aidara

Mah Mint Alioune, la mère Teresa de la commune de NDiago

Elle a été choisie il y a quelques années parmi les femmes-leaders en Mauritanie et sa demeure accueille souvent les grandes personnalités de passage dans sa localité, Ghahra, environ 7 kilomètres au nord-ouest de NDiago. Rencontre avec Mah Mint Alioune.

Mah Mint Alioune (Photo Aidara)

Mah, comme l’appellent affectueusement les habitants de NDiago, est infirmière d’Etat à la retraite, adjointe au maire de NDiago et personnage incontournable dans le département de Keur Macène. C’est à elle que s’adressent d’abord les femmes des villages environnants pour des problèmes de grossesse ou de couche. Quand les choses se compliquent, vu l’absence d’équipements et de moyens médicaux, elle les réfère au chef-lieu de la commune ou à Keur Macène. Son poste de santé, fermé depuis des lustres, attend toujours d’être fonctionnel. Les images de son poste de santé en disent long sur la politique en matière de santé en milieu rural.

Elle a reçu depuis deux années des ballots de moustiquaires, don d’une ONG nationale relais d’une ONG internationale. « Je ne peux pas procéder à la distribution, car le nombre est insuffisant pour tous les habitants et je ne tiens pas à faire de jaloux », déclare-t-elle. Alors, elle attend depuis qu’on lui fournisse le complément qu’on continue de lui promettre année après année.

Il y a quelques années, elle a été flouée et les habitants des villages avoisinants avec. Une ancienne ministre convertie dans la société civile l’avait entraînée dans un projet de plantations de mangrove qui a fini en queue de poisson. Un Marocain a tenté de reprendre le projet, mais là aussi, les choses ont foiré, car Mah est connue pour sa fermeté, sa rigueur et son intransigeance quant à la transparence.

Mah Mint Alioune est l’image de la hartaniya qui ne fait plus de son appartenance sociale, un sujet de discussion. L’esclavage selon elle est une histoire ancienne dans le département de Keur Macène. Ou tout au moins, dans la commune de NDiago. N’empêche, une certaine discrimination continue encore de peser sur tous ces villages haratines, dépourvus de tout.

Cheikh Aïdara

Enquête réalisée dans le cadre du Projet «Liberté, Droits et Justice : combattre l’esclavage par ascendance en Mauritanie » exécuté par SOS Esclaves, ONG des droits de l’homme créée en 1995 reconnue en 2005, financé par le Département d’Etat des Etats-Unis


Conakry, là où un manant débarque millionnaire

Tu débarques à l’aéroport international Conakry Gbessia avec en poche 200 dollars et tu te retrouves avec près de 2 millions de francs guinéens. Manant ouest-africain ou d’ailleurs, millionnaire en Guinée. Mais tu vas vite déchanter, quand tu sauras qu’une course en taxi te coûtera facilement 100.000 francs guinéens ou quand après avoir mangé un bon plat de riz gras dans un restaurant moyen, tu devras casquer 25.000 francs plus 10.000 francs si tu commandes un Coca-Cola. En plus, si tu payes une puce et la charge, c’est facilement 20.000 francs en l’air. En tout, entre le transport, le prix de ton gosier et ta communication, ton million se trouve déjà allégé de quelques 200.000 francs guinéen. Deux ou trois jours de transport, de resto et de folies, et te voilà sur le carreau.

Une partie de Conakry vue du Sheraton (Crédit Aidara)

Conakry est cette ville des contrastes, entre l’opulence de son centre-ville, ses gratte-ciels, ses hôtels de luxe, ses échangeurs et ses voies souterraines, mais aussi ses bicoques, sa misère et ses immeubles aux toits rouges ondulés. Au grand marché de la Madina, les Chinois pullulent comme des grappes de mouches, pantalons courts, tee-shirt blanc moulant des torses échancrés, traînant leurs sandales entre les motos-taxi et les teuf-teuf guinéens aussi indisciplinés que des marmots en classe maternelle.

Conakry, c’est surtout le Sheraton Grand Conakry et sa façade balayée par la mer, offrant à ses pensionnaires une vue imprenable sur un océan calme, truffé dès l’aube de têtes de pêcheurs à pied, un bidon entre les mains et l’autre tenant un hameçon. Ces pêcheurs en caleçon qui bravent chaque jour la fraîcheur des vagues rivalisent d’ardeur avec des piroguiers qui se lèvent aussi très tôt pour jeter leurs filets ronds. Seules des rare embarcations de transport avec leurs paquets de voyageurs reliant le port les dérangent dans leur solitude avec leurs puissants moteurs assourdissants qui font fuir les poissons.

Au restaurant «Le Parisien», situé juste près du Sheraton, on se croirait au Caire ou dans une cité arabe. Ici, c’est le narguilé qui attire la jeunesse dorée de Conakry plus que le menu. Assis en couple, en groupe ou en solitaire, chacun tient au bout des mains une pipe orientale à long tuyau flexible dans laquelle la fumée passe par un flacon rempli de chicha. Dans ce resto où un plat peut vous coûter entre 65.000 et 100.000 francs guinéens, c’est le calme plat le jour et la folie de la jeunesse branchée de Conakry la nuit, au milieu de rangées interminables de bolides. Au nez et à la barbe de la Brigade de répression du banditisme et la brigade de gendarmerie, juste à côté. Au carrefour, c’est un entassement de corps humains, de nuit comme de jour, des chaînes interminables de bouchons et de taximen, en quatre ou deux roues, qui interpellent le moindre étranger de passage. Ici, on sent toute la misère du peuple guinéen, perdu dans les gargotes aux repas douteux, à côté de restos chics où ne s’aventure que la classe huppée.

Ramatai Camara, jeune fille de la zone forestière diplômée en banque et assurance, travaille dans un de ces restos situés près du carrefour de Ratoma. Elle raconte qu’elle bosse depuis trois mois sans le moindre salaire. Le patron de l’établissement promet de l’embaucher à chaque fin de mois. En vain. Entre temps, elle assure un temps de travail de 8 heures à 17 heures, préparant les repas pour descendre le soir souvent sans le prix du taxi. Comme elle, ce sont des dizaines de jeunes Guinéens qui sont exploités par des hommes d’affaires véreux, qui profitent de la soif de travail de leurs concitoyens pour les exploiter.

Travailler en Guinée nécessite selon eux des bras longs et des interventions, dans un pays où les clivages ethniques sont forts, entre Peulhs, qui détiennent l’essentiel des affaires et n’embauchent que leur race, et les autres ethnies, Malinkés, Baga, Soussous, Kissi et j’en passe.

Chômage en Guinée : Voici ce que les jeunes font pour survivre…( Reportage)

La nuit, Conakry étale ses tentacules, de la cité administrative, à Kaloum, siège du gouvernement, des ambassades et cœur de la capitale, jusqu’à Matam ou Kolona, en passant par les quartiers de Hamdallaye ou de Matoto. Une ville qui ne dort pas et où s’entassent des millions de guinéens fuyant la misère, dans un des pays les plus riches d’Afrique.

Ici, l’insécurité est de mise. Les coupeurs de route et les gangs de malfaiteurs pullulent au point que pour rallier le Sheraton et l’aéroport, les clients de l’hôtel se font accompagner la nuit par un gendarme armé. Les agressions sont monnaie courante dans les rues obscures et la faune se déchaîne toutes les nuits à la recherche de proies faciles.

La dépréciation des conditions de vie des Guinéens est si grande que Conakry fait partie des villes africaines où la prostitution est la plus importante. Plusieurs articles parus dans la presse guinéenne sont d’ailleurs consacrés à ce sujet pour alerter les autorités sur la dépravation grandissante des mœurs et les risques sanitaires auxquels est exposée la jeunesse guinéenne.

https://guineeinfos.org/2017/07/16/prostitution-mal-tue-dignite-filles-a-conakry/

https://www.aujourdhui-en-guinee.com/fichiers/videos6.php?code=calb9120&langue=fr&champ2=&pseudo=art12&PHPSESSID=06884c7b7857d2289099a29602a028b8

https://www.nouvelledeguinee.com/fichiers/videos5.php?langue=fr&idc=fr_La_prostitution_prend_de_l__ampleur_a_Conakry_4493

Pourtant, la ville de Conakry qui avait reçu Myrième Makeba, la grande diva Sud-Africaine et chantre de la lutte contre l’Apartheid durant ses années d’errance, et avant elle, l’ancien président ghanéen Kwame Nkruma, mérite plus que cette image iconoclaste de ville-dépotoir.

Cheikh Aîdara


L’état de droit en Mauritanie sous la loupe des pays ACP-UE avant mi-2018

La 34ème session de l’Assemblée parlementaire paritaire Afrique Caraïbes Pacifique-Union Européenne (ACP-UE), qui s’est déroulée du 18 au 20 décembre 2017 à Port-au-Prince (Haïti), a été houleuse. La Mauritanie s’est tirée in extremis d’une condamnation, n’eût été l’intervention des cinq pays membres du G5 Sahel. Qu’à cela ne tienne, l’Assemblée a décidé de mettre sur pied une délégation ad-hoc, avant sa session prévue en juin 2018, qui sera chargée d’une mission d’informations de première main sur l’engagement de la Mauritanie de respecter les principes communs en matière d’état de droit, de droits de l’homme, de libertés fondamentales, entre autres.

Vue partielle de l’Assemblée parlementaire paritaire ACOP-UE (Photo google)

La Mauritanie a été mise sur le grill au cours de la dernière session de l’Assemblée parlementaire ACP-UE qui s’est achevée le 20 décembre dernier à Port-au-Prince. Sur les sept (7) résolutions prises au cours de cette rencontre, quatre ont visé la Mauritanie, dont trois demandant sa condamnation eu égard à ses multiples violations des droits de l’homme, de persistance de l’esclavage, de discrimination raciale, de violations des droits politiques, économiques et sociaux des citoyens.

Aux résolutions demandant des sanctions contre la Mauritanie, l’Assemblée parlementaire a tiré une résolution de conciliation visant à s’informer directement sur le terrain, via une délégation ad-hoc, sur la véracité des faits reprochés à l’Etat mauritanien. Cette délégation qui est attendue à Nouakchott avant juin 2018 devra rencontrer les autorités, les parlementaires, les partis politiques et la société civile.

La Mauritanie invitée à ratifier la Charte africaine de la démocratie

La 1ère proposition de résolution d’urgence de condamnation de la Mauritanie a été déposée par Frank Engel et Bogdan Wenta au nom du groupe PPE. Cette résolution a cité un certain nombre de griefs contre l’Etat mauritanien, dont entre autres, les restrictions aux droits de manifestations et d’association, ainsi que le manque d’espaces d’expression démocratique pour l’opposition et les activistes des droits de l’homme, les poursuites judiciaires à caractère politique, les arrestations arbitraires et les emprisonnements d’opposants, sans compter la persistance de l’esclavage, de la discrimination, mais aussi de la pauvreté et de la famine. Cette résolution s’est dite aussi préoccupée par les circonstances dans lesquelles a été conduite la récente réforme constitutionnelle et les troubles politiques qui s’en ont suivis et déplore les informations récurrentes faisant état de violations des droits de l’homme subis par les opposants politiques et les différents groupes de militants, y compris les militants engagés dans la lutte contre l’esclavage.

Cette résolution invite les autorités mauritaniennes à respecter les droits de l’homme, y compris la liberté d’expression, d’association et de réunion. Elle condamne toute discrimination fondée sur la race, l’appartenance ethnique et religieuse. Elle précise que les Harratines et les Afro-Mauritaniens représentent les deux tiers de la population mauritanienne et qu’ils doivent jouir du respect de leurs droits politiques et sociaux ainsi que de leur dignité. La résolution exhorte ainsi les autorités à modifier ou abroger toute disposition disciplinaire du corpus législatif, y compris les dispositions discriminatoires du code pénal, du code de l’état-civil et du code de la nationalité. Elle regrette que les poursuites pour esclavage soient très rares et invite les autorités à mettre fin à toute forme d’esclavage et à promulguer des lois visant à lutter efficacement contre cette pratique.

La résolution invite l’Union Européenne en tant que premier partenaire de la Mauritanie et les pays ACP à continuer de suivre de près la situation en Mauritanie afin que les élections présidentielles prévues en 2019 se passent dans la transparence et l’équité. Aussi, la proposition invite-t-elle l’état mauritanien à ratifier la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance. Elle rappelle que la Constitution mauritanienne fixe une limite de  deux mandats présidentiels ; que les prochaines élections sont prévues en 2019 et que le président Aziz s’est engagé de manière officielle à respecter la Constitution et à ne pas se porter candidat à une réélection pour un troisième mandat.

«Le référendum constitutionnel du 5 août 2017 n’a pas été libre et équitable»

La deuxième proposition de résolution d’urgence condamnant la Mauritanie et déposée par Maria Arena au nom du groupe S&D, se félicite d’emblée de la décision prise par le gouvernement mauritanien d’ériger l’esclavage en infraction pénale, d’établir une juridiction spéciale traitant de l’esclavage et l’annonce de la mise en œuvre en 2014 d’une feuille de route pour éradiquer la pratique. La résolution déplore cependant la forte prévalence de l’esclavage et la traite des êtres humains en Mauritanie. Elle condamne aussi les mesures répressives contre l’opposition, l’usage de la violence contre les manifestations pacifiques. Elle estime aussi que le référendum constitutionnel du 5 août 2017 n’a été ni libre ni équitable, comme elle déplore la dissolution du sénat et la soumission du parlement actuel à l’Exécutif, demandant à ce que la séparation des pouvoirs soit effective. La résolution rappelle aussi au gouvernement qu’il a la responsabilité de veiller à ce que les élections se déroulent en conformité avec les obligations internationales du pays en matière de droits de l’homme. Cette résolution invite également l’état mauritanien à ratifier la Charte africaine de la démocratie, comme elle exhorte les autorités à instaurer un enseignement scolaire universel pour l’ensemble des Mauritaniens, y compris les esclaves ainsi que leurs enfants et de mettre fin au système d’esclavage fondé sur la caste.

«Les lois sur l’apostasie violent le droits de l’homme »

La troisième résolution de condamnation d’urgence contre la Mauritanie a été déposée par Nicolay Barekov, Anne Gericke et Eleni Theocharous, au nom du groupe ECR. Elle condamne le recours à la torture par les forces de l’ordre, les arrestations arbitraires, la mise au secret de personnes placées en détention provisoire prolongée, la dureté et la dangerosité des conditions carcérales dans des établissements surpeuplés, etc. Cette résolution invite les autorités à libérer le Sénateur Ould Ghadde, à veiller à réagir aux manifestations dans le respect des obligations qui lui incombent au regard du droit international en matière de droits de l’homme et à respecter pleinement le droit à la liberté de réunion pacifique, d’opinion et d’expression. Elle condamne le projet de loi visant à durcir les peines pour blasphème et apostasie, notamment au regard du repentir qui ne permettra plus d’éviter la peine de mort. Elle invite le gouvernement à supprimer cette loi de sa législation nationale.

«Appel à la communauté internationale pour accompagner la Mauritanie »

Une contre-proposition aux condamnations a été déposée par Oum Kelthoum Mint Soueid’Ahmed au nom de la Mauritanie. Elle s’adosse sur l’option faite par la Mauritanie d’instaurer un système démocratique basé sur la séparation des pouvoirs et considère que Mohamed Abdel Aziz, Président de la République, a été réélu en 2014 à l’issue d’un scrutin transparent et régulier. Elle a mentionné le dialogue national tenu à Nouakchott en septembre-octobre 2016, avec la participation des partis politiques de la majorité et d’une partie de l’opposition et de la société civile, qui a abouti à un consensus sur la nécessité d’apporter des modifications à la Constitution et notamment la suppression du Sénat. Elle a rappelé les circonstances qui ont amené le Président de la République à faire recours à l’article 38 de la Constitution pour contourner le vote négatif du Sénat en faveur du référendum et qui serait le fait de corruptions accordées par un réseau.

La résolution tout en regrettant le refus de certains partis de l’opposition à prendre part aux dialogues de 2011 et de 2016, les invite à accepter la main tendue du pouvoir et à s’engager dans les efforts de développement économique et social du pays. Elle se félicite des progrès réalisés dans le cadre de la protection des droits de l’homme et de la liberté d’expression, ainsi que des avancées démocratiques remarquables observées en Mauritanie.

Enfin, la résolution appelle la communauté internationale à accompagner le pays dans la mise en œuvre de la feuille de route, sans mentionner toutefois que cette feuille de route est destinée à l’éradication de l’esclavage et de ses séquelles.

La note de conciliation de l’Assemblée paritaire

En guise de conciliation entre les résolutions condamnant la Mauritanie et la contre-proposition introduite par Oum Kelthoum Mint Soueid’Ahmed, ainsi que les efforts du G5 Sahel pour éviter la condamnation de la Mauritanie au cours de la session de Port-au-Prince, l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE a décidé d’envoyer à Nouakchott, avant sa prochaine session prévue en juin 2018, une délégation paritaire qui sera chargée de rencontrer les autorités mauritaniennes, les parlementaires, les partis politiques ainsi que la société civile, pour recueillir des informations fiables sur les multiples accusations portées contre la Mauritanie.

Elle invite dans ce cadre les autorités à accorder à la délégation un accès total et sans restrictions à l’information et à toutes les parties prenantes et que la délégation sera établie conformément à l’article 28 du règlement de l’Assemblée. Ses co-présidents sont chargés de transmettre la présente résolution au Conseil ACP-UE, au Conseil de l’Union européenne, au conseil ACP, à la vice-présidente de la Commission/haute représentation de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, à la Commission européenne, au Secrétaire général des Nations Unies, à l’Union Africaine, à l’Union du Maghreb Arabe, ainsi qu’au président, au premier ministre et au parlement de la République Islamique de Mauritanie.

Synthèse par Cheikh Aidara


Les harratines de Keur Macène, une fierté en bandoulière entre une pauvreté endémique et des terres luxuriantes

Keur Macène ! Un melting-pot civilisationnel où cohabitent depuis des siècles  maures, peulhs et wolofs dans une totale symbiose, même si ici, on trouve un exemple exceptionnel d’intégration et de décomplexion des Harratines, qui continuent cependant, dans certains aspects, à être encore pénalisés, comme les négro-africains, par l’immuable stratification sociale et une implacable hégémonie raciale sur les rouages politiques, économiques et administratives.

Vue de Ndiago (Photo Aidara)

Tapi dans une harmonie de dunes à la robe immaculée, d’étangs exotiques avec leur faune bigarrée et leurs forêts denses, «Meussène», comme l’appellent ses habitants, est bercé par le Fleuve Sénégal et l’Océan Atlantique. Une zone riche où  se pratiquent l’élevage sous pluie, la pêche à pied dans les étangs et la pêche continentale, mais aussi la cueillette et l’artisanat, avec son parc naturel, celui de Diawling, qui aurait pu développer une économie touristique naturaliste si les infrastructures nécessaires étaient mises en place. Pour le moment, seul le campement de chasse attire encore quelques amateurs de randonnées. On y poursuit le sanglier et quelques oiseaux de prestige. Le département est constitué de trois grandes communes, Keur Macène, NDiago et MBallal. Sa population est de  39.441 habitants selon le dernier recensement général de la population en 2013. Mais malgré toutes ces richesses, Keur Macène reste profondément rural, avec une multitude de villages éparpillés où l’Etat mauritanien a peu investi. Les populations sont pauvres et manquent souvent de tout.  Les écoles sont sans enseignants et les rares postes de santé fonctionnent sans matériels ni médicaments ni personnel.

Une économie rurale et naturelle
Les paysans à Keur Macène cultivent la terre avec des moyens rudimentaires et ne profitent que pendant trois mois de la pluie,  entre juillet et septembre. En matière de santé, le département ne compte qu’un centre de santé à Keur Macène, le chef-lieu du département, avec un laboratoire peu équipé, une maternité et un service nutrition presque déserté. Les postes de santé ne dépassent pas 19 unités et sont mal équipés et sans personnel suffisant et de qualité. En matière d’éducation, Keur Macène compte 59 écoles fondamentales, 4 collèges et 1 lycée. Le taux de couverture des besoins en eau potable est de 40%, avec deux châteaux d’eau à Keur Macène et à Boneinadji alimentés par l’Aftout-Essahili, et un ouvrage pour le traitement de l’eau du Fleuve à Birette.

Une famille de phacochère (Photo Aidara)

NDiago, la sirène du Delta

NDiago est la plus grande commune de Keur Macène, avec sa quarantaine de villages. Elle abrite l’essentiel de l’économie du département, avec des localités denses comme Zira, Birette et Bden, le parc de DIawling, les installations de Diama qui régule l’eau du Fleuve, empêchant la remontée saline, et alimente la ville de Nouakchott en eau potable à travers l’Aftout-Essahili.

Paysage près de NDiago (Photo Aidara)

NDiago c’est surtout un panorama d’îles exotiques, d’étangs, de dunes blanches, à quelques jetées de Saint-Louis du Sénégal. Ici, vivent en symbiose populations wolofs, peuls et maures. L’esclavage n’est qu’un lointain souvenir dans cette commune où ses séquelles se confondent avec la misère vécue par les autres communautés. Les Harratines de NDiago ont une mentalité totalement différente de celle de leurs frères des autres contrées mauritaniennes. Ici, ils sont fiers, hautains. Ils ne subissent aucun complexe dans leur rapport avec les autres et ne se connaissent pas de maîtres.

Situé à 65 kilomètres de Keur Macène, l’arrondissement est une cité moderne, avec ses habitats en dur, son collège, sa préfecture, sa base marine, sa brigade de gendarmerie et son commissariat de police. NDIago est choyé par la Nature, baigné par les eaux du Fleuve et l’Océan Atlantique dont la façade en marée basse offre un beau raccourci pour relier Nouakchott au Nord ou  Saint –Louis du Sénégal au Sud. Ses habitants sont en majorité pêcheurs. Ils pratiquent la pêche fluviale et la pêche maritime, mais aussi le transport fluvial. La commune est enclavée, sans route bitumée et sans pont entre les villages dont certains sont situés sur des îles. Le commerce y est florissant avec des échanges fructueux avec le Sénégal. Le Port militaire et de pêche dont les travaux ont débuté, ainsi que ceux de l’exploitation du gaz, constituent des opportunités économiques importantes pour les habitants dont les conditions économiques se seraient beaucoup dégradées ces dernières années. Le Port de NDiago va en effet favoriser la possibilité d’ouvrir une ligne pour le transport fluvial sur le Fleuve Sénégal sur une distance de 15 kilomètres et approvisionner les villes côtières jusqu’au Mali.

Le maire de la commune, Boidiel Ould Houmeid, crédité d’un bon mandat, aurait beaucoup contribué à l’amélioration de la vie sociale. NDiago est en effet desservi en électricité et en eau courante, mais aussi en réseau de communication.

MBoyo, entre les bras du Fleuve et le soupir de l’Atlantique


Femmes de MBoyo dans leur jardin (Photo Aidara)

Séparés par un bras du fleuve, les deux MBoyo (1 et 2) se dévisagent. Un précédent conflit entre les deux villages frères empêcherait les élèves de MBoyo 2, sans enseignant depuis deux ans, de rejoindre la modeste école de MBoyo 1 et son unique enseignant,  Ici, le défi premier des habitants est lié au manque d’eau. Ils s’alimentent à partir de Saint-Louis, par pirogue, à raison de 150 ouguiyas par bidon de 20 litres. «Tous les hommes sont partis, la pêche qui est leur principale activité n’étant plus rentable. Les poissons sont devenus rares à cause du gaz » déclare Rama Gaye, responsable de coopérative. Seules les femmes sont restées et tentent de survivre en s’adonnant sans moyen au maraîchage et à un maigre commerce de poissons séchés qui se meurt à cause de la situation de la mer, affirment-elles en substance. Les femmes accusent les travaux en haute mer de Kinros Energy qui aurait commencé ses installations pour l’exploitation du gaz pour le compte du Sénégal et de la Mauritanie. Même pour le maraîchage, les femmes déclarent se heurter au manque d’eau.

MBoyo, un village près de l’eau (Photo Aidara)

Face aux plants qu’elles arrosent à l’eau et chèrement achetés à Saint-Louis, les femmes de MBoyo se rabattent de plus en plus vers d’autres économies de substitution, comme le commerce de volailles. Elles ont ainsi mis en place, avec leurs propres moyens, un poulailler avec une pouponnière de 300 poussins. Pour les nourrir, elles leur achètent des aliments à raison de 11.000 UM le gros sachet, de l’Amprolium 20% et de l’Aminisotel, en particulier. «L’eau pour les poussins et leur nourriture coûtent chers, mais nous espérons qu’avec ce commerce, nous pourrons tirer des revenus dans l’avenir » poursuit Rama Gaye. Dans le bâtiment où est logé le poulailler, les femmes ont aussi installé de l’éclairage alimenté par le solaire. «C’est pour  garder les poussins au chaud » explique la présidente de la coopérative.

Les filaos sont desséchés (Photo Aidara)

Plus loin, à quelques pas du poulailler, face à la mer, des rangées de tables à l’état piteux, surmontées de filets où sèche une maigre provision de poissons. «C’est notre troisième activité, le poisson séché » détaille Rama, les yeux tristes tournés  vers les troncs rabougris de quelques filaos, au pied desquels elles triment depuis des années. «Les filaos sont en train de mourir petit à petit et pourtant, c’est eux qui fixent le sol. S’ils disparaissent, nous risquons de connaître des inondations » soupire-t-elle. Selon elle, «quelques mètres de grillage leur permettrait de les faire régénérer, sans ça, nous ne pourrons rien faire contre les chèvres qui dévastent les troncs ».

Bden, le silence de la cloche

L’école de Bden, constituée de six classes, est tristement vide. Les portes sont fermées et les 400 élèves de l’établissement se sont rabattus soit sur les écoles coraniques, soit sur les autres écoles de la commune. Le silence de la cloche fend le cœur des habitants, restés sans enseignant cette année.  Cette bourgade de quelques centaines d’habitants est peuplée par une population essentiellement harratine, ou plutôt de «maures noirs », selon l’expression consacrée par sa première personnalité, le maire de la commune dont la demeure est le fleuron du département. Ici, on ne parle ni d’esclavage ni de ses vestiges. Ce phénomène qui assombrit le reste de la Mauritanie, ne serait qu’un lointain souvenir, selon ses habitants qui n’ont connu que la liberté et la suffisance de soi.

Les portes closes de l’école de Bden… (Photo Aidara)
…et sa cloche tristement silencieuse (Photo Aidara)

N’empêche, l’Agence de Tadamoun, plus connue pour ses interventions dans les localités souffrant des séquelles de l’esclavage, est en train de construire, à 5 kilomètres de là, dans la localité de NDiago, une superbe école presqu’en finition.

L’île de Djawoss, l’oubliée

Peu de Mauritaniens connaissent l’île de Djawoss. Certains  se demandent même si ce bout de terre complètement oublié fait partie de la Mauritanie. Cette île que l’on peut relier à partir de NDiago ou de MBoyo par pirogue, en logeant le petit village côtier de Lorma, est pourtant composé de plusieurs petits villages, certains habités par des Wolofs et d’autres par des pasteurs Harratines. Un poste de santé et une école fondamentale sont construits à mi-chemin entre les deux Djawoss. Ils seraient environ 140  familles à vivre dans  cette partie de l’île, soit 700 personnes, dont une majorité de femmes et d’enfants. D’autres villages leur partagent cette zone.

Aux abords de l’île de Djawoss (Photo Aidara)

L’ïle a son infirmier d’état diplômé. Presque un miracle, car dans ce genre d’endroit, le personnel le plus gradé est en général une matrone ou une fille de salle. Mais Yarg Ould Houmeid, originaire de l’île, a choisi de venir servir les siens, après avoir été dans plusieurs autres villes du pays, dont un dernier poste à Walata. C’est le seul chauffeur aussi dans l’ïle. Il possède un tricycle tiré par une moto et fait le tour des malades à bord de son véhicule, s’il ne transporte à sa descente, quelques habitants ou des élèves de l’établissement contigu au poste de santé qu’il anime.

«Je suis là depuis deux ans. Je suis chez moi » déclare-t-il, assis derrière une table où traîne un stéthoscope. Une étagère contenant quelques médicaments complètent le décor. «Depuis 2015, je n’ai relevé aucune maladie  grave chez les habitants, pas même un palu » souligne-t-il. Yarg est secondé par une accoucheuse, Marième Mint Yatma, conseillère municipale, et une bénévole. Selon l’infirmier, les cas les plus fréquents qu’il rencontre, ce sont les hypertensions, les diarrhées, les insuffisances respiratoires aigües, les otites et les IST (infection sexuellement transmissible). Les femmes de Djawoss suivent aussi, selon lui, le Planning familial régulièrement. Entre janvier et octobre 2017, il a ainsi administré des contraceptifs, pilule et injectable, mais aussi condom féminin, à 62 femmes de l’île. Le poste de santé s’occupe aussi des accouchements. «En cas de complication, nous référons directement à Saint-Louis. Les patientes sont transportées à bord de mon tricycle et une fois sur la berge, par pirogue » explique-t-il. La dernière est décédée à Saint-Louis suite à une crise d’éclampsie, se rappelle-t-il. C’était la fille de l’accoucheuse.

Le poste de santé cohabite avec l’école primaire avec ses deux enseignants, tous originaires de l’ïle. Selon le directeur, Jidou Ould Mohameden, l’école compte deux classes, la 1ère année et la 4ème année, avec une 6ème année en chute d’effectifs. «En 2016, nous avions obtenu pourtant 4 admis au concours d’entrée au collège » fait-il remarquer avec regret, ajoutant que cette année, ils ont enregistré 3 abandons. «Les élèves sont partis à Nouakchott et à Nouadhibou avec leurs parents».

Ecole de Djawoss (Photo Aidara)

Pour le moment, l’école de Djawoss compte un effectif de 85 élèves53 pour la 1ère année et 32 pour la 4ème année. Selon Jidou, une mission de l’Inspection départementale est venue leur rendre visite en janvier 2017. «Nous manquons de tout ici, pas de livres scolaires, surtout pour la 1ère année, ainsi que des livres pour la 4ème année, notamment des livres d’Instruction morale et religieuse, de mathématique, d’histoire et de géographie, des livre arabes et français ».  De l’avis des habitants, la qualité des enseignants, sortant tous les deux de l’ENI (école nationale des instituteurs), fait que des élèves viennent d’autres villages pour s’inscrire ici. «Ces enfants, issus de milieux pauvres, sont pris en charge par les populations. Ils devaient normalement bénéficier d’une bourse d’études ou d’une cantine scolaire » se plaint-il.

Djawoss Wolof, où le minimum vital manquant

«Ici, nous manquons de tout et nous avons besoin de tout, y compris le minimum vital » témoigne Fally Oumar Guèye, chef de village de Djawoss Wolof et ancien représentant de la Qadarya à Nouadhibou.  «Nous avons même des problèmes pour faire évacuer nos malades car nous sommes dans une île complètement enclavée » se lamente-t-il,  demandant à l’Etat mauritanien de les aider en mettant à leur disposition une «Pirogue ambulance».  Prenant à témoin l’infirmier Yarg Ould Houmeid, il ajoute «notre poste de santé manque de médicament et ne possède même pas le minimum nécessaire pour soulager les malades. Aussi, nous nous rendons souvent à Saint-Louis pour acheter des médicaments ». Même pour boire, les habitants sont obligés selon lui d’aller au Sénégal. «Neuf mois sur douze nous buvons grâce à Saint-Louis, et pendant le reste de l’année, nous consommons l’eau des marigots » relève-t-il.

Fally Oumar Guèye, chef de village de Djawoss (Photo Aidara)

Avec la sècheresse qui frappe le pays en cette année, les habitants de Djawoss ne savent même plus quoi faire, selon Fally. «Les services de l’Hydraulique n’ont jamais posé leur pied ici à l’ïle. Je pense qu’ils ignorent même notre existence » plaide-t-il. Idem pour les services de l’électricité. «Nous nous alimentons à partir de panneaux solaires pour les usages courants et la conservation des médicaments et des produits alimentaires»  dit-il.

Les habitants de Djawoss sont agriculteurs et pêcheurs. «Nous n’avons jamais bénéficié d’aide de la part de l’Etat dans le domaine de l’agriculture, ni semences, ni grillages et nos champs sont souvent dévastés par les animaux » complète-t-il.  La seule aide qu’ils ont eu, selon lui, c’est en 2009-2010, par le biais d’une ONG. Les femmes aussi sont confrontées selon lui au manque d’eau pour développer un projet de maraîchage.

Djawoss Haratine, vie pastorale menacée

Les populations harratines de Djawoss souffrent des mêmes insuffisances que leurs voisins Wolofs avec lesquels ils cohabitent dans une symbiose parfaite. Les deux villages entretiennent des relations fraternelles vieilles de plusieurs siècles et partagent tout, y compris l’école et le poste de santé.

Petit élevage de ruminants pour compenser le départ du bétail (Photo Aidara)

Selon Tenwaza Mint Houmeid,  deuxième femme responsable de la localité, «nous avons posé nos problèmes aux autorités, mais sans réponse ». Selon elle, leur île manque surtout de moyens de transport. «Nous avons bénéficié une seule fois d’un projet  AGR (activité génératrice de revenu) d’un montant de 200.000 UM pour ouvrir une boutique communautaire, mais nous avons été bloqués par les procédures administratives pour créer une coopérative». Même pour monter un projet de maraîchage, les populations se sont heurtées à un problème d’approvisionnement en eau. «Pour boire, nous sommes obligés d’enjamber le Fleuve pour nous ravitailler au Sénégal » lance-t-elle. La plupart des hommes sont partis de l’autre côté pour sauver le bétail d’une mort consécutive à la sécheresse, ajoute-t-elle en substance.

Mais l’ïle de Djawoss est en train de vivre une expérience inédite et pourrait dire adieu au problème de l’eau dans un proche avenir. Un haut cadre de l’UNICEF, ressortissant de la localité, a construit un énorme bassin de retenue d’eau avec un système de pompage, de filtrage de l’eau du Fleuve et de distribution à partir d’un petit château d’eau construit sur le toit d’un bel immeuble de deux étages. Il a importé un mini-tracteur de Chine ainsi que des motopompes pour creuser une tranchée de 2 à 3 kilomètres pour amener l’eau.
Ghahra où les efforts d’une bénévole

Vice-présidente de la commune de NDiago, Mah Mint Alioune fait figure de notable emblématique dans la localité de Ghahra, un petit village situé à quelques 10 kilomètres de NDiago sur la piste menant vers Keur Macène.  Cette ancienne infirmière qui a choisi de vivre parmi les siens, loin d’une vie facile qu’elle aurait pu avoir à Nouakchott ou ailleurs, fait de l’action sociale son sacerdoce.

Mah Mint Alioune devant un paquet de moustiquaires incomplet (Photo Aidara)

Grâce à une ONG française, elle est parvenue à se construire un petit poste de santé, mais totalement abandonné faute de matériels de bureau et d’outils de travail. Pour le moment, elle opère chez elle où des patients venus des villages voisins, surtout les femmes, viennent profiter de ses prestations gratuites. Le village de Ghahra n’est jamais parvenu à se soustraire de la pauvreté, malgré plusieurs expériences qui auraient pu changer la donne, mais qui n’ont pas connu de succès. L’une d’elle est une expérience miroitée par une ancienne ministre aujourd’hui versée dans l’action sociale. Elle aurait entraîné Mah Mint Alioune plus l’administration du Parc de Diawling dans un projet de plantation de mangrove initié par l’Unesco et qui se serait achevé sur un micmac. Ce projet devait bénéficier à 3 villages harratines, Dar-Salam, Dar-Rahma et  Ghahra et aboutir à des emplois rémunérés pour plusieurs femmes et des hommes. Puis, un investisseur marocain se serait présenté pour le même projet. Seulement, son initiative tombera à l’eau quand il décida de se greffer sur la première expérience alors que les habitants pensaient qu’il voulait lancer un nouveau projet indépendant de celui d’où ils n’avaient tiré que frustration. «Ce projet de mangrove ne nous a finalement apporté que des malheurs, les moustiques, le paludisme et la détérioration de notre environnement » témoigne Mah. Pour tout, les villageois n’en auraient tiré selon elle que la modique somme de 45.000 ouguiyas.

Autre déception des habitants de Ghahra, l’état lamentable de leur école, construite en 1984 grâce à l’effort des habitants. Selon Alioune Ould Abdi,  jeune enseignant originaire de NDiago et directeur de l’établissement, «nous avons besoin d’un cycle complet, car jusque-là nous ne disposons que de trois classes, la 6ème, la 5ème et la 1ère année pour un effectif de 92 élèves, 47 garçons et 45 filles» lance-t-il en guise de préambule. Ils seraient deux à assurer l’enseignement, lui et son collègue francisant. Mais ils manquent de manuels scolaires et d’outils didactiques. «L’école ne dispose pas de cantine, même si tous les élèves sont issus de familles déshéritées » tient-il à préciser, pour expliquer certaines absences assidues.

Il faut dire que la localité de Ghahra est peuplée de 500 familles et beaucoup d’enfants. La planification familiale y est faiblement suivie. «Avant ma retraite, je disposais de produits contraceptifs. Maintenant je n’en reçois plus malgré mes demandes répétées car les besoins non satisfaits en matière de planning familial sont important s» conclut-elle.

Moydina, les vaines promesses électorales

«Lors des élections de 2006, nous avons été submergés par des promesses mirobolantes de la part de politiciens venus de Nouakchott et le résultat est là, un poste de santé construit à la hâte pour capter nos voix, puis la décrépitude » raconte Moya Mint Moussa Ould Sneiba. Le bâtiment en question est là, abandonné aux caprices du vent. Des portes défoncées, des écriteaux encore visibles, indiquant le bureau de l’infirmier, la maternité, la salle de pansement.  «Une brave infirmière y a travaillé pendant deux années, de 2010 à 2012, mais faute d’avoir obtenu le matériel promis et les médicaments, elle est partie. Mais déjà le bâtiment menaçait de s’écrouler et elle a continué à travailler pendant longtemps dans une maison que les habitants lui avaient aménagé » poursuit-elle. Aujourd’hui, les femmes se soignent à Saint-Louis, quand leur cas dépasse les modestes moyens de Mah Mint Alioune de Ghahra, complète-t-elle.

Un poste de santé en ruine (Photo Aidara)

L’école de Moydina n’est pas dans une situation meilleure. Une simple bâtisse de deux salles jetée dans un no man’s land et un drapeau râpé, seul signe de sa présence. Certains habitants disposent de l’eau courante, mais la plupart achète l’eau des fûts. La seule activité maraîchère qui occupait les femmes s’est arrêtée, «faute d’eau, le puits du village ayant tari » explique encore Moya. Selon elle, elles exportaient des légumes jusqu’à Nouakchott.

Face au manque de débouché, «tous les hommes sont partis à Nouakchott pour trouver du travail, et les jeunes diplômés du village sont sans emploi » maugréa-t-elle, assise à même le sol, au milieu d’une dizaine d’autres femmes. Elle exhiba des nattes en lianes tissées et des sacoches en cuir, échantillon d’un maigre projet artisanal auquel s’adonnent les membres de la coopérative qu’elle préside. «On veut travailler, mais on est sans moyens» explique-t-elle. Selon Moya Mint Moussa, le village compte cinq coopératives féminines, deux dans le commerce et deux dans l’artisanat, trois dans le domaine agricole.

Moya Mint Moussa et les femmes de la coopérative (Photo Aidara)

Elle se rappelle encore du passage du président Mohamed Abdel Aziz, lorsqu’il longea leur village pour aller poser la première pierre du Port de NDiago. «Nous étions massés le long de la piste pour l’accueillir. Nous aurions bien  aimé qu’il s’arrête pour écouter nos souffrances » regrette-t-elle, promettant qu’à la prochaine occasion, elle se jettera sur le convoi pour l’arrêter. Ce qui provoqua le rire de ses congénères.  Moya se félicite cependant de l’ouverture dans leur localité d’une boutique EMEL et ses produits subventionnés. «Nous souhaitons que cette boutique continue à fonctionner et qu’elle soit régulièrement approvisionnée » souligne-t-elle.

Zira Taghridient, les vestiges d’un passé glorieux

Les Taghridient de Zira vivent les vestiges d’un passé émiral que la naissance de l’Etat mauritanien a sérieusement compromis. Issus d’une tribu guerrière d’origine Sanhaja, Ils sont reconnus par les organisations internationales et l’Etat mauritanien comme interlocuteurs incontournables des administrateurs du parc de Diawling installé sur leurs  terres dont la propriété est attestée par un document qui leur a été délivré en 1957 par l’autorité coloniale. Ce rôle tient également à leur longue expérience et leur connaissance parfaite du delta du Fleuve, ce qui en fait d’admirables experts. Les Taghridient vivent de pêche, de la récolte du Djaccar (nymphéa) et de la Selaha (gousse de l’acacia nilotica). Ils pratiquent aussi la chasse aux phacochères et aux petits gibiers dans un environnement panoramique dominé par la beauté des étangs, la violence de la mer et le vol majestueux de millions d’oiseaux venus d’Occident, fuyant la rudesse de l’hiver. Cette petite économie naturelle génère plus de 12 millions UM et pourrait atteindre 240 millions d’UM avec l’exploitation des ressources du parc. Cependant, 73% de la population de Zira, estimée à 540 habitants, est pauvre.

Pêcheur Taghridient

Les pêcheurs Taghridient exploitent aujourd’hui les ouvrages de Cheyal, Lemer, Lekseir, Gambar et Bel, alors que les Tendgha et les Bouhoubeïny, s’orientent vers Thiallakh. Mais, une nouvelle génération moyennement riche grâce au commerce ou à des fonctions administratives, se développe de plus en plus. Cela se voit, à travers le standing d’habitat qui commence à changer, avec l’émergence de belles demeures en durs, à la place des huttes en banco des parents. Pauvres mais fiers, les Taghridient restent profondément attachés à leur terre. Même les Moussafirines Taghridient, expulsés du Sénégal à la faveur des tristes évènements de 1989, sont revenus au bercail. Ils se sont installés près de Zira, créant un village du nom de Bounayatt.

Sur le plan social, les Taghridient se distinguent des autres populations mauritaniennes. Ils sont les seuls à revendiquer leur double identité, arabe et berbère. Leur histoire est surtout le symbole d’une interaction sociale réussie entre les populations locales, d’origine souvent noire, et les Béni Hassane installés ultérieurement. Les Harratines constituent la majorité d’une communauté dont la classe nobiliaire est aujourd’hui estimée à une centaine dindividus. Ici encore, le contraste est saisissant, car les Harratines Taghridient, contrairement aux autres Harratines, sont parfaitement intégrés dans l’architecture sociale tribale. Ils sont d’une fierté qui tranche avec la psychologie du dominé qui caractérise les autres Harratines.

Excellents pêcheurs, les Taghridient se confondent presque à leur activité et le Guedj (poisson séché) qu’ils fabriquent est très apprécié au Sénégal.

Leurs femmes sont particulièrement actives. «En l’absence des hommes, nous nous adonnons à la cueillette et à l’artisanat » explique Tacha Mint Mahmoud, une femme d’une cinquantaine d’année. «Elles ont une grande capacité historique d’autosuffisance vivrière due à une longue connaissance du delta et de ses richesses », explique un cadre du Parc de Diawling.

Les Taghridient sont aussi reconnus comme la communauté la plus importante pratiquant le maraîchage dans le bas delta. Ils cultivent 35% des terres de la commune de NDiago.
MBallal où la vie au bord de la Nationale

La commune de MBallal est constituée d’une succession de petits hameaux dont l’essentiel vit au bord de la Nationale reliant Nouakchott à Rosso. Ntaba, Nwelky, Bavradchya, Mighve, Tewgui, Ntarche, Lebeired, Leweigue, Haci Barka…Autant de noms de villages qui se suivent à la queue leu leu, presque à deux ou trois kilomètres de distance. Le symbole de l’anarchie auquel l’Etat mauritanien tente de mettre fin en lançant un programme de regroupement communautaire.

Hindou Mint Hmeyed, présidente de coopérative à oueivia (Photo Aidara)
Bezeid Ould Ahmed (Photo Aidara)

A Ouweyvya, une bourgade située sur la bifurcation menant à Keur Macène, à la limite de la commune de NDiago, Hindou Mint Hmeyed se plaint du puits asséché de la coopérative qu’elle préside et qui regroupe une vingtaine de femmes. «Notre projet agricole est sérieusement compromis et pour amener l’eau, nous payons chaque jour 1.000 UM » se lamente-t-elle. Pour avoir l’électricité, indispensable à l’ère du numérique, le solaire fait floraison dans ce hameau qui plonge pourtant dans le noir dès la nuit tombée. «Mais les familles ont de quoi alimenter leurs portables » susurre-t-elle. Ce qui semble être suffisant. Pour se soigner, les femmes se rendent au poste de santé de Bombry. Quant à l’école, seuls deux classes sont fonctionnels pour accueillir la centaine d’élèves du village, la troisième s’étant effondrée.

Ici, les lamentations sont florès.  Bezeid Ould Ahmed, propriétaire d’un projet maraîcher  de 400 mètres carrés se plaint d’avoir été omis lors d’une distribution de grillages. «Mon nom était sur la liste, et ils ont profité de mon absence pour des soins, pour m’oublier. J’ai protesté auprès du maire sans succès » déclame-t-il.

Créée en 1957, l’école primaire de MBallal, chef-lieu de la commune, est l’une des plus anciennes du pays. Elle compte un cycle complet, de la 1ère année à la 6ème année avec trois enseignants dont une institutrice en français. Mais faute de classes, l’école fonctionne en multigrades. Pour le directeur de l’école,  «nous avons 130 élèves et des classes à réfectionner mais le conseil municipal semble ignorer l’état piteux de l’établissement » déclare-t-il.

Les élèves de 5ème de l’école de Mbalal en..(Photo Aidara)
…cours de français

A MBallal, comme dans la plupart des villages, les hommes sont partis dans les grandes villes, laissant aux femmes le soin de s’occuper du quotidien et de l’éducation des enfants. Pour faire face à toutes ces contraintes, les femmes de MBallal se sont aussi regroupées en coopératives. Principale activité, la vente de poisson ou du couscous. Pour Soukeina Mint Ahmed, «nous manquons profondément de moyens pour fructifier notre commerce ; nous avons besoin de frigos pour la conservation du produit et de l’électricité » confie-t-elle. Même son de cloche de la part de NDèye Mint Oubeid qui préside une coopérative de 20 femmes. «Nous nous heurtons à des difficultés de transport et d’accès aux marchés pour écouler nos produits » déclare-t-elle. Tous n’attendent pas l’aide de l’Etat. «S’il fallait attendre que les pouvoirs publics nous appuient, nous et nos enfants seraient morts de faim depuis longtemps » soutient Soukeina, qui souligne que les maigres revenus de leurs activités sont cependant complétés par les envois de leurs maris ou frères qui travaillent à Nouakchott, à Rosso ou à Nouadhibou.

Au fil des ans, les Harratines se soustraient ainsi peu à peu de l’esprit de domination qui caractérisait les rapports entre leurs parents et leurs anciens maîtres. Le département de Keur Macène en offre une parfaite illustration.

Cheikh Aïdara

Enquête réalisée dans le cadre du Projet «Liberté, Droits et Justice : combattre l’esclavage par ascendance en Mauritanie » exécuté par SOS Esclaves sur financement du Département d’Etat des Etats-Unis

 


Festival Traversées Mauritanides : «peut-on parler de l’écriture de l’ailleurs ? »

Le Festival «Traversées Mauritanides», ou les rencontres littéraires de Mauritanie, tire à sa fin. Lancé le 14 décembre dernier, le festival qui s’achève mardi à la médiathèque de l’Institut français, aura vécu ses meilleurs moments, avec deux ultimes tables-rondes, dont celle qui a réuni dimanche dernier autour de l’ancienne journaliste de Jeune Afrique Yasmina, Lahlou, les écrivains Mbareck Beyrouk, Brahim Bakar Sneiba, Marième Derwich, Eddy Harris et Yacoub Khattari. Le thème : «peut-on parler de l’écriture de l’ailleurs ?»

De gauche à droite : Yacoub Khattri, Brahim Bakar Sneiba, Eddy Harris, Yasmina Lahlou, Marième Derwich et Mbareck Beyrouk (Photo Aidara)

«Ecrire hors de sa ville ou de son pays, influences de résidence ou évocations de souvenirs». Autant d’éléments déclencheurs ou inhibiteurs qui ouvrent les vannes de la muse ou bloque l’inspiration. C’est pour débattre des difficultés liés à la dialectique du dedans et du dehors, de l’autre qui pourrait être l’égo, l’alter ego ou carrément l’antithèse de ce qu’on pourrait être ou penser, que le thème sur l’écriture de l’ailleurs a été disséqué jusque dans ses derniers retranchements.

Devant un public jeune, mais aussi d’adultes, amoureux des belles lettres, Yasmina Lehlou, ancienne journaliste de Jeune Afrique, experte en communication et enseignante à l’Ecole de journalisme de Paris, a introduit ses invités.

Mbareck Beyrouk, ancien journaliste, auteur de plusieurs ouvrages dont «Et le ciel a oublié de pleuvoir (2006)», mais surtout son ouvrage «Le Tambour des larmes (2015)» qui lui a valu le Prix Kourouma 2016.

Marième Derwich, métisse de père mauritanien et de mère française, chroniqueuse «Nous les Z’Autres» au journal «Le Calame » et auteur du recueil de poésie «Mille Je (2015)».

Brahim Bakar Sneiba, ancien officier de l’armée mauritanienne, ancien journaliste et écrivain, auteur des ouvrages «La Mauritanie entre les chars et les urnes (2013) » et «Soufi, le mystique qui fait peur (2016)».

Yacoub Khattari, enseignant et auteur du livre «Les Résignés (2004)» qui parle de l’esclavage et de ses séquelles mais aussi de la stratification sociale et des castes en Mauritanie.

Eddy Harris, journaliste de formation et écrivain américain installé en France, auteur de «Still life in Harlem, Jupiter et Moi (2009)» et de plusieurs autres ouvrages tirés de ses voyages.

« Mon ici, c’est ce qui m’interpelle »

Mbareck Ould Beyrouk, déclare ne pas connaître ce qui est son ici et son ailleurs. Parlant de son ouvrage «Le tambour des larmes », il souligne que «ce n’est pas un livre féministe, mais le cri des femmes du désert prises dans le tourbillon des traditions ». Selon lui, ses meilleures lectures sont étrangères, la poésie arabe, les légendes africaines, les littératures françaises et d’ailleurs. Pour lui, l’ici, c’est là où s’installe son esprit. «Mon ici, c’est ce qui m’interpelle, car pour moi, l’écriture est avant tout un acte solitaire» affirme-t-il.

Vue partielle du public (Photo Aidara)

Pour Marième Derwich «l’écriture est plurielle ». Elle-même se dit «victime de sa multipluralité» et qu’elle vit une dualité douloureuse, tiraillée entre un ici, source de ses racines paternelles et un ailleurs, terre de sa mère. En fait, son «Mille Je » serait en réalité «Mille UN». Cette multipolarité est à la fois pour Marième Derwich une richesse et un fardeau. Métisse, elle se dit être «la fille de gens qui ont porté leur propre mémoire», ce qui ne l’empêche pas d’être coincée dans un dilemme identitaire qui lui fait faire d’incessants aller-retour dans sa vie qui est à la fois ici et ailleurs. Marième de souligner qu’elle est «dans la recherche perpétuel d’un point nodal entre son ici et son ailleurs », sentiment angoissant de n’être ni d’ici ni d’ailleurs. Cette douloureuse dualité transparaît ainsi dans ses chroniques et dans sa poésie. Et jusque-là, elle déclare ne pas avoir encore réglé ses problèmes de mémoires. Ainsi, le seul endroit où elle a senti qu’elle n’avait plus envie d’écrire, parce que se sentant enfin elle-même, ni «Marième, la Mauresque » ni «Marième, fille de la Nazaréenne Chantal», c’est durant son séjour de deux ans en Nouvelle Calédonie.

Pour Yacoub Khattari, l’écriture est un moyen de régler les problèmes identitaires. Son ouvrage sur «Les Résignés», un plongeon dans les strates de la société féodale mauritanienne, serait le fruit de longues observations pendant ses années d’enseignant, dans les années 90.

De la langue de l’écriture

Pour Brahim Bakar Sneiba, le passage de l’écriture engagée, «La Mauritanie entre les chars et les urnes» à l’écriture spirituelle romanesque, «Soufi, le mystique qui fait peur», le fait penser au titre d’un célèbre journal satirique mauritanien «Chi Loh V’Chi » ou «sauter du coq à l’âne».  Pour lui, le premier ouvrage ne serait que l’écho d’une révolte née d’une injustice qui l’avait conduit en prison, (dans la trame du coup d’état manqué de 2003 : Ndlr), puis de sa révocation de l’armée. Pour Brahim, les littéraires forment un microcosme fermé différent des scientifiques, car là où l’imaginaire et le rêve servent souvent de trame, ici, on se heurte au monde froid des chiffres et des certitudes ancrées.  Pour lui, «l’ailleurs est souvent plus proche qu’on ne l’imagine».

Mais la langue de l’écriture semble aussi jouer un rôle prépondérant dans le rapport de l’ici et de l’ailleurs, entre le moi qui exprime et l’autre qui reçoit.

Pour Bakar Sneiba, «j’ai l’impression dans mes ouvrages que je n’écris pas en français, mais dans ma langue paternelle», mettant en exergue cette dichotomie commune à tous ceux qui pensent s’exprimer dans une langue autre que celle de leur propre culture.

Pour Marième Derwich, «j’écris la langue de ma mère, une langue par rapport à laquelle je ne cultive aucun complexe, et face à laquelle je ne me pose aucune question». Pour elle, s’interroger déjà sur la langue de l’écriture, est un acte politique et idéologique.

Pour Eddy Harris qui écrit en anglais et se fait souvent traduire en français, bien qu’il manie la langue de Voltaire, «je rêve et je pense en anglais, mais j’écris en français ». Pour lui, il ne cherche ni à s’enraciner en France, pays dans lequel il a choisi de vivre, ni à se déraciner des Etats-Unis, son pays qu’il aime profondément.

Si Eddy Harris écrit souvent ses ouvrages là où ses pérégrinations le mènent, Mbareck Beyrouk s’est déclaré lui, incapable d’écrire en dehors de son pays et de ses racines.

La table-ronde s’est achevée par une séance question-réponse entre les écrivains et le public, agrémenté de quelques contributions fort enrichissantes.

Il faut rappeler que le Festival «Traversées Mauritanides» qui en est à sa 8ème édition (14-19 décembre 2017) , a été lancé en 2010 par Moussa dit Bios Diallo, journaliste, poète, écrivain, auteur de plusieurs ouvrages : «Une vie de Sébile », «De la naissance au mariage chez les Peuls de Mauritanie », «Les Pleurs de l’Arc-en-ciel », les «Os de la Terre» (recueil de poèmes).

Cheikh Aidara


La grève des aiguilleurs de Dakar bloque les congressistes à Conakry et à Abidjan

Les participants à la 6ème réunion annuelle des pays membres du Partenariat de Ouagadougou sont bloqués à Conakry et à Abidjan, à cause de la grève des aiguilleurs du ciel à Dakar. Un sacré coup pour l’image du Sénégal et de l’aéroport international Blaise Diagne, inauguré avec grande pompe par le président sénégalais Macky Sall il y a juste quelques jours.

Aéroport Blaise Diagne de Dakar désert

A la réception de l’hôtel Sheraton Grande Conakry, le désarroi était à son comble ce vendredi 15 décembre 2017. Les vols sur Dakar étaient suspendus, touchant de plein fouet les passagers d’Air Ivoire et de Mauritania Airlines qui devaient décoller respectivement à 15 h 30 et à 18 h 30. Une véritable douche froide qui se transforma en un vacarme de lamentations, alors que la plupart des voyageurs avaient déjà procédé à leur check-out, tout leur bagage aligné devant la réception.

Au Secrétariat du PO, une réunion de crise était convoquée sous la présidence de sa directrice, Mme Fatimata Sy. La rapidité des réaménagements était à la mesure d’une direction qui avait non seulement réussi une conférence qui avait regroupé plus de 400 invités, mais aussi dans la promptitude des mesures efficientes prises face à la nouvelle crise. Une demande de prolongation fut rapidement négociée avec l’hôtel pour reloger les retardataires tandis que des mesures rapides et efficaces étaient engagées pour changer certains itinéraires de vol.

C’est ainsi que les voyageurs d’Air Ivoire en partance vers Dakar ont été aiguillonné vers Abidjan pour une nuitée avant leur acheminement le lendemain vers le Sénégal.

Pour les voyageurs de Mauritania Airlines, c’est encore un peu plus compliqué. Ils devront passer encore une ou deux nuitées supplémentaires à Conakry. Leur vol est programmé dans le meilleur des cas pour le samedi 16 et le pire des cas le dimanche 17 décembre, par la compagnie Ethiopian Airlines. Une fois à Dakar, les passagers à destination de Nouakchott devront certainement attendre encore le vol de Mauritania Airlines du lundi à 18 h 30 en provenance de Conakry. En tout, ils auront perdu  trois jours.

L’information avait pourtant circulé très tôt le matin. «L’aéroport Blaise Diagne de Dakar est fermé à cause d’une grève des aiguilleurs ». Une grève longtemps annoncée et qui a abouti à une première semonce qui heureusement ne durera que 24 heures. «Au cas où la doléance des aiguilleurs n’est pas satisfaite, une suspension plus longue sera enclenchée » faisait-on entendre.

Selon plusieurs Sénégalais rencontrés dans les couloirs de la réception de l’hôtel Sheraton de Conakry, «pour des motifs de politique politicienne, l’aéroport Blaise Diagne a été inauguré dans la précipitation sans que les mesures d’accompagnement aient été prises ». Parmi ces mesures, le problème des aiguilleurs dont la plupart logent à Dakar et qui sont obligés chaque jour de parcourir 80 kilomètres, en payant de leur poche le carburant nécessaire pour un tel trajet ainsi que les frais de péage. Un problème qu’ils auraient posé aux responsables sans qu’une réponse claire leur ait été donnée. Face au retard pris pour régler le problème de déplacement, le personnel aiguilleur a ainsi décidé ce vendredi 15 décembre, de lancer une semonce.

Une crise que le ministère sénégalais des transports devra rapidement résoudre, sans quoi l’aéroport de Diass, qui a a coûté officiellement plus de 700 milliards de Francs Cfa au contribuable sénégalais, ne sera plus qu’un cimetière aérien.

Cheikh Aidara
Conakry


Médias primés au diner gala de l’UCPO

L’Unité de Coordination du Partenariat de Ouagdougou (UCPO) a organisé durant la soirée du 13 décembre dernier un diner gala en marge duquel six prix ont été distribués aux meilleurs reportages sur la santé reproductive et la planification familiale (PF). Le Burkina Faso et le Bénin ont tout raflé.

Vue partielle de la salle (Photo Aidara)

En marge de la 6ème réunion du Partenariat de Ouagadougou qui s’est tenue du 12 au 14 décembre 2017 à Conakry, l’Unité de Coordination a divulgué le nom des six lauriers qui ont remporté le 3ème prix du concours d’excellence de la meilleure production médiatique, avec l’introduction des blogs dans une compétition qui a été jusque-là circonscrite à la radio et à la presse écrite.

Les productions gagnantes ont porté sur les grossesses en milieu scolaire, les effets dramatiques de la surpopulation (cas de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso), l’état désastreux de certains centres publics d’écoute jeunes, ainsi que les problèmes d’accès aux services de la planification familiale. La soirée a été ouverte par le discours de Mme Fatimata Sy, directrice générale de l’UCPO, qui a mis en exergue le rôle de la presse dans la promotion de la PF.

Le 1er prix blog a été emporté par Mme Agbazahou Styline Alexine Sémévo du Bénin pour son article «Les tabous qui nous brisent » et le 2ème a été attribué à Mme Bassératou Kindo du Burkina Faso pour son article «les effets secondaires des contraceptifs : la méthode de communication pour rassurer les femmes ».

Mme Agbazahou Styline Alexine Sémévo recevant le 1er prix blog (Photo Aidara)
(
Mme Bassératou Kindo du Burkina Faso recevant son prix (Photo Aidara)

Dans la catégorie radio, le 1er prix a été emporté par M.Abdoulaye Moumouni Yacoubou, journaliste à la Radio-Télévision du Bénin, station de Parakou, qui anime un magazine santé en langue locale, pour son émission «les grossesses scolaires : prévenir ou assumer». Le 2ème prix est allé à Mme Eveline Akpédjé Ayodélé Sagbohan, journaliste à Radio Bénin pour son émission «la contraception : une alternative au maintien des filles à l’école».

Abdoulaye Moumouni Yacoubou recevant son prix (Photo Aidara)
Mme Eveline Akpédjé Ayodélé Sagbohan recevant son prix (Photo Aidara)

Enfin, dans la catégorie presse écrite, les deux prix ont été emportés par des journalistes du quotidien Sidwaya. Le 1er prix a été emporté par M.Abdoul Aziz Nabaloum pour son article «accroissement démographique : un baby boom non maîtrisé à Bobo Dioulasso et le 2ème prix est allé à M.Boureima Sanga pour son article «Centres de santé au Burkina : une initiative inachevée ».

Abdoul Aziz Nabaloum reçoit son prix des mains du Ministre de la Santé de Guinée (Photo Aidara)
Boureima Sanga recevant son prix des mains de la présidente de l’UCPO (Cheikh Aidara)

Les lauréats des premiers prix de chaque catégorie ont reçu un ordinateur portable et un enregistreur dictaphone et les seconds, un enregistreur dictaphone et un smartphone.

Lancé le 4 septembre 2017, les productions en compétition devaient être publiées entre le 4 septembre et le 25 octobre 2017. Cinquante journalistes des neuf pays du Partenariat de Ouagadougou ont participé à ce concours, dont 16 productions en radio, 11 en presse écrite et 23 en blog.

Cheikh Aidara
Conakry


La Mauritanie regrette son isolement au sein du Partenariat de Ouagadougou

En marge de la 6ème Réunion du Partenariat de Ouagadougou, ouverte au Sheraton Grand Conakry le 12 décembre 2017 pour trois jours, les membres de la délégation mauritanienne, conduite par le Coordinateur du Programme national de santé de la reproduction (PNSR), M.Sidi Mohamed Ould Abdel Aziz se sont exprimés. Cette délégation est composée en plus du PNSR, des représentants des ministères de la Santé, des Affaires Sociales, de la Jeunesse et du Budget, en plus des membres de la Coalition des organisations de la société civile pour le repositionnement de la PF.

Dr.Sidi Mohamed Ould Abdel Aziz, Coordinateur du PNSR en Mauritanie

«Nous nous sentons isolés au sein du Partenariat, à cause du peu d’intérêt des investisseurs»

Dr.Sidi Mohamed Ould Abdel Aziz, Coordinateur du PNSR (Photo Aidara)

«La Mauritanie participe chaque année aux réunions du PO, mais malgré les efforts pris au plus haut niveau politique pour améliorer la PF, avec l’adoption d’une loi sur la SR et son décret d’application en finalisation, ainsi que la circulaire du ministre de la Santé demandant à toutes les structures de mettre en place les méthodes de la contraception, on sent que la Mauritanie est un peu isolée au sein du Partenariat de Ouagadougou. Il n’y a pas beaucoup de partenaires, ces derniers investissent très peu sur la PF en Mauritanie. On lance un appel solennel aux partenaires pour nous soutenir afin que l’autonomisation des femmes devienne un objectif essentiel. Nous avons été très surpris par l’expérience du Burkina Faso qui malgré ses moyens limités a atteint des objectifs très avancés dans le cadre de la lutte contre la mortalité maternelle et néonatale et dans celui de la PF. Nous rappelons que la Mauritanie est le seul parmi les 9 pays du Partenariat où les services de la planification familiale sont gratuits »

Imam Abdoulaye Sarr, membre du groupe des religieux de la société civile en Mauritanie

«Les objectifs du PO qui visent le bien-être de la femme, cadrent bien avec les enseignements de l’Islam»

Imam Sarr (Photo Aidara)

«Ce que j’ai remarqué au cours de cette 6ème réunion du PO, c’est qu’il y a de plus en plus d’engagement. Entre religieux, nous sommes convenus que toutes les religions révélées oeuvrent pour le bien-être de la personne humaine, en particulier de la femme. C’est dans ce cadre que nous accompagnons le partenariat de Ouagadougou et les religieux sont engagés selon ce qu’ils ont compris des textes pour valoriser la femme. Les religieux ne font que répéter ce que les textes sacrés ont soutenu, à savoir que Dieu qui a créé l’être humain, l’a fait pour assurer son bien-être. Et nous, on soutient cette thèse. Tout ce qui est conforme aux textes islamiques, nous le valorisons. Nous considérons que l’Islam est la religion qui a donné plus de droits aux femmes dans tous les domaines et ce, dès l’aube de son apparition».

Alioune Diop, président de la Coalition de la société civile pour le repositionnement de la PF en Mauritanie

«Pour booster la PF chez nous, il faudra passer par la santé communautaire de base »

Alioune Diop (Photo Aidara)

«J’ai remarqué au cours de cette rencontre de Conakry, que la phase d’accélération de la PF se met en route dans tous les pays du P.O. Nous avons remarqué que dans beaucoup de pays, il y a de notoires avancées pour le respect des engagements pris en juillet dernier à Londres. Beaucoup ont mis en place des lignes budgétaires pour l’achat des produits de la contraception. Toutes les parties prenantes se sont également engagées, d’où la diversité des acteurs présents aujourd’hui à Conakry. En Mauritanie, il y a une forte délégation de la société civile, du gouvernement représenté par le Coordinateur du PNSR, les religieux et les jeunes. Les départements ministériels sont aussi bien représentés ici, la Santé, les Affaires Sociales, la Jeunesse et le Budget. Pour dire le fort engagement de l’Etat mauritanien à faire du repositionnement de la PF une priorité comme levée du développement. Nous sommes à 18% de prévalence contraceptive, très loin de la révolution contraceptive des 60% requis, mais tout ce que nous avons vu ici, prouve que nous aussi, on peut y arriver. C’est heureux de noter la présence des leaders religieux, dans cette partie du monde où la donne religieuse est très forte. Je crois que la voie à suivre est celle de l’approche communautaire par le biais d’agents de santé communautaire bien formés ainsi que la délégation des tâches»

Zeynabou Taleb Moussa, de la Coalition de la société civile

«Nous étions en avance, mais aujourd’hui nous avons pris beaucoup de retard»

Zeynebou Taleb Moussa (Photo Aidara)

«Nous participons à cette réunion du PO à Conakry accompagnés d’une grande délégation mauritanienne constituée du gouvernement, de la société civile, en particulier les ONGs actives dans la santé sexuelle, les religieux et les jeunes. Par rapport à cette rencontre, nous sentons une certaine jalousie par rapport à des résultats importants réalisés par certains pays dans le cadre de leurs engagements. Beaucoup de pays, qui étaient derrière nous, nous ont dépassés et sont aujourd’hui très en avance. Ils sont en train de concrétiser leurs engagements à travers des plans d’action et stratégies bien réfléchies. Notre participation était très peu active à cause du retard que nous avons pris dans l’atteinte des objectifs de Londres. Je salue la présence du ministre de la santé guinéen et le ministre de la santé burkinabé, qui ont tous les deux fait des engagements forts au nom de leur pays. J’aurais souhaité que le ministre mauritanien de la Santé soit présent à cette rencontre, car personne parmi nous ne pouvait prendre d’engagement à sa place. Ce qui ne veut pas dire que la Mauritanie n’est pas engagée au plus haut sommet de l’Etat à atteindre les objectifs en matière de la PF sur la trame du président de la République qui avait engrangé la dynamique lors du Sommet de l’Union Africaine en janvier 2017 à Addis-Abeba. La réunion de Conakry n’est pas une petite affaire, et la présence du Ministre constituait une bonne opportunité pour montrer notre expérience tout en prouvant une fois de plus que le gouvernement mauritanien est fortement engagé dans l’autonomisation des femmes et la révolution contraceptive ».

Mlle Khoudiedji Camara, présidente des jeunes ambassadeurs pour la SR/PF de Mauritanie

«Il faut que les autorités valorisent davantage le rôle central de la jeunesse dans la problématique de la SFR/PF »

Diedi Camara (Photo Aidara)

«Nous sommes à la 6ème réunion du PO à Conakry sur le thème «autonomisation de la femme et révolution contraceptive. Un thème très important, car l’autonomisation de la femme lui garantit une plus grande autonomie et partant, un rôle plus actif dans le développement socioéconomique du pays. Parmi les leçons que nous avons  apprises lors de cette rencontre, les efforts à déployer pour rattraper notre retard par rapport aux engagements pays et quand je dis nous, je veux parler particulièrement des jeunes, car c’est la frange la plus concernée par les problématiques développées autour du dividende démographique et de la PF. En tant que jeunes ambassadeurs, membres de la coalition de la société civile pour la SR/PF, nous nous félicitons de l’implication grandissante des jeunes dans tout ce qui est en train de se faire dans le domaine, même s’il y a là aussi des efforts à faire de la part des départements concernés, notamment les ministères Jeunesse, Affaires Sociales, Santé, en particulier ».

Propos recueillis à Conakry par
Cheikh Aidara


Les Etats membres sur les bancs de la 6ème Réunion du Partenariat de Ouagadougou

Distribution de notes entre bons, moyens et mauvais élèves, à la 6ème réunion du Partenariat de Ouagadougou qui s’est ouverte mardi 12 décembre 2017 à l’hôtel Sheraton Grand Conakry, en République de Guinée. Une rencontre qui a regroupé le gotha de la santé en Afrique de l’Ouest et du Centre, mais aussi des partenaires techniques et financiers. La conférence s’est penchée sur le bilan contrasté des engagements pris par les Etat membres lors de la rencontre de Londres en juillet dernier par rapport à l’accélération de la planification familiale.

Table officielle (Photo Aidara)

La 6ème réunion du Partenariat de Ouagadougou a été ouverte mardi 12 décembre 2017 à Conakry, sous le thème «Autonomisation des femmes et révolution contraceptive » par le Premier ministre de Guinée, M.Mamady Youla. Au cours de son discours, le chef du gouvernement guinéen s’est réjoui du choix porté sur son pays pour abriter cette importante rencontre. Elle marque selon lui un tournant décisif pour atteindre l’objectif de garantir à tout citoyen guinéen l’accès aux produits contraceptifs. M.Youla s’est engagé, au nom du Président Alpha Condé, à faire de la planification familiale une réussite dans son pays.

Auparavant, le ministre guinéen de la Santé et de l’Hygiène Publique, M.Abdourahmane Diallo, a reconnu la mauvaise performance de son pays par rapport aux objectifs du Partenariat, soulignant toutefois «une amélioration significative avec la dernière enquête mixte de 2016 qui montre une tendance positive ». Pour lui, beaucoup d’efforts restent à faire pour améliorer le niveau des indicateurs, soulignant la forte mortalité maternelle et infanto-juvénile en Guinée, avec un indice synthétique de 6 enfants environ par femme.

Succédant aux ambassadeurs de France et d’Allemagne, le Directeur régional de l’UNFPA en Afrique de l’Ouest et du Centre, M.Mabingué NGom a déclaré « nous sommes réunis aujourd’hui à Conakry pour échanger sur les progrès que chacun des pays et organisations membres du PO ont fait durant ces 12 derniers mois mais également apprendre les uns des autres« . Selon lui, il n’y a pas d’autre moyen d’atteindre les conditions d’un développement durable que d’aller vers la capture du dividende démographique, soulignant que «pour ce faire, il nous faut investir dans la jeunesse». Et d’ajouter «puisque la planification familiale est reconnue comme un investissement essentiel pour la réalisation du dividende démographique, il s’agit également d’un investissement pour la paix, la sécurité et la stabilité».

Les Plénières
Les 400 invités du Partenariat de Ouagadougou ont par la suite suivi plusieurs communications, dont un focus sur «Résultats et perspectives des interventions de la PF en Guinée » présenté par Dr. Mamady Kourouma, Directeur de la Santé familiale et de la Nutrition, avec plusieurs sous thèmes,  «Interventions réussies pour augmenter l’accès aux service de la PF en Guinée», par Dr.Madina Rachid, «Utiliser les espaces des jeunes pour améliorer leur implication dans la PF » présenté par Fassouma Sanoh de la société civile et «Résultats de l’enquête CAP et autonomisation des femmes » par Dr.Ibrahima Barry de la coopération allemande.

Vue partielle de la salle (Photo Aidara)

Au cours de cette première journée, les participants ont également suivi une session sur «Accélération vers 2020 », avec l’intervention de Mme Fatoumata Sy, Directrice générale de l’Unité de Coordination du Partenariat de Ouagadougou, qui a salué «la volonté du président Alpha Condé de hisser la question du dividende démographique parmi les priorités de l’Union Africaine ». Elle a aussi déclaré que «la capture du dividende démographique repose non seulement sur l’éducation et l’emploi des jeunes, y compris les jeunes filles, mais aussi et surtout sur la planification familiale».

Mais la réalité des engagements pour le repositionnement et l’accélération de la PF dans les États membres du Partenariat de Ouagadougou reste alarmante. Selon Mme Fatoumata Sy, des défis importants plombent encore les efforts au niveau de l’Afrique de l’Ouest, citant «un fort taux de mortalité maternelle, des services statistiques de fécondité les plus élevés au monde, des plus grands besoins contraceptifs non satisfaits dans le monde, des plus forts taux de mariage d’enfants et de surcroît, du statut  social et économique de la femme qui reste bas et le financement des programmes  de santé et de la reproduction toujours fortement dépendants de l’aide extérieure ».

Parmi les bons élèves du Partenariat de Ouagadougou, trois pays se sont détachés du lot, notamment le Burkina Faso, le Bénin et la Côte d’Ivoire, cités comme les bons élèves. La Mauritanie et le Togo font partie des élèves moyens tandis que le Sénégal, la Guinée, le Niger, le Tchad et le Mali sont dans le rouge.

Cheikh Aidara
Conakry


Droit de réponse de Biram Dah ABEID au magazine « Jeune Afrique »

Le 2 décembre, devant la presse, dans la ville de Tichit aux confins du désert, le Président mauritanien s’en prenait aux activistes de la lutte contre l’esclavage et ses séquelles, non sans désigner ma modeste personne ; d’après lui, nous serions des affabulateurs, en mal de salaire, donc mus par la seule motivation du ventre.

Birame Dah Abeid

Plutôt que de prolonger une vieille polémique avec les pouvoirs mauritaniens et leur inclination au déni, je préfère retenir, du propos de Mohamed Ould Abdel Aziz, une phrase révélatrice de la fidélité de l’homme aux intérêts historiques de son groupe, le monde des maîtres: « Nous agissons avec l’esclavage comme pour le vol ou le terrorisme : nous avons des textes pour combattre ces délits et ces crimes, mais ils continuent à être commis et nous améliorons nos lois en conséquence chaque fois que nous le pouvons ».Faut-il rappeler, à l’auteur, qu’en vertu de la législation de notre pays, l’esclavage relève d’une catégorie imprescriptible, le « crime contre l’humanité ». Ainsi, cette tentative de relativisation comparée, marque-t-elle le désir de banaliser l’héritage de siècles d’oppression par une ethnie, sous couvert de religion. Au demeurant, sur la récente vente de personnes dans une pétaudière du Maghreb, Ould Abdel Aziz, recourt, à l’inversion habituelle de la culpabilité : « Il n’y a plus d’État en Libye et c’est la faute de l’Occident, qui a bombardé le pays et contribué à l’assassinat de son président». Bon, admettons un instant d’accorder crédit aux raccourcis commodes, à quel bouc-émissaire devrait-on imputer la persistance de l’esclavage chez nous ? Au complot sioniste ? A la Colonisation française ? Aux Francs-maçons, aux illuminati, à l’éternel impérialisme ?

Non, hélas, les noirs mauritaniens, depuis des temps immémoriaux, naissaient et mourraient, sans rien connaitre de la vie, que la condition de serviteur docile, vendable, légué et corvéable à merci. Au moins, le Président mauritanien ne congédie cet aspect incontesté de notre mémoire et je lui en reconnais le mérite.

Au détour d’une autre citation, le Chef de l’Etat mauritanien, identifie le sort des descendants d’esclaves, à celui des Afro-américains, non sans les qualifier  de « minorité ». Le choix du terme justifie le reste du propos. Là, encore, Mohamed Ould Abdel Aziz lance un message aux siens, la communauté arabo-berbère où grandissent, pourtant, des attitudes de solidarité admirable avec les victimes du racialiste et de l’exclusion: il leur adresse un avertissement, autant qu’il les incite à l’esprit de corps, autour de lui. La légèreté de l’assertion trouve, dans l’animation de nos rues, un démenti sans appel. L’observateur, même distrait, sait combien la démographie de la Mauritanie consacre une majorité – exponentielle – de Noirs dont leur concours à l’exercice du pouvoir, de l’économie globale, de la banque, de la fonction publique, du commandement des forces armées et de sécurité et du magistère religieux n’atteint 5%. Peu importe le refus, par les juges, de traiter les dizaines de cas en instance d’instruction ou d’anéantir les plaintes d’un revers de non-lieu, les fils et petits –fils d’esclaves endurent des discriminations et une inégalité que seule leur naissance explique. Cette différence de destin justifie notre acharnement à la lutte.

Au lieu de s’emmurer dans le repli défensif, devant une cause fatalement désignée à la victoire, Mohamed Ould Abdel Aziz devrait nous tendre la main, pour reconstruire, ensemble, la Mauritanie trait d’union des deux Afriques, sur une base saine. L’extrémisme religieux, favorisé par ses propres atermoiements et son laxisme, menace de transformer le pays en base arrière du Jihad sahélo-saharien. Bientôt au terme de deux mandats d’une gouvernance de l’imprudence et du risque, notre Président, fourbu a besoin de consensus, point de rallonger la liste déjà profuse de ses ennemis.

Paris le 05/12/2017

Biram Dah ABEID

Président de l’Initiative de Résurgence du Mouvement Abolitionniste (IRA – Mauritanie)


Naissance du réseau des journalistes africains en santé et population

Des journalistes africains, spécialistes de l’information et de la communication, ont créé mardi 5 décembre 2017 à Abidjan, un réseau Santé, Population et Développement, pour accompagner la Feuille de route de l’Union Africaine, le Projet SWEDD «Autonomisation des Femmes et Dividende Démographie au Sahel »  et le Fonds des Nations Pour la Population (UNFPA) dans leurs efforts pour la capture de la fenêtre des opportunités à travers le dividende démographique en Afrique.

Mabingué NGom entouré d’Alassane Cissé (à gauche) et Marcelline GNEPROUST journaliste ivoirienne (Crédit Aidara)

La cérémonie d’ouverture de l’Assemblée générale constitutive a été présidée par le Directeur régional de l’UNFPA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, Mabingué NGom, en présence de trois représentantes résidentes de l’UNFPA, au Mali, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso.  Etait également présente, une forte délégation de cadres du Bureau régional de l’UNFPA à Dakar, notamment Dr. Justin Koffi, Coordonnateur régional du Projet SWEDD, Céline Adotevi, spécialiste en communication, Siaka Traoré du bureau du Burkina Faso, Mme Kayissan Agbodjan, assistante au Programme VIH/SRAJ, Mme Ghislaine Ametchié, Chargé de projets à GBCHealth, Mme Hind Jalal,spécialiste Jeune et Genre. Les jeunes leaders africains d’Afryan, étaient également fortement présents derrière leur Directeur exécutif, Pape Arona Traoré.

Après avoir approuvé le Plan d’action et les textes constitutifs, les journalistes présents ont élu un bureau Exécutif pour un mandat de 3 ans renouvelables une fois. M.Alassane Cissé, journaliste à la Radio-télévision du Sénégal (RTS) et président de l’Association sénégalaise des journalistes en Santé et Population, a été porté à la tête de la nouvelle structure, qui vient s’ajouter au réseau des Parlementaires et celui des jeunes.

Voilà la composition du bureau :

Bureau Exécutif du Réseau des Journalistes Africains en Santé, Population et Développement

Président : Alassane Cissé (Sénégal- RTS)

Vice-président chargé du partenariat : Marceine Ghenproust (Côte D’Ivoire Fraternité Matin

Vice-président chargé de la formation (Ghana)

Secrétaire Général : Alassane Karama (Sidwaya-Burkina Faso)

Secrétaire Générale Adjoint : (Bénin)

Trésorière générale : Khadiydiatou Sanogo (Mali)

Adjoint Trésorier : (Niger)

Secrétaire Chargé des Relations Extérieures, de l’Information et de la Communication : Zié Coulibaly (Côte d’Ivoire)

Adjoint du Secrétaire chargé des Relations Extérieures : M’Ma Camara (Côte d’Ivoire)

Secrétaire chargé de l’Organisation et de la Mobilisation : Dieh Moctar Cheikh Saad Bouh dit Cheikh Aïdara (Mauritanie)

Adjoint du Secrétaire chargé de l’Organisation : Idrissa Birba (Burkina Faso)

Secrétaire chargé du Suivi-Evaluation : (Tchad)

Adjoint du Secrétaire chargé du Suivi-Evaluation : (Congo)

Deux postes de Commissaires aux comptes (Cameroun et Cap-Vert)

Secrétariat Permanent : Sénégal.

Cheikh Aidara
Abidjan


ICASA 2017 : «les malades du Sida sont au Sud et les médicaments au Nord»

C’est un Alassane Ouattara ému par le témoignage de la jeune Assita Ouédraogo, 20 ans, atteinte du VIH à la naissance, qui a ouvert la 19ème session de la Conférence internationale sur le Sida et les infections sexuellement transmissibles en Afrique (ICASA 2017). En ouvrant les travaux de cette rencontre scientifique internationale, lundi 4 décembre 2017 à l’Hôtel Sofitel Ivoire d’Abidjan, le président ivoirien a déclaré que «l’Afrique doit être actrice et non simple consommatrice dans le domaine de la recherche sur le VIH/Sida». En écho, la célèbre vérité de son prédécesseur, Henri Konan Bédié qui disait il y a 20 ans que «les malades du Sida sont au Sud et les médicaments au Nord»

Le président Ouattara et son épouse entourant la jeune Assita Ouedraogo (crédit : abidjan.net)

«Je m’appelle Assita Ouédraogo, 20 ans. J’ai eu le VIH/Sida à la naissance et j’ai perdu ma mère ». Ce témoignage émouvant a été l’élément phare qui a marqué la 19ème édition de l’ICASA 2017, ouverte le 4 décembre  à l’hôtel Sofitel Ivoire d’Abidjan. La cérémonie d’ouverture a été présidée par le Chef de l’Etat ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, en présence de son prédécesseur Henri Konan Bédié, de son Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, de la ministre ghanéenne de l’Aviation qui représentait le président du Ghana, Nana Akufo-Addo, de plusieurs hautes personnalités ivoiriennes et africaines,  ainsi que des représentants des organismes internationaux dont le Directeur exécutif d’ONUSIDA, Michel Sidibé.

Cérémonie haut en couleur, protocolaire jusqu’à l’excès, colorée et bondée de monde, et que l’immense salle de conférence de l’hôtel Ivoire a eu du mal à contenir. Arrivé ensemble avec son prédécesseur Henri Konan Bédié, Alassane Ouattara devait d’abord lancer un message de soutien et de respect à tous les malades du VIH/Sida en Afrique, avec un hommage appuyé à la jeune Assita Ouédraogo dont le témoignage plein de courage et d’espoir avait secoué l’assistance, qui lui a réservé un standing ovation à l’issue de sa brillante intervention.

Acteur actif dans la recherche sur le VIH/Sida
«Après le 5ème Sommet Union Européenne-Afrique qu’elle vient d’abriter du 29 au 30 novembre 2017 avec la présence de 84 nations, voilà que la Côte d’Ivoire est de nouveau honorée en abritant la 19ème édition de l’ICASA ». C’est en ces termes que le président ivoirien a entamé son discours, soulignant que depuis le début de la pandémie du Sida en Afrique, il y a trente ans, 76 millions de personnes ont été infectées et 35 millions sont mortes du sida. Selon lui, cette rencontre scientifique internationale de haut niveau, saura sans doute apporter des solutions nouvelles aux défis qui se posent à l’Afrique sur ce plan, soulignant les progrès accomplis par la Côte d’Ivoire, 4ème pays au monde à avoir souscrit selon lui, aux engagements de l’ONUSIDA. «Cette pandémie constitue une véritable problématique d’actualité, en raison de son impact social et économique très négatif » devait-il souligner, indiquant que les défis posés nécessitent que les décideurs, les scientifiques et les acteurs du secteur privé, associent leurs intelligences et leurs efforts pour apporter les mesures adéquates.

Photo de famille (Crédit ; abidjan.net)

Selon Ouattara, «le défi de l’heure est lié au phénomène migratoire, la promiscuité des voyages et les abus sexuels des migrants » ajoutant que les efforts doivent se concentrer sur la mobilisation des ressources, notamment l’implication plus accrue du secteur privé dans la prévention et le traitement. Il a salué la solidarité internationale ainsi que le rôle joué par la société civile africaine dans l’accompagnement et la prise en charge des malades. Il a toutefois souhaité que «l’Afrique soit actrice et non plus simple consommatrice des résultats des recherches sur le VIH/Sida».

Une loi contre la stigmatisation est en vigueur en Côte d’Ivoire

Auparavant, la ministre ivoirienne de la Santé et de l’Hygiène Publique, Dr.Raymonde Goudou-Coffie, qui assure en même la Vice-présidence de l’ICASA 2017, devait rendre hommage à la Première Dame de Côte d’Ivoire, Mme Dominque Ouattara, en sa qualité d’ambassadrice de bonne volonté d’ONUSIDA pour la lutte contre le sida et marraine de la conférence, ainsi que le président Henri Konan Bédié, pour leurs engagements en faveur de la lutte contre cette maladie. Et de rappeler que du temps où il dirigeait le pays, Bédié avait rappelé, lors de son discours de l’ICASA en 1997, que «les malades sont au Sud et les médicaments au Nord » pour inciter les Africains à se lancer dans la recherche et la fabrication des médicaments pour soulager leurs malades.  Selon elle, des progrès significatifs ont été enregistrés dans le domaine du diagnostic, et que depuis 2010, le traitement par antirétroviraux a été beaucoup allégé. «Le taux de prévalence en Côte d’Ivoire est de 2,7 % » indiquera-t-elle, soulignant qu’une loi de protection et de répression contre la stigmatisation des porteurs du VIH/Sida a été également promulguée.

«L’Afrique a fait des efforts, mais les défis restent »
Le président d’ICASA, Dr.Ihad Ahmed Abdelrahmane, devait à son tour prononcer un bref discours dans lequel il rappelait que lors de l’AWARDS accordé par l’ONU à la Société africaine anti-SIDA qu’il préside pour ses efforts en faveur de la lutte contre le VIH/Sida, l’ancien Secrétaire général Kofi Annan avait déclaré que «les résultats, c’est bon, mais il faut redoubler les efforts ». Selon lui, l’ICASA est une plateforme pour renforcer les financements nationaux en faveur de la lutte contre la pandémie et les maladies pernicieuses comme l’hépatite.

Photo de la salle (Crédit abidjan.net)

Le Directeur Exécutif d’ONUSIDA, Michèle Sidibé, abondera dans le même sens, lorsqu’il souligna que le monde connaît de profondes mutations, citant la montée du terrorisme, l’éclatement de plusieurs nations, la montée du nationalisme, les changements climatiques, et l’extraordinaire révolution démographique, mais aussi la baisse de l’Aide publique au développement. «Autant de facteurs qui doivent nous amener à revoir nos stratégies » dira-t-il. Il a rappelé à ce titre les paroles de l’ancien président Henri Konan Bédié, lorsqu’il disait que «les malades sont au Sud mais les médicaments au Nord » ainsi que les paroles de l’ex-président français Jacques Chirac, lors de la 10ème édition de l’ICASA, qui soulignait que «le combat contre le Sida doit être mené sur plusieurs fronts  et toute l’histoire de la lutte contre cette maladie est une histoire d’innovation».

Pour Michèle Sidibé, l’Afrique a accompli d’énormes progrès depuis lors, soulignant la baisse du nombre de personnes vivant avec le VIH-Sida, qui est passé à 14 millions de personnes, dont 6 millions sous traitement antirétroviraux et une chute de 45% des infections, dont 65% de réduction des enfants nés avec le Sida. «Nous ne devons pas relâcher notre engagement et dormis sur nos lauriers, même si le Sida est aujourd’hui encerclé partout sur le continent » soulignera Michèle Sidibé.

Selon lui, «une fille sur trois en Afrique est mariée  avant l’âge de 18 ans » et que ces filles mariées à cet âge précoce sont plus exposées au VIH/Sida que celles qui ne le sont pas. «Les hommes ne contrôlent pas leur statut et se font soigner trop tard », déplora-t-il, ajoutant que ce sont les «hommes âgés qui épousent des jeunes filles qui leur transmettent la maladie et ces dernières une fois libre, la transmettent aux hommes plus jeunes». Et de marteler «évitons les solutions à deux vitesses, car seuls 42% des hommes vivant avec le VIH/Sida connaissent leur statut et seuls 35% ont accès aux traitements ».

La cérémonie a été animée par une troupe folklorique locale et s’est achevée par une photo de famille.

Cheikh Aîdara
Abidjan


Les femmes de R’Kiz, entre la dureté des labeurs et la douleur de l’enfantement

Entre Nouakchott et Rosso, vers le Fleuve Sénégal, se trouve Tiguint. De là, une bifurcation sur 100 kilomètres de route aux trois quart bitumés, mène vers R’Kiz, le département le plus excentré du Trarza. Les habitants y vivent un été insupportable, un climat à peine tempéré par la fraîcheur de décembre et janvier. L’agriculture y est la principale activité au milieu d’une pauvreté endémique. Les femmes, regroupées en coopératives, vivent de maraîchage.

La planification connaît une bonne pénétration en milieu rural (Crédit Aidara)

Dans ces contrées perdues entre les dunes du Draa et les gerçures de la Chemama ainsi que ses innombrables cours d’eau, dont le célèbre Lac R’Kiz, prolifèrent des villages d’agriculteurs, descendants d’esclaves vivant les pires séquelles du fléau. La propriété foncière, celle des terres cultivables, y constitue le plus épineux dossier, là où les séquelles de l’esclavage sont prégnantes et la compromission des administrations locales, flagrante.

Un contrôle des naissances dicté par la vie

«Nous avons perdu le goût de l’enfantement » lance Mabrouka Mint Imijine, l’échine courbée sous 49° de chaleur, comme un défi. Ses mains rugueuses ont du mal à attraper la manche chaude de la houe avec laquelle elle tente péniblement de retourner la terre durcie par des années de sécheresse. Une dizaine d’autres silhouettes aux habits en loque s’échinent aux alentours, dans un immense champ à labourer par la main. Nous sommes à Naçra, commune de Tekane, un hameau de 600 familles, aux abords du lac du même nom qui tire sa source de Sekan, aux confins du département.

Mabrouka n’a que 18 ans, mais on lui en donnerait le triple, tellement son corps a été émacié par des années de labeur et la douleur des enfantements.  «J’ai  4 enfants, et je n’en veux plus» ajoute-t-elle, debout sur ses 1,80 m. Mariée à l’âge de 13 ans, elle a aligné les grossesses comme une pondeuse. «Nous retournons le soir fourbues par le travail et dormons pratiquement debout». Pour elle, et pour nombre de ses compagnes, les méthodes contraceptives qu’elles suivent auprès du centre de santé de R’Kiz, sont une aubaine.

«Nous n’avons même pas un poste de santé, et quand une femme va accoucher, on l’amène par charrette vers le centre le plus proche, le village Douze-Douze à 15 kilomètres de là. En cas de complication, on l’amène à R’Kiz.  Les femmes qui saignent meurent souvent en cours de route» ajoute-t-elle

«Des équipes de santé passent souvent pour parler d’espacement des naissances », reconnaît Zeynabou, la vingtaine. «Beaucoup utilisent ici la pilule » jette-t-elle en boutade, provoquant l’hilarité générale. «Mais ces pullules n’ont provoqué que des saignements et des avortements, moi je ne m’y aventurerais pas. D’ailleurs, Allah garantit la nourriture à tout être » ajoute-t-elle, le corps disparaissant sous une bourka noir, celle des islamistes nourris aux idées radicales, le bébé sous la hanche.

Beaucoup ne sont pas de son avis. Pour Aïcha Mint Mandaw, 2 garçons et 1 fille, «moi j’ai accepté de rester à 3 ans sans enfant. On m’a placé un objet sous le coude et je suis tranquille ». Mawa Mint Jibril elle, s’approche de la trentaine. Mariée depuis quinze ans, elle n’a pas d’enfants.

L’autonomisation agricole

«Nous n’avons que ces terres comme sources de revenus, mais nous en tirons rarement profit à cause des animaux errants qui viennent tout dévorer la nuit, si ce ne sont les eaux que l’Etat déverse sur nos cultures » se plaint la doyenne, Mouya Mint Imijine, à peine 35 ans, presqu’une grand-mère. Les femmes en veulent aux services qui contrôlent les vannes du cours Naçra. «Jamais d’appui de la part de l’Etat, ni en semences ou engrais. Si au moins, on nous avait donné un engin pour défricher la terre » soupire-t-elle.

Bien que ne détenant pas la propriété des terres, celle-ci étant l’apanage des hommes, les femmes de Naçra comme toutes les femmes rurales, sont les principales agricultrices du village. Avec les maigres revenus qu’elles tirent de leur travail, elles participent en grande partie aux dépenses courantes de leurs familles, nourriture, habillement et scolarité des enfants.

«Et les hommes, que font-ils ? » Une question qui provoque une hilarité générale. «Ils ne font rien, sinon nous attendre au pas du crépuscule» glousse Marième Mint Ijiwene. «Nous finirons par nous révolter et refuser de rentrer » s’esclaffe-t-elle, déclenchant des fous rires.

Partout ailleurs, dans ces vastes étendues du département de R’Kiz, que cela soit à Tachtaya, à Adala, à Douze-Douze, à Bougamoun, Mou Sleymane, Lemhariya, Awleig, Nkhayla, pour ne citer que ces villages des communes de R’Kiz, de Tekane ou de Lexeiba, les femmes sont regroupées en coopératives maraîchères ou cultivent le riz. Le dénuement est partout le même, les complaintes aussi. A côté des ennemis de la culture qui détruisent les récoltes d’une saison, l’action prédatrice des services publics régionaux et départementaux est également citée comme la principale cause qui freine le développement socioéconomique au niveau local.

Mais la révolution sociale est en route, car l’espacement des naissances, jusque-là confrontées aux pesanteurs socioreligieuses, fait des progrès, selon Khady Mint Mohamed, sage-femme, responsable du Service SR/PF au Centre de santé de R’Kiz. Un tableau des utilisatrices de la Planification Familiale au niveau départemental renseigne sur l’engouement de plus en plus fort des femmes rurales pour la contraception (Voir Tableau).

R’KIZ : Plan de distribution des produits contraceptifs / Janvier-Octobre 2017

 Pullule NouvellePullule AncienneInjection NouvelleInjection AncienneImplanon
Janvier0703110900
Février0405111801
Mars0506062102
Avril0904051003
Mai0911111109
Juin0808131405
Juillet0207041903
Aout1819191108
Septembre3023351206
Octobre1708251707
Total1099514114244

Source : Service Planification Familiale Centre de Santé de R’Kiz (le 3 Novembre 2017)
N.B : seuls 02 condoms ont été distribués

Cheikh Aidara

Enquête réalisée dans le cadre du Projet «Liberté, Droits et Justice : combattre l’esclavage par ascendance en Mauritanie » exécuté par SOS Esclaves sur financement du Département d’Etat des Etats-Unis


Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d’une médaille de Spahi

Le nouveau drapeau mauritanien se serait en fin de compte inspiré de la médaille du Spahis. Marième Mint Derwich de commenter : « de l’art d’un plantage gouvernemental jouissif…. Crier partout contre la colonisation française, cris qui justifient officiellement ces horreurs de bandes rouges sur notre drapeau, et, en fin de compte, « commémorer » sans le savoir cette même colonisation… À la bêtise ainsi poussée, total respect… Nous voilà donc peuple de spahis….Amateurisme, amateurisme…hhhhhh D’où la nécessité de laisser l’histoire aux historiens et non pas aux idéologues… »

La médaille du Burnous

 

Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d'une médaille de Spahis
Le Burnous est une association créée en 1895 dans le but de favoriser l’entraide et la fraternité entre les anciens militaires ayant servi en tant que Spahis, Goumiers, Sahariens, Méharistes et Supplétifs. Encore active aujourd’hui cette association, en plus de sa mission première, perpétue désormais auprès des jeunes générations le souvenir de ceux qui ont porté le burnous et la chéchia depuis 1831.

Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d'une médaille de Spahis

Afin de récompenser ses membres méritants l’association édite dès ses débuts une médaille. Il existe plusieurs types qui ont été décernés jusqu’à aujourd’hui. Nous vous présentons les trois premiers types.

1er type: Plaquette de bronze de 50 mm de large pour 73 mm de hauteur, gravée au nom du membre auquel elle est attribuée. Poinçon BRONZE sur la tranche.
A l’avers:
Marianne en cuirasse portant une cape,
arborant en chef un bonnet phrygien orné de feuilles de chênes,
inscription République Française,
signature du graveur S. E. Vernier.
Au revers:
Attribution au nom et grade du récipiendaire: « Le Burnous au… »,
palme de laurier.
Ce modèle est rare puisqu’il est indiqué comme inconnu dans le numéro 92 de la revue Symboles & Traditions. Il daterait des premières années de l’association.
2e type: Médaille circulaire en argent de 31 mm de diamètre et de 44 mm de hauteur avec la bélière.
A l’avers:
Signature F. Rasumny,
casque coloniale à fond peu élevé,
cheveux de l’effigie personnalisant la République très épars sur l’épaule droite,
inscription Honneur et Patrie.
Au revers:
Signature du graveur S. Duseaux,
cartouche rectangulaire ornementé au centre et légèrement décalé vers le bas,
inscription « Fondée le 26 juin 1899 » sur deux lignes placées au-dessus du cartouche et un peu décalé vers la droite,
inscription en cercle sur le pourtour « Association Amicale et Philanthropique des Anciens Spahis Le Burnous ».
Ruban de 37 mm de largeur vert, avec une bande rouge de 3mm de largeur placée à 1 mm de chaque bord. L’insigne agrafé sur le ruban comporte une banderole émaillée bleu, blanc et rouge dans laquelle est inscrit de gauche à droite: « 26.6 Le Burnous 1899 ».
Que cela soit sur l’agrafe ou sur la médaille, il y a une erreur au niveau de la date réelle de la fondation de la société.
Ce type daterait des années 1900 puisqu’il est mentionné dans l’ouvrage du lieutenant Sculfort édité en 1912.
3e type: Médaille similaire au modèle précédent. Elle se distingue de celui-ci par:
A l’avers:
Absence de signature du graveur,
un casque colonial à fond plus haut,
cheveux de l’effigie plus rassemblés dans le cou,
inscription « Honneur et Patrie »
Au revers:
Absence de signature du graveur,
cartouche rectangulaire très décalé vers la gauche,
inscription ramassée en petites lettres sur quatre lignes et nettement décalée vers le haut à droite
On note une nette différence dans la bélière qui est liée d’un ruban vers le bas remplaçant la boule existant dans le deuxième type. Ruban de 37 mm de largeur également mais avec une bande rouge de 4,5 mm de largeur placé sur chaque bord. L’insigne agrafé est davantage formé en U et la banderole tricolore et nettement plus large.
La date de la création de ce 3e type n’est pas connue mais d’après Symboles & Traditions elle se situe vraisemblablement dans les années ayant suivies la fin de la Première Guerre Mondiale.
Il existe un 4e type créée en 1954 mais que nous ne possédons pas encore. Celui-ci fera l’objet d’une prochaine mise à jour.

Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d'une médaille de Spahis

Si vous souhaitez voir ces médailles en grand format, cliquez dessus.

 

Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d'une médaille de Spahis

En mémoire d’Ali Bellout (1893-1957). Ancien spahi demeurant à Philippeville, il portait en permanence sur sa veste la médaille du Burnous, il circulait dans une rue de sa cité le 6 septembre 1957 lorsqu’il a été assassiné par le FLN.

source spahis.fr 

 

Tout ça pour ça : le nouveau drapeau de résistant est une copie d'une médaille de Spahis
Tiré de la page de Chezvlane : https://www.chezvlane.com/Tout-ca-pour-ca-le-nouveau-drapeau-de-resistant-est-une-copie-d-une-medaille-de-Spahis_a4845.html


A Conakry, les pays du PO débattront de l’autonomisation des femmes et de la révolution contraceptive

Conakry abritera du 12 au 14 décembre 2017 la 6ème réunion du Partenariat de Ouagadougou (PO) sur le thème «l’autonomisation des femmes et la révolution contraceptive ». A ce titre, un communiqué de presse dont la teneur suit, a été publié et diffusé à large échelle.

Né de la volonté commune de 9 pays de l’Afrique de l’Ouest Francophone et de différents partenaires techniques et financiers, le Partenariat a pour but d’accélérer les progrès dans l’utilisation des services de Planification Familiale (PF).

Depuis sa création, des progrès ont été notés dans l’accès aux moyens de contraception. Entre 2012 et 2016, le nombre de femmes sous méthodes contraceptives dans les pays du Partenariat est passé de 3.000.000 à 4.720.000, soit une augmentation de près de deux millions de femmes additionnelles. En 2016, le Partenariat de Ouagadougou est entré dans sa phase d’accélération qui prévoit d’atteindre 2.2M d’utilisatrices additionnelles d’ici 2020.

Afin d’assurer le suivi de la mise en oeuvre des plans d’action, les 9 pays membres du Partenariat de Ouagadougou ainsi que leurs partenaires se rencontrent chaque année depuis 2012 pour échanger sur leurs intérêts communs et partager les résultats et contraintes rencontrés.

A ce jour, le Partenariat a tenu cinq réunions annuelles. Chacune de ces réunions a marqué un tournant décisif pour la promotion de la Planification Familiale en Afrique de l’Ouest Francophone.

La 5ème Réunion Annuelle du Partenariat de Ouagadougou qui a eu lieu à Abidjan du 12 au 14 décembre 2016 a été une occasion de faire un état des lieux du démarrage de la mise en oeuvre de la phase d’accélération conformément aux engagements pris en décembre 2015 à Dakar et d’établir les bases des prochaines actions pour une meilleure accessibilité aux services de la planification familiale. Le thème retenu était : « Promouvoir la contraception c’est garantir un meilleur avenir des jeunes ». Au cours de cette même année on recensait 4.720.000 de femmes utilisatrices de méthodes de contraception moderne dans les 9 pays francophones de l’Afrique de l’Ouest. Ceci représente une croissance de 1.306.000 d’utilisatrices additionnelles de méthodes modernes depuis 2011.

Cette année, Conakry abritera du 12 au 14 décembre, la 6ème réunion annuelle du Partenariat de Ouagadougou. Le thème fédérateur retenu sur une base participative est : Autonomisation de la Femme et la Révolution Contraceptive.

Ce thème central présente plusieurs enjeux importants pour le PO. Tout d’abord, celui de l’amélioration du statut de la femme et par ricochet sa santé, car la PF contribue de 30% à la réduction de la mortalité maternelle. Ensuite, celui de la liberté de choix, car le développement est un processus d’expansion des libertés qui doit profiter à tous, hommes et femmes (Sen,2009). Et enfin, celui économique qui reconnaît que l’autonomisation de la femme est un atout pour le développement économique.

Environ 350 personnes participeront à cette réunion parmi lesquelles des délégations des pays du PO constituées des représentants des gouvernements, des jeunes, des religieux, des journalistes et des OSCs, des représentants des bailleurs de fonds, institutions régionales, des partenaires techniques, des parlementaires et maires, et des acteurs du secteur privé.

Cette 6ème réunion annuelle sera à nouveau l’occasion pour ces divers participants, membres du PO de faire un bilan sur les progrès réalisés durant l’année 2017, de répondre aux questionnements soulevés l’an dernier à Abidjan, de discuter des défis communs comme l’effectivité du partenariat et de la coordination au niveau national et régional, les échanges entre pays, la mise en oeuvre des initiatives à hauts impacts visant à soutenir les plans d’action nationaux, et de s’accorder sur les perspectives de l’année 2018 afin de consolider les acquis du PO et améliorer la tendance progressive vers l’atteinte de l’objectif de 2020.

A propos du Partenariat de Ouagadougou

Le Partenariat de Ouagadougou a été lancé en février 2011, lors de la Conférence régionale sur la Population, le Développement et la Planification Familiale : l’urgence d’agir, qui s’était tenue dans la capitale du Burkina Faso. Il mise sur l’engagement des gouvernements, une meilleure coordination entre les bailleurs de fonds pour optimiser leurs soutiens aux pays, une accélération de la mise en oeuvre des interventions à haut impact et également sur une collaboration et coopération aux plans national et régional pour remédier au taux élevé des besoins non satisfaits en matière de planification familiale. Le Partenariat de Ouagadougou compte neuf pays membres : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Togo.

Contact Presse

Marie Ba, Chargée du Plaidoyer et des Relations Externes

Tel: (221) 33 869 70 29

Email: mba@intrahealth.org


Visa for Music, un rush sur les musiques du monde au cœur de Rabat

Pendant quatre jours, du 22 au 25 novembre 2017, Rabat a vibré au son des musiques d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Europe, grâce au festival Visa For Music dont la 4ème édition qui vient de s’achever a drainé des centaines d’acteurs culturels venus de 85 pays qui ont répondu cette année à l’appel de l’équipe de Brahim Mezned, fondateur du festival. Concerts, conférences et expositions ont jalonné cette édition qui a plongé la capitale marocaine dans un continuum, avec des journées attachées aux nuits.

Lors d’un concert au Théâtre Mohamed V -Crédit photo Aidara

Artistes, producteurs, managers et groupes se bousculent désormais aux portes de Visa For Music et pour participer à l’un des plus grand rendez-vous musicaux du continent africain, plus d’un millier de candidatures. De quoi donner du fil à retorde au jury qui a dû jouer de toute la rigueur de ses membres pour choisir cette année, une quarantaine de groupes du Maghreb, d’Afrique, du Moyen-Orient et du reste du monde. Pour le président-fondateur de Visa For Music, Brahim Mezned, «le marché annuel des musiques du monde qu’est Visa For Music devient un rendez-vous important des professionnels de la musique ». Grâce à ce festival, selon lui, Rabat s’impose comme la capitale africaine des arts et de la culture.

Si le splendide Théâtre Mohamed V a abrité le speed meeting, avec ces dizaines d’exposants, mais aussi des concerts sur son esplanade et dans son immense salle des spectacles d’une capacité de dix milles places, d’autres lieux ont servi de lieux pour les multiples évènements qui ont marqué Visa For Music, notamment, l’Institut Français de Rabat, la Villa des Arts, l’Institut Cervantes, le Club café et cinéma «La Renaissance » et enfin le Hiba Lab.

Avant-scènes

En avant-scènes du festival, un carnaval parade animé par un groupe marocain et un autre des Caraïbes a ouvert le show du festival, le 22 novembre, suivi d’une conférence inaugurale organisée à l’hôtel Terminus où logeaient la plupart des journalistes accrédités. Younes Boumehdi, président de la Fondation Hiba, parrain de Visa For Music, est revenu sur l’importance du festival, véritable facteur d’échanges et de rencontre entre musiciens, a-t-il déclaré en substance. Pour sa part, Brahim Mezned a mis l’accent sur la richesse de la programmation et la forte présence de la communauté africaine.

Groupe de batteurs marocains (Crédit photo Aidara)

Autre facette de l’avant-scène, les hommages rendus à des figures des industries créatives, notamment Mamou Daffé, président du Festival sur le Niger et du réseau panafricain Arterial Network, Vincent Ahehehinnou, membre fondateur et porte-parole de l’orchestre  Poly-Rythmo, Khadija Badaoui, artiste vétéran et figure contemporaine de l’art du Mersaoui, et enfin, Tabu Osusa William, figure emblématique de la musique en Afrique de l’Est.

Showcases
Parmi les présentations musicales ou showcases qui ont marqué la 4ème édition du festival Visa For Music, le groupe «3MA », un trio formé par le Marocain Driss Maloumi, le Malien Ballaké Sissoko et le Malgache Rajery dont les spectacles au son de la kora ont remué les âmes. Le festival a également produit une voix féminine exceptionnelle, Marema Fall, jeune artiste et nouveau talent de la musique sénégalaise. Le Maroc a surtout fait connaître ses surdoués, à l’image de Fayçal Azizi, comédien, auteur-compositeur, interprète et animateur radio, originaire de Tetouan, le Dj Khalil Betamallem, le duo Camil Kanounni et Mamoun Iraqui Houssaini du groupe «MAcAM » de Fès, le rappeur Rbati Younes Taleb, entre autres.

Un des nombreux concerts du festival (Crédit photo Aidara)

Le monde arabe était aussi bien présent à travers  «YUMA », le duo tunisien, Sabrine Jenhani et Ramy Zohlemi, le compositeur et pianiste palestinien Faraj Suleiman et la première DJ palestinienne de Ramallah, Sama.

Présent également, l’Extrême-Orient avec le groupe turc, «Kardes Türküler » qui a littéralement conquis le public du Théâtre Mohamed V lors de la clôture du festival. Il y a les Iraniens avec le groupe Aïda et Babak Quartet, né de la rencontre entre la chanteuse-violoniste Aida Nosrat et le guitariste Babak Amir Mobasher, mais aussi leur compatriote Ali Asghar Rahimi, le virtuose chanteur et joueur du luth. Il y a eu également, le groupe libanais «The Wanton Bishop » de Nader Mansour ou encore le trio jordanien du groupe «El Morabba 3 » bien inspiré du rock alternatif et du post-rock des vingt dernières années. L’Egypte était aussi présente à travers Hisham Kharma, musicien, directeur artistique et entrepreneur social, également l’Algérie avec Raina Raï la légende vivante du Raï.

L’Afrique était aussi bien représentée à travers notamment l’artiste gabonaise, Queen Koumb, le camerounais Armand Biyag, le guinéen Sekou Kouyaté, la cap-verdienne Elida Almeida. Parmi les groupes africains qui ont tenu la scène, Mokoomba du Zimbabwé.

La diaspora été bien présente elle-aussi lors de ce festival, à travers les prestations du groupe franco-marocain AYWA, mais aussi le célèbre guitariste américano-tchadien Caleb Rimtobaye qui a collaboré avec des célébrités comme Rihana ou Chris Brown, ou encore la franco-tunisienne Miss Ness.

Le festival Visa For Music a aussi reçu des musiques venus du vieux continent, avec la présence de groupes, de producteurs et managers évoluant en France, en Espagne, en Portugal, en Belgique, en Italie et dont la plupart travaillent avec des artistes africains.

La musique des Iles a aussi baigné le festival avec les sonorités venues de Trinidade et Tobago, notamment avec le groupe Jouvay Fest, ou encore le groupe martiniquais Roro Kaliko et le groupe Jysse de la Nouvelle Calédonie. En parallèle, le Sahara et ses mystères ont donné une toute autre couleur au Visa For Music avec le groupe Tarwa N’Tiniri, le groupe Gnawa Racines, Jbara, Taragalte.

Nourriture de l’esprit
Si la musique nourrit l’âme, les conférences sur la musique nourrissent l’esprit. Aussi, Visa For Music a également développé une série de conférence sur des thèmes aussi variés : «comment apporter un soutien aux arts du spectacle au Moyen-Orient », «de l’informel au formel, les enjeux actuels et futurs des industries créatives et leur place dans l’élaboration des politiques culturelles », «les bureaux d’experts de la musique, des outils efficaces au service de la promotion culturelle », «la nouvelle scène  africaine et moyen-orientale, le son du futur ? » , « «la culture et l’art comme facteurs de paix sociale ».

« Art et musique facteurs de paix » conférence (Crédit photo Aidara)

Ces conférences ont été animées par d’éminents spécialistes, à l’image de Mamou Daffé d’Arterial Network, Moulaye Ahmed Alami, directeur Jazzablanca et trésorier de l’Association marocaine des entrepreneurs du spectacle vivant, Hicham Abkari, directeur du Théatre Mohamed V, Monza, musicien et opérateur culturel de Mauritanie, pour ne citer que ceux-là.

Le festival a aussi abrité des ateliers de formation en logistique des programmations, management d’artistes,  le digital, etc.

Ça prend de l’ampleur

Le festival Visa For Music devient au fil des ans une grosse machine qui risque de drainer encore plus de monde. Si lors de cette 4ème édition, le jury s’est empêtré à dépouiller plus d’un millier de candidatures, les années à venir risquent de se transformer en un véritable rush. Car le festival attire de plus en plus de monde à la recherche d’opportunités. Les stands d’exposition ont été littéralement submergés par les chasseurs de bons partenariats. L’occasion pour les uns et les autres de découvrir ce qui se fait ailleurs.

Stand N°225 (Crédit photo Aidara)

Le Stand N°225 d’Arterial Network, ce réseau panafricain dynamique composé d’organisations non gouvernementales, d’institutions, d’entreprises de l’économie créative, de festivals et d’artistes individuels, a connu plusieurs visiteurs venus s’enquérir de ses domaines d’activités et des opportunités qu’elle offre. A l’instar des autres stands, le réseau a joué sa partition lors de cette édition. Il continue sa contribution pour nourrir cette industrie musicale qui se construit à partir de quelques capitales africaines et européennes, comme le MASA en Côte d’Ivoire, le Womex à Berlin ou Visa For Music à Rabat.

Cheikh Aïdara
Rabat,
le 26 novembre 2017


DE L’ASAC CONCORDE A LEVANTE.UD Hacen El Id le premier Mauritanien à disputer la Copa Del Rey Espagnole

L’ex sociétaire de l’ASAC Concorde, HACEN EL ID est le premier joueur Mauritanien à fouler les pelouses Espagnoles en disputant un match de la Copa del Rey.

Hacen El Id

En effet, le Concordien a été déjà convoqué pour la  première fois lors du  match de la liga : UD LAS PALMAS Vs LEVANTE UD (0-2) du Dimanche 19 Novembre 2017 ; Cette fois ci le jeune Mauritanien a disputé sa première rencontre professionnelle (titulaire et sur plus d’une heure de jeu) ce Mardi 28 Novembre 2017 face à GIRONA lors du match retour des 8emes de finale de la Copa Del Rey ; cette rencontre s’est soldée par un match nul(1-1) mais au bout la qualification de Levante UD aux ¼ de finale car elle s’était imposée par 2 buts à 0 lors du match aller .

 

Rappelons que ce joueur est issu du transfert de l’ASAC Concorde à LEVANTE en Janvier 2016 dont les montants de transferts (75.000 Euros) ont été détournés par le Président de la FFRIM qui depuis lors a mis en place des mécanismes de prise en otage  « du club de football de l’ASAC Concorde »  via ses complices (3 ex membres du comité directeur de l’Asac Concorde) qui jusqu’à nos jours servent de boucs émissaires de gestion temporaire du club de football de l’ASAC Concorde.

 

Notons que les dirigeants légitimes de l’ASAC Concorde réunis autour de leur président        le Dr Ba Mouhamadou sont fiers d’être les premiers exportateurs des joueurs Mauritaniens de façon efficiente en Europe (Abdoulaye Sileye Gaye dit PALAYE, Hacen El Id et Aly Abeid) et en Asie (El Moustafa Diaw).

 

Enfin, l’ensemble des dirigeants légitimes de la Concorde adressent leurs chaleureuses félicitations au pionnier du football Mauritanien en Espagne Hacen El ID  et sont par ailleurs déterminés à aller jusqu’au bout en exploitant tous les moyens de justice au niveau national et international afin de retrouver leur droit.

Source : ASAC Concorde


Rabat, entre le must et le rustique

Le Maroc est un pays formidable. Rabat, la capitale, avec ses belles avenues, ses splendides immeubles, sa belle architecture, ses foisonnantes terrasses qui ne dorment jamais, ses magasins aux articles bien achalandés et ses splendides mosquées, mais aussi son réseau routier et son chemin de fer, surtout son fameux tramway, n’ont rien à envier à Paris, Madrid, Londres ou Bonn. Plusieurs migrants africains s’y  sont d’ailleurs installés, y trouvant finalement un pan recherché de mirage occidental.

Un cireur de Rabat (Photo Aidara)

Rabat est un grand carrefour des arts et de la culture. Beaucoup d’artistes africains, fuyant les régimes d’oppression chez eux, y ont trouvé en même temps un refuge sûr et une source inépuisable d’inspiration. On y rencontre des artistes confirmés et des journalistes culturels de toutes les nationalités, attirés par l’environnement de créativité qui baigne le Royaume. On y rencontre également des artistes paumés qui ont raté le coche, telle cette ancienne artiste devenue clocharde, à cause d’une maladie, fait-elle comprendre.

Tout cela est dactylographié dans un bout de papier qu’elle dépose gentiment, sourire aux lèvres, sur la table des clients. Mais si le corps est malheureux, il se dégage d’elle un sourire malicieux et cette grâce majestueuse des habitués des grandes scènes.  Le festival «VISA FOR MUSIC » qui vient de baisser les rideaux le samedi 25 novembre 2017 après quatre jours et trois nuits de folie, dans l’étincelant Théâtre Mohamed V,  a permis à cette faune venue d’ici et d’ailleurs de se fondre dans une parfaite communion d’âme, entre concerts, expositions et conférence.

Le Maroc, c’est surtout une tolérance religieuse et morale à nul autre pareil dans le monde arabe. Ici, les filles peuvent déambuler, cheveux au vent, en jean moulant,  ou s’emmitoufler dans leur burka en toute pudeur.  Dans la capitale marocaine, on peut en effet croiser de fervents croyants sortant à l’aube de la mosquée de la Médina, et tomber quelques mètres plus loin, sur des scènes ludiques, tel cet ivrogne, la langue pâteuse, rouspétant contre un magasinier qui l’empêchait de cuver son vin en le chassant à coups de balai au petit matin.  Un mélange de permissivité, de ferveur religieuse et de libertinage non ostentatoire. Sans gendarme de conscience.

Rabat, c’est surtout quelques vestiges du 18ème  siècle, mélange d’art baroque et de scènes de vie qui vous rappellent l’Europe des Lumières, un zest d’Orient lorsque Bagdad inondait le monde de son savoir, un brin d’Andalousie avec ses soirées musicales,  un coin retrouvé de l’Asie, de ses sonorités langoureuses. Les cireurs de chaussure avec leur caisse en bois ciré et leur repose pied, n’ont jamais exercé ici un métier considéré ailleurs comme mort un certain temps, puis ressuscité. Contrairement à d’autres pays où la profession est dévolue aux enfants, ici c’est le domaine des vieux. Tous ceux qui transportent leur boîtier aux alentours de la splendide avenue Mohamed V et qui viennent dénicher les souliers jusqu’en dessous des cafés, sont d’un certain âge. Un clin d’œil à Marcello Faraggi, cet ancien journaliste devenu en 2015 cireur de chaussures parce que comme il le dit ; «J’ai toujours aimé soigner le cuir, c’est magnifique de soigner et ne pas jeter les choses ».

Rabat, c’est aussi les bouquinistes dont le trésor étalé à même le sol, révèle parfois des titres qui vous rappellent, nostalgiques, quelques lectures d’ados.  Un tableau qui a presque disparu des rues de Nouakchott connu dans les années 70-80 comme le refuge attitré des lecteurs assidus des BD, des SAS, des Guy des Cars, aux alentours de ce qui fut le plus grand immeuble de la capitale, Afarco, aujourd’hui réduit à un nain.

Dans les avenues bondées de Rabat, où le jour et la nuit se confondent, le restaurant «Les Voyageurs » adossé au vieux souk, offre du Hariri originel et le couscous du vendredi. Un parfum du Maroc des années 20 mélangés aux cris des danseurs de rue et les onomatopée joyeux et tonitruants des vendeurs à la criée.

Si Rabat offre de la joie et du bonheur, il a aussi sa mauvaise conscience, toutes ces femmes, bébés sur les genoux, ses vieux au dos cassé, qui vous tendent la main, pour y recevoir parfois, à défaut de pauvres piécettes en dirham, le mépris de ceux qui savent beaucoup dépenser et peu offrir.

Cheikh Aidara