté d’eux des étudiants vacanciers, des étudiants chevronnés et des étudiants de service. Comment disait notre professeur de droit commercial, M. Adjita, déjà, pour les catégoriser ? Les amis, passez-moi les mots.

Toute la pression du début d’année étant tombée, c’était le moment choisi par un camarade pour tenter sa chance. Il se décida à envoyer à cette fille qu’il a en admiration depuis quelques mois une lettre dont on peut se féliciter de la rédaction en deux parties. Le cours d’introduction à l’étude du droit et celui de méthodologie devaient bien servir à quelque chose. Et oui !

On pouvait donc lire un plan comme suit :

I- Un homme aux qualités recherchées

A- Mes qualités en la forme

B- Mes qualités au fond

Il- Un homme aux défauts gérables

A- Distinction entre défauts gérables et non-gérables

B- La nécessaire acceptation de ma demande au regard de la gérabilité de mes défauts

C’était sa plus simple façon de se défendre. Le génie et l’influence du professeur Komla Dodzi Kokoroko pendant ses cours de droit administratif ne pouvaient que l’orienter dans ce sens. Il ne ratait ses cours pour rien.

Mais c’était sans compter l’étoffe et le relief de son adversaire. Je veux dire de sa promise, celle pour qui son cœur battait. La fille, juriste aussi , ne s’est pas privée de lui répondre comme une vraie étudiante des cours du professeur Kpodar. Ah ! La belle répartie.

I- Une fille aux défauts insupportables

A- Une insupportabilité affirmée

B- Une insupportabilité justifiée

II- Une décision négative insusceptible de recours

A- Une décision finale défavorable.

B- Une décision finale irrévocable.

Pourquoi je vous raconte tout ça ? Est-ce que je sais ? 😂

Dix ans après avoir perdu ses traces, je viens de rencontrer cet ancien camarade qui s’est retrouvé en aventure à São Paulo. Le droit ne lui a pas réussi, mais le marketing international, oui. Et le hasard faisant bien les choses, il a retrouvé cette camarade dans une banque. Ils se sont rappelés ces vieux moments, ont appris à mieux se connaître et ont fini par se marier. La faculté a quand même servi à quelque chose, non ?

 


L’étudiant, la stagiaire et le faux directeur (Acte 1)

Les amours de jeunesse ont souvent cet arrière-goût amer qui vous fait croire que vous n’êtes pas digne de vivre l’amour tel que relaté dans les éditions Arlequins où tout se termine souvent bien pour les amoureux. Tout porte à croire que, lorsqu’on est étudiant, l’amour véritable n’est que douloureux. Le poids de la déception est tel que vous perdez confiance en l’autre. Submergé par la peine, perdu dans un monde en ruine, dévasté quelques fois entre deux examens… Il est bien difficile d’envisager l’avenir quand on a un chagrin d’amour à l’université. Et pourtant… Les allers-retours ne manquent pas à la cité. La douleur vous rend tellement indécis que vous ne savez pas s’il faut haïr ou pardonner pour avancer.

Bien le bonjour chers lecteurs ! Heureux de vous retrouver après tant de mois de séparation. Excusez ma paresse ces derniers temps… croyez-moi rien n’est plus facile quand on quitte le chômage pour un contrat de professionnalisation. Vous vous demandez sûrement qui est cette personne qui a trahi Guillaume au point de le transformer en philosophe. Rassurez-vous, je ne relate ici que la mésaventure amoureuse de mon plus vieil ami qui a aimé avec toutes ses tripes et qui a failli en mourir n’eut été le soutien de ses proches. Passé les larmes et la douleur, cette épreuve, dans laquelle il croyait mourir, l’a aidé aussi à grandir. Elle l’a éclairé sur sa capacité de résistance face à la séparation comme sur son aptitude à trouver, peu à peu, son autonomie affective.

Récit :
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Deuxième année de droit, assis dans les escaliers de l’amphi 500, parce que je n’ai pas pu venir à 5h pour me trouver une meilleure place. J’écoutais  malgré moi le professeur AMOUDOKPO m’expliquer le droit du travail, tout en maugréant parce que j’avais du mal à prendre des notes. C’est dans cet inconfort que je vis venir vers moi Léandre, ce vieil ami tout souriant comme si nos fameuses tranches d’aides universitaires étaient sorties.

– Salut Guillaume, Comment vas-tu ?

– Salut Léandre, ce n’est pas la forme, j’en ai marre d’user mes fesses sur les marches glaciales de cet escalier sombre. Toutefois, j’irais mieux si tu partageais avec moi cette bonne nouvelle qui te rend si joyeux.

– Orrrh ! Vous les littéraires, vous me fatiguez avec vos longues phrases pour dire des choses simples. Désolé pour toi tchalé, mais moi je pourrais dormir dans cet escalier sombre, ça m’est égal du moment que j’y suis avec Patricia.

– Haha ! C’est donc ça, il faudrait déjà que tu lui fasses part de tes sentiments, lui ai-je répondu tout en riant.

(Léandre était amoureux depuis la première année de Patricia, une nymphe aux rondeurs africaines qui pouvaient faire renier le…à mon cher ami. Sacrilège ! Elle savait également mettre en valeur son teint noir ébène ce qui nous changeait des peaux dépigmentées de ses copines. Ses copines que nous appelons affectueusement les taxis VIP, puisqu’elles consomment en carburant (entendez ici par carburant « énergie » ou « argent ») Mais mon cher ami était si timide que toutes mes tentatives pour le pousser à dévoiler ses sentiments furent vaines.)

–          Je vais te surprendre. Il y a deux semaines, j’ai invité Patricia à diner et j’en ai profité pour lui faire part de mes sentiments. Elle vient de me dire qu’elle acceptait de sortir avec moi pour que nous apprenions à mieux nous connaitre.

–          Bingo ! Félicitations, gars ! Tu as enfin décidé de te comporter en jeune lion.

La joie de Léandre était si contagieuse que j’oubliais l’inconfort de ma place dans les escaliers. A la fin du cours, je proposais de lui offrir un bon jus de bissap au restaurant universitaire. Patate ! Le restaurant universitaire n’était pas ouvert ce jour-là. Nous étions en pleine grève. Six mois déjà que dure le bras de fer entre les étudiants et le corps professoral, avec à la tête des résistants ADOU Séibou et de l’autre côté le professeur AHADJI. Mon argent de poche n’aurait pas suffi à couvrir un déjeuner à deux à l’espace universitaire. C’est donc au marché noir, gayibor, que j’ai traîné Léandre pour un déjeuner succulent mais à petit prix.

Pendant que nous étions en train de manger, le vieux téléphone Nokia E71 de Léandre sonna. C’était Patricia au bout du fil.

A suivre…


Entre Israel et le Togo, c’est le je t’aime moi non plus

Parmi les pays africains, qui dans leur grande majorité votaient à l’assemblée générale des Nations Unies pour une résolution condamnant la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël par les Etats-Unis, le Togo créait la surprise.

Le Togo était le seul pays africain à se ranger du côté d’Israël en votant contre la résolution onusienne condamnant la décision de Donald Trump. Ce pays d’Afrique de l’Ouest rejoignant ainsi le cercle fermé des opposants à la résolution composé par le Guatemala, le Honduras, la Micronésie, les îles Marshall, le Nauru et le Palau (en plus des Etats-Unis et d’Israël). Un tel choix du Togo semblait désavouer la position de l’Union Africaine, mais à y regarder de près, il était bien prévisible.

Comme dans d’autres parties du monde, la reconnaissance par Donald Trump de Jérusalem comme capitale israélienne a enflammé les esprits dans certains pays africains. Des manifestations spontanées ont eu lieu pour dénoncer cette décision considérée comme une provocation. L’Union Africaine s’est voulu ferme sur la question en condamnant la décision du président américain. Une condamnation réitérée par Moussa Faki, le président de la commission de l’Union Africaine, qui a tenu à exprimer “la solidarité de l’Union africaine avec le peuple palestinien et son soutien à leur quête légitime d’un État indépendant et souverain avec Jérusalem-Est pour capitale”.

En se démarquant de cette position, le Togo ne fait que confirmer son rapprochement de l’Etat israélien. Il démontre une fois encore qu’il n’a jamais caché son intention d’entretenir de solides relations avec Israël. Entre ce pays d’Afrique de l’Ouest et Israël, les relations sont plus que stables, et ce, depuis l‘ère du président Gnassingbé Eyadema. Le Togo avait d’ailleurs entrepris d’accueillir un sommet Israël – Afrique du 24 au 26 octobre 2017, au détriment de certains pays islamiques africains. Ce sommet critiqué par une partie de l’opinion avait finalement été reporté sine die par le gouvernement confronté à une crise politique interne. Jamais dans l’histoire de ses relations avec l’Afrique, Israël n’a autant compté sur l’amitié d’un pays africain.

Au Togo, l’opinion publique reste divisée sur cette ouverture de plus en plus importante du gouvernement, dès lors que cette orientation diplomatique n’est pas sans incidence sur sa position concernant le conflit israélo-palestinien.

Tout compte fait, à l’heure où des puissances émergentes telles que la Chine, l’Inde, le Brésil développent leurs relations avec l’Afrique, il n’est pas peu probable que le Togo joue un rôle dans le rayonnement des liens entre Israël et l’Afrique.


Fiançailles en pays Moba

Samedi dernier, on s’est réveillé le sourire aux lèvres. Après une longue semaine de travail, on était pour une fois d’accord que la cause méritait qu’on ne se repose pas mais qu’on sorte vite de notre lit.
 
J’ai vu mon pote publier : « une fille va quitter momentanément ses parents. Momentanément ? Non. Définitivement. » 😊
 
C’est comme ça on a tous ri. 8h30 on se retrouve à la maison familiale de la future fiancée. La grande tante avec une canne, les lunettes posées délicatement sur le nez nous dit : « eeeeh les jeunes, vous êtes à l’heure, c’est bien. » On rit… 😂
 
On prend place. La grande tante sans plus attendre nous dit qu’on va apporter 3 calebasses. On choisira celle qui est la nôtre.
 
La cérémonie commence. Une prière, puis on sort une fille voilée. La famille de mon pote dit que ce n’est pas elle. On sort une seconde fille. La grande sœur de mon pote dit qu’elle lui ressemble étrangement mais ce n’est pas elle. On s’impatiente. Une troisième fille sort. La famille hésite. Elle titube… Finalement conclue que ce n’est point elle.
 
La grande tante nous dit : la calebasse que nous cherchons se trouve dans les trois qu’on nous a proposé. Si nous voulons qu’on nous propose une autre, la dernière, qu’on paye le transport.
 
La famille de mon pote donne 10.000F. La grande tante dit qu’elle doit appeler avant qu’on ne fasse monter la calebasse dans le véhicule. La famille paye encore 10.000F. Quelques minutes après, on fait sortir une quatrième fille voilée. La grande sœur de mon pote va vers elle.
 
Elle touche ses hanches, ensuite ses fesses et enfin sa poitrine. Elle se tourne vers la famille. C’est elle… C’est notre calebasse. Un cri d’allégresse retenti dans la maison.
 
La grande tante dit très bien. On va pouvoir parler sérieusement. Elle fait enlever le voile sur la future fiancée. Elle demande à la future fiancée : « Tu connais ces personnes ? »
 
Elle répond oui. C’est la famille de mon ami.
 
Le grand oncle rétorque : ton ami comment ?
 
Elle répond, mon petit ami. Celui avec qui j’ai traîné ces dernières années.
 
Le grand oncle dit okay. C’est celui qui te gère. On rit… 😂
 
La grande tante dit que nous avons la parole maintenant. Elle voulait s’assurer de ce qu’on était pas des inconnus, des étrangers. Ensuite la famille de mon pote prend la parole. Elle fait les présentations des membres de la délégation. Elle rappelle le village d’origine du futur fiancé. Et demande une minute de concertation. On sort chercher les éléments cités pour la dot. On revient avec trois colis différents.
 
La grande tante commence le décryptage. Elle demande les enveloppes sur chaque colis. Elle réclame la cola et le tabac. La famille dit qu’il n’y avait pas ça dans la liste. La grande tante se fâche. Elle dit :  » vous voulez épouser une femme sans remercier ses ancêtres ? Ne m’enervez surtout pas. »
 
Le grand oncle de la fiancée rapplique :  » On n’attrape pas un hippopotame avec un hameçon. Vous savez ça ? »
 
La famille de mon pote panique. Le grand oncle nous propose de la cigarette pour remplacer le tabac. La famille paye encore 10.000F pour la cola. La grande tante de la future fiancée vérifie les boissons une à une. Elle s’assure de leur date de péremption et de leur qualité.
 
Elle réclame les enveloppes qui accompagnent chaque colis. L’enveloppe qui accompagne les boissons emballées c’était pour les tantes. Elle l’ouvre, s’insurge et demande si nous savons à quoi c’était destiné. Elle nous apprend que c’est pour les tantes et la maman de la fille.
 
Le contenu de cette enveloppe sera divisé en deux, une part pour les tantes et l’autre pour la maman en compensation dans piments et tomates achetées pour nourrir la fille.
 
La famille de mon pote s’affole. Elle fait faire une collecte rapide et ajoute une seconde enveloppe. La grande tante semble satisfaite. Elle ouvre l’autre enveloppe, la seconde qui accompagne la valise de pagne. Elle s’indigne encore et nous regarde.
 
Elle nous dit : « si je me fâche, agban agbodji hein ? Je n’aime pas ça. »
 
La famille de mon pote demande pardon. Elle nous explique que le contenu de l’enveloppe avec la valise de pagne, repart avec nous. Cette enveloppe permettra à la femme de faire du commerce, ouvrir une boutique par exemple. Donc, de nous discipliner.
 
La famille de mon pote s’affole encore. Elle fait faire une collecte rapide et ajoute une seconde enveloppe.
 
La grande sœur de mon pote se fâche, elle dit à la grande tante qu’elle exagère.
 
La grande tante enlève ses lunettes, les dépose délicatement sur la table, se tourne vers la grande sœur de la fiancée, prend sa respiration et lui répond : « Celui qui veut attraper le crabe, doit se salir dans le sable. »
 
Elle se dirige vers la valise, scrute au peigne fin les pagnes, s’assure de la qualité et de la date de péremption des boissons dans le troisième colis. Elle vérifie la bague de fiançailles, et s’assure qu’il y a le nom de leur fille dessus. Elle nous dit qu’on peut s’entendre maintenant.
 
C’est comme ça que la bague s’est retrouvée aux doigts d’une fille Samedi. C’est comme ça qu’une fille est devenue la fiancée de quelqu’un.
 
La grande sœur de la fiancée nous explique devant le plat et la bière qu’on se plaisait à manger que même si nous étions en règle, la grande tante aurait trouvé le moyen de nous faire dépenser et tester notre patience.
 
L’objectif, c’est de s’assurer que leur fille ne manquera de rien. L’objectif, c’est de se convaincre que leur fille a de la valeur à nos yeux. L’objectif, c’est de tester la solidarité et la complémentarité de la famille de mon pote, savoir s’ils peuvent voler au secours du jeune couple dans les moments difficiles.
 
Derrière toute cette scène, l’objectif, c’était de nous faire comprendre que leur fille vaut beaucoup même si la famille n’a pas exigé de l’argent. C’est la raison pour laquelle la dot était composée uniquement que de présents sur la liste.
 
Nous nous sommes tous séparés samedi, avec le diction sur les lèvres : « Celui qui veut attraper le crabe, doit se salir dans le sable  » parce que dans amusement, la grande tante de la fiancée nous a marqué.
 
A très vite !


La constitution, l’incivisme et les Togolais

Bonjour chers tous,

Les derniers rebondissements de l’actualité socio-politique au Togo font état de ce qu’une tension profonde se manifeste à chaque coin du pays. Une tension allant jusqu’à perturber le fonctionnement des institutions régaliennes. Une tension obligeant le gouvernement à couper Internet au nom de la sécurité nationale dans tout le pays cinq jours successifs, une première fois du 5 au 10 septembre puis une seconde fois du 18 au 20 septembre. Cette mesure drastique a perturbé et affecte malheureusement toutes les activités liées au net et tous les métiers qui en découlent. J’en ai parlé ici

La question au centre de la tension est liée aux réformes politiques institutionnelles et constitutionnelles. C’est donc la limitation de mandat présidentiel et l’exigence d’une élection présidentielle au scrutin uninominal majoritaire à deux tours qui sont la pomme de discorde.

De l’élection du Président et de son mandat.

Nos parents ont pris soin de nous le raconter, et chacun d’entre nous aurait appris depuis le 31 décembre 2002 ou du moins à partir de 2005 qu’il y a des problèmes institutionnels et surtout constitutionnels au Togo, problèmes auxquels on demande au pouvoir de trouver des solutions. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Trois problèmes fondamentaux se posent depuis la modification unilatérale de la Constitution de 2002. Deux sont liés à la présidence de la République et le troisième au rôle de Premier Ministre.

Allons pas à pas… Le premier problème de la Constitution togolaise se trouve dans le mandat présidentiel. Tout le monde le sait aujourd’hui avec les marches de l’opposition ou du parti UNIR. Alors qu’au sortir de la Conférence Nationale les vainqueurs avaient opté pour un mandat de cinq (5) ans renouvelable une seule fois, aujourd’hui, et depuis 2002 les vaincus de l’époque ont modifié la Constitution togolaise ce qui prévoit un mandat présidentiel renouvelable de façon illimitée. En effet, alors que la Constitution votée par le peuple togolais en 1992 prévoit en son article 59 que « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois » et ajoute en plus qu’« en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats », la modification apportée à ce texte en décembre 2002 fait dire à la loi fondamentale togolaise simplement que le Président de la République « est rééligible ».

Cette nouvelle version dit ceci : « Le président de la République est élu au
suffrage universel direct et secret pour un mandat de cinq (05) ans. Il est rééligible. Le Président de la République reste en fonction jusqu’à la prise de fonction effective de son successeur élu.» C’est cette nouvelle disposition qui est source de tension entre le gouvernement et l’opposition depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuel Président SEM. Faure GNASSINGBE. Ni l’Accord Politique Global de 2006, ni les rencontres TogoTelecom I, TogoTelecom II, l’introduction d’un premier puis d’un second projet de loi par le gouvernement, ni l’introduction d’une proposition de loi par l’opposition n’ont pu résoudre la crise. C’est ce qui explique que l’on scande aujourd’hui dans les artères de Lomé et dans quelques villes à l’intérieur du pays le retour pur et simple de la Constitution de 1992.

La limitation du nombre de mandats présidentiels n’existe donc plus depuis 2002 dans la Constitution togolaise. Hier, c’est la France que l’on donnait en exemple pour soutenir qu’il n’est pas nécessaire de limiter le nombre de mandat présidentiel. Aujourd’hui et cela depuis 2008 avec l’arrivée du Président Sarkozy, la France a clairement inscrit la limitation à deux des mandats présidentiels dans sa Constitution. Cette limitation est contenue dans l’article 6 de cette Constitution qui dispose : «Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. Les modalités d’application du présent article sont fixées par une loi
organique ».

Cette fois-ci, les chefs d’Etat africains qui ne copient auprès de la France que des mauvais exemples ne disent pas qu’ils vont emboîter le pas à l’ancienne puissance colonisatrice. Seul le Bénin a copié cette disposition française. Les autres se retrouvent même à citer le modèle parlementaire allemand ou britannique comme exemple.

La polémique aujourd’hui tourne autour de la rétroactivité ou non dès l’entrée en vigueur de la nouvelle constitution. Ceci semble dire que les deux parties sont du moins d’accord sur la limitation de mandat et sur le nombre de scrutin. D’un côté comme de l’autre, le ton se durcit parce que le consensus n’est pas privilégié. La confusion est semée par des intellectuels qui jouent sur des mots comme immédiateté, caractère patrimonial, caractère extra-patrimonial, rétroactivité…

Le second problème se trouve dans le mode de scrutin permettant d’élire le Président de la République. La Constitution de 1992 avait mis en
place un système permettant d’élire le Président de la République dans un scrutin à deux tours où les deux vainqueurs du premier tour se retrouvent au second tour. Depuis le 31 Décembre 2002, cette disposition a été modifiée et l’article 60 qui est le siège de cette nouvelle règle dit désormais
ceci : « L’élection du Président de la république a lieu au scrutin
uninominal majoritaire à un (1) tour. Le Président de la République est élu à la majorité des suffrages exprimés. »

Cette modification a fait asseoir la règle du « un coup K.O ». Selon cette règle, le Président est élu à la majorité des suffrages exprimés, cela ne veut pas dire que le Président devra avoir obligatoirement 50% des voix de l’électorat national. Cela signifie simplement que celui des candidats qui sera majoritaire au premier tour sera élu. La conséquence est claire. Si nous avons 10 candidats pour les élections présidentielles, il suffit que le premier d’entre eux ait par exemple 10 ou 15% des voix pour qu’il devienne le Président de la République, pourvoi que ce soit le plus grand pourcentage. La « démocratie est la dictature de la majorité » comme le dirait l’autre. C’est pour cette raison que la majorité qu’il faut pour élire le Chef de l’Etat doit être la majorité absolue de l’ensemble des votants et c’est également pour cela que l’on essaie d’aller à la confrontation finale entre deux candidats.

Le troisième problème de la Constitution togolaise, c’est celui qui concerne le Premier Ministre et la majorité parlementaire. On en parle presque pas alors que c’est important dans l’équilibre du pouvoir. La Constitution togolaise, telle que votée en 1992, est en réalité une copie conforme de la Constitution française d’avant les modifications de 2008 et qu’on appelle la Constitution de la Cinquième République inaugurée en
1958 avec le Général De GAULLE. Cette Constitution consacre un régime semi présidentiel où les pouvoirs sont partagés entre le Président de la
République et le Chef du Gouvernement, le premier restant Chef de l’Etat et imprimant les orientations générales à la politique internationale du pays tandis que le Premier Ministre reste celui qui s’occupe de la gestion du quotidien.

Normalement, dans un tel système, le Chef de Gouvernement n’est pas un valet, un majordome ou un godillot du Président de la République, ni même un simple collaborateur, surtout lorsque les deux ne viennent pas du même bord politique. En effet, dans la mesure où le Premier Ministre doit normalement être issu de la majorité parlementaire, lorsque le Président et le Premier Ministre viennent de la même majorité, c’est la politique du parti du Chef de l’Etat qui s’applique. Dans ce cas, son Premier Ministre qui est issu de son propre parti ou de sa majorité est simplement comme son exécutant. C’est le cas par exemple aujourd’hui avec le Premier Ministre Sélom Komi KLASSOU. Mais lorsque les deux têtes de l’exécutif sont issus de bords différents ou que la majorité parlementaire n’est pas associée au Président de la République, alors le Premier Ministre est une véritable autorité et même un pouvoir face au Chef de l’Etat. C’est ce que les constitutionnalistes appellent la cohabitation. Le Premier Ministre met librement en application sa politique dans laquelle le Président de la République n’a rien à faire. Cette répartition des pouvoirs est souvent considérée comme une défiance de l’autorité du Président ce qui a conduit à la modifier en Décembre 2002.

En effet, conformément aux dispositions de l’actuelle Constitution togolaise, la relation entre le Premier ministre et le Président de la République, si elle ne place pas totalement le premier dans une situation de personne travaillant pour le compte du Chef de l’Etat ou qui lui
est complètement soumis, maintient celui-ci dans une situation de soumission assez avancée pour que le rapport entre les deux têtes de l’exécutif donne l’impression d’un premier ministre presque totalement aux ordres. Ainsi, le Premier Ministre agit avec son gouvernement sous « l’autorité » d’un Chef de l’Etat dont dépend sa nomination et sa pérennisation ou non au poste chef de gouvernement.

Dans ces circonstances, le chef de l’Etat peut revendiquer le succès des actions menées par le premier ministre et donner l’impression qu’il en est l’initiateur mais en même temps dégager toute responsabilité et jeter le chef de gouvernement en pâture dès que celui-ci commet une erreur ou est contesté. Il faut donc penser à clarifier la situation en modifiant la Constitution pour qu’il y ait une répartition claire des rôles pour refléter le système constitutionnel choisi si l’on veut rester dans le même régime semi-présidentiel. A défaut, il faudra penser à transformer la Constitution et aller à un véritable régime parlementaire avec des pouvoirs conséquent au Premier Ministre. Ce qui assurerait un équilibre et enlèverait le rôle de l’homme tout-puissant au Président.

Du manque d’éducation politique source d’incivisme.

Une population bien éduquée est beaucoup plus demanderesse sur
le plan de l’emploi mais aussi sur le plan social et culturel. Et plus les gens
sont éduqués, plus ils sont exigeants et souhaitent avoir du boulot. Et plus
ils sont également regardants sur leurs droits qu’ils revendiquent parce
qu’ils les connaissent. Ce que les dirigeants, ne font pas en priorité dans leur défis de développement de leur pays, n’aiment guère, surtout en ce qui concerne la revendication des droits.

Malgré les discours grandiloquents du style « aucun sacrifice n’est trop
grand lorsqu’il s’agit de la jeunesse », discours creux par excellence chez les élus du peuple, l’enseignement au Togo n’a connu ses heures de gloire qu’avec la gratuité de l’école primaire, très récemment la gestion responsable de l’Université de Lomé à travers les rénovations qui y sont faites et le programme school assur.

Lors des revendications démocratiques au début des années 90, les acteurs ont cru devoir redonner à l’éducation sa place de choix dans la cité. C’est pour cette raison que ces acteurs ont voulu traduire dans la Constitution du pays, les principes contenus dans les traités internationaux signés par le Togo. En ce sens, l’article 35 de la Constitution de 1992 dispose : « L’Etat reconnaît le droit à l’éducation des enfants et crée les conditions favorables à cette fin. L’école est obligatoire pour les enfants des deux sexes jusqu’à l’âge de 15 ans. L’Etat assure progressivement la gratuité de l’enseignement public ».

À chaque manifestation de l’opposition l’on se retrouve à faire des bilans de destruction de biens publics ou de mort. La destruction des édifices publics est la forme de riposte que trouvent les manifestants face aux lancement de gaz lacrymogènes des forces de l’ordre. Ceci n’est pas justifiable en ce sens que l’édifice a pour objet la satisfaction de l’intérêt général aussi bien l’intérêt de celui qui manifeste que de celui qui ne manifeste pas. Une inculture est donc à l’origine de ces maux. Cette inculture est ce qu’on peut qualifier d’incivisme en ce sens qu’elle se déduit du caractère violent des citoyens.

Cette inculture porte les germes de la haine qui à tort ou à raison n’a de conséquence que négative sur tissu social et sa sauvegarde. L’usage exagéré de la forme d’un camp, l’incivisme de l’autre. Les menaces contre la sécurité des biens et des personnes, les promesses d’une répression à haute dose. Le scénario devient répétitif et l’on en paie le lourd tribu.

S’il y a bien une notion qu’il importe de faire évoluer dans la psychologie des deux camps, c’est l’amour de la patrie et du concitoyen. C’est la défense de l’intérêt de tous. C’est l’écoute des meurtrissures des populations. C’est la prise réelle de décision pour mettre fin à l’arbitraire et à la discrimination. C’est la fin du népotisme et de la gabegie qu’il importe de sonner.

Il n’est pas un seul Togolais qui soit prédestiné à de meilleurs traitements qu’un autre. La patrie, la nation, les mêmes chances de s’épanouir, c’est le souhait de chaque fille et fils du Togo.

Bien à vous !


L’éducation, Internet et les Togolais

Une majorité de Togolais se trouvent aujourd’hui pris  en étau entre les tentatives de préservation du tissu social par le gouvernement et les revendications légitimes de l’opposition. D’un côté comme de l’autre, chacun se rejette constamment la faute. De toute façon, nous n’avons pas Internet pour nous chamailler.

De l’importance d’une éducation de qualité

L’Unesco organise depuis le début de cette semaine, à Lomé, un colloque international sur les perspectives éducatives à l’horizon 2030. L’éducation est un droit auquel doivent pouvoir accéder tous les citoyens. C’est ce qui est prévu par les normes internationales. Cependant, il reste difficile d’accéder à un enseignement de qualité dans les pays en voie de développement à cause des frais de scolarité.

L’article 26 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) dispose que:

« Toute personne a droit à l’éducation. L’éducation doit être gratuite, au moins en ce qui concerne l’enseignement élémentaire et fondamental. L’enseignement élémentaire est obligatoire. L’enseignement technique et professionnel doit être généralisé ; l’accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite.

L’éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle doit favoriser la compréhension, la tolérance et l’amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux ou religieux, ainsi que le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix. Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants ».

La différence entre intelligence et éducation

Éduquer une personne, c’est lui transmettre un ensemble d’éléments, de facultés, de savoirs qui lui permettent de réagir face à différentes situations, dans diverses circonstances et à diverses informations. Elle s’approche de la connaissance générale sans s’y identifier et ne se confond pas non plus avec l’intelligence. Plus une personne est intelligente et plus son éducation se fait facilement et plus une personne est éduquée, plus son intelligence s’exprime avec aisance et dans divers domaines.

Par exemple, c’est la combinaison de l’intelligence et de l’éducation qui va permettre à une personne qui reçoit une information, quelle qu’elle soit, de ne pas l’ingurgiter de façon totalement passive, mais de l’analyser et de voir en quel sens elle est vraie ou fausse et dans quelle proportion on peut la prendre ou la laisser, l’accepter ou la rejeter. Sur ce plan, l’éducation et l’intelligence fonctionnent avec le vécu. Et plus l’éducation est mauvaise, orientée ou partielle, moins la capacité d’analyses est développée et plus l’individu est exposé à la manipulation. C’est pour cette raison que nous devons faire attention à ce que nous imposent les médias internationaux comme information.

Notre épanouissement personnel sur tous les plans exige que l’éducation ne se limite pas à l’instruction scolaire ou livresque dans un domaine donné. Elle doit aborder le plus largement possible les différents aspects de la vie. Musique, Religion, Art, Médecine, Droit, Économie…. Une partie de l’éducation se reçoit à la maison, une partie à l’école et une autre au sein de la société. La partie de l’éducation qui se reçoit à la maison et celle reçue en société et qui se fait le plus souvent par le biais des relations est l’un des volets les plus importants mais aussi les plus dangereux.

L’éducation peut niveler la société par le bas. Au contraire, l’éducation de qualité permet de se déterminer soi-même sans être tout le temps manipulé ou sans que l’on vous dicte ce que vous devez penser et ce que vous devez faire. C’est pour ainsi dire elle qui permet de bâtir des nations fortes et prospères.

De l’inutilité de l’information contrôlée

Dans les pays où l’information est contrôlée, les réactions des citoyens face aux informations s’en ressentent. Les gens ont tendance à ingurgiter tout ce qu’on leur dit sans grande réflexion. Dans certains de ces pays, la réaction du peuple face à la rétention de l’information, au matraquage médiatique et au lavage de cerveau par les médias est de développer un autre système d’information et de communication qui est la rumeur.

Le danger au niveau de l’éducation populaire dans ce cas, c’est justement de tomber dans l’excès contraire. Rejetant l’information officielle dont on croit qu’elle est nécessairement manipulée, les citoyens s’en remettent de façon tout aussi passive et même quelquefois idiote à la rumeur. Tout ce qui est information officielle ou passe par des canaux officiels est considérée comme fausse et toute rumeur dont on ne sait pas la plupart du temps d’où elle vient et comment elle est faite est immédiatement prise pour une vérité biblique.

Chacun reprend la rumeur à son compte et le véhicule en affirmant même avoir des éléments de preuve qui la justifient. La plupart du temps, ces éléments de preuve seront fabriqués par la personne qui veut communiquer la rumeur elle-même. Chacun ajoute à la rumeur d’origine sa propre part de rumeurs pour rendre cette information beaucoup plus crédibles et plus intéressantes, selon lui. Chacun des transmetteurs devient lui-même ainsi fabricateur de rumeurs.

L’information biaisée ne circule pas de la même manière lorsque la liberté de la presse et d’expression existent

La situation est complètement différente dans les pays où la liberté de presse et d’expression existent et où l’information officielle ou transmise par les canaux officiels ou traditionnels est généralement fidèle à la réalité ou s’en rapproche toujours. L’éducation des personnes est telle que la rumeur dure parce qu’on l’analyse toujours avec beaucoup plus de hauteur. La manipulation y a des difficultés à prospérer parce que les citoyens sont outillés pour disséquer l’information.

Ils arrivent tôt ou tard à découvrir ses aspects exacts et inexacts, de manipulation ou non. Voilà ce qui explique la coupure générale et répétée d’Internet sur la terre de nos aïeux. La privation est volontaire parce qu’une forte propension à intoxiquer, à dramatiser et à exagérer s’installe dans les usages et habitudes sur les réseaux sociaux. Les messages haineux, les appels au meurtre et les propos liés aux ethnies commencent à prendre le dessus ? Est-ce que la censure générale était la solution ?

De la coupure d’Internet

L’éducation assure beaucoup de fonctions aussi bien sur le plan Individuel, familial que social. L’éducation permet aussi de construire la société dans laquelle on vit, le pays où on est. L’éducation est à ce titre un élément fondamental et même un moteur indispensable pour le développement de la société. Elle permet d’atteindre des objectifs personnels comme professionnels. Aujourd’hui l’éducation peut se faire en présentiel ou à distance. Et elle est facilitée par l’accès à internet.

Internet aujourd’hui permet facilement d’apprendre, de s’informer et de se cultiver. Internet est un droit fondamental reconnu par les Nations Unies depuis 2012. Toutes les activités aujourd’hui se fondent sur le numérique ou une sorte de digitalisation. Sans verser dans le subjectif, je suis dépité par la coupure générale, longue et successive d’Internet au Togo. La coupure de cette semaine intervient dans un contexte où est organisé un évènement d’envergure communautaire appelé Lomé Numérique Officiel. Je me demande l’appréhension qu’ont les étrangers qui sont dans nos murs et qui malheureusement ne vont pas pouvoir jouir, non communiquer autour de l’évènement de façon instantanée comme ça se passe à l’accoutumée dans des évènements techs.

Couper Internet en 2017 ? Quelle idée !

Le développement de la société et la construction d’une Nation qui est nécessairement fondée sur le développement du sentiment patriotique, l’un des aspects de l’éducation le plus indispensable est l’instruction civique objective. Le manque de cette instruction civique justifie la destruction des biens publics, l’incendie des commissariats, la destruction de motos ou de maisons appartenant à d’autres citoyens. Le Togolais n’a pas encore compris que la politique ne doit pas prendre le dessus sur le sentiment d’appartenance à une nation, à la défense d’une cause noble et plus grande. C’est à nos dirigeants d’éduquer les citoyens sur les bons usages ou non, sur les dangers et les risques d’intoxications ou de diffusions de fausses informations.

L’exemple du Rwanda très souvent cité suffit pour prendre la mesure des choses. Il ne suffit pas de censurer, il faut préparer les esprits à un meilleur usage et censurer dans le pire des cas. La censure même ne doit être envisagée qu’en cas de véritable péril. Aujourd’hui des activités sont suspendues, des projets ralentis, des transactions non effectuées parce que Internet n’est pas accessible.Tout passe par l’éducation raison pour laquelle je me suis attardé sur cette thématique. Dans la mesure où l’éducation est un moyen de préparer l’Homme pour la vie et pour assurer le développement de la société, elle est fondamentale dans la vie d’une société.

Comme le dit John Dewey, « L’éducation est un progrès social…L’éducation est non pas une préparation à la vie, l’éducation est la vie elle-même.»

Sachez jouer avec la vie de vos concitoyens, sachez les préparer à un meilleur devenir, sachez anticiper à l’avenir, évitez donc de couper Internet. Bien à vous !!!

Nb : Ce billet a été inspiré par le document Education et nouvelle Constitution Togolaise.


Le LMD, l’UE libre et moi

30 Juin 2011, Université de Lomé, dalle de la Cité C. Il était presque 18h, quelques individus traînaient encore leur corps fatigués sur le dur sol en ciment. Soi-disant ils étaient en train de faire des exercices physiques. Parmi ces individus, il y avait moi, Francius, Cédric et Edem. Le but de cet exercice nocturne ?  Valider des UE libres (UE – Unité d’Enseignement) grâce au cours de taekwondo.

Ma génération a eu l’affreuse malchance de subir nerveusement le système LMD à ses débuts. Elle a payé le lourd tribut d’un système aussi instable que l’étiquette politique d’Agbéyomé Kodjo. Nos professeurs savaient bien que nous n’avions, à l’époque, ni les ressources humaines, ni les moyens financiers, ni les stratégies appropriées, mais ils nous l’ont imposé quand même. Le système classique qui permettait de valider son année en s’appuyant sur une juste compensation devait disparaître. Il devait laisser place au système de validation unique des matières. C’est là que sont apparues les UE libres. Elles n’étaient pas aussi libres que le suggérait l’adjectif. Pas libre du tout… Il fallait, au contraire, bien suer ou même se blesser pour avoir les 3 points de crédits qui manquaient aux 57 crédits afin de valider son semestre. Les études étaient devenues subitement violentes. Les étudiants curieux que nous étions, en lieu et place de l’espagnol ou de l’allemand, nous sommes allés nous inscrire au cours de taekwondo. On voulait apprendre quelque chose de nouveau. Erreur !

Le taekwondo est un art martial avant tout. Ne pratique pas le taekwondo qui veut, mais qui peut. On l’a appris à nos dépens. La voie du pied et du poing (c’est sa traduction littérale), on l’a compris au premier cours. Aussitôt arrivé, aussitôt impliqué. Il fallait faire des pompes sur des poings fermés. Et on pouvait entendre de loin : ana, toul, set, net puis silence. Le coach, un bolo jamais souriant de la quarantaine est venu nous intimer l’ordre de sortir des rangs, nous ranger à côté pour faire 30 pompes. On était punis. On a repris malgré nous : ana, toul, set, net, tasot, yosot, ilkop, yodol, ohop, yol. C’était chaud !

Bref… Le prof avait compris qu’on était des aventuriers. Il fallait soit nous motiver à y rester, soit nous faire désister. Il nous a raconté que le but des arts martiaux est le contrôle de soi. Les techniques de casse sont très importantes. Le taekwondo, c’est pour les gens frêles comme une guêpe. Les coups de pieds hauts sont inutiles, etc… Les balabla qu’on dit aux débutants !!!

Un mercredi soir, alors qu’on était en fin d’année académique, un camarade avec un grade plus élevé s’est essayé à faire des exercices avec nous. Il a choisi pour adversaire un gars au milieu, un mec dur comme le teck, un jeunot raide comme un piquet. Ao… Ce jeunot, c’était moi. Après l’exercice pénible de grand écart, je ne sentais plus mes jambes. Avant même que le prof ne siffle le début de l’exercice suivant, j’ai senti un violent coup de pied dans mon ventre. Misère ! C’était un complot contre ma personne. Et par ricochet contre tous les aventuriers.

Je venais de me faire frapper par un nerveux. Je n’avais jamais connu de douleur aussi atroce. J’ai décidé, depuis ce soir-là, que je ne m’aventurerai plus à valider quoique ce soit en prenant le risque de me fracasser le crâne ou de découvrir des maux de bas-ventre atroces à cause d’un coup de pied mal placé. C’était sans compter sur mon envie de valider mes deux semestres. J’ai poursuivi les cours avec une prudence excessive jusqu’aux évaluations qui m’ont permis d’en finir. Je n’ai pas perdu l’envie d’en apprendre davantage, en m’inscrivant à un autre cours au Lycée technique. Mais les exercices violents des senseis, ceux qui étaient là avant moi, m’ont dissuadé.  J’ai compris avec du recul qu’il ne sert à rien d’essayer d’enlever de force un manteau à un homme. Faites-en sorte qu’il ait chaud, il l’enlèvera de lui-même.

Ce matin, 6 ans après, alors même que ce souvenir me revenait, j’ai vu le prof de taekwondo en circulation. Il s’est amusé à me demander : est-ce que tu veux gné bras ? J’ai répondu à haute et intelligible voix : JAMAIS !

Bon weekend, chers tous !

 


A cœur ouvert (III)

Maman,

Neuf ans déjà, Maman. Neuf ans déjà que tu n’ouvres plus cette porte. Neuf ans déjà que nous manque cette personne forte.

Je ne savais pas exactement quoi t’écrire aujourd’hui. Oui, je l’avoue, l’inspiration m’a fui. Ça fait de nombreux mois que je n’ai point écrit un seul billet. Mon esprit s’évade loin de mon corps et voyage dans les tréfonds de mes ressentis. Un bruit, une odeur, un mouvement, une idée… Je n’arrivais à rien capter, à rien immortaliser. Tout est un chantage qui me pousse à m’oublier. M’oublier en me donnant toute l’attention que je puisse m’octroyer.

Des regrets en toile de fond, de la pluie sur le balcon, un reste de soupçon, mais où es-tu ? Où est ton sourire qui crache du bonheur ? Ton attention qui habille des fleurs ? Ton regard qui amoindrit la peur ? Toute cette absence m’enfle souvent le cœur. Du soir au matin, j’attends le crépuscule, à la recherche du moindre scrupule, des nuits arrosées de recul où j’imagine ton absence dans un calcul. Et ma solution, bien plus que de l’ambition, est de voir dans mes actions, ne serait-ce qu’une bribe d’avoir réussi mon éducation. Aujourd’hui, je souffre de ne plus ressentir, la moindre des sensations, je pleure de ne plus sourire en me revoyant petit garçon.

Tout, absolument tout a changé depuis ma dernière lettre, tes enfants ont bien grandi. Spéra est une grande femme, maintenant. Jacques, toujours aussi brillant. Et Gérard, un merveilleux grand frère. On parle peu de toi, de ces morceaux d’inepties à peine voilés, des souvenirs qui rament jusqu’à s’écraser, ce fardeau de fortune pour les moins fortunés. Mais quand on s’y met, les larmes coulent le long de nos joues, on ressent l’entière tristesse que contient notre vécu. Et la grande surprise quand on s’abandonne à soi-même, c’est que rien n’est blanc ou noir. Les plus beaux sourires que j’ai pu observer chez eux, étaient tous ornés par des regards déchirés sur tes photos, sur nos photos.

On est tous un peu mort aussi. Ce sont des parties de nous qui ne reviendront jamais. Ce sont des sourires qui ne naîtront jamais, ce sont des regards qui ne s’échangeront jamais. Ce sont des chansons que nous ne chanterons jamais. Ni avec toi, ni avec personne d’autre. C’est un peu trop douloureux. Ce regard qui ne me quitte pas est d’ailleurs un des seuls souvenirs qu’il me reste. Celui de l’hôpital, tu as pris bien soin de ne nous laisser que les meilleurs souvenirs, les meilleurs moments encrés dans nos peaux comme des cicatrices indélébiles. Les murs tremblent à chaque femme qui te ressemble. Les secondes se prélassent en années et tout s’accélère, ton souvenir féconde en moi des rugissements de ténèbres. Les violons hérissent mes pensées, pesantes idées qui me dictent d’abandonner. Douceur immense que de souffrir, douleur intense d’être ivre. La terre tourne et moi je fais du sur-place, c’est dans tes yeux que se trouvait ma place. Neuf ans que ce n’est plus le cas… Un reflet inanimé dans ce miroir sans aspérités, image un peu faussée, de la vie, de la vérité. Mes idées dansent des mélodies que mes actes oublient, ce que je ne fais pas, je te le dis.

Pour une troisième fois consécutive, je t’écris une missive. Une que tu ne liras pas, mais dont tu connais déjà le contenu. J’ai eu la paresse de t’écrire aujourd’hui parce que ce rendez-vous épistolaire, où je t’écris sans que tu ne puisses me répondre est le plus douloureux de tous. Mais il me permet de parler à moi-même… J’espérais trouver un jour tes secrets au fond d’une bouteille, avec tes conseils et tes merveilles, retrouver cette tendresse qui ensorcelle, j’espérais juste un peu de soleil. Mais il fait toujours froid dans ce monde sans toi et il n’y a rien pour me réchauffer, que la douleur d’être forcé à rester dans un univers que tu as laissé filer. A chaque seconde qui s’estompe, je n’ai plus assez d’énergie pour m’habiller, alors je profite du manteau de la nuit pour me rappeler que c’est en moi que tu vis. En nous…

En ce jour spécial, je voulais te dire combien tout a changé derrière toi. Combien ton départ nous a brisé des fois. Mais nous gardons l’ultime foi que depuis là-haut, tu es fière de nous.

Tu nous manques, Maman.

Je t’aime.

Guillaume.


Au nom du peuple…

Une sélection nationale constituée de joueurs représente la nation togolaise depuis quelques années. Au nom du peuple, ces derniers donnent le meilleur d’eux sur le terrain. Ou pas… En 2012, ils se sont miraculeusement qualifiés pour la Coupe d’Afrique des Nations qui devrait se dérouler quelques mois plus tard en Afrique du Sud. Au nom du peuple, celui qui dirige le pays depuis 2005, qui s’est fait réélire en 2010, selon ce que ses proches disent, a fait un discours au soir du 31 Décembre 2012. Ce discours est apparu comme un méa culpa du chef de l’état. Tant il a évoqué le sujet fâcheux des réformes, tant il a même effleuré l’épineuse question de la répartition des richesses qui selon lui « les ressources de notre pays sont accaparées par une infime minorité des Togolais. » Devant les postes radios et téléviseurs, le peuple a dit « Alléluia» !!! Il est allé plus loin en précisant qu’ « une nouvelle dynamique politique visant à faire de chaque citoyen Togolais un artisan d’une nouvelle gouvernance fondée sur l’inclusion politique, économique et sociale et la rigueur dans la gestion de la chose publique ». Devant les postes radios et téléviseurs, le peuple a dit de nouveau « Alléluia, il a enfin reçu Jésus Christ comme Seigneur et Sauveur » !!!

Quelques semaines après, les éperviers devaient se rendre en Afrique du Sud, ils avaient besoin de soutien. Tout les favorisait, tout les appelait au stade. Le peuple les poussait, les opérateurs économiques les encourageaient, l’état leur tendait la main. Chacun semblait leur dire : volez très haut, Eperviers. Ils n’avaient qu’à se présenter ; ils se sont présentés donc, et ont eu une qualification pour les quarts de finale.

Au nom du peuple, un individu à la moralité douteuse dans le comité de participation a eu la bêtise de miser sur leur échec. Il s’est permis de faire une réservation qui prendrait fin après l’étape des sélections pour le quart de final. Malheur pour lui, les Eperviers réussissent à franchir cette étape. Il fallait proroger leur séjour à l’hôtel, il fallait proroger les commandes de restauration, il fallait prolonger les séances d’entraînement, il fallait reporter le vol de retour à Lomé. Bien évidemment, tout ça implique des frais. Il y avait ce moyen mais comme le football ne sert qu’à distraire, pour une fois, on n’a pas puisé dans les caisses de l’Etat. On a plutôt demandé aux citoyens, déjà assez emporté par l’euphorie du moment, de contribuer. De gré ou de force, chacun y a participé.

Au nom du peuple, un montant de 1 milliard 50 millions a été rassemblé à la date du Mardi 29 Janvier 2013 sur les prélèvements des coûts de communication, sur l’augmentation des prix du ciment, sur l’augmentation des prix du carburant, sur l’augmentation des prix de la bière, et par conséquent une augmentation subite sur les prix des denrées de première nécessité. Il y a eu une grosse flambée à tous les niveaux. Chacun voulait en profiter… Prix du taxi, prix de la course avec le zémidjan, prix de la pâte dentifrice, prix du lait, prix du papier hygiénique, prix du riz, etc… Comme aucun sacrifice n’était trop grand pour la cause des éperviers, le peuple s’est tu. Le président du comité de mobilisation des fonds pour la participation du Togo à la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2013, Etienne Bafaï, s’est même félicité en disant que « la volonté des Togolais pour la Participation des Eperviers à la Can est très manifeste. » Il a ajouté « nous avons trois types de contribution : il y a les contributions volontaires, la contribution de l’Etat et les contributions spéciales qui se font à travers certains opérateurs économiques. Au titre des dons volontaires, nous avons enregistrés jusqu’à ce jour 250 millions de la part des donateurs. L’Etat a contribué à hauteur de 800 millions…  ».

Au nom du peuple, quelques jours plus tard, les éperviers ont échoué dans les épreuves des quarts de finale. Il n’y avait plus rien à faire dans un pays étranger. La déception était amère mais il fallait rentrer chez soi. Au nom du peuple, l’avion n’est jamais arrivé à destination. Les éperviers ont dû dormir sur les bancs de l’aéroport comme des rats. Scandale !!! Qu’est-ce qui s’est passé ? Qu’est-il arrivé à tout cet argent collecté ? Personne ne comprenait. En un, deux, trois ans, personne n’a jamais compris.

Trois ans plus tard, en Novembre 2016, le sort offre une seconde chance aux éperviers. Ils se sont mystérieusement qualifiés pour la Coupe d’Afrique des Nations qui doit se dérouler au Gabon en 2017. Et prélude aux préparatifs, le gouvernement annonce un comité de mobilisation de fonds. Comment pouvait-on créer une commission sans que la précédente n’ait fait les comptes des dépenses effectuées ? Comment pouvait-on s’assurer que cette nouvelle commission serait plus responsable que la précédente ? Comment pouvait-on penser que le peuple contribuerait encore une fois pour qu’un individu s’envole dans la nature mieux que les éperviers sur un terrain de football ? A cet énième foutage de gueule, le peuple a décidé de dire STOP à l’irresponsabilité, à l’irréflexion, à l’insouciance des dirigeants. « La loi est la même pour tous soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » dit l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1786. Cette déclaration précise en outre dans son article 14 que « tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. »

Au nom du peuple, une campagne avec l’hashtag #FaisonsLesComptes a été lancée sur les réseaux sociaux. Les médias locaux en parlent, les médias internationaux en reparlent. Le peuple voudrait connaître le montant mobilisé et ce qui en a été fait. Le peuple voudrait plus de transparence dans la gestion des deniers publiques. Le peuple s’arroge, aujourd’hui, les prérogatives que le chef de l’Etat lui a concédé au soir du 31 Décembre 2012 : le peuple veut de la rigueur dans la gestion de la chose publique.

Au nom du peuple, #FaisonsLesComptes !


Vous êtes sourd, Monsieur le Président !

Excellence,

On avait espéré, Excellence, que vos conseils, après ces nombreuses interpellations de la rue depuis 2013, vous tireraient de ce chemin si égaré. Mais vos conseillers n’ont ni force ni vigueur pour le bien. Du moins, pas en ce qui concerne celui de votre population. Ils ont une définition contraire du bien. Pour eux, faire le bien, c’est menacer, intimider, remplacer. Leur faiblesse et leur timidité les déshonorent et scandalisent tout le monde, aujourd’hui. L’éducation au Togo est aux abois. Et votre population a désespérément cherché de nombreuses fois à vous parler franchement. Le seul recours qui lui restait était la rue… Vos conseillers, aujourd’hui, craignent de vous déplaire. Ils ne vous aiment donc pas, car il faut être prêt à fâcher ceux qu’on aime, plutôt que de les flatter ou de les trahir par son silence. À quoi sont-ils bons, s’ils ne vous montrent pas que vous devez reformer les secteurs comme l’éducation et la santé, qui constituent l’épine dorsale soutenant toute nation ? À quoi sont-ils bons, s’ils ne sont même pas capables d’organiser les assises de l’éducation, que vous avez annoncé depuis des années déjà, si ce n’est vous embourber de faussetés au quotidien ?

Vos conseillers, en lieu et place d’une négociation, pour satisfaire les revendications légitimes des professeurs, ont préféré lancer un concours. Que peut-on conclure si ce n’est du mépris envers ce corps qui se bat bec et ongle pour offrir un enseignement décent à votre peuple. Que peut-on penser si ce n’est de la bêtise humaine doublée d’une inconscience professionnelle à l’endroit de cette catégorie qui, même mal payée, continue de braver le soleil et la pluie pour dispenser leur savoir en toute fierté. Ce peuple, votre peuple, peu à peu, commence à perdre le peu de respect qui lui restait pour vous, Excellence. Tant il lui semble, et vous le confirmez au quotidien, que vous ne l’écoutez point. Tant il constate que les priorités, celles pour lesquelles il vous aurait élu, ne sont en aucun cas les vôtres.

C’est avec grand chagrin, avec une douleur extrême que je me vois dans l’obligation de vous écrire de nouveau, Excellence, puisque enfin vous ne voulez point parler et que vous ne voulez point écouter votre peuple. Je ne m’en plains pas toutefois dans cet exercice à sens unique. Vous avez parlé de mandat social, un concept qui a fait tressaillir plus d’un. Un concept qui a redonné de l’espoir à de nombreux citoyens ténébreux. Un concept qui, aujourd’hui, meurt dans les sorties quotidiennes des élèves et des enseignants. Qu’avez-vous compris du mandat social ?

Le concept de mandat social sous-tend préférer la vie de son peuple à une fausse gloire, réparer les maux faits à une population, et songer à devenir un Président soucieux de l’intérêt général. Oui, un Président plus soucieux de son image au plan national qu’à l’international. Pourquoi préférer polir son image auprès de ceux qui ne vous connaissent pas qu’auprès de ceux qui, vous ont donné mandat pour les gouverner ? Un mandat social suppose anticiper les besoins de sa population avant même que celle-ci ne l’exprime. Lui accorder une liberté de parole, l’écouter, et en tenir compte. Aujourd’hui, vous vous perdez dans d’inutiles circonvolutions à essayer d’organiser des sommets, à essayer désespérément de plaire à l’étranger.

Je sais bien que, quand on parle avec cette liberté universelle, on court le risque de perdre votre faveur. Mais votre faveur est-elle plus chère pour vos conseils que faire le bonheur de votre peuple ? Je sais bien aussi qu’on doit vous parler avec zèle, douceur et respect. Mais il est honteux qu’ils aient votre confiance sans fruit depuis tant de temps. C’est à eux de se retirer si vous êtes trop ombrageux et si vous ne voulez que des flatteurs autour de vous. Vous demanderez peut-être, Excellence, qu’est-ce qu’ils doivent vous dire. Le voici : il faudrait à un moment donné vous ranger du bon côté de l’Histoire, vous autoriser la liberté de circuler dans certains quartiers des régions du Togo pour toucher du doigt la misère de votre peuple. Excellence, il faudrait que vous rencontriez les étudiants, que vous constatiez par vous-même ce qu’est devenue l’Université de Lomé, après tant d’année d’existence. Il faudrait cacher votre fierté et descendre au CHU Sylvanus Olympio pour constater dans quel état se trouve le plus grand hôpital du pays que vous dirigez. Ce n’est qu’après ça que vous pouvez véritablement comprendre le besoin profond d’exécuter un mandat social. Tant qu’ils ne vous le diront pas, que vous ne ferez pas ce que je viens de citer plus haut, vous resterez dans cette bulle dans laquelle vous vous êtes enfermé depuis 2005, vous ne comprendrez rien des besoins de votre population.

Vos conseillers doivent vous représenter qu’il faut vous humilier sous la puissante main de Dieu, si vous ne voulez pas qu’il vous humilie. Qu’il faut nourrir votre peuple, et expier par cette honte toute la gloire dont vous avez fait votre idole, qu’il faut rejeter les conseils injustes, des politiques flatteurs. Qu’enfin il faut rendre au plus tôt à votre peuple, sa fierté d’appartenir à une nation unie, pour sauver l’État.

C’est folie de lutter contre la destinée de votre peuple, Excellence. Vous aviez le mérite requis, on me l’assurait, et je le croyais, je vous l’avoue. Le pouvoir nécessaire, Excellence ! Mais à l’heure où je vous écris, je n’y crois plus, je n’espère plus, et je n’attends que votre départ. Car, il est clair qu’aujourd’hui, vous êtes sourd, muet, et aveugle, Monsieur le Président !

Que peut-on attendre d’un sourd si ce n’est le silence ?

Un citoyen inconnu de vous.


Lettre à l’artiste SIA

siaChère Sia.

J’ai écouté the Greatest. Et je suis définitivement épris de vous. Je voudrais bien qu’il y ait un « nous ». Et qu’on vive le bonheur to the Highest. Au travers de cette musique si douce, vous avez rendu toute ma semaine si belle. Les mimiques m’ont fait l’effet d’une mousse. Et je vous avoue combien ça aurait tissé dans la dentelle. Puisque je ne suis pas votre seul admirateur, je voulais y aller à toute vitesse. Excusez donc mon impolitesse, je n’ai pas eu le temps de faire les civilités. Vous allez bien ? Moi, oui, en toute fierté.

Aujourd’hui encore cette mélodie me transporte si haut. J’ai l’impression de toucher l’horizon. Elle me fait frôler l’avenir à demi-mots. Et moi, je m’y perds plus que de raison. Votre dernière  chanson est si doucereuse. Toutes vos mélodies sont si enivrantes. Elles me font toujours l’effet d’une grande berceuse. Vous êtes d’une beauté exaspérante.

Regardez. Observez, et dites-moi. Comment êtes- vous entrée dans ma vie ? Comment avez-vous fait, pour qu’en un jour, avec une musique, tout bascule dans mon existence ? Je suis désespérément accroché à YOU’VE CHANGED, à I GO TO SLEEP, à CHANDELIER, à ELASTIC HEART, à ALIVE, à TITANIUM à CHEAP THRILLS et pas que…  Je vais vous le dire, moi : votre dernière mélodie a fracassé toutes les fenêtres qui fermaient mon âme et mon cœur. Elle a ouvert toutes les portes que je voulais fermer, comme un bélier qui déchire le silence en martelant les murs du château que j’avais mis des années à construire. Elle a assiégé le château de mon existence.

J’ai été blessé plusieurs fois. J’ai pleuré de nombreuses fois. J’ai pris tout seul ma croix. Et faillit perdre ma foi. Mais de toute façon, qui ne pleure pas ? Je vous le dis, j’ai été blessé, et comme un lion combattant l’homme, j’étais en retraite dans mon propre royaume, reclus, comme un Roi amputé de son armée et de sa couronne. Je revoyais à chaque cauchemar les sourires qui s’effacent, les larmes que l’on trace, le sang qui perle au bout d’un fragment de cœur embroché. Et je haïssais tout ça !

La faiblesse de mon être m’avait contraint à abandonner, à laisser derrière moi les regrets, comme un sillon formé par l’acide de mes larmes et de ma colère. Je voulais que toutes mes craintes deviennent brume d’absurdités. Je voulais m’enfermer le temps que tout passe, naïf, moi qui me pensais solide comme un roc. Puis, je vous ai écouté. Un soir, je vous ai rencontré…

Et vous, SIA et vôtre musique, êtes venus à moi, oui, vous ! Vous êtes arrivées comme une tempête de pétales de cerisiers, et vous avez apporté le Soleil qui me manquait mais que je redoutais tant. Vous avez apporté tant à mon existence en un échange audible, en quelques mots bien placés vous avez détruit mon monde, comme on briserait un verre sur le carrelage. Vous avez été une étoile dans un monde trop noir.

Votre voix si lénifiante, vos paroles si édifiantes, ont fracturé mes repères, ébloui mes routes, changé mon quotidien. Vous m’avez transformé en goutte d’eau au travers de l’océan. Vos mots m’ont arraché à la solitude, au silence. Votre orphéon a été plus doux que toutes les fantaisies que j’ai pu connaître dans le passé. Vous avez émoussé délicatement les lames de mes rasoirs. Vous avez été la solide corde qui a aidé l’alpiniste en fin de course.

Vous êtes depuis une semaine, la première silhouette qui secoue mon réveil, la première image qui se bouscule dans ma tête, l’objet de mes désirs, la source de mes hantises. Pas une seule minute ne passe sans que je ne pense à vous, à ce que vous faites, à ce dont vous avez besoin.

Vous et votre enivrante musique êtes la bouée à laquelle je me raccroche désespérément. Vous êtes l’espoir que je n’attendais plus. Je sais. Je sais, c’est pathétique, mais vous auriez peut-être dû me laisser, dans l’obscurité des terres gelées, mais vous avez eu raison en me sauvant sans même le savoir. Pour ça, je vous dis merci, oui merci infiniment, parce que vous êtes devenue ma seule manière de survivre. Je n’ai pas eu d’autres choix.

CERVANTÈS avait raison en disant que « là où est la musique, il n’y a pas de place pour le mal ».
Vous me rendez un peu trop moi. Alors je marche pas à pas. Mon côté sombre n’est plus là. J’étais triste et puis soudain, vous voilà, SIA !

Je vous aime. ❤

Guillaume.


Togotelecom, Togocel, et Moov (Partie I)

 

togocelMoov

Au départ, il y avait la Dame d’alimentation générale avec tous les produits au quartier. Une forte clientèle, enfin presque tout le quartier s’approvisionne chez elle. Elle se trouve incontournable, insurmontable. Alors elle devient arrogante. Elle devient chiante à la moindre protestation. Elle devient insupportable mais comme personne ne propose mieux, elle a le monopole, on continue de s’approvisionner chez elle.

Puis, un Zarma vient dans le quartier. Il prend une autochtone pour femme. Un matin, cette femme devient une petite boutiquière douce, souriante, affectueuse qui s’installe. Le quartier hésite, la Dame arrogante en profite. On a peur de la jeune boutiquière, on a pas encore confiance. La jeune boutiquière change de stratégie, propose des services à petits prix, elle propose même des achats à crédit. Comme une cerise sur le gâteau, elle fait une promotion et réduit de moitié tous les prix de ses produits.

La Dame arrogante réplique en privant la jeune boutiquière de certains produits pendant un quinquennat. Au même moment, la Dame arrogante se fait un chiffre d’affaire énorme. Des sueurs, des odeurs… Une longue queue devant chez elle chaque jour. La jeune boutiquière ne s’en sort qu’avec quelques rares clients fidèles. Les clients vagabonds sont nombreux.

La jeune boutiquière ne désespère pas. Un weekend, elle réussit à contacter d’autres fournisseurs. Elle revient donc plus forte que jamais avec un service et des produits de meilleures qualités. Tout le monde parle de la jeune boutiquière, de bouche à oreille, elle est recommandée. Elle vide le tiers des clients de la Dame arrogante en une semaine. En deux, la moitié des clients.

La Dame arrogante panique, s’inquiète, s’écroule. Elle contre-attaque en offrant des produits gratuitement. Une longue file s’installe et saturant donc l’accès à la boutique.

Sans y faire attention, la jeune boutiquière continue d’améliorer ses prestations. Tout le monde l’adule, la chérit.

C’est l’histoire de Togocher, pardon Togocel, Telecel et Moov.

Ce sourire indétrônable, presque contagieux que je vois sur le visage de mes compatriotes togolais ces deux dernières semaines, est le fruit d’une concurrence rude mais loyale entre les deux opérateurs Togocel et Moov. La fourniture du bon débit d’internet est longtemps resté un luxe que les Togolais n’ont pas pu se payer. Depuis le 8 Août 2016, les togolais commencent à goûter à ce que peut être véritablement du haut débit à travers le prisme de la libre concurrence.

Si nous, juristes, voulons une gestion transparente des deniers publics, une libre concurrence, une limitation de mandat, un état de droit… c’est parce que l’équation a prouvé depuis bien longtemps qu’un homme, un groupe, une société peut BIEN FAIRE mais il y aura toujours un autre homme, un autre groupe, une autre société pour penser autrement, et donc MIEUX FAIRE. Celui qui gagne, qui en profite le plus… c’est le PEUPLE.

#Internet4All

#QuandLaVeritableConcurrenceSinstalle

Bien à vous !


Zémidjan à Lomé, chroniqueur à France24 !

TAXIS MOTOS

Si conduire le vélo n’est plus dans les habitudes des togolais d’un certain âge, conduire une moto est devenu une mode à laquelle toutes les couches de la population s’identifient. Si ailleurs, la voiture est le matériel roulant le plus confortable et le plus rapide, sous les tropiques une nette préférence est manifestée à l’endroit des engins à deux roues pour les courses en ville, les déplacements rapides, les besoin de dernière minutes et parfois pour son bon plaisir.

Une véritable concurrence s’est installée entre chauffeurs de taxi et conducteurs de taxi moto affectueusement appelés « zémidjans » au Togo comme au Bénin, « bendskineur » au Cameroun,

Les zémidjans sont d’anciens diplômés avertis, des personnes de professions libérales ou fonctionnaires, reconverties, et des VDV (« Venus Directement du Village ») convertis, en proie à une précarité et à la recherche d’un meilleur devenir. Quelques heures passées avec un zémidjan loméen vous feront prendre la température locale mieux que n’importe quelle immersion, artificielle ou naturelle.

Un zémidjan est une personne avec des talents différents. Il a une variété de facultés qui fait sa richesse et sa particularité. Mieux, c’est un champion en presque tout.


Un champion du guidon.
Zémidjan et taximan ne s’entendent presque jamais parce que se rejetant toujours la faute pour telle ou telle infraction. Un zémidjan est doué pour se faufiler entre les taxis et ça, c’est mal vu par les conducteurs qui, par zèle, les coincent quelques fois entre les véhicules. C’est là que la bagarre commence.

Zémidjan : tu ne m’as pas vu ? Sorcier ! 
Taximan : imbécile, la route, c’est le salon de ton père ?

Ils se descendent à coup d’insultes. A ce stade, ils oublient leurs clients. Ils doivent laver l’honneur de leur profession, peu importe le temps que la discussion prendra. Si vous vous hasardez à intervenir, soit il vous vire, soit il se retourne contre vous. Et si vous avez été patients en restant toujours derrière la moto, lorsqu’il aura démarré, il vous sortira toujours la phrase fétiche en parlant des autres automobilistes : voilà les gens qui n’ont pas été à l’auto-école. Voilà les gens qui font traîner l’émergence.


Un champion de l’humour.
Moi : atikoumé, combien ?
Lui : 500F.
Moi : 250F
Lui : pourquoi ? Comment un gars élégant comme ça peut donner un prix aussi minable ? Donne 400F vite.

Ou encore

Elle : Avédji.
Lui : 700F.
Elle : 300F
Lui : assieds-toi, tonton va compléter avec 400F.

Ça, c’est parce qu’il vous a vu en train de raccompagner la fille. C’est votre copine, votre petite sœur, votre voisine ? Il s’en fout. Vous marchiez ensemble, ça lui va.


Un champion de la surdité.
Si vous proposez un prix que le Zémidjan estime ridicule, genre 100F, Campus ! Il feint la surdité et repose la question. Il demande combien ? Tu as dit ? Répète encore ? Soit la honte vous fait taire, soit (c’est mon cas) vous répétez fièrement prix et destination. Alors, il vous sort le classique : mon frère, faut marcher. Pauvre étudiant ! Puis il démarre en trombe vous regardant depuis son rétroviseur.


Un champion de la discussion.
Si ailleurs les gens prennent des rendez-vous chez le psy et payent pour une thérapie…  chez un zémidjan togolais un client gagne automatiquement un bonus discussion. C’est agréable quand vous êtes stressés par quelque chose ou lorsqu’il est de bonne humeur. Vous avez envie de discuter ou non ? Vous parlerez quand même.


Un champion de la mauvaise foi. 
Le zémidjan peut partir avec votre monnaie mais vous ne garderez jamais la sienne, fut-elle une petite somme. N’y pensez même pas. Il vous laissera vous décarcassez pour lui ramener ses 50F manquants. Le zémidjan n’a jamais tort. Chaque fois que, pour une raison ou une autre, il a une discussion avec un client, il se croit obligé d’avoir raison. Notamment quand il s’agit d’une affaire de monnaie. Il n’admettra jamais que vous l’avez prévenu détenir un billet de deux mille francs. Mon frère tu veux que je chie la monnaie ? Je viens de sortir, c’est quel mauvais esprit ça ?

12-05-29 - LOME, TOGO - Zemidjan ('take me quickly' in Fon) driver Eric Pidjolo demonstrates how he sleeps on his motorcycle in LomŽ, Togo on May 29. Underpaid, rarely thanked and working all hours to make a meagre living, they find very few moments of calm and quiet in their lives. And so, the moto-taxi men have perfected various ways of calmly sleeping on their motorbike as they wait for their next customer. And so, on the move amidst the chaos and bustle of daily life, they relax and sleep. Photo by Daniel Hayduk
Photo by Daniel Hayduk

Un champion de l’aigreur.
Très souvent, ils considèrent leur métier comme une pénitence. Il suffit de discuter quelques minutes avec l’un d’eux pour justifier je ne sais quelle élucubration, il vous sortira toujours la phrase : adja (gars), ce n’est pas parce que je suis derrière le guidon hein ? J’ai un Bac+4.


Un champion de la politique.
Lui : tu as appris la nouvelle ?
Moi : quelle nouvelle ?
Lui : Agboyibo veut imiter Gilchrist. Il refuse de céder les rennes du parti aux jeunes. C’est un dictateur.


Un champion des injures.
Alerte… Ne provoquez jamais les jeunes zémidjans. Ceux qui prennent le produit tramadol pour résister à la fatigue et au sommeil. On les reconnait à la sortie d’un mouchoir blanc pour nettoyer leur moto aux feux rouges, regardant intempestivement leur échappement et en gazant de temps à autres l’embrayage bien pressés. C’est bien eux qui portent les chaussures Tauld ou All Star bien cirées en noir. Ils ont la langue facile… Ils aiment klaxonner, mais souvent, le klaxon ne leur suffit pas. Ils ont une panoplie d’injures, qui accompagne le klaxon, pour le conducteur adverse et son véhicule. Kabli (imbécile) ! Honvi (idiot) ! Azuin bé vi (fils de connard) ! Sorcier ! Vampire ! Charlatan. Enlève ton tas de ferraille devant moi / Ta brouette / Ton clou / Ton bois / Ton réchaud / Ton tétanos de là…


Un champion titrologue.
Le seul endroit où règne la véritable démocratie, c’est chez les vendeurs de journaux. On y trouve les meilleurs zémidjans décrypteurs de tout bord : UNIR, ANC, CAR, CDPA, NET, SOCIÉTÉ CIVILE. Ils viennent lire, décryptent et repartent. Ils ne payent jamais. Leur disque dur (cerveau) a déjà tout mémorisé. Là-bas, c’est argument contre argument. Ce n’est pas comme au parlement britannique où on se bat à coups de poings.

Un zémidjan est avant tout et surtout un analyste. Un expert dans la déduction, de l’exploration, de l’observation, de la description et de la conclusion. C’est un peu la raison pour laquelle la gendarmerie s’appuie souvent sur leur syndicat pour démanteler les réseaux de malfrats. Même si ces derniers plongent souvent dans la spéculation, on trouve souvent de la véracité dans leur propos. C’est d’ailleurs pour valoriser leur métier que le gouvernement a créé en 2015 une mutuelle spécialement pour eux. Dans un contexte social où l’objectivité est presque inexistante dans les journaux parce que tel est de tel bord ou tel soutien tel président de parti politique, prendre un zémidjan est une véritable sinécure. Contrairement à nos pseudos intellectuels qui nous distraient au quotidien avec des joutes verbales, le zémidjan est un véritable expert des questions sociopolitiques. Il est capable de te faire une équation logique sur le fonctionnement du HCCRUN, sur ses conclusions et de souligner les écarts avec l’attente des Togolais et la réalité concrète. Malgré le caractère pénible de ce métier, le zémidjan a toujours un sourire contagieux, s’intéressant toujours à sa clientèle.

Lui : chef tu es sapé comme jamais aujourd’hui hein. Tu vas tuer. Vraiment, tu dépasses Patrice Talon. Pardon, après faut me mettre en contact avec ton fournisseur.

Ou

Lui : tonton, tu as mauvaise mine ce matin. Il est seulement 6h hein… Il y a quoi avec madame ?

Un zémidjan, un bon, un vrai est un abonné à RFI, à BBC et aux médias locaux. Il est un vrai friand des débats politiques sur les chaines locales comme le club de la presse. Pendant ses heures de pause, ce qu’il a rarement, écouteurs dans les oreilles ou réuni avec ses collègues devant un kiosque, il suit goûte à goûte l’actualité dans le monde. En définitive, qui peut me contredire si je dis qu’un zémidjan avec tous ces talents, un bon, un vrai, aurait fait un excellent chroniqueur sur France24 ? Hein ?

Bien à vous !


Humour : discussion des Présidents dans un groupe Whatsapp

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Yayi BONI : 🙋 salut.

Faure GNASSINGBE : salut beau, c’est comment ?

Yayi BONI : ça peut aller looo. 😢

Faure GNASSINGBE : y’a quoi, bro ?

Yayi BONI : j’ai la nostalgie du pouvoir.

Faure GNASSINGBE : 😂 ah bon ? C’est toi même qui es parti !

Patrice TALON : 🙋 coucou les amis.

Faure GNASSINGBE : 👍 salut cousin.

Yayi BONI : Houm !

Faure GNASSINGBE : 😂😂😂

Faure GNASSINGBE a ajouté Blaise COMPAORE.

Faure GNASSINGBE a ajouté Ibrahim Boubakar KEÏTA.

Blaise COMPAORE est parti.

Barack OBAMA : How are you friends ?

Robert MUGABE : oooh toi, go over there. 😪

Paul BIYA : 😂😂😂👍 Doyen laaa. C’est commeeeeeeeng ?

Paul BIYA a ajouté Franko.

Joseph KABILA : hein ! Tu veux déranger ? Toi alors tu ajoutes les laids rappeurs dans le crew ?

Paul BIYA : il est plus célèbre que toi. 😝

Mouammar KADHAFI : 😂😂😂😂😂

Nicolas SARKOZY : Eh ! Mon boss on dit quoi ? 👀

Mouammar KADHAFI : On dit qu’Obama et toi, m’avez eu non ? Je veux mon argent. 😡

Nicolas SARKOZY : t’inquiète, Boss. Je reviens au pouvoir et on va gérer.😅

Joseph KABILA a ajouté Fally Ipupa.

Barack OBAMA : gars vous voulez dérangez ? Okaaaaay.

Barack OBAMA a ajouté Kanye WEST.

Barack OBAMA a ajouté Lil WAYNE.

Robert MUGABE : merde ! Et voilà que les vrais bandits sont arrivés.

Kanye WEST : fuck you. 😡😡😡

Alassane OUATTARA :c’est désordre vous voulez non ! 😉

Allassane OUATTARA a ajouté Arafat Dj.

Allasane OUATTARA a ajouté Debordo.

Laurent GBAGBO : c’est tout ce que vous savez faire ça ! Autant boire l’eau par les narines. 😗 Tchruuuu.

Charles Blé GOUDE : Prési, laisse ça. De l’enfer, nous reviendrons.

Mouammar KADHAFI : vous n’ajoutez pas aussi Douk SAGA 😂😂😂 ?

Dadis CAMARA : regardez-moi ce comportement de Machiavel. Pfff !

Général DIENDERE : camarade d’arme, c’est comment ? 🙌

Dadis CAMARA : c’est qui ton camarade ici ? 😳 Faut traiter avec les cousins d’ERDOGAN qui ratent leur coup d’état. Tsrrrrrrrr !

Géneral DIENDERE est parti.

Vladimir POUTINE a ajouté Theresa MAY.

Theresa MAY : c’est où ici ? 😳😳😳

Xi JINPiNG : c’est la cour des grands. C’est depuis cette tour de contrôle que nous manipulons le monde entier.

Theresa MAY : that’s interessting.

Kim JUNG-UN : taisez-vous. Je suis au W.C. Vous perturbez ma concentration. Orrrh ! 😡😡😡

François HOLLANDE a ajouté La Fouine.

François HOLLANDE a ajouté Booba.

Booba est parti.

Nicolas SARKOZY a ajouté Marine Le PEN.

Nicolas SARKOZY : parlez encore. 😅

Marine Le PEN : salut aux blancs de ce crew.

Arafat est parti.

Debordo est parti.

Fallu Ipupa est parti.

Robert MUGABE est parti.

Barack OBAMA : c’est Marine Le PEN qui vous fait peur comme ça ? 😂😂😂

Mouammar KADHAFI : ce que vous faites là c’est bon ? c’est pas cool du tout. Vous avez chassé tous mes bro. 😡😡

Barack OBAMA : man, ils n’ont pas le mental. 😀😀

Mouammar KADHAFI : ok.

Mouammar KADHAFI a ajouté Ben LADEN.

Ben LADEN : Salam alekoum mes frères. 👳

Barack OBAMA est parti.

Marine Le PEN est parti.

Nicolas SARKOZY est parti.

Angela MERKEL est parti.

David CAMERON est parti.

Mouammar KADHAFI : 😂👍 c’est qui qui n’a pas le mental maintenant ? 😏 Game over !

Ben LADEN a ajouté Boko Haram.

Boko Haram a ajouté AQMI.

AQMI a ajouté État Islamique.

Tout le monde a quitté le groupe.

Ben LADEN : 😂😂😂 Gueulez encore on va voir non ?!

 

Un peu d’humour pour démontrer à quel point le terrorisme prend de l’ampleur. Il semble qu’on devrait de plus en plus promouvoir la tolérance et la solidarité. Autrement, notre monde court à sa perte. Attentat par ici, fusillade par là, nous sommes pris dans un étau. Un peu d’humour pour rappeler que nous sommes humains avant tout.

Bien à vous !


Des Racines et des Ailes

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Je participe à la campagne digitale dans le cadre de la Journée Internationale de la Femme Africaine (JIFA2016), célébrée le 31 Juillet de chaque année. Grâce Bailhache, l’initiatrice de cette campagne digitale, m’avait été demandé d’écrire un texte sur le thème  »Des racines et des ailes ». Je suis accompagné par trois autres hommes dont vous pouvez lire les écrits ici. Je n’ai pas été seul à être inspiré par ce thème, Benjamin et Anthony vous livrent leurs textes sur le sujet. En attendant de les lire, voici le mien…

Dans ce monde éphémère,
Elles sont riches en humanité,
En grandeur et en candeur,
Ces racines dont elles héritent,
Pèsent souvent sur elles,
En communauté, en famille et au foyer,
Sans le soutien extérieur dont,
Elles ont souvent besoin.
Dans leur monde, tout a son temps.
Comme parfois le printemps qui vient après l’été,
Comme le magnifique soleil qui illumine après la pluie,
Comme ces larmes qui viennent après la joie,
Et comme ces bonheurs qui viennent après des sacrifices.

Ne sachant pas à qui se confier et comment s’altier,
Elles se confrontent à une ribambelle de préjugés,
Dans une société en proie à une mondialisation mal gérée.
Machisme, arrogance et mépris,
Sont des maux auxquels elle se confrontent,
Suscitant des questions dans leur tête,
Lorsque les lames acérées de chagrins et affûtées de désespoirs,
Ce double tranchant de culpabilité et d’innocence,
Viennent subitement les transpercer.
Elles aiment incommensurablement en silence,
Et inconditionnellement avec patience.
C’est pourquoi elles restent victimes d’abandonner après l’avoir été,
Et victimes d’aimer autant après l’avoir reçu.

De ces ailes qu’elles s’offrent,
Pour leur liberté et leur bonheur.
Par le courage et le sacrifice,
Consentis pour leur communauté,
Elles se distinguent par leur volonté,
À construire la vie,
Et à reconstruire sur des ruines.
Elles élèvent leur entourage plus haut que le ciel,
Et font autour d’elles, des merveilles.
D’où elles viennent et où elles vont,
Et même quand enfin il faut qu’elles volent,
Elles s’accrochent dur à des fondamentaux.
Ceux de leur cultures et de leur traditions,
Complétés par l’évolution et la mondialisation.
Elles sont ainsi une énergie dans l’existence,
De tous ceux qui leur sont chers.
Malgré les incertitudes, elles restent sereines,
S’efforcent de garder la tête haute,
En donnant partout de leur sourire.

Elles sont pauvres en rancœurs,
En méchanceté et en précipitation.
Elles sont la splendeur des splendeurs,
La merveille des merveilles,
Douceurs et tendresses.
Quand elles prennent leur envol,
Elles demeurent toujours enracinées pour ne pas balbutier.
Leur vacillement est immortalisé par des mots,
Des mots griffés à jamais sur les murs de leur personnalité.

Elles nous ont porté avant le monde.  Elles nous portent encore chaque seconde, par la Vie, par l’Amour, par la Sévérité… Pour la Douceur, pour la Bonté, pour la Bravoure…

Elles sont nos Mères !


La Plume Parlante participe à la campagne digitale #JIFA

JIFA Bon

Dans le cadre de la Journée Internationale de la Femme Africaine, je collabore depuis quelques mois sur l’édition de cette année 2016. D’ailleurs mon blog La Plume Parlante avait été élu meilleur blog Masculin lors de l’édition de 2015. Le lien par ici >>> https://bit.ly/296E7uH

C’est donc avec un plaisir inespéré que je travaille sur ce projet depuis des mois avec cette formidable équipe que vous pouvez découvrir ici >>>https://bit.ly/29fgfaI

Depuis mon Togo natal, c’est ma contribution digitale à la Journée Internationale de la Femme Africaine de l’année 2016 qui ouvre le bal des hostilités à l’approche de ce mois de Juillet. Ainsi, à intervalle régulier vous lirez mes textes pendant tout le mois de Juillet jusqu’à mi-Août, et celui de deux autres collaborateurs, ainsi que ceux du Roi cœur. Il y aura un texte spécial en l’honneur des femmes Africaines qui sera disponible sur mon blog dans la semaine du 31 Juillet 2016.

Depuis hier, mon texte introductif parle de mon parcours et de ma Muse Africaine. Vous voulez savoir qui est ma muse Africaine ? Eh bien, c’est par ici >>> https://bit.ly/29d8f8s

Merci à toutes ces femmes qui se battent dans le silence pour l’évolution de notre mère commune, l’Afrique !

‪#‎JIFA2016‬


Joyeux 50 ans, Monsieur le Président !

Excellence,

Vous êtes né un 6 Juin 1966 en toute innocence avec un cœur droit et équitable. Vous avez grandi dans une atmosphère qui est loin de vous révéler la gravité du dénuement dans laquelle une grande partie de la population togolaise vit. Ceux qui vous ont élevé ne vous ont donné pour science de gouverner que l’autorité et la méfiance, l’habileté et la défiance, l’éloignement de la vertu et la crainte de tout mérite éclatant, le goût des hommes souples et rampants, la hauteur et l’attention à votre seul intérêt. Vous avez cinquante ans, aujourd’hui. Cinquante ans dans la vie d’un homme est un âge de maturité, de sagesse et de responsabilité. Cinquante ans est un âge auquel commence le repos de tout homme ayant véritablement vécu les quarante-neuf dernières années à construire et à se construire.

Ce citoyen, Excellence, qui prend la liberté de vous écrire aujourd’hui à travers ce blog, n’a aucun intérêt à vous nuire. Il n’écrit ni par chagrin, ni par ambition, ni par envie de se mêler des grandes affaires étatiques. Il s’est même promis de ne plus parler de politique. Car, voyez-vous, votre troisième mandat a été la source de crainte semée dans de nombreux cœurs y compris le sien. Il est de ceux qui pensent que ce troisième mandat n’a pas été obtenu mais arraché de force sacrifiant donc sur l’autel de l’ambition, la démocratie et la liberté d’expression que vous étiez en train d’accorder à votre peuple ces dernières années. Avec toute votre puissance, vous ne pouvez lui donner aucun bien qu’il désire, et il n’y a aucun mal qu’il ne souffrît de bon cœur pour vous faire connaître les vérités nécessaires à votre salut. Mais, il semble qu’il y ait des voix qu’on ne peut feindre d’écouter : celle de notre conscience et celle de nos cœurs. Ce citoyen, inconnu de vous a donc décidé d’écouter ces voix et de vous adresser une lettre. Si ce citoyen vous parle fortement aujourd’hui, n’en soyez pas étonné, c’est qu’il pense que la vérité est libre et forte. C’est aussi parce que vous grandissez et qu’en Afrique, à un certain âge, nous ne parlons plus d’adultes mais de sages. Vous n’êtes guère accoutumé à l’entendre. Les gens accoutumés à être flattés prennent aisément pour chagrin, pour âpreté et pour excès, ce qui n’est que la vérité toute pure. C’est la trahir que de ne pas vous la montrer dans toute son étendue. Dieu est témoin que ce citoyen qui vous parle à travers les murs de ce blog, le fait avec un cœur plein de zèle, de respect, de fidélité et d’attendrissement sur tout ce qui regarde votre véritable intérêt.

Depuis environ cinquante ans, les principaux ministres de votre père ont ébranlé et renversé toutes les anciennes maximes étatiques, pour faire monter jusqu’au comble l’autorité qui était devenue la leur, parce qu’elle était dans leurs mains. Ils ont été impitoyables, durs, hautains, injustes, violents, de mauvaise foi. Ils n’ont connu d’autre règle, ni pour l’administration du dedans de l’État togolais, ni pour les négociations étrangères, que de menacer, que d’écraser, que d’anéantir tout ce qui leur résistait. On n’a pas parlé de justice, de démocratie, d’État de droit, ni des règles. On n’a parlé que du Président et de son bon plaisir. On a poussé ses revenus et ses dépenses à l’infini. On l’a élevé jusqu’au ciel, pour avoir effacé, disait-on, la grandeur de tous ses prédécesseurs ensemble.

Au décès de votre père, de notre cher Président, ces mêmes personnes vous ont élevé au lendemain du 05 février 2005 sur les ruines d’un Etat fortement fragilisé, comme si vous pouviez être grand en ruinant tous vos citoyens, sur qui votre grandeur est fondée. Comme si vous pouviez être légitime en ruinant tous vos concitoyens, sur qui votre légitimité est fondée Il est vrai que vous avez été élevé dans l’autorité, peut-être même trop, mais, pour le fond, chaque ministre de votre défunt père a été le maître dans l’étendue de son administration. Depuis 2005, vous avez cru gouverner, parce que vous avez réglé les limites entre ceux qui gouvernent en changeant de nom à l’ancien parti de votre père. Vous avez cru gouverné parce que vous avez signé des accords qui ont calmé vos opposants. Vous avez cru gouverné parce que vous avez rétabli les liens de coopération. Mais vos ministres ont bien montré au public leurs limites, et on ne l’a que trop bien sentie avec le chômage, la précarité, le taux de mortalité élevé. Ils ne vous ont parlé que pour écarter de vous tout mérite qui pouvait leur faire ombrage. Ils vous ont accoutumé à recevoir sans cesse des louanges outrées, pour une cantine scolaire, pour un forage d’eau, pour une ambulance, qui vont jusqu’à l’idolâtrie, au griotisme et que vous auriez dû, pour votre honneur, rejeter avec indignation.

Par exemple, Excellence, on fit croire à une partie de votre peuple, ceux du nord, que ceux du sud sont leur ennemis, pour la gloire de votre défunt père, pour votre gloire et pour punir ces derniers. Cette idée reçue et préconçue a alimenté malheureusement la cécité étatique pendant tout le règne de votre père et le vôtre, aujourd’hui. Cette partie de votre peuple issue du sud a du mal à aspirer aux fonctions administratives. L’administration togolaise en soi, avant d’être ethnicisée et régionalisée est, politisée. Je cite en particulier cette division, parce qu’elle a été la source de toutes les autres. Elle n’a eu pour fondement qu’un motif de gloire et de vengeance, ce qui ne peut jamais rendre une nation unie ; d’où il s’ensuit que toute la quiétude que vous avez obtenue par cette division, est injustement acquise dans l’origine.

Il est vrai, Excellence, que les accords et négociations subséquents semblent couvrir et réparer cette injustice, puisqu’ils vous ont donné un semblant de réconciliation nationale mais une division injuste n’en est pas moins injuste, pour être heureuse. L’accord politique global signé par vos opposants farouches n’est point signé librement. On signe par dédain, on signe malgré soi, pour éviter de plus grandes pertes. On signe comme on donne sa bourse quand il la faut donner ou mourir. Il faut donc, Excellence, remonter jusqu’à cette origine de la division nord-sud, pour examiner devant Dieu toutes vos avancées.

Il est inutile de dire qu’elle était nécessaire à votre règne : le malheur d’autrui ne nous est jamais nécessaire. Ce qui nous est véritablement nécessaire, c’est d’observer une exacte justice. En voilà assez, Excellence, pour reconnaître que vous avez passé ces dix dernières années hors du chemin de la vérité et de la justice, et par conséquent hors de celui de la réconciliation nationale. Tant de troubles affreux qui ont désolé toute la nation depuis plus de cinquante ans. Tant de sang répandu, tant de scandales commis, tant de vies saccagées, tant de familles détruites, sont les funestes suites de cette division. Ce citoyen, doit-il vous rappeler que les victimes et les parents des victimes des atrocités de 2005 n’ont toujours pas eu droit à un procès équitable ? Malgré les jugements de la cour de justice de la CEDEAO en leur faveur, au point de songer à une indemnisation ?

Elle est encore la vraie source de tous les maux que le Togo souffre. L’indifférence… Depuis cette division, vous et vos proches avez toujours voulu donner la paix en maître, et imposer des conditions, au lieu de les régler avec équité et modération. Vous avez pris des engagements que vous n’avez jamais honorés. Ce citoyen, doit-il vous parler de la question des réformes constitutionnelles et institutionnelles ? De la limitation de mandat ? De la décentralisation ? De la mise en œuvre effective des recommandations de la Commission Vérité Justice et Réconciliation ? Voilà ce qui fait que le semblant de réconciliation n’a pu durer. Vos opposants, honteusement accablés, n’ont songé qu’à se relever et qu’à travailler avec vous. Faut-il s’en étonner ? Vous n’avez même pas demeuré dans les termes de ces accords que vous aviez donnés avec tant de hauteur, Excellence. Tous les rappels qui ont été fait par des manifestations de rue, par des grèves et des boycotts, sont passés inaperçus. C’était ajouter l’insulte et la dérision à l’usurpation et à la violence.

Jamais, aucun de vos ministres n’a osé, depuis tant d’années, alléguer ces termes dans aucune négociation, pour montrer que vous eussiez la moindre prétention de rétablir véritablement l’unité nationale. Une telle conduite a réuni et animé l’indifférence de votre peuple à votre endroit. Ceux mêmes qui étaient enthousiastes à votre venu en 2005, et ont osé se déclarer ouvertement, souhaitent du moins avec impatience votre affaiblissement et votre humiliation, comme la seule ressource pour la liberté et pour la quiétude de tous les citoyens. Votre peuple, que vous devriez aimer comme vos enfants, et qui a été jusqu’ici si passionné pour vous, meurt de faim. La culture des terres est abandonnée. Les villages et les campagnes se dépeuplent. Tout le monde converge vers Lomé, la capitale. Certains métiers languissent et ne nourrissent plus les travailleurs. Doit-on parler des médecins et des professeurs ? Des fonctionnaires et des étudiants ? Tout effort pour vous faire comprendre la gravité du creusé social, est anéanti.

Cette partie du peuple qui vous a tant aimé à un moment donné de l’histoire, qui a eu tant de confiance en vous, commence à perdre l’amitié, la confiance, et même le respect qu’elle vous doit. Vos inaugurations et vos dons ne la réjouissent plus. Cette partie de votre peuple est plein d’aigreur et de désespoir. La sédition s’allume peu à peu de toutes parts à travers des marches de rue. Cette partie du peuple croit que vous n’avez aucune pitié de ses maux, que vous n’aimez que votre autorité et votre gloire. Si le Président, dit-on, avait un cœur de père pour son peuple, ne mettrait-il pas plutôt sa gloire à leur donner du pain, du lait et du miel au quotidien ? A les faire respirer un brin de démocratie après tant de maux, qu’à garder quelques privilèges, qui causent la division ?

La minorité qui s’accapare les richesses, vous l’avez-vous-même reconnu, n’a jamais été inquiétée. Au même moment la majorité pauvre croule sous le poids de la pauvreté et de la mendicité. Quelle réponse à cela, Excellence ? Les émotions populaires, qui se sont apaisées à un moment, deviennent fréquentes.

En 10 ans de règne, vous n’avez jamais adressé un quelconque mot à l’endroit de votre jeunesse estudiantine. Cette jeunesse dont vous dites, être le levier du développement de notre cher Togo. Pire, vous n’avez jamais mis pied, pas une seule fois en 10 ans, dans ce temple considéré comme celui du savoir et celui favorisant la compétition, ce facteur d’émulation et de progrès. L’Université de Lomé, ce temple qui reste une véritable brousse qui s’agrandit et se dégrade au fur et à mesure que le temps passe. Ce silence n’est-il pas la manifestation d’un mépris à leur égard ?

En cette ère où l’on parle cruellement du numérique, de ses métiers et de ses opportunités, vos citoyens peinent à se connecter sur les internets. Ils se plaignent au quotidien de la mauvaise connexion sans que personne ne les écoute. Ils sont constamment testés dans leur patience pour le téléchargement de simples fichiers attachés dans un mail. Ce citoyen doit-il vous rappeler l’absence de concurrence sur le marché de la téléphonie et donc la cherté des coûts d’appels ?

Malheureusement, pendant qu’ils manquent de pain, de connexion internet, vous manquez vous-même de légitimité, et vous ne voulez pas voir l’extrémité où vous êtes réduit. Parce que vous avez toujours été heureux, vous ne pouvez-vous imaginer que vous ne cessiez jamais de l’être. Vous craignez d’ouvrir les yeux. Vous craignez d’être réduit à rabattre quelque chose de votre gloire. Cette précieuse gloire, qui endurcit votre cœur, vous est plus chère que la justice, que la réconciliation nationale, que la conservation de l’unité de votre peuple, qui périt tous les jours de maladies causées par le manque de soin adéquat dans un hôpital digne de ce nom. Ce citoyen, doit-il vous parler du CHU Sylvanus Olympio ?

Vous ne prêtez volontiers l’oreille, Excellence, qu’à ceux qui vous flattent de vaines espérances. Tout le monde dans votre entourage le voit et personne n’ose vous le dire : vous emboitez fidèlement le pas de votre défunt père, Excellence. Vous nourrissez les mêmes sources qui ont solidifié son règne. Vous le verrez peut-être trop tard. Le vrai courage consiste à ne point se flatter, et à prendre un parti ferme sur la nécessité. Il faudrait aller au-devant de la vérité, puisque vous êtes Président, presser les gens de vous la dire sans adoucissement, et encourager ceux qui sont trop hésitants.

Je n’espère pas une réponse de vous, Excellence. Je sais combien vous êtes plus silencieux qu’un cimetière à minuit. Tout ce que j’espère, c’est que quelqu’un dans votre entourage lise cette lettre et prenne ses responsabilités pour que les petits citoyens d’en bas que nous sommes, puissions profiter des fruits de vos efforts. Mieux, pour qu’une bonne volonté dans votre entourage ait le cran de vous en toucher un mot pour que vous preniez enfin la mesure des choses. Pour que vous tourniez enfin votre regard vers cette jeunesse en proie à un chômage constant et palpable. Ce citoyen qui vous dit ces vérités, Excellence, bien loin d’être contraire à vos intérêts, donnerait sa vie pour vous voir tel que Dieu vous veut, tel que votre peuple voudrait vous voir et il ne cesse de prier pour vous. Il le fera encore plus en ce jour spécial qui est le vôtre !

Vous avez un demi-siècle aujourd’hui. Un âge important dans la vie de tout homme. Oui, je considère que vous êtes homme avant d’être mon Président, notre Président à tous. Il n’est pas question de réjouissance populaire, de gaspillage des deniers de l’état. Il est question de faire un bilan, d’asseoir une vision et d’orienter sa politique. Ma lettre semble longue parce que je suis conscient que je ne trouverai pas d’autres meilleures occasions pour vous écrire un ressentiment aussi profond, partagé par une grande partie de vos citoyens, qu’à l’occasion de votre cinquantième anniversaire. Je ne compte pas sur la chance pour que vous me lisiez. Il y a bien longtemps que ce mot m’est étranger.

Puisse cette nouvelle bougie vous ôter du chemin de l’obscurité, vous illuminer dans le choix de l’intérêt général de vos citoyens, vous inonder de sagesse, vous faire retrouver le sens de la communication avec votre peuple, immortaliser vos actions futures dans les  livres d’histoires et guider vos pas vers un avenir radieux pour vous et pour la nation togolaise toute entière.

Surprenez votre peuple, Excellence… Soyez ce Président qui à cinquante ans a fait la différence. Soyez l’homme de la rupture !

Joyeux anniversaire, Monsieur le Président.

Fait à Lomé,
Le 06- 06- 2016

Un citoyen inconnu de vous.