Boukari Ouédraogo

Le gourou, les policiers, le journaliste et le blogueur

Le vendredi 5 février 2016, j’ai assisté à une scène assez bizarre entre un homme et deux policiers, au niveau du rond-point du quartier Wemtenga de Ouagadougou. Un célèbre opérateur économique burkinabé refusait de s’exécuter alors qu’il était en infraction parce qu’il roulait sans les papiers de son véhicule non immatriculé.

Le propriétaire de ce véhicule non immatriculé n'avait pas ses papiers quand il a été interpellé par la police
Le propriétaire de ce véhicule non immatriculé n’avait pas ses papiers quand il a été interpellé par la police

Le gourou et la police

A mon arrivée sur place, l’opérateur économique habillé d’un complet basin bleu est assis au pied de son véhicule, et discute fortement avec les deux policiers. Des jeunes tentent de lui arracher un objet placé au niveau de sa ceinture droite. Un pistolet. J’apprends que l’opérateur économique roulait sans les papiers de son véhicule non immatriculé. Les policiers lui ont donc demandé d’en sortir. Le monsieur, convaincu d’avoir les papiers à son domicile, demande plutôt que son chauffeur aille le déposer et revienne avec les papiers. Les policiers s’y opposent et demandent plutôt à cet opérateur économique spécialisé dans la vente des deux roues de libérer la voiture. Face au refus de ce dernier, les forces de l’ordre tentent d’utiliser la manière forte.

C’est à ce moment-là qu’ils se rendent compte que le gourou en question est armé. Ils tentent de prendre l’arme mais ce dernier refuse. Des curieux, qui observaient la scène tentent, certains maladroitement, de récupérer l’arme en question. S’ensuivent donc de discussions enflammées entre les policiers, l’opérateur économique et certains curieux. Les policiers étaient visiblement offusqués et choqués de voir que ce monsieur, en infraction, possédait une arme. « Avec ces temps qui courent », dit l’un d’entre eux en référence au dispositif sécuritaire mis en place suite aux attentats du vendredi 15 janvier 2016 contre le café Cappuccino et le Splendid Hôtel à Ouagadougou. L’esprit des jeunes présents sur place s’échauffe, mais le gourou ne se laisse pas faire. En définitive, les policiers acceptent d’accompagner l’opérateur économique en question pour récupérer les papiers. D’après moi, pour éviter un bain de sang.

Ces faits, je les ai rapportés sur mon profil Facebook : 

Il y a des gens qui ne savent pas que les choses ont changé.Rond-point de Wemtenga. 11h25. Un célèbre opérateur é…

Posté par Boukari Ouédraogo sur vendredi 5 février 2016

 

Entrée en jeu du journaliste

Le lendemain samedi, après avoir passé toute la nuit devant mon ordinateur, un appel me réveille sous les coups de 10 heures. Le numéro ne figure pas dans mon répertoire. Je décroche. Sait-on jamais si quelqu’un voulait m’offrir un bon boulot. Mon interlocuteur se présente. Il travaille dans une célèbre radio privée. Je ne le connais pas. J’ai juste souvent entendu son nom sur la station pour laquelle il travaille. Ce dernier me demande de supprimer ma publication faite la veille incriminant l’opérateur économique. A moitié réveillé, je fais savoir que je n’ai cité le nom de personne. Il insiste. Je lui dis que je vais supprimer la publication, soucieux de pouvoir me rendormir.

Des passants ont tenté d'arracher l'arme de l'opérateur économique
Des passants ont tenté d’arracher l’arme de l’opérateur économique

Vers 11 heures, un deuxième appel, cette fois avec un téléphone fixe. Le journaliste de nouveau. A ce moment, je fais savoir à mon interlocuteur que je ne suis pas encore connecté parce que j’étais toujours couché lorsqu’il m’a appelé. Plus tard, je rappelle le journaliste pour lui faire savoir que je ne peux pas supprimer mon poste. J’aurais pu le faire par confraternité mais le vin était tiré. Il fallait qu’il accepte qu’après le week-end, ce petit buzz serait noyé par d’autres actualités.

Mon interlocuteur me fait alors savoir que lui et l’opérateur économique en question, qui serait son « tonton », souhaitent que je le supprime parce que cela peut porter préjudice à son commerce, ses amis commerçants pouvant aussi se servir de cette histoire pour lui nuire. Il aurait vu ma publication. Après l’incident, les policiers se seraient rendus chez le « tonton » pour s’excuser. Je répète encore que je n’avais pas donné le nom de l’opérateur économique et que je ne pouvais pas supprimer mon post au risque de perdre toute crédibilité. Un peu énervé, il tente de me faire comprendre qu’effectivement, je suis libre de le faire. Mais je n’avais plus assez de crédit pour tenir la conversation, qui s’interrompt. J’ai attendu qu’il rappelle mais au moment où j’écris ces lignes, il n’a toujours pas fait signe.

Si j’ai rapporté l’histoire sur mon profil, c’est pour que l’on prenne conscience que dans toute société, il y a des règles à respecter. L’opérateur économique aurait dû accepter que sa voiture soit confisquée et de se rendre au commissariat avec ses papiers pour se mettre en règle. Dorénavant, il devrait circuler avec les papiers de son véhicule, car nul n’est au dessus de la loi.


Monsieur le Président, le sport est un facteur de développement économique

Le nouveau Premier ministre burkinabé Paul Kaba Thiéba a fait sa déclaration de politique générale le vendredi 5 février 2015 devant l’Assemblée Nationale du Burkina. Dans cette déclaration, le patron du gouvernement burkinabé n’a pas fait du développement du sport une priorité. Une décision qui concorde avec le programme du Président Roch Marc Christian Kaboré, qui s’est contenté de l’effleurer dans le sien.

Pour jouer au basketball, les enfants ont besoin de plateaux de jeux dans toutes les villes du Burkina
Pour jouer au basketball, les enfants ont besoin de terrains de jeux dans toutes les villes du Burkina

Le développement du sport n’est pas une priorité pour le Président du Burkina Faso Roch Marc Christian Kaboré. Cela s’est ressenti lors du discours de politique générale du premier ministre Paul Kaba Thiéba dans l’hémicycle. Pour le reste, le Premier ministre a déployé un programme qui fait rêver. Paul Kaba Thiéba a tout fait pour être précis sur les secteurs de l’éducation, de l’économie, de l’emploi, etc., allant jusqu’à chiffrer les objectifs à réaliser durant son mandat.

Sur le plan sanitaire par exemple, le gouvernement dirigé par Paul Kaba Thiéba prévoit « la normalisation de 361 Centres de Santé et de Promotion Sociale (dont 61 en 2016), de 33 Centres Médicaux avec Antenne chirurgicale (15 en 2016), de 2 Centres Hospitaliers Régionaux en 2016 et la poursuite de la transformation des CSPS des chefs-lieux de communes rurales en Centres Médicaux (37 entre 2016 et 2017) ». Ce qui est bien. Très bien même s’il arrive à le faire.

Le ministre effleure la question du sport

Concernant le sport, on s’aperçoit que, comme d’habitude, il a été relégué au dernier plan. Il est même couplé avec le programme culturel et touristique de l’actuel gouvernement. Aucun chiffre, aucune donnée. On ne sait pas combien de plateaux, combien de stades, combien de centres de formations seront construits pour faire du sport un vecteur de développement économique. Et pourtant, le Burkina Faso ne dispose pas d’infrastructures sportives dignes de ce nom. Le Tour du Faso fait partie des compétitions cyclistes les plus en vue du continent africain. Mais le pays ne dispose pas de vélodrome. Le cheval est l’emblème du Burkina. Pourtant le seul hippodrome du pays est dans un piteux état. C’est dans des conditions difficiles qu’il abrite des compétitions hippiques. Les plateaux sont insuffisants et les matches du championnat national de football se disputent dans la poussière.

Le Dr Jean-Loup Chappelet faisait déjà le constat, dans une étude réalisée en 1995 par l’UNESCO sur la situation du sport dans les pays les moins avancés d’Afrique, que les taux de pratiques sportive étaient très bas. Selon son analyse, la très faible présence de l’éducation physique et du sport (EPS) à l’école est notamment en cause, due à une pénurie de maître d’EPS et d’entraîneurs, ainsi qu’à un manque flagrant d’équipements sportifs – notamment pour les sports qui nécessitent des installations sophistiquées. Le Dr. Chappelet ajoute que cette situation résulte bien évidemment de dépenses gouvernementales insuffisantes en la matière. Cela s’explique par le fait que les gouvernants africains, et burkinabés particulièrement, négligent ce secteur sportif, considéré comme budgétivore et sans rentabilité.

Le sport, moteur facteur de développement économique

Et pourtant, le sport est un facteur de développement économique. C’est ce que souligne d’ailleurs un article du Huffington Post au travers de ces termes : « tout le monde est d’accord pour dire que le sport contribue au développement économique en créant des emplois et en dynamisant l’activité commerciale. L’organisation d’un grand événement sportif, par exemple, est une opportunité formidable pour l’économie locale : les milliers de personnes qui viennent y assister vont dépenser de l’argent dans la nourriture, l’hébergement ou encore le transport, et bien souvent aussi dans des activités touristiques annexes ». L’auteur de cet article donne des chiffres qui montrent en quoi un évènement comme la Coupe du Monde 2010, qui s’est disputée pour la première fois en Afrique du Sud, a été rentable pour le pays hôte.

« Si on prend comme exemple l’Afrique du sud en 2010, l’effet positif de la Coupe du monde fut temporaire en terme de création d’emplois et de baisse de la criminalité et inférieur aux estimations d’avant l’événement. 309 000 touristes sont venus pour la Coupe du monde ; ils ont dépensé environ 400 millions de dollars d’après les études du département du tourisme. Or, les estimations étaient de 480 000 et des dépenses par séjour trois fois plus importantes. La Coupe du monde 2010 a permis un profit de plus de 2 milliards de dollars pour la FIFA mais a coûté à l’Afrique du sud 4,3 milliards de dollars dont près d’un milliard de dollars pour les stades du Cap et de Durban ».

Le choix de l’Afrique du Sud pour accueillir la Coupe du Monde 2010 s’explique bien par le fait que le pays était en avance sur les autres pays en termes d’infrastructures. En plus de cela, elle a dû renforcer celles qui existaient déjà pour gagner son pari.

Le développement du sport au Burkina Faso contribuerait à la création des vastes marchés pour les équipements sportifs (maillots, T-shirts, chaussures, gadgets), la vente des billets, de restauration, de droits télés avec la retransmission des matchs, le sponsoring… Le marché de l’emploi serait plus ouvert, de façon directe et indirecte. Les stades auraient par exemple besoin de personnel pour entretenir et veiller sur eux. Le développement du sport au Burkina Faso pourrait permettre aussi l’essor de la petite unité de construction de ballons de football (et bien d’autres disciplines aussi) situés dans le village de Bourzanga dans la province du Bam.

Des exemples existent

Une réflexion, trouvée sur Internet et apparemment relevant du Ministère des sports et des loisirs, donne des exemples précis.

Une étude hollandaise (Université d’Amsterdam, Ministère de la santé, des services sociaux et du sport, 1998), cherchant à évaluer les effets du sport sur l’économie, a montré que la suppression des activités sportives entraînerait la perte de 300.000 emplois et une réduction de la consommation intérieure de 5 milliards de florins soit environ 2,27 milliards d’euros.

En France, la fédération des industries d’articles de sport comptait, en 1980, 6.482 entreprises qui employaient 300.000 personnes. Une étude menée par l’École Supérieure des Sciences Économiques et Commerciales (ESSEC), indique que le sport a généré un chiffre d’affaires de 29 milliards d’euros en 2005.

S’appuyant sur le cas du Burkina Faso, cette réflexion fait les observations suivantes :

« Au Burkina Faso, il suffit de prendre l’exemple du championnat de football, première division qui compte quatorze équipes des joueurs (ndlr: le championnat compte actuellement 16 équipes). Si on retient seulement 25 joueurs licenciés par équipe, cela donne le chiffre de 350 joueurs qui perçoivent un revenu moyen de 50.000 FCFA par mois, soit une masse salariale mensuelle de 17,5 millions de FCFA, on aboutit à un chiffre annuel de 210 millions de FCFA.

A ce montant, il faut ajouter les frais d’achat d’équipements et de matériel sportifs, les dépenses d’organisation, les frais de gestion administrative, les frais médicaux et les charges récurrentes des infrastructures sportives ».

Ce document estime qu’en général, le poids de l’économie du sport varie entre 1% et 2% du PNB dans les pays industrialisés et tend à croître à un rythme supérieur à celui de la plupart des autres secteurs. C’est pourquoi, il faut faire en sorte que les clubs burkinabés passent du statut amateur au statut professionnel.

Ainsi donc, pour faire du sport un moteur de développement économique, il faut une politique générale des sports rigoureuse, portant prioritairement sur le développement des infrastructures mais aussi sur la formation. « Si nous voulons sérieusement faire du sport une partie intégrante du développement social, cela doit démarrer à la base, dans les quartiers », relève un article de Institut AMADEUS.

La réflexion du ministère des sports soulignait également ceci : « La pratique des activités physiques et sportives est reconnue comme un droit social par la Constitution du Burkina Faso. Il convient qu’elle soit désormais considérée comme faisant partie intégrante du développement économique et social ».

Le Dr Chappelet, pour sa part, disait ceci pour conclure cet article : « en promouvant de façon durable et saine le sport dans ces pays, on peut espérer briser cette spirale négative et faire démarrer des activités porteuses de croissance économique et sociale, sans mettre en danger l’environnement naturel ».


Ordures à Ouagadougou : le ménage a-t-il commencé ?

Récemment et plus précisément le jeudi 28 janvier 2016, je publiais un billet dans lequel je critiquais l’insalubrité, dans la ville de Ouagadougou. Le billet prenait principalement l’exemple d’un dépôt d’ordures situé au quartier Somgandé de Ouagadougou entre l’école de formation et de perfectionnement des travaux publics (côté Ouest) et l’Action éducative en milieu ouvert (AEMO, côté Est).

Rassemblées ainsi, l'on se rend compte de l'ampleur des ordures
Rassemblées ainsi, l’on se rend compte de l’ampleur des ordures

 

En moins d’une année, les ordures ont envahi cet espace au point d’obstrué la route. Le ménage semble être en cours. Le lundi 1er janvier 2016, l’endroit était revêtu de nouveaux habits. Des cartepillars dont les pneus sont toujours visibles ont retourné les ordures qu’ils ont placé en placés en plusieurs tas. Des pancartes indiquent : «Interdit de jeter les ordures ».

Coïncidence ? Est-ce l’effet du billet ? Les intéressés s’étaient déjà rendus compte du problème ? Quoi qu’il en soit, le fait d’avoir pensé à nettoyer cet endroit est une bonne initiative. Les ordures avaient presque obstrué le passage de ce quartier de Ouagadougou et une forte odeur se dégageait. Même si l’odeur pestilentielle continue de polluer l’atmosphère cet endroit où sont installés des kiosques à proximité, la démarche a pour effet de dissuader.

Ici, un fou fouille dans un tas d'ordures déposé malgré l'interdiction de jeter les ordures
Ici, un fou fouille dans un tas d’ordures déposé malgré l’interdiction

 

Il faudrait vraiment veiller à ce que, ceux qui ont l’habitude de déposer d’y déposer leurs déchets ménagés, ne recommencent plus. Les femmes chargées de récolter les ordures ménagères dans la ville de Ouagadougou ne savent pas lire en général. Elles croiront peut-être que l’endroit a été mieux aménagé pour elles.

Malgré les pancartes d’interdiction,  quelqu’un a récemment vidé sa poubelle à cet endroit. Juste pour interprétation, nous estimons que ces ordures sont sorties du domicile d’une famille aisée.

Les autorités communales doivent sensibiliser les riverains sur la question et de passer à une phase de sanctions. Il est inadmissible que des gens quel que soit leur catégorie sociale se permettent de jeter des ordures là où ils le souhaitent. Mais elles aussi, les autorités, doivent aménagés des dépotoirs d’ordures dans chaque quartier mais aussi des centres de traitement d’ordures. Sinon, on nous répètera encore un jour que : « Ouaga, c’est pas forcé » (Ne vit pas à Ouaga qui veut).


Immigration : des Burkinabés obligés de fuir la Guinée

Le centre de l’Action éducative en milieu ouvert (AEMO), situé dans le quartier de Somgandé de Ouagadougou, est résolument devenu un site d’accueil pour les Burkinabés rapatriés d’autres pays. 71 d’entre eux sont arrivés dans la nuit du jeudi 21 janvier 2016, après avoir rejoint la frontière entre le Mali et la Guinée à pied. En décembre, 240 mineurs burkinabés avaient été chassés.

C'est à pieds que ces Burkinabè sont rentré de la Guinée
C’est à pied que ces Burkinabés sont rentrés de la Guinée

Ils se sont rendus à la mine d’or de Siguiri, au nord-est de la Guinée, dans l’espoir de faire fortune. Mais c’est dans le dénuement total que 71 Burkinabés partis à l’aventure en Guinée-Conakry sont rentrés chez eux. Et pour rentrer au bercail, ils ont dû fuir le pays en se cachant dans la forêt afin de passer la frontière malienne, d’où ils ont été rapatriés à Bobo Dioulasso avant de finalement rejoindre la capitale Ouagadougou. Dans le froid glacial de ce vendredi 22 janvier 2016, une trentaine d’immigrés de retour au pays discutaient dans la cour de l’Action éducative en milieu ouvert (AEMO) de Ouagadougou, situé au quartier Somgandé.

Entouré de quelques jeunes (qui pourraient être ses enfants), Ibrahima Zakary Congo accepte de raconter ce qui l’a contraint, avec les autres, à emprunter le chemin du retour. « Je ne sais pas pourquoi, mais ils se sont levés, un jour, et se sont mis à nous chasser sans préavis. Certains d’entre nous ont été battus, fouillés, dépouillés de leurs biens », explique-t-il malgré la gêne qui se lit sur son visage. N’ayant aucun problème entre les ressortissants burkinabés et la population locale, c’est la police elle-même qui était à la manœuvre, fait savoir Congo. « Les portables, les habits quand ils avaient de la valeur, l’or que nous avions gagné à la sueur de notre front, ils ont tout récupéré », ajoute-t-il indigné.

Le rêve de faire fortune s’envole

Il avait pourtant nourri beaucoup d’espoirs en quittant son village de la province du Ganzourgou pour se rendre en Guinée. Il n’a pas non plus rechigné au travail, lui le père de cinq enfants, dont certains sont déjà très grands. Mais l’aventure guinéenne a mal tourné. «Ce n’est pas par plaisir que je suis allé en Guinée. C’est parce que je n’avais pas de travail chez moi et que j’avais besoin de quoi nourrir ma famille », confie Congo. « Regardez-moi, je ne suis plus jeune. On ne peut pas dire qu’on est jeune lorsqu’on a dépassé la quarantaine. J’étais donc allé à la recherche de quoi nourrir ma famille mais je reviens sans un sous ».

Son rêve de faire fortune brisé, Ibrahim Zakary Congo s’est rendu compte qu’obligé de se cacher, il ne pouvait pas travailler comme il le voulait. A un certain moment, il a dû affronter la dureté de la vie. Il n’avait plus rien à manger puisqu’il devait se cacher. S’il était arrêté, il irait en prison comme les rapatriés du mois. Conscient de cette réalité, il décide donc de quitter la Guinée pour sa terre natale. Là encore, Ibrahim Zakary Congo est obligé de se cacher. Il a fallu se cacher pour rejoindre la frontière malienne, à partir de l’endroit où l’ambassade du Burkina Faso au Mali a affrété des cars pour les ramener à Bobo Dioulasso. « Les policiers étaient à la frontière et attendaient. Ils avaient été aussi au niveau du fleuve Niger », raconte toujours ce désormais ancien mineur. S’il est rentré à pied, c’était pour éviter de rentrer plus démuni qu’il ne l’était dans le cas où la police mettait la main sur lui. 

Retour à la terre

Que faire après ce retour, désorienté et tout honteux ? Congo n’a d’autres choix que de retourner à la terre. « J’ai quitté très tôt l’école. J’étais donc devenu cultivateur. Je suis obligé de retourner à la terre », avoue-t-il tout en montrant des signes d’impatience quant à l’arrivée de la saison pluvieuse. Toutefois, il ne sait toujours pas comment il va affronter le regard de ses enfants, de sa femme et de son village. « Regardez nous ? C’est dans des plastiques que nous avons laissé nos habits. C’est une honte pour un homme comme moi de rentrer d’une aventure avec ses biens dans un simple plastique », lâche-il comme si ses propos l’étouffaient. S’il n’était qu’un simple employé, Ibrahim Zakary Congo déplore tout de même le matériel laissé sur place par ses patrons. D’après ses explications, ces derniers avaient de grosses machines qui servaient à moudre les pierres sorties des mines. Ils pourraient essayer quelque part au pays s’ils pouvaient récupérer leur matériel. Mais cela semble désormais impossible.

Au début du mois de janvier 2016, des Burkinabés ont été rapatriés de la Libye.


Ordures à Ouagadougou : nettoyez nos quartiers

Ouagadougou se targue d’être l’une des villes les plus propres de l’Afrique de l’Ouest. C’est peut-être vrai pour ceux qui ont eu la chance de visiter certaines capitales de la sous-région ouest-africaine. Cela ne veut toutefois pas dire que la capitale du Burkina Faso est une ville propre. Il suffit de faire un tour de ses quartiers pour constater des tas d’ordures, entreposés de façon anarchique.

Les compagnies de ramassage d'ordures jettes les déchets à n'importe quel endroit
Les compagnies de ramassage d’ordures jettes les déchets n’importe où

Quartier Somgandé de Ouagadougou. Entre l’école de formation et de perfectionnement des travaux publics (côté Ouest) et l’Action éducative en milieu ouvert (AEMO, côté Est), se trouve un dépôt d’ordures. J’ai presque vu naître ce dépôt d’ordures car il m’arrive souvent d’emprunter la voie qui sépare les deux sites. Au départ un petit tas d’ordures négligeables, elles ont en quelques mois envahi l’espace, au point d’obstruer la route.

Pendant la saison pluvieuse, ce tas d’ordures empêchait l’eau de couler. A tel point que des retenues d’eaux se sont créées au beau milieu de la route, assez profondes pour que l’eau pénètre dans les tuyaux d’échappement des motos. Les passants étaient donc obligés, tant bien que mal, de déverser des ordures (objets lourds) dans les crevasses créées par la stagnation de l’eau afin de se frayer un passage.

Les ordures sont sources de maladies
Les ordures sont sources de maladies

Si les compagnies chargées de ramasser les ordures dans les ménages ont choisi cet espace, on se demande comment les autorités (et notamment la municipalité) ont pu laisser cet espace se transformer en dépotoir au vu et au su de tout le monde. Si c’est arrivé, c’est parce que les compagnies chargées du ramassage d’ordures n’ont pas trouvé d’autres endroits pour les jeter. S’il s’avère que les autorités burkinabè ont donné leur accord, alors ils n’ont pas eu le nez creux car cet endroit n’est clairement pas adapté. Ils doivent donc rattraper cette erreur.

En réalité, le cas cité plus haut n’est qu’un exemple dans la ville de Ouagadougou. Aux alentours du rond-point des martyrs, dans le quartier Ouaga 2000, on peut constater plusieurs tas d’ordures de ce genre. Les déchets plastiques pullulent à cet endroit. On ne se croirait pas dans un quartier huppé où vivent les hommes les plus riches du Burkina – sous-entendu, supposés avoir les moyens de gérer leur saleté.

A la future ZACA, les immeubles côtoient les dépotoirs d'ordures
A la future ZACA, les immeubles côtoient les dépotoirs d’ordures

Dans le quartier supposé être la future Zone d’Aménagement Commerciale et Administrative (ZACA), qui ressemble à une ruine malgré quelques immeubles en construction, la situation est encore pire. Pourtant, des immeubles devaient pousser à la place de ce vieux quartier détruit pour ce projet. La zone a été transformée en dépôt d’ordures de tous genres, les exemples ne manquent pas. 

Ce n’est donc pas par hasard que si le Burkina Faso, et en particulier la capitale Ouagadougou, fait partie des pays où le paludisme sévit le plus. Ces dépôts d’ordures sont sources de proliférations de moustiques et de bactéries eux-mêmes vecteurs d’autres maladies.

Si les ménages font des efforts pour avoir des poubelles et engager des compagnies de ramassage d’ordures, les autorités burkinabè doivent faire en sorte que celles-ci puissent avoir des dépotoirs. Cela s’accompagne de stations de traitement de ces déchets. Sinon, on risque d’être plus que déborder dans les années à venir.


Gilbert Diendéré, véritable casse-tête pour le Burkina

Cela fait quatre mois à la date de ce lundi 25 janvier 2016 que le général Gilbert Diendéré auteur du coup d’Etat manqué du mercredi 16 janvier 2016 est détenu à la maison d’arrêt et de correction de l’armée (MACA) à Ouagadougou. Bien qu’étant incarcéré, le général Gilbert Diendéré continue de troubler le sommeil des autorités burkinabè.

Bien qu'étant en prison, Gilbert Diendéré donne des occasions difficiles à résoudre aux autorités burkinabè
Bien qu’étant en prison, Gilbert Diendéré donne des occasions difficiles à résoudre aux autorités burkinabè

Le nom de Gilbert Diendéré était à la fois un mythe et un mystère au Burkina Faso. Personnage réservé, il était craint et souvent même, cela peut étonner aujourd’hui, et admiré. L’on dit de lui qu’il a déjoué des coups foirés contre le Burkina Faso ou contre son mentor, l’ancien Président Blaise Compaoré. Sa puissance, son intelligence, son sens de la stratégie, son goût du secret etc. avaient même conduit le journal Jeune Afrique dans un portrait à le considéré comme « l’homme le plus puissant du Burkina Faso après Blaise Compaoré lui-même » ou encore « L’homme le mieux informé du pays » dans un portrait de cet ancien patron du Régiment de sécurité présidentielle (RSP).

Mais, le mythe du général Gilbert Diendéré est tombé à l’issue du coup d’Etat manqué du mercredi 16 septembre 2015. Le dénouement de cette crise a conduit à son arrestation et son incarcération le jeudi 1er octobre 2015. Malgré cela, le général Gilbert Diendéré continue de troubler le sommeil des Burkinabè et aussi de leurs autorités. Depuis la chute de Blaise Compaoré le 31 octobre 2014, Gilbert Diendéré et le RSP ont troublé la situation socio-politique au Burkina Faso notamment en décembre 2014 quand ils auraient voulu régler des comptes avec le Premier ministre de l’époque mais numéro 2 de ce régiment Yacouba Isaac Zida.

Attaque à Yimbi pour déstabiliser le dispositif sécuritaire

Le 23 décembre 2015, les services secrets burkinabè ont su déjouer la mise en place d’un plan d’évasion du général Gilbert Diendéré emprisonné. Après l’échec de ce plan, les militaires de l’ex RSP qui n’avaient pas rejoint les casernes tentent à nouveau un coup en attaquant la poudrière de Yimbi situé à la sortie Ouest de Ouagadougou. La traque menée par les forces de défenses et de sécurité burkinabè ont permis de mettre la main sur ces déserteurs. Apparemment, les assaillants ont profité de l’attentat du vendredi 15 janvier 2016 pour attaquer le camp Yimbi. Une opération qui a pour objectif de créer la psychose mais aussi affaiblir le système sécuritaire burkinabè. Les fidèles de Diendéré étaient presque arrivés à faire douter des compétences de l’armée burkinabè.

Les difficultés restent. Les geôliers de Gilbert Diendéré ne savent pas comment surveiller ce prisonnier vraiment encombrant. Ils doivent toujours vivre avec à l’esprit qu’à chaque moment, de tels plans peuvent être échafaudés pour permettre à Gilbert Diendéré et à d’autres prisonniers de s’évader. Pour le moment, le coup d’Etat du 16 septembre 2016 n’a pas révélé tous ses secrets. Qui sait s’il n’y a pas de complices au sein de l’armée qui attendait juste d’apporter leur soutien au coup d’Etat s’il était en bonne voie. Les autorités burkinabè doivent aussi avoir à l’esprit que Gilbert Diendéré réputé fin stratège et imprévisible pourrait (tenter de) s’évader. Pour cela, il peut même bénéficier de complicités au sein de l’armée.

On peut attenter à la vie de Gilbert Diendéré

On pourrait même imaginer que cette complicité vienne des autorités burkinabè. Ces dernières, d’anciens compagnons de Compaoré, ont côtoyé Gilbert Diendéré tout le temps qu’ils ont passé avec Gilbert Diendéré. Si jamais ils ont des cadavres dans le tiroir, Gilbert Diendéré devrait être bien informé. Dans ce cas s’il parle, c’est l’actuel régime qui devrait rendre compte au peuple qui l’a élu et qui souhaite mettre fin avec les agissements du régime ancien.

Hormis tout cela, il y a cette possibilité que Gilbert Diendéré tente de se suicider. Si cela arrivait, les autorités burkinabè auront le dos au mur. Il sera difficile pour elles d’expliquer aux Burkinabè qu’ils n’ont rien à y voir. Et si d’ailleurs, quelqu’un tentait de l’empêcher de parler ? Ce sont des inquiétudes légitimes car, avec tout le temps que certains ont passé avec Blaise Compaoré, un procès de ce régime pourrait les salir. Ils n’ont donc pas intérêts à ce que Gilbert Diendéré parle.

Même en prison, Gilbert Diendéré, avec son RSP, qui a fait trembler le Burkina plusieurs fois pendant la Transition continue de troubler le sommeil des autorités burkinabè. Pour qu’elles retrouvent le sommeil, il faudrait lever le couvre-feu instauré entre 1 et 4 heures du matin.


Incendies en série à Ouagadougou : Ils veulent empêcher le Président Roch de gouverner

Depuis le 15 janvier 2016, au lendemain des attentats contre le Cappucino, Splendid Hôtel et l’Hôtel Yibi, une série d’incendies secoue les marchés de la capitale burkinabè Ouagadougou. Si au départ, les Burkinabè ont pensé, peut-être, ils doivent se rendre à l’évidence que ces incendies enregistrés en ce laps de temps est une manière peut-être pour les anciens nostalgiques du régime de Blaise Compaoré d’empêcher le nouveau président démocratiquement élu Roch Marc Christian Kaboré de diriger ce pays.

Incendie

Il faut désormais privilégier la piste criminelle. Cette série d’incendies dans les marchés du Burkina n’est pas le fait du hasard. En moins d’une semaine, les marchés de Tanghin, de Boins Yaaré, à Gounghin et le grand marché de Bobo Dioulasso ont connu des incendies tout comme un maquis au quartier Tanghin supposé appartenir à un homme de tenu.

Ces incendies interviennent quelques jours après la nomination des membres du gouvernement par le Premier ministre du Burkina Paul Kaba Thiéba, et surtout au lendemain des attentats du vendredi 15 janvier 2016 qui ont plongé les Ouagalais et tous les Burkinabè dans la peur.

Dans la même nuit, un maquis situé au quartier Tanghin de Ouagadougou, supposé appartenir un homme de tenu partait aussi en fumée. Simple coïncidence ? Non. Tout cela ressemble à un scénario mis en place pour empêcher le nouveau Président élu Roch Marc Christian Kaboré de diriger ce pays. Beaucoup de ceux qui ont connu derniers soutiens de Blaise Compoaré rapportent bien que l’ancien Président Blaise Compaoré et ces derniers ont juré qu’il ne dirigera jamais ce pays. Alors à défaut de l’empêcher, ils ont donc décidé de l’empêcher de le faire. C’est pourquoi tout ceci ressemble à l’œuvre d’anciens nostalgiques du régime Compaoré. Ils ont mal digéré le départ du trio Roch Salif Simon surnommé les RSS pour renforcer les rangs de l’opposition lors des différentes luttes contre la modification de l’article 37 de la constitution du Burkina de l’époque. Ce qui a finalement contribué à la chute du Président Blaise Compaoré.

En incendiant les marchés, ces terroristes veulent susciter une grogne de la population contre les nouveaux dirigeants. Pour cela donc, ces terroristes, c’est ainsi qu’il faut nommer ces pyromanes, veulent semer la psychose afin d’éviter toute velléité d’investissement au Pays des Hommes Intègres.

Il y a peut-être un lien entre cette série d’incendies, l’attentat du vendredi 15 janvier 2016, l’attaque d’une patrouille de gendarmerie dans la province de l’Oudalan mais aussi l’enlèvement du couple Eliot dans la ville de Djibo le même jour de l’attentat.

Les pyromanes qui sèment la terreur ces derniers temps dans les marchés devraient bien avoir un lien avec ces mêmes personnes qui ont attaqué le camp militaire de Yimdi dans la nuit du mercredi 21 au jeudi 22 janvier 2016. Ces terroristes pensent peut-être qu’ils font du mal au RSS mais c’est aux Burkinabè qu’ils le font. De toutes les façons, ce n’est jamais de cette façon qu’ils dirigeront à nouveau le pays. Au contraire, ils risquent de susciter l’effet contraire : les Burkinabè pourraient plutôt, en solidarité avec leurs dirigeants, nourrir de la sympathie pour eux et accepter mourir pour défendre leur cause comme ce fut le cas les 30 et 31 octobre 2014 et pendant le putsch du mercredi 16 septembre 2015.

Il est vrai que ces attaques, ces incendies ainsi que d’autres braquages moins médiatisés ces derniers se déroulent en période de couvre-feu (1heures à 4 heures du matin) révèlent aussi de la défaillance au niveau des services de sécurité burkinabè. Mais ce sujet sera l’objet d’un billet.


Attaque à Ouagadougou: les djihadistes ont frappé le coeur de la capitale

On savait qu’ils pouvaient frapper un jour. Ils l’ont fait. Ils ont touché un point symbolique de la capitale burkinabè : l’avenue Kwame N’Krhumah et, précisément, le Splendid Hôtel et le café Cappuccino. Les djihadistes de Al-Mourabitoune n’ont pas frappé au hasard et surtout, ils ont fait mal. Très mal.

Splendid Hôtel Ouagadougou

Cela n’arrive pas qu’aux autres. Après le Mali, où les attaques djihadistes sont quasi quotidiennes dans le nord du pays, le Burkina Faso vient de vivre son attaque terroriste la plus sanglante (après l’enlèvement, dans la province de l’Oudalan, d’un Roumain en avril 2015, l’attaque de la gendarmerie d’Oursi en août 2015 mais aussi celle de Samarogouan dans l’ouest du Burkina, en octobre de la même année). Aux environs de 19 heures, les premiers tirs ont été entendus. Quatre assaillants, habillés de noirs et cagoulés (enturbannés selon certains), ouvrent le feu le vendredi 15 janvier 2016 au Cappuccino, situé sur l’avenue Kwame N’Krumah.

Après cette première attaque du Cappuccino, les assaillants s’intéressent à l’hôtel Splendid, le plus grand de la place, situé juste en face du Cappuccino. Dans leur prise d’otages, ils abattent tous ceux qui tentent de s’échapper de l’hôtel et brûlent les véhiculent stationnés autour de l’hôtel. L’objectif, sûrement, est de dissuader et retarder toute intervention des forces de défense et de sécurité, ou toute personne qui tenterait de secourir les otages.

Video d’une dame qui a vécu l’enfer.#MMMV Posté par Mokonzi Dread sur samedi 16 janvier 2016

Des témoins présents sur place rapportent qu’une heure après, la riposte des forces de défense et de sécurité burkinabè s’est organisée. Les échanges de tirs emportent deux gendarmes burkinabè et un civil, à l’extérieur de l’hôtel. La riposte s’organise avec le renfort des forces françaises et américaines. Aux environs de 2 heures du matin, les otages sont libérés grâce au courage et à la bravoure de ces hommes.

Pourquoi l’avenue Kwamé N’Khruma

Comme d’habitude, les djihadistes n’ont pas choisi leur cible au hasard. L’avenue Kwamé N’Krumah est considérée comme « la plus belle avenue de Ouagadougou ». C’est dans cette zone que se trouve la plupart des compagnies aériennes, des hôtels, des restaurants, des entreprises et des sièges d’institutions internationales. Une grande partie des cérémonies, comme les conférences et les séminaires, s’y tiennent. Cette avenue est aussi le symbole de la bourgeoise. Elle est également connue pour ses fleurs de bitume de luxe.

Le grand marché de Ouagadougou, Rood Wooko, se trouve à moins de 500 mètres de cette avenue. L’avenue est également à moins de 15 minutes d’une porte d’entrée au Burkina, l’aéroport international de Ouagadougou. C’est aussi là que se trouve le palais de justice de Ouagadougou et le commissariat central de la capitale burkinabè. Kwame N’Krumah, comme l’ont déjà relayé les médias, est une avenue fréquentée par de grandes personnalités du pays mais aussi des Européens, principales cibles des djihadistes. En frappant cette avenue, les terroristes étaient sûrs d’attirer l’attention de la communauté internationale et de gagner la campagne de communication qui va avec. L’avenue Kwame N’Krumah est le cœur même de la capitale burkinabè.

Une attaque trop facile

 Un premier reproche : l’arrivée tardive des forces de sécurité burkinabè sur les lieux. Ce n’est qu’une heure après le début des fusillades que les forces de sécurité burkinabè sont intervenues, selon les témoins. Les terroristes, « presque des enfants » ont donc contrôlé la zone pendant tout ce temps, faisant ainsi un maximum de victimes. Par ailleurs, cela n’a pas permis de sauver ceux qui ont été asphyxiés par la fumée. Cela montre bien que les autorités burkinabè n’ont pas vraiment eu le sentiment qu’une attaque terroriste d’une telle ampleur était en cours à Ouagadougou.

Depuis l’attaque de Samarogouan, l’on a dénoncé la promiscuité et le dénuement total des forces de sécurité burkinabè qui face aux bandits n’ont pour arme que leur courage. Un meilleur équipement n’aurait peut-être pas pu éviter cet attentat, mais cela aurait peut-être permis une intervention rapide et meilleure.

Comment comprendre que des individus de cet âge (moins de 30 ans, a priori), puissent traverser tout le pays, avec de telles armes, sans être inquiétés ? Cette attaque démontre une nouvelle fois que les forces de défense et de sécurité manquent cruellement de moyens. Si les militaires français et américains n’étaient pas venu en renfort de l’équipe burkinabè, la libération des otages n’aurait pas été aussi facile et d’autres auraient perdu la vie dans cet acte de terreur.

Le mal étant désormais fait, tout Burkinabè doit se sentir responsable de la sécurité du pays.


L’enfer Libyen d’un rapatrié burkinabè

Un mois après, les Burkinabè chassés de la Guinée Conakry, 133 Burkinabè sont rentrés de la Libye, dans la nuit du jeudi 7 au vendredi 8 janvier 2016 grâce à une opération spéciale engagée par les autorités burkinabè. Ces rapatriés ont vécu un enfer en Libye.

Un mini-car transportant des Burkinabè rapatriés de la Libye
Un mini-car transportant des Burkinabè rapatriés de la Libye

Aux environs de 11 heures ce vendredi 8 janvier, de nombreux rapatriés avaient déjà quitté le site d’hébergement de l’Action éducative en milieu ouvert (AEMO), un centre du ministère de l’action sociale et de la solidarité nationale du Burkina, situé au quartier Somgandé de Ouagadougou. A l’entrée, un groupe de jeunes, les valises posés devant eux, attendent que des véhicules dépêchés par l’Etat burkinabè viennent les chercher. Au milieu  de ces  jeunes au regard perdus, l’un d’entre eux se renseigna auprès de nous sur la situation géographique de la gare de l’Est. Renseignement pris, il quitta le centre d’hébergement.

A l’intérieur, un mini-car s’apprête à démarrer avec une vingtaine de rapatriés. Plus loin, devant les salles qui ont servi de dortoirs, situées au milieu de la cours, une dizaine d’autres rapatriés attendaient également des parent pour être transportés à la gare ou passer la nuit chez eux. Ils n’avaient plus rien. Ils ne pouvaient pas non plus attendre les autres. Parmi eux, Séni Zampou, 22 ans. Habillé d’un survêtement bleu-ciel, il attend sur un table-banc d’écolier, un sachet d’eau à la main.

Il y a un an il a quitté le Burkina Faso pour rejoindre la Libye dans l’espoir de faire fortune. En quittant le purgatoire burkinabè pour l’Eldorado rêvé, c’est plutôt droit l’enfer que Séni Zampou a foncé la tête baissé. Dans ce pays, il a connu toute sorte de souffrance dont particulièrement le racisme.  Comment s’est-il retrouvé dans cette situation? « Il y a trois mois, des gens sont venus cassés notre porte, ils ont pris tous nos biens et ils sont allés nos enfermées sans rien nous dire », explique-t-il les propos remplis d’amertume. Après, cela, ils ont été conduit en prison comme des voleurs alors qu’ils n’avaient rien fait, estime-t-il.

C’est aux environs de une heure du matin que ces individus qui pourraient bien être des policiers se sont introduis chez lui, raconte-il. Ce jour-là, lorsqu’il est rentré tout fatigué du travail avec ses camarades, avant même de manger, des individus qu’ils ne connaissaient ont fait irruption dans leurs maisons. « Ils nous ont frappé et nous ont demandé où se trouvait l’argent ensuite, ils ont fouillé les maisons », poursuit Séni Zampou en tenant de faire des gestes pour montrer son incompréhension ce jour-là. Ils cherchaient donc de l’argent, pensant que ces migrants ont gagné à la sueur de leur front leur ont été volés. C’est ainsi que les maigres économies qu’ils avaient faites ont été emportés avant de les envoyer en prison.

 

Des tracasseries quotidiennes

Bien avant de devoir partir, le jeune burkinabè parti à l’aventure a dû faire face aux brimades de tout genre. Décorateur, il pensait que son talent lui ferait vivre dans l’eldorado libyen. Mais en réalité, c’est sur place que Zampou a appris le métier de décoration. Mais pour ce travail, il lui arrivait de travailler sans être payer tout simplement parce qu’il était un migrant et en plus sans papier. Son rêve était de rejoindre l’Europe, faire fortune et revenir dans son pays. Mais faute d’argent, il ne pouvait pas continuer le voyage. C’est pourquoi, le jeune homme  est resté en Libye en attendant un jour meilleur.

Dans un tel contexte, lui qui rêvait d’envoyer de l’argent à sa famille resté au pays, se demande comment faire. « les affaires que je t’ai dit, on a pris. Tu ne peux pas travailler, on va te prendre ça (argent) », regrette-t-il. Chaque jour était un jeu de cache-cache. Lorsqu’un rapatrié avait le malheur de se retrouver en prison, il peut y rester plusieurs jours s’il n’a pas un téléphone portable.

Pour aller en Libye, il a du faire beaucoup d’économies. Et Séni Zampou ce qu’il a investi pour ce voyage. Selon lui, 100 mille franc CFA suffissent pour engager ce voyage. Mais avec les tracasseries policières, les passeurs qu’il faut payer, il faut disposer d’une fortune qui aurait pu servir à créer une petite entreprise au Burkina « C’est la chance ! Tu peux dépenser 500 mille comme tu peux aussi dépenser un million de francs CFA », confie Séni Zampou.

« Pour nous, c’est dans la main de Dieu. On ne peut rien dire parce qu’on a rien. Rien du tout ».

De retour désormais au pays, il doit penser à ce qu’il va faire. Mais Séni Zampou, ne sait pas à quel saint se vouer. Il est rentré tout démunis de son périple libyen. « C’est la prison que j’ai quitté pour aller directement à l’aéroport. Façon je suis assis, c’est de cette manière que j’ai quitté la Libye », fait-il remarqué. Le bagage à côté, ne lui ’appartiendrait pas. C’est celui, d’un ami allé chercher un taxi. Lui, a eu plus de chance.

« Pour nous, c’est dans la main de Dieu. On ne peut rien dire parce qu’on a plus rien. Rien du tout. Si on avait un peu, on allait s’appuyer sur ça », déplore encore le jeune homme. A présent, il ne sait pas comment expliquer à sa famille qu’il a échoué.


Spoliés de leurs biens, des Burkinabè chassés de la Guinée

Près de 240 rapatriés de Guinée Conakry, sont arrivés à Ouagadougou. Rentrés au bercail dans le dénouement total, ces Burkinabè qui ne savent pas comment récupérer leurs biens restés dans ce pays.

Des Burkinabè rapatriés de la Guinée se battant pour des friperies
Des Burkinabè rapatriés de la Guinée se battant pour des friperies

Une natte, des friperies et souvent un sceau en main certains de ces Burkinabè chassés de la Guinée et arrivée dans la nuit du dimanche 6 au lundi 7 décembre 2015 su ruent vers trois minicars de fortune stationnés mais prêts pour mettre le cap respectivement sur Bagré, Ouahigouya et Kombissiri. Quelques-uns arrêtés devant un Peugeot bâchée arrachent des friperies offertes par le Comité National de Secours d’Urgence et de Réhabilitation (CONASUR). Âgés entre 12 et 40 ans. D’autres sont assis sur des tables-bancs attendant le car qui devrait les convoyer dans leurs destinations respectives. Ils sont venus de Siguiri zone aurifère située au Nord-Est de la Guinée où ils s’adonnaient à diverses pratiques d’exploitations de l’or. Sur près de 240 rapatriés, l’on compte 7 femmes. Parmi celles-ci, une seule une seule est arrivée à Ouagadougou. Les autres sont restées à Bobo Dioulasso.

Détenus dans la promiscuité

Assis devant un bâtiment dans l’enceinte de l’Action éducative en milieux ouvert (AEMO) située au quartier Somgandé de Ouagadougou, les coudes sur les genoux, la tête dans les deux bras, il et habillés d’un maillot et un pantalon aux couleurs du FC Barcelone, club espagnol de football. Son nom est Moustapha Sango et il fait partie des rapatriés. Ce jeune homme de la trentaine est marié et père d’un enfant. Comme pour se sentir mieux, il se met debout. « Moi, c’est le 24, (ndlr novembre 2015) quand je me suis réveillé, j’ai constaté la présence des militaires qui sont venus m’arrêtés. J’ai demandé ce qui se passait. Ils m’ont dit qu’arriver là-bas, je saurais ce que j’ai fait», confie Moustapha Sango, visiblement meurtri par ce qui lui est arrivé.

Mais arrivé dans ce qu’il appelle un camp, il constate qu’il n’est pas le seul. C’est alors qu’il demande aux autres ce qui se passe. Eux également, arrêtés par surprise n’avaient aucune idée de ce qui leur a conduit en une prison. « Au fil du temps, nous sommes devenus nombreux », souligne-t-il en ajoutant : « On a fait 12 jours en prisons. On nous donne une miche de pain le matin pour six personnes. Le soir à 18 heures, on nous remet des tasses. Si tu as la chance, tu peux avoir une tasse. On pisse là-bas. On fait tout là-bas. On ne se lave pas. On ne fait rien. Ils ne causent pas avec nous. On ne sait ce qu’on a fait », explique toujours Moustapha Sango.

Adama Nikièma lui, a passé 14 jours en prison. Il confirme les affirmations de Moustapha Sango : ils dormaient, mangeaient et faisaient leurs besoins naturels au même endroit. Ce qui lui reste au travers de la gorge, c’est que les autorités guinéennes n’ont même pas donné un ultimatum aux Burkinabè pour quitter le pays. «On ne nous a pas informé avant de nous chasser. J’ai fait 14 jours en prison. J’étais dans un trou (ndlr de mine d’or dont la profondeur peut atteindre 100 mètres). C’est lorsque je suis sorti, que j’ai vu les hommes en tenus. J’ai tenté de fuir et ils m’ont rattrapé. Je me suis même blessé dans la course-poursuite (ndlr, il montre son bras blessé) », rapporte Adama Nikièma. Parmi ces rapatriés, l’on compte des enfants. C’est le cas de Dramane Gouem, âgé de 13 ans. Il était avec son grand frère et a été arrêté dans les mêmes conditions que lui.

Ils ont perdu tous leurs biens

Le samedi 5 décembre 2015 ils sont à la frontière du Mali selon Moustapha Sango. C’est pendant le rapatriement qu’il a compris que c’est à cause de l’exploitation de l’or guinéen qu’ils sont chassés comme des bandits. A partir du Mali, la situation s’est améliorée grâce à l’intervention de l’ambassadeur du Burkina installé dans ce pays. Ce dernier a fait de son mieux pour qu’ils soient à l’aise avant de les renvoyer au Burkina Faso. « L’ambassadeur nous a remis 300 mille francs CFA. Nous nous sommes partagés. Certains ont eu 250, d’autres 500. Quelques-uns n’ont rien eu », regrette Moustapha Sango. A Bobo Dioulasso également, les autorités locales se seraient aussi bien occupées d’eux. Arrivé à Ouagadougou et en partance pour Bagré, il ne sait pas à quel saint se vouer. « Il y a nos biens qui sont restés là-bas. Nous travaillons avec des machines qui coûtent plus d’un million. Certains en ont deux ou trois, quatre voir même cinq. Moi-même j’en ai trois. Je ne sais comment faire pour récupérer mes biens », se plaint Sango.

Ces Burkinabè rapatriés de Guinée Conakry étaient-ils en règle ? A cette question, il est catégorique. « Normal ! Il y a de l’argent que nous reversons au service des mines à 40 mille francs CFA, la patente à 75 mille francs CFA , 50 mille francs CFA au service de l’environnement. Quand tu arrives, il y a un papier qu’on te remet et tu payes 50 mille francs CFA par an. D’ailleurs, on ne nous a pas demandé de payer et nous avons refusé », assure Sango.

Repartir en Guinée, ils y pensent

Certains rapatriés dénoncent les conditions de vie. Moustapha Sango veut être honnête, malgré une vie modeste, il n’avait pas de problème. Toutefois, il n’a aucune idée de ce qu’il va faire au Burkina Faso. Ses économies sont restées en Guinée Conakry. « Tout ce que tu as économisé, ils ramassent. Certains sont venus sans pièces d’identités ». Adama Nikièma ne sait pas non plus ce qu’il fera. Il a honte : « Cela fait deux ans que je travaille là-bas. Je suis revenu l’année dernière pendant la saison pluvieuse. J’avais pu honorer. Mais cette fois, je ne sais pas comment je vais arriver au village. Je ne sais comment je vais raconter mon histoire pour que l’on puisse me croire ». Emile Bancé, ressortissant de Zabré s’est vu dépouillé de tous ses biens. 

«J’avais 40 grammes d’or sur moi. On m’a fouillé et pris tous les 40 grammes. J’étais en train de travailler avec ma machine. On m’a dit que c’est justement à cause de ma machine qu’on m’a arrêté», raconte Bancé. Son objectif désormais c’est de repartir pour récupérer ses biens même si certains ont été arrêtés à la frontière et envoyer en prison à Conakry. Il n’est pas seul à le penser. Ils veulent à tout prix récupérer leurs biens acquis à la sueur de leur front.


Bonjour Monsieur le président du Faso !

C’est fait Monsieur Roch Marc Chrisitan Kaboré. Le peuple burkinabè vous a choisi comme président du Faso  pour cinq ans.  Il vous a élu avec 53,43 % des voix dès le premier tour, ce qui devrait mettre fin à une insurrection populaire qui a fait fuir le président Blaise Compaoré en octobre 2015. Vous aviez, dans les stades et les terrains de sports, crié votre compétence, vanté votre programme qui selon vous était le meilleur. Le peuple vous a élu. Mais certains doutent toujours de votre compétence à tort ou à raison. Plusieurs dossiers sont posés sur le bureau et n’attendent que vous.

#Roch_Marc_Christian Kaboré, Président du Faso Déclaration du président de la CENI.

Posté par Mouvement du peuple pour le progrès – MPP sur lundi 30 novembre 2015

Manger trois fois par jour. C’est le rêve de beaucoup de Burkinabè parce que dans votre pays, la cherté de la vie n’est plus un secret. Quand vous circulez et que vous tombez ces personnes en haillons, mendiants au niveau des feux tricolores, d’autres y passants la nuit, ils ne sont pas fous. Ils ont juste faim !

Dans mon village, certaines familles ne mangent que le soir venu parce que le grenier est vide après le mois de janvier. On ne peut plus compter sur la bonté du ciel, car les pluies se font de plus en plus rares. Les paysans ne peuvent plus aussi compter sur leurs enfants pour finir leurs vieux jours. Ils n’ont pas d’argent pour les envoyer dans les écoles sous paillote. Même les cotisations des associations des parents d’élèves (1000 francs F CFA), ils sont incapables de les payer tant la pauvreté est ambiante. Quand leurs enfants ont la chance d’arriver en classe et de dépasser la classe de CM2 c’est un casse-tête pour les parents. Dans le Sahel, au nord du pays, on préfère les envoyer garder les bœufs. L’école n’est plus un gage de réussite. Le niveau de l’enseignement a baissé. Ceux qui s’adonnent à ce métier ne le font pas par vocation. On ne pense plus qu’à son maigre salaire qu’on empochera à la fin du mois mais aussi à profiter des avantages du métier : enceinter ses élèves.

C’est souvent sur les tables-bancs de l’école que les filles, en lieu et place d’instruction et d’éducation, apprennent les vies de débauche. Elles terminent pour la plupart sur l’avenue Kouamé N’Khruma ou au Matata offrant leur jeunesse et leur fraicheur à des vieux grabataires pour de petits billets. Bonjour le SIDA !

Ceux qui malgré l’adversité arrivent à l’université, sont assurés d’avoir comme profession, chômeur. Autant les élèves sont fiers après l’obtention de leur Bac autant l’entrée à l’université surnommée Guantanamo, à cause de la dureté de ce monde fait peur. Sans bourse, la vie d’étudiant est un véritable chemin de croix : insuffisance des chambres dans les cités universitaires, manque d’amphithéâtres, insuffisance du personnel enseignant et leurs mauvaises conditions de travail, la mauvaise qualité du repas dans les restaurants universitaires, les difficultés de transport des étudiants, le contingentement des bourses, etc. La liste est longue. Il faut vous atteler à régler la crise universitaire. Et comme le dit l’autre, les Universités sont devenues des usines de chômeurs.

Pourquoi ? Parce qu’il faut frauder aux concours de la fonction publique pour espérer décrocher un emploi. Et pour quel salaire ? De toutes les façons mieux vaut vivre à crédit si on est fonctionnaire.

Ce n’est pas pour rien que tout le monde veut travailler dans le secteur privé. On a plus de chance quand on est du sexe féminin. En s’allongeant sur le canapé de l’employeur, le poste est garanti. Si on est garçon, il serait mieux d’avoir une sœur qui a des atouts. Le fonctionnaire qui réussit à payer ses factures est tout de même confronté à des problèmes de délestages et de coupures d’eau en période chaude.

Conséquence : tout le mois de mars est affronté avec peur par les Burkinabè. Dans certains quartiers, nos mamans sont souvent obligées de se taper des K.O pour avoir de l’eau à la borne-fontaine ou au robinet du quartier. Au village, elles doivent parcourir de longs kilomètres de chemins rocailleux pour obtenir de l’eau pas toujours potable.

C’est par là que tout commence. Avec le manque d’eau potable, nos populations sont soumises à toutes sortes de maladies. Quand on tombe malade au Burkina, il vaut mieux creuser sa tombe, car l’on risque de mourir avant d’arriver à l’hôpital. Il faut braver ces routes rocailleuses et souvent épineuses, pour arriver dans les centres de santé. Là encore, il faut faire face au manque de plateaux médicaux, l’insuffisance du personnel soignant, l’absence de pharmacie. Même quand ces pharmacies existent, nos parents n’ont pas assez d’argent pour régler les ordonnances. C’est pourquoi certains préfèrent se soigner chez le guérisseur du village ou font confiance à l’église pour soigner un simple palu.

Quand on a de la chance, l’infirmier du village vous trouve quelques comprimés de remplacement. Sinon, il vous envoie à des centaines de km de là. « Il faut aller en ville » tant le pays manque d’infrastructures sanitaires.

Simon Compaoré : « Il faut faire en sorte que le changement tant attendu par les uns et les autres soit au rendez-vous… »

Posté par Mouvement du peuple pour le progrès – MPP sur lundi 30 novembre 2015

Le peuple vous attend sur le chantier de la justice. Les 30 et 31 octobre 2014, des Burkinabè sont tombés pour faire partir le président Blaise Compaoré que vous connaissez bien. Au mois de septembre 2015, d’autres sont encore tombés sous les coups de balle du régiment de sécurité présidentielle (RSP). Les Burkinabè attendent que justice soit faite. Les Burkinabè attendent aussi que justice soit faite sur les dossiers Thomas Sankara, Dabo Boukari, Norbert Zongo. Ils souhaitent aussi que justice soit faite sur tous les crimes économiques et de sang qui ont émaillé les 27 ans de règne du président Blaise Compaoré. Justement Blaise Compaoré sera-t-il jugé ? Les Burkinabè attendent de savoir comment seront traitées toutes les affaires de détournement de parcelles et de conflits fonciers.

Les défis à relever sont immenses. C’est au pied du mur qu’on attend le vrai maçon. Certains qui digèrent mal votre élection mettront des peaux de banane sur votre chemin, d’autres de bonnes fois tenteront de vous aider. Mais si une maison est mal construite, ce n’est pas la faute aux ouvriers.


Putsch manqué au Burkina : Gilbert Diendéré aurait reçu 160 millions de F CFA

Le rapport de la commission d’enquête du putsch manqué du jeudi 16 septembre 2015 circule en ce moment sur internet. De ce rapport, il ressort que le coup d’Etat du 16 septembre 2015 a été planifié, des dirigeants de partis politiques sont impliqués et révèle que le général Gilbert Diendéré a reçu des soutiens extérieurs.

 

Le Coup d’Etat manqué du mercredi 16 septembre 2015 a été planifié. C’est la conclusion que tire le rapport supposé de la commission d’enquête qui circule ces derniers temps via Internet. Ce rapport révèle que la proclamation du coup d’Etat a été rédigée bien avant le mercredi 16 septembre 2015, date à laquelle les putschistes sont entrés en action. Après la prise en otage des ministres lors du conseil des ministres qui se tenait ce jour-là, le général Gilbert Diendéré aurait été le premier informé. C’est lui donc qui aurait informé la hiérarchie militaire et les autres membres du régiment de sécurité présidentielle. Par la suite, il a donc tout mis en œuvre pour justifier le coup d’Etat en avançant des mobiles sociaux politiques.

Ce rapport accuse le général Gilbert Diendéré d’avoir donné de la prise d’otages des membres du gouvernement le 15 septembre 2015. Ce dernier a pris la tête de la junte et a dissout les institutions de la Transition. Le rapport l’accuse d’avoir fait venir de la Côte d’Ivoire et du Togo des armes et un sac de voyage contenant de l’argent.

Gilbert Diendéré a reçu 160 millions de F CFA

Le général Gilbert Diendéré aurait bénéficié d’appuis extérieurs qui se manifestent en des cautions morales et politiques et la fourniture de matériels de maintien de l’ordre pour réprimer ceux qui manifestaient contre le coup d’Etat. « Il a refusé de donner l’origine de 160 000 000 F CFA qu’il dit avoir reçu des mains d’amis », souligne ce rapport. Djibril Bassolet aurait établi des connexions avec des forces étrangères pour soutenir le coup d’Etat et aurait aussi financé la résistance des militaires du RSP.

Le colonel Major Boureima Kéré aurait donné la première lecture du projet de proclamation du coup d’Etat devant la hiérarchie militaires et les médiateurs nationaux. C’est lui également qui aurait intimidé les aux jeunes officiers qui planifiaient la descente et leurs troupes sur Ouagadougou. C’est encore Kéré qui aurait organisé la mission hélicoptère pour aller récupérer le matériel de maintien de l’ordre et le sac de voyage contenant environs 50 millions de francs CFA à la frontière ivoiro-burkinabè.

Bamba a empoché 5 millions F CFA

Lors du coup d’Etat, l’une des personnalités les plus en vue est le porte-parole du Conseil national de la démocratie le médecin lieutenant-colonel Mamadou Bamba qui a lu les différents communiqués et a reçu la somme de 10 millions de francs CFA de la part de Gilbert Diendéré au domicile de ce dernier dont 5 millions de francs CFA pour lui-même et le restant pour le colonel Abdoul Karim Traoré. Ce rapport affirme que certains partis politiques ont ouvertement soutenu le coup d’Etat à travers des déclarations, des manifestations violences, des financements et activités diplomatiques.

Installée officiellement le 12 octobre 2015, la commission d’enquête avait 30 jours pour rendre son rapport. Les enquêtes ont entendu au total 124 personnes sur toute l’étendue du territoire. Les acteurs principaux de ce putsch sont, selon le rapport le général de Brigade Gilbert Diendéré, les adjudants-chefs Major Eloi Badiel, Moussa Nébié dit Rambo, Betamba Meda, les adjudants Jean Florent Akowé Nion, Koessé Ouekouri, les sergent-chef Roger Koussoubé dit le Touareg, Mahamado Bouda, Ali Sanou, Adama Diallo, les sergents Zacharia Sangotouan et le caporal Boureima Zoureima.

Le rapport constate plusieurs rebondissements dans ce coup de force raté avec l’entrée en jeu d’acteurs militaires, politiques, coutumiers et religieux qui ont mené des «tractations délicates et périlleuses ». Au plan interne, les négociations ont surtout été menées par la Commission de réflexion et d’appui aux décisions (CRAD) du ministère de la défense nationale et des anciens combattants appuyée par l’ancien chef d’Etat Jean-Baptiste Ouédraogo.

Le rapport révèle que la hiérarchie militaire a refusé de soutenir le coup de force. Ce qui a amené Gilbert Diendéré « a usé de manœuvre dilatoires pour maintenir les éléments de l’ex RSP à sa cause ».

Les médiations au niveau international ont été assurées essentiellement par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) accompagné de l’Union Européenne, de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et de certaines chancelleries. On constate que ce rapport ne revient sur les contenus et le déroulement de ces différentes négociations mais insiste sur le fait que : « L’Union Africaine pour sa part avait fermement condamné la tentative de coup d’Etat, en qualifiant ses auteurs de terroristes et en prenant des sanctions contre eux ».

La hiérarchie militaire égratignée

Resté laxiste, de jeunes officiers (même s’ils ne sont pas nommés) ont pris des initiatives pour une opération militaire contre les putschistes après l’appel au patriotisme des forces vives de la nation, le nombre croissant des victimes civiles et la frustration par rapport à l’ex RSP au sein de l’armée. La prise de responsabilité des jeunes officiers a été l’actuel décisif du début du dénouement heureux d’une crise qui allait entraîner une guerre civile.

Et pourtant, dans la nuit du mercredi 16 au jeudi 17 septembre 2015 la hiérarchie militaire a refusé d’assumer mais celle-ci a fait preuve d’ambivalence. « Si la hiérarchie militaire avait pu prendre des mesures non équivoques dès les premiers moments, conformes à son refus du coup d’Etat, les évènements n’auraient certainement pas connu le même cours», dit le rapport sans pour autant préciser quelle tournure les évènements auraient pris. Pris de cours par les jeunes officiers, la hiérarchie militaire a su se ressaisir.

12 morts, 211 blessés recensés

Il a fallu toutefois recourir à « l’assaut final » parce que les opérations de désarmement ont connu quelques difficultés à cause de certains éléments incontrôlés qui ont interrompu l’opération en cours. De nombreuses infractions ont été retenues contre les putschistes et leurs complices. Il s’agit entre autre de trahison, les actes terrorismes, complicité d’acte de terrorisme, enlèvement et séquestration, le complot militaire, la révolte, le refus d’obéissance, la violation de consignes. Selon ce rapport, douze personnes ont perdu la vie lors de ce putsch   avec 211 victimes de coups et blessures.

Le rapport oublie les résistants

Toutefois, ce rapport compte beaucoup d’insuffisances. Il n’apporte d’informations sur comment le coup d’Etat a été planifié, comment se sont déroulés les différentes négociations. Le plus grave, c’est que le rapport ne fait pas cas de la résistance organisée par la société civile sur le terrain. Ce qui aurait permis de mieux comprendre les motivations des putschistes. Les différentes complicités ne sont pas complètement définies. L’on ne voit pas clairement la part de responsabilité de ceux qui ont soutenu le coup d’Etat à travers des déclarations et autres actes.


Issaka Zampaligré : « Je propose qu’on mette Kossyam en location »

Le candidat indépendant Issaka Zampaligré était le deuxième invité de l’émission : « Un candidat, un programme » diffusée le dimanche 15 novembre 2015 sur les antennes de la télévision nationale du Burkina. Issaka Zampaligré bien qu’ayant du mal à convaincre les deux journalises sur son programme de société «Ensemble pour un Burkina de justice d’équité et de prospérité» proposent un système quelques fois un système innovant qui est une fusion entre les pratiques culturelles traditionnelles et modernes.

Issaka Zampaligré compte fusionner la justice traditionnelle et moderne
Issaka Zampaligré compte fusionner la justice traditionnelle et moderne

Gouvernance/ Justice: Le candidat Issaka Zampaligré est parti du constat qu’ «Un pays qui vit sans justice est voué à la guerre ». Il relève que les Burkinabè décrient une justice aux ordres de l’exécutif et corrompue etc. « Mon ambition c’est de faire en sorte que la justice revête ses traits de noblesse. Il faut revoir les moyens mis à la disposition de la justice », affirmé le candidat indépendant. Sur cette question l’inquiétude des deux journalistes Aissata Sankara et Galipe Somé se réside dans le fait que ce dernier ne prévoit pas la construction de tribunaux alors qu’il existe 24 au Burkina sur 45 prévus. Issa Zampaligré tranche avec plusieurs autres de ses concurrents en ne se basant pas sur la construction des infrastructures : « Si les juridictions sont mises à la disposition du public fonctionnaient bien et régulièrement, nous n’allons pas décrier les modes de gouvernance de la justice. C’est parce qu’aujourd’hui, la justice est vu comme un rempart de démons où les procès sont monnayés à coup d’argent ». Il dénonce une justice à deux ou même plusieurs vitesses qui créent une crise de confiance entre le justiciable et les juridictions. C’est pourquoi à ce niveau il pense qu’il faut renforcer l’assistanat gratuit de la part de l’Etat afin que tout justiciable dépourvu de moyens financiers puisse comprendre les mécanismes de la justice.

Jumeler les tribunaux traditionnels et modernes

En plus de cela, l’une de ses propositions est de jumeler la justice moderne et celle traditionnelle. Il relève qu’ «il  coexistent dans notre pays deux types de tribunaux. Il y a la chefferie traditionnelle qui arrange à longueur de journée des procès sous l’arbre à palabre des justiciables. Ils ne sont pas moins burkinabè que ceux qui sont en ville ». C’est pourquoi Zampaligré, chef de village de son état pense que la justice rendue par les chefs traditionnelles peuvent être un apport aux juridictions modernes. « Je compte utiliser ces canaux pour entrer dans le tissu du monde rural et permettre une sensibilisation et une formation de tous les citoyens », soutient Zampaligré. Il a d’ailleurs pris l’exemple du rôle joué par le Mogho Naba Baongho lors du coup d’Etat manqué du 16 septembre 2015 qui a permis d’éviter un affrontement. Il en a profité pour aborder la question de gouvernance pour lequel il pense qu’il faut responsabiliser chacun. «Quand on parle de gouvernance, on parle de responsabilisation » dans la politique, l’administration, la gestion des finances, comptabilité dépense de l’Etat pour plus de transparence.

Sur le sujet de la sécurité, Issaka Zampaligré compte recruter 20 mille gendarme et policiers parmi lesquels les 136 radiés en 2006 pendant la durée de son mandat. Pour lui ses radiés « réclamaient plus de justice sociale ». En plus de cela, Issaka Zampaligré compte sur la coopération sous régionale pour faire barrage aux frontières poreuses des Etats de l’Afrique de l’Ouest.

A moins de 10 km de Ouagadougou, il y a des gens qui boivent de l’eau boueuse

Réduction du train de vie l’Etat : Issaka Zampaligré sort encore de l’ordinaire. « Je propose qu’on mette même en location Kossyam qui est un gros palais inutile alors que la population git dans les cases », a-t-il martelé. Pour lui, les bureaux doivent être adaptés à nos modes de vie. Les journalistes n’ont pas fouillé pour comprendre comment l’invité comptait gérer son administration. En réalité, Maitre Bénéwendé Sankara en 2010 avait aussi fait proposition pareille. Il avait dit qu’il n’utiliserait pas le palais présidentiel de Kossyam s’il était élu.

Cependant, Issaka Zampaligré est arrivé sur le plateau de la télévision nationale avec des phrases chocs toutes faites qu’il tentait de placer entre temps. Certaines d’entre elles ont fait mouche. Par exemple, il dit ceci : « a moins de 10 km de Ouagadougou, il y a des gens qui boivent de l’eau boueuse ». Une phrase répétée à deux reprises pendant l’émission.

Education : Issaka Zampaligré n’était pas aussi claire dans vision quand il s’est agît de parler d’éducation. Toutefois, l’on constate qu’il ne se présente pas en un Président « tout puissant », porteur de toutes les solutions. C’est dans ce cadre qu’au niveau de l’enseignement, il compte réunir le monde universitaire pour comprendre comment ces derniers peuvent accepter que 1000 étudiants suivent des cours dans un amphi. En réalité, pour lui, c’est au monde universitaire de trouver des solutions à leur problème et lui en tant que Président se chargera de la phase pratique.

Et pour garantir une santé de qualité aux Burkinabè, le chef de village pense que la construction des hôpitaux est un jeu enfant. Selon lui, il faut juste ventre les voitures de marque Patrol pour construire au moins deux centres de santé. En même temps, il pense associer la pharmacopée traditionnelle à celle moderne constatant que les Burkinabè se soignent à l’indigénat dans les villages.

Une réouverture de la SOFITEX en vue

Agriculture : Une autre idée géniale mais dont le financement devrait poser problème, c’est l’attribution d’une charrue à chaque famille et aussi un tracteur à chaque village. Un projet qui semble s’être inspiré du projet « Huit mille villages, huit forêts ». Comment financer un tel projet? Issaka Zampligré pense qu’il faut reconvertir les dons (ordinateurs, fusils) que certains pays offrent au Burkina Faso dans le cadre de la collaboration. Une allusion en quelque sorte à l’attribution de tablettes aux députés du gouvernement burkinabè sous Blaise Compaoré. Une idée aussi similaire à celui proposé la veille par le candidat Zéphirin Diabré qui compte créer la Société nationale d’équipement agricole (SONEA).

Cependant, sur les sujets des mines, de l’énergie, du foncier, l’invité du jour n’a pas fait de proposition claire. Les journalistes ont vraiment eu du mal à saisir le fil de sa pensée. Au niveau de l’industrie, il n’a pu établir une vision précise même s’il pense qu’il faut rouvrir la Société des fibres et textiles (SOFITEX) à Koudougou.

Dans l’analyse, le projet de Zampaligré Ensemble pour un Burkina de justice d’équité et de prospérité semble être basé sur des valeurs de sobriété. Mais ce dernier a eu du mal à faire comprendre son concept aux journalistes souvent beaucoup trop attachés aux questions de chiffres. Ce qui a donné une impression de manque de sérieux dans la rédaction de son programme.

Cependant certaines ratées de l’émission sont aussi imputables aux journalistes qui apparemment n’ont pas respecté le candidat en semblant banaliser certaines de ses appréciations. 

Quelques phrases chocs de Issaka Zampaligré

« Je suis de ceux qui pensent que lorsqu’on émet un billet de 1000 francs dans la journée, ce billet retourne en occident ce soir »

« A 10 km, les gens dorment à même le sol »

« A moins de 10 km de Ouagadougou, il y a des gens qui boivent de l’eau boueuse »

« Le train de vie de l’Etat, c’est que tout le monde puisse se serrer la ceinture »


Zéphirin Diabré: « Je suis pétri des valeurs de l’insurrection populaire »

La première émission « Un candidat, un programme », initiée par le Conseil supérieur de la communication (CSC) et diffusée sur les antennes de la télévision nationale du Burkina a reçu comme premier candidat, Zéphirin Diabré de l’Union pour le Progrès et le Changement (UPC). C’est avec assurance que l’ancien chef de file de l’opposition a défendu son programme.

Zéphirin Diabré candidat présidentielle Burkina

Pourquoi les Burkinabè devraient voter pour Zéphirin Diabré ? C’est l’une des dernières questions posées au candidat de l’Union pour le Progrès et le Changement (UPC). Alors qu’on pensait qu’il évoquerait son programme, Zéphirin Diabré évoque son parcours. Il relève qu’il a occupé des postes ministériels au Burkina Faso pour montrer ainsi son expérience dans la gestion de l’affaire de l’Etat. Il a aussi rappelé son cheminement dans l’opposition pour conduire le combat contre la mise en place du Sénat et la modification de l’article 37. « Je suis pétri par les valeurs de l’insurrection », a martelé Zéphirin Diabré comme pour afficher son intégrité. Il a d’ailleurs appelé ceux qui auraient des dossiers sur lui à les présenter.

Zéphirin Diabré, en une heure de temps, a dû répondre à des questions sur quatre points. A savoir, le « burkindlim », le nom de son projet de société, les questions sociales, l’économie et sa vision pour le Burkina s’il était élu.

1 – Le « burkindlim »: « Un peuple, une génération, c’est toujours un héritage historique, culturel et surtout un héritage de valeurs ». C’est partant de cette appréciation que Zéphirin Diabré explique le sens de son projet qui veut réinstaurer le « burkindlim », une expression en langue mooré qui revêt les valeurs de l’intégrité. Une occasion pour lui de montrer qu’il partage les valeurs sankariste se basant sur la philosophie de Thomas Sankara (sans forcément être un sankariste). Selon lui, le burkidlim est une philosophie qui permet de définir ce que doit être le comportement du Burkinabè, ce qui implique de défendre la fibre nationale. « Si on ne le fait pas, nous créons une société qui n’a pas d’avenir ». Cette philosophie qui devrait être adoptée à l’issue d’une conférence nationale ressemble bien à un autre concept, source de la crise qu’a connu la Côte d’Ivoire : l’Ivoirité.

 

Si cette référence à la philosophie est un appel à l’unité nationale, Zéphirin Diabré n’a toutefois pas montré en quoi le Burkindlim, qui défend le concept de la sobriété, tranche avec le luxe dans lequel il mène sa campagne. Le président de l’UPC s’est mal défendu : « Je viens de parcourir 16 provinces en une semaine comment voulez-vous que je le fasse ? ». Il aurait encore pu saisir la balle au bond lorsqu’Aubin Guébré a évoqué le train de vie de l’Etat. Mais pour Zéphirin Diabré : « La société est dans son ensemble gangrénée par ce mal ».

Dans ce volet, en plus des questions culturelles avec la possibilité de faire voyager les lauréats de la Semaine nationale de la Culture (SNC), il a aussi développé sa vision du sport. Zéphirin Diabré veut créer des «plateaux diverses» qui permettraient de développer plusieurs disciplines dans les communes. Un projet intéressant. Cependant, l’occasion ne lui a pas été donnée de dire comment cela devrait se mettre en place.

2 – Les secteurs sociaux : Sur le plan de l’éducation, Zéphirin Diabré s’est d’entrée de jeu montré favorable au continuum du système Licence Master Doctorat (LMD) qui fait actuellement débat au Burkina. Il estime que ces concepts sont bons mais leurs applications posent problème à cause du manque d’infrastructures et de matériels. « Si vous voulez attendre d’avoir tous les moyens pour mettre en œuvre la réforme, vous n’allez rien faire », explique-t-il. L’une de ses ambitions est d’amener le ratio à 500 étudiants pour cent mille habitants. Même si ses ambitions sont beaucoup trop grandes, l’invité du jour a fait comprendre que son document a été rédigé en 1994 et qu’il s’agit de donner à mettre à jour.

Sur les questions sanitaires, Zéphirin Diabré pense qu’on ne peut pas offrir la gratuité des soins aux Burkinabè sauf les soins d’urgence. « Mettre au monde un enfant ne doit pas être une occasion de dépenser de l’argent », a dit-il dit.

Sur la question de l’emploi, le candidat de l’UPC annonce qu’il compte créer 140 000 emplois pendant son mandat, soit cinq mille par an. Il constate trois sources d’employabilité des jeunes : les Concours de la fonction publique, le secteur le privé et l’auto-emploi. « L’Etat ne peut pas embaucher tout le monde », souligne Diabré. Dans le secteur privé, il faut compter sur les investisseurs et faire en sorte que les Burkinabè sachent qu’un charpentier ou un menuisier peut mieux vivre qu’un fonctionnaire. Mais à ce niveau, Diabré ne dit pas comment la politique sera mise en place. A travers la réforme du système éducatif ?

3 – Economie : Economiste de formation, c’était en principe son terrain de prédilection. A ce sujet, Diabré compte créer un ministère du plan, qui a déjà existé de par le passé au Burkina Faso, pour assurer la liaison étroite avec le secteur privé et définir les secteurs porteurs. Conscient que le Burkina a besoin d’investissement, Zéphirin Diabré pense qu’il faut assurer les investisseurs. Sur cela, il se base sur des arguments subjectifs et vagues comme s’il était facile de convaincre un investisseur. En parlant de celui qui sera élu « s’il dit clairement qu’il veut un pays où l’initiative privée est encouragée, il viendra ».

Il pense néanmoins qu’il faut compter sur ses proposes en force. Et comme idée intéressant, il pense qu’il faut encourager les jeunes entrepreneurs. Cela à travers l’octroi à ces derniers d’un pourcentage de la commande publique et aussi, faire en sorte que ce ne soit pas toujours les mêmes qui sont retenus.

Sur le plan agricole, Zéphrin Diabré pense qu’il faut passer de la daba à la charrue. C’est pourquoi, il a en projet la création de la société nationale d’équipement agricole (SONEA) qui va faire en sorte qu’on puisse mettre à la disposition des paysans du matériel monté sur place et à moindre frais. Il a aussi relevé des potentialités. D’après lui, il y a 250 mille hectares de terre à irriguer et 500 mille hectares de baffons aménageable.

Cependant, en abordant la question des industries, Zéphirin Diabré pourrait perdre des points auprès des Bobolais. Alors qu’une certaine opinion dans la ville de Sya estime que la ville de Bobo Dioulasso est délaissée avec les unités industrielles qui se ferment Zéphirin Diabré réfute cet argument. « Quand les unités se meurent, ce n’est pas l’Etat qui les fermes », réplique Diabré qui pense qu’il n’y a pas de complot que la ville de Bobo Dioulasso. Si cela est juste, la manière de le dire pourrait laisser croire que cette partie du Burkina n’occupe pas une place importante dans son programme. Néanmoins, Bobo Dioulasso fait partie des « zones d’économies spéciales » que compte mettre en place Zéphrin Diabré.

Sur la question des mines, Zeph tranche avec une certaine conception des populations locales qui souhaitent que les ressortissants d’une localité minière puissent avoir une place dans les sociétés minières dès leurs installations : « Ils sont tous des Burkinabè ». Et pourtant, beaucoup de conflits dans les zones minières sont parties du fait que les populations locales estiment qu’ils ne bénéficient pas assez des retombées. L’on constate donc qu’à force de vouloir sortir de ces questions d’éthnicisme, de régionalisme, le candidat de l’UPC glisse sur des terrains dangereux.

Vision pour le Burkina : Zéphirin Diabré rêve d’un pays qui sera bâtit par tous les Burkinabè quel que soit leurs bords. Interrogé sur la participation de la diaspora, il en a profité pour parler indirectement des refugiés. Pour lui, tous peuvent contribuer à construire le Burkina Faso mais il faut la vérité, la justice avant le pardon. Au niveau de la coopération, il estime qu’il faudrait que certaines coopérations soient revues. Un clin d’œil surement à la Chine Taiwan.


Au cœur de la Présidentielle : Blaise Compaoré sera jugé selon les candidats

Les Burkinabè ont pu suivre l’acte 3 de l’émission «Au cœur de la présidentielle» avec les candidats Jean Baptiste Natama et Françoise Toé indépendants, Saran Séré Sérémé du Parti pour le développement et le changement (PDC) et un représentant du candidat Ablassé Ouédraogo en la personne de Roch Ouédraogo. La bonne gestion du débat par les deux journaliste à pousser les invités dans leur dernier retranchement.

Tous les candidats sont d'accord pour juger Blaise Compaoré
Tous les candidats sont d’accord pour juger Blaise Compaoré

Gouvernance : 25 ministres pour Françoise Toé, 16 pour Natama

La question de la gouvernance a été le premier sujet abordé par lors de l’émission « Au cœur de la présidentielle ». Le représentant du Faso Autrement Roch Ouédraogo, affirme qu’il s’agit de faire en sorte que les Burkinabè sachent ce qui s’est passé au Burkina. C’est pourquoi ce parti va commanditer un audit des projets et programmes des dix dernières années au Burkina Faso et des grandes sociétés de l’Etat. Ces résultats seront publiés dans les six mois à suivre. Si son candidat Ablassé Ouédraogo souhaite restaurer l’autorité de l’Etat au Burkina, il compte aussi s’investir dans la réconciliation. « Nous assistons une bipolarisation des rancœurs et il faut éviter tout esprit de triomphalisme d’un camp sur un autre », a lancé Roch Ouédraogo.

Françoise Toé compte mettre en œuvre les recommandations de la Comité nationale des réformes et de la réconciliation (CNRR). L’éthique est importante dans la gestion de l’Etat à son avis : « tant que les choses ne seront pas fait dans les règles de l’éthique, on ne peut pas assurer la bonne gouvernance. Le projet de société vise pour objectif d’assurer le développement endogène du Burkina Faso». Françoise Toé compte s’investir dans la lutte contre l’impunité, la corruption. Son gouvernement d’une large ouverture sera constitué de 25 membres.

 Jean-Baptiste Natama constate que la situation que vit le Burkina est consécutive à la mal gouvernance. « Pour que le pays puisse repartir sur de bon pied, il faut nécessairement donner des signes forts en matière de promotion de la bonne gouvernance qui commencent par la moralisation de la vie politique nationale, la promotion des valeurs, qui sont des valeurs d’intégrité d’honnêteté et de solidarité des Burkinabè ». Et pour réduire le train de vie de l’Etat, son gouvernement sera composé de 16 membres paritaire. Interrogé sur sa collaboration avec l’ancien régime, Jean-Baptiste Natama nie. « Je n’ai jamais été membre d’un gouvernement, je n’ai jamais été membre de l’assemblée nationale, je n’ai jamais été maire, je n’ai jamais été conseillé. Je suis nouveau sur la scène politique », a résumé Natama. Mais pour Remy Dandjinou l’un des journalistes, son passage à la tête du Mécanisme d’Evaluation par les Paires (MAEP) pourrait s’expliquer par le fait qu’il avait des accointances avec Blaise Compaoré. Mais selon Natama, il s’agit d’un « sacrifice » et un acte patriotique de servir au MAEP tout en affirmant que le rapport a été véridique et posait les problèmes soulignés aujourd’hui.

Sur la question de sa collaboration avec Blaise Compaoré, Saran Séré Sérémé affirme que le « système présidentialiste », ne permettait pas à un seul individu du système de faire changer les choses. « La justice étant un bras du gouvernement, elle ne pouvait pas être neutre », souligne la Présidente du PDC. Saran Séré Sérémé rappelle qu’elle a quitté le navire de l’ancien régime lorsqu’elle a constaté des rives.

Roch Ouédraogo, représentant de Ablassé a abordé les mêmes arguments que Natama puisque son candidat a été ministre des affaires étrangères dans le gouvernement de Blaise Compaoré. « C’est par patriotisme qu’Ablassé Ouédraogo a accepté de venir travailler pour le Burkina Faso », précise Roch Ouédraogo.

Blaise Compaoré va répondre devant la justice

l«Notre préoccupation, c’est d’arriver à éradiquer l’impunité et la corruption au Burkina Faso », a répondu Françoise Toé lorsqu’elle a été interrogée sur la question du sort réservé à l’ancien Président du Faso Blaise Compaoré. Selon elle, tous les acteurs appelés par la justice devront répondre : « toute personne qui a déposé des actes susceptibles d’être qualifiés de délit de crimes». Pour Natama cette question de « la justice ne saurait se limiter au Président Compaoré »

« Sous la présidence Ouédraogo, aucun Burkinabè ne sera au-dessus de la loi. Cela veut dire que le Président Compaoré est appelé à répondre à la justice burkinabè, il répondra de ses faits et actes. Nous n’allons pas faire d’entraves à la justice », assure Roch Ouédraogo.

Saran Sérémé s’est inscrite dans la même logique. «Toute personne qui a pu poser des actes en porte-à faux avec la loi devra répondre ses actes. Chacun doit apprendre à s’assumer devant l’histoire». Toutefois, elle croit en une possible réconciliation.

Économie: mettre l’accent sur l’industrialisation 

Pour redresser l’économie du Burkina Faso, Françoise Toé qui s’appuie sur le programme du PDP/PS compte créer des lycées agricoles, même s’ils existent déjà, et mieux les faire fonctionner pour augmenter la productivité. Natama constatant que les indicateurs sociaux sont bas pense qu’il faut identifier les déterminants de la croissance économique « à partir de là vous identifier les leviers qu’il faut actionner ». Selon elle, 80% des Burkinabè vivent de l’agriculture et cette même couche produit 30% du produit intérieur bruit. C’est pourquoi, elle pense qu’il faut accroitre la productivité dans le milieu rurale qui pourrait résoudre l’employabilité, l’accès à la terre,

Saran Séré Sérémé pense qu’il faut importer les technologies, s’ouvrir à l’industrialisation agro-alimentaire qui va résoudre par ricoché l’employabilité des jeunes. Elle préconise la mise place d’un système de formation professionnalisant à partir des départements et non des régions.

Le représentant de Ablassé Ouédraogo relève qu’il faut investir dans le capitale humain, restructuration du système éducatif. Il propose la mise à disposition des Burkinabè du monde rurale des outils adaptés, un circuit de distribution de leur produit. Tout cela devrait permettre « au cours de la première année de gouvernance, qu’on puisse porter le taux de croissance du pays à 8% (…) en investissant sur les petits emplois à caractère intensifs ». Sur ce sujet, Françoise Toé compte faire en sorte que les populations bénéficient des retombés en revoyant les conventions signées et en misant sur les infrastructures.

Un plan pour les générations futures à travers les mines

Jean-Baptiste Natama veut rompre avec les pratiques. « Il faut délier les recettes minières des recettes publiques pour éviter le phénomène de croire qu’il y a un accroissement de la recette publique qui entraîne un accroissement de la dépense publique», résume-t-il en ajoutant qu’il faut créer des ressources pour les générations futures.

Saran Séré Sérémé pense aussi qu’il faut consacrer essentiellement les recettes minières dans les infrastructures d’avenir tout en investissant dans le social, dans les zones d’exploitation minière. Elle ne comprend pas pourquoi en avec le boom minier, que le gramme d’or soit passé de six mille 500 francs CFA à 28 mille francs CFA alors que les conventions signées n’ont pas changé. C’est pourquoi, « l’amazone de Tougan » pense rediscuter certaines conventions avec les exploitants.

 

Roch Ouédraogo relève qu’il faut revoir la transparence dans le permis d’exploitation en adoptant un cahier de charge. Concernant toujours les mines, il pense aussi qu’il faut réorganiser l’exploitation artisanale. « Il faut faire en sorte que les recettes minières qui rentrent au niveau du trésor public soit orientées vers les services sociaux de base comme l’éducation, la santé », mentionne Roch Ouédraogo tout en tenant compte des générations futures.

Le tissu industriel faible voire inexistant

Françoise Toé insiste sur la régulation les autorisations d’importation de produit déjà produit aux Burkina Faso ce qui va contribuer à résoudre le problème de l’employabilité. Le candidat Natama incite à la création des conditions de l’éclosion et de développement des industries. Le point essentiel pour atteindre cet objectif est de résoudre les questions de l’énergie. Natama constate tout de même comme entrave, la faiblesse du capital humain. « Si vous n’avez pas un capital humain de qualité vous ne pouvez pas promouvoir l’industrie ».

La redynamisation du secteur de l’industrie est une préoccupation du Faso Autrement. Roch Ouédraogo pense à la création d’entreprise pour réduire l’exportation et transformer les produits sur place. « On ne fait que transporter les balles (ndlr de coton) vers les ports. Ce n’est pas normal ». En abondant dans le même sens, Saran Séré Sérémé relève que le Burkina Faso, premier pays africain producteur de coton n’a pas d’industrie de transformation. Pour encourager l’industrialisation du Burkina, elle souhaite soutenir les entreprises à travers des subventions. « Au Burkina Faso, nous avons plus prioriser l’importation de produit qui apportait à certaines personnes de tel sorte que personne n’avait envie d’œuvrer à ce que l’industrialisation soit effective », a asséné Saran Sérémé.

Secteurs sociaux : l’éducation la clé

« L’éducation est la clef de tout », souligne Jean-Baptiste Natama (comme pour faire référence à Lucky Dube qui disait : education is key. Pour lui, l’éducation peut aussi résoudre les problèmes de santé. Partant de l’importance de l’éducation Françoise Toé va promouvoir l’éducation pour tous si elle est élue dans un système éducatif de qualité. Estimant que toute la chaîne est défaillante, le Faso Autrement va revoir tout le système éducatif burkinabè dans sa globalité.

Sur le plan social, Saran Séré Sérémé pense s’attaquer à deux fronts : la santé et l’éducation. « J’ai un problème lorsque je vois une mère mourir en donnant la vie », appuie-t-elle. La présidente du PDC a insisté sur les soins de santé infantile, maternelle de la reproduction. Sur le plan de l’éducation, elle prévois le renforcement de la formation technique.

Critiques

Le journaliste Remy Dandjinou a bien mené le débat en poussant les invités dans leur retranchement, en relevant souvent des failles dans les réponses de ses interlocuteurs. Il a montré qu’il avait une bonne culture général en rappelant par exemple à Françoise Toé que Blaise Compaoré avait déjà mis un place le projet des lycées agricoles, la relecture du code minier. Les deux journalistes ont insisté sur le « comment » de la mise en œuvre des différents projets des candidats. Cette fois les candidats n’ont pas passé leur temps à critiquer le régime déchu mais à faire des propositions plus ou moins concrètes.

Toutefois, il faut le reconnaitre Remy Dandjinou a noyé Soumaila Ouédraogo assez timide. Par exemple, alors que ce dernier tente de poser une question à Françoise Toé qui n’avait totalement fini de développer son idée sur la question économique, Remy décide de remettre la parole à Jean-Baptiste Natama. Les prochains modérateurs doivent faire preuve de plus complicité. En voulant amener les invités à mieux s’expliquer, les deux journalistes n’ont pu épuiser les sujets prévues.


« Au cœur de la présidentielle »: tirs groupés sur le MPP

L’émission de débat de la télévision nationale du Burkina « Au cœur de la présidentielle » mettant en scène les candidats à l’élection présidentielle du 29 novembre 2015 a reçu comme invité Simon Compaoré représentant du candidat du Mouvement du peuple et du progrès (MPP), Roch Marc Christian Kaboré, Victorien Tougouma MAP (Mouvement africain des peuples) et Boukaré Ouédraogo, candidat indépendant, ce lundi 9 novembre 2015. Les deux derniers qui avaient face à eux un ancien dignitaire du régime de Blaise Compaoré à savoir Simon Compaoré ont passé leur temps à attaquer Simon Compaoré et son parti plutôt que de convaincre sur le projet qu’ils proposent aux Burkinabè.

D’entrée de jeu dans cette émission supposée être un débat, les candidats Victorien Tougouma et Boukaré Ouédraogo tels des rugbymen se sont rués sur Simon Compaoré et son parti le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) anciens dignitaires du régime de Blaise Compaoré. Victorien Tougouma accuse le MPP de coller des affiches sur des arbres, des murs comme celui du Salon international de l’artisanat et de la culture (SIAO). Les deux candidats ne comprennent pas non plus pourquoi Simon Compaoré est le représentant de Roch Marc Christian Kaboré, alors qu’un candidat doit défendre lui-même son programme. Les explications de Simon Compaoré ne sont pas convaincantes. Néanmoins, l’ancien maire de la ville de Ouagadougou reconnaît qu’il n’est pas normal d’afficher des posters sur des arbres. Il explique cela par l’absence d’espaces aménagés dans ce cadre. Puis Simon Compaoré de demander pourquoi est-ce seulement les affiches du MPP qui posent problème alors que d’autres candidats sont dans la même situation.

Réduction du train de vie l’Etat : les candidats sont unanimes. Tout en accusant les pratiques du régime déchu de Blaise Compaoré, Victorien Tougouma compte remplacer les 4X4 qu’utiliseraient les ministres par des véhicules plus modestes. Il évoque aussi la suppression des avantages accordés aux ministres qui bénéficient d’un statut de ministre six mois après leur départ du gouvernement. C’est pourquoi le salaire du président sera diminué, car : « Aux États-Unis le directeur de la CIA à un salaire plus élevé que Barack Obama». A ce sujet, Boukaré Ouédraogo regrette que des ministres roulent avec des véhicules de 77 millions de francs CFA alors qu’une seule de ces voitures peut construire deux écoles. Il dénonce aussi des pratiques dans l’attribution des marchés publics qui font perdre beaucoup d’argent à l’Etat.  

Sur cette question le représentant du MPP confie que son équipe va revoir la configuration du gouvernement pour « éviter un gouvernement pléthorique ». Quand le journaliste lui demande un chiffre, Simon Compaoré dans le doute affirme qu’il devrait tourner avec quelque 25 ministres. Par ailleurs, Simon Compaoré pense que pour certaines missions, l’administration a besoin de 4X4 et qu’il faudrait revoir la dotation des services en matière de carburants, l’usage de l’électricité, etc.

L’éducation : tous les candidats en plus du représentant de Roch Marc Christian Kaboré reconnaissent que le secteur de l’éducation est très important. Le journaliste Ismaël Ouédraogo est revenu particulièrement sur le continuum dans le système éducatif qui pose vraiment débat. Si Victorien est resté évasif sur le sujet Boukaré Ouédraogo lui ne sait pas s’il va l’appliquer ou pas. On a eu l’impression qu’ils ne savaient pas de quoi il s’agissait exactement. A ce sujet Simon Compaoré pense que le continuum tout comme le système licence-master-doctorat qui pose problème actuellement à l’Université de Ouagadougou parce qu’on a mis la charrue avant les bœufs. « On ne peut pas prendre des magasins pour faire des salles de classe » a-t-il lancé en reprenant une phrase qui semble chère à son candidat : « Nous allons mettre fin aux écoles sous paillote ».

Boukaré Ouédraogo propose la professionnalisation du système éducatif. Une idée à appliquer dès l’école primaire souhaite Victorien Tougouma  ! Il compte aussi augmenter les capacités d’accueils à l’Université. Dans ce cadre, il accordera des bourses aux meilleurs étudiants pour se former dans les dix pays les plus développés au monde. « C’est comme ça que la Chine a fait », a-t-il lancé.

Santé : Aucun Burkinabè n’ira se soigner à l’extérieur si Boukaré Ouédraogo est élu. « Le plus important n’est pas de construire des hôpitaux mais de consolider les acquis » affirme le candidat comme s’il reconnaissait que le régime précédent a réussi dans ce domaine. Victorien Tougouma pense que la réussite de sa mission dans ce secteur passe par une intégration politique au niveau de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Il note que les évacuations à l’étranger auraient coûté 4 milliards de francs CFA alors que le budget de l’hôpital Yalgado Ouédraogo est de 3 milliards de francs CFA. Pour Simon Compoaré, le secteur de la santé passe par trois points : la construction, la réhabilitation et la formation. Et selon lui « l’assurance universelle est quelque chose de nécessaire ». Le Service d’aide médicale urgente (SAMU) dans les grandes villes où il y a beaucoup d’habitants est une autre nécessité.

Economie : Sur le plan économique, Victorien Tougouma pense que le domaine des mines est l’un des points sur lequel le Burkina doit mettre l’accent tout en faisant en sorte que chaque Burkinabè puisse être actionnaires dans une société minière. Il faut éviter les connexions entre les hommes d’affaires et les hommes politiques selon son argumentaire. Sous le mandat de Boukari Ouédraogo le Burkina Faso « n’exportera plus le coton ». Simon Compaoré estime qu’il faut mettre l’accent sur la transformation du lait que le Burkina Faso produirait en grande quantité.

Sport et culture : Dans le domaine de la culture, Boukaré Ouédraogo s’est appesanti sur la réouverture et la construction de salles de cinéma « pour redynamiser le FESPACO ».

Les candidats ont juste survolé le sujet sur le sport. Victorien Tougouma qui veut attirer cinq millions touristes par an au Burkina Faso compte également sur le sport pour atteindre cet objectif.

Critiques : Victorien Tougouma et Boukaré Ouédraogo candidats pas très connus du public n’ont rien dit d’essentiel. Pas connus du grand public, ils auraient dû mieux se concentrer sur leur programme politique au lieu de s’attaquer à Simon Compaoré et au MPP. En plus, ils n’ont pas su montrer l’originalité de leur programme. Simon Compaoré en assumant le passé de son parti a fait de Roch Marc Christian Kaboré un candidat expérimenté. Il n’y a pas eu de débat d’idées sur le contenu des programmes de chaque camp.

Ce n’est pas à un débat que l’on a assisté à la télévision nationale. Le temps imparti pour cette émission (une heure) était insuffisant. Les participants à l’émission se sont contentés de faire le constat de la situation sociopolitique et économique au Burkina Faso. Ils n’ont pas dit comment ils comptaient mettre en œuvre leur programme.

Les journalistes Ismaël Ouédraogo et Romaine Zidwouemba n’ont pas su gérer cette émission. Face aux propositions des différents candidats les questions : « comment le réaliser ? » ont beaucoup manqué. Ils auraient dû sortir des contenus du programme de ces candidats afin de montrer les forces et les faiblesses. Peut-être manquaient-ils de temps. En plus de cela, ils n’ont pas su gérer les interventions. Le scénario était connu d’avance : la parole à Victorien Tougouma en premier, Boukaré Ouédraogo ensuite pour finir avec Simon Compaoré. Il fallait souvent inverser l’ordre. En plus de cela, il fallait peut-être imaginer une horloge pour indiquer le temps de parole de chaque candidat.


Qui n’a pas dîné avec le «Diable» au Burkina ?

« Nous avons dîné avec le Diable, mais nous ne sommes pas le diable ». Ces propos d’un des anciens hommes forts du régime de Blaise Compaoré à savoir Salif Diallo entré dans l’opposition, alimentent l’actualité politique au Burkina Faso. Salif Diallo et ses amis ne sont pas les seuls à avoir dîné avec le « Diable ».

 

A un moment de l'histoire, certains ont collaborer avec Blaise Compaoré
A un moment de l’histoire, certains ont collaboré avec Blaise Compaoré

Qui n’a pas déjeuné, dîné, soupé à la même table que le « Diable » ? Si l’on pense que le « Diable » ici cité est Blaise Compaoré, l’on se demande alors qui n’a pas collaboré avec lui et son régime ? Peu d’hommes politiques peuvent se bomber la poitrine. Roch, Simon et Salif sont les plus en vus, eux qui ont quitté le navire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) à la dernière minute, soit une année avant l’insurrection populaire. Mais il y en a beaucoup d’autres.

Ces trois qui ont bien dîné avec le « Diable »

Et là encore, ces leaders avaient été écartés de la gestion du parti par Blaise Compaoré et son frère François. Leur départ a été ressenti comme un dépit. Mais, ils ont bien côtoyé le « Diable ». Simon Compaoré a été directeur de cabinet de Blaise Compaoré qui était ministre dans le gouvernement de Thomas Sankara. Il a dirigé différentes instances du régime Compaoré jusqu’à sa nomination comme maire de la ville de Ouagadougou de 1995 à janvier 2012. Salif Diallo également était là au tout début du régime de Blaise Compaoré en occupant différents postes comme ministre de l’Emploi en 1991, ministre des Missions, de l’Environnement et de l’Eau, de l’Agriculture. Cet ancien vice-président du CDP et directeur de campagne de Blaise Compaoré est tombé en disgrâce avec son ancien mentor en 2008 puis il a été limogé de son poste de ministre et nommé ambassadeur.

 

C’est à partir de 1989 que Roch Marc Christian Kaboré occupe, plusieurs postes ministériels à savoir le ministère des Transports et de la Communication, le ministère chargé de l’action gouvernementale avant de devenir président de l’Assemblée nationale de 2002 à 2012. C’est dans les mêmes conditions que Roch, Salif et Simon qu’il quitte le CDP pour s’opposer à la modification de l’article 37 de la Constitution qui limite le mandat présidentiel à cinq ans, renouvelable une fois.

D’autres aussi ont mangé avec le Diable

Toutefois, Roch, Salif et Simon ne sont pas les seuls à avoir pris un repas avec le président Blaise Compaoré. Le leader de l’ancienne opposition Zéphirin Diabré a également été convié à la table du « Diable ». Il a été membre du gouvernement de Blaise Compaoré entre 1992 et 1996 en tant ministre de l’Economie et des Finances (un poste stratégique confié aux personnes de confiance), conseiller aux affaires économiques de Blaise Compaoré comme l’était François Compaoré. Ce qui prouve que lui aussi était un homme de confiance de l’ancien président. Zéphirin Diabré a aussi été député de l’ODPMT aujourd’hui CDP entre 1992 et 1997, président du Conseil économique et social (CES).

Saran Séré Sérémé, combattu depuis le régime de Thomas Sankara mais aussi par Blaise Compaoré, renouera plus tard de bons rapports l’ancien président. De retour d’exil du Mali, Saran Sérémé, est élu députée pour le compte du CDP de Blaise Compaoré d’abord dans la boucle du Mouhoun en 2002 puis en 2007 dans la province du Sourou. Saran Séré Sérémé sera même membre du bureau politique de ce parti avant de s’en aller pour des questions de positionnement sur la liste électorale lors des élections législatives deux ans avant l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Michel Kafando, l’actuel président de la Transition a représenté le Burkina Faso sous le régime de Blaise Compaoré de 1998 jusqu’à sa retraite. Son actuel premier ministre Yacouba Isaac Zida a fait presque toute sa carrière au sein du régiment de sécurité présidentielle (RSP) de 1996 quand il était commandant de compagnie  jusqu’à la chute de Blaise Compaoré alors qu’il était chef de corps adjoint.

Le professeur Laurent Bado, un homme qui n’a pas sa langue dans sa poche s’est plusieurs fois vanté d’avoir rédigé des discours de Blaise Compaoré qui ont été fortement applaudis à l’extérieur. Il a reconnu avoir reçu 15 millions de francs CFA de la part de Blaise Compaoré pour soi-disant construire une opposition forte. Laurent Bado a, à plusieurs reprises, affirmé qu’à part le défunt Norbert Michel Tiendrébéogo tous les autres hommes politiques n’avaient pas forcément les mains propres.

Pour paraphraser quelqu’un, « si on cite tous ceux qui ont dîné avec le « Diable », on ne va pas quitter ici ».


Insurrection populaire au Burkina : Qui a tué à la RTB ?

J’ai suivi d’un air amusé la commémoration de l’an I de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 qui a conduit au départ de Blaise Compaoré du pouvoir au Burkina Faso. Cette commémoration s’est déroulée sans que justice ne soit rendue. Et pour rendre justice, il faudrait savoir qui a tué qui  quand, comment, pourquoi et comment ? Parmi ces morts de l’insurrection, il faut compter ceux tombés le 2 novembre 2015 au niveau de la télévision nationale du Burkina.

Les manifestants s'étaient opposé aux militaires le 2 novembre 2014
Les manifestants s’étaient opposé aux militaires le 2 novembre 2014  (ph.page facebook Saran Sérémé)

Le 2 novembre 2014, après la désignation de Yacouba Isaac Zida comme Président après le départ de Blaise Compaoré, l’opposition burkinabè a programmé un meeting à La Place de la Nation deux toujours après une insurrection populaire. Après quelques discours, Jean Hubert Bazié, membre de l’ancienne opposition annonce à la foule qu’il s’agit d’un meeting d’information et que chacun devait retourner chez soi. La foule refuse. Pas question qu’un militaire et particulièrement un ancien membre du régiment de sécurité présidentielle (RSP) en la personne du lieutenant-colonel Isaac Zida soit le Président. Après une concertation, les membres de l’ex opposition se retirent. Ils promettent de revenir avec des nouvelles. L’attente était longue. Très longue. Personne n’apparait. Quelques jeunes tentaient de galvaniser la foule à lançant des slogans. D’autres prononçaient des discours en attendant que l’opposition burkinabè prenne ses responsabilités en désignant en son sein une personne qui assurerait la transition jusqu’aux prochaines élections. Alors que le soleil assenait encore plus fortement ses rayons, un jeune pris le micro : «  il y a une bonne nouvelle. On pourrait connaitre le Président d’ici là ». Quelqu’un annonça après que Saran Sérémé serait la prochaine présidente. Des acclamations ! Comme par coïncidence, elle arriva quelques minutes plus tard. Elle fut conduite sur l’estrade.

Séance tenante, les manifestants l’intronisèrent Présidente. Malgré les tentatives d’explications de la part de la bonne dame, la foule conduisit Saran Séré Sérémé à la télévision nationale pour qu’elle fasse une déclaration alors qu’elle était supposée se rendre au CFOP. Sentant le danger, son chauffeur éteignit le moteur de la voiture après avoir manqué le virage conduisant au siège du CFOP. C’était sans compter avec la détermination des manifestant qui poussèrent sa voiture jusqu’à la télévision nationale du Burkina. Elle s’y rendit malgré elle. Mais, Saran Séré Sérémé qui savait que faire une déclaration était inopportune s’enferma dans l’une des salles de la télévision nationale et tenta de dissuader certains leaders. La pression des manifestants étaient forte.

C’est dans ce contexte que le général Kouamé Lougué arriva également avec sa garde. Surement, il n’attendait pas laisser Saran Séré Sérémé, une femme, dirigée le Burkina Faso alors que lui, le peuple a scandé son nom pendant toute la durée de l’insurection. Il se rendit donc dans la salle du journal télévisé. Il n’y avait aucun technicien pour retransmettre le discours en direct. Kouamé Lougué fit malgré tout sa déclaration devant des journalistes qui enregistrèrent.

Alors que l’on croyait que tout était fini et que Kouamé Lougué venait de remplacer un ancien membre du RSP, des militaires de ce régiment apparurent. Ils dispersèrent la foule à travers des coups de feu. On dénombra un mort. Deux dira-t-on par la suite. Kouamé Lougué, Président de quelques minutes s’enfuit et se réfugia chez le Mogho Naba Bangho le chef des Mossis. Il se serrait fracturer les deux jambes en tentant d’escalader le mur du palais. Quelques jours après, il était d’ailleurs transporté en Europe pour des soins. Depuis, plus de nouvelle.

En conduisant Saran Séré Sérémé de force à la RTB, les manifestants croyaient en elle
En conduisant Saran Séré Sérémé de force à la RTB, les manifestants croyaient en elle (ph. page facebook Saran Séré Sérémé)

Mais jamais, l’on a communiqué sur les morts de ce fameux 2 novembre 2015. Quelles sont les balles qui ont tué ? Faut-il mettre ces deux morts sur le compte du Blaise Compaoré ? De quels ordres répondaient ceux qui ont tiré ? Pourquoi ont-ils tiré ? Voilà des questions se posent surement les parents de ces victimes. Lors de l’hommage rendu aux disparus de l’insurrection, des parents de martyrs et des victimes ont étalé leur déception sur la façon dont ils ont été traités : justice non rendue, sentiment d’abandon.

Quelque part, certaines personnes ne souhaitent pas que toute la vérité soit faite sur les évènements qui se sont passés entre le 30 octobre et le 2 novembre 2015. On ne peut pas traiter le dossier de ceux qui ont été tués les 30 et 31 octobre de la manière que ceux qui l’ont été le 2 novembre 2015. Blaise Compaoré n’était plus au pouvoir depuis deux jours. On ne peut pas mettre ces évènements sur son dos. On dira peut-être que c’est l’une des conséquences… Mais certains ont tout simplement fait preuve de sauvagerie. De la vérité sur les tueries seront la preuve que le peuple burkinabè et ses dirigeants assument pleinement leur histoire et leur responsabilité sur tout ce qui s’est passé au Burkina ces dernières années. Il faudra montrer que la page a tourné.

Le 2 novembre aussi a montré la boulimie du pouvoir de certaines personnes. Cela a montré à quel point les hommes politiques étaient capables de se jouer des coups bas pour parvenir au sommet. L’ex CFO est resté muette face aux appels au secours de Saran Séré Sérémé. Par la suite, l’on a tenté malicieusement et sournoisement de lui faire porter le chapeau. Les nombreux témoignages ont montré qu’elle était plutôt victimes. Quel que soit ce qu’ils auront fait pour la Transition, ceux qui ont tué le 2 novembre devant la RTB doivent répondre devant la justice. Ils doivent s’expliquer. Cela permettra d’apaiser l’âme des disparus de cette date et le cœur de leurs ayants droits.