renaudoss

À Dakar nous étions

Dakar

Nous sommes ces mots,
Ces doigts
Qui dessinent mille et un mondes, de clics en clics, de ‘’like’’ en ‘’like’’,
Ces arcs-en-ciel chantants qui fleurissent aux quatre vents
Aux quatre saisons et aux quatre âges de l’Homme

Qui dessinent le monde à l’encre de nos rêves ou le caricaturent, pour lui voler un sourire
Nos humanités éparses, semées au gré des hasards, des sourires, des mains tendues, des salutations et des ‘’Nangadef’’.

Nous sommes ces mains emmêlées, ‘’collées’’ (la petite) corps raccords, âmes à âmes, clique à clique, solitude à solitude, monde à blog.
Ces cuillères qui s’entrechoquent et font de la musique, autour du grand plat de riz, du grand plat du partage et de la satiété, ou pas. (Et chuuuuuuut, fait la bouche « Chantal » au petit matin – Et rebelote pour les coquillettes malaimées, « Demain est un autre jour, vous en mangerez quand même! », dit Chantal au soir) 
Nous sommes cette multitude d’ici et maintenant encastrés dans la chair du monde, juchés sur la chaire des mots.

Un jour, une certaine semaine,
Quelque part à mi-chemin entre nos rires et nos pleurs.
Nous nous sommes trouvés.

(CC) - Wikipedia
(CC) – Wikipedia


La démographie ou le miracle Africain

Salutations chères toutes et chers tous.

Évoquons aujourd’hui un des plus remarquables miracles de l’Afrique: sa démographie. On a tous entendu et réentendu cette fameuse phrase : en 2050, le quart de la population mondiale sera africain. C’est probablement le grand phénomène de repeuplement de l’histoire récente de l’humanité.

démographie (3)

L’Afrique est un continent, pas une île

Avant d’aller plus loin, une chose fondamentale: l’Afrique, messieurs et dames, est un CONTINENT : 30 000 000 de mètres carré! Ce n’est ni un pays, ni une île, ni une péninsule. Ne perdons pas cela de vue.

 

Esclavage et dépeuplement de l’Afrique

Pourquoi la démographie actuelle est un véritable miracle, et pourquoi parler de re-peuplement ? Tout simplement parce que le continent revient de loin, de très loin même. D’ailleurs, par rapport à sa superficie, même en excluant les déserts, il n’est pas si peuplé que cela. On fait encore pale figure derrière l’Asie, en termes d’habitants par kilomètre-carré.

démographie (2)~1

La notion de « Surpopulation » est en elle déjà problématique, et révèle une certaine méconnaissance de l’histoire du continent. L’Afrique Impériale a toujours été relativement peuplée, mais le ma’afa (le Grand Désastre, la traite négrière) nous a énormément couté en vies humaines. Les pertes s’évaluent entre 100 et 200 millions.

 « Au XVIe siècle, dans la plupart des régions d’Afrique subsaharienne, il existait des villes considérables pour l’époque (soixante mille à cent quarante mille habitants ou plus), de gros villages (mille à dix mille habitants), souvent dans le cadre de royaumes et d’empires remarquablement organisés, et aussi des territoires à habitat dispersé dense. […]

[…] A partir du XVIe siècle, la situation s’aggrava singulièrement. Les Portugais pénètrent le Congo, au sud de l’embouchure, ils conquièrent l’Angola, attaquent les principaux ports de la côte orientale et les ruinent, pénètrent dans l’actuel Mozambique. Les Marocains attaquent l’empire Songhaï, qui résiste pendant neuf ans. Les agresseurs disposent d’armes à feu, alors que les Subsahariens n’en ont pas. Des milliers d’habitants sont tués ou capturés et réduits en esclavage. Les vainqueurs s’emparent de tout : hommes, animaux, provisions, objets précieux…

Royaumes et empires sont disloqués, émiettés en principautés amenées à se faire la guerre de plus en plus souvent afin d’avoir des prisonniers qui pourront être échangés, notamment contre des fusils, indispensables pour se défendre et pour attaquer. Il en résulte des déplacements de populations provoquant de nouveaux heurts, des regroupements dans des sites refuges, la propagation d’un état de guerre latent jusqu’au cœur du continent. Les razzias se multiplièrent au point d’atteindre le chiffre de quatre-vingts par an, au début du XIXe siècle, au nord-est de la Centrafrique, d’après le lettré tunisien Mohammed el-Tounsy, qui voyageait au Darfour et en Ouaddaï (actuel Tchad) à cette époque. Le pourcentage des captifs par rapport à l’ensemble de la population s’accroît donc continuellement entre le XVIIe siècle et la fin du XIXe, et des « districts autrefois densément peuplés furent reconquis par la brousse » ou la forêt. » Pr Louise Maës-Diop

 

La récente explosion démographique

En l’état de nature, la population de l’Afrique connaissait une régulation simple : natalité forte – mortalité forte. Le mot d’ordre était simple : « la nature tue tout ce qui bouge, fais-donc un maximum d’enfants, parmi quelques-uns survivront ».

Crédit: https://www.ankhonline.com
Crédit: https://www.ankhonline.com

Cette régulation naturelle, couplée à l’état de délabrement politico-économico-social du Continent au sortir des cinq siècles d’esclavage, explique le taux d’accroissement naturel relativement bas. Mais, suite à la colonisation, avec l’introduction de la médecine prophylactique et autres, on verra la machine être relancée significativement (Natalité toujours forte – Mortalité en baisse). C’est heureux, ou plutôt c’est moins pire.

Cependant, la mentalité qui consiste à faire beaucoup d’enfants perdure encore aujourd’hui, notamment dans les campagnes, car les mutations ont eu lieu assez vite. La natalité que l’ainé Kpelly ne manque pas de fustiger vient de là.

Fait peu connu, au sortir des indépendances, certains intellectuels s’inquiétaient déjà de la faible démographie du Continent. L’actuel repeuplement apparait donc comme miracle de l’histoire. Un miracle comme il s’en produit très peu ; figurons-nous que les amérindiens, les aborigènes d’Australie ou de Tasmanie n’ont pas eu cette chance.

 

Le faux-problème de la surpopulation

Comme dit plus haut, l’Afrique est un Continent et doit se penser comme tel. Tous les pays n’ont pas la population du Nigéria ou de l’Egypte ; à côté, il y a des territoires beaucoup moins peuplés comme le Gabon. Bien qu’il faille dès maintenant œuvrer à un contrôle des naissances, il ne faut pas non plus être dans l’excès et perdre la tête. Tirons les leçons de l’expérience chinoise. Ils commencent à voir leur population légèrement décliner, ce qui a conduit récemment à un arrêt de la politique de l’enfant unique.

Proportion de la population suivant les continents - Wikipedia
Proportion de la population suivant les continents – Wikipedia

Urbanisation et baisse de la natalité

L’Urbanisation entraine une baisse de la natalité. C’est systématique (à cause de l’augmentation significative du coût de la vie et du temps de plus en plus long que l’on consacre aux études). Pour exemple : notre génération se comporte souvent de fratries de 3 à 4, alors que celle de nos parents comptait des fratries 7 et 10 sans problème. Les « jeunes » d’aujourd’hui, surtout ceux ayant grandi en ville, n’ont absolument pas l’intention d’enfanter une équipe de football.

Or l’Exode rural un fléau, crève le plafond ces dernières décennies. Qui dit exode rural dit « urbanisation » (même de manière délétère), donc baisse tendancielle de la natalité sur l’échelle du temps. Ça se fera sur quelques décennies, bien sûr. Voilà déjà un facteur de ralentissement sur le long terme.

 

Démographie – Géopolitique – Masse Critique

Il y a un rapport entre la démographie et la poids géopolitique. Un pays sous-peuplé a relativement peu de chance de peser lourd, peu importe sa puissance financière ou militaire. Par exemple, on voit mal la Suisse déclarer la guerre à la Chine.

Et demain l'Afrique

Dans le très excellent ouvrage « Et demain l’Afrique« , Edem Kodjo montre la relation entre un espace géo-économique raisonnable, une population raisonnablement importante et le développement. Le « développement » est extrêmement couteux en ressources matérielles et humaines. Ainsi, pour ce qui est de la recherche spatiale, cite-t-il:

Le nombre des membres du Club spatial ne risque pas de dépasser la quinzaine d’ici la fin du siècle (20è siècle, nda) car, pour en faire partie, il faudra disposer de grands moyens scientifiques, technologiques, militaires et financiers; en un mot: une masse critique… Il n’y a pas de place dans « l’espace »pour des ensembles de moins de deux cents millions d’habitants.  – Mahdi Elmandjra, cité par Edem kodjo.

200 millions d’individus…c’est le minimum de ressources humaines nécessaire pour se construire (Les pays européens vieillissants possèdent déjà les superstructures du « développement », ils n’ont pas à se « construire »), s’auto-gérer  et tenir ferme face aux grands ensembles actuels. Les micro-états africains peuvent donc aller se coucher (Tant qu’il vont en rangs dispersés, il n’ont pas voix au chapitre et ne l’auront JAMAIS).

Notez que la régression de l’Afrique est allé de pair avec son dépeuplement, comme c’est souvent le cas.

 

Le défi de la démographie

C’est certain, la démographie africaine est un défi. Mais une telle abondance de forces vives et dynamiques est le parfait terreau pour bâtir une civilisation très puissante et rayonnante en à peine un siècle. A condition de faire ce qu’il faut, et de changer le « problème » en ce qu’il est, c’est-à-dire une grande opportunité. Pour l’instant, ces forces vives se noient dans la Méditerranée ou vont faire la vaisselle dans les restaus d’Europe, donc faut voir…

Il nous faut des politiques souveraines aux échelles « nationale » et continentale. Ce serait malavisé de s’appuyer exclusivement sur des ONG ou autres Organismes Internationaux pour savoir combien d’Africains méritent de naitre ou pas.

 

Cette inquiétude autour de «la marée noire»

On peut se demander pourquoi on ne hurle pas autant après les pays d’Asie du Sud-Est. Certes, le quart de la population mondiale sera africain en 2050…mais plus de la moitié est déjà asiatique ! A tous ceux qui fantasment sur la question, il n’y aura pas de « péril noir », pas plus qu’il n’y a pas eu de « péril jaune ». Toutes les « vagues d’immigrations » ont été autorisées par les grands patronats occidentaux dans le but de réduire le coût du travail, pénalisant ainsi les masses laborieuses occidentales, suivant le principe de l’armée de réserve de Karl Marx.

 

Bien à vous

A.R.D-A.


Les résistances en Afrique Occidentale à la colonisation française – Fin

Salutations chères toutes et chers tous

Dernière partie de notre article sur les résistances en Afrique Occidentale à la colonisation française (ici la première partie), articles qui sont des extraits de l’ouvrage « Le mouvement de libération nationale en Afrique occidentale » de Nikolaj Ivanovič Gavrilov, pp 5-11. 

 


(…) Bien des historiens français, lorsqu’ils décrivaient les campagnes de conquête en Afrique occidentale, présentaient les chefs africains comme des « despotes sanglants », des « barbares », des « négriers ».

Décrivant les prétendues « cruautés » des chefs de la résistance africaine, les historiens de mauvaise foi ne poursuivaient qu’un but : tracer un portrait flatteur des chefs militaires français, en faire des porteurs de progrès, qui affranchissaient l’Afrique d’un « mal séculaire » pour lui donner accès à une « civilisation supérieure ».

colonisation

En réalité, les « despotes sanglants », c’étaient les « porteurs de progrès » eux-mêmes, les colonels et les généraux français, sous la direction desquels se déroulait la conquête de l’Afrique occidentale. Voici comment un officier français, qui avait pris part aux événements, décrit la prise de Sikasso en 1894 par les troupes coloniales : « Après le siège, l’assaut… On donne l’ordre du pillage. Tout est pris ou tué. Les captifs, 4 000 environ, rassemblés en troupeau. Le colonel commence la distribution… Chaque Européen a reçu une femme à son choix… On a fait au retour des étapes de quarante kilomètres avec ces captifs. Les enfants et tous ceux qui sont fatigués sont tués à coups de crosse et de baïonnette… » Ce témoignage est extrait du livre de Vigné d’Octon La gloire du Sabre, publié à Paris en 1900. On rencontre beaucoup de ces descriptions d’ « exploits » perpétrés par les soldats français. Souvent, l’armée coloniale dévastait des régions entières sans nécessité militaire aucune, et, comme le disaient les officiers français, seulement « à titre prophylactique ». Mais dans leurs rapports envoyés à Paris, ces « mesures prophylactiques » étaient décrites comme des combats acharnés s’étalant sur plusieurs jours menés contre « un ennemi supérieur en nombre ».

Au cours des guerres coloniales, l’Afrique occidentale a subi des pertes en hommes plus considérables qu’au cours de toutes les guerres locales durant tout le XIX siècle.

Pourquoi, malgré leur lutte héroïque, les peuples d’Afrique occidentale ne réussirent-ils pas à repousser l’assaut des colonisateurs ? Cela s’explique partiellement par la faiblesse militaire des Africains. Alors que l’armée coloniale était équipée d’un matériel moderne : artillerie, fusils à tir rapide, etc., les guerriers africains n²’avaient souvent à leur disposition que des arcs et des flèches, ou bien, dans le meilleur des cas, des fusils à pierre ou à piston. Évidemment, le rapport des forces n’était pas à l’avantage des africains. Cependant l’isolement fut la cause essentielle de leur défaite. Dans sa lutte contre les colonisateurs, chaque État s’appuyait, en règle générale, sur ses propres forces… Durant tout la période de l’ « épopée coloniale », c’est-à-dire durant les 25 à 30 ans, les Français n’eurent jamais en face d’eux un front uni de la résistance africaine. Bien plus. Les États africains occidentaux n’essayèrent même pas de s’allier entre eux, ils se déchiraient au contraire les uns aux autres. Les colonisateurs exploitaient habilement les guerres intestines des féodaux africains. Ils excitaient un État contre l’autre, pour, ensuite, se précipiter sur le « vainqueur » affaibli. Ainsi, les colonisateurs français réussirent à écraser un à un tous leurs adversaires avec une relative facilité.

Nikolaj Ivanovic GAVRILOV, Le mouvement de libération nationale en Afrique occidentale.


 

Addendum

Qu’il soit permis de faire remarquer la similarité (tragique) de la situation au XIXè siècle avec l’époque actuelle. Les mêmes causes conduisant aux mêmes effets, la désunion  des nations africaines aujourd’hui face aux manipulations intérieures et extérieures est pour beaucoup dans l’actuelle faiblesse du continent. Au lieu de songer à une intégration plus forte à l’échelle sous-régionale, voire continentale, les états actuels, obstinément et mièvrement tournés vers leurs anciennes métropoles le plus souvent, font le lit de leur servitude.  Maîtriser son passé est un impératif de survie, ne dit-on pas que « ce qui ignorent leur histoire sont condamnés à la répéter (ou à périr) »?

Ajoutons que si le présent article parle de l’épopée coloniale française, ce n’est qu’incident, il ne s’agit pas d’indexer particulièrement la France. D’ailleurs, en terme de massacres et de destructions, les français n’ont rien à envier aux anglo-saxons, aux ibériques et aux germains, passés maîtres dans l’art du massacre à grande échelle et de la violence organisée.

Il serait d’ailleurs contre-productif et paresseux de fustiger uniquement la France aujourd’hui, car, du reste, elle n’est plus vraiment aux commandes en Afrique, remplacée (chassée?) par des impérialistes peut-être plus subtils mais tout aussi implacables, sinon plus, notamment l’Empire américain et ses multi-nationales.

 

Ceci conclut assez éloquemment on l’espère cette petite incursion dans le passé, un passé relativement proche s’il en est.

 

Bien à vous

A.R.D-A.



De l’inconvénient d’être né… au 20e siècle (et de vivre le 21e)

Salutations chères toutes et chers tous

De l'inconvénient d'être né (5)L’an de grâce 2015, à peu près deux mille ans après Yeshua ben Yosef, plus connu sous son nom de scène, « Jésus-Christ de Nazareth ». Nous sommes au 21e siècle donc, ou plutôt à ses débuts. La plupart d’entre nous viennent du siècle qui a précédé : l’âge des deux guerres, de la modernité, du progrès technique et des droits de l’homme. A bien y regarder, ce n’est peut-être pas le meilleur temps pour faire son passage sur cette planète. Parlons donc de l’inconvénient d’être né aux 20e – 21e siècles.

Cette sensation aigre-douce de fin de l’histoire

Même si nous sommes dans du culte de la nouveauté frénétique et de la mode, notre siècle ne peut pas se débarrasser de cet étrange arrière-goût de la fin de l’histoire, pour reprendre la formule de Hegel (et un peu Fukuyama). Non pas que l’histoire s’arrête (ça n’arrivera pas avant extinction de l’espèce), mais que l’essentiel et le meilleur de la présente civilisation soient derrière nous. Que ce soit en musique (Mozart, Beethoven, Miles Davis, les Beatles, etc.), en littérature (Balzac, Rimbaud, Baudelaire, Tolstoï, Dostoïevski, Ben Okri , Tokien, J.K. Rowling, et beaucoup d’autres) ou encore en art (allant de De Vinci à Picasso, en passant par Dali et les grands maîtres-sculpteurs yoruba).

Hormis en sciences et encore!, tout le reste de nos « innovations » ne sont que des reprises, des dilutions ou des déconstructions de grands mouvements et de grands génies du passé. Plus que jamais, l’expression « Nil novi sub sol » (rien de nouveau sous le soleil) prend son sens. Même le rap, à bien y regarder, n’est pas « nouveau » en soit et est en bout de course. Et çà c’est notre époque.

Entre deux grandes époques :

Entre l’ancien âge et le nouveau, notre siècle.

La période des grandes explorations est terminée. Il n’y a plus de terre mystérieuse ou de « contrée lointaine et inconnue » sur cette bonne vieille planète; plus de tache blanche sur les cartes, tout a été comblé. A l’inverse, la phase de l’exploration de l’univers n’en est qu’à ses balbutiements, cela prendra encore du temps avant de se la jouer Star Wars.

Pour explorer le monde en se lançant dans des expéditions audacieuses, il aurait fallu naître deux à trois siècles plus tôt (voire même remonter aux belles épopées du Mansa Abubakri II, de Marco Polo, des Vikings ou même de Simbad?)… et pour explorer l’univers, il aurait fallu naître un à deux siècles plus tard.

Siècle charnière et siècle charnier

De même, le 20e-21e siècle est une phase charnière dans la marche du monde, marquée par la mondialisation et le mondialisme, par de graves conflits mondiaux pour  restructurer l’échiquier géopolitique mondial et la répartition des ressources (la Première Guerre mondiale, c’était il y a à peine un siècle). Il s’agit aussi du summum de la lutte à mort entre le Capital et le Travail : les 1 % les plus riches contre les 99 % restant, faites vos jeux.

La boucle de ces cycles de violence va probablement se refermer avec un ultime conflit majeur (mondial ?) qui nous pend au nez comme une épée de Damoclès. Eh oui, la Troisième, elle s’amène, à pas feutrés mais elle s’amène. Ce sera peut-être un véritable carnage, à la mesure des forces et des armements en présence.

L’âge de la pollution et du gaspillage

Crédit: www.chambery-metropole.fr
Crédit: www.chambery-metropole.fr
Crédit: www.marketing-chine.com
Crédit: www.marketing-chine.com

Jamais l’être humain n’a autant produit avec facilité, et jamais il n’a autant gaspillé. Il est bien loin, le temps où ne prenions que ce dont nous avions besoin.  Que ce soit dans l’agriculture, dans l’industrie ou dans la pêche, nous sommes en surproduction permanente.

Les pays dits « développés » et leur société de consommation nous entraînent dans ce cercle vicieux encore et encore et encore : produire massivement et jeter massivement. C’est un gaspillage qui ne dit pas son nom. Tout cela va de pair avec la pollution monstre, on ne compte plus les villes-cheminée dont l’air est irrespirable : le rejet de fréons, monoxydes de carbone, dioxydes de carbone et autres joyeux gaz à effet de serre dans la nature, tout ça tout ça.

 Crédit: www.viande.info
Crédit: www.viande.info

Sur l’échelle du temps, c’est à un véritable carnage, une mise à sac de la planète, aussi vertigineuse qu’irraisonnée, que se livre le genre humain, car il est évident que l’homme scie la branche sur laquelle il est assis. La nature nous survivra, l’inverse est loin d’être vrai.

Le « réchauffement » climatique et les tragiques dérèglements des saisons de part et d’autre, ainsi que les préoccupations écologiques qui montent sont le signe de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Ce n’est pas très reluisant.

L’âge d’or des inégalités sociales

S’il y a aujourd’hui suffisamment pour nourrir à peu près tout le monde, il n’y a jamais eu autant d’affamés. S’il n’y a jamais eu autant de milliardaires, il n’y a jamais eu autant de (très) miséreux non plus. La structure très profondément inégalitaire du système dominant, enfanté par l’épopée capitaliste, nous impose une telle laideur. Un fossé de plus en plus grand entre les couches sociales à l’échelle mondiale : une poignée de riches qui deviennent de plus en plus riches, et une écrasante majorité de faibles et de pauvres, de plus en plus pauvres et démunis.

Pour l’Afrique

Afriques
Afriques

Pour les nations (et les Etats-nations) africaines, cette période aura été, à bien des égards, un gâchis, une succession ininterrompue d’occasions manquées pour régler la dette de l’Histoire et retrouver les chemins de la grandeur. A l’esclavage aura succédé la colonisation, aux espoirs des indépendances auront succédé l’ère des dictateurs fantoches.

Le demi-siècle qui succède aux indépendances peut donc sans trop de problèmes être ajouté aux cinq à six cents ans qui ont précédé. Nous avons obtenu des drapeaux et tout, mais rien n’a vraiment changé, les esclaves sont toujours des esclaves et les sangsues toujours des sangsues. Les chaînes ont changé de forme et de position (passant des mains aux cerveaux) mais sans plus. Il est bien loin l’âge de l’Afrique impériale.

Notre siècle, notre responsabilité, nos défis

Tout ceci étant dit, ce siècle est le nôtre. Votre époque, c’est comme votre famille : vous ne les choisissez pas.

Et il y a largement de quoi se consoler. C’est aussi le siècle d’Internet, du pop-corn et des chips (on oublie souvent les chips). C’est celui des grands voyages transcontinentaux, Moscou, Tokyo, Malabo, Tanger, Abuja, Katmandou, Jakarta ou encore Berlin, Rio de Janeiro…  Allez tenter ce genre de voyages à l’époque de Soundjata Keita. C’est le siècle des mouvements d’émancipation, du féminisme (avec toute son ambiguïté, oui).

D’autre part, chaque génération s’appuie sur le travail et les sacrifices de ceux qui les ont précédés, ainsi il est de notre responsabilité de bâtir et de forger ce monde mirifique de demain, ceci est notre défi. C’est à la fois un privilège et une malédiction rare d’assister à ces grands changements radicaux, ces carrefours entre l’Ancien Monde et le nouveau, où le monde s’apprête à bondir vers de nouveaux horizons ou à tomber dans le fossé de l’autodestruction et de l’épuisement des ressources.

En ce siècle, l’humanité joue sa vie à quitte ou double sur l’échelle du temps. Et nous, sept milliards d’humains accrochés à des hamburgers ou des galettes d’argile, à nos télécommandes ou nos kalachnikovs, à nos livres centenaires ou aux souris de nos ordinateurs, nous sommes là pour le voir et le vivre. Brrrr

Bien à vous, frères et sœurs d’humanité,

A.R.D-A.



L’Afrique, ses « ethnies » et ses Etats-nations

Salutations chers tous,

Notre récente plongée à marche faurcée dans les eaux bourbeuses de la politique me pousse à aborder la question des ethnies, des nations et des Etats-nations.
Durant les nombreux débats de bureau et de bistrot qui ont alimenté la campagne présidentielle, un constat flagrant s’est imposé. Que dis-je, je me le suis pris dans les dents comme un violent coup de massue : en lieu et place de convictions politiques et de vote pour le plus grand bien, beaucoup sont encore sur le logiciel du « frère », du « fils du pays » ou encore du « camarade de clan ». (1)

La chose choque et déçoit de prime abord, surtout quand on s’est abreuvé pendant longtemps à la fontaine de l’universalisme droitdelhommiste et du « débat d’idée » à l’américaine.  Mais, et si on était allé trop vite en besogne? Car il faut in fine reconnaître et respecter les faits et le concret (L’éternel retour du concret de Lénine.) Et le concret, c’est que les pays africains ne sont pas des nations.)

Les États africains ne sont pas des nations

Il faut bien le comprendre, l’immense majorité des pays africains (Afrique subsaharienne notamment), en l’état actuel des choses, ne sont pas des nations (du moins, pas encore) et ne l’ont jamais été. Vous n’êtes pas obligés de me croire sur parole, mais voici ce que c’est qu’une nation, selon le Grand Robert

Nation : groupe* humain, généralement assez vaste, qui se caractérise par la conscience de son unité et la volonté de vivre en commun.  Assemblage, association, nationalité, peuple. — REM. En ce sens, il convient de distinguer la nation et l’État. «  L’idée de Nation implique une idée de spontanéité; celle d’État, une idée d’organisation qui peut être plus ou moins artificielle. Une nation peut survivre, même lorsqu’elle est partagée entre plusieurs États; et un État peut comprendre plusieurs nations  » (Cuvillier, Précis de philosophie, t. II, p. 395). |

Tout y est dit, je crois… j’insiste sur le «plus ou moins artificielle». (Quant aux différences et nuances entre les termes « État« , « pays« , « patrie« , « ethnie » et « nation« … ça vaut le détour.) D’ailleurs, je préfère substituer au terme « ethnie », celui de « nation », bien plus juste. La naissance de ces différentes nations ainsi que les relations bonnes ou mitigées qu’elles entretiennent entre elles au cours de l’histoire sont les conséquences de plusieurs facteurs comme le ma’afa (2), l’évolution des royaumes et empires, les différentes migrations, etc.

Ce ne sont pas des nations, mais des puzzles de nations (ethnies), il est fondamental de partir de ce constat : c’est le terreau malsain sur lequel ont poussé certains des maux qu’on connaît (tribalisme, ethnocentrisme, népotisme, régionalisme, etc.). Les phrases du genre « […] Mais pourtant, nous sommes tous Togolais… Ivoiriens, Maliens… » laissent donc songeurs sur ce que chacun entend par « Togolais », « Ivoirien », « Malien ».

Votre nationalité, que veut-elle dire pour vous ?

Bien évidemment, l’ethnique n’explique pas tout, loin de là. Mais c’est souvent un fil conducteur (souvent, pas toujours. J’insiste là-dessus!).

 

Ces « États-nations » : Des faux nés de l’histoire et des bombes à retardement.

ECOWAS members.png
CEDEAO – « ECOWAS members ». Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

Je vais parler de l’Afrique occidentale que je connais un tout petit peu mieux. La répartition des nations était relativement homogène suivant les axes est-ouest (parallèlement à la côte). Ce qui veut dire que suivant l’axe sud-nord (ou nord-sud), on avait « différentes » familles de nations-apparentées qui se superposaient (Des bandes ou des rameaux civilisationnels et culturels, si vous préférez).

Quand les colons sont venus, ils ont eu l’idée brillante de découper les pays, non pas suivant les axes est-ouest (ce qui aurait facilité la cohabitation et préservé le tissu social, voire l’éthos des peuples, mais n’aurait eu aucun sens du point de vue de leurs intérêts), mais plutôt suivant l’axe nord-sud, perpendiculairement au Golfe. In fine, on a donc X pays qui reproduisent les mêmes clivages « nationaux » (« ethniques ») ainsi que d’inutiles rivalités Nord-Sud (Le cas récent et dramatique étant la Côte d’Ivoire… et peut-être le Nigeria un de ces jours, si rien n’est fait).

ethnies (5)
Carte approximative des ethnies en Afrique de l’Ouest – Google Image

Ces antagonismes régionalistes même s’ils ne sont qu’à l’état de sentiment diffus, sont des faiblesses que des puissances et des sphères d’influence malveillantes, intérieures comme extérieures, ne se privent pas d’instrumentaliser dans le but d’asseoir ou de perpétuer une domination. Divide ut regnes (3), on n’a encore rien inventé de mieux. D’ailleurs, certains (beaucoup de) politiciens peu scrupuleux ne s’en privent pas pour gagner des voix.

Voter ethnique – Manque d’éducation politique ou poids du Réel et de l’Histoire?

Les « ethnies » sont des identités bien plus pertinentes et authentiques que les « nationalités » (au sens moderne du terme). En effet, si les notions de « Togolais », de « Camerounais » ou de « Malien » n’existent que depuis soixante ans (à peine deux générations, rendez-vous compte que nos grands-parents ont vu la naissance de ces entités politiques que sont les pays actuels), les notions de Béti, de Sérère, de Peuhl, de Sénoufo, d’Ewé, de Fon, de « Yoruba » ou de Kabyè existent depuis bien plus longtemps, plusieurs siècles même (Bien plus d’un millénaire pour certaines antiques nations comme les Yoruba).

LanguesAfrique

Il est incroyablement naïf et arrogant de notre part de croire que ces choses vont changer du jour au lendemain. On ne crée pas une identité d’un claquement de doigts sous prétexte qu’on a un drapeau, une frontière et une devise. Dans le meilleur des cas, c’est une identité en carton-pâte dans tous les sens du terme : c’est-à-dire qu’elle est molle à ses débuts, et ne durcit qu’avec l’effet du temps. Un temps qui se compte en générations, et non en mois et en années !).

Bien sûr, il existe chez l’humain un naturel réflexe à s’assimiler à cette collectivité plus grande qu’est la « patrie », ou plutôt l’Etat-nation, mais à bien des égards l’ethnique est encore surdéterminant, à juste titre. C’est vrai surtout pour la très grande majorité de notre population rurale de l’hinterland. L’actuelle et nébuleuse idée d’Etat-nation n’est que le fruit d’une éducation somme toute tardive et secondaire (car scolaire).

Prendre l’ethnique pour un simple dysfonctionnement de la mécanique humaine, comme un simple grain de sable dans la machinerie sociale est une aberration épistémologique et historique. D’ailleurs, si une même erreur se reproduit 99 fois sur 100, il faut peut-être commencer à en tenir compte plus sérieusement.

Quand elles ne jouent pas malhonnêtement sur ces clivages, l’essentiel des élites africaines (si tant est qu’elles existent) se fourvoie dangereusement sur ce sujet. Sans doute à cause de la bouillie droitdelhommiste et universaliste post-révolution française qu’on nous donne à l’école coloniale.

Pour ne pas conclure

Nos pays, sous leur forme actuelle, sont des « trucs » géopolitiques, de véritables aberrations de l’Histoire. Hormis les caprices de la colonisation, il n’y a aucun déterminisme géographique et démographique sérieux qui explique leur forme et leur structuration. Évidemment, notre propre paresse et notre dormance y sont pour beaucoup. Certes, on nous a refourgué le bébé après les indépendances, mais c’est NOUS qui avons commis des d’erreurs par la suite:

  • Ne pas changer carrément les frontières et les remodeler suivant le strict bon sens, notamment en évitant de se coltiner des micro-Etats (en trop grand nombre). Des micro-Etats très faibles géopolitiquement, et pour cause. Rendez-vous compte qu’à côté d’un pays comme la Chine (9 598 095 km2), la Russie (17 098 242 km2), le Brésil (8 515 767 km2) ou encore les Etats-Unis (9 629 091 km2), le Togo mon « pays » fait (5 7000 km²), ses voisins le Ghana, Bénin et Burkina Faso font respectivement 238 533 km2, 114 763 km2 et 272 967 km2. C’est mignon…
  • Nous adonner au système de la démocratie (démocratie électoralo-parlementariste à l’occidentale, type un homme, une voix) sans avoir au préalable adapté ce barbarisme à nos réalités sociopolitiques. Et là, même la sacro-sainte alternance prend des allures de chaises musicales entre « ethnies » ou entre régions (cas du Nigeria). En l’état actuel des choses le un homme, une voix a ses limites. Si les gens ne sont pas hyper motivés, par exemple pour bouter dehors un pouvoir vampire et parasite qui s’éternise, ou pour s’unir face à une menace terroriste type Boko Haram, eh bien ils retournent tranquillement à leur bon vieux vote ethniquel’éternel retour du concret.

Que l’ethnique nous déplaise est une chose, qu’il ne soit pas opérant en est une autre.

  • Ne pas  intégrer nos pays dans des ensembles plus grands et plus cohésifs comme des intégrations régionales fortes… ou mieux encore, comme un État fédéral panafricain qui neutraliserait très efficacement les tensions ethniques en les diluant dans un échiquier beaucoup plus grand. En plus de nous offrir la taille critique nécessaire pour peser très très très significativement sur la scène géopolitique mondiale.

 

Un sujet grave quoique subtil et délicat, on n’a pas fini d’en parler…

Bien à vous

A.R.D-A.

 


(1) Entendons-nous bien, je ne dis pas que c’est ce qui a permis la réélection de Miabé’Faure, garant d’un certain pouvoir quinquagénaire, loin de là. Je dirais même que les gens étaient motivés pour un peu changement.

(2) Ma’afa [Grand Désastre : terme désignant les cinq siècles d’esclavage] car elle a poussé les gens à se réunir en groupes très soudés, et à cultiver la peur et la méfiance de l’autre pour survivre.

(3) « diviser pour mieux régner ».

 


De la notion de « race » et d’africanité

Salutations chères toutes et chers tous!

Cet article m’est inspiré par une passionnante et plaisante discussion que seules des rencontres au sommet comme notre #TweetUp peuvent procurer.  Le thème du jour était « Africanité et réseaux sociaux« .

En ces débuts de 21e siècle, époque de mondialisation et de globalisation, de l’internet et de l’intensification des échanges, peu de questions sont aussi épineuses et périlleuses (et par conséquent attrayantes) que celle de la « race »… Eh bien parlons-en.

On va gagner du temps : Oui les « races » existent. Ou du moins ce que l’on essaie de définir par là.

race (4)
Les « races »,  grosso modo… C’est très à l’emporte-pièce.

« Ma négritude n’est pas une pierre, sa surdité ruée contre la clameur du jour

Ma négritude n’est pas une taie d’eau morte sur l’œil mort de la terre

Ma négritude n’est ni une tour ni une cathédrale » (Aimé Césaire – Cahier d’un retour au pays natal)

 

De la pauvreté et de l’étrangeté du mot « race »

Déjà, le mot « race » n’existe pas dans ma langue maternelle. Il en est de même pour l’ensemble de critères par lesquels elle se définit, la couleur notamment. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, le mot pour désigner « le Blanc » dans ma langue n’a rien à voir avec la couleur.

Tout ceci pour dire que le concept de « race », au sens où nous l’entendons aujourd’hui, est une fabrication occidentale. Et c’est un énorme fourre-tout pas toujours aisé à circonscrire. Peut-être faudra-t-il le changer un de ces jours, et lui substituer quelque chose de plus approprié. Le mot « race » peut s’appliquer à des « variétés biologiques » (Blanc, Noir, Jaune, etc.) tout comme à des « ethnies » (Celtes, Nordiques, Germains, Ouest-Africain, Lobi [Pygmées])  sans problème. C’est vous dire.

De la notion de « race » pure

Il n’existe pas de « race » pure à proprement parler. Il n’en a jamais vraiment existé. L’histoire du monde est très surprenante de ce point de vue, très surprenante. Quand on sait que les premiers habitants de la péninsule ibérique ou d’autres régions d’Europe occidentale étaient plutôt mélaniques, ou encore que les sept cents ans d’occupation maure en Espagne ont laissé des traces dans le génotype…

Complexions - Crédit: www.readthis.tk
Complexions – Crédit: www.readthis.tk

On peut cependant parler d’« homogénéité » et de « stabilité ». En faisant table rase des nuances, définir un « archétype » : « Africain type », « Asiatique type ». S’en tenir à des critères généraux, les plus déterminants. Car il y a une grande variété de phénotypes au sein d’une même « race ». La « race » africaine notamment.

L’amour des siens n’est pas la haine des autres

Que nous soyons plus enclins à aimer nos semblables n’exclut en rien d’aimer « l’autre », frère et sœur d’humanité. De ce point de vue, le « racisme » est une notion à définir (tout comme la « race »). Car il y un certain racisme qui est universel. Je suis de ceux qui considèrent que, dans leur mécanique globale et au-delà de leur épiderme, les humains sont les mêmes partout sur la planète. Ce sont les systèmes de valeur transmis par l’éducation (l’imprégnation sociale) et le milieu de vie qui font le reste.

Aimé Césaire
Aimé Césaire

« … mon cœur, préservez-moi de toute haine
ne faites point de moi cet homme de haine pour qui je
n’ai que haine
car pour me cantonner en cette unique race
vous savez pourtant mon amour tyrannique
vous savez que ce n’est point par haine des autres races
que je m’exige bêcheur de cette unique race » (Aimé Césaire, Cahier d’un retour au pays natal)

 

De la « Race » et de l’image de soi

Tête colossale - Civilisation Olmèque
Tête colossale – Civilisation olmèque

Un peuple normalement constitué et en pleine possession de lui-même (de ses ressources mentales et spirituelles surtout) fait graviter son monde autour de lui. Il crée une pyramide du bien dont il est le sommet (ou le centre). Le partage avec les « autres », frères d’humanité, vient en second lieu. Pour exemple, la tendance des peuples à représenter Dieu à leur image, Jésus étant un cas d’école. C’est normal, c’est humain.

Les Chinois appelaient leur pays l’Empire du Milieu, alors qu’ils ne sont pas plus au centre de la Terre que les Papous ou les Andalous.

Ainsi, toute représentation de la réalité, toute mode qui tend vers une négation, une dégradation ou une altération ‘excessive’ de soi-même et de son image (de son soi-par-excellence) est délétère et néfaste:

Pour le dire de manière grossière, au point de vue de l’image, tout ce qui pousse le soi (1) à se transformer en non-soi est anti-soi.

Il est naturel qu’un groupe humain valorise les caractères [extérieurs] qui sont les siens, plutôt que ceux de lointains voisins. Une tendance contraire découle d’un caprice de l’histoire ou d’un dysfonctionnement:

Les nations dites « blanches », par exemple, ne se sont jamais évertuées à obtenir par mille procédés des cheveux crépus…

Art réaliste - civilisation yoruba
Art réaliste – civilisation yoruba

Un certain processus d’aliénation (2), lent et long, subtil ou brutal, explique le pourquoi du comment de phénomènes tels que le décapage, le diktat du défrisage et des greffes de cheveux de cadavres (pour faire « plus blanche »?). Mais bon, comme le dit si bien l’autre, ce n’est pas vraiment la mèche le problème. Ce sont les causes profondes et les motivations qui gênent.

De la « race » et de l’essence.

Je le dis haut et fort, il n’y a pas de métaphysique du « Noir » ou du « Blanc » ou du « Jaune » (ces notions chromiques sont d’ailleurs très pauvres et réductrices). Les systèmes de valeur ne se transmettent pas par le sang. Parler donc d’une « race » ou d’un peuple de manière essentialiste, en tant qu’absolu atemporel et figé, sans tenir compte du milieu et de l’imprégnation historico-sociale est une erreur (Erreur étant un euphémisme. On se rappelle les délires racialistes d’un certain Adolf). De ce point de vue, la notion d’Africain ou d’africanité peut devenir épineuse (par exemple, aimer Beethoven rend-il moins africain?).

Du peuple et de la culture : Peuple et civilisation

Encore une fois, la connaissance ne se transmet pas par le sang. Cela dit, les cultures sont portées par des peuples. Les civilisations millénaires yoruba, égypto-nubienne, romaine ou encore chinoise ne se sont pas formées « dans le vide ».

Même si philosophiquement, c’est très séduisant d’imaginer un « ensemble d’idées» automotrices qui ne feraient qu’habiter des corps et des peuples comme on copie des données sur une clé USB, il est malgré tout assez difficile de découpler l’éthos d’un peuple de ce peuple même.

Un peuple génère la machinerie conceptuelle et civilisationnelle qui lui permet de survivre, de prospérer et d’évoluer dans son environnement (une fois que les questions de survie sont réglées, elle s’acharne à tendre vers l’universel). Ce sont des peuples qui créent des civilisations et non l’inverse. La civilisation formate et définit le peuple sur la durée, certes, mais jamais en premier lieu.

L’idée de transposer à souhait l’Esprit (habitudes, culture, mode de vie et visions du monde) d’un peuple à un autre, d’une aire géographique à une autre, pour autant qu’elle est très intéressante, peut être dangereuse. Si ce n’est pas par sa radicale impossibilité sur le long terme, au moins par les bouleversements graves que cela suppose. J’en veux pour exemple le culte de la peau « blanche » chez beaucoup d’Africains, héritage de 500 ans sous domination, et les désastres du décapage ( habitude qui est littéralement une auto-destruction) ou toute l’ambiguïté du défrisage. Fort heureusement, le Nappy prend de l’ampleur, on verra bien ce que ça donnera.

« Races » et métissage

La rencontre individuelle entre deux êtres et leur union ne pose pas du tout de problème. Je n’oserais aucune façon la critiquer. Ceci étant, le métissage de masse n’est pas forcément un idéal. Globalement il n’en ressort pas beaucoup de bien, un pays comme le Brésil en est un bel ( ?) exemple.

Le concert des nations

L’humanité est une très belle mosaïque. Par sa diversité, elle transpire « le Beau, le Bien et le Vrai ».

A l’ère des grands échanges et de la mondialisation, il y a deux façons d’envisager l’avenir : un monde multipolaire avec des peuples solidement enracinés sur leurs traditions et leur patrimoine, qui embrassent sainement la modernité et échangent entre eux… ou alors une grande bouillie mondialiste (informe, délétère et babélienne, selon moi). Ce sera la « MacDonaldisation » du monde, en gros.

Vous l’aurez compris, mon choix se porte sur la première option : « Le Concert des nations ».


que ce que je veux
c’est pour la faim universelle
pour la soif universelle
la sommer libre enfin
de produire de son intimité close
la succulence des fruits.

(Aimé Césaire – Cahier d’un retour au pays natal)

 


(1) « soi » au sens « intégral» du terme

(2) Sauf cas particuliers et exceptions, car il y en a.


Quelques grands esprits que nous ne connaissons pas forcément (3)

Salutations, chères toutes et chers tous.

Nous en arrivons donc au dernier volet de notre série d’articles consacrée à quelques grands esprits qui ont traversé l’histoire. Bouclons donc la boucle (Ici, partie 1 et partie 2). Écrire ces lignes me procure un inqualifiable plaisir.

No. 7. Al-Djazari

Al Jazari
Al-Djazari (Abu al-‘Iz Ibn Isma’il ibn al-Razal-Djazari)

Abū al-‘Iz Ibn Ismā’īl ibn al-Razāz al-Djazari (1136-1206) (arabe: أَبُو اَلْعِزِ بْنُ إسْماعِيلِ بْنُ الرِّزاز الجزري ) est un grand érudit ingénieur, inventeur et astronome arabe. Il appartient à cette brillante civilisation que l’on nomme la civilisation musulmane ou islamique (perso-berbéro-andalouse); civilisation très brillante , probablement plus brillante que la civilisation grecque, et de loin. (Wikipedia)

Malgré ses nombreuses et importantes œuvres, il est assez peu connu. Son chef-d’œuvre majeur est le livre de la connaissance des procédés mécaniques (Kitab fi ma‘rifat al-hiyal al-handasiyya).

Grands esprits (25)
La roue de Sindi – permettant de convertir l’énergie circulaire en énergie linéaire, précurseur des automates

C’est une immense savant et inventeur. Son impact sur le monde moderne, notamment la révolution industrielle du XIXe, est colossal. Au rang de ses innovations techniques nous avons : les pompes hydrauliques, la machine hydraulique automatique, les machines automatiques (en plein « moyen-âge », je ne sais pas si vous réalisez), l’un des premiers « ordinateurs » du monde, un calculateur analogique, les humanoïdes mécaniques programmables (précurseurs de l’automate et du robot).

Comme dit plus haut, les travaux d’Al-Djazari sont à la base de la locomotive ( !!!) notamment par l’invention de la pompe aspirante à double effet automatique Franchement, il fallait le faire.

L'horloge de l'éléphant - Crédit d'image: https://www.youtube.com/watch?v=879kqbx9rqc
L’horloge de l’éléphant – Crédit d’image : https://www.youtube.com/watch?v=879kqbx9rqc

Cependant, sa plus célèbre invention est sans doute la légendaire horloge de l’éléphant, une « machine à dire l’heure », qui constitue la parfaite synthèse des connaissances en génie mécanique de toutes les civilisations connues de son temps: égyptienne, grecque, arabe, indienne, chinoise, etc.

Bref, Al-Djazari est un bel exemple de l’extraordinaire génie humain qui a marqué la civilisation islamique, injustement méconnue, à l’image d’autres grands auteurs tels Ibn Batouta (historien et explorateur), Alhacen (savant, physicien, inventeur de la chambre noire, précurseur de la caméra), Ibn Firnas (Pionnier dans le domaine de l’aviation), Ibn Khaldoun (philosophe, père des sciences humaines), Ibn Sinna ( Avicennne, un autre père de la médecine), Abu al-Qasim al-Zahrawi (Père de la chirurgie moderne).

 

No 8: Mendeleïev

Crédit: Wikipedia
Mendeleiev – Crédit: Wikipedia

Mais si, vous connaissez Mendeleïev. C’est le monsieur avec son incontournable tableau. Le tableau de classification périodique.

 » Dmitri Ivanovitch Mendeleïev (en russe : Дми́трий Ива́нович Менделе́ев), né le 8 février (27 janvier) 1834 à Tobolsk et mort le 2 février (20 janvier) 1907 à Saint-Pétersbourg, est un chimiste russe. Il est principalement connu pour son travail sur la classification périodique des éléments publiée en 1869 et également appelé « tableau de Mendeleïev ». Il déclara que les éléments chimiques pouvaient être arrangés selon un modèle qui permettait de prévoir les propriétés des éléments encore non découverts« . (Wikipedia)

 

Tableau de Classification périodique ou Tableau de Mendeleiev
Tableau de Classification périodique ou Tableau de Mendeleiev

Le plus spectaculairement brillant avec Mendeleïev, c’est que quand il théorise tout ça, on n’est même pas encore sûr que la matière est composée d’atomes ! Aujourd’hui le tableau de classification périodique est la base de la base en sciences, notamment en chimie. Un peu comme la roue pour l’automobile.

Imaginons ce que c’était à l’époque : Théoriser une classification de tous éléments en fonction d’un hypothétique modèle qui va tomber juste à 100 %; une théorie qui changera le visage de la chimie à tout jamais. Na sdorovie tovarishch Mendeleïev !

 

No. 9 Nikola Tesla

grands esprits (17)
Nikola « Shango » TESLA

Nous allons finir comme nous avons commencé, avec du must, du premier choix. C’est le “last but not least”.

Mesdames, mesdemoiselles et messieurs, je vous prie de faire un tonnerre d’applaudissements pour Nikola Tesla (un tonnerre :D, connaissant les travaux de Tesla, c’est hilarant).

[Le ciel s’ouvre, les lumières jaillissent. C’est la séparation des eaux, la multiplication des pains]

 Nikola Tesla (en serbe cyrillique Никола Тесла), né le 10 juillet 1856 à Smiljan, dans l’Empire d’Autriche (aujourd’hui en Croatie), et mort le 7 janvier 1943 à New York, aux États-Unis, est un inventeur et ingénieur serbe de la Croatie également citoyen américain, ayant principalement œuvré dans le domaine de l’électricité. Considéré comme l’un des plus grands scientifiques dans l’histoire de la technologie, pour avoir déposé quelque 300 brevets couvrant au total 125 inventions (qui seront pour beaucoup d’entre elles attribuées à tort à Thomas Edison), et avoir décrit de nouvelles méthodes pour réaliser la « conversion de l’énergie », Tesla est reconnu comme l’un des ingénieurs les plus créatifs de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Quant à lui, il préférait plutôt se définir comme un découvreur. […] Son nom a été donné au tesla (symbole : T) qui est l’unité d’induction magnétique du Système international d’unités. (Wikipedia)

Crédit: eden-saga.com
Nikola Tesla, le génie du Tonnerre – Crédit: eden-saga.com

Si je devais illustrer Tesla avec une image, je dirais que c’est le Beethoven de la physique moderne. Sans doute le scientifique qui a le plus influencé le monde actuel, grâce à lui, il a pu exister et perdurer une seconde révolution industrielle, par la vulgarisation de l’électricité. Pour imaginer tout ce que nous devons à Nikola Tesla, fermez les yeux une minute et imaginez notre quotidien sans électricité, sans téléphone et sans radio… Voilààà ! Merci qui ? Merci Tesla.

Pour vous donner une idée de l’immensité du monsieur, on va faire un petit quiz. A chaque question, vous répondez seulement « TESLA », un peu comme dans certaines pubs brésiliennes (Serge ou bien? 😉 ).

 

Qui a (vraiment) inventé la radio ? (Aller tous en chœur) T E S L A

Qui a mis au point le radar? T E S L A

A qui doit-on le barrage hydroélectrique ? T E S L A

Qui a mis au point la télécommande ? T E S L A

Qui a failli (?) fournir au monde de l’énergie libre, gratuite et infinie ? T E S L A

Qui est le plus bad-ass des grands génies scientifiques du XIX-XXe siècle ?  Toi-même tu sais. Et il y en a plus encore…


Ce fut très agréable de parcourir ces personnages (Im-Hotep, Ahmed Baba, Zéra Yacob, Joseph de Bologne, Mozart, Beethoven, Al-Djazari, Mendeleïev et Tesla). Il est particulièrement plaisant de se dire qu’ils ne sont que neuf parmi des centaines, voire des milliers d’autres. L’histoire de l’humanité est belle, faite, aussi, de lumières fugaces et d’étincelles tenaces. Osons si possible rêver que nous portons tous ces parcelles de lumière, et puissent-elle être plus brillantes que tous les coups de canons et les éclats d’obus qui émaillent le monde. Pour citer Friedrich von Schiller, repris par Beethoven dans l’ode à la joie:

Ode à la joie
Ode à la joie – Neuvième symphonie de Beethoven

 

Bien à vous,

A.R.D-A.

 


Togo post-électoral : nous voilà la risée de tous

Salutations chères toutes et chers tous,

(J’avais pris pour résolution de ne point m’exprimer sur nos récentes élections, mais… )

Le Togo sort en boitant de la danse tourmente électorale. Ce qui en sort surtout, ce sont les résultats que l’on sait. Je ne m’étendrai guère sur le show politique carnavalesque qu’était la chose, de ses débuts chaotiques jusqu’à la proclamation des résultats. Il a fait bien des hésitants, ce scrutin.

Et la proclamation, le grand final, n’était qu’un paroxysme d’amateurisme, grossier et grotesque, truffé d’erreurs, de fautes (fraude ?) de frappe, de tâtonnements et de corrections au stylo dignes d’une réunion de club de lecture. Une expérience d’un comique navrant pour tout Togolais qui se respecte, voire pour tout Africain. Il y avait un petit quelque chose de suranné sur mon écran de télé cette nuit-là, un anachronisme à vous glacer le sang.

Quant à la mascarade de l’opposition (Fabre et son clan surtout) qui part à la chasse aux fraudeurs (Faure, président réélu, éternel fort et fils de son père, c’est le cas de le dire)… #tristesse #tristesse #tristesse

Une petite phrase résume assez bien la situation :

ENTRE UN RÉGIME FAURCÉ ET UN RÉGIME FABRIQUÉ, LE TOGO EST À LA CROISÉE DES CHEMINS D’UN PROCESSUS DÉMOCRATIQUE DONT L’ACCOUCHEMENT RESTE JUSQU’ICI DIFFICILE.

Au bout du rouleau

figur hat akku leer

Ce que j’ai vu c’est une classe politique, surtout l’opposition, très surfaite, et aujourd’hui en surchauffe, au bout du rouleau, incapable de se réinventer, rabâchant les mêmes formules depuis deux générations. C’est tragique. Pour ceux qui sont sur le trône, je veux bien comprendre qu’on utilise encore les mêmes méthodes, il paraît qu’on ne change pas une équipe qui gagne on ne s’étendra sur la façon dont elle gagne.

Une équipe qui gagne, je veux bien, mais une équipe qui perd (tout le temps) ??? Faudrait penser à renouveler tout ça.

 

La risée de tous

Cependant, ce qui m’aura le plus peiné au terme de cette plongée bourbeuse et marécageuse de la politique politichienne, c’est que l’image du Togo en a encore pris un coup.

Nos péripéties démocratiques nous érigent à présent en exemple, pire encore, en mauvais exemple. Le Togo s’était déjà illustré avec l’arrivée au pouvoir de #Faure, au décès de son père. Ce qui a créé dans le jargon le terme de « succession à la togolaise ». A présent, nous sommes un cas pratique de fixisme démocratique.

En un mot comme en cent, nous sommes la risée de tous. De tous.

Un mandat de plus est un mandat de trop, disait l’autre. Eh ben nous y sommes, nous ! La tête la première. Troisième mandat, troisième mandat, troisième mandat (peut-être que c’est la quatrième qui sera de trop, qui sait ?)…

 

Miabé Faure et ses émules

De toute évidence, notre mésaventure politique, car c’en est une selon moi, donne des ailes à d’autres. L’exemple proche de nous est celui du Dr Yayi, qui laisse un peu un peu ressortir son Mister Hide. Et Nicéphore Soglo, ancien président du Bénin, de le prévenir en sortant la formule qui tue, celle qui immole mon pays sur l’autel des Justes : « Le Bénin ce n’est pas le Togo ». Ben oui, puisque c’est au Togo qu’on peut se permettre ce genre de choses.

Vidéo (02:45)

Voilà donc ce à quoi nous sommes réduits, à être les derniers de la classe à l’école de la démocratie et de l’alternance*


  • Bénin, alternance ? Validé (ça coince un peu, maaais, validé)
  • Burkina-Faso, alternance ? Validé (il a fallu mouiller la chemise et balayer pas mal, mais c’est plus ou moins passé)
  • Ghana, alternance ? Validé (John, John et John)
  • Nigéria, alternance ? Validé (avec les acclamations du jury)
  • Togo, alternance ? (404 not found)

 

Comme on dit: « Qu’est-ce qui n’a pas marché  ? » 

C’est un sujet qui me déplaît au plus haut point. Arrêtons-nous donc là.

C’est dit, le vin ranci est tiré, nous aurons cinq ans pour le boire et le digérer au possible.

 

Bien à vous
A.R.D-A.


*la démocratie vaut ce qu’elle vaut, et j’en pense ce que j’en pense. Mais c’est le paradigme à travers lequel l’actuel concert des nations voit et juge le progrès, alors qu’il en soit ainsi.


« Voter ou ne pas voter, là est la question »… Ce qu’en disent quelques blogueurs togolais

Salutations, chères toutes et chers tous.

La date fatidique du 25 avril jour de l’élection présidentielle #TGPR15 approche à grands pas pour le Togo. Le long feuilleton politico-social, aussi cahotant que chaotique, qui nous y conduit pousse tout un chacun à prendre position vis-à-vis de ce scrutin. Mais au-delà de nos tergiversations, de nos débats houleux et passionnés, des démonstrations les plus complexes aux raisonnements les plus subtils, au final la chose se résume et se condense de manière infiniment plus simple et radicale : irez-vous voter ce 25 avril 2015 ?

Voter ou ne pas voter, là donc est la question… Quelques compatriotes s’y  sont volontiers soumis : CyrilleEliGuillaumeJudithYann (et moi-même).

A question directe réponse directe. Commençons par ceux qui feront le déplacement ce samedi, j’ai nommé Yann, Cyrille et Judith.

Oui

voter (2)

Cyrille (Le Mondoblagueur) :   » Le Togolais est une des rares personnes qui répond toujours au réveil ou dans le courant de la journée, « Ça va bien » à la question : « Comment tu vas ? ». Qu’il ait mangé ou pas, qu’il soit assailli par les soucis ou tenaillé par des douleurs, il te répondra : « Ça va bien ». Notre vie se résume à des choix par défaut. Nous vivons dans des conditions qui se dégradent au jour le jour, par défaut les mêmes s’enrichissent et les mêmes crèvent la dalle. Par défaut nous acceptons tout, les pires injustices, vaincre ou mourir dans la dignité, cette même dignité qui nous a depuis tourné le dos.

Assumer, endosser et pérenniser les choix par défaut, c’est rester chez soi ce 25 avril, en espérant que les choses changent d’elles- mêmes. Personnellement, je vais voter, même si le jeu semble perdu d’avance, parce que ce serait lâche de ne pas assumer ce droit et exprimer mon devoir pour revenir me plaindre de ce qui ne va pas ou rêver de ce qui aurait pu changer. Voter pour moi, c’est assumer mes rêves et caresser l’espoir de les vivre! »

Yann (Petit Togolais libre  devant l’Eternel) :  « Entre hésitation et résolution, après mûre réflexion, j’ai choisi : je vote.  Je vais voter et ce ne sera ni la première fois ni la dernière fois. Je comprends le choix et les raisons de ceux qui ne votent pas. Mais je crois profondément en la démocratie, celle de la participation, peu importent les imperfections. Certes, il n’y a pas d’illusion à se faire sur ce qu’il adviendra de mon vote, mais il vaut mieux voter et faire face à l’accusation de l’histoire que d’être un spectateur passif de la suite des événements. Je vais voter parce que c’est un droit que nous avons conquis dans les larmes et le sang, je vais voter parce que le Togo que je souhaite pour les générations futures c’est un pays qui fait des choix et les assume. Je vais voter pour tous ceux qui sont à l’étranger et qui ne pourront pas exercer leur droit de ce simple fait. Je vais voter pour tous ceux qui ne sont plus là et qui auraient tant voulu glisser leur bulletin dans l’urne. Je vais voter enfin pour mon fils, pour qu’il ait le droit de vivre dans un pays où il aura le droit de devenir quelqu’un sans être le fils de personne. Je vais voter parce que c’est ma liberté, mon choix, mon droit…  inaliénable ».

Judith (La négresse qui pense): « Personnellement, j’entrevois le 25 avril comme un samedi de plus dans notre triste histoire. Catholique et fière, on m’a toujours appris que le devoir citoyen est d’aller porter son choix devant les urnes et voter. J’ai souvent même exhorté tous ceux que je pouvais à porter à un choix ; mais c’est réellement avec une amertume très profonde que je dois avouer que bien que je porte l’envie de voter, il me sera difficile de le faire. Je ne sais pour qui voter. Tiraillée par ma fierté de contribuer à choisir le président du Togo, j’espère avoir assez de force dans ces quelques jours pour aller voter… parce qu’accuser sans porter son choix au moment voulu, c’est lâche et j’espère ne pas être lâche ! »

 Ceci est la parfaite transition pour se tourner ceux qui ne pensent pas mettre de bulletin dans l’urne.


voter (1)

Eli (échos de mes états d’âme« Je suis de ceux qui estiment que pour un meilleur déroulement des élections, un nouveau départ s’impose qui passe par la réforme en profondeur de la Constitution, impératif préalable au scrutin présidentiel. Ce pays a grandement besoin de garde-fous constitutionnels pour freiner l’usure, et la monarchisation rampante du pouvoir.

Il y a une légèreté qui me rend perplexe sur la nécessité d’aller voter. Comment faire confiance à ceux-là qui ne sont pas foutus de satisfaire l’aspiration de 85 % des Togolais – j’en fais partie et je ne m’en cache pas – aux réformes? Je refuse de cautionner cette imposture en allant voter le 25 avril prochain. »

 

Renaud (Mots et murmures, c-à-d ici) : « Entre les réformes repoussées aux calendes grecques, les revendications sociales dont le miabé’pouvoir n’a rien à faire (il s’en c*rre le f*on), et une flopée de candidats qui ne me disent pas grand-chose, j’ai bien assez de raisons de ne pas me livrer à cet étrange exercice prétendument rédempteur qu’est le vote. Vote qui, sous sa forme actuelle, n’est par ailleurs qu’un barbarisme, un faux né de la démocratie à l’occidentale (démocratie de marché et d’opinions).

A une toute autre échelle de considérations, au-delà du seul Togo, je dirais que dans ce contexte d’adversité structurelle, le problème des pays africains ne se limite pas au vote, ce n’est qu’une part (relativement marginale au final) de l’équation… Donc non, je n’irai pas voter. Mais j’observerai avec grand intérêt le déroulement du scrutin. A l’image d’un expérimentateur qui regarderait de fortuits cobayes faire tourner sans cesse la roue dans laquelle ils sont prisonniers, ou d’un amateur d’art plongé dans la contemplation d’une toile très imparfaite en ayant l’irrationnel espoir qu’elle se change subitement en un chef-d’œuvre, par elle-même, comme par magie ou par transfiguration. »

Et pour finir, laissons parler la plume de Guillaume:

Facteur inéluctable de démocratie, les élections sont la scène par excellence d’expression de la volonté populaire par le biais du suffrage exprimé. Par le vote, l’électeur choisit son candidat. Celui qui répond à ses aspirations, dont le programme de société converge avec ses besoins, qui a du charisme et qui par-dessus tout lui inspire confiance.

Malheureusement, pour l’électeur exigeant et impertinent que je suis, les 5 candidats dans la course ont raté le coche, ce qui m’incite à ne pas me déplacer.  Patience, j’en viens aux raisons.

1 – L’absence de réformes constitutionnelles et institutionnelles est pour moi, plus qu’une priorité. C’est une nécessité absolue dans un Etat qui aspire à la démocratie et à l’état de droit.

2 – L’absence de réconciliation nationale due à la non-application des recommandations de la Commission Vérité Justice et Réconciliation.

3 – Le fait que les 5 candidats se soient entendus sur la défectuosité du fichier électoral. Je n’ai pas compris l’intérêt de participer à un scrutin, dont le fichier est dit « non fiable, mais consensuel ». Soit c’est fiable, soit ça ne l’est pas. Il n’y a pas d’à-peu-près dans mon dictionnaire politique.

Pour ce qui est de ces pantins qui parlent de non-violence dernièrement j’aimerais leur faire savoir que même s’il vaut mieux jouir en paix de peu de choses que de posséder beaucoup dans le trouble,  je concède cette citation d’Edmund Cooper qui dit :

« Il vaut peut-être mieux une juste violence qu’une paix à tout prix. »


 

 En espérant que tout ceci nous aura édifiés.

Bonne élection à nous tous; oui à nous tous, car au final nous serons tous dans ces 55 600 km² pendant et après ce scrutin. Le vin tiré, nous le boirons ensemble. Alors puisse-t-il avoir bon goût.  

Bien à vous!

A.R.D-A. & Camarades

 

 

 


La violence dans l’histoire (3) – Fin

Salutations chers tous

J’aime à penser que ce troisième et dernier volet de « la violence dans l’histoire » vous trouve en bonne forme. C’est une chose étrange que de poursuivre sur ce sujet au vue de l’actualité, les tragédies qui émaillent le monde entier, surtout celles du Kenya, sont encore très vives et bouleversantes dans les esprits. Je profite de l’occasion pour dire, encore une fois, nos condoléances aux familles. Malheureusement, les mots et les larmes ne font pas tout!

Enfin, ce qu’un Homme a commencé un Homme doit finir.

Dans cette dernière partie (ici partie 1 et partie 2) nous allons encore descendre dans les échelles de considération. Être plus « terre à terre » et palpables que précédemment.

 

Violence et dialectique : résistance, soumission et régression.

C’est un aspect de la question qu’il me parait important de soulever.

Violence dans l'histoireQuand on prend une seule carte à jouer et qu’on la plie, elle casse vite. Tout un paquet par contre ploie mais ne romps pas. Ceci dit, si vous maintenez la pression suffisamment longtemps autour du paquet, il finira par casser également, feuillet par feuillet. Bien évidemment, ce sont les cartes les plus exposées à la pression qui cèdent en premier.

Ceci est une illustration parfaite de ce que je veux aborder. Quand un peuple subit une violence et/ou une domination extérieure, il y a systématiquement deux types d’individus qui apparaissent : Les résistants et les soumis (toujours, ils apparaissent toujours). Si la violence s’installe pendant suffisamment longtemps et que l’ennemi est beaucoup plus fort, les résistants sont éliminés (tués, emprisonnés ou déportés, au choix). Il s’en suit donc une régression radicale du peuple, tant sur le plan du matériel génétique (les forts, les courageux et les résistants ayant été éliminés, il ne reste que les planqués, les collabos et les plus faibles) que sur le plan moral (la couardise devient une valeur de survie, tout comme la délation et la soumission. La majorité des parents enseigne à leurs enfants à courber l’échine, à ne pas trop la ramener, à faire tout bien comme il faut). A long terme, cela oblitère l’esprit de grandeur et l’audace d’un peuple. Une expression de chez moi illustre fort bien la chose, je pense : « manon tonyéviadji » (Que je me contente du peu que j’ai).

Comme un parasite dans un corps malade, les traitres et les collabos fleurissent et se développent, dominent leur congénères et profitent du système : Exemple des royaumes esclavagistes pendant la traite négrière ou d’une certaine pseudo-élite économique à l’époque coloniale et à la plus récente époque néocoloniale)

Comme on dit : « A la guerre, ce sont les meilleurs qui partent en premier ». C’est tragique.

 

La violence dans l’histoire : quelques cas.

1- Afrique, être trop « civilisée » a fait sa ruine.

Un africain conscient de son histoire ne sait que trop bien à quel point les rapports de peuple à peuple peuvent être violents, surtout envers les plus gens les plus civilisés. Pour nous, les cinq derniers siècles sont particulièrement édifiants. Comment sommes-nous passés de la grandeur de l’Afrique Classique à ce b*rdel généralisé, ce brouillard diffus de médiocrité, d’aliénation et de désunion ? Une certaine violence y est pour beaucoup.

violence dans l'histoire (4)
Œuvres (très) réalistes – Empire du Bénin

A partir du XVème siècle, le contact avec l’Occident a été source d’une grande violence, une violence que peu de gens peuvent réellement comprendre et mesurer encore à ce jour. Il ne s’agit pas de pleurniche, ce sont juste les faits. A l’aube du XVIème les grands royaumes du continent avaient un niveau très acceptable par rapport à l’échelle mondiale, voire un niveau supérieur (comme dans la gestion de l’état et l’alimentation pour tous).  Évidemment, les choses n’auraient pu être possible sans les nombreux soumis et traitres qui jalonnent notre histoire, ça aussi ce sont les faits.

Si on doit simplifier, condenser et prendre des raccourcis, ce qui a fait la différence c’est le canon. D’une certaine façon, l’Afrique était trop « civilisée » pour se concentrer sur la fabrication des armes. Tout le reste n’est qu’une résultante logique de la violence prolongée (se référer au paragraphe « Dialectique de la violence : résistance, soumission et régression »). Mais bon, ce qui est fait est fait.

Crédit:nahlaciss.chez.com
Crédit:nahlaciss.chez.com

La leçon à retenir:

Si tu as de hautes pyramides, de belles villes, de grandes bibliothèques ou de grands greniers, assure toi aussi d’avoir un gros gourdin (Sinon tu ne feras pas long feu et les enfants de tes enfants auront oublié jusqu’à ton existence)

 

 

2- La thalassocratie Britannique (puis anglo-saxonne)

Violence dans l'histoire (20)En la matière, l’empire Britannique est un cas d’école. Un royaume relativement petit qui réussit à conquérir la majeure partie du monde, à imposer sa domination jusqu’à nos jours (en ayant passé le témoin aux États-Unis). Elle a même compensé sa petitesse géographique une domination basée sur la mer : une thalassocratie. Paradoxalement, ils ont probablement été un des peuples les plus sanguinaires et les plus génocidaires de la planète. Même si ce n’est pas à eux qu’on penserait en premier en y songeant. Que ce soit avec les amérindiens, les aborigènes, les birmans, j’en passe et des meilleurs. Pour paraphraser Churchill « Ce n’est pas la supériorité de nos idéaux ou de notre philosophie qui nous a rendu maitres du monde mais bien notre capacité à maitriser la violence organisée ». C’est rien de le dire.

C’est le monopole de la violence a été un atout majeur dans la grandeur de l’Angleterre (puis de l’Amérique). Les anglais ont pris de l’avance sur leurs camarades d’Europe lors de guerres successives (nous l’évoquions dans la première partie: la débâcle de L’Invincible Armada pour les espagnols, la bataille de Waterloo puis Trafalgar pour les français). Quand on sait que les Yankees ont été en guerre 222 ans sur leurs 239 ans d’existence, on comprend beaucoup de choses. Le concept de Pax americana n’est pas tombé du ciel.

Crédit: https://reseauinternational.net
Pays avec des bases américaines – Crédit: https://reseauinternational.net

Nous sommes un peuple de la guerre. Nous aimons la guerre parce que nous sommes très bons à la faire. En fait, c’est la seule chose que nous savons faire dans ce putain de pays: faire la guerre, on a eu beaucoup de temps de pratique et aussi parce que c’est sûr que nous ne sommes plus capables de construire une machine à laver ou une voiture qui vaille un pet de lapin ; par contre si vous avez plein de bronzés dans votre pays, dites leur de faire gaffe parce qu’on va venir leur foutre des bombes sur la gueule… – George Carlin

 

3- Haïti ou « La violence utilisée à bon escient »

Crédit: faculty.goucher.edu
Crédit: faculty.goucher.edu

Haïti est sans doute un autre aspect de l’usage de la violence. Pour autant que je sache, la libération de ce Saint Domingue, la révolution Haïtienne ne s’est pas faite autour d’une table de négociation, lors d’un « débat d’Idées ». Et c’est euphémisme. La révolution haïtienne a été d’une violence inouïe, mais il fallait ce qu’il fallait pour se libérer du joug esclavagiste. C’est d’ailleurs le lieu de rendre un énième hommage mérité à Toussaint Louverture, un des plus grands génies militaires de son temps.

 

Maitrise de la violence directe Vs Non maitrise de la violence indirecte.

Le plus triste dans l’histoire, c’est que si Haïti a su maitriser la violence frontale et directe, il n’en fut pas de même pour la violence indirecte, ce qui lui a couté cher : Les multiples trahisons, les mensonges, coups fourrés au sommet, la capture de Louverture, les manipulations bancaires et cette immonde dette que l’Ile était censée payer aux esclavagistes… Toutes ces choses, en plus de l’occupation de l’ile par des forces étrangères et de la dictature, ont eu raison de l’Ile, l’ont changé en ce cloaque de désolation que nous dépeignent les média.

 

4- William Lynch

Pour donner une idée, c’est de lui que vient le mot « lyncher ». Ceci est un discours de William Lynch, en 1712 en Virginie. Lynch était un propriétaire d’esclaves anglais des Caraïbes. Il présenta ses techniques et méthodes particulièrement efficaces pour garder le contrôle des esclaves. C’était une forme très « hard » de Mind Kontrol Ultra si vous voulez. Pour lui, il s’agissait d’expliquer à ses « potes » esclavagistes comment empêcher les nègres indisciplinés de s’unir. C’était un genre d’expert en la matière :

Mesdames, Messieurs, Je vous salue ici, en cette année de notre seigneur, 1712 (…) Si je suis là aujourd’hui, c’est pour vous aider à résoudre les problèmes que vous avez avec vos esclaves. J’ai expérimenté dans ma modeste plantation, des méthodes nouvelles de contrôle des esclaves. La Rome antique nous envierait si mon programme était appliqué. Non seulement vous perdez de l’argent en pendant vos esclaves, vous avez aussi des insurrections, des révoltes, vos champs restant ainsi longtemps sans être cultivés, vos propriétés sont souvent victimes d’incendies, votre cheptel est tué. Je ne suis pas là pour énumérer tous les problèmes que vous avez avec ces esclaves, mais pour vous aider à les résoudre. (…)

Je fais ressortir un certain nombre de différences parmi les esclaves; il me suffit de reprendre ces différences, de les agrandir, de les exagérer. Puis je suscite la peur, la méfiance, l’envie, la méfiance en eux, afin de les contrôler; par exemple, prenez cette liste de différences: l’âge, la couleur, l’intelligence, la taille, le sexe, la superficie des plantations, l’attitude des propriétaires, le lieu d’habitation des esclaves (vallées, montagnes, l’est, l’ouest, le nord, le sud), le type de cheveux des esclaves (fins ou crépus), la taille des esclaves (grands de taille ou courts). Je vais ensuite vous donner une stratégie d’action pour mettre tous ces éléments ensemble; mais avant tout, j’aimerais vous dire que la méfiance, le manque de confiance en soi, est plus efficace que le respect ou l’admiration. L’esclave noir, après avoir reçu ce lavage de cerveau, perpétuera de lui-même et développera ces sentiments qui influenceront son comportement pendant des centaines voire des milliers d’années, sans que nous n’avions plus besoin d’intervenir. Leur soumission à nous et à notre civilisation sera non seulement totale mais également profonde et durable. N’oubliez jamais que vous devez opposer les adultes et les noirs âgés aux plus jeunes, les noirs à peau foncée aux noirs à peau plus claire, la femme noire à l’homme noir (…) cela vous permettra d’asseoir une domination quasi éternelle sur eux.»  William Lynch, 1712, Colonie de Virginie. (Ici  l’Intégralité du discours)

Au point de vue strictement théorique, ce raffinement dans l’usage de la violence est tout à fait fascinant. De même que le recours à l’intemporel « divide ut regnes » (diviser pour mieux régner). Quant à savoir ce qu’inspire ce genre de méthodes… je laisse à chacun le soin d’en penser ce qu’il en pense. La formule est très souvent remise au gout du jour en tant qu’outil de domination. Son usage n’est bien évidemment pas restreint à une seule « race » ou une seule région. Que voulez-vous, « on ne change pas une équipe qui gagne ».

Il va sans dire que le dossier de la violence est très très grand, les cas sont légions. C’est question pleine d’attrait mais nous ne saurions en discuter dans les limites de cette esquisse.

Ceci clôt cette discussion qui s’est quelque peu éternisée. Mes salutations à ceux qui m’auront tenu compagnie jusqu’ici. On pourra refermer ce chapitre quelque peu « amer » et voir vers d’autres directions.

Bien à vous,

A.R.D-A.


Eclosion

Et le doigt

Démiurge

Forge un mot-monde, un mot-bocal

Pour y loger sa folie créatrice

Se tailler une parcelle de Dieu

A même la chair infinie de l’imaginaire

Un brin d’éclosion pour tromper le silence

 

Une façon comme une autre

De dire « je t’aime »

A une plume égarée

Tombée de l’assiette du Créateur

Pour dompter l’impétueuse virtuosité

Du monde,

Qui se maquille devant la glace

Qui se dit et se redit sans cesse

Comme un murmure phosphorescent

Qui survole et nargue le néant

Ayi Renaud DOSSAVI-ALIPOEH (A.R.D-A.)

Lomé, 09 04 2015


Charlie ou Kenya… Moi je suis Kenya !

Crédit: www.jihadwatch.org
Crédit: www.jihadwatch.org

Nous voilà donc, chers amis, en ce jour qui commence. Le visage morose, l’esprit enfiévré, l’âme tuméfiée, il persiste dans notre bouche comme un gout de pisse, une amertume diffuse et atroce qui refuse de céder face aux festivités de la résurrection de Jésus de Nazareth, sauveur des chrétiens. Car nous émergeons à peine des relents vaporeux de ce qui restera dans nos mémoires comme la fête de Pâques rouge, rouge du sang kényan qui a coulé et souillé un temple du savoir, rouge de l’innocence égorgée sur l’autel de la barbarie,  rouge de la colère et de la douleur des familles éplorées.

Entre colère et frustration

Que ce soit pour le Niger, le Nigeria ou le Kenya, je remarque que ces fameux « soldats de Allah » ne s’en prennent qu’à des pays riches en ressources et/ou qui ont toutes les chances de devenir des leaders d’une renaissance panafricaine. Un chaos bien salutaire à certains manipulateurs… tiens, le hasard sûrement. Face à l’ampleur de l’horreur, nous sommes partagés, submergés de sentiments violents. Deux d’entre eux retiennent mon attention :kenya garissa charlie (3)

La haine contre ces prétendus soldats d’Allah qui font (et coupent) des pieds et des mains pour nous tirer par la tignasse des cheveux dans une pathétique et mortifiante guerre de religion. Allons-nous sombrer dans la violence ?

Le dépit, le dépit profond et l’indicible frustration face au monde qui était Charlie il n’y a pas si longtemps, mais qui s’en fout royalement de Garissa.

Nous n’allons même pas entrer dans des considérations numériques, c’est un décompte macabre que j’ai toujours trouvé indécent (encore qu’on pourrait le faire, que ce soit pour les 100 millions de l’esclavage, les 6 millions de la Shoah ou les 10 millions du Congo).

Un deux-poids deux-mesures pas du tout étonnant

Étonné par la différence de traitement de cette tragédie dans les médias main-stream ? Pourquoi ? Moi, ce qui m’étonne, c’est ceux que ça étonne.

kenya garissa charlie

Cette maxime dit. Au cas vous ne l’auriez pas remarqué, c’est comme ça que fonctionne le monde. Je sais que la religion du droit de l’hommisme et de l’égalitarisme abstrait a fait beaucoup de dégâts dans l’esprit de mes compatriotes africains, mais il y a des choses élémentaires à ne pas oublier :

  • Personne ne se fait respecter par les larmes et la pleurniche. Surtout pas quand on se traîne à longueur de siècle une image savamment entretenue de demi-sauvage et de primitif affamé.
  • Il faut pleurer la mort de son fils avant d’aller pleurer celle du voisin. Si le voisin est plus riche que toi et qu’il ameute tout le quartier, c’est son droit… Mais est- ce que toi tu es obligé d’aller aux funérailles de son cousin ou de sa belle-mère quand lui il ne vient jamais aux funérailles de tes enfants ? Non, mais où on a jamais vu ça ? C’est quelle affaire ça? Chez moi, c’est ce qu’on appelle être « Honvi ».

On peut être Charlie et Kényan.

Certes, on peut être ému pour les tueries de Paris et pour le massacre de Garissa en même temps. La question ne se pose pas. C’est même la moindre des choses… Mais alors, où sont les Kényans à l’heure de ce drame ? Mieux encore, où sont les #JesuisKenya parmi les #JesuisCharlie ?

Où sont donc les Charlie, les Charlots et autres bisounours ?

D’aucuns considèrent le massacre de Garissa comme sur fond religieux et l’affaire Charlie Hebdo étant plutôt dans le cadre de la sacro-sainte « liberté d’expression ». Le dossier de Garissa est considéré par ces « experts » comme non conforme pour être sponsorisé. Moi je dis « Gratte-moi le dos ». C’est de la tartufferie ou je ne m’y connais pas.

Comme dirait l’aîné Kpelly :

kenya garissa charlie (5)Tu es Africain, tu es touché par ce qui s’est passé au Kenya? Eh bien, compatis à ta manière. Et comme cela se fait sur Facebook, mets ‘Je suis Kenya » ou une bougie sur fond noir avec KENYA écrit dessus en photo de profil, et, surtout, boucle-la. « Oui, voilà, les Blancs ne disent rien sur le drame kényan, aucun d’eux n’a mis « Je suis Kenya » sur son profil, alors que pour Paris nous avions tous mis « Je suis Charlie… » Vraiment, boucle-la. Ce n’est pas à coups de larmes et de pleurnichements et de soupirs qu’on réussira à tourner le cœur de qui que ce soit vers l’Afrique. La compassionb ça ne s’achète pas. Surtout pas avec des larmes !

Voilà qui est dit et bien dit.

J’épouse entièrement la pensée d’un autre aîné, Kossi Noglo :

Crédit AFP - Carl de Souza
Crédit AFP – Carl de Souza

Chers amis africains, près de 150 personnes assassinées chez nous et nous ne voyons aucun chef d’Etat occidental venir faire une marche au Kenya. Nous ne voyons aucun T Shirt « Je suis…. ». Nous ne voyons pas les grandes chaînes de télé passer la nouvelle en boucle. Nous ne voyons aucune célébrité se scandaliser, aucun débat télé? On a vu tout ça quand il y a eu 12 tués à Paris n’est-ce pas? Ça montre bien le MANQUE DE CONSIDÉRATION qu’on vous donne en tant que race, culture et continent. La prochaine fois vous réfléchirez mieux avant d’aller STUPIDEMENT témoigner de la compassion alors qu’on ne vous rendra pas la pareille.

 

Nil novi sub sol

Pour moi, comme dirait la Bible, il n’y a « rien de nouveau sous le soleil ». Ces gens-là n’ont jamais eu de considération pour nous, pourquoi ça changerait aujourd’hui ? Arrêtons de quémander leurs larmes, leur commisération et leur considération. Si CNN & Cie avaient été des chaînes africaines ou panafricaines, je crois que ça se saurait.

Un journaliste travaille pour celui qui le paie, est-ce  vous qui payez ceux de CNN ? Hein ?

D’ailleurs on peut prolonger cette question : qui finance les shebabs, Boko-Haram et autres Aqmi ? Qui ? D’où viennent leurs armes ? Allah peut-être ? Comme dirait un grand érudit musulman, le cheikh Imran Hossein :

« Ce n’est pas le père Noël qui fournit les armes à l’Etat islamique ». Cheikh Imran Hossein

Il serait grand temps que nous retrouvions le chemin de l’intelligence. Au lieu d’être là à pleurnicher encore, à se demander « pourquoi pas nous » encore. Ceci est un monde de violence, tout particulièrement envers les plus faibles. D’ailleurs, en parlant de violence, attendez de voir le grand bouquet final (et mondial) que les puissants nous réservent, vous allez bien être Charlie.

Nous ne pouvons exiger d’être traités avec respect et considération tant que nous sommes faibles. Arrêtons d’être étonnés.

Je n’ai jamais été Charlot et ce n’est pas demain que ça va changer. Pour ceux qui disent qu’être Charlie, c’est être pour la liberté d’expression, soit, c’est une façon comme une autre de voir les choses.

Et nos chefs d’Etat… Immonde et affligeante soumission !

Crédit: www.rewmi.com
Crédit: www.rewmi.com

Le plus mortifiant, c’est nos chefs d’Etat, surtout la bande à Charlie n’ont pas daigné faire un discours ou une condamnation. Rien, zéro, nada, peau de balle. Trop occupés à bien se faire voir par le maître, ils se sont comportés en dignes gardiens de plantation en allant marcher comme des toutous bien dociles à Paris. Je ne parle même pas des larmes de certains, comble de l’humiliation. A croire que leur pays respectif ne se trouve pas en Afrique. Dans leur esprit, comme dans celui de beaucoup, il y a leur pays, et puis il y a la France, l’Europe et les States. Ils se sentent éminemment plus proches de Paris que de leurs voisins.

Le plus tragique c’est que, par leur comportement, ils nous forcent à choisir notre camp entre les tragédies en Afrique et celles d’ailleurs.

 

C’est bien la preuve que nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge…  ou plutôt de l’abattoir, pauvres moutons charlots que nous sommes. Notre sang coulera encore, encore et encore, dans l’indifférence générale, mais ce n’est pas grave, puisque « nous sommes tous Charlie ».

Alors, quand retiendrons-nous donc les leçons de l’Histoire ? Notre sang carbonique et « sauvage » n’intéresse personne. Nous sommes seuls.

kenya garissa charlie (2)

Bien vous

A.R.D-A.


La violence dans l’histoire (2)

Prolégomènes :

Ce billet ne sera ni une incitation à la violence, ni une apologie de la violence, « aveugle » ou non. Encore moins un procès à telle vision du monde ou tel courant de pensée.

Ceci se veut une discussion amicale et, je l’espère, aussi plaisante qu’édifiante. Une réflexion strictement théorique au sujet de la « Violence dans l’histoire », au sens global du terme. J’ai trouvé intéressant de mettre le doigt sur certaines contradictions doctrinales auxquelles nous nous heurtons souvent. Notamment dans nos pays « autrefois » colonisés et soumis à la prédation de puissances extérieures.

Salutations, chères toutes et chers tous

Poursuivons donc cette discussion: « La Violence dans l’histoire ». Charmant sujet s’il en est. (Ici partie 1). Tachons ensemble de quitter un plan général pour aller « plus bas » dans les échelles de considération.

 

Systèmes et Violence: Quand un système veut ta peau c’est qu’il veut ta peau. Point barre !

En un mot comme en cent, ça donne ceci :

« Le monde actuel est une jungle, et c’est deux fois plus une jungle pour les peuples africains…pas parce qu’ils sont noirs mais parce qu’ils sont faibles et naïfs.»

Le monde est régi par un système, ce système écrase les plus faibles, nous faisons partie des plus faibles, donc ce système veut notre peau. Fin de la discussion (C’est plutôt simple il me semble… un gosse de sept ans comprendrait du premier coup).

Violence dans l'histoire (6)En suivant un peu l’Histoire, on finit pas ne plus être surpris par le genre humain. Pour ceux qui ont gentils pour croire que les hommes, ou plutôt les castes dirigeantes, ne sauraient être malveillantes (plus qu’elles ne l’ont été par le passé!)…Eh bien, comme disait Nietzsche:

N’oublions pas que:

  « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. » (Bossuet)

Violence dans l'histoire (12)

Les systèmes n’ont aucune morale et une aucune conscience. Les attentats barbares de Kenya ne font que le prouver à suffisance, si besoin en était encore. Je suis certain que pendant l’esclavage, la colonisation ou encore l’occupation française par le régime Hitlérien, il y avait par ci par là une ou deux bonnes âmes charitables envers les opprimés ; de là à dire que ces systèmes de choses en eux-mêmes étaient charitables, je crois qu’il y a un énooooooooooooooorme fossé.

Je le redis:

Pour peu qu’il soit suffisamment sûr de lui-même et aliéné par sa propre idéologie, un système ou un État n’a aucune morale, aucune conscience, aucune limite dans l’horreur, la mesquinerie ou la méchanceté.

Ainsi, quand un système ou un pouvoir repose sur la violence, il créera et utilisera toujours de la violence, tout le reste n’est que de la littérature de la mauvaise qui plus est.

Les génocides et les exterminations ont tous été pratiqués par l’État, jamais par l’individu ou le peuple.

Il est donc illusoire de croire qu’on va changer un système (d’oppression ou non) en jouant sur la conscience de ceux qui en profitent. Comme s’ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient. Pour ce qui est de la violence en tant que moyen de libération, outil de l’opprimé, je laisse la parole au « vrai gars » Malcolm X.

La violence vue d’en haut et la violence vue d’en bas

La violence n’est pas la même pour tout le monde. Tout dépend de là où on se trouve dans la pyramide du pouvoir. Je vais prendre un exemple simple : Imaginons qu’on soit en pleine guerre, quelque part. Un état-major décide qu’une certaine ville est importante stratégiquement…

« Mein führer Cette ville sera difficile à prendre»

« Combien d’hommes cela nous coutera, à peu près ? »

« Cent mille hommes ».

« Eh bien on va sacrifier cent mille hommes »

« On dénombre également cinq cent mille civils dans les régions d’habitation »

« Tant pis pour eux, des bombardements ciblés nous ferraient perdre trop de temps… la guerre n’épargne pas les civils.»

Vous voyez où je veux en venir ? La guerre du point de vue de Sani Abacha ou du Général Joukov n’est pas la même que la guerre du point de vue de la pauvre femme dont le mari et les enfants se feront massacrer, elle-même violée à plusieurs reprises par les « forces du bien ». Ni la guerre du point de vue du pauvre soldat qui n’a rien demandé et n’y comprends rien mais qui est là juste pour « servir son pays».

Ainsi, pour autant qu’on puisse justifier théoriquement la violence intelligemment et sagement utilisée de manière très ciblée dans l’espace et le temps, il n’en est pas moins que c’est une horreur absolue…surtout pour ceux qui la subissent vraiment.  De ce point de vue, je donne raison aux pacifistes.

 

Violence directe/Violence indirecte.

J’entends par « violence indirecte » l’ensemble de moyens d’agression plus subtils que l’attaque physique frontale: Les médias-mensonges, la désinformation sur sujets importants, les impôts injustifiés, les coup d’état non violents, l’expropriation à coup de millions, la prédation foncière, le système esclavagiste de la dette etc…

Dans le monde prétendument évolué d’aujourd’hui, la violence indirecte est la plus répandue. Elle est plus soft, plus clean et plus « raffinée ». Elle est extrêmement efficace parce qu’elle pousse l’esclave à aimer ses chaines, même quand il sent que quelque chose ne va pas, détricoter le réseau de chaines et de nœuds coulants qui l’étouffe lui demande du recul, de la patience ainsi qu’un certain travail de réflexion et d’érudition. Choses qu’il est de moins en moins capable de fournir.

Bien évidemment, la violence directe n’est jamais loin. Il suffit de voir la taille des armées des trois grandes puissances actuelles. Ou encore les moyens dont disposent les forces du bien comme l’OTAN ou l’AFRICOM, j’en passe et des meilleurs.

 

Violence structurelle : le capitalisme libéral « sauvage ».

Un système basé sur la violence génère toujours de la violence et de l’oppression. La violence et l’injustice qui en découlent immanquablement sont structurelles. Ce ne sont pas des anomalies mais des effets logiques du système.

Violence dans l'histoire (13)L’exemple le plus intéressant est sans doute le capitalisme sauvage. C’est de la violence pure et simple. Il a causé bien plus de morts que la guerre du Biafra ou du Congo. Je dirais même que ces guerres, comme beaucoup d’autres, ne sont que des conséquences du système. Le capitalisme sauvage il est oppressif et destructeur par essence. J’en veux pour preuve le nombre de femmes et d’enfants morts dans la misère et la famine à cause du racket bancaire, du système de la dette, des malversations financières de multinationales comme Lehmann Brothers, Goldman Sachs, le FMI et autres joyeusetés.

Violence dans l'histoire (11)Le système de la dette et le capitalisme libéral sauvage fera tout (TOUT!) pour perdurer et se survivre à lui-même jusqu’à ce qu’il ploie complètement sous le poids de ses contradictions.  

 

 

 

L’éternel retour du concret ou les limites des mots.

On peut faire ou dire tout ce qu’on veut avec les mots (discours pompeux, belles théories, concepts fumants ou fumeux). On peut embobiner autant qu’on veut, mais sur l’échelle du temps, sur la durée, Le concret, ou le contexte, est toujours plus fort que le concept, aussi beau et séduisant soit-il :Si une théorie est fausse,  si un discours est mensonger, les faits finiront fatalement par lui donner tort. Ce n’est qu’une question de temps. C’est ce que le grand Lénine appelait « l’éternel retour du concret ». Les faits sont têtus et radicaux, ils ne négocient pas: Ce n’est pas parce que nous nous persuadons que tout le monde il est bon, tout le monde il est gentil qu’il en est ainsi.

Violence dans l'histoire (8)Il n’y a qu’à voir le deux-poids-deux-mesures obscène entre les douze morts de Charlie Hebdo et les dizaines de victime de Boko Haram au Nigéria ou les 140 victime du Kenya !

De même, si une stratégie ne marche pas dans un contexte donné, elle ne marchera jamais dans le même contexte. JAMAIS. Soit on change de contexte, soit on change de stratégie. Sinon… Eh bien, une fois n’est pas coutume, je m’en réfère à la Bible :

Violence dans l'histoireNous sommes dans un monde de violence structurelle, où la lutte des classes se superpose et s’hybride à la lutte des races d’une façon très malsaine et très ambiguë. Dans un tel monde, il est souhaitable et même salutaire que ce soit le plus raisonnable et pacifique de tous qui possède les armes les plus puissantes et dévastatrices. Ne serait-ce que pour ne jamais s’en servir ou les détruire.

Pratiquez l’hospitalité, les danses autour du feu, les veillées de prières et de chants, et tout ce que vous voulez, mais de grâce, faîtes-le à l’ombre de vos bombes atomiques (à vous). Si l’agneau ne peut pas empêcher le loup d’être ce qu’il est, qu’il se construise au moins une solide clôture. Ce sera ça de gagné.

De la barbarie

Tout ceci étant dit, ne nous méprenons pas. La violence ne saurait en aucune façon être un but ou une fin soit (sauf quand on est marchand d’armes). C’est un outil expéditif et dangereux, une lame à double tranchant. Je dirais même que c’est une arme encore plus dangereuse pour celui qui la brandit. Là encore je donne raison aux pacifistes forcenés… ou plutôt je peux les comprendre.

On connait la formule : Qui tue par l’épée meurt par l’épée. (Enfin, je connais deux ou trois dictateurs et traitres à l’Afrique qui sont morts dans leur lit, mais bon, c’est une autre histoire). D’autre part, gardons à l’esprit qu’il n’y a rien de pire pour une nation qu’une guerre inutile, notamment une guerre civile. Ces choses sont souvent le fait de manipulations extérieures avec la complicité de quelques traitres et compradors, il y a toujours, malheureusement. Les exemples sont légions : Liban, Liberia, Congo, Kosovo etc… Aucun pays n’est jamais sorti fort et grandi d’une guerre civile. Aucun.

Il y a donc un glissement dangereux: De la violence intelligemment et rigoureusement modulée dans le temps et l’espace à la violence tout court: la sauvagerie et la destruction intégrale. Avec son cortège de morts, de souffrances etc. Une bagarre, on sait comment elle commence, mais rarement comment elle finit.

Comme le suggérait notre brillant salaud de service: et si on faisait économie des révolutions en Afrique?. C’est une idée.

 

A bientôt pour en finir avec toute cette violence… 🙂

Bien à vous

A.R.D-A.


Faites-nous la nuit

Faites-nous la nuit juchée sur des espérances en bikini Des douceurs aguicheuses habillées d’étoiles et de grains de beautés Des rêves à la jupe légère dansant en farandole Autour des sentiers incendiés de nos désespoirs oubliés   Faites-nous la nuit comme un lent et long baiser… Et l’horloge se brise contre les seins d’un fantasme en robe rouge Et des mains tremblantes plongent vers la terre promise Et des lèvres…


La violence dans l’Histoire (1)

Ce billet ne sera ni une incitation à la violence, ni une apologie de la violence « aveugle » ou non. Encore moins un procès à telle vision du monde ou tel courant de pensée. Ceci se veut une discussion amicale et, je l’espère, aussi plaisante qu’édifiante. Une réflexion strictement théorique au sujet de la « Violence dans l’histoire », au sens global du terme. J’ai trouvé intéressant de mettre le doigt sur certaines contradictions doctrinales auxquelles nous nous heurtons souvent. Notamment dans nos pays « autrefois » colonisés et soumis à la prédation de puissances extérieures.


En vérité, en vérité je vous le dis : Jésus-Christ était un Sénégalais

Récemment, le camarade et aîné Fosto Fonkam a très brillamment parlé de l’opposition des religions abrahamiques avec les spiritualités classiques africaines. Il montra bien la tartuferie monumentale, le deux poids deux mesures, ainsi que le manque de cohérence dont nous faisons preuve dans notre façon d’appréhender ces deux systèmes de valeur. Le « mysticisme » et « culte » des morts de l’un étant « mystère » et « vénération des saints » de l’autre. « Les idoles » de l’un étant « les symboles » de l’autre.

Jésus christ africain (5)
Crédit: tempsreel.nouvelobs.com

De fait, Je ne saurais que trop abonder dans son sens. J’aurais même été plus loin en certains points. D’ailleurs, dans le présent billet, je compte bien aborder un autre pan de cette épineuse et vaste question. Car en vérité, en vérité je vous le dis : Jésus-Christ était un Sénégalais.

Comme je le disais dans un billet sur le père Noël :

J’entends traiter ici des images et des icônes que nous avons, car je pense que ces éléments jouent un rôle fondamental dans notre structuration mentale profonde. Nous sommes ce que nous voyons.

Je dirais même plus :

Ce que nous croyons nous fait.  A plus forte raison ce en quoi nous croyons!

Je tiens à préciser une chose. J’ai évolué dans un univers très chrétien catholique, et c’est un euphémisme (j’ai été intéressé par les ordres à une époque, on a deux curés dans la famille, j’ai eu un grand-oncle évêque, et mon arrière-grand-père était catéchiste… c’est vous dire…) Je me considère encore comme un catholique culturel. Mais j’ai aussi beaucoup beaucoup beaucoup étudié l’église, sa construction et son histoire. De ses premiers balbutiements à sa progressive dégénérescence actuelle. Des conciles de Nicée aux conciles de Vatican (I & II), en passant par le concile de Trente, l’Inquisition, et la légalisation de l’esclavage par le Pape Nicolas V. Je l’ai étudiée un peu plus profondément que la plupart des « chrétiens », j’ose le dire.

Paus Nicolaas V door Peter Paul Rubens
Pape Nicolas V – Auteur de la bulle papale ouvrant la voie aux razzias négrières, en 1454
Pour entrer dans le vif du sujet, je vous propose ce petit exercice :  » Fermons tous les yeux et imaginons Dieu. Dieu tout puissant, dans toute sa bonté, sa miséricorde et sa grandeur. Imaginons-le en train de nous bénir, de nous protéger, de nous sourire paternellement ou maternellement, c’est selon et de nous envoyer tout l’amour du monde « .

Bien, la question : « De quelle couleur était Dieu? » Mieux encore, de quelle « race » était-il ? … Voilààààààààààà, c’est à ça que je voulais en venir.

Crédit; www.chemindemarie.com
« Dieu » Tout-Puissant qui est aux cieux. Pas vraiment une tête de Congolais – Crédit: www.chemindemarie.com

 

Alors, de quelle couleur est « Dieu »?

Inutile de se voiler la face, nombre d’entre nous l’aurons vu comme « blanc ». Un Dieu plus proche du Zeus de la Grèce antique que d’un Wégbadja. Ainsi qu’un Yeshua ben Yosef (*) de Nazareth dit Jésus-Christ tout blond avec des yeux bleus. Pour ceux qui ont vu Dieu sous les traits d’un Wosiré (Osiris, le Kem-Hur), d’un Mérikarè ou d’un Samory Touré, je dis Xotep et félicitations. Vous pouvez arrêter ici la lecture de ce billet. Et merci de m’avoir honoré par votre lecture.

Wsir - Kem Our (Osiris: Le Grand Noir)
Wsir – Kem Our (Osiris: Le Grand Noir)

Et n’allez pas me dire que Dieu n’a pas de couleur C’est un truc de faux-c*l ça. Certes, il n’en a pas. Mais seulement dans son acception purement métaphysique et cosmique du terme. Mais combien, combien de fidèles dits fervents ont cette définition hautement subtile voire ambiguë de Dieu ? Et comment représentez-vous Yeshua ben Yosef de Nazareth, dit le Christ ?

De mon point de vue, les religions sont des systèmes de valeur, un cadre épistémologique de conceptualisation et de compréhension du monde. Du reste, comme disait Sénèque :

L’homme ordinaire tient la religion pour vraie, l’homme sage la trouve fausse et les chefs la trouvent utile. Sénèque

C’est pourquoi je ne saurais débattre de religion avec un religieux dit « fervent ». Car, par définition, un « croyant » ne débat pas, il ne soupèse pas, il croit. Encore faut-il savoir ce les gens, surtout les Africains, entendent par « être chrétien ». Bien souvent ils sont à cheval entre traditions classiques et religions abrahamiques, même s’ils ne veulent ou ne peuvent se l’admettre.

Ce dieu « blanc » qui me regarde

Cela dit, et c’est là tout mon propos, je trouve infiniment malsain, pathologique et délétère pour nous, Africains, de rentrer dans une église pour nous agenouiller devant un « dieu » qui n’est pas « à notre image et à notre ressemblance ». Et pour ceux qui croient que c’est vraiment Jean-Claude qui se trouve sur cette croix : Vous connaissez beaucoup de blonds aux yeux bleus qui viennent d’Asie mineure ou du Moyen-Orient ? Depuis quand les sémites sont des blonds aux yeux bleus ? A plus forte raison des Africains ???

C’est comme si nous donnions nous-mêmes le bâton pour nous faire battre. Les leucodermes ont représenté Dieu « à leur image et leur ressemblance », c’est la moindre des choses. Je dirais même que c’est tout à leur honneur. Il serait grand temps que nous en fassions de même, tout simplement. Se reconstruire passe aussi et surtout par la repossession de son mental et par la maîtrise de son univers. Il n’y a rien de sain, pour l’Africain, à s’agenouiller devant une entité qui n’est pas à sa ressemblance. Ce n’est pas du racisme, c’est du strict bon sens.

ChineseJesus
La représentation de la race de Jésus a été influencée par le cadre culturel9,49 : illustration chinoise, Beijing, 1879. – Crédit; Wikipedia
Jésus-Christ africain… oui pourquoi pas?

Il n’y a aucun blasphème ou aucune hérésie là-dedans. ça fait des siècles et des siècles que le mec change régulièrement de visage. Très sérieusement, si le Christ revenait là tout de suite, très, très, mais alors très peu de personnes le reconnaitraient. Vous la voyez venir, l’arnaque, ou pas?

CompositeJesus
Les auteurs ne s’entendent pas sur la race et l’apparence de Jésus ; il a été représenté sous de multiples aspects au fil des siècles. Crédit – Wikipedia
 Coupez la pomme en deux, faites-nous un  » Dieu » africain

Si vous n’avez pas le cœur de revenir à des traditions classiques en ancestrales, de grâce, représentez au moins votre sauveur avec des traits plus africains. Si vous ne le faites pas pour votre propre équilibre mental, faites-le au moins pour vos enfants ! D’autant que Yeshua ben Yosef avait bien plus de chance d’être un noir africain que d’être un blond aux yeux bleus.

Crédit: koyeba.blogspot.com
Hic venit verum negrum deum  – Crédit: koyeba.blogspot.com

En vérité, en vérité je vous le dis : Jésus-Christ était un Sénégalais (ou un Congolais, un Soudanais, un Malien. C’est comme vous le sentez… Et décrochez-moi ce « Blanc » de cette croix !)

Il va sans dire que ceci vaut pour toutes les religions abrahamiques. Le christianisme tout particulièrement le catholicisme n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

Ceci était un petit appel à la réflexion sur la question. En aucune façon une critique gratuite.

 

Que les ancêtres et les Puissances soient avec vous.

Bien à vous

A.R.D-A.

 

*: c’est à dire, « Jésus, fils de Joseph »