Francoperen

Au Faso, on travaille, on prend de la peine mais ce sont les fonds qui manquent le plus

L’initiative de rédiger ce billet nait de ma profonde indignation à l’issue d’un débat houleux qui m’a récemment opposé à quelques amis burkinabés. Tout part d’une critique émise par ceux-ci à l’encontre des gardiens de nuit (qui touchent en moyenne 25 000 FCFA par mois) qui, apparemment passent la majeure partie de la nuit à rêver plutôt que de veiller sur leurs employeurs et les biens de ces derniers. Autre chose avant d’entrer dans le but du sujet : j’ose espérer que Mr Jean de La Fontaine ne se retournera pas dans sa tombe pour me reprocher d’avoir transformé sa célèbre citation tant dans la sémantique que dans la syntaxe.

Au Burkina Faso, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (S.M.I.G) pour les travailleurs, à l’exception des employés agricoles et des personnes liées à leur employeur par un contrat d’apprentissage est fixé à 32 218 FCFA. Cela suppose que l’ouvrier burkinabé actif bosse pendant environ 6 heures de temps chacun des 30 jours du mois pour obtenir exactement une prime de 1 074 FCFA au terme d’une journée de labeur. Faites vous-même le calcul et vous verrez à quel point ces chiffres sont insignifiants en termes d’argent. Aussi, il faut noter que très peu d’employés connaissent leur droit en matière de contrat de travail. Le plus souvent quand il vienne chercher du travail, ils se mettent dans la position la plus défavorable qui soit, ce qui du coup transfert tout le pouvoir de décision à leur futur patron. C’est le cas de certaines femmes de ménage qui sont embauchées dans des agences de nettoyage à Ouaga et qui reçoivent un salaire de 10 000 FCFA chaque fin du mois. Pourtant elles arrivent tous les jours à partir de 5 heures du matin dans les locaux des entreprises ou instituts où elles sont affectées pour blanchir les toilettes et d’autres surfaces. N’est-ce pas là une forme d’exploitation de l’homme par son semblable?

Je reviens donc sur la discussion que j’ai eue avec mes frères africains. Ceux-ci soutiennent que le salaire d’un employé doit être fonction des efforts qu’il fournit et de la situation exceptionnelle que vit son employeur. Je m’explique. Le salaire est fonction des efforts dans la mesure où, pour rémunérer un individu, on évalue la quantité de travail qu’il a produit. Et il est fonction de la situation vécue par son employeur lorsque ce dernier justifie, par exemple, le salaire dérisoire qu’il paye à sa bonne par l’argument du salarié qui vient à peine d’intégrer la vie active. Je suis tout à fait d’accord avec la première vision mais quant à la seconde, elle m’écœure. Je vais vous dire le pourquoi : non seulement en procédant ainsi on ne reconnait pas la valeur humaine et n’oublions pas que, quand bien même la situation du patron serait favorable (cadre qui gagne bien sa vie), il ne ferait pas d’effort à son tour dans le sens avantageant sa ménagère. Et bien tout ceci n’est pas juste. D’ailleurs je n’ai pas hésité à le leur répéter en m’appuyant sur quelques faits prépondérants de la société. Aujourd’hui, si on intègre de plus en plus la politique RSE (Responsabilité Sociétale et Environnementale) dans les entreprises, c’est parce qu’il est temps de changer cette mentalité chez les hommes.

Cela consiste, en partie, pour les boss à mettre en place des mesures qui permettront à leurs employés d’être dans des conditions favorables pour produire un bon rendement. En ce sens que si vous avez à votre disposition quelqu’un qui vous offre ses services, et peu importe le type de services, vous devez contribuer à ce qu’il soit épanoui quand il le fait. Je connais au moins une famille où lorsque vous arrivez chez eux, vous ne vous rendez même pas compte qu’ils hébergent une bonne. Celle-ci est certes là pour s’assurer que le bébé ne manque de rien, mais la façon dont on la traite à la maison lui fait oublier qu’elle est employée. De cette façon, elle est plus motivée dans son travail. Et je peux vous affirmer avec certitude qu’aussi minable que puisse être sa rémunération, elle ne boudera pas ses patrons car ils sont devenus pour elle des parents. Cependant si les gens sont parfois strictes et inhumains envers leurs employés c’est parce qu’il y a bien eu des exemples moins édifiants par le passé. Des gens bien ont eu à accorder leur confiance et leur estime à leur chauffeur, leur gardien ou leur boy, et en guise de remerciement ceux-ci leur ont dérobé des objets précieux ou d’importantes sommes d’argent avant de s’enfuir. L’Africain n’est pas reconnaissant parfois, c’est là où le bât blesse.


Serment de prostituée

Il y a deux jours de cela, en revenant d’une balade nocturne, je me suis arrêté devant deux prostituées. Rassurez-vous j’étais lucide, j’avais toute ma tête et mes idées intactes. Avec le froid qui me pénétrait de partout et cette envie presque obsessionnelle de regagner mon lit, à l’abri de l’angoisse vespérale, j’ai hésité un moment avant de finalement m’aventurer. Voici une liste de conseils à suivre pour éviter l’échec lorsqu’on se lance dans une pareille initiative: ne pas sourire en arrivant, regarder droit dans leurs yeux, ne pas baisser son regard, jouer leur jeu, débattre comme un client intéressé. Aussitôt, l’une d’elles et moi avons tenté de nous mettre d’accord. Elle me demandait de proposer mon prix tandis que je cherchais vainement à lui faire comprendre que je n’avais pas assez d’argent dans mes poches et qu’elle rendrait une énorme faveur à un étudiant comme moi en ne lui facturant pas ses services. C’est alors qu’on engage une longue conversation qui finit par me captiver.

Dis-moi, tu résides dans les parages ?

Non, j’habite loin d’ici. Je suis vers Kilwin, le quartier juste après Tampuy.

Celle que tu remorques, c’est ta sœur ?

C’est ma « potesse ». Elle et moi, on se cherche, on fait du business.

Tu dis quoi finalement par rapport à ma proposition?

Mon ami, excuse-moi, je ne suis pas sortie dans ce froid de congélateur pour venir offrir mes fesses cadeau aux gens dans la rue. Tu vas me donner combien? Dis toujours. Quand je te vois, je sens que tu es « choco ». Faut pas gâter ton nom dèh !

Ma sœur, faut pas tu vas me laisser partir dormir comme ça, faut faire pardon s’il te plait. Ce soir j’ai pas d’argent mais dans peu de temps seulement mes parents vont me faire un « western ».

Toi tu es bien hein ! Un gros papa comme toi-là tu attends encore tout de tes parents. Faut te lever toi aussi pour bosser et gagner des sous.

Pourquoi tu dis ça ?

Tel que tu me vois là aujourd’hui, je suis indépendante. J’ai très vite appris à me prendre en charge. Je ne me rappelle pas de la dernière fois que j’ai reçu quelque chose des parents. Et même ils ne pouvaient pas toujours tout me donner. J’avais donc un copain qui faisait le reste. Ceci a fait que je prenne goût très tôt à la vie de dehors et c’est comme ça que les hommes m’ont trompée.

Donc tu ne peux pas me faire cette faveur pour une fois ? Viens avec moi et tu ne regretteras pas.

Tséh ! Les hommes, vous là quoi. Aujourd’hui là moi je ne peux plus rien traiter avec un homme, si ce n’est pas lui vendre mes fesses. Dans Ouaga ici, il n’y a pas l’homme. Peut-être que dans ton pays ça y est là, mais je n’en suis pas si sûr. D’ailleurs tu es d’où ?

Je suis Camerounais et toi ?

Moi non. Je suis Bobolaise. Je suis venue à Ouaga ça fait déjà presque 5 ans. Je suis là pour faire des affaires.

Tu ne penses pas retourner à Bobo un beau jour pour te marier ?

Pô pô pô … ! Marier ! Qui ? Moi. Tu sais, j’ai connu plein plein plein … d’hommes dans ma vie. Si en 24 ans j’ai pas pu gagner mari, ce n’est pas maintenant qu’il va tomber du ciel. Si un monsieur vient vers moi qu’il va m’épouser, je fuis en abandonnant ma moto, je te jure. Moi, je sais que si une fille connait 1, 2, 3, jusqu’à 4 déceptions amoureuses, pour elle est fini comme ça. Elle ne peut plus avoir de chance en amour. Et même, quand on sort avec vous les hommes de nos jours, vous nous utiliser seulement. Vous nous baisez baisez baisez … jusqu’à gâter nos fesses et vous ne nous donnez rien. Voilà pourquoi je préfère encore donner ça à un inconnu contre 5 000 ou 10 000 FCFA. Au moins, je ne me casse pas la tête à demander quoi que ce soit à quelqu’un. Si j’ai besoin de me coiffer, je sors mon propre argent et je paye.

Pour couper court je lui demande de me passer son contact afin de pouvoir l’appeler dès que j’aurais suffisamment d’argent. Elle me le donne volontiers et je reprends aussitôt ma route après leur avoir souhaité un bon marché.


Feuilleton des réseaux sociaux en Afrique noire

Comme partout ailleurs dans le monde, les grandes métropoles africaines se sont mises en mode réseau social. Toutefois avant d’aborder le sujet relatif au web social proprement dit, il faut rappeler que l’internet n’est pas un phénomène aussi répandu en Afrique que dans les cités occidentales. Au Cameroun, si l’on exclut le cas des grandes sociétés, c’est par les cybercafés que les populations y ont facilement accès. Ce sont des espaces dont l’atmosphère est généralement confinée. Les ordinateurs vétustes sont disposés côte à côte, très souvent sans aucune cloison, ce qui prive les utilisateurs de l’intimité escomptée. Moyennant la somme de 300 FCFA, on peut surfer une heure durant. Quelques rares ménages peuvent s’offrir une connexion internet privée. Avec l’arrivée du distributeur d’internet haut-débit Ringo et le succès honoré de son produit my Quat, les étudiants peuvent désormais se connecter 24 heures sur 24, envoyer des SMS gratuits, tout ceci contre le paiement d’un montant fixe de 15 000 FCFA et l’achat régulier d’une carte de recharge entre 1 000 et 25 000 FCFA. Par ailleurs, les entreprises de téléphonie mobile s’activent de plus en plus à prester dans ce sens en mettant à la disposition de leurs abonnés des clefs de connexion. Il y a, par exemple, Orange qui le fait. Mais le problème demeure le même : le débit de connexion offert ne permet pas toujours de naviguer de manière continue et efficace sur le réseau.

Parmi les réseaux sociaux les plus actifs au pays des grandes ambitions, on compte surtout Facebook et Hi5. C’est d’abord grâce au second que fut découverte cette nouvelle ambiance dynamique du réseautage social. A l’époque, jeune et adulte l’utilisaient surtout pour se faire des amis, se faire connaitre du public notamment en partageant leurs photos, des informations sur leur vie, leurs habitudes, etc. Aujourd’hui, presque tous les internautes optent pour le premier. Facebook est au cœur de la vie aussi bien pour les instituts d’enseignement que pour les entreprises ou les ménages. Avec ses multiples options dont la messagerie instantanée, il est venu combler les insuffisances de Hi5. Dorénavant, grâce à ce web social au caractère original, les personnes que l’on rencontre peuvent passer du virtuel au réel. Il suffit juste d’un clic et le tour est joué. Les jeunes filles en savent quelque chose car recevant dans la majeure partie du temps les avances de visiteurs inconnus. Facebook c’est aussi un moyen de célébrer des retrouvailles entre amis perdus de vue.

Pour terminer en beauté, je vous raconte l’expérience ô combien vibrante des étudiants de l’Institut 2iE à Ouaga. Une fois de plus, c’est en terre des hommes intègres qu’a lieu ce fatidique forum de nationalités, à la fois symbole d’unité et de progrès pour le continent. Dans cet univers de futurs cadres tous liés par le même métier, l’intégration se fait de manière systématique. D’un simple geste courtois,  serviteur, les étudiants arrivent à tisser de solides rapports entre eux. Imprégnés de toute cette sympathie, de toute cette chaleur, ils n’hésitent pas à se confier les uns aux autres. C’est ainsi qu’à la pause comme aux heures de cours, on ne résiste pas aux commentaires d’une photo récemment marquée ou à un thème de discussion donné. Il suffit de faire un tour à l’amphithéâtre et de jeter un coup d’œil sur les écrans d’ordinateurs : s’il y a une page web active, je parie mon blog que c’est celle de Facebook. On se lève le matin de Facebook et on se couche la nuit sur Facebook. Et puisqu’on partage les mêmes dortoirs dans le campus, certains ont trouvé à cet outil indispensable une nouvelle application : passer leurs commandes de crédit de communication, de yaourt ou de bissap 1 auprès des étudiants qui en offrent les prestations commerciales. Dès que votre message parvient à ceux-ci,  il ne vous reste plus qu’à patienter 5 minutes et le produit est aussitôt livré.

1 Jus d’oseille


La fuite des cerveaux: un élément déstabilisateur pour le continent noir

Lorsqu’on observe ses multiples trébuchements sur les plans politique, économique et social, on est tenté de remettre en question l’idée que notre continent regorge d’hommes valides. Pourtant en portant un regard critique sur le bilan des prouesses que le monde a réalisées jusqu’ici on se rend compte que les statistiques englobent aussi bien les nationalités occidentales que les descendants du berceau de l’humanité. Même si le mérite de tels exploits n’est pas souvent officiellement attribué à ces derniers, cela ne les empêche pour autant de toujours aller de l’avant.

Il y a quelques années, la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (à travers son Programme-Cadre pour la mise en place, le renforcement et l’utilisation des capacités essentielles en Afrique, Addis-Abeba, 1996) fournissait à propos de la fuite des cerveaux les chiffres suivants : entre 1960 et 1975, ce sont 27000 hauts cadres africains qui ont quitté le continent pour s’établir en Occident. Une décennie plus tard, ce chiffre atteignait 40000 personnes, soit le tiers des personnes les plus qualifiées. De 1985 à 1990, on estime à plus de 60000 le nombre de médecins, d’ingénieurs et de professeurs d’universités qui ont émigré de leurs pays. Et aujourd’hui, on pense que cet exode s’est accru, de sorte qu’ils seraient autour de 20000 à immigrer chaque année vers l’Europe et l’Amérique, à la recherche des meilleures opportunités de travail et d’épanouissement. Ces statistiques révèlent qu’il y a de la matière grise en Afrique, mais hélas une matière grise tournée vers l’Occident.

Qu’est ce qui justifie le fait que des élites africaines se soient établies en grand nombre à l’étranger et non pas dans leurs pays respectifs ? Je vous propose de faire le tour de cette problématique à travers l’analyse qui suit. Lorsqu’on est Africain et qu’on étudie en Europe ou aux Etats-Unis, le rêve qu’on a le plus souvent c’est de s’y installer plus tard pour faire fortune. Mais ce rêve ne devient réalité que si l’on est meilleur dans ce que l’on fait, et nombreux sont les émigrés africains qui excellent dans leur domaine de compétence. Dans la plupart des cas, ceux-ci sont retenus par des entreprises de renom  qui les arrosent de privilèges afin qu’ils mettent leurs génies au profit du pays d’accueil. A ce niveau, les éléments qui motivent la diaspora africaine intellectuelle à rester dans cet eldorado sont davantage l’épanouissement personnel et le besoin de s’affirmer. Là n’est pas le problème car l’on peut, après avoir terminé sa formation, travailler pour une structure étrangère pendant 3, 5 ans ou même une dizaine d’années, et revenir chez soi servir sa patrie pour le restant de sa vie. Si la plupart des têtes africaines ne sont pas favorables à l’idée de retourner définitivement un jour dans leurs pays d’origine c’est qu’ils ressentent une profonde indignation, de la frustration. Rien qu’en songeant aux rouages infernaux du pouvoir, à la rude conjoncture économique et aux amères réalités sociales qui y prévalent, ils sont tout de suite découragés.

Je cite pour étayer mon propos l’entretien qui s’est tenu en Août dernier entre le futur chef de la Diplomatie camerounaise et trois éminents membres de la diaspora. Au cours de cet échange qui est, à mon avis, illusoire, Jacques BONJAWO, ancien de Microsoft et actuel patron de Genesis Telecare a déclaré : « Nous ne demandons pas que l’Etat construise des ponts, connecte tous les villages et villes au réseau d’eau potable et d’électricité… Nous demandons qu’il y ait mise en place d’un cadre dans lequel l’élite camerounaise de l’étranger pourra participer à l’amélioration du climat des affaires, des conditions de vie des populations et au développement du pays. ». Ils sont nombreux à faire partie de la diaspora, ces cerveaux africains qui n’ont pas eu l’opportunité d’importer le savoir-faire occidental chez eux. Quand je dis qu’ils n’ont pas eu la possibilité c’est qu’ils ne l’ont pas eue, contrairement à ce que clament certains chefs d’Etats africains dont je ne mentionnerai pas les noms. C’est une perte énorme pour l’Afrique, vous en conviendrez sans doute avec moi. Il y a cinquante ans aujourd’hui que nos plus importants projets, nos sociétés les plus prometteuses auraient dû être pilotés par ceux-là qui illuminent majestueusement le continent de Madiba et qui font sa fierté.


Quand mon coeur se dédouble

Le chemin d’une vie est tellement parsemé d’enchevêtrements, de feintes, d’impondérables, de surprises, de coups durs qu’on pourrait passer toute l’éternité rien que pour en chercher les fondements (ne parlons même pas de les comprendre). Tentative complexe voire quasi impossible ! L’amour serait donc un phénomène de la vie qui ne possède pas d’unité de mesure. A la différence de la matière, par exemple, qu’on modélise aisément grâce à l’atome, l’amour n’a pas d’entité que l’on puisse exploiter pour le quantifier, interpréter ses lois de comportement. Comme un tremblement de terre, il ne s’annonce jamais, il surgit au milieu de nulle part et frappe qui il veut frapper. Inutile de choisir un abri particulier, d’y dresser votre lit à coucher, d’y déballer vos coffrets les plus précieux et de vous y tenir solidement, simplement parce que vous l’attendez. Pour se faire représenter, il risque de vous envoyer l’ouragan. J’ignore du fond du cœur pourquoi je m’investis dans ce billet, peut-être ai-je le cœur suffisamment étranglé que j’étouffe désormais de vous dire ce que je ressens de l’intérieur. Il m’arrive de passer des quarts d’heure où j’ai l’impression que je vais vomir, vomir mes ressentiments, mes maux, puis ma langue.

La fille en question s’appelle Corine. Elle a 20 ans, elle est plutôt jolie. On dit généralement des hommes qu’ils sont beaux parleurs, je ne sais pas s’il est juste de dire qu’elle est « belle parleuse ». Elle est pour moi ce que le prédicateur est pour le pécheur. J’ai conscience que j’exagère un peu dans les propos précédents, mais je veux simplement insinuer qu’elle a l’art de capter mon attention lorsqu’elle me parle. Je l’écoute même quand je soupçonne qu’elle me raconte des balivernes. Si elle a un don, c’est de me séduire. Elle a du sex-appeal : rien qu’avec sa gestuelle hollywoodienne, l’expression charmeuse de son visage, elle arrive à vous communiquer des envies, des sensations fort ravageuses et à vous soutirer tout ce qu’elle peut désirer. En arrière plan de cette personnalité, se cache une personne presque difficile à vivre, une âme mystérieuse. En l’espace d’une poignée de minutes, son sourire peut basculer dans une humeur irascible. Je ne dirais pas qu’on s’aime, je dirais, en suivant l’exemple des jeunes de ma génération, qu’il y a quelque chose de fort entre nous. La preuve, nous nous sommes retrouvés après quasiment 3 ans de séparation et l’impression que j’ai eue lors de ces charmantes retrouvailles était pour le moins saine.

Qu’est ce qui fait que je me sente si mal de retour à Ouaga, après ces deux semaines intenses de congés passées à Douala et auprès d’elle ? J’ai découvert une véritable femme. Elle vit seule, sait se prendre en charge ou du moins s’évertue à le faire, sa mère n’étant pas toujours présente. Elle est devenue bien trop autonome pour qu’un homme lui fasse des suggestions de vie, lui inspire le spectre du commandement en définissant les bases de leur relation amoureuse. C’est là qu’elle et moi cessons d’être d’accord. Elle m’en veut de lui reprocher un tas de choses et je lui en veux de ne pas m’écouter. La veille de mon départ, on s’est disputé pour la nième fois : je l’ai regardée s’emporter comme d’habitude, sauf que cette fois-ci mon regard était plus serein. C’est de cette façon crue qu’on s’est quitté. Depuis lors mon cœur est allé à la dérive. Une partie de lui s’interroge objectivement et se demande si tourner la page n’en vaut pas la peine tandis que l’autre partie, noyée dans un bain de souvenirs exquis, ne réussit pas à se défaire des tentacules – qui demeurent encore ancrées à son bord – de cette idylle ô combien contrariante.


10 autres manières de vous servir les mots qu’Andriamihaja avait à nous dire

Ceci est un appel lancé aux Mondoblogueurs en particulier et à la communauté mondiale des blogueurs en général de prime abord pour les inviter à écrire non pas seulement pour le plaisir mais surtout pour penser l’homme, la société, et enfin pour les booster afin qu’ils s’évertuent à le faire dans les règles de l’art, car je pense que c’est le scénario idéal où la passion vit pleinement en nous et nous pleinement en elle.

Je ne suis pas écrivain, encore moins journaliste. Mais je me suis engagé bien avant l’aventure Mondoblog dans une croisade contre les maux qui gangrènent notre chère société. D’ailleurs mon billet « Cette vie, j’ai de la peine à la vivre ! » le mentionne assez bien. Grande est ma sensibilité à l’égard des injustices, des déboires nationaux ou continentaux dont nous sommes tous témoins ou victimes au quotidien. Nous avons donc, avec la plateforme accueillante que l’Atelier des médias a bien voulu mettre à notre disposition, l’opportunité inestimable de dénoncer, dans une analyse structurée, approfondie et susceptible d’inciter l’éveil des consciences africaines, ces plaies sociales. Coups de gueule, appels lancés, discours satiriques sont nos plus redoutables armes pour contribuer harmonieusement à ce que les choses changent et que le bon sens soit enfin la chose la mieux partagée de ce monde.

Mondoblog c’est aussi un terrain d’apprentissage où nous pouvons améliorer nos techniques d’écriture, soigner notre style. Toujours par le biais du tapis que nous a déroulé l’équipe de supervision, il nous est donné de convier les fins gourmets de la littérature à la dégustation des agapes que pourraient devenir les articles que nous concoctons et insérons sur la toile, cette interface qui permet également de réseauter entre internautes. Tout se passerait alors comme si nos hôtes se disposaient en cordée autour des savoureux billets, puis les auscultaient jusqu’à ce que tous aient reconnu en chœur le talent de leur auteur. Ainsi chacun des 100 blogueurs que nous sommes a une chance, à condition que sa main se révèle prodigieuse au fil de cette fructueuse expérience, de décrocher un contrat dans une maison d’édition. Plus tard, à la cérémonie de remise des prix du concours, vous apercevrez alors au premier rang du public un homme qui vous fera un sourire complice : ce sera votre nouveau mentor.


Appel aux élites africaines du savoir

A Messieurs les héritiers africains du Savoir.
Ceci est un message destiné aux meilleurs produits que les différentes professions ont forgés, façonnés et mis au service de la société afin que celle-ci devienne, elle-même, aussi meilleure un jour. Étudiant de mon statut, et ayant suffisamment apprécié le rôle de répétiteur, j’ai aujourd’hui une idée réelle de la qualité des efforts qu’il faut consacrer lorsqu’on porte la casquette d’enseignant. Bien entendu, transmettre ses connaissances à des jeunes, qui quelques fois affichent des écarts de conduite, est loin d’être la chose la plus simple du monde. C’est certes un travail qui demande de la patience, de la vocation, mais c’est tout de même un travail faisable. Je le sais car je suis déjà passé par là.

Ce que je déplore et qui m’indigne sérieusement c’est de constater, par exemple, que les enseignants ne répondent pas toujours présents à l’appel de leurs disciples. Que ce soit pour une recommandation à une bourse ou un recrutement, pour des explications ou pour un encadrement pendant le stage académique, il arrive dans bien des cas que le maitre serve à ces derniers le « je n’ai pas de temps ». Cette phrase est très célèbre et prisée de nos jours. Elle arrange sans doute mieux la bouche qui la débite que l’oreille qui l’endure. Essayez de vous mettre dans la peau de l’étudiant et de ressentir ce que votre « je n’ai pas de temps » peut lui faire quand il vient solliciter votre aide.

C’est devenu une véritable épidémie et presque tous les corps de métiers souffrent de ses symptômes : égoïsme, avarice et ingratitude. Dans cette séquence, je me réduirai aux aspects du divorce entre les élites du savoir et le peuple. Eminents professeurs, docteurs, ingénieurs, enseignants que vous soyez, avez hérité de la connaissance, du savoir-faire rattachés à votre domaine de prédilection ; cette valeur ajoutée que vous avez gracieusement acquise, vous avez le devoir de la perpétuer à une échelle plus grande. De quelle autre façon pourriez-vous rendre hommage au Savoir, si ce n’est en accordant votre plus digne attention, écoute ou disponibilité à qui de droit : l’apprenant. Tout est prévu de sorte qu’il advienne un jour où ces mêmes jeunes reprendront le flambeau et divulgueront à leur tour les enseignements reçus. C’est ce que j’appelle le « cycle du savoir ».

Ouvert à d’éventuelles remarques de votre part et croyant à une amélioration de la donne, je vous prie, Messieurs les héritiers africains de Savoir, d’agréer mes sincères salutations.

Francoperen


Comment vivre, comment semer et récolter amour et respect dans le jardin des relations interindividuelles?

S’il y ait une question à laquelle je me sois sans cesse heurté au cours de ce dernier quart de siècle, c’est bien la suivante : « Comment vivre, comment semer et récolter amour et respect dans le jardin des relations interindividuelles ? ». Les relations entre individus constituent dans la plupart des circonstances une vaste problématique. Ce n’est que lorsqu’on côtoie plusieurs types d’environnements, de communautés ou de personnes, qu’on s’aperçoit que les uns sont différents des autres. Même si ces différences ne se jouent qu’à quelques centimes près, elles doivent quand même nous interpeller. En ce sens qu’elles nous permettent de comprendre qu’il n’y a pas une manière universelle d’aborder les gens en société. Quelles que soient notre personnalité, notre sensibilité, il nous incombe d’être réceptif aux états d’âme de la personne qui se trouve en face de nous.

Je me suis souvent évertué à suivre les étapes de cette démarche dans mon pays ou à l’étranger. Tantôt ça marche avec un tel, tantôt ça foire avec un autre. Pourquoi ça marche, pourquoi ça foire ? J’avoue que j’ignore la vraie raison. Cependant je tiens quand même à partager ces quelques tentatives de réponse. A mon avis, ça marche parce que votre vis-à-vis et vous avez des points en commun, des fréquentations, des habitudes presque similaires. Mais ce que vous n’avez pas toujours c’est l’amour ou le respect de l’autre. Et si l’une des parties mettait en évidence le fait que l’autre ne lui retourne pas cet amour ou ce respect, elle se sentirait blessée dans son amour propre. Le second perdrait alors l’estime du premier. En général, c’est dans ce cas de figure que ça foire.

En attendant de trouver la meilleure formule de vie communautaire, je pense qu’on a des valeurs, des idéaux à prôner. C’est notre conception des choses qui fait de nous un être authentique. Il arrive souvent que nous cherchions à ressembler aux autres, que nous nous camouflions dans des peaux autres que la nôtre. Au bout du compte, ce déguisement dont nous nous sommes revêtus tout au long de la relation finit par devenir une imposture. Il est donc très important de rester fidèle à sa personnalité, d’être naturel dans les rapports que nous entretenons avec autrui. Une fois que l’on se lance dans le traitement de la problématique citée plus haut, on ne peut plus échapper à un autre paramètre : « Comment concilier les influences qu’autrui exerce sur nous à nos valeurs intrinsèques afin de vivre une relation harmonieuse ? ».


Parcage des engins à deux roues : activité génératrice de revenus à Ouaga

Chronique produite ce matin pendant que je patientais, assis  sur le banc d’un garage où je venais de confier ma moto pour une révision. Le garage en question est situé en face de l’annexe de l’Institut Supérieur d’Informatique et de Gestion (ISIG).

A Ouaga, le moyen de déplacement le plus courant est l’engin à deux roues. Sur une motocyclette ou une bicyclette, le Ouagalais se meut de la manière la plus commode qui soit. Si vous êtes étranger et que vous cherchez à emprunter un taxi, il vous faudra attendre pendant un long moment au bord de la voie, car il y a très peu de taxis dans la ville.

Figurez-vous que même ceux qui ont une automobile (je fais ici allusion aux fonctionnaires, commerçants, bref aux travailleurs en général) parquent toujours dans leurs domiciles une « Crypton » comme véhicule de secours. Pour la petite histoire, j’ai effectué pendant les vacances dernières un stage au sein d’un bureau d’architecture de la place. Le boss, qui est monsieur très sympa, ne s’est pas abstenu de m’emmener chez lui. A l’occasion, j’ai remarqué qu’il y avait une « Yamaha » parquée dans son garage. Pris de curiosité depuis notre arrivée et assailli par des interrogations qui me laissaient jusqu’ici sceptique, j’ai « serré le cœur », comme on dit, et j’ai abordé le sujet avec lui. Il m’a révélé que la moto était indispensable à Ouaga et que, bien qu’ayant déjà une voiture, il préférait, après être revenu du bureau le soir, faire ses courses en moto et se relaxer en faisant du vélo dans le quartier.

Pourquoi les motos pullulent-elles dans la capitale du pays des hommes intègres ? En tentant de répondre à cette question, il ressort trois éléments :

  • La tradition : il est de coutume à Ouaga que le parent offre une moto à son enfant pour l’encourager ou le féliciter d’avoir accompli une prouesse académique. Tel est le cas lorsque les élèves réussissent leur examen du brevet ou du bac. Comme autre volet de ce point, les Ouagalais ont hérité des Européens leur hâte caractéristique. Quand on veut faire quelque chose à Ouaga, on le fait sap sap 1.
  • Le relief : avec un profil topographique quasiment régulier, Ouaga est l’une des régions les moins accidentées de la planète. Le terrain naturel est plat et parfaitement adapté à la circulation à l’aide d’engins à deux roues.
  • Le coût du carburant : en réalité, si la plupart des travailleurs possèdent, hormis leur véhicule de service, une moto de relais, c’est parce qu’en dehors des heures de boulot, ils s’évertuent à limiter leur consommation en carburant. Effectivement, le prix du carburant « n’est pas cadeau » au Burkina. Le pompiste de la station vous vend respectivement le litre de Super 91, de Gasoil ou de Mélange à raison de 682 FCFA, 606 FCFA ou 690 FCFA. Entretenir une automobile devient alors un luxe pour le Ouagalais moyen.

L’observation est donc pertinente, le parc des véhicules de Ouaga est fourni davantage en engins à deux roues qu’en automobiles. Les jeunes débrouillards l’ont compris, c’est pourquoi ils se lancent en grand nombre dans le parcage de motos. La mairie contribue également à créer des emplois dans cette activité en aménageant des parkings. Devant chaque point d’échange, lieu public ou de divertissement, service administratif ou financier, vous pourrez presque toujours voir un parking entièrement occupé par des motos ; ces dernières sont rangées de manière à permettre un stationnement optimal. Quand vous arrivez, les jeunes vous accueillent, récupèrent votre engin et vous remettent un ticket. Une fois que vous terminez votre course et que vous désirez partir, vous leur payez respectivement les sommes de 50 FCFA ou 100 FCFA selon qu’il fait jour ou nuit.

J’ai voulu ce matin en savoir plus sur la recette journalière que génère cette activité considérée comme étant secondaire. En approchant le gérant du parking de l’ISIG, qui m’accueille d’ailleurs avec hospitalité en m’offrant du thé chaud, j’obtiens les informations suivantes : il y a deux types de clientèles, une qui opte pour l’abonnement à 750 FCFA le mois et une autre qui utilise le ticket. La première est majoritaire et ne rassemble que des étudiants. La seconde est constituée de quelques étudiants et des visiteurs ; c’est grâce à cette dernière qu’il gagne pendant les jours ordinaires entre 1000 et 1500 FCFA ou entre 2000 et 2500 FCFA pendant les occasions spéciales (soutenance, kermesse, etc.).

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Un portable dernier cri, une meuf garantie !

L’idée de transcrire les présents faits sur support numérique me hante l’esprit hier soir au moment où, en sortant d’Ecobank,  je tente vainement d’aguicher une jolie demoiselle que j’ai remarqué dans la queue un quart d’heure plus tôt.

Dans mon pays, les gens ont une grande admiration pour la technologie cellulaire. De l’enfant de 2 ans à l’adulte de 40 ans, les symptômes de ce phénomène implacable sont visibles. Lors de la Noël, par exemple, pour qu’un parent prétende susciter l’intérêt et la joie chez son jeune fils, il se doit de lui offrir au minimum un portable en jouet. Ce dernier produit un effet magique dans l’esprit de l’enfant qui ne peut qu’être fasciné en manipulant son gadget et en émettant au moyen de celui-ci des sons vraisemblablement agréables à son tympan; aussi il trouve du plaisir à reproduire les gestes téléphoniques de son entourage. Si les enfants ne résistent pas au charme d’un cellulaire en jouet, qu’en est-il des adultes face à la magie d’un téléphone réel ?

Les femmes sont les premières à succomber à l’envie de se munir d’un portable multimédia. La chose à la fois très curieuse et paradoxale est que : quand bien même elles en possèderaient, elles ignoreraient comment le faire fonctionner correctement ou efficacement. Acquérir un téléphone sophistiqué devient alors pour la plupart d’entre elles un moyen de paraitre dans leur univers. Très souvent elles boudent leurs maris à la maison, notamment lors d’occasions telles que leur anniversaire, le 8 Mars (Journée internationale de la femme) ou la fois où elle convoite le téléphone d’un membre de sa tontine. Et si les victimes espèrent rétablir la paix et la gaité dans le foyer, ils devront inéluctablement offrir à ces dames enragées, un Nokia ou un Samsung dernière génération, dont le prix frise généralement la centaine de mille.

Qu’est ce que les hommes trouvent à leur tour à cet appareil qui conditionne désormais la vie de presque tous les ménages camerounais ? Contrairement à la gente féminine, l’homme qui achète un téléphone dernier cri sait avant toute autre chose s’en servir. Il l’utilise en outre comme atout de séduction devant ses proies. En effet, j’ai moi-même testé hier soir l’effet de cet artifice sur la jolie demoiselle de la banque. Mais on dirait que le stratagème en question ne fonctionne pas ou ne réussit pas toujours quand on a affaire aux guerrières de Ouaga. J’ai donc sorti de ma poche mon Nokia 6280 coulissant avec options (appareil photo de 2 mégapixels, caméra, lecteur mp3, Bluetooth, mémoire extensible, etc.) croyant qu’en l’approchant, elle allait tout de suite être attirée, peut-être pas directement par ma personne mais d’abord par mon apparence frappante. En résultat, elle n’a même pas daigné répondre à ma salutation.

Projetée dans un environnement comme Douala, cette situation allait à coup sûr tourner à mon avantage. Les filles de la porte d’entrée et de sortie du Cameroun sont certes des lionnes en matière de confrontation avec le sexe opposé, mais il n’en demeure pas moins qu’elles s’inclinent tout de même devant la puissance foudroyante que le téléphone mobile confère à leurs vis-à-vis. Elles sont convaincues que l’homme doté d’un objet aussi luxueux et de tout l’arsenal qui rime avec, a également les moyens de leur offrir la sécurité à laquelle elles aspirent toutes. Je me souviens avoir emporté avec moi la preuve en 2008 lorsque je m’envolais pour Ouaga. Ma famille et moi venions d’arriver à l’aéroport de Douala et aussitôt, je faisais la connaissance d’une beauté divine. Je manipulais mon même Nokia quand j’ai senti qu’elle me regardait avec insistance. Peut-être le faisait-elle parce que j’étais bien sapé ? Je l’ignore. Je me suis alors rapproché d’elle et l’ai prise en photo avant de lui demander son prénom. Elle était déjà toute « enjaillée » à l’idée de bavarder avec moi. Je finis par croire que ce n’est peut-être pas la cité ouagalaise le problème, mais plutôt mon mobile qui aujourd’hui n’est plus suffisamment en vogue pour produire l’effet escompté. Ne ferais-je donc pas mieux de m’en procurer un récent modèle afin de dompter ces guerrières?


Ouaga by night

Véritable plateforme de brassage de traditions, Ouaga est l’une des villes africaines qui accueillent chaque année plus d’un évènement socioculturel. Quand l’on ne parle pas du Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou (SIAO), c’est le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco) qui est à l’ordre du jour. A défaut de participer au festival de Cannes en Europe ou au Hollywood Film Festival en Amérique, les Ouagalais et leurs hôtes africains ont l’occasion, grâce au Fespaco, de vivre les mêmes sensations à l’échelle du continent noir. Cette année en exclusivité, Ouaga a accueilli la 10ème édition des Kora Awards. Ajoutés aux manifestations inédites précédentes, nombre sont les concerts d’artistes musiciens internationalement reconnus qui se tiennent à Ouaga. L’an dernier, par exemple, en Décembre la star jamaïcaine de Dance hall Sean Paul faisait vibrer les gradins du stade du 4 Août, tandis qu’en Octobre Muss et Singuila mettaient le feu à la baraque. On se souvient également du spectacle manqué de la célébrissime icône américaine de RNB Akon en 2008.

Cela fait bientôt 2 ans et demie que je réside à Ouaga. Au cours de ce séjour en terre des hommes intègres, j’ai pris le temps d’observer les mœurs qui demeurent les plus ancrées. Si on me demandait aujourd’hui ce que font les habitants de Ouaga quand ils ne s’engouent pas pour de pareilles manifestations ? Et bien, je répondrai : le « show ». En effet, les nuits à Ouaga sont plus longues que les journées. Le jour, le Ouagalais normal vaque à ses activités citoyennes. Dès 7 heures tout le monde rejoint son occupation : les plus jeunes vont à l’école ou sont employés dans une activité quelconque du secteur informel ; les adultes et les vieux vont au boulot ou dirigent une activité du secteur informel. Quand surgit la nuit dans cette région attractive du monde, tous les chats, munis de leurs chars, deviennent gris. Les rues sont désertes et bruyantes ; partout c’est la voix de DJ Arafat qui résonne. Les maquis et boites quant à eux sont bondés de monde.

En faisant un tour sur l’avenue KWAME Nkrumah, baptisée avenue des plaisirs, on peut sentir monter la température dans divers endroits tels que le Byblos, le Showbiz, le taxi-brousse, chez Simon, la Véranda, etc. Hormis les Burkinabé, les noctambules étrangers y sont également très actifs ; sur place, on trouve des Libanais, des Français, des Turcs, des Ivoiriens, des Camerounais, des Congolais saouls ou à moitié saouls. Lorsqu’on quitte le centre ville pour se diriger vers les quartiers périphériques, les ruelles imposent presque de faire un break avec leurs silhouettes provocantes et promptes à procurer du plaisir. Une fois que l’on franchit les cinq mètres cinquante de Dapoya, au lieu dit Matata dont mon compatriote Alain FOKA de RFI a déjà si bien fait l’éloge en parlant de son caractère déviant, on n’envisage plus partir. Rares sont les mâles qui résistent aux appas des coquines qu’offre cet environnement quasi comparable à Sodome ou Gomorrhe. J’y étais moi-même et je peux vous assurer une chose : c’est pas facile!


A son arrivée

Depuis qu’elle est arrivée j’ai le cœur inondé de joie
Depuis qu’elle est arrivée j’ai le sentiment que tout va pour le mieux
Depuis qu’elle est arrivée j’apprends à vivre, vivre comme un homme
Depuis qu’elle est arrivée je l’ai regardée comme jamais je n’ai eu le courage de regarder une autre
Depuis qu’elle est arrivée j’ai le sommeil lourd: ma nuit ressemble à une sorte d’embarquement dont la destination n’est pas connue; et je me réveille quand je suis tout près d’y parvenir…

Depuis qu’elle est arrivée je pense au moment où nous pourrions enfin nous regarder dans les yeux et nous révéler ce que nous avons jusqu’ici ressenti et refoulé
Depuis qu’elle est arrivée j’ai pu mémoriser le parfum de son corps, à tel point qu’il hante le couloir qui mène dans ma chambre
Depuis qu’elle est arrivée j’ai arrêté d’écrire, parce que retenu par cette nouvelle passion qu’elle-même incarne
Depuis qu’elle est arrivée elle me parle et j’ai la certitude qu’elle ne profère pas de mensonges; d’ailleurs si cela avait été le contraire, je me serais douté de la faille la plus subtile qu’elle aurait pu introduire dans ses paroles
Depuis qu’elle est arrivée je l’ai observée, écoutée et comprise
Depuis qu’elle est arrivée j’ai cessé de communiquer avec celles que je fréquentais jusqu’à récemment
Depuis qu’elle est arrivée je suis plus confiant que je ne l’ai été ces dernières années d’études supérieures
Depuis qu’elle est arrivée tout me répugne, les moments qu’elle m’accorde exceptés
Depuis qu’elle est arrivée je fais ce qu’il y a lieu de faire sans pour autant lui imposer le moindre choix
Depuis qu’elle est arrivée j’attends le moment opportun pour saisir la chance qui m’est offerte
Depuis qu’elle est arrivée je sens qu’elle veut me porter un message par ses gestes, ses actes, son sourire, sa démarche, son habillement et le ton dont elle garnit sa voix pendant nos conversations


Cette vie, j’ai de la peine à la vivre!

J’étudie dans le domaine de l’ingénierie. Depuis tout petit, je me suis toujours vu dans la peau d’un écrivain célèbre. Mais il fallait avant tout privilégier l’aspect rémunérant d’une future profession. Et je pense que mes parents n’ont pas lésiné sur leurs moyens pour me l’inculquer. Aujourd’hui je sais, contrairement à il y a neuf ans plus tôt, que l’homme peut se nourrir de son art sans toutefois en vivre. Ainsi je me forme dans le domaine des sciences exactes pour la raison que je venais de mentionner. Cela n’empêche qu’un jour à venir je m’installe dans cet espace animé, embelli, merveilleux qu’est la littérature. Ecrire c’est tout ce à quoi j’aspire ; j’aime parler de moi à travers ces lignes d’écriture que je formule avec la plus grande délicatesse qui soit. Je propose aux autres mes choix de vie, mes conceptions des choses et surtout mes avis sur un certain nombre de questions récurrentes de cette époque. Je le fais parce qu’au fond de moi je ressens le besoin de le faire : c’est de la vocation, si je ne m’abuse. Il ne se passe pas un jour sans que l’idée de produire un texte ne me revienne. A un moment donné, cela se transforme en une condition de survie : je suis alors tenu d’écrire si je veux me libérer des châtiments de cette passion. En attendant je fais des calculs, des applications aux moyens de programmes ou logiciels, des choses que je n’étais certainement pas prédisposé à accomplir. De toute façon un talent, même lorsqu’il n’est pas entretenu, demeure en l’homme. Il suffit de le réactiver et tout fonctionne comme auparavant. Ce penchant pour les Belles Lettres, je l’ai acquis, au moment où j’ai commencé à écouter des gens parler avec aisance, éloquence. J’ai aussitôt voulu m’identifier à ceux-là car j’y voyais une sorte de magie. J’aimerais préciser que le livre n’a jamais constitué ma muse, la preuve est que le plus grand effort que j’ai réalisé jusqu’ici est d’ouvrir la dixième page d’une œuvre littéraire au collège. Le simple fait de tenir un livre me rend jaloux, combien de fois prendre connaissance de son contenu ? Je me suis toujours dit que si je pouvais écrire, alors je n’aurais plus besoin de lire. Mais j’ai tort de penser ainsi car les plus talentueux mêmes ont toujours eu recours aux productions de leurs confrères. Ils sont bien conscients que ce qu’ils pourront y tirer constitue un complément précieux pour le background qu’ils possèdent déjà. Cependant ma susceptibilité vis-à-vis des maux qui gangrènent la société est sans aucun doute la raison mère de mon engagement. Des circonstances observables au quotidien, nombre sont celles qui suscitent en moi une indignation. Celle-ci enclenche alors le processus qui consistera tout d’abord à faire la satire de ce qu’il y a de répugnant dans toute l’affaire, puis proposer des solutions constructives afin de pallier à cela. C’est une tâche qui transcende tout ce que l’on peut se faire comme idée d’elle, croyez-moi, je peux vous l’assurer.


Le « kapo »

Il est 7 heures et demie, le dernier coup de sonnette vient de retentir et pas un seul en Terminale D2 ne se sent concerné pour le moment. Encore faut-il qu’ils arrivent à discerner ce signal dans la cacophonie qui règne dans la salle. Il suffit d’y faire un tour, de rapprocher votre oreille des casiers de tables, aussitôt après on vous annoncera, et vous ne pourrez que corroborer, que vous êtes devenu sourd-muet, sourd d’endurer la pluie de sons qui s’y abat et muet de ne pouvoir rien dire ou faire pour que cesse ce remue-ménage. Hier soir, en regagnant les domiciles, l’instruction donnée par l’enseignant était de proposer un plan détaillé pour un sujet de dissertation. Quelques élèves y compris moi-même, ont souffert de venir une heure plus tôt ce matin pour accomplir la tâche du forçat. Au fond de la salle, entre les mains d’un groupe mixte d’élèves, dits muna bobo 1, on peut dénombrer une série de téléphones multimédias. Le kapo 2 ou le garçon le plus « stylé » de tous, celui qu’on reconnait à l’application fréquente des écouteurs à ses oreilles, se distingue par ses abonnements chez Orange, MTN et Camtel ; ses trois mobiles, dit-il avec fierté et arrogance, lui ont coûté une fortune. C’est pourquoi il n’hésite pas, à la pause comme aux heures du cours, à les exhiber à ses camarades, d’ailleurs c’est à ces atouts de frime qu’il doit sa célébrité au collège ALFRED SAKER. Pendant que certains s’échangent des sons ou des « hot » vidéos par Bluetooth, d’autres offrent gratuitement leurs prestations de DJ à la classe. « Le prof arrive », s’écrie un élève qui se trouvait encore dans le couloir, en plein pourparlers avec une mo nga 3 inconnue dont il a quand même réussi à enregistrer le numéro de portable. Ils se reverront certainement dans les vestiaires un quart d’heure plus tard, à condition que le done man 4 sache bien agencer son « verbe » dans le SMS qu’il lui écrira une fois revenu en salle. Lorsque le professeur franchit le seuil de cette dernière, les activités du petit marché s’estompent, ses commerçants rangent leurs marchandises et ses clients leur argent. D’un ton autoritaire, il demande aux élèves de présenter leurs travaux sur la table. A peine se lève-t-il pour se diriger dans la première rangée qu’une sonnerie aiguë l’interrompt et captive la classe entière. En une fraction de seconde, le cellulaire qui l’a émise a été éteint et rangé. Le geste éclair n’a suscité aucun soupçon chez le professeur, vraisemblablement transformé en inspecteur. Il réclame alors le responsable avec une voix vibrante de colère. Mais les trente minutes qui suivront serviront à traquer en vain l’auteur de cette perturbation. Coco est pourtant assise au milieu de ce petit monde ; elle se camoufle, retient son souffle et évite de se trémousser. De pareilles imprudences lui ont déjà valu la confiscation de son précédent portable. C’était en plein évaluation de Maths ; elle a convaincu au moyen d’un SMS un mougou 5 de la classe de lui transmettre les réponses de quelques questions complexes. Comme elle avait omis de mettre le son du téléphone en position OFF, le message en lui parvenant a émis un signe sonore qui a alerté le surveillant. Dans ce genre de situation, la classe sait se montrer solidaire et taciturne. Le professeur, pour ne pas être couvert de ridicule, abandonne ses investigations pour poursuivre le contrôle des devoirs. Aujourd’hui, il choisit de n’expulser personne car il est conscient du fait que s’il commence, il sera contraint à la fin de négocier avec les trois ou cinq élèves qu’il en restera de la classe pour achever son programme de la matinée. Il entame aussitôt la correction de l’exercice. Pendant qu’il explique une notion importante à ses élèves, son téléphone sonne. Toute la classe braque ses yeux sur lui, même ceux qui n’étaient que présents en chair. « Allo ! Oui, j’arrive, je suis en circulation, accordez-moi juste 10 minutes, le temps que je descende du taxi pour vous rejoindre. », déclare le professeur à son interlocuteur lorsqu’il décroche son mobile. Le bip de fin de conversion enclenche alors dans la salle des éclats de rires, des sifflets et des claquements de mains.

1 enfant de riches ; 2 personne qui sort du lot et fait l’objet de convoitise ; 3 jolie fille ; 4 garçon futé ; 5 personne facilement manipulable, faible de caractère.