William Bayiha

Cameroun : la République à feu et à sac

Il ne se passe plus une semaine sans qu’une administration ou un établissement public ne soit victime d’un incident. Incendie et cambriolage.

Drapeau
Les élections législatives et municipales du 30 septembre 2013 imposent au président de la République de procéder à un remaniement.

Le fait le plus récent remonte à la nuit du 13 au 14 décembre dernier. La préfecture de la ville de Dschang, dans l’ouest du pays a été volée.  Ceci dit, c’est au ministère de la Santé publique qu’il faut se rendre pour comprendre qu’il y a peut-être quelque chose qui ne va pas dans les couloirs des administrations au Cameroun. En l’espace d’une semaine, deux incendies se sont déclenchés dans les services de ce département ministériel. L’un dans les «services centraux», pas loin du cabinet du ministre, dans le bureau du directeur de la logistique. C’était le6 décembre 2013. Un malheur ne venant jamais seul, le vendredi 13 décembre une autre alerte au feu a été lancée à la direction de la Santé communautaire située un demi-kilomètre plus loin. Dans les deux cas, les sapeurs-pompiers n’ont pas pu empêcher le feu de se propager et aux flammes d’emporter de la «paperasserie». Tout ceci ne relèverait que de l’anecdote si une semaine auparavant deux événements de nature différentes, mais d’une curiosité égale n’étaient pas arrivés. Il s’agit de cambriolages à la Fédération camerounaise de football (la fameuse Fécafoot) et au ministère de la Défense.

Le 3 décembre à  la Fécafoot, les visiteurs ont emporté selon des révélations de la presse quelque dix années d’archives contenues dans des ordinateurs et autres documents ! Au ministère de la Défense, c’est le bureau d’un général qui a été mis à sac le 27 novembre 2013. Des indiscrétions font état de quelque quinze millions de francs Cfa en liquide qui se seraient évaporés en même temps (une nouvelle fois !) que des piles de documents.

A la suite de ces incidents à répétition, les soupçons sont nés dans l’opinion sur la responsabilité des faits. Le cas du ministère de la Défense est celui qui interroge le plus. L’administration est, s’il en est, le lieu supposé le plus sûr de Yaoundé après le Palais de l’Unité puisqu’elle est logée de fait en plein cœur du quartier général de l’armée. Qu’un groupe de malfrats réussisse à avoir le courage de franchir tous les miradors, à savoir tromper la vigilance des militaires consignés aux postes de contrôle, à avoir raison de l’équipe de garde qui reste en tout temps dans le secrétariat d’un général, à prendre le temps de tout fouiller et de tout prendre et à réussir à sortir son butin en évitant soigneusement de tomber dans les pièges précédents relève tout simplement d’une fiction hollywoodienne, estiment certains.

Une analyse qui se fonde sur le contexte politico-judiciaire camerounais actuel. En effet les élections législatives et municipales du 30 septembre 2013 imposent au président de la République de revoir l’équipe gouvernementale. Des personnalités auraient peur donc de sortir du gouvernement et de se retrouver à la merci de l’opération Epervier. Craignant que les enquêteurs aillent fouiller dans les archives de leurs administrations respectives, ils prennent les devants en détruisant d’éventuelles preuves. Quid de la Fécafoot ? C’est le même fil argumentatif qui prédomine dans les débats. L’ancien président de la fédération Iya Mohamed étant derrière les barreaux, ses successeurs seraient en train de vouloir sonder sa gestion et celle de ses collaborateurs à la tête de la Fécafoot. Le cambriolage aurait pour objectif, de ce point de vue, d’emporter les preuves et d’empêcher ainsi la justice de faire son travail.

La même analyse prévaut au ministère de la Santé. Il s’agit en effet d’une administration qui a souvent été citée ces dernières années devant les juridictions compétentes en matière de lutte contre la corruption. L’un des prédécesseurs de l’actuel ministre est en effet condamné à 15 années de prison pour détournement de deniers publics. Pour ne rien arranger, les forces de sécurité et même les sapeurs-pompiers sont accusés de laxisme sinon de complicité. Pour le cas de l’incendie du 13 décembre 2013, des témoins les accusent d’être venus éteindre le feu avec des camions-citernes sans eau. Le temps de retourner à la caserne la plus proche s’approvisionner, l’aile concernée par le sinistre avait eu le temps d’être réduite en cendres.


Aventure : le visage africain des drames de l’immigration

Au fait le récent drame de Lampedusa me rappelle le récit qu’un ami d’enfance m’a fait il y a quelques mois.

BateauIl rentrait d’ «aventure». Il faut comprendre. Quand je dis aventure, je fais référence, en camerounais, à la décision que certains Africains (en l’occurrence des compatriotes) prennent pour rallier l’Europe en comptant sur le hasard et la chance. Mon ami que j’appellerais Jules a été en aventure pendant près de deux ans avant de regagner le pays riche de ses expériences et des leçons de vie qu’il a eu au cours de ce voyage vers l’inconnu. En termes d’expériences, il a fait le voyage Tripoli-Maroua (Extrême-Nord du Cameroun) avec le cadavre d’un compagnon de route décédé dans la capitale libyenne. Lui-même, malgré ses regrets de n’avoir pas franchi les frontières européennes reconnaît avoir eu de la chance, beaucoup de chance en regagnant le pays natal sain et sauf. Voici son histoire.

Un jeune africain
Si l’Europe n’est pas le paradis , ce n’est pas l’enfer non plus (c) narosnews.fr

En 2010, Jules décide de quitter sa ville d’Edéa non loin de Douala. Objectif, rejoindre l’Europe afin d’y gagner sa vie. Un choix qui n’en est pas en réalité puisque le jeune homme a été inscrit à l’Université de Douala pendant deux ans. 27 ans, formation hybride (probatoire de Maths et de physiques et Baccalauréat Lettres et Philosophie)  il suit des cours de littérature française et anglaise en faculté. Son rêve, être enseignant de lettres dans un lycée. En même temps, Jules a un autre rêve plus pressant encore. Il est le père d’une petite Axelle* qu’il doit convenablement élever.

Pour lui, passer le concours de l’École normale supérieure (ENS)  est une bonne mauvaise idée.  Certes après la formation de trois ans (il n’a pas encore sa licence), il sera automatiquement intégré dans la fonction publique où il pourra gagner décemment sa vie. Seulement l’ENS n’est plus ce qu’elle était. La passion pour l’enseignement ne suffit plus. D’un point de vue formel, il faut vraiment être le meilleur pour s’en tirer avec l’une des 35 places ouvertes au concours. À ce moment, rien ne garantit que mon ami soit le meilleur des 2 000 candidats qui postulent pour les mêmes places. La garantie est d’autant plus illusoire que le chômage généralisé rend les places convoitées mêmes pour la classe moyenne. Je parle de corruption, d’achat de place. Il faut être manifestement très brillant ou avoir un million de francs pour être dans la shortlist. En tout cas c’est ce que prétend la rumeur. Par ailleurs les frais de concours s’élèvent à 35 000 francs. Un investissement si on considère qu’au Cameroun le salaire minimum est quand même de 28 500 francs.

Faire ce concours ressemble donc à une loterie à laquelle notre héros ne peut pas participer. À 27 ans, le jeune homme est en train de devenir définitivement un homme. Le gars doit absolument s’en sortir. Ses parents sont de simples paysans qui vivent au village, ils espèrent que leur fils aîné s’en sorte un jour pour les aider un peu. Un optimisme qui a le don de mettre le concerné sous pression. Il sait qu’il doit réussir.

Pour joindre les deux bouts, Jules fait des cours de répétitions et donne un coup de main dans les collèges privés qui pullulent dans la ville de Douala. Le salaire est plus maigre que le loyer dans cette ville commerciale. En même temps, il ne parvient plus à suivre les cours à l’université. Quatre ans pour passer une licence qui se prépare en trois, c’est trop. Il faut rentrer à Edéa. Mais ici non plus l’activité d’enseignant bénévole n’a rien d’excitant. Par ailleurs malgré la présence des usines de l’unique entreprise d’industrie lourde du Cameroun (Alucam) dans cette ville, le chômage ici est une plaie. Impossible d’espérer construire une vie dans cet environnement.

Jules se sent coincé. Il y a les discours bienpensant sur les dangers de l’immigration. Il y a l’immigration choisie de Sarkozy, il y a les affirmations péremptoires du type «L’Europe n’est pas le paradis» débitée par ceux qui malgré leur réussite manifeste ne manquent pas de se rendre en Europe de «temps en temps». Si l’Europe n’est pas le paradis se dit Jules, ce n’est pas l’enfer non plus. Il veut y aller, il va y aller. Il réunit une centaine de milliers de francs. Dis au revoir à sa copine qui le soutient. Demande à des amis proches de garder le secret. Les parents ne doivent surtout pas être au courant très tôt. Et promet de revenir prospère.

Il traverse le Cameroun. Même à l’intérieur des frontières nationales, 100 000 francs ne conduit pas bien loin. À Maroua, il doit déposer son baluchon et travailler de ses deux mains. «J’ai fait des travaux que je n’aurais jamais imaginé faire», a-t-il raconté en rentrant. Manœuvre dans des chantiers, garçon de course, répétiteur, vendeur à la criée… Après quelques semaines, il traverse la frontière avec le Tchad et se retrouve à N’Djamena. Ici, il sera enseignant comme à Douala et à Edéa. Ça paie plutôt bien. Mais il se souvient que le Tchad n’est qu’une étape. Il faut progresser vers l’antichambre de l’Europe : la Libye. Seulement entre N’Djamena et la capitale libyenne, il y a plus que des kilomètres. Il y a le désert.

17 000Dix-sept mille. C’est le nombre à la mode. Dix-sept mille c’est le nombre de d’Africains tentant de rallier l’Europe décédés dans la Méditerranée en deux décennies. La police et les ONG ne voient pourtant pas tout. Personne ne compte ceux qui, se croyant plus malins que les trafiquants s’engagent en solo dans des embarcations plus légères que les pirogues pour affronter la haute mer. De même, ceux qui périssent dans les pays d’Afrique du Nord du fait des mauvaises conditions de vie n’entrent sans doute pas en ligne de compte. Pourtant un mort en vaut bien un autre. Jules m’a parlé des morts du Sahara. Les caravanes de jeeps où des femmes, des enfants et des hommes de tout à âge, ouvertement migrants clandestins s’entassent pendanttrois semaines avant d’atteindre la frontière libyenne. La soif. Elle te tenaille un homme. Une gorgée le soir et puis plus rien. La nourriture est prise comme un médicament, à dose homéopathique. Pas de bain. Sans compter les coupeurs de route, les brigands et les petits larcins à l’intérieur même des caravanes qui peuvent sceller le sort de la victime dépouillé de tout.

Vous ai-je parlé de la brûlure du soleil le jour et de celle du froid la nuit ? C’est l’enfer. C’est fou de le voir raconter cette histoire avec cette voix claire, comme dénuée de toute émotion. L’expérience de la vie. J’ai vu me confiait-il à son retour avec une certaine répétition, des choses. Quelles choses ? Des squelettes comme dans les films western. Des carcasses d’animaux travaillées par le Sahara, des fémurs visiblement humains et même des crucifixions qu’aucune camera ne pourra jamais filmer. Pendant le voyage, il y a eu des morts. Il y en a toujours, ils sont enterrés dans le sable aussi rapidement que possible.  J’ai vécu le moyen-âge.

Au moment où sa caravane atteint les frontières libyennes, c’est la crise dans le pays de Kadhafi. Tous les points habituels sont verrouillés. Les  passeurs ne peuvent rien faire pour la cargaison qu’ils ont transportée de N’Djamena. Chacun doit se débrouiller. Les familles avec des enfants encore très jeunes, oui il y en a, décident de s’installer dans le désert le temps que la situation se décante. Mon ami et trois autres Camerounais partis ensemble de Maroua abandonnent le reste de caravane. Ils ont entendu parler d’une entrée encore libre 25 kilomètres plus loin. Ils vont tenter leur chance. 25 bornes à pied et de nuit, il faut les faire. Passage réussi. Ils passeront près de trois mois dans cette Libye profonde où le Subsaharien est encore victime du racisme le plus abject.

C’est à Tripoli qu’ils vont retrouver une douceur de vivre toute relative. Ils prennent un studio à quatre, enchaînent les petits boulots : ils font la plonge, balaient les cours, portent les colis, gardent les véhicules, jouent les portefaix… Mon ami va tomber sur une famille qui souhaite envoyer sa fille poursuivre ses études en France. Il devient professeur personnel de français. Il commence à constituer le magot qui lui permettra de payer les passeurs pour l’Italie. Il envoie même un peu d’argent au pays pour sa fille, sa copine et ses parents.

Mais il a fallu que le malheur vienne rompre la linéarité de ce parcours vers l’Europe. Un de ses trois compagnons a succombé à une intoxication alimentaire. Tout s’est passé en une nuit. Le lendemain matin, les survivants ont été raccompagnés à la frontière après qu’ils aient été dénoncés par le bailleur. Le départ pour l’Europe était prévu dans la semaine. Mais avant de leur dire au revoir, les autorités libyennes ont pris la peine d’embaumer le corps à l’orientale. C’était l’ultime vœu de la bande pour cette aventure : rentrer avec le cadavre de ce «frère» au pays. Mais traverser le désert avec un macchabé ! Toutes leurs économies y sont passées. En l’enterrant à Maroua près d’un mois plus tard, ils étaient aussi fauchés qu’au départ. En écoutant ceux qui ont pris le chemin de l’immigration clandestine, on se rend compte qu’avant même de prendre une embarcation pour franchir la Méditerranée, la mort est partout sur la route de l’Europe.Cependant chacun de ces jeunes gens s’est juré de tenter d’atteindre le but une prochaine fois. Mon ami Jules particulièrement s’est fait une promesse. Immigrer en France et y vivre mais cette fois légalement même si pour l’instant, il ne sait pas comment cela va arriver.

 

 

 


Le calvaire des stagaires au Cameroun

Dur labeur
Dans la presse écrite, les radios, en ligne ou à l’écran, les stagiaires font les gros titres pour rien.

Récemment, un jeune confrère de 24 ans est décédé. Diplômé en journalisme, il était néanmoins stagiaire à la rédaction du Poste national de la radio-télévision d’Etat (CRTV) depuis un an. Il a été emporté par un AVC. Personne ne comprend ce qui s’est passé. Le 14 août 2013, il a été foudroyé sans raison apparente. Qu’est-ce qui peut expliquer cet accident ? Pas question de faire un raccourci. Mais à l’occasion de son décès, l’ensemble de la rédaction du Poste national a salué sa mémoire non pas en tant qu’employé de la CRTV mais c’était «la voix de Dimanche Midi », le magazine phare de la direction de l’information radio de l’Office camerounais de radio-télévision. Les superlatifs résumant son talent ont afflué lors de sa veillée funèbre. «C’était un vrai talent» ! Mais pourquoi le talent n’a-t-il pas été titularisé depuis un an ? Quelles peuvent être les raisons professionnelles, d’égo, de prise en charge personnelle qui l’ont stressées au point d’être victime de l’accident dont nous venons de parler ?

La CRTV, c’est connu, n’embauche plus officiellement depuis de nombreuses années. Mais les jeunes professionnels fascinés par les voix qu’ils entendent depuis leur tendre enfance veulent les côtoyer au cours de leur formation. Par ailleurs dans la rédaction, les journalistes ne manquent pas de confier, non sans perfidie, aux stagiaires (ou aux professionnels fraîchement sortis de l’école) qu’ils ont une chance d’être retenus définitivement s’ils persistent dans l’effort. Et voilà l’étudiant qui se plie en quatre pour satisfaire les moindres désirs de ses «encadreurs». En plus du café rituel qu’il doit servir au premier reporter venu, c’est lui qui est préposé à la réalisation du journal du matin. Il doit être là avant le présentateur vers  04h30. C’est toujours lui qui sera là le soir pour la réalisation du fameux 20h. Donc venu avant tout le monde, il rentre après tout le monde. Combien doit-il gagner ? Normalement la moitié du salaire de base d’un journaliste BAC+3. Un peu moins de 75 000 francs (120 euros). Mais ici, pas question. Il n’aura rien. Pendant un an ! Il y a de quoi pousser un jeune homme à bout.

Pas d’emploi

Le malheur des stagiaires qui finissent par convaincre leur hiérarchie qu’ils sont aptes est qu’ils sont transformés en Jack-of-all-trade. Ils sont soumis à des horaires, aux pressions et aux moqueries les plus acerbes de la part des dirigeants ou des autres employés. S’il est établi que les employés se doivent le respect mutuel, pas question pour le stagiaire d’en bénéficier. Tout le monde peut lui crier dessus impunément.

Malheur au stagiaire qui parle d’emploi, de contrat, de salaire. On s’étonne. Pour qui il se prend celui-là, maugrée-t-on. Il n’est pas patient. Il n’ira pas loin. Pourtant tout le monde lui reconnaît un «talent certain», de la sagacité et de la perspicacité. Ce qui est vrai pour la rédaction de la CRTV est vrai pour l’ensemble de la presse camerounaise. Les stagiaires sont exploités. Et ils n’ont aucun moyen de recours. A-t-on jamais vu une grève de stagiaires prospérer ?

Je discutais récemment avec un «chef d’entreprise» de presse qui veut lancer un quotidien. Dans son business-plan, il prévoie gaillardement des places permanentes… pour les stagiaires. «Les jeunes qui sortent de l’Esstic, de Siantou… là. Ils n’ont pas l’expérience des quotidiens» raisonne-t-il toute honte bue. Ceux-là ne seront jamais recrutés.

Je ne sais pas à quoi sert un blog si ce n’est pour dénoncer. Je suis contre la manie de la presse camerounaise à user des stagiaires comme du bétail. J’ai fait partie de cette catégorie socioprofessionnelle pendant 07 longs mois, sans aucun radis mais sonné, interpellé, critiqué et humilié. Je ne sais pas si je suis sorti de l’auberge.

Responsabilité

Donnez une chance aux jeunes si vous pouvez, messieurs les patrons de presse. Ne les utilisez pas comme des machines à produire de l’information. Vous transformerez les professionnels hésitants en journalistes corrompus et aigris. Ces jeunes que vous condamnez aujourd’hui à couvrir les cérémonies où on «paie le taxi à la presse» deviendront bientôt des journalistes mendiants par habitude même quand la nécessité aura disparue.

Les autorités sont aussi responsables. Abordé par hasard dans une salle d’audience sur la précarité des jeunes dans les salles de rédaction, le ministre du Travail a fait une promesse d’une rare vacuité. «Quand je vais m’intéresser à la presse… ». Oui monsieur le ministre continuez. Et puis rien. Quand vous allez vous intéresser à la presse que direz-vous pour réconforter ceux qui n’en pouvant plus d’être stagiaires ont préféré partir ou mourir ? Et ceux qui ayant d’autres talents ont préféré abandonnez le journalisme, comment allez-vous les récupérer ? Pensez à la détresse des jeunes gens, à la déception des familles qui doivent héberger des grands garçons et des grandes filles formés mais dénués de la moindre considération. Pensez à la vie qu’ils doivent avoir dans la société. Une vie de stagiaire, avec des badges de stagiaires qui attirent les regards condescendants et qui finissent par vous castrer un talent.

Je ne suis pas un médecin légiste mais l’AVC de ce jeune confrère interpelle ceux qui l’ont encouragé à travailler comme un dingue pour rien. Ceux qui le narguaient avec des mots gentils sur l’éthique professionnelle alors qu’ils ne transigent pas eux-mêmes sur leurs salaires et leurs autres revenus. Si la presse savait faire son propre mea culpa peut-être, cette mort serait-elle un exemple pour que cela n’arrive plus. Malheureusement tout le monde s’arrange à ne pas évoquer cet aspect des faits. C’est dommage !


Grandes vacances : les «Mbenguistes» sont de retour

  • Douanes
    Le logo de l’administration des douanes camerounaises

    Depuis quelques semaines, nos frères et sœurs qui vivent de l’autre côté de la Méditerranée et de l’Atlantique sont revenus au pays avec… plein d’histoires.

La palme d’or du récit revient à ma cousine qui revient d’Ukraine où elle fait des études de médecine. Depuis son retour à chaque fois que nous nous rencontrons, elle a toujours une petite anecdote à partager. Après deux ans passés au pays de Ioulia Tymochenko, c’est pourtant les minutes passées dans les couloirs de l’aéroport de Yaoundé en arrivant qui l’ont le plus marquée. Sa descente d’avion, raconte-t-elle, a été un mélange de joie et de frustration. La joie de retrouver le pays natal après si long exil. Elle a duré un court instant. Puis le reste a été la frustration.

Il faut l’écouter décrire les agents de contrôle de l’aéroport. « Quand tu vois le visage de vos gens-là, tu sens que tu es vraiment arrivée au Cameroun. Ils te parlent comme si tu avais un problème avec eux », se plaint-elle. Dès son arrivée, elle dit être tombée sur une bonne femme bien ronde « au visage noir » (sic). Derrière son guichet de contrôle, la policière ne semblait pas particulièrement pressée pour apposer son tampon sur les documents des voyageurs munis d’un passeport camerounais. La jeune fille raconte que la fonctionnaire avait le cou tendu en permanence vers un box situé quelques mettre plus loin. C’est là qu’étaient reçus les passagers non camerounais, en majorité des Turcs puisque la correspondance était en provenance d’Istambul. Tout à coup, suivant en la matière ses collègues et plantant sur place la file des passagers brandissant leurs passeports camerounais, la bonne femme a élancé sa masse au petit trot vers le box d’en face. Une cohue dont l’objectif affiché était de tirer de ces étrangers le maximum d’euros et de gadgets à « dédouaner ».

Il a donc fallu attendre qu’une partie des fonctionnaires de la police des frontières soit sortie des poches des Turcs pour servir le reste des passagers. Ignorant les jurons et reprenant ses bonnes vieilles habitudes de femme acariâtre, la fonctionnaire dodue a repris sa place et a servi des cachets au compte-goutte. Une fois sortie de ce calvaire, ma cousine n’était pourtant pas au bout de ses peines. Alors qu’elle s’apprêtait à franchir la dernière grille et que nous la voyions déjà, elle est tombée nez à nez avec une dame de l’administration des douanes. « Que cherche encore celle-ci ? », l’avons-nous entendue demander avec humeur ?

–          Tu as dédouané ton ordinateur là a fait la douanière, sans s’occuper du regard que lui lançait la jeune fille ?

–          Quoi, un appareil que j’ai acheté depuis deux ans. Je vous ai dit que je suis une commerçante ?

–          Tu dois le dédouaner.

Protégeant son ordinateur portable qui pointait un de ses angles hors de son cabas, la jeune dame n’a eu la soirée sauve que grâce à l’intervention d’un officier des douanes. Il n’y avait pas pour cet autre fonctionnaire, matière à créer un scandale.


Homosexualité : des outils pour transformer le non en oui

Les médias européens et leurs gouvernements veulent contraindre les anti-homosexualité au silence en usant de trois outils.

1-      Les effets de cadrage

Deux noirs qui s'embrassent.
Dire que la question de la légalisation des pratiques homosexuelles relève des droits de l’homme est indéfendable – (c) newscotedivoire.net

La mort d’Eric Lebembe la semaine dernière a ramené au-devant de la scène internationale la question de l’homophobie au Cameroun. En déconstruisant les nouvelles envoyées à Paris par la correspondante locale de Radio France Internationale et repris par la British Broadcasting Corporation, je me rends compte qu’il ne s’agit que d’un prétexte pour mettre la pression sur le gouvernement camerounais et le pousser à la faute.

La nouvelle est lapidaire. « Un journaliste, militant homosexuel assassiné à Yaoundé ». Même un enfant du Moyen 2 peut constater qu’il y a une volonté de politiser à tout prix la mort de ce jeune homme. J’ai la chance de travailler au quotidien La Nouvelle Expression où la victime a effectué un stage académique en 2006. Certes, il s’occupait des activités de communication pour des événements organisés par Me Alice Kom. Mais personne ne savait qu’il était lui-même militant. D’ailleurs, il s’en défendait lui-même. Pourquoi sa mort serait-elle liée au fait qu’il soit homosexuel ? Sait-on que ce 21 juillet 2013 un homme a été retrouvé décapité dans l’Ouest du Cameroun ? Qu’est-ce qui explique qu’on ne parle pas de lui ? Sait-on que la campagne internationale de la mort d’Eric fait de son cadavre une dépouille non grata pour ses proches ?

2-      La stigmatisation

Le simple fait d’avoir forgé la notion d’homophobie est symptomatique de la conception que se font certains de la hauteur de leurs orientation sexuelle. Homophobie = homo+phobie.  Si on est contre l’homosexualité, c’est qu’on est contre les hommes. Non, je ne déteste pas les hommes. Je ne déteste même pas les homosexuels. Ce serait absurde. Je les comprends et je leur dis que je ne suis pas d’accord avec leur conception de la vie. Attention, mon point de vue est aussi radical que la volonté des gays d’accéder à la légalité à défaut de la légitimité. Ne soyez pas homophobes ! Parce que les homophobes sont des extrémistes. Quid des homosexuels ?

L’agenda international d’un pays comme le Cameroun est rempli des séquelles de la stigmatisation dont le pays et ses citoyens font l’objet à travers le monde parce qu’ils soutiennent le point de vue de la logique et du bon sens. Tout le monde peut être hétéro mais tout le monde ne peut pas devenir homo. L’humanité disparaîtrait dans deux générations !

3-      L’amalgame

L’une des armes utilisées par ceux qui soutiennent une légalisation de l’activité homosexuelle au Cameroun comme ailleurs est l’amalgame. Ils mélangent tout pour créer la confusion. Dire que la question de la légalisation des pratiques homosexuelles relève des droits de l’homme est indéfendable. Est-ce qu’on doit tuer quelqu’un parce qu’il est cleptomane? Non ! Est-ce qu’on doit lui appliquer les rigueurs de la loi pénale. Oui si les faits sont établis ! Est-ce qu’on doit tuer quelqu’un parce qu’il a des penchants homosexuels ? Non ! Est-ce qu’on doit lui appliquer les rigueurs de la loi ? Oui, si les faits sont établis. Mettre dans le même sac les immigrants clandestins parqués dans les camps de concentration le long des côtes méditerranéennes et la décision de lutter contre le fléau de la pédérastie et du lesbianisme est un mélange de genre de nature à créer le trouble dans l’esprit d’honnêtes citoyens.