Isidore KWANDJA NGEMBO

Gouvernement de politiciens ou de technocrates pour les élections?

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En République démocratique du Congo (RDC), les élections présidentielles et législatives prévues initialement pour le 28 novembre 2016 n’auront finalement pas lieu. Le 20 décembre 2016, il n’y aura pas non plus une passation de pouvoir pacifique entre un président sortant et un président démocratiquement élu par le peuple congolais, dans le respect de la Constitution. Tout cela simplement parce que les responsables qui étaient censés financer, préparer, mener à bien le processus électoral et administrer l’élection à la date prévue, ont failli à leur obligation constitutionnelle.

En conséquence, la RDC se dirige certainement vers une profonde crise de légitimité qui pourrait aggraver la paralysie, de ce qui en reste, de l’État. Une situation qui risquerait d’enfoncer encore davantage le peuple congolais dans une grande incertitude, tant sur le plan sécuritaire que sur le plan socio-économique. La RDC, un pays, qui éprouve toutes les peines du monde à sécuriser son territoire et protéger sa population, et qui n’a jamais su utiliser à bon escient d’immenses ressources minières, énergétiques et forestières dont elle regorge, pour améliorer le vécu quotidien de son peuple.

À moins de deux mois de la date fatidique de fin du mandat du président de la république, tel que prévu par la Constitution, la RDC est plongée dans une sorte d’incertitude qui n’augure pas d’un lendemain meilleur. Il persiste un flou juridico-politique préjudiciable au bon fonctionnement des institutions de l’État. Un flou purement politico-stratégique, orchestré intentionnellement par le pouvoir actuel, pour éviter la tenue d’élections et ainsi s’éterniser au pouvoir.

Le dialogue national inclusif voulu par tous – la communauté nationale et internationale –, comme seule voie pacifique de sortie de la crise politique congolaise, non seulement n’a pas été inclusif, s’est clôturé sans que les participants aient établi un calendrier électoral global et chronométré. Rien dans cet accord n’indique comment pourrait-on financer l’organisation effective des élections, tel qu’ils sont convenus.

En plus, l’opinion publique, tant au niveau national qu’international et même sa famille politique, attendaient que le président Kabila viendrait annoncer publiquement, lors du dialogue qu’il avait pourtant convoqué depuis le 28 novembre 2015, qu’il n’a pas l’intention de briguer un troisième mandat, pour rassurer et apaiser la tension politique qui prévaut en RDC à la veille de la fin de son dernier mandat constitutionnel. Celui-ci n’a pas daigné intervenir personnellement lors de ces assises, pour garantir aux participants que les résolutions issues de ce dialogue seront prises en considération et effectivement appliquées.

Plus alarmant encore, les participants au dialogue ont décidé que les membres du gouvernement de transition qui souhaiteront se porter candidats à une élection, présidentielle ou législative, ne pourront démissionner que trois mois avant la convocation du corps électoral. Une telle résolution est susceptible de semer les germes d’une instabilité permanente du gouvernement et créer une nouvelle crise sans précédent à la veille des élections. L’idéal aurait été de décider que les membres du gouvernement de transition ne peuvent se présenter aux élections présidentielles et législatives en cours, pour assurer la bonne exécution des mandats qui leur seront confiés.

Quoi qu’on dise, rien ne rassure que les élections présidentielles auront bel et bien lieu dans une ou deux années. La Commission nationale électorale indépendante (CENI) – l’organe chargé d’organiser et d’administrer les élections –, dans sa configuration actuelle, ne rassure personne, ni par son indépendance, ni par son objectivité. Sans dire exactement qu’elle est aux ordres du pouvoir, l’on peut néanmoins dire qu’elle est, toutes proportions gardées, noyautée par celui-ci. Le renouvellement des animateurs de cette institution d’appui à la démocratie, en tenant dûment compte de l’expertise et non de considérations politiques, serait souhaitable pour assurer la transparence et l’équité.

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Devant toutes ces évidences et pour assurer la crédibilité du processus électoral à venir, la classe politique et la société civile congolaise n’ont pas droit à l’erreur et ne doivent ménager aucun effort susceptible de sortir le pays de l’impasse dans laquelle il se trouve actuellement. Il y a nécessité de maximiser le peu de temps qui reste, d’ici le 20 décembre 2016, pour trouver rapidement un compromis politique inclusif qui mènerait à l’organisation dans les meilleurs délais des élections apaisées, et ce, en se mettant d’accord sur les animateurs de la transition, neutres et impartiaux.

Gouvernement transitoire de technocrates

Un des scénarii possibles pour assurer le bon fonctionnement du processus électoral libre, transparent et accepté par tous, serait la formation d’un gouvernement de transition composé essentiellement des technocrates, y compris ceux de la diaspora, sans appartenance politique et sans ambition pour les échéances à venir, et dont la tâche principale sera de préparer sereinement et dans la transparence les élections prochaines.

En effet, dans la situation politique actuelle accentuée par la crise de confiance mutuelle dont souffre la classe politique congolaise, un gouvernement transitoire composé uniquement des technocrates serait une solution idéale compte tenu de la méfiance considérable qui existe entre la Majorité au pouvoir et l’Opposition politique.

Un tel gouvernement aurait un temps bien limité avec un mandat clairement établi, de proposer des pistes de solutions réalistes, tant sur le plan politique, socio-économique que sécuritaire, pour régler les problèmes actuels et futurs au bénéfice de l’intérêt général. Il devra agir avec la rigueur et la rationalité sous-jacentes à une saine gestion, sans manifester de partisannerie politique.

In fine, il revient aux acteurs politiques et de la société civile congolaise de s’accorder sur ce qu’ils voudront pour leur pays et pour le bien de leurs populations, de décider en toute connaissance de cause, quels moyens faut-il mettre en œuvre pour les surmonter la crise politique actuelle.


RDC : Un accord politique qui ne repose sur aucune base juridique

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Après moult tractations aux multiples rebondissements, le dialogue politique convoqué par l’ordonnance présidentielle N° 15/084 du 28 novembre 2015, ouvert le 1er septembre dernier et supposé se dérouler pendant deux semaines, a finalement clôturé les travaux ce mardi 17 octobre 2016, avec, à la clé, un Accord qui recommande la mise en place d’un gouvernement de transition et le partage des pouvoirs entre les différents représentants de partis présents auxdites Assises.

En passant en revue intégralement ledit Accord signé par la Majorité présidentielle au pouvoir et une partie de l’Opposition politique et de la Société civile, il est indiqué dans le préambule que les participants « s’engageaient à respecter la Constitution dans son intégralité », sans faire référence à aucun article spécifique de celle-ci. Mais grand était mon étonnement de constater qu’au chapitre IX, article 17 C, de cet Accord il est dit qu’ : « Il sera procédé, dans les 21 jours de la signature du présent Accord, à la formation d’un nouveau gouvernement d’union nationale. Sans préjudice des dispositions constitutionnelles et législatives nationales en vigueur, le Premier ministre est issu de l’opposition politique signataire du présent Accord. »

Au regard de cette disposition de l’Accord, de deux choses l’une : ou bien les participants au dialogue violent ostensiblement la Constitution ou incitent à sa violation, spécialement en son article 78 qui stipule que : « Le président de la république nomme le premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci », ou alors ils font désormais partie de la Majorité présidentielle, et doivent le dire ouvertement et très clairement, pour prétendre intégrer son gouvernement avant la fin du mandat constitutionnel.

En effet, recommander la formation d’un nouveau gouvernement dans les vingt-et-un jours après la signature de l’Accord revient à dire qu’il devra être mis en place au plus tard le 07 novembre 2016, alors que le dernier mandat de Joseph Kabila et sa Majorité présidentielle court encore jusqu’au 19 décembre 2016.

L’Accord ne s’appuie sur aucune base juridique

Ce n’est pas moi qui le dit, ce sont les présidents de deux chambres du Parlement congolais, tous deux juristes de leur état, qui l’on dit clairement le 15 septembre dernier, pendant que le dialogue se tenait à la Cité de l’OUA.

Dans son discours d’ouverture de la session ordinaire au Sénat, Léon Kengo wa Dondo, président du Sénat, a tenu à rappeler aux participants à ces Assises que « le dialogue n’est ni un Parlement, ni une Assemblée constituante ». Et que, tout ce qui sortira de ce forum doit se faire dans le cadre de ses limites. C’est-à-dire dans le strict respect de la Constitution et des institutions qui en sont issues.

De son côté, le président de la chambre basse du Parlement, Aubin Minaku, secrétaire général de la Majorité présidentielle a, dans son discours d’ouverture de la session parlementaire, abondé dans le même sens et dans les termes très compréhensibles : « avant, pendant et après le dialogue, tout doit se faire conformément à notre Constitution […] le respect de la Constitution passe par le respect de tout le corpus constitutionnel de bout en bout […] aucune des résolutions du dialogue national ne devra de s’affranchir du corpus constitutionnel. »

Nécessité d’un autre dialogue

En principe le dialogue n’avait pas sa raison d’être si tout le monde avait assumé ses responsabilités avec toute la diligence voulue et tout le professionnalisme attendu, notamment en mettant à disposition les ressources nécessaires pour ce faire. Malheureusement, tous ont failli à leur engagement de respecter et de faire respecter la Constitution.

Nous ne cessons de sonner l’alarme pour dire qu’il y a péril en la demeure. Le risque d’implosion est imminent, si jamais les acteurs politiques ne reviennent pas au gros bon sens et s’engagent véritablement pour un dialogue réellement inclusif afin de trouver un compromis politique consensuel avant la fin du dernier mandat de Joseph Kabila.

Malgré les tergiversations des uns et des autres, une chose que les acteurs sociopolitiques ne devraient pas perdre de vue ce que le temps joue contre eux tous. En tout état de cause, les résolutions du dialogue de la Cité de l’OUA, aussi bonne qu’elles puissent être, si elles ne sont pas partagées par la grande majorité des citoyens congolais, elles sont vouées à l’échec.

La recherche d’un Accord politique réellement inclusif pour pallier aux lacunes de la Constitution sur la gestion de la période transitoire, dans le cas où les élections présidentielles ne sont pas organisées dans le délai constitutionnel, devient urgent pour organiser des élections apaisées, crédibles et transparentes. Il y a fort à parier que les jours à venir seront très critiques pour le peuple congolais, si rien n’est fait pour désamorcer cette grave crise. Wait and see.

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La République démocratique du Congo (RDC) est au seuil d’une crise politique profonde et historique à l’issue très incertaine et aux conséquences sûrement imprévisibles pour la paix et la stabilité dans la sous-région d’Afrique centrale. Le président Joseph Kabila, en fonction depuis une quinzaine d’années après avoir succédé à Laurent-Désiré Kabila en janvier 2001, arrive au terme de son dernier mandat le 20 décembre prochain. Les sénateurs, les députés provinciaux, les gouverneurs et vice-gouverneurs des provinces, ont vu leur mandat reconduit de facto pour toute une législature, simplement parce qu’aucune élection n’a été organisé depuis 2012 pour renouveler leur mandat. Dans quatre mois, il en sera de même pour les députés nationaux dont le mandat arrive également à son terme.

La Commission nationale électorale indépendante (CENI) – organe chargé d’organiser et d’administrer les élections – a montré ses limites à plusieurs égards et est incapable de convoquer le scrutin présidentiel en novembre prochain, comme le lui prescrit l’article 73 de la Constitution. Le pays va bientôt se retrouver dans une situation où, de la présidence de la république, les deux chambres du Parlement, aux gouvernorats de provinces, plus aucune autorité exerçant une fonction élective n’aura le pouvoir d’agir et de s’acquitter légitimement de ses responsabilités pour représenter et engager pleinement l’État congolais.

Le bras-de-fer politique qui oppose actuellement la Majorité présidentielle au pouvoir et le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement qui ne fait que commencer, mais a déjà atteint les limites d’un jeu politique adroit habituellement reconnu dans un régime démocratique. Le pays court le plus gros risque de submerger dans une nouvelle violence beaucoup plus sanglante que celle que l’on a vécu le 19 et 20 septembre dernier à Kinshasa (plusieurs dizaines de morts, selon la mission des Nations unies au Congo). La RDC pourrait replonger dans la spirale des conflits armés, si jamais le dialogue réellement inclusif pour trouver un compromis politique consensuel n’a pas lieu d’ici avant le 19 décembre, date prévue de la fin du dernier mandat de Joseph Kabila.

En effet, même si le scrutin présidentiel avait lieu comme prévu, la Constitution congolaise interdit au président Kabila de se représenter pour un troisième mandat, mais ce dernier ne donne aucun signe qui laisse penser qu’il serait prêt à quitter le pouvoir. L’homme est resté insensible aux appels de la communauté nationale et internationale de clarifier sa situation après son dernier mandat, pour apaiser la tension politique dans son pays. Son attitude inquiète de nombreux Congolais qui y voient là une volonté manifeste de recourir à la politique de terre brulée.

Pour contrer cette attitude belliqueuse, il est nécessaire que les forces politiques en présence – Majorité présidentielle et Rassemblement des forces politiques acquises au changement – définissent un cadre politique clair, convenu d’un commun accord et accepté par tous, qui permette notamment d’assurer la gestion consensuelle du pays et le bon fonctionnement des institutions dans un laps de temps relativement court afin d’organiser le plus rapidement possible des élections démocratiques, et ce, dans un climat apaisé.

Mais devant l’impossibilité pour l’ex-premier ministre togolais Edem Kodjo de concilier les points de vue divergents des deux parties et de réussir à les rassembler autour de la table des négociations, la communauté internationale, à travers de ce qu’on appelle : « Le groupe international de soutien à la facilitation du dialogue national en RDC », composé de Nations unies, Union africaine, Union européenne et Organisation internationale de la Francophonie, devrait, de toute évidence et en toute responsabilité, se raviser en requalifiant son appui à un dialogue qui, en réalité est un monologue entre les membres d’une même famille politique élargie qui harmonisent leur réflexion et leurs actions communes pour conserver le pouvoir.

Ceci dit, le fait de vouloir coûte que coûte maintenir son appui à un dialogue aujourd’hui séché par les grandes composantes de la société civile et l’Église catholique risquerait manifestement d’aggraver la situation conflictuelle qui y règne déjà au sein de la classe politique congolaise, au lieu d’aider à la solutionner. Nous sommes de ceux qui pensent que le groupe international de soutien à la facilitation du dialogue national peut encore sauver la mise, en jetant son dévolu sur une autre personnalité neutre, intègre et extrêmement crédible et respectée pour assurer la médiation et faciliter la communication entre les parties en présence pour un dialogue national réellement inclusif.

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Kofi Annan serait l’homme de la situation

Ancien secrétaire général des Nations unies et Prix Nobel de la paix en 2001, Kofi Annan est l’une de rare personnalité africaine et internationale qui, non seulement inspire confiance, mais connait mieux la genèse de la problématique congolaise qui remonte au génocide rwandais de 1994. C’est du temps qu’il était secrétaire général des Nations unies que la classe politique congolaise et les forces vives de la société civile s’étaient réunies dans un dialogue inter-congolais à Sun City, en Afrique du Sud, pour conclure un Accord global et inclusif en décembre 2002, mettant en place un nouvel ordre politique fondé sur une nouvelle Constitution démocratique actuellement en vigueur.

Kofi Annan est rompu aux techniques de négociation internationale et peut mener à bien une mission de médiation et de facilitation dans un contexte complexe et difficile. Il a déjà été impliqué personnellement, avec beaucoup de volontarisme, lorsqu’il était en fonction et connait bien les acteurs actuels, tant au niveau national que sous-régional, qui tirent les ficelles. Même dans sa retraite dorée, Kofi Annan,  président d’Africa Progress Panel, suit attentivement l’évolution de la situation politique, économique et sécuritaire du continent et en particulier de la région des grands lacs africains.

Avec M. Annan comme facilitateur, il est certainement possible que le dialogue politique véritablement inclusif, voulu par les uns et les autres, prenne un tournant décisif et aboutisse à un compromis politique qui permette de combler le vide laissé au sommet de l’État, le 20 décembre 2016.

Croisons les doigts et espérons que les souhaits de nombreux Congolais et amis du Congo se concrétiseront et qu’un jour ce pays béni de Dieu pourra instaurer la démocratie, le respect des droits de l’homme et des principes de l’État de droit pour finalement permettre à son peuple de jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels.


L’ONU préconise un pacte mondial sur les migrations et les réfugiés en 2018

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Le 19 septembre 2016, au siège des Nations unies à New York, les États membres ont adopté une Déclaration sur la mobilité humaine et se sont engagés à protéger les droits des réfugiés et des migrants. Ils ont émis le souhait d’organiser une conférence internationale en 2018, dont l’objectif ultime serait de parvenir à l’adoption d’un pacte mondial sur les migrations et les réfugiés. Il convient de relever, fort malheureusement, qu’il n’est pas fait mention spécifiquement de migrants climatiques dans cette déclaration.

La lutte contre le changement climatique est devenue une préoccupation majeure et urgente qui mobilise aussi bien les États, les communautés, les régions, que les individus de partout dans le monde, elle nécessite des solutions à l’échelle mondiale, nationale, régionale et locale. Les États reconnaissent, par ailleurs, la nécessité de limiter le réchauffement climatique causé par les activités humaines. De ce fait, ils manifestent leur volonté de trouver une solution durable, notamment en limitant le réchauffement climatique mondial à deux degrés Celsius au maximum, par rapport aux températures de l’ère préindustrielle.

En effet, si nous sommes conscients que le réchauffement climatique actuel est le résultat de notre mode de vie, de production et de consommation, nous devons également être conséquents, et donc conscients que nous avons le devoir moral et la responsabilité éthique d’assurer les droits et le bien-être de migrants climatiques.

Quand bien même des divergences de vues persistent encore, tant dans le milieu scientifique que politique, au sujet des liens directs entre les répercussions des changements climatiques et les déplacements forcés de populations, il est néanmoins vrai qu’à mesure que le climat se réchauffe et provoque la multiplication et l’imprévisibilité croissante des phénomènes météorologiques extrêmes tels que : la hausse du niveau des océans et des mers, l’acidification des océans, les inondations, la pénurie d’eau potable, la désertification des terres agricoles, etc., des milliers de personnes craignant pour leur vie sont forcées par les circonstances d’abandonner leur milieu naturel d’habitation, soit temporairement soit définitivement, vers d’autres régions pour trouver refuge.

Les scientifiques s’accordent pour dire que le réchauffement de la planète et les changements climatiques progressent à un rythme alarmant et affectent beaucoup plus gravement les populations de pays pauvres et plus vulnérables. Dépendamment de leur situation géographique, les régions naturellement prédisposées aux aléas de la nature ou endommagées par les activités humaines subissent encore beaucoup plus les conséquences négatives du réchauffement climatique. Ces pays sont impuissants face à la multiplication des catastrophes naturelles et ne disposent pas des moyens d’adaptation nécessaires et de la capacité de réagir rapidement pour contenir les menaces que pose les changements climatiques et d’en atténuer les préjudices.

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Migration comme mesure d’adaptation aux changements climatiques

Si les problèmes environnementaux sont mondiaux, les impacts se font ressentir d’abord au niveau local. Pour réduire la gravité de la menace que représente le réchauffement climatique, deux principales actions majeures sont préconisées – l’atténuation et l’adaptation. Ces deux actions sont considérées comme nécessaires pour lutter contre les changements climatiques, mais nécessitent que les États disposent d’énormément de ressources financières et technologiques que les pays pauvres et vulnérables n’ont pas souvent pour faire face aux défis climatiques.

En effet, bien que l’atténuation soit nécessaire pour réduire l’ampleur du réchauffement climatique mondial, il est toutefois nécessaire de noter que pour les populations de pays pauvres et vulnérables qui subissent de plein fouet les impacts climatiques, les mesures d’adaptation sont encore plus nécessaires et urgentes. La plupart des pays pauvres et vulnérables ont des niveaux d’émissions de gaz à effet de serre tellement faible que l’atténuation n’est pas nécessairement la solution appropriée pour remédier à leur problème.

La priorité de la communauté internationale devrait consister à les aider avec les moyens d’adaptation nécessaires pour lutter contre les changements climatiques. Il est nécessaire de rappeler que les conséquences du réchauffement climatique représentent des risques majeurs pour la paix et la sécurité internationale, dans la mesure où elles peuvent devenir une source potentielle de tensions, de conflits, voire même de guerres entre communautés à la recherche des ressources de base pour leur survie. Les mesures d’adaptation peuvent donc être, à la fois un facteur de limitation des migrations de populations et un déterminant pour la paix et la sécurité de ces populations.

Mais, faute de moyens techniques et financiers, les populations les plus pauvres, vulnérables face aux conséquences du changement climatique, n’ont pas d’autres choix que d’envisager la migration comme une stratégie d’adaptation. Quid de la protection de leurs droits fondamentaux ?

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La protection des droits fondamentaux de migrants climatiques

Parmi les engagements contenus dans la Déclaration de New York sur les migrations et les réfugiés, il y a notamment la nécessité de protéger les droits fondamentaux de tous les réfugiés et migrants, indépendamment de leur statut ; de soutenir les pays secourant, recevant et accueillant un grand nombre de réfugiés et de migrants ; de condamner fermement la xénophobie à l’encontre des réfugiés et des migrants ; de mettre en œuvre une réponse globale pour les réfugiés, fondée sur un nouveau cadre qui définit la responsabilité des États, etc.

En effet, le droit international des droits de l’homme reconnaît à tout être humain le droit à un niveau de vie suffisant qui se matérialise par le droit à la santé, à l’alimentation, à l’eau potable, à un environnement sain, à un emploi, à l’éducation, à un logement décent, etc. En vertu de ces principes universels des droits de l’homme auxquels tous les États ont adhéré et qu’ils ont intégré dans leurs législations nationales, il est nécessaire de rappeler que les migrants climatiques, qui traversent la frontière internationale, doivent être également protégés contre toutes formes de violations de leurs droits fondamentaux. Les États ont le devoir, en vertu du droit international, de respecter leurs obligations et de garantir les droits de toutes les personnes vivant sur leur territoire. Or, les changements climatiques ont des répercussions négatives sur la jouissance effective de ces droits mentionnés ci-hauts.

Il convient de rappeler ici que la situation de migrants climatiques constitue un défi majeur pour le droit international. Selon tous organismes internationaux spécialisés dans les questions de migrations de populations, il y a beaucoup plus des « réfugiés climatiques » que de réfugiés politiques. Mais à ce jour, le statut juridique et la protection des droits de migrants victimes du climat demeurent encore incertains. Il n’existe aucun instrument juridique international qui protège spécifiquement les migrants climatiques, lorsque ceux-ci franchissent la frontière internationale. Le droit positif actuel n’offre pas de solutions appropriées et adéquates à la protection juridique des populations victimes du climat. En effet, les mécanismes de protection internationale des droits de la personne ne garantissent pas de façon adéquate les droits des victimes du climat, que ce soit à travers le concept de réfugié ou même à travers les instruments généraux de protection des droits de la personne.

Deux obstacles juridiques majeurs peuvent expliquer cette situation qui prive les migrants climatiques de la jouissance de leurs droits. Premièrement, le droit international étant basé sur le principe de souveraineté des États, seuls ces derniers ont le pouvoir de déterminer la pertinence d’une demande et d’accorder le droit d’asile. En définitive, le respect des résolutions des Nations unies, à ce propos, est souvent soumis au bon vouloir de gouvernements concernés dans la détermination de qui peut entrer sur leur territoire et sous quelles conditions.Deuxièmement, la demande d’asile est définie en se référant à la définition de la notion de » réfugié » figurant dans la convention relative au statut des réfugiés, dite convention de Genève, adoptée le 28 juillet 1951, qui est l’instrument par excellence qui régule le droit international en matière d’asile. Or, il existe une différence significative entre un réfugié politique et un migrant climatique.

La convention de Genève est basée sur une approche individuelle des droits de la personne et ne protège que les personnes qui se trouvent hors du pays dont elles ont la nationalité. De ce fait, le statut de réfugié ne s’applique qu’à des individus qui apportent la preuve d’une menace personnelle de persécution. Alors que les migrations climatiques sont et seront vraisemblablement collectives – exodes massifs de populations craignant pour leur vie et fuyant pour les mêmes raisons.Il est donc clair que la convention de Genève souffre d’importantes limites pour répondre aux nouvelles migrations internationales causées par les changements climatiques dans la mesure où il serait pratiquement difficile, par exemple, de demander à un migrant climatique de justifier le caractère personnel d’une menace de la montée du niveau de la mer.

Les « réfugiés climatiques » ne devraient pas être considérés au même titre que les réfugiés politiques. Le manque d’une convention internationale spécifique qui reconnaisse légalement la particularité de migrants climatiques entraîne des conséquences néfastes en termes des droits, notamment les droits économiques, sociaux et culturels. Il revient donc à la communauté internationale de se préoccuper sérieusement du sort de migrants climatiques et de garantir leurs droits fondamentaux, en adoptant une convention internationale qui accorde légalement un statut juridique aux migrants climatiques, comme c’est le cas actuellement avec les réfugiés politiques.

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La stratégie marocaine d’immigration et d’asile dans la perspective de COP22

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Le royaume chérifien s’apprête à accueillir les délégués représentants les 196 états membres de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), qui viendront participer à la 22e conférence internationale sur le changement climatique (COP22) à Marrakech en novembre prochain. Comme lors de précédentes conférences, les enjeux de la COP22 sont considérables et exigent une volonté politique de la part de toutes les parties concernées pour parvenir à un compromis satisfaisant sur l’agenda des solutions pré-2020, notamment le financement climatique d’une valeur de 100 milliards de dollars américain prévu en 2020 en faveur des pays vulnérables.

Parmi d’autres sujets que compte le volumineux ordre du jour des débats, on note notamment la question de migration et de mobilité humaine, un des sujets au cœur des vives préoccupations de nombreux États, dans la mesure où la question de migration est étroitement liée à celle des droits humains. L’inscription de cette question à l’ordre du jour de la COP22 devrait être une suite logique du nouvel accord universel et contraignant convenu à Paris l’année dernière, qui succèdera à l’Accord de Kyoto et entrera en vigueur dès 2020, pour lutter efficacement contre le dérèglement climatique.

Le Maroc peut-il influencer les négociations sur la mobilité humaine?

Il est nécessaire de rappeler que les incidences du changement climatique sur la mobilité humaine n’avaient pas été prises en compte dans la CCNUCC. Les liens entre le changement climatique et les migrations forcées étant complexes et donnant souvent lieu à des opinions divergentes, cette question avait été éludée. Ceci étant, l’accord de Paris a reconnu que les changements climatiques représentaient une menace immédiate et potentiellement irréversible pour les sociétés humaines. De ce fait, l’accord de Paris a mis en évidence la nécessité de prendre en compte les questions de mobilité humaine à toutes négociations internationales à venir sur les changements climatiques. Car en effet, c’est sur la mobilité humaine que le changement climatique pourrait avoir l’incidence la plus importante.

Avec l’avènement de la COP22 à Marrakech, le Maroc veut saisir cette opportunité pour sensibiliser la communauté internationale sur la nécessité d’agir rapidement et de disponibiliser les moyens nécessaires pour faire face à la problématique des changements climatiques qui devient de plus en plus pressante pour les pays pauvres et les plus vulnérables, et constitue la première cause de migrations forcées. Le Maroc voudrait notamment promouvoir sa stratégie d’immigration et d’asile comme une initiative qui englobe les différentes problématiques liées à la migration et vise à faciliter l’intégration harmonieuse des migrants dans la société marocaine, notamment en leur facilitant l’accès à l’éducation, au logement, à la santé, aux emplois, etc.

Qu’en est-il de la stratégie marocaine d’immigration et d’asile?

Longtemps considéré comme un pays d’émigration, le Maroc est devenu, avec le temps, également un pays de transit et d’accueil de migrants. En effet, par sa position géographique qui place ce pays à la fois proche de l’Europe occidentale et au carrefour de deux régions – Afrique subsaharienne et Arabe où l’on enregistre le plus grand nombre de conflits armés qui poussent des centaines de milliers de personnes en exile, le Maroc devient, par la force des choses, un pays de destination et d’accueil de demandeurs d’asile et de migrants, essentiellement issus de deux régions ci-dessus.

Le Maroc doit donc faire face à la fois aux problèmes liés à l’accueil et à l’intégration de migrants, et ceux liés à la protection de leurs droits, étant entendu que le pays a ratifié, depuis 1957, la Convention de Genève relative aux statuts des réfugiés du 28 juillet 1951.

Toutes les activités visant à assurer le plein respect des droits de la personne, conformément à la lettre et à l’esprit du droit pertinent, c’est-à-dire le droit des droits de l’homme, le droit international humanitaire et le droit des réfugiés : définition de la protection selon le CICR.

Sévèrement critiqué par le Conseil national des droits de l’homme du Maroc, dans un rapport rendu public en septembre 2013, sur la situation de l’asile et de l’immigration au Maroc, le gouvernement du royaume chérifien annonce sa volonté de mettre en place une nouvelle politique pour juguler autant que possible les flux migratoires.

C’est dans ce cadre qu’une stratégie nationale d’immigration et d’asile a été adoptée et présentée officiellement en septembre 2014 et mise en place pour assurer un niveau de protection suffisant de droits fondamentaux des migrants, conformément aux engagements internationaux du Maroc en matière de droits de l’homme, et en tenant compte de recommandations formulées par le Conseil national des droits de l’homme.

Une stratégie certes ambitieuse mais dont la réussite dépendra de l’engagement constant du gouvernement marocain et du soutien des partenaires internationaux concernés par les questions migratoires.

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« J’étais un peu seul dans l’arène, mais je ne me suis pas dégonflé du tout », propos tenus par le facilitateur Kodjo à la RTNC (chaîne de télévision publique congolaise) après sa rencontre à Bruxelles avec le comité de sages du Rassemblement de forces acquises au changement, conduit par Etienne Tshisekedi.

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Il y a exactement huit mois, jour pour jour, que la présidente de la commission de l’Union africaine, Nkosazana Dlamini Zuma, avait désigné l’ancien premier ministre togolais, Edem Kodjo, pour baliser le chemin en vue de la convocation d’un dialogue national inclusif qui devrait réunir les acteurs socio-politiques de la République démocratique du Congo (RDC), afin de régler les problèmes liés à la prochaine élection présidentielle et permettre sa tenue effective dans un climat apaisé.

Cinq mois depuis qu’il a été confirmé officiellement par l’Union africaine, avec le soutien des Nations unies, de l’Union européenne et de l’Organisation internationale de la Francophonie, comme facilitateur du dialogue congolais. Mais depuis, Edem Kodjo fait du surplace et commence même à perdre toute confiance et toute crédibilité aux yeux d’une frange majoritaire de la population congolaise.

De report en report, le dialogue tant attendu avec la plus grande impatience, compte tenu de la brièveté du temps qui reste avant les élections, n’a toujours pas commencé. Pendant ce temps, la majorité présidentielle et l’opposition politique campent fermement sur leurs positions et sont incapables de faire converger un tant soit peu leurs intérêts vers l’intérêt supérieur de la nation.

En effet, pour mener à bien sa mission, le facilitateur devrait avoir une attitude de neutralité, d’impartialité et d’objectivité rigoureuse, assortie d’une capacité d’écoute active susceptibles de créer la confiance et les conditions favorables à la participation de tous dans un dialogue politique qui se veut inclusif, et ainsi rendre possible la résolution de points de divergences. À contrario, si une partie prenante au dialogue a un préjugé défavorable à l’endroit du facilitateur et un pressentiment que celui-ci est partial, il est clair que les pourparlers risqueront de traîner en longueur et de ne pas produire les résultats souhaités.

Le rôle du facilitateur est donc et avant tout de gérer le temps du mieux qu’il peut et de faire avancer les discussions pour atteindre les résultats souhaités. Il ne doit pas proposer unilatéralement ni imposer ses propres opinions, mais devrait en tout temps modérer et encourager les participants à discuter entre eux pour parvenir à un compromis.

Que reproche-t-on à Edem Kodjo?

Monsieur Kodjo est supposé connaître parfaitement bien que la mission qui lui a été confié tenait compte du timing très serré pour parvenir à un compromis consensuel, afin de traverser, sans trop de fracas, la période pré et post-électorale. Mais par son approche quelque peu cavalière, le facilitateur a du mal à convaincre toutes les parties prenantes de sa bonne volonté d’aider les Congolais à organiser un dialogue qui puisse garantir un minimum d’apaisement à la tension politique palpable liée à l’organisation d’élection présidentielle prochaine.

Ceux qui récusent le facilitateur de l’Union africaine, l’accusent, à tort ou à raison, de manque d’écoute et de vouloir imposer ses propres opinions, sans préalablement consulter toutes les parties concernées. Trop imbu de lui-même, il semble oublier qu’il n’est qu’un simple modérateur, au mieux, un accompagnateur qui a pour mission de veiller à ce que toutes les parties prenantes discutent franchement et librement, et ce, de façon productive afin d’aplanir leurs divergences et parvenir à un compromis sur lequel elles seront d’accord de vivre avec les conséquences.

Mais Edem Kodjo s’abrite derrière la confiance que lui a renouvelé ceux qui l’on nommé, comme il ne cesse de le rappeler chaque fois, perdant de vue que cette facilitation a été demandé par la classe politique congolaise qui voulait la présence d’une tierce partie dans leur discussion. Ils ont donc fait appel aux Nations unies, conformément à la Résolution 2277 du Conseil de sécurité, de nommer un facilitateur international pour modérer le dialogue.

Mais de quoi va-t-on encore débattre au dialogue ?

L’ultime question qui se pose maintenant est de savoir : que reste-t-il à débattre au dialogue facilité par Edem Kodjo, lorsque qu’on sait bien, premièrement, que dans son Arrêt du 11 mai 2016, suite à la saisine des députés de la majorité présidentielle, la Cour constitutionnelle s’est déjà prononcée concernant le vide juridique à la tête de l’État, en invoquant le principe de la continuité de l’État, et a estimé que le président sortant pourra rester en place jusqu’à l’élection du nouveau président élu?

Deuxièmement et comme il ne cesse de le répéter à qui veut bien l’entendre : « sans révision du fichier électoral pas d’élection présidentielle », le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) vient d’annoncer, cette fin de semaine, le report unilatéral de la date d’élections en juillet 2017, avant même que le dialogue national inclusif n’ait commencé pour statuer sur la question. Ayant ainsi vider de toute substance les questions litigieuses devant faire l’objet des discussions, que reste-t-il encore à débattre au dialogue, sinon que d’aller acter les décisions déjà prises par ces deux institutions?

En effet, si le dialogue venait à se tenir effectivement en RDC pendant cette période pré-électorale, tout le mérite reviendrait à l’Église catholique du Congo et au président Denis Sassou Nguesso du Congo-Brazzaville qui, comme nous l’avons écrit précédemment, ne ménage aucun effort pour éviter le chaos chez sa grande voisine la RDC, qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses dans son pays.


Au FSM : Isidore Kwandja Ngembo plaide pour une Convention relative au statut des réfugiés climatiques

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Pour la première fois de son histoire, le Forum social mondial (FSM), un de plus grand rassemblement de la société civile mondiale, se tient actuellement en Amérique du Nord. Des dizaines de milliers de militantes et militants venant de partout au monde ont convergé vers le Canada pour réfléchir activement à un certain nombre de solutions possibles pour bâtir un monde juste, pacifique et un meilleur environnement habitable pour les générations actuelles et futures.

Lors de ce FSM, la diaspora marocaine au Canada, réunie au sein du Forum des compétences canado-marocaines, a organisé une table ronde portant sur « les migrations climatiques : tendances et enjeux », qui est en fait une suite logique d’un colloque international qui s’était tenu le 20 mai dernier à Rabat, pour réfléchir sur la problématique des « réfugiés climatiques ». L’objectif étant d’attirer l’attention et sensibiliser la société civile mondiale réunie à Montréal, sur les conséquences catastrophiques souvent engendrées par le réchauffement climatique. Notamment, la situation des communautés entières et souvent vulnérables qui sont contraintes de migrer, soit temporairement soit définitivement, vers d’autres régions du monde pour trouver un refuge.

L’occasion était belle de promouvoir la 22ème conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP22) qui se tiendra, cette fois-ci, au Maroc et d’exiger l’intégration de la problématique des « réfugiés climatiques » à l’agenda de ce sommet. Aussi, de sensibiliser l’opinion publique internationale aux conséquences dues au réchauffement climatique, afin que celle-ci interpelle les décideurs politiques de leurs pays respectifs qui se réuniront en novembre prochain à Marrakech, pour que cette question figure à l’ordre du jour.

Lire aussi:

C’est dans ce contexte que nous avons été invité à présenter une conférence qui a porté sur : « Le régime international des droits de l’homme à l’épreuve du changement climatique ». Cette conférence faisait suite à celle que nous avions présenté au colloque international sur « les migrations climatiques : tendances et enjeux » à Rabat, sur le même sujet. C’était donc un grand honneur de venir partager nos connaissances avec les militantes et militants préoccupés par les conséquences du réchauffement climatique mondial.

Au cours de cette conférence, nous avons mentionné le fait que le droit international des droits de l’homme reconnait à tout être humain le droit à un niveau de vie suffisant qui se matérialise par le droit à la santé, à l’alimentation, à l’eau potable, à un environnement sain, à un emploi, à l’éducation, à un logement décent, etc.

Nous avons démontré à quel point ces droits sont successibles d’être violés à cause des effets des changements climatiques. Ce qui nous a amené à en déduire que les changements climatiques contribuent à la violation des droits de la personne, dans la mesure où ils ont des répercussions négatives sur la jouissance effective des droits mentionnés ci-hauts.

Nous avons aussi mentionné qu’à ce jour, il n’y a pas d’instruments juridiques spécifiques, au niveau international, qui protègent suffisamment les personnes victimes des effets des changements climatiques, lorsque celles-ci franchissent la frontière internationale.

Le statut de réfugié tel qu’il est défini par la Convention relative au statut des réfugiés, adoptée le 28 juillet 1951, est entièrement basé sur une approche individuelle des droits de l’homme et ne s’applique qu’aux personnes qui craignent avec raison d’être persécutées par les autorités de leur pays, du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques. Or, les migrations climatiques sont souvent des exodes massifs d’individus qui craignent pour leur vie, qui fuient pour les mêmes raisons et qui ne sont pas  forcément persécutés par les autorités de leur pays. En définitive, cette Convention ne s’applique pas aux migrants climatiques.

Notre argumentaire présenté en faveur de la protection internationale des « réfugiés climatiques » semble avoir reçu un accueil favorable de la part de militantes et militants présents dans l’auditoire. Gageons que les membres de la société civile mondiale ici présents à Montréal vont, au retour dans leurs pays respectifs, mener des activités de plaidoyer efficaces pour la reconnaissance d’un statut juridique des réfugiés climatiques, sur le même principe que celui des réfugiés politiques.

Nous sommes néanmoins très conscients du fait que le chemin à parcourir pour parvenir à l’adoption d’une Convention internationale relative au statut des réfugiés climatiques est parsemé de beaucoup d’embûches, mais nous avons toutefois bon espoir que les autorités marocaines feront de leur mieux, pendant la COP22, pour à la fois faire avancer les négociations internationales sur les changements climatiques et parvenir à un consensus pour la protection juridique des droits de migrants climatiques.


Le Canada renoue avec le maintien de la paix en Afrique

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Le ministre canadien de la Défense nationale, Harjit S. Sajjan, séjournera en Afrique, notamment en République démocratique du Congo (RDC), en Éthiopie, au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda du 09 au 16 août 2016. L’annonce a été faite la semaine dernière dans un communiqué du ministère de la Défense nationale daté du 4 août 2016. Selon ce communiqué, le ministre sera accompagné de l’ex-sénateur libéral et Lieutenant-général à la retraite Roméo Dallaire (celui qui commandait la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda (MINUAR) pendant le génocide de 1994), et de l’ancienne procureure en chef du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et ex-Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme Louise Arbour.

Le recoupement des informations obtenues de diverses sources nous permet d’attester que le Canada se prépare à déployer une cinquantaine de Forces canadiennes dans une mission de maintien de la paix, vraisemblablement en RDC, dans le cadre de la Mission de l’organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco). Mais rien n’a encore été précisé. C’est à l’issue de cette visite africaine que le ministre pourra définitivement fixer l’opinion publique canadienne du lieu et de la date prévus pour un tel déploiement.

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Débattre des questions relatives à la paix et la sécurité en RDC

Au-delà du déploiement des troupes canadiennes pour le maintien de la paix, ne devrions-nous pas d’abord commencer par aider ce pays à instaurer un système de justice pénale opérationnel pour prévenir les crimes et violations massives des droits de la personne des civils innocents ?

En effet, en lisant entre les lignes l’annonce de la visite du ministre de la Défense nationale, il y a lieu de penser que la présence dans la délégation ministérielle de Roméo Dallaire et Louise Arbour, deux personnalités canadiennes connues pour leur rôle joué dans la région des grands africains, n’est pas fortuite. Elle est révélatrice de la volonté du gouvernement Trudeau, qui travaille activement pour obtenir un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, d’attirer l’attention de la communauté internationale sur les crimes qui se perpétuent en RDC depuis maintenant deux décennies sans qu’aucune action judiciaire internationale ne soit réellement entreprise à l’encontre des responsables des violations graves du droit international humanitaire.

De l’avis de plusieurs observateurs avertis de la situation socio-politico-économico-sécuritaire en RDC, il n’y aura pas de paix durable dans ce pays tant et aussi longtemps qu’il n’y aura pas de justice indépendante qui doive non seulement juger les criminels qui sévissent en toute impunité, mais également les dissuader de récidiver.

Dix-sept ans après sa mise en place en juillet 1999 par le Conseil de sécurité, la Monusco, avec près de 17 000 casques bleus déployés sur le terrain, peine à instaurer une paix durable dans ce pays, notamment en éradiquant les groupes rebelles qui, chaque jour, sèment la terreur, la mort et les viols massifs de femmes et d’enfants, essentiellement dans la partie Est.

L’ampleur et la cruauté des crimes atroces et barbares perpétrés dans cette région de l’Afrique centrale ne devraient pas rester impunis, si l’on veut réellement aider ce pays à rétablir une paix durable.

À propos, il est vrai qu’il revient fondamentalement à l’État, en premier, de tout mettre en œuvre pour protéger ses citoyens, avec un système de justice pénal qui assure la sécurité publique en protégeant la population contre ceux qui enfreignent la loi. Mais quand on sait le dysfonctionnement de la justice congolaise et son impuissance à dire le droit ; quand on connaît que le manque de volonté manifeste des autorités d’engager des poursuites contre les vrais criminels et autres commanditaires, il y a lieu de croire que seule une justice internationale peut agir efficacement pour suppléer au manquement de l’État qui ne respecte pas ses obligations internationales de poursuivre et traduire en justice toute personne présumée responsable de crimes indescriptibles et proscrits par les Conventions internationales.

En effet, nous sommes de ceux qui pensent que la communauté internationale a le devoir d’établir une justice internationale compétente et habilitée à poursuivre et juger toutes les personnes qui se sont rendues coupables de violations graves du droit international humanitaire en RDC. Sinon, la culture de l’impunité va demeurer encore pour longtemps dans ce pays.

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Que peut faire le Canada ?

Comme a dit le ministre Harjit S. Sajjan : « Le Canada accorde beaucoup d’importance aux relations riches et étroites qu’il entretient avec ses partenaires africains et reconnaît l’importance d’une forte voix africaine pour débattre des questions relatives à la paix et la sécurité mondiales. »

Lire aussi : Canada-Afrique : Justin Trudeau va-t-il offrir une perspective nouvelle?

La recherche d’une solution pour une paix durable en RDC repose notamment sur l’établissement d’un Tribunal pénal international pour ce pays, à l’instar du TPI pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda que Mme Arbour connait parfaitement bien pour avoir été la Procureure. L’instauration d’un TPI ad hoc pour le Congo contribueraient non seulement à dissuader les criminels de commettre d’autres crimes, mais également à rendre justice aux millions des victimes de la tragédie congolaise. À défaut d’un TPI ad hoc à l’image de l’ex-Yougoslavie ou du Rwanda, il serait nécessaire d’envisager d’autres formes de justice internationalisée à l’image de la Sierra Leone, du Cambodge ou du Liban. La mise en place d’un tel Tribunal s’inscrit parfaitement dans la poursuite des objectifs du Conseil de sécurité en faveur de la paix et de la sécurité internationale.

Le Canada peut donc exiger au Conseil de sécurité de mettre sur pied un TPI ad hoc pour la RDC. Car, s’investir dans la mission de maintien et de rétablissement de la paix en RDC, sans investir davantage dans l’établissement d’une justice indépendante, d’une démocratie et d’un État de droit, ne peut procurer une paix durable.


Pourquoi Denis Sassou Nguesso s’invite-t-il au dialogue en RDC ?

Il y a un proverbe africain qui dit : « Quand la case de ton voisin brûle, hâtes toi de l’aider à éteindre le feu de peur que celui-ci ne s’attaque à la tienne. »

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À moins de cinq mois de la tenue des élections présidentielles et législatives en République démocratique du Congo (RDC), conformément à la Constitution, des signes très inquiétants donnent à penser que le pays est vraisemblablement assis sur un volcan qui couve et prêt à exploser à tout moment.

Les acteurs de la vie politique congolaise, toutes tendances politiques confondues, savent pertinemment bien que cet exercice démocratique appelé « élection » est devenu quasiment intenable du point de vue logistique. Et que, seul le dialogue national franc entre toutes les parties prenantes afin de trouver un accord politique, s’avère être l’alternative possible pour traverser sans heurt cette période de turbulence et aller vers des bonnes élections libres et transparentes. Mais à cause des tergiversations des uns et des autres, conséquentes à la méfiance qui règne entre eux dans les pourparlers en vue d’un dialogue national, l’on assiste à un jeu de ping-pong qui n’en finit pas.

Les jours avancent et le dialogue politique tant souhaité, aussi bien par la communauté nationale et internationale, pour baliser le chemin vers des élections apaisées, tarde à se tenir. Un véritable casse-tête pour le facilitateur désigné par l’Union africaine, Edem Kodjo, qui s’est embourbé dans des tractations sans fin, en voulant convaincre à tout prix les acteurs socio-politiques congolais à participer au dialogue.

C’est dans ce contexte que le président Denis Sassou Nguesso, qui connait très bien les acteurs socio-politiques de l’autre côté du fleuve Congo, s’est invité volontairement notamment en offrant ses bons offices, et en invitant les différentes parties prenantes dans son fief d’Oyo pour rechercher ensemble avec eux, les voies et moyens propices à un règlement anticiper de la crise imminente en RDC. Mais les observateurs avisés ne peuvent imaginer un seul instant que la motivation première de Denis Sassou Nguesso soit uniquement d’aider son grand voisin à se sortir du pétrin.

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Qu’est-ce qui motive le président Sassou Nguesso en RDC ?

Deux raisons majeures pourraient bien expliquer pourquoi le président du Congo-Brazza serait très intéressé aux tractations politiques en RDC. En effet, il éviterait à tout prix qu’il y ait de heurts qui pourraient, par effet domino, déstabiliser son propre pouvoir.

Première raison majeure, il est important de rappeler que Brazzaville et Kinshasa sont les deux villes capitales les plus rapprochées au monde. Près de 5 km seulement séparent les deux rives du majestueux fleuve Congo. Les deux agglomérations transfrontalières ont chacune une population d’environ 10 millions d’habitants à Kinshasa et 2 millions à Brazzaville. Les deux pays ne partagent pas seulement le même nom (Congo), mais les deux peuples sont liés par un destin commun. Quand Kinshasa éternue, Brazzaville attrape le rhume, et vice-versa.

À chaque fois qu’il y a des troubles politiques, une instabilité majeure ou un conflit armé dans un côté du fleuve Congo, le premier réflexe de la population concernée, en commença par les dignitaires et personnalités politiques, est sans doute de traverser de l’autre côté du fleuve pour y trouver refuge ou transiter. Mais Brazzaville ne saurait absorber un afflux massif de la population kinoise sans en subir les conséquences humanitaires et surtout les contrecoups politico-sécuritaires qu’entraînent souvent les flux important de réfugiés.

Vingt-deux ans après, l’histoire du génocide rwandais de 1994 est encore fraiche dans la mémoire, par le nombre considérable de pertes en vies humaines enregistrées en RDC, pays d’accueil, et la grande souffrance que les populations locales continuent d’endurer jusqu’à ces jours. Ce génocide qui déclencha l’exode d’environ 2 millions de réfugiés rwandais en RDC, exporta en même temps une guerre qui finira par chasser le président Mobutu du pouvoir, par des rebelles de l’Alliance des Forces démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) soutenues essentiellement par le Rwanda et l’Ouganda.

Deuxième raison majeure, après une réélection sévèrement critiquée à cause des graves irrégularités enregistrées dans le scrutin de mars dernier, le Président Sassou Nguesso, apparemment mis sur la touche diplomatiquement, veut redorer son image sur la scène internationale.

En effet, sachant parfaitement bien que le regard de la communauté internationale – qui investit d’énormes moyens financiers, humains et matériels pour restaurer un semblant de paix -, est actuellement braqué sur la RDC qui s’apprête à vivre un moment historique avec la passation de pouvoir pacifique, Denis Sassou Nguesso veut saisir cette opportunité et est prêt à offrir son aide pour trouver rapidement un compromis politique, si jamais les élections présidentielles ne se tiennent pas telle que prévue dans la Constitution.

En tant que plus proche voisin, le président Sassou Nguesso a l’avantage de connaitre mieux que quiconque les réalités congolaises de la rive gauche du fleuve et ses hommes politiques. Il mesure bien la situation dans laquelle se trouve ce pays et a conscience de la dangerosité du volcan qui couve actuellement chez son voisin. Raison pour laquelle il tente visiblement de désamorcer cette crise imminente, en cherchant à ramener les Congolais autour d’une table pour dialoguer.

C’est ainsi qu’on observe de va-et-vient de tout le gratin politique de Kinshasa, d’opposition comme du pouvoir, chez le doyen d’Afrique centrale, Denis Sassou Nguesso, afin d’explorer les pistes devant les amener à un dialogue sans exclusive, pour préparer des élections apaisées. Le premier à ouvrir le bal était le président Joseph Kabila qui était reçu le 27 juin dernier, suivi du facilitateur désigné par l’Union africaine, Edem Kodjo. Depuis, c’est un ballet diplomatique en coulisses qui s’enchaîne.

Comme on peut le deviner, au-delà de l’exercice des bons offices, le président Sassou Nguesso, en homme politique suffisamment averti et prévoyant les conséquences néfastes qui pourront découler de la dégradation de l’environnement politico-sécuritaire en RDC, notamment à Kinshasa la capitale, évite absolument qu’une telle situation ne vienne fragiliser le climat politique déjà tendu dans son pays depuis les dernières élections.

Tant mieux si cette initiative peut également aider à solutionner le problème de la RDC, mais l’implication des autorités de la république sœur du Congo est purement une question de sécurité nationale. Elle sert d’abord l’intérêt national du Congo-Brazza, la préservation de sa sécurité intérieure et la protection du pouvoir établi.


De visite au Canada, Barack Obama plaide pour un monde plus juste

À cinq mois des élections présidentielles de novembre prochain, qui signeront la fin du deuxième et dernier mandat du 44e président des États-Unis, Barack Obama, celui-ci était en visite officielle au Canada pour participer au Sommet des leaders nord-américains dit « les Trois Amigos » qui s’est déroulé le 29 juin à Ottawa. Un Sommet qui a réuni les présidents Barack Obama des États-Unis, Enrique Peña Nieto du Mexique et le premier ministre canadien Justin Trudeau.

Lors de cette deuxième et probablement sa dernière visite officielle au Canada, à titre de président américain bien entendu, Barack Obama a prononcé, devant la Chambre des communes bondée de parlementaires et plusieurs notables canadiens triés sur le volet, un discours historique et percutant qui restera longtemps gravé dans la mémoire collective des Canadiens.

Reconnu pour ses talents d’orateur et ardent défenseur des droits humains, le président Obama a tout d’abord commencé par vanter d’excellentes relations de bon voisinage et de coopération économique entre les deux pays, et les bienfaits de la mondialisation et du libre-échange qui doivent normalement bénéficier à l’ensemble de l’humanité et réduire les inégalités sociales. « Si nos démocraties semblent incapables d’assurer une croissance pour tous, les gens réagiront avec colère », a toutefois prévenu le président américain.

Le président Obama a ensuite énuméré un certain nombre des défis que doivent relever la nouvelle génération des dirigeants politiques mondiaux pour assurer un monde meilleur, plus juste et plus équitable. « Peu importe qui nous sommes, peu importe notre nom de famille ou la foi que nous pratiquons, ici nous pouvons faire de nos vies ce que nous voulons. » a souligné le président américain.

Barack Obama a fait valoir que ce qui unit le Canada et les États-Unis, c’est également les valeurs profondes que partagent les deux pays. Il a rappelé certaines valeurs communes que défendent les Américains et les Canadiens, notamment la primauté du droit, le respect de l’État de droit, de la démocratie et des droits de la personne ; la tolérance et le respect mutuels de nos différences culturelles et religieuses ; l’égalité de chance et la non-discrimination, qui sont en fait des valeurs universelles que nous devons continuer à préserver et à promouvoir activement partout à travers le monde et de veiller à ce que personne ne soit privée de ses droits fondamentaux.

Nous devons nous opposer à la diffamation et à la haine adressées contre ceux qui ont une apparence ou une foi différente. C’est notre obligation. C’est ce qui fait que l’Amérique est extraordinaire. C’est ce qui fait que le Canada est extraordinaire, a souligné le président.

Le président Obama s’est également attardé longuement sur l’urgence d’agir contre les changements climatiques qu’il considère comme un enjeu urgent de sécurité nationale. « Le changement climatique n’est plus une abstraction. Ce n’est plus un problème que nous pouvons remettre à demain », a-t-il affirmé devant le Parlement canadien.

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Le président Obama a enfin rendu un vibrant hommage au premier ministre Trudeau pour ses politiques publiques progressistes et inclusives qui reflètent les valeurs canadiennes et s’inspirent de justice sociale, d’égalité et qui sont destinées à bénéficier à l’ensemble des Canadiens. Il a adressé un message clair qui apparaît comme une sorte de testament politique qu’il lègue à Justin Trudeau : « Mon mandat au pouvoir tire à sa fin, mais je sais que le Canada et le monde profiteront de ton leadership pour des années à venir ».

Le président Obama a demandé aux Canadiens de ne pas céder aux charmes de ceux qui fondent leur discours sur l’intolérance, la haine, le racisme et la xénophobie. Il a tenu à rappeler que les Canadiens et les Américains ont tous un jour été des étrangers. Le Canada doit savoir renforcer son rôle de leadership, notamment à l’OTAN, et affirmer haut et fort les valeurs canadiennes sur la scène mondiale.

En effet, Le président Obama qui achève ses huit années de pouvoir en décembre prochain, ne peut plus jamais briguer un troisième mandat. Étant donné que le XXIIe amendement de la Constitution américaine fixe à deux la limite du nombre de mandats que peut exercer un président des États-Unis.

Le principe de l’alternance, de transfert pacifique du pouvoir, et l’organisation d’élections libres, transparentes et régulières, conformément à la Constitution, constituent la base même d’un processus politique ouvert et transparent dans un État de droit. Le respect strict de la Constitution est primordial pour tout État démocratique et devrait donc être une règle que nul ne peut déroger pour rien au monde. En effet, il y a toujours une vie après le pouvoir qui peut s’avérer beaucoup plus paisible, lorsque l’on a assumé convenablement ses responsabilités publiques.


L’adhésion de l’Ontario à l’OIF

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Avec plus de 600 000 Francophones, selon les dernières données du recensement fait par Statistique Canada en 2011, l’Ontario est la province qui compte, en nombre absolu, la plus importante communauté francophone au Canada, après le Québec. Une population franco-ontarienne très diversifiée, à l’image même de l’ensemble de la population ontarienne issue d’origines ethniques très différentes.

En effet, tout comme le Québec et le Nouveau-Brunswick – deux provinces canadiennes membres effectifs de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) –, la province de l’Ontario a toujours voulu également devenir membre de plein droit de cette organisation intergouvernementale, participer pleinement aux instances de l’OIF et prendre part aux votes, ou, en d’autres termes, participer au Sommet de la Francophonie; aux Conférences ministérielles sectorielles; au Conseil permanent de la Francophonie; et aux différentes Commissions de l’OIF.

Cependant, durant la dernière décennie de règne du gouvernement conservateur à Ottawa, l’Ontario n’a pu obtenir l’appui nécessaire pour soumettre sa demande d’adhésion à l’Assemblée générale de l’OIF. Toutes les démarches qui ont été entreprises dans ce sens se sont butées à un refus catégorique de la part du fédéral. Maintenant que le gouvernement a changé de mains à Ottawa, et que ceux qui autrefois portaient ombrage ne sont plus aux commandes, il y a lieu d’espérer que l’Ontario peut finalement intégrer l’OIF comme membre de plein droit.

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Les astres sont bien alignés en faveur de l’Ontario

Malgré le départ de Madeleine Meilleur, anciennement ministre déléguée aux Affaires francophones du gouvernement de l’Ontario, et figure emblématique de la francophonie ontarienne qui a milité activement pour l’adhésion de sa province à l’OIF, la nomination Marie-France Lalonde, députée d’Ottawa-Orléans, rassure et montre la grande importance que la première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne, attache à la poursuite sans discontinuité de cette démarche d’adhésion à l’OIF.

Les Franco-Ontariens ont accueilli avec beaucoup d’enthousiaste cette nomination. Mme Lalonde, qui fut précédemment Adjointe parlementaire aux Affaires francophones, est très au courant de l’évolution de ce dossier. Elle est également consciente que faire partie d’une telle organisation composée de 80 États et gouvernements issus de cinq continents représente, pour une entité régionale, des opportunités d’affaires intéressantes pour les opérateurs économiques.

De plus, la présence à l’OIF de Michaëlle Jean, ex-gouverneure générale du Canada et résidente de l’Ontario, peut s’avérer opportun pour un aboutissement rapide de cette démarche. En effet, elle, qui avait axé toute sa campagne électorale sur la francophonie économique, y verrait certainement d’un bon œil l’adhésion de l’Ontario, dans la mesure où celle-ci apporterait un coup de pouce financier supplémentaire pour matérialiser ce vaste chantier qu’est la francophonie économique.

Définitivement, les astres semblent bien alignés, aussi bien à Queen’s Park, à Ottawa, qu’à Paris, pour croire à la possibilité d’une adhésion de l’Ontario qui va certainement consolider davantage l’influence du Canada au sein de l’OIF.

Pour rappel, la contribution au budget de l’OIF est calculée en fonction du PIB de chaque État et gouvernement membre. Si cette adhésion se concrétisait, l’Ontario deviendrait le deuxième gouvernement canadien, après le fédéral, qui apporterait une contribution substantielle à l’OIF.


Élection présidentielle en RDC : la majorité sort sa dernière carte pour se maintenir au pouvoir

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La prochaine élection présidentielle, prévue fin novembre en République démocratique du Congo (RDC), est suivie avec beaucoup d’attention tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. La communauté internationale – qui soutient financièrement le processus électoral en RDC –  n’a cessé de demander la publication du calendrier électoral global pour pouvoir apporter son soutien.

Alors que tout le monde se mobilise pour réunir les conditions nécessaires afin de permettre la tenue de scrutins libres et transparents qui garantissent une alternance pacifique au pouvoir en décembre prochain (dans le respect de la Constitution), la famille politique du chef de l’État sortant (Joseph Kabila) met toutes les batteries en marche pour réussir son coup de force de maintenir ce dernier au pouvoir, cette fois-ci, en agitant la possibilité d’un référendum.

Le Secrétaire Général du Parti populaire pour la reconstruction et la démocratie (PPRD), Henri Mova Sakanyi, la formation politique du président Kabila, a évoqué lors d’une manifestation de son parti le samedi 4 juin dernier, la possibilité d’un référendum pour réviser la Constitution et permettre à Joseph Kabila de se présenter pour un troisième mandat. « Le peuple congolais est souverain et sa volonté ne souffre d’aucune contestation. Attention, un jour il risque de dire allons au référendum … Si le peuple décide de son référendum, il va le faire: le peuple congolais de Brazzaville l’a fait, le peuple rwandais l’a fait », avait-il lancé au public.

Le référendum n’est pas mauvais en soi, au contraire. C’est un instrument de la démocratie directe et une procédure de vote permettant de consulter directement le corps électoral d’un État ou d’une collectivité locale à se prononcer sur une proposition précise, de nature législative ou constitutionnelle, initiée soit par le pouvoir exécutif soit par les citoyens, selon les modalités définies par la loi. En vertu de l’article 218 de la Constitution congolaise, une telle initiative de révision constitutionnelle appartient concurremment au président de la république, au gouvernement, aux deux chambres du Parlement, et au peuple congolais qui s’exprime dans une pétition de 100.000 personnes adressée au Parlement. Mais la révision de la Constitution ne peut intervenir que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvé(e) par référendum.

Mais la Constitution interdit au chef de l’État sortant de se représenter pour un troisième mandat. L’article 220 stipule très clairement que « la forme républicaine de l’État, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical, ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle. »

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Est-il possible d’organiser un référendum quand on ne sait pas organiser une élection présidentielle ?

Qu’il s’agisse d’un référendum ou d’une élection, ces deux moyens sont les différents modes de scrutin qui consistent à convoquer le corps électoral pour se prononcer. La distinction entre les deux réside dans le fait que : le premier est une forme de démocratie directe tandis que le second est une forme de démocratie indirecte ou représentative. Dans le cadre d’un référendum, le corps électoral est appelé à répondre par oui ou par non à une question bien précise, alors que dans une élection, il est appelé à choisir ses représentants.

Le référendum tout comme les élections présidentielle, législatives, sénatoriales et provinciales sont organisés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Le président de la CENI pour les élections à venir en RDC, Corneille Nangaa, dit vouloir enrôler entre 42 et 52 millions d’électeurs. Il avait ouvertement exprimé son incapacité d’organiser des élections libres, transparentes et crédibles en novembre prochain sans avoir révisé le fichier électoral. Cette opération devrait, selon lui, durer plus ou moins 17 mois. De plus, pour enclencher le processus de révision du fichier électoral, la CENI a besoin d’une loi électorale à jour et d’une loi sur l’enrôlement des électeurs qui tardent encore à être révisées par le Parlement.

La question que l’on peut naturellement se poser aujourd’hui est celle de savoir si l’idée d’organiser un référendum est réaliste et faisable ? Si oui, la CENI sera-t-elle en mesure d’organiser un référendum d’ici la fin du mandat du président Kabila ? Elle qui dit n’avoir pas les moyens financiers et logistiques pour organiser les élections présidentielle et législatives dans le délai constitutionnel. Le gouvernement congolais aurait-il finalement trouvé des moyens conséquents pour permettre à la CENI de tenir le référendum ? Ce même gouvernement qui n’a pas pu lui en donner pour organiser l’élection présidentielle telle que prévue dans la Constitution. Les partenaires bilatéraux et multilatéraux vont-ils s’embarquer dans ce processus à haut risque, en contribuant financièrement à l’organisation du référendum ? Tant de questions essentielles qui restent encore sans réponses …

Ce qui est vrai, c’est que la situation politique reste encore très volatile en RDC. L’avenir semble incertain et sombre comme la nuit. À cette allure, si tous les acteurs socio-politiques concernés ne prennent pas conscience de la situation (en privilégiant l’intérêt supérieur de la nation), il y a un vrai risque de voir le pays s’enfoncer dans une spirale infernale qui le mènera à nouveau dans les conflits violents et affrontements armés avec leurs lots de violations massives des droits humains.

Si la communauté internationale laisse la RDC retourner à la case départ, tous efforts déployés ces vingt dernières années pour améliorer la situation dans ce grand pays situé au coeur de l’Afrique auront été futiles.

IKN1Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue


De Paris à Marrakech : le Maroc prêt à relever le défi du changement climatique

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Le Royaume du Maroc va accueillir, pour la seconde fois, la vingt-deuxième session de la Conférence des parties (COP22) de la Convention-cadre des Nations unies  sur le changement climatique (CCNUCC) du 7 au 18 novembre 2016, à Marrakech. Une rencontre annuelle pour faire un état des lieux des avancées réalisées, depuis l’accord de Paris, dans la lutte contre les changements climatiques. Parmi les axes prioritaires autour desquels s’articulera l’action du Royaume du Maroc, il y a en bonne place la mise en application de l’accord de Paris et l’appui aux pays en développement et vulnérables, notamment les petits États insulaires.

Pour rappel, le Maroc en 2001 et l’Afrique du Sud en 2011 sont les deux pays africains qui ont déjà accueilli une conférence des Nations unies sur le changement climatique. Les accords issus de la septième session de la Conférence des parties (COP7) de Marrakech avaient non seulement défini les règles d’application du Protocole de Kyoto, mais aussi permis de mettre en place de nouveaux instruments de financement et de planification en vue de l’adaptation aux changements climatiques. Enfin, ils ont permis d’établir un cadre pour le transfert de technologies.

Une année après la réussite de la COP21 de Paris qui a abouti à un accord historique pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), le Maroc met les bouchés doubles pour accueillir de nouveau, quinze ans après, la COP22 dans la même ville de Marrakech. Le souverain du royaume chérifien, Sa Majesté le Roi Mohammed VI, a chargé les différents ministères de son gouvernement à concourir à une bonne préparation de cette conférence mondiale sur le climat, pour en assurer un succès retentissant.

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C’est dans ce cadre qu’un colloque international, sous le thème « Migrations climatiques : tendances et enjeux », a été organisé le vendredi 20 mai 2016 au Centre d’accueil et de conférences du ministère de l’équipement à Rabat.

Inclure la question des migrations climatiques à l’agenda international

La question des migrations climatiques préoccupe au plus haut point le Maroc qui est tout à la fois un pays d’émigration, d’immigration et de transit pour les migrants qui cherchent à gagner le territoire européen. Le gouvernement du royaume chérifien tient à saisir l’occasion qui lui est offerte d’accueillir de nouveau la COP22 pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la nécessité de protéger les droits des personnes qui sont forcées de quitter temporairement ou définitivement leur milieu de vie habituel à cause des effets du changement climatique.

De ce fait, le Maroc voudrait s’engouffrer dans la brèche qui a été ainsi ouverte dans le préambule de l’accord de Paris qui consacre la création d’une Task force pour faire face à la mobilité humaine, pour intégrer la question des migrations climatiques à l’agenda international. Une question qui jamais auparavant n’a figuré en une aussi bonne place sur l’agenda international que voudrait faire le Maroc.

Ainsi, en réunissant les experts et éminents spécialistes dans le domaine des migrations climatiques venus d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Afrique pour un colloque international, le pouvoir organisateur de la conférence de Marrakech a bien voulu, par l’entremise du ministère en charge des Marocains résidant à l’étranger et des Affaires de la migration, prendre le pouls de différentes opinions au sujet du lien direct ou indirect entre les catastrophes naturelles dues aux changements climatiques et les flux migratoires que l’on observe ces dernières années, pour développer son argumentaire face à cette problématique, lors de la COP22.

La diaspora marocaine met la main à la pâte pour le succès de la COP22

Le gouvernement marocain tient à mobiliser le plus grand nombre d’États et d’organisations de la société civile à participer activement à la COP22. Il a également voulu associer formellement les Marocains issus de la diaspora, en leur offrant un espace de réflexion et collaboration pour assurer un franc succès à cet événement planétaire. Ils ont répondu présent et sont venus de tous les continents pour participer à ce colloque. Chacun, à sa manière, a apporté un éclairage particulier au mieux de ses compétences pour aider leur pays à tirer le meilleur parti des avantages de la tenue d’une telle conférence mondiale sur le territoire national.

La présence du ministre chargé des Marocains résidant à l’étranger et des Affaires de la migration, Monsieur Anis Birrou et de celui des Affaires étrangères et de la coopération, et président en exercice du comité de pilotage de la COP22, Monsieur Salaheddine Mezouar, à ce colloque accompagnés du Commissaire et du président du comité scientifique de la COP22, était un signe évident que le gouvernement marocain ne veut rien laisser au hasard pour le succès de cette conférence.

Aussi bien dans les discours introductifs du ministre Mezouar que de celui du ministre Birrou, tous ont déclaré que la COP22 sera celle de l’action et de la mise en œuvre des résolutions de la COP21. Il s’agit bien entendu d’assurer le développement et le transfert Nord-Sud, voire Sud-Sud des technologies propres et novatrices en matière d’adaptation et d’atténuation aux effets du changement climatique; de crédibiliser et renforcer la confiance des pays en développement et vulnérables qui payent déjà le plus lourd tribut, tant économiquement, socialement qu’écologiquement; de mobiliser les gouvernements, les acteurs non étatiques et la société civile dans le cadre du Plan d’actions Lima-Paris consacré à l’Accord de Paris; de mobiliser et encourager le plus grand nombre des États parties à ratifier l’accord de Paris; et surtout de mobiliser les États à honorer leurs engagements financiers, notamment les 100 milliards de dollars promis à la COP21 d’ici 2020.

Le Maroc qui ambitionne d’exercer un leadership stratégique dans la lutte contre le changement climatique en Afrique et jouer le rôle pivot pour faciliter le partenariat triangulaire Nord-Sud-Sud, voudrait attirer le plus d’investissements vers le continent africain, qui ne parvient toujours pas à capter autant de financements du Fonds vert pour le climat, faute de projets bancables. Il veut également accompagner les pays en développement dans la préparation de leurs plans nationaux d’adaptation et apporter une assistance technique aux pays vulnérables dans la préparation de leurs projets afin d’accéder facilement au financement.

En effet, si la COP20 de Lima était pour négocier un accord contraignant, la COP21 de Paris était celle de finalisation et d’adoption de cet accord. Espérons, en définitive, que la COP22 de Marrakech sera bien celle de l’action et de la mise en œuvre de cet accord conclu à Paris. Une COP22 devra faciliter l’adoption des outils opérationnels dans la ligne droite du plan d’actions Lima-Paris-Marrakech.

DSC03068888 (1)Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue


Pourquoi Moïse Katumbi fait-il peur à Joseph Kabila?

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À l’approche imminente de la fin du deuxième et dernier mandat de Joseph Kabila en République démocratique du Congo (RDC) et de la passation du pouvoir en décembre 2016 au nouveau président élu, les prétendants à la succession fourbissent leurs armes et se bousculent au portillon en vue d’une bataille politique attendue avec impatience, théoriquement le 27 novembre 2016. C’est en prévision de cette bataille politique que l’ancien gouverneur de la riche province du Katanga, Moïse Katumbi a annoncé officiellement le mercredi 4 mai 2016, soit six mois plus tôt que prévu, sa candidature à l’élection présidentielle en RDC.

Le porte-parole du gouvernement congolais qui opine que « le créateur ne peut pas avoir peur de la créature… Joseph Kabila ne peut avoir peur de Katumbi qu’il a fabriqué de ses mains et à qui il a donné tous les moyens pour qu’il rayonne aujourd’hui », a estimé que cette annonce était prématurée, dans la mesure où les règles de jeu ne seraient pas encore fixées par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui ne dispose pas jusqu’à présent d’un fichier électoral fiable, ni même un calendrier aussi prévisible que possible.

Élection dans le délai constitutionnel est-ce possible?

Aucun observateur sérieux de la politique congolaise ne peut s’avancer sur une telle affirmation. Ce qui est sûr et certain est que la classe politique congolaise, toute tendance confondue, mais également la communauté internationale qui apporte son soutien financier, sont toutes conscientes que même avec toutes les bonnes volontés du monde, il est techniquement et matériellement improbable d’organiser des bonnes élections présidentielles justes, transparentes et apaisées dans le temps qu’il nous reste.

En plus du temps matériel qui ferait défaut pour organiser les élections dans le délai prévu, il y a ce que j’appelle « un vrai faux problème du futur politique de Joseph Kabila » qui, depuis plus d’année, anime le débat politique en RDC. Comme si la Constitution était muette à ce sujet, il est difficile de mettre fin au débat sur la candidature de Joseph Kabila et à l’inquiétude que cela suscite auprès de l’opinion publique congolaise qui se demande si le président sortant allait se représenter pour un troisième mandat, en violation de la Constitution; lui qui totalise déjà 15 ans d’exercice du pouvoir.

En effet, même si l’intéressé ne s’est jamais prononcé ouvertement à ce sujet, il y a des signes qui ne trompent pas. Tous ceux, y compris dans sa famille politique, qui s’opposent publiquement à son éventuel troisième mandat savent pertinemment bien ce qui les attend. L’exemple le plus patent est celui de responsables des sept partis politiques de la majorité présidentielle, dénommé « G7 », signataires de la lettre adressée au président Kabila en septembre 2015. Ils ont tous été révoqué dans les différentes fonctions qu’ils occupaient au sein du gouvernement, dans les entreprises publiques et au sein du Parlement. Ce qui, bien évidemment, conforte les pressentiments de ceux qui soupçonnent le président Kabila de vouloir s’accrocher absolument au pouvoir au-delà du délai constitutionnel. Son mutisme à ce sujet nourrit à la fois la crainte, la méfiance et l’intransigeance de la classe politique, et débouche finalement sur une crise politique qui ne dit pas son nom, mais qui paralyse pratiquement toute organisation apaisée de prochaines élections présidentielles et législatives.

Pour clarifier une fois pour toute cette situation et trouver un compromis nécessaire aux préoccupations majeures, des uns et des autres, qui minent le processus électoral, la communauté internationale et une frange majoritaire de la classe politique congolaise ont appelé vivement au dialogue politique pour baliser le processus électoral et tenir le scrutin présidentiel crédible et apaisé. Mais force est de constater que depuis sa désignation, bientôt deux mois passés, comme médiateur international par l’Union africaine, avec le soutien des Nations unies et de l’Organisation internationale de la Francophonie, pour lancer le processus de dialogue politique, le Togolais Edem Kodjo ne parvient visiblement pas à nager convenablement dans le marigot congolais plein des caïmans. M. Kodjo peine à constituer le bureau du comité préparatoire de ce forum, alors que les jours qui restent avant les élections se comptent sur le bout des doigts.

Avec un tel retard, on se demande si le diplomate togolais va-t-il réellement tenir sa parole? Lui qui, dans une de ses déclarations, s’était engagé à respecter la Constitution de la RDC ainsi que les délais fixés pour l’élection présidentielle. Tout compte fait, aucun observateur averti ne pouvait s’en douter de l’issue catastrophique d’une telle manœuvre suspicieuse à la veille des échéances électorales importantes. Comme qui dirait « la diplomatie est la dentelle de l’hypocrisie ».

Pourquoi Moïse Katumbi fait-il peur?

Le bilan de 15 ans au pouvoir de Joseph Kabila est loin d’être reluisant quand il s’agit de l’amélioration du vécu quotidien de la grande majorité de la population congolaise. Les différents gouvernements constitués n’ont certainement pas contribué à améliorer la situation du Congolais lambda. Il ne fait donc aucun doute que le candidat de la majorité présidentielle ait du mal à présenter des réalisations concrètes issues des promesses faites et des attentes légitimes du peuple congolais, tant sur le plan sécuritaire, économique et social.

De plus, les prétendants à la magistrature suprême ont finalement compris que pour maximiser leur chance, advenant la candidature du président sortant, en violation de la Constitution, la seule chance pour l’opposition politique, dans une élection à tour unique, est celui de fédérer leurs forces autour de l’un d’entre eux qui réunit suffisamment d’atouts pour battre Joseph Kabila. En effet, une campagne présidentielle n’est pas qu’un bon programme, c’est un ballet complexe mettant en jeu simultanément plusieurs facteurs, dont les moyens financiers, matériels et humains. De plus, une bonne équipe de campagne est le premier élément essentiel sur lequel peut reposer une victoire.

À cet effet et comme nous l’avions déjà écrit autrefois, Moïse Katumbi présente un avantage comparatif du fait qu’il dispose des moyens matériels et financiers nécessaires pour mener une campagne électorale sur l’ensemble du territoire congolais, grand comme un continent, sans infrastructures de transport. À titre d’exemple malheureux, aux élections de 2006 et 2011, la plupart des candidats ont fait campagne seulement à Kinshasa et dans leurs provinces respectives, faute de moyen de transport pour couvrir l’ensemble du territoire national.

Un autre fait est la popularité de M. Katumbi qui faisait certainement peur à Joseph Kabila même pendant qu’il était gouverneur de la province du Katanga. Le capital de sympathie dont jouit Moïse Katumbi auprès de la population congolaise et particulièrement de la jeunesse congolaise n’est pas dû à sa fortune, mais bien à son engagement sportif. En effet, on a beau dire que le sport n’a rien à voir avec la politique, il reste que le sport n’est pas qu’un jeu, c’est un enjeu. Patron d’un grand club de football africain qui fait la fierté du Congo, Moïse Katumbi peut bien se servir encore des exploits sportifs de son équipe de football comme étalon de success-story pour courtiser l’électorat jeune, un groupe d’électeurs le plus nombreux en RDC. Ceux qui pensent que sport et politique ne se mélangent pas font de l’aveuglement volontaire.

Enfin, la RDC n’étant pas n’importe quel pays d’Afrique, plusieurs groupes d’intérêts financiers ont un regard intéressé sur ce qui se passe dans ce pays. Ces groupes d’intérêts ont des relais dans les arcanes du pouvoir politique de leurs pays. Ceci dit, il est toujours nécessaire de savoir lire et comprendre tous les faits et gestes des partenaires internationaux et des puissants de ce monde en ce qui concerne les enjeux électoraux en RDC. Moïse Katumbi réussit bien au niveau intérieur à rassembler autour de lui plusieurs partis et regroupements politiques qui soutiennent sa candidature et constituent une force politique dans l’éventualité d’une candidature de Joseph Kabila. Sur le plan extérieur également, en lisant les médias internationaux qui sont souvent les portes voix de leur gouvernement, c’est une candidature qui attire l’attention. Mais M. Katumbi devrait approcher également des gens comme Noel Tshiani Muadiamvita et Freddy Matungulu qui connaissent bien les arcanes des institutions de Bretton Woods, pour l’aider à fignoler son programme économique afin de sortir ce pays, doté d’immenses richesses, de la pauvreté.

Isidore KwandjaIsidore KWANDJA NGEMBO, Politologue


Union africaine : Jean Claude de l’Estrac possible successeur de Nkosazana Dlamini-Zuma?

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La présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, ne briguera pas un second mandat. Elle quitte son poste en juillet 2016, au terme d’un seul mandat de quatre ans. Un des piliers du Congrès national africain (ANC), parti cher à Nelson Mandela, Mme Dlamini-Zuma est pressentie pour prendre la direction de ce parti lors du prochain congrès en 2017, pour éventuellement succéder à son ex-mari, Jacob Zuma, à la présidence de l’Afrique du sud.

Pour organiser sa succession à l’UA, une date butoir avait été fixée au 31 mars 2016 pour la présentation de candidatures. La liste définitive des candidats présélectionnés sera dévoilée ce mois de mai et le choix du nouveau président de la Commission de l’UA sera fait en juillet prochain, lors du 27e sommet de l’UA qui se tiendra à Kigali au Rwanda.

Parmi les candidats sérieux qui pourraient probablement succéder à Mme Dlamini-Zuma, on cite de plus en plus le nom du secrétaire général de la Commission de l’océan indien, Jean Claude de L’Estrac et celui de la ministre des Affaires étrangères du Botswana, Pelonomi Venson-Moitoi, tous deux issus de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) comme Mme Dlamini-Zuma. Il y a aussi le nom du ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra et celui de l’ancien ministre sénégalais des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio.

Les pays de la SADC, qui avaient bataillé fort pour arracher la présidente de Commission de l’Union africaine, ne sont pas prêts de lâcher le morceau, et sont décidés de conserver coûte que coûte ce poste, du moins pour un second mandat. Ils ont déjà avancé le nom de Mme Venson-Moitoi. Seulement voilà, la ministre botswanaise des Affaires étrangères risque de ne pas faire l’unanimité au sein de la communauté de l’Union Africaine.

On entend des murmures comme quoi, l’Afrique a besoin d’une fille ou un fils qui a démontré d’une vision panafricaniste dans l’exercice de ses fonctions, pour présider à la destinée de l’UA. Le panafricanisme est ici entendu comme une vision politique, économique et socioculturelle d’émancipation des peuples d’Afrique et de la diaspora qui partagent une histoire et une destinée commune et que leur progrès socio-économique est lié à leur unité. Certains disent donc que le Botswana ne serait pas autant panafricaniste pour prendre la direction de l’UA.

Si ces murmures se confirment, il sera difficile pour Mme Venson-Moitoi d’obtenir les votes favorables pour atteindre les 2/3 des États membres afin de succéder à Mme Dlamini-Zuma à l’UA. C’est alors que la candidature de Jean Claude de L’Estrac devient intéressante. L’homme peut rallier, à la fois, les voix des États membres de la SADC qui veulent garder le poste pour un second mandat, les voix des États francophones qui sont majoritaires au sein de l’UA, y compris ceux des États de l’océan indien dont l’intéressé est actuellement leur secrétaire général de la Commission.

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Le Mauricien peut-il compter sur le soutien indéfectible de l’Afrique francophone?

Ancien journaliste, politicien et diplomate chevronné, le Mauricien Jean Claude de L’Estrac a un profil idéal pour succéder à Mme Dlamini-Zuma. Il a été plusieurs fois ministre des Affaires étrangères, du Développement économique et de l’Industrie. On l’a vu en 2014 très combatif, lorsqu’il s’est porté candidat au secrétariat général de la Francophonie. Jean Claude de L’Estrac a voulu service la communauté francophone. Il avait fait une campagne électorale exemplaire, avec un programme méticuleux pour une Francophonie économique. Malheureusement la chance ne lui a pas sourit.

L’homme peut encore faire parler de lui, mais jusqu’à présent, le gouvernement mauricien ne s’est pas encore prononcé pour une telle candidature à l’UA. Certainement qu’il est encore entrain d’évaluer les chances de réussite, après le camouflé de 2014 à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), avec le même candidat, Jean Claude de L’Estrac. Mais comme disait Socrate : « la chute n’est pas un échec. L’échec c’est de rester là où on est tombé. » Les échecs font partie de la vie, et les hommes de convictions ont toujours la capacité de rebondir après un échec et les frustrations qui s’en suivent. La balle est donc dans le camp du gouvernement mauricien. Et je dirai même plus que, M. De L’Estrac peut gagner son pari s’il prend l’initiative, comme en 2014, de mobiliser les soutiens francophones nécessaires.

Le jeu reste grand ouvert pour quiconque peut rallier autour de lui 2/3 de voix des États membres pour diriger l’UA. Les pays francophones qui n’avaient pas réussi à faire réélire le Gabonais Jean Ping pour un second mandat, après plusieurs tours de scrutin et des tractations infructueuses, peuvent néanmoins reprendre la main en misant sur une candidature francophone qui peut recueillir le soutien le plus large possible, même en dehors de l’espace francophone. Une candidature de M. De L’Estrac, si elle est confirmée, pourrait faire l’unanimité tant du côté des pays anglophones que francophones. Il reste à savoir si, cette fois-ci, les pays francophones soutiendront indéfectiblement M. De L’Estrac. Wait and see.

IKN1Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue


Qu’aurait dit Hans Jonas de l’Accord de Paris sur le changement climatique?

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« Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre. » (Hans Jonas)

Ce vendredi 22 avril 2016, Journée internationale de la Terre nourricière, les États partis sont conviés au siège des Nations unies à New-York pour la cérémonie officielle d’ouverture à la signature de l’Accord de Paris sur le climat, première étape du long processus vers la ratification et sa mise en œuvre. Un Accord qui a été adopté au forceps par les 196 États-parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) lors de la COP21 à Paris, en décembre 2015. Il est dit dans cet Accord que tous les États s’engagent à œuvrer, dans la mesure du possible, pour limiter le réchauffement climatique de la planète à deux degrés Celsius.

En effet, les humains ont, pendant longtemps, ignoré sciemment les conséquences qu’avaient leurs activités sur la nature, en prétextant que celle-ci avait les capacités de rétablir ses équilibres fondamentaux. Avec la révolution industrielle, la tendance à l’augmentation de la concentration des émissions de gaz à effet de serre et autres polluants relâchés dans l’atmosphère a commencé à représenter une menace réelle pour la sécurité de l’humanité tout entière.

Actuellement, le réchauffement climatique de la planète dû à l’effet de serre soulève un bon nombre d’inquiétudes ayant trait à la protection de l’environnement pour les générations futures. Aucun pays n’est épargné par les effets néfastes du changement climatique, même si tous ne seront pas touchés de la même façon. Étant entendu que certains sont naturellement plus exposés dépendamment de leur situation géographique et de leur capacité d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques, déterminée par des ressources économiques et technologiques que les États disposent pour répondre aux défis climatiques.

Ainsi, l’ampleur du réchauffement climatique, telle qu’observée par les scientifiques du panel intergouvernemental des Nations unies sur le changement climatique, affectera plus gravement les populations de pays pauvres, impuissantes face à la multiplication des catastrophes naturelles et à leur vulnérabilité aux dommages associés aux effets climatiques.

Depuis la première Conférence des Nations unies sur l’environnement humain qui s’était tenue à Stockholm, en 1972, conférence qui a marqué le début d’une véritable prise de conscience collective de l’importance des problématiques liées au développement durable, les États ont reconnu la nécessité de limiter le réchauffement climatique causé par les activités humaines, et manifesté leur volonté de trouver une solution durable. Il a fallu néanmoins attendre plus de quarante après pour qu’ils aboutissent à un Accord, certes timide mais qui mérite d’être salué.

Maintenant, les espoirs de tous sont que cet Accord soit signé, ratifié et rapidement mis en œuvre pour effectivement stabiliser la concentration de gaz à effet de serre d’origine humaine dans l’atmosphère. Mais il ne faut pas se leurrer, la partie est loin d’être gagnée. Depuis des années, les États continuent de traîner les pieds, en se rejetant les responsabilités en lieu et place de prendre des mesures contraignantes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les intérêts des uns et des autres sont tellement divergeant que la seule signature de l’Accord ne signifie pas grand-chose, si elle n’est pas suivie, par la suite, de la ratification.

À lire aussi:

– COP21: tirer les leçons des échecs précédents

– Changement climatique: l’Afrique attend une juste rétribution

– Paris 2015 : un accord sur climat est-il possible?

C’est ici que nous faisons allusion à l’éthique de responsabilité, telle que proposée par Hans Jonas, et qui devrait inspirer les dirigeants politiques mondiaux afin de surmonter leurs divergences de vues en mettant en application des mesures efficaces, conformément à cet Accord, pour relever les défis actuels du changement climatique.

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Hans Jonas et la responsabilité pour les générations futures

Hans Jonas (1903-1993), philosophe allemand qui a publié « Principe responsabilité » en 1979, propose une réponse à la question de changement climatique, qui pourrait inspirer, encore aujourd’hui, les dirigeants politiques mondiaux à faire preuve de reconnaissance de leur responsabilité et devoir moral de préserver l’environnement pour les générations futures.

En effet, la question de responsabilité a toujours été l’un des points d’achoppement pendant tout le processus de négociations internationales sur climat. H. Jonas a développé un concept de l’heuristique de la peur, entendue comme faculté de connaissance, dans l’espoir de sensibiliser les pouvoirs publics et provoquer leur prise de conscience quant à la responsabilité qu’ils ont face à l’environnement. Une responsabilité à l’égard de l’humanité à venir comme principe directeur qui devrait guider les décisions à prendre pour leur assurer également un environnement meilleur.

« Nous n’avons pas le droit d’hypothéquer l’existence des générations futures à cause de notre simple laisser-aller » Hans Jonas

La peur à laquelle en appelle H. Jonas, est une peur réfléchie qui incite à prendre conscience de la valeur de la planète Terre qui est menacée et d’anticiper les conséquences qui pourraient découler de nos actions présentes. Une peur qui impose une attitude responsable de l’action humaine, qui fait réfléchir aux conséquences de ses actes pour la vie future et qui pousse à agir de telle manière à préserver la planète Terre pour les générations futures. Finalement, une peur qui nous invite tous à assumer notre responsabilité de préserver l’environnement et de prévenir les catastrophes à venir. C’est cette obligation qu’ont les humains de préserver l’humanité de toute disparition, qui est l’impératif catégorique de H. Jonas.

Hans Jonas croit donc que seule la peur peut parvenir à changer le comportement des humains. Sans la peur, il n’y a pas la perception de risque. En effet, si tous les dirigeants de ce monde sont habités par l’anxiété et la peur des conséquences lointaines de leurs décisions actuelles et de l’état dans lequel laisseront-ils la planète Terre aux générations futures, ils devront agir pour le bien l’humanité à venir.

La justice et l’équité climatique exigent non seulement que tous les États, riches et pauvres, soient conscients de leurs actions passées et présentes, de bénéfices que leurs industries « polluantes » ont tirés depuis des années, mais surtout doivent contribuer proportionnellement à leur niveau de développement pour apporter assistance mutuelle, en tenant compte aussi bien des responsabilités des uns et des autres, mais également de leurs capacités respectives à lutter contre les changements climatiques, notamment les pays en développement qui ont besoin d’avoir eux aussi les moyens de s’adapter et atténuer les effets climatiques. C’est comme ça que nous pouvons relever ensemble le défi mondial des changements climatiques.

Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue

 

 


Journée Internationale de la Femme : même combat pour les droits, victoire à deux vitesses

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Depuis 1975, le 08 mars de chaque année, les femmes de partout dans le monde célèbrent la Journée internationale de la femme. Une occasion pour elles de marquer une pause et se remémorer du véritable parcours du combattant qu’elles ont mené pour revendiquer leurs droits légitimes et parvenir à convaincre les États d’adopter différents instruments nationaux et internationaux de lutte contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Chaque année, elles commémorent cette journée en organisant différentes manifestations festives, projections de films, colloques et conférences… pour échanger sur l’évolution des droits des femmes et surtout pour rappeler à l’humanité que malgré les avancées notables dans la reconnaissance des droits des femmes et l’amélioration de leurs conditions de vie, obtenues de haute lutte, rien n’est acquis et coulé définitivement dans le béton. Il s’agit d’un combat de tous les jours que celui de plaider en permanence pour la promotion de l’égalité des droits et des chances entre les hommes et les femmes à travers le monde.

Le thème de la Journée de 2016 est : « Planète 50-50 d’ici 2030 : franchissons le pas pour l’égalité des sexes ». En effet, les Nations unies imaginent un monde en 2030 où toutes les femmes disposeront d’opportunités et de droits égaux. Pour atteindre cet ambitieux objectif, il est demandé aux gouvernements des États membres de prendre des engagements nationaux destinés à combler les inégalités entre les sexes, notamment en prenant des mesures législatives, en élaborant des politiques publiques et surtout en investissant massivement pour franchir ce pas.

L’instrument par excellence que les gouvernements devraient utiliser pour faire avancer l’équité et l’égalité des sexes, et ainsi assurer le respect de leurs engagements internationaux à l’égard de la femme, est la mise en œuvre effective de l’Agenda de 2030 fixant les 17 nouveaux Objectifs de développement durable (ODD) qui favorisent l’autonomisation des femmes.

Il est important de rappeler ici qu’en vertu du droit international en général et des Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits socioéconomiques et culturels, les droits de la femme et l’égalité des sexes relèvent des droits de l’homme qui sont enchâssés dans les différents traités internationaux et contraignants, tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). La grande majorité des États signataires de cette Convention ont également ratifié la Convention (C-100) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) relative à l’égalité de rémunération, entre la main-d’œuvre masculine et féminine pour un travail de valeur égale.

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Même combat, mais victoire à deux vitesses

Si dans les pays développés, les conditions de base essentielles à l’affirmation de l’égalité des droits, notamment en ce qui concerne le droit d’accès à l’éducation, à la formation et à un travail décent, l’accès aux soins de santé adéquats et au choix relatif à la santé reproductive; si des pas de géant ont été franchis dans la voie de l’affirmation des droits civils et politiques, socioéconomiques et culturels des femmes; si des progrès notables ont été accomplis notamment les droits de participer à la prise de décisions démocratiques dans tous les domaines : politique, économique, social et culturel…; il n’en est pas ainsi pour des nombreuses femmes de pays en développement où le statut et la condition de la femme sont parfois en contradiction évidente avec des engagements internationaux souscrits par leurs États.

Indépendamment des difficultés d’ordre économique que cela pose aux pays en développement de réaliser les droits socioéconomiques et culturels de leurs populations en général et des femmes en particulier, il y a également un manque de volonté politique pour faire évoluer concrètement le statut et la condition de la femme sur les plans juridique, politique, socioéconomique et culturel.

En Afrique notamment, des nombreuses femmes sont victimes, quotidiennement, des facteurs socioculturels qui perpétuent les inégalités et la discrimination fondées sur le sexe. Ces facteurs socioculturels couplés avec le manque d’éducation et d’information sur les droits en matière de sexualité et de reproduction notamment, affectent sérieusement les droits des femmes de décider librement si elles veulent ou non avoir des enfants, quand et combien.

Passer des paroles aux actes

Pour franchir le pas de l’égalité des sexes en 2030, il est indispensable que les gouvernements du Nord comme du Sud assument pleinement leurs engagements financiers pour éliminer toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des femmes. En effet, on a souvent comme l’impression qu’il y a manifestement un manque de cohérence entre les engagements pris et les moyens alloués pour leur mise en œuvre effective, et ce, conformément aux dispositions contenues dans les principaux instruments ratifiés par les États, pour réaliser l’égalité entre les femmes et les hommes.

On ne le dira jamais assez, le manque d’éducation et de formation est un obstacle majeur à l’épanouissement de la femme. Il y a une évidence indiscutable que faute d’éducation suffisante, nombreuses femmes sont à la fois victimes de discrimination, de violence fondée sur le sexe et de violation de leurs droits et libertés fondamentaux.

Ce qui nous pousse à croire qu’il y a un lien direct facile à établir entre le manque d’éducation et de formation, la discrimination faite à la femme, la violence fondée sur le sexe, et la violation des droits et libertés fondamentaux de la femme. Et que, c’est par l’éducation et la formation que l’on pourrait briser cette quadrature du cercle qui porte atteinte à l’intégrité physique et mentale de la femme, contribue à son enfermement dans le rôle subordonné, et la maintient ainsi dans l’extrême pauvreté.

Le rôle traditionnel que jouaient jadis les hommes et les femmes dans la société est en train d’évoluer considérablement, tout comme la structure familiale. Il est donc nécessaire d’investir dans l’éducation de la jeune fille pour garantir l’égalité des chances pour tous de participer à la vie sociopolitique et à la prise de décisions qui la concernent, d’accéder au marché du travail et de contribuer à la réalisation de son plein épanouissement dans la société et au sein de son foyer.

Procurer une éducation de qualité à toutes les jeunes filles est la base fondamentale pour assurer l’égalité des chances en matière d’emploi et garantir l’autonomie financière des femmes sur le même pied que les hommes. C’est donc par l’éducation et la formation que les femmes pourront se départir des pratiques rétrogrades qui les marginalisent, se libérer des facteurs socioculturels qui les empêchent de jouir de mêmes droits et libertés que les hommes dans certaines sociétés à travers le monde.

 Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue


La CEEAC : un outil d’intégration pour l’Afrique Centrale

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La sous-région d’Afrique centrale est géographiquement située dans une position charnière et stratégique de l’Afrique, et constitue l’une des sous-régions les plus riches du continent. Elle regorge d’immenses potentialités humaines et naturelles susceptibles d’impulser le développement économique et social, et ainsi améliorer sensiblement les conditions de vie des peuples qui y habitent. On y trouve notamment d’importantes ressources pétrolières, d’importants gisements de métaux précieux et de minéraux, de gigantesques ressources en eau potable et un potentiel hydro-électrique le plus important du continent.

Six pays de la sous-région – Cameroun, Centrafrique, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée équatoriale et République démocratique du Congo –, partagent en commun un massif forestier du Bassin du Congo, deuxième poumon vert de la planète derrière celle de l’Amazonie, par sa biodiversité ainsi que pour la sauvegarde de l’humanité. L’Afrique centrale dispose également d’un important potentiel agricole encore très peu exploité, notamment des terres arables de qualité et les conditions climatiques favorables au développement de l’agriculture industrielle à grande échelle.

Cependant et en dépit du fait que la sous-région recèle d’immenses avantages potentiels pour le décollage économique, il y a lieu de constater malheureusement que l’Afrique centrale est à la traine et semble accuser beaucoup du retard par rapport aux autres sous-régions du continent africain. La Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC), un outil intergouvernemental d’intégration économique qui réunit onze États de la sous-région, éprouve encore des difficultés d’attirance et d’absorption des appuis techniques et financiers extérieurs, comparativement à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) notamment.

Il est impératif de relever le défi d’intégration économique

Lors de sa création, la CEEAC avait pour objectif de « promouvoir et renforcer une coopération harmonieuse et un développement équilibré et autonome entretenu dans les domaines de l’activité économique et sociale, […] en vue de réaliser l’autonomie collective, d’élever le niveau de vie des populations, d’accroître et de maintenir la stabilité économique, de renforcer les étroites relations pacifiques entre ses membres et de contribuer au progrès du continent africain ». Plus de trente ans après, l’intégration économique est et demeure encore le leitmotiv important de l’Organisation.

Mais force est de constater que la CEEAC ne semble pas, dans son état actuel, produire suffisamment des résultats positifs escomptés. Il sied de souligner notamment que de toutes les Communautés économiques sous-régionales existantes en Afrique subsaharienne – la CEDEAO en Afrique de l’Ouest, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) en Afrique de l’Est et la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (SADC) –, la CEEAC demeure la sous-région la moins intégrée du continent, tant économiquement, politiquement, que même sur le plan sécuritaire.

D’après une étude menée conjointement par le cabinet McKinsey, la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA) et la Banque africaine de développement (BAD), on remarque que la plupart des pays d’Afrique centrale se classent dans le groupe des pays les plus fermés à la mobilité des ressortissants africains. Ce qui constitue un handicap majeur pour entreprendre, avec succès, des projets intégrateurs mutuellement profitables.

Plusieurs raisons peuvent tout de même expliquer cette insuffisance des résultats attendus, aussi bien par les populations de la sous-région que par les bailleurs de fonds internationaux. Il convient néanmoins de noter qu’entre 1992 et 1997, la CEEAC est restée inopérante du fait que plus de la moitié des États membres étaient confrontés à des crises internes et des conflits armés qui ont secoué la sous-région ces dernières années. Ce n’est qu’en 1998, à l’issue du sommet de Libreville, que la CEEAC a repris du service. Aussi, la sous-région d’Afrique centrale est dramatiquement sous-équipée en infrastructures de base et souffre d’une déficience en interconnexion des réseaux nationaux de transport des biens et personnes entre les États membres.

Pour remettre la CEEAC sur les rails et rattraper le temps perdu, il est nécessaire de créer les conditions favorables qui puissent attirer les filles et fils de la sous-région qui ont une réelle volonté de renforcer les capacités institutionnelles, managériales et techniques de l’Organisation sous-régionale pour relever les défis actuels et à venir auxquels sont confrontées la plupart des organisations tant régionales qu’internationales. Notamment la réforme profonde de la CEEAC afin de lui doter d’une réelle capacité d’opération et de coordination des actions d’intégration économique, susceptibles d’accroître non seulement la visibilité et la crédibilité, mais aussi de maintenir de bonnes relations avec les bailleurs de fonds internationaux et bilatéraux.

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Instance de décisions : Conférence des chefs d’État et de gouvernement

En mai 2016, la CEEAC va tenir sa 17ème session ordinaire de la conférence des chefs d’État et de gouvernement à Libreville au Gabon, pays qui abrite le siège de l’Organisation. L’un des principaux sujets de discussion sera le renouvellement de l’équipe de la haute direction de la CEEAC, intégrant les professionnels de haut niveau, dont le mandat arrive à son terme, et ce, en tenant dûment compte à la fois du principe de rotation géographique et de représentativité équitable des États membres.

Le renouvellement de l’équipe dirigeante est plus que nécessaire pour insuffler une nouvelle dynamique aux efforts que déploie la CEEAC, au travers de la coopération sous-régionale, pour favoriser le rapprochement entre les États, les entreprises et les peuples, afin de relever ensemble, le plus grand défi à l’intégration économique continentale.

Les principaux partenaires financiers de l’Organisation, actuels et futurs, notamment les Nations unies, l’Union européenne, l’Union africaine, la France, les États-Unis, le Groupe de la Banque mondiale et différentes Agences spécialisées des Nations unies qui appuient ou sont susceptibles d’appuyer le processus d’intégration sous-régionale, en finançant la majeure partie des programmes prioritaires de la CEEAC, s’attendent à ce que l’Organisation fasse des efforts considérables pour améliorer son image et renforcer sa crédibilité, en améliorant la gouvernance interne, en instaurant les principes d’imputabilité et de transparence dans la gestion des ressources allouées.

De plus, quoique la CEEAC soit un outil intergouvernemental, elle aurait beaucoup à gagner et pourrait s’avérer beaucoup plus efficace en impliquant et faisant participer activement les organisations de la société civile et le secteur privé également, pour impulser l’intégration économique. Ensemble – État, société civile et secteur privé –, ils peuvent relever le plus grand défi du continent, celui de permettre à la jeunesse africaine d’accéder aux emplois stables, productifs et décents, nécessaires pour lutter contre l’embrigadement idéologique, l’extrémisme religieux et l’enrôlement des jeunes dans les groupes armés.

Aujourd’hui plus que jamais, la CEEAC est à la croisée des chemins et doit prendre des décisions qui veillent à étendre sa visibilité internationale pour attirer l’attention des acteurs importants de la coopération internationale au développement, susceptibles d’investir dans la sous-région, pour améliorer le bien-être des populations locales et lutter contre la pauvreté.

Ceci dit, la crédibilité et la visibilité de l’organisation dépendront du choix judicieux des dirigeants qui sera fait à la session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement en mai prochain, pour renforcer réellement les capacités institutionnelles et humaines du secrétariat général de la CEEAC, afin de lui permettre de faire avancer l’agenda d’intégration économique sous-régionale.

DSC03068888 (1)Isidore Kwandja Ngembo, Politologue

Ancien conseiller à la direction de l’Afrique centrale et occidentale du ministère canadien des Affaires étrangères et commerce international