Boukari Ouédraogo

Présidentielle ivoirienne : ce que dit la presse

Au lendemain de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, les populations avaient repris tranquillement leurs activités ce lundi 26 octobre 2015. L’un des enjeux de l’élection se situait au niveau du taux de participation des électeurs. Dans la presse ivoirienne, les analyses sont diversement appréciées. Si certains journaux pensent qu’il y a eu boycott, d’autres estiment plutôt que les électeurs ont rempli leur devoir civique.

« Désert total ». C’est le titre affiché à la manchette du journal Notre Temps qui affirme que les Ivoiriens ont dit non à une mascarade et que des observateurs internationaux auraient été refoulés. « Le mot d’ordre de notre parti a été respecté. On a constaté un désert électoral dans tous les centres de vote », rapporte Notre Temps citant un citoyen. Dans son édition, le journal pense que le FPI a ainsi affirmé sa suprématie. Le même éditorial signé du même nom Yacouba Ggbané est repris dans le Journal « LG infos ». Celui-ci parle d’ « Immense sécheresse électorale, hier ! » Les deux journaux présentent des bureaux presque vident.

 

Le journal Notre Voie reproche « Trop d’irrégularités » lors de ce scrutin présidentiel du 25 octobre 2015. Le journal affirme que des observateurs dénoncent ces irrégularités, les tablettes biométriques qui se plantent, la faiblesse de l’affluence et des suspicions de fraude à Treichville. Le journal compare Affi N’Guessan, candidat du Front populaire ivoirien que le journal semble soutenir à Alexis Tsipras. « L’élection présidentielle ivoirienne s’est déroulée hier dimanche. Sans accroc. En tout cas pour l’instant. Les « urgentistes » des réseaux sociaux sur Internet en ont pour leurs frais. Car, le ciel n’est pas tombé sur la tête des Ivoiriens. Pour décourager les électeurs, des « résultats » ont même circulé sur Internet. Pour tout dire, on a tout mis en œuvre pour amener Affi N’Guessan à retirer sa candidature. Il ne l’a pas fait. Le politicien avisé est resté scotché à sa campagne électorale de proximité. Il ne s’est ni démonté ni déconcentré », se réjouit Notre Voie avant d’ajouter : « Comme Alexis Tsipras, le candidat FPI déjouera les pronostics et autres sondages ».

Si certains quotidiens décrient une faible affluence, ce n’est pas le cas selon le journal Le jour qui rapporte qu’il y a une grande mobilisation pour ces élections. « L’engouement a été total partout, même dans les lieux de vote les plus reculés du pays », rapporte le journal. Le Nouveau Réveil salue le taux de participation à ce scrutin «et dit merci aux « Ivoiriens, merci pour le bon choix». Le journal rapporte les satisfactions de candidats et d’autres personnalités politiques de la Côte d’Ivoire. C’est le cas également pour Le Mandat qui trouve que « Les Ivoiriens tournent la page de 2010» dont l’issue avait été marquée par une crise. Le journal dans sa rubrique Signature estime qu’ « à l’arrivée, les Ivoiriens ont démontré leur maturité et surtout donné une leçon de civisme à Mamadou Coulibaly, Essy Amara, Aboudramane Sangaré et autres Charles Konan Banny. Des opposants qui ont prédit des sècheresses électorales ». Pour le quotidien Nord-Sud, tout cela est « La victoire de la démocratie». En tenant compte de tout ce qui s’est passé, ce journal pense que « la Côte d’Ivoire a amorcé une autre étape ».

Dans une position assez neutre, L’Inter rend compte de ce qui s’est passé dans les bureaux de vote en relevant toutefois des difficultés notamment dues au dysfonctionnement des tablettes biométriques, la participation contrastée, des candidats sans représentants dans les bureaux… Ce journal revient également sur « la leçon d’humilité de Soro aux hommes politiques » puisque ce dernier s’est aligné comme tous les candidats pour accomplir son devoir citoyen. Fraternité Matin, le quotidien d’Etat rapporte également que les Ivoiriens ont voté dans la paix et signale une forte mobilisation des populations à l’intérieur du pays. L’intelligent d’Abidjan pense que les tendances et les leçons à tirer de cette élection pèseront  pendant les 5 ans prochains.

La Matinale reprend en Une reprend les mots de Ouattara qui affirme ceci : «Sortons des élections avec la paix », commune nouvelle fois pour conjurer le mauvais sort. Même si le journal est affirmatif sur une chose, c’est que selon lui, Alassane Dramane Ouattara a gagné l’élection.


Côte d’Ivoire : Quand Guillaume Soro redevient citoyen lambda

Les Ivoiriens sont allés élire le successeur du champion de Côte d’Ivoire en titre Alassane Dramane Ouattara. Le Président de l’Assemblée Nationale Guillaume Soro s’est aligné comme tous les autres électeurs et attendre son tour pour voter ce dimanche 25 octobre 2015.

« Cette année, ce n’est pas comme en 2010. A cette heure-là, les gens avaient déjà pris d’assaut les bureaux de vote », explique un ami sur l’élection présidentielle de 2015. Mais le contexte est différent. Cela faisait près de 10 ans que le pays était en crise. Les Ivoiriens voulaient vraiment en finir et trancher définitivement. Il y a cinq aussi, l’élection se déroulaient sous haute tension. Après le retrait de Charles Konan Banny, il ne reste que six candidats pour la succession de Alassane Ouattara qui compte bien garder son fauteuil. Dès 10 heures, Guillaume Soro quitte sa résidence de Marcory pour Moussou, une localité située aux environs de Grand Bassam la première capitale de Côte d’Ivoire situé à 43 km d’Abidjan. Arrivée une quinzaine de minutes après, le Président de l’Assemblée Nationale Ivoirienne se rend à l’école Groupe Scolaire Moosou, où se trouve son bureau de vote. Il s’agit du numéro 7.

Guillaume Soro juste avant son entrée dans son bureau de vote
Guillaume Soro juste avant son entrée dans son bureau de vote

Guillaume Soro s’aligne à son tour comme tous les autres électeurs. Bien que certains tentent de lui laisser passer, il préfère attendre. Quelques personnes viennent solliciter des séances photos. Il s’y prête volontiers. Une trentaine de minutes après, c’est son tour. Soro s’introduit dans le bureau 7 suivi par les journalistes. Guillaume Soro remplit les formalités puis glisse son bulletin dans l’urne. Il signe puis se met à la disposition des journalistes pour répondre aux questions. A Moosou, ce n’était pas la bousculade dans ce bureau de vote mais certains habitants se sont déplacés pour accomplir ce devoir citoyen.

 

« Je suis très heureux de l’opération de vote. Il n’y a pas eu d’incidents. Je ne vois que la discipline et l’ordre ici. Je tiens à rappeler que c’est ici que j’ai effectué en 2010 mon vote. Donc je suis fidèle à mon bureau de vote. Je viens de voter et c’est avec satisfaction que j’ai accomplie mon devoir citoyen », a confié Guillaume Soro a sa sortie du bureau de vote. Interrogé sur son choix d’attendre comme tout le monde, celui qui était surnommé quand il était étudiant Bogota estime que cela rentre dans le cadre normal des choses. « Ce sont des pratiques qui devraient être normales. Ordinaires. Aujourd’hui, il n’y a pas de Président de l’Assemblée, il n’y a pas de Président de la République. Il y a des citoyens, il y a des électeurs. C’est normal que nous puissions nous comporter comme un citoyen qui vient dans la discipline l’ordre accomplir son devoir », a expliqué l’actuel Président de l’Assemblée Nationale ivoirienne. Selon lui, cette élection doit être celle de la maturité, de la démocratie et de la transparence.

Soro a voté pour le candidat de son choix
Soro a voté pour le candidat de son choix

La crise qui a suivi l’élection présidentielle de 2010 hante encore la mémoire des Ivoiriens. C’est pourquoi, la plupart des électeurs interrogés souhaitent un dénouement paisible. « La paix, rien que la paix. Quel que soit celui qui sera élu, on compose avec lui. Que ce soit lui quelqu’un d’autre, il faut que le pays avance », affirme Adolphe Nazaire Blé. Si Camara Ibrahima artisan désire la même chose, il veut que le prochain président s’intéresse beaucoup à son domaine d’activité qui, estime-t-il semble être un peu négligée.

«Je suis venu accomplir un devoir citoyen : celui d’un Ivoirien vivant dans son pays. Ensuite si mon candidat est élu, ce sera une satisfaction. En Côte d’Ivoire, il y a un pourcentage élevé de chômage. Je pense qu’aujourd’hui avec tout ce qui se dit, on pense que si la jeunesse travaille, il y aura moins de heurts, il y aura moins d’affronts surtout si on parle d’élection », explique également un électeur qui se fait appeler Elo. Et pour lui, il ne faut plus revivre les évènements de 2010 : « Voter ne veut pas dire faire la guerre, s’entretuer. On a connu des moments difficiles, il faut tout faire pour ne pas arriver à un 2010 bis».

Certains électeurs estiment pour leur part qu’il faut de grands changements. «On est un peu déçu de la politique actuelle du gouvernement en place. Il ne s’agit pas d’une question de personne. On n’est pas contre le visage de quelqu’un. Mais le Président doit représenter tout le monde. Il ne faut que certains aient du travail et d’autres attendent parce qu’ils ont tel nom», relève Assamoah à la sortie du bureau de vote.

Pendant que les candidats sont en train de voter, nous apercevons des agents de la Commission électorale indépendante (CEI) parlant des tablettes biométriques. «Les tablettes ne sont plus obligatoires». L’un de ces agents était en train de passer le message aux agents des bureaux de vote.

C’est dans un tel contexte que les Ivoiriens sont allés aux urnes attendant les résultats aux environs de deux heures du matin.


Côte d’Ivoire : la femme d’Houphouët Boigny demande aux Ivoiriens de voter

 La ville d’Abidjan était en effervescence à deux jours de la date de l’élection présidentielle prévue le dimanche 25 octobre 2015. En général, les derniers jours de campagnes connaissent cette ferveur particulière parce que les candidats mettent se surpassent ce jour-là pour convaincre les indécis. Alors que je me préparai pour suivre le dernier meeting du candidat Alassane Ouattara, l’un de mes hôtes, Moussa Bamba, m’invite plutôt à accueillir Marie Thérèse Boigny !

C’est donc plutôt Marie Thérèse l’épouse du premier président de la Côte d’Ivoire Félix Houphouët Boigny que nous avons accueilli à l’aéroport international (comme par coïncidences) Félix Houphouët Boigny. Ha Marie Thérèse ! Cette dame est habitée par le même mythe qui entourait son mari. Du vivant de son mari et même aujourd’hui, son non suscite mystère, envie, admiration… Les femmes lui vouaient le même respect qu’au Président Boigny. Sûrement pour elle, « n’importe qui ne peut pas être la femme de Houphouët Boigny ».

18 heures. Marie Thérèse Houphouët Boigny arrive au pavillon présidentiel de l’aéroport Félix Houphouët Boigny. Beaucoup s’attendaient à voir une vielle femme grabataire qui aurait du mal à mettre un pied devant l’autre. Au contraire, c’est une dame d’un âge mûr, toujours solide, souriante, belle, bien entretenue qui apparut. « Hum ! Regarde sa peau », remarqua quelqu’un tant celle-ci brillait. Le Président de l’Assemblée Guillaume Soro, en campagne pour le Président Alassane Dramane Ouattara, reçu Marie Thérèse. Ils s’embrassèrent, échangèrent des mots.

 

Marie Thérèse Houphouët Boigny, la mamie internationale

Une équipe de la Guillaume Soro TV présente depuis 16 heures se dirigea vers Marie Thérèse. Une journaliste lui tend le micro : « Je suis descendue. Cette fois-ci tout le monde m’appelle mamie, donc je suis la mamie internationale (et l’on entend Guillaume Soro ajouter « tout à fait ») et je suis venue jouer mon rôle de citoyenne et j’invite tous les Ivoiriens à faire autant ». Ce sont ces mots que prononça Marie Thérèse avant de quitter l’aéroport. Moussa Bamba nous fait signe : « Rejoignez vite Didi (ndlr le chauffeur). On file ». A toute vitesse, le cortège d’une vingtaine de véhicules quitta l’aéroport pour une destination que nous ignorions.

Le car de reportage de l'équipe de reportage de la Guillaume Soro TV, une web TV
Le car de reportage de l’équipe de reportage de la Guillaume Soro TV, une web TV

Retardés au péage du pont Henri Konan Bédié nous perdîmes le cortège. Bamba que nous avons appelé nous fit savoir qu’il était mieux de se rendre à l’hôtel et qu’il nous rejoindrait après. Dommage !

Le jet d’éponge de Charles Konan Banny

Et pourtant dans la ville d’Abidjan ce vendredi, il n’y avait apparemment qu’un seul candidat : Alassane Dramane Ouattara ! Les différents rassemblements, les meetings, les fanfares qui parcouraient les quartiers ne scandaient un seul nom : « ADO ! » Dans des bus « gbakas », minicars de transport en commun, dans les voitures, des jeunes et souvent dangereusement accrochés aux véhicules, habillés à l’effigie de ADO paradent dans les différents quartiers.

Des jeunes faisant campagne pour Alassane Ouattara à Abidjan
Des jeunes faisant campagne pour Alassane Ouattara à Abidjan

C’est dans un tel contexte que les Ivoiriens apprenaient que Charles Konan Banny se retirait de la course à la présidence. Une information qui a eu pour effet de susciter de la moquerie de la part de certains comme Didi, le chauffeur. « Toi tu n’es pas garçon. Si tu es garçon il faut venir on va s’affronter. Tu as passé ton temps », affirma Didi dès qu’il entendit l’information sur la Radio Nostalgie. Pour d’autres, l’attitude de Konan Banny avait pour effet de créer un climat délétère. Charles Konan Banny avait affirmé sur les antennes de la RTI qu’il y avait des doublons dans la liste électorale sans apporter les preuves à la Commission électorale indépendante (CEI). Charly Konan Banny affirme qu’il y a un doublon d’environs 600 noms. « OK, retorqua quelqu’un, qu’on leur donne tous 600 voix d’avance, et on verra si ces 600 noms peuvent les permettre d’être Président. Charles Konan Banny est le 3ème candidat après Amara Essy et Mamadou Coulibaly a jeté l’éponge.

La Une de la presse ivoirienne de ce samedi 24 octobre 2015
La Une de la presse ivoirienne de ce samedi 24 octobre 2015

 

La Une de la presse ivoirienne de ce samedi 24 octobre 2015
La Une de la presse ivoirienne de ce samedi 24 octobre 2015

Les autres candidats tentent de convaincre les indécis

A défaut de suivre un meeting, il faut se référé au journal Fraternité Matin pour savoir ce que chaque candidat a fait ce dernier jour de campagne. Dans la rubrique « Le journal de la Présidentielle », Fraternité Matin nous apprend que Kouadio Konan Bertin a échangé avec la délégation des Nations unies. Kacou Gnangbo était lui à Assinie dans le département d’Addiaké où il a incité les Ivoiriens à éviter l’abstention. Siméon Kouadio Konan s’est rendu dans une localité du nom de Lopou (Département de Dabou) où il a animé un meeting où il a tenté de convaincre la population à porter leur choix sur lui. Affi N’Guessan lui paradait dans le Moronou pour reprendre le titre de Fraternité Matin. Avant de rejoindre Daloa où elle votera, Kouangoua, elle était à Yamoussoukro sur les terres d’Houphouët où elle a été accueillie par des associations de restauratrices mais aussi… la pluie. Signe du destin selon elle. « C’est par des feux d’artifices qui ont illuminé la lagune Ebrié du côté du pont Félix Houphouët Boigny que le candidat du RDHP, Alassane Ouattara, a terminé, hier, sa campagne… ».

Les jeunes prennent souvent des risques pour soutenir Ouattara
Les jeunes prennent souvent des risques pour soutenir Ouattara

A deux jours du premier tour de l’élection présidentielle, les douloureux souvenirs de 2010 hantaient encore l’esprit des Ivoiriens. Lors de la première du vendredi de 23 octobre 2015, l’imam d’une mosquée du quartier Cocody a appelé ses fidèles à tout mettre en œuvre pour que la présidentielle se déroule dans la paix en mettant l’amour du pays en avant. « L’amour pour la patrie fait partie de la croyance », a affirmé ce dernier. Pour lui, celui qui n’aime pas son pays n’est pas un bon croyant.


Un Ouagalais à Abidjan en pleine campagne électorale

Un groupe de blogueurs a été invité en Côte d’Ivoire pour l’observation de la campagne présidentielle dans ce pays. Contacté et après une semaine de tergiversations, l’invitation est finalement confirmée et je dois me rendre à Abidjan pour couvrir la campagne en tant que blogueur sur le terrain. Pas besoin de grands préparatifs.

(ph. rfi)
(ph. rfi)

L’heure africaine : Sur le billet d’avion, le décollage de l’avion est programmé pour 16 h 25. Convocation deux heures avant. A 14 h 30 les passagers pour le vol HF 0739 air Côte d’Ivoire sont convoqués. Les formalités passées, j’attends tranquillement dans la salle d’attente. C’est finalement aux environs de 16 h 40 minutes que nous sommes appelés pour rejoindre le car assurant la navette. C’est plutôt avec un passager que je me renseigne : « C’est quel vol ils ont annoncé ? ». « C’est Abidjan» répondit-il. Je me précipitai pour rejoindre le petit rang. Deux personnes étaient encore alignées. J’aurais pu manquer le vol. Vu le temps pris pour rejoindre l’avion, l’installation des passagers, les consignes, puis le décollage, nous étions largement en retard. Conséquence, nous arrivâmes à Abidjan à 18 h 30 minutes exactement à en croire la standardiste qui annonçait également une température de 26 degré. Beau temps ! Celui qui m’attendait à l’aéroport attendait depuis 17 h 25 comme indiqué sur le billet d’avion. C’est l’heure africaine ! Le retard est normal.

Bonjour Abidjan : En quittant l’aéroport, une musique me vint en tête. « La Côte d’Ivoire, c’est le tourisme. Pays de rêve de beaux paysages. Baby, je fais mes valises, on part en Afrique, en Côte d’Ivoire… » Je n’eus même pas le temps de me fredonner la suite cette chanson culte que je vis un jeune homme, une pancarte avec mon nom inscrit. « C’est monsieur Ouédraogo ? », demanda-t-il. Je fis « oui » de la tête et lui tendit la main. Il prit mes bagages et me conduisit à la résidence. Celui qui vient de m’accueillir s’appelle Henri Didi. Un chauffeur. Il travaille pour le patron. Je ne voulus pas savoir qui était vraiment ce patron. Mais je me renseignerai plus tard. Nous quittâmes l’aéroport. « On va à Cocody Angré. Vous connaissez ? », me demanda-il. Je connaissais seulement les environs de Koumassi, Marcory, Treichville, Port-Bouet et un peu le Plateau. Comme s’il avait deviné que je ne comprenais pas le calme qui régnait autour de l’aéroport, Didi me fit savoir que la zone était inhabitée. Il y avait seulement quelques jardins potagers autour. Même si ce n’est pas la première fois que j’allais en Côte d’Ivoire, c’était la première fois que j’y allais par avion.

Abraham Moussa et Solo Jah Gunt chantant la Côte d’Ivoire

Des signes de la campagne : lorsque nous quittâmes la zone de l’aéroport, des affiches sur les voitures attirèrent l’attention. La Côte d’Ivoire est en campagne électorale. Des affiches sont collées sur les voitures « gbakas », minis cars de transport en commun. La première affiche que nous voyons est celle du candidat Kouadio Konan Bertin surnommé KKB. Mais très rapidement, les affiches d’ADO prennent place. La plupart des panneaux géants sont occupés par les affiches du président sortant. Le tenant du titre en quelque sorte. « Avec Ado, mon salaire augmente ». « Avec Ado, l’assurance garantie », « Avec ADO, j’ai l’eau courante »… Le long des murs sont placardées des affiches géantes ou en petits formats de tous les candidats. Mais celles qui émergent toujours du lot sont celles d’ADO.

A certains ronds-points, des jeunes en t-shirt orange et blanc et en casquettes font de l’animation. Ce sont encore les partisans de l’actuel président. Nous apercevons quelques affiches des challengers. Mais ADO est omniprésent. Souvent les premières impressions sont les meilleures. ADO domine la campagne. Dans cette ferveur de campagne, c’est comme si la messe était déjà dite, les affiches du président Ouattara dominent suivies de celles de KKB et de AFFI N’guessan. Entre-temps, nous avons pu voir un camion dans une station d’essence avec les affiches de Lagou Adjoua Henriette. « Elle, c’est une intellectuelle », confie Didi qui rappelle en même temps que la campagne est moins tendue cette année.

Affaire de pont à péage : Pendant le parcours, Didi a joué les guides. Lorsqu’on changeait de quartier, il me disait où on se trouvait, les changements intervenus dans la zone tout en faisant des critiques sur l’incivisme de certains chauffeurs. Lorsque nous arrivâmes au niveau de l’échangeur à péage, il me le fit comprendre même si l’évidence sautait aux yeux. « Le problème de ce pont, c’est qu’on paye ». Il faut payer à chaque passage. « C’est ce que l’opposition critique », explique encore Didi. Mais le chauffeur du soir précise : « Il fallait ce pont parce qu’il permet d’éviter les embouteillages ». Didi m’explique qu’on n’est pas obligé de l’emprunter, mais dans ce cas il faudra faire de grands détours tout en supportant les embouteillages. Il me fit même remarquer qu’après avoir traversé le pont, la voie est désengorgée. Et pour Didi, il faut saluer cette œuvre du président Ouattara. La dernière fois que j’étais à Abidjan, le pont était encore en construction. Il y avait un grand restaurant à cet endroit, mais le propriétaire était obligé de déménager. Tous ceux qui ont été délogés ont été « bien » dédommagés selon Didi. D’après lui certains étaient dans de petites baraques et se sont retrouvés dans des maisons de deux ou de trois pièces dans d’autres quartiers. Information que je n’ai pas pu vérifier.

Ouaga c’est comment ? : Personnellement, je savais que cette question serait posée après le putsch manqué du mercredi 16 septembre 2015 quel que soit l’endroit où je me trouverai. « Ha les Burkinabè, vous avez refusé à tout prix le coup d’Etat… » Je ne savais pas si c’était une question ou juste une affirmation. Je lui expliquai que le coup d’Etat est mal tombé surtout après le sacrifice que les Burkinabè ont fait depuis la chute de Blaise Compaoré le 31 octobre 2014. Didi me fit comprendre qu’il a eu peur parce qu’il a des parents au Burkina Faso. Ces derniers se trouveraient à Ouaga 2000 ou dans les environs. Mais en réalité il s’agit des enfants d’un ancien cuisinier de son grand frère défunt. Un lien est né entre ces deux familles de sorte qu’elles se considèrent comme une. Le cuisinier en question aurait même donné à l’une de ses filles le nom de la femme de son ancien patron. Ivoirien ! Cette histoire résume ce qu’est la Côte d’Ivoire. Une « terre d’espérance » pour tous ceux qui se mettent au travail et aussi « pays de l’hospitalité » comme dit dans l’hymne national ivoirien. «Le Burkina ne mérite pas ce qui est arrivé » me fit comprendre Moussa Bamba lorsque nous rencontrâmes à la résidence. Ce sont Moussa Bamba et Marc Antoine qui m’ont envoyé l’invitation au nom de leur patron.

C’est dans cette ambiance que nous arrivâmes à « Les Résidences Niable » à Cocody. Pas le temps de se reposer que Moussa Bamba arrivât. Je pus voir d’autres blogueurs Aphtal Cissé du Togo que j’avais déjà croisé à Dakar, Nelson du Cameroun et Gloria du Bénin. Nous causâmes jusqu’aux environs de minuit quand Marc Antoine rejoint le groupe. On attendait désormais ce vendredi 23 octobre pour suivre le dernier meeting du candidat Ouattara.


Sankara, l’empêcheur de dormir

On ne peut pas tuer un être humain et dormir tranquillement surtout. Les assassins de Thomas Sankara n’ont plus eu un sommeil tranquille depuis la disparation de la figure de proue de la révolution burkinabè le 15 octobre 1987.

La commémoration de l’anniversaire de l’assassinat de l’enfant de Yako s’est faite de façon particulière. C’est la première fois que le pays se souvenait de l’homme qui a marqué l’histoire du Burkina sans Blaise Compaoré au pouvoir. La télévision nationale du Burkina a diffusé une série d’éléments sur Thomas Sankara. Même si les accros des CD piratés et d’Internet avaient déjà pu voir ces images, la saveur particulière s’explique par le fait que c’est la première fois depuis sa mort que la télévision nationale diffusait ces images. Le grand public ne les a pas forcément vues au point que beaucoup se demandaient si la RTB les avait effectivement.

 

Le certificat de décès de Thomas Sankara
Le certificat de décès de Thomas Sankara

Ce 15 octobre 2015, tombait un jeudi comme le jour de l’assassinat de Thomas Sankara, les internautes ont rivalisé dans leurs messages d’hommage à travers la publication de photos, de discours, de vidéos, de citations, etc., de Thom Sank. Le site d’information Burkina24.com a diffusé une vidéo exclusive où l’on voit Thomas Sankara jouer au football à la présidence du Faso, l’actuel premier ministère du Burkina. A la fin de la vidéo, il enfourchait son vélo et s’en allait. Une vidéo qui résume ce qu’a été la vie et la philosophie de Thomas Sankara : la simplicité.

Si depuis sa mort ses assassins n’ont pas trouvé une seule nuit de sommeil tranquille, aujourd’hui ces derniers n’osent même pas regagner leur lit. Le fantôme de Sankara les hante, les quête et les suit partout depuis que sa tombe a été ouverte. Le mensonge en route depuis dix ans, la vérité le rattrape en une journée ! Cela n’a jamais été vrai.

Si le certificat de décès officiel affirme qu’il est mort de façon naturelle contredisant plusieurs témoignages, les premières autopsies de son corps ont montré que Sankara a été criblé de balles. Cela témoigne de la barbarie et la haine avec lesquelles, il a été assassiné. Ce n’est que le début du commencement comme on aime à le dire. Ce que Blaise Compaoré et son régime ont tenté de cacher pendant 28 ans est en train d’être, à petits pas, porté au grand jour. La justice est en marche et les criminels sont aux abois. Cette justice, elle-même n’est pas tranquille. Ceux qui avaient prétendu qu’ils étaient incompétents à juger cette affaire seront obligés de reprendre le dossier, de le fouiller, d’investiguer et de dire au peuple assoiffé ce qui s’est vraiment passé.

 

Les Burkinabè ne sont pas dupes. Ils l’ont prouvé lors de l’insurrection populaire d’octobre 2014 mais aussi pendant le coup d’Etat avorté du 16 octobre 2015. La justice n’a d’autre choix que de dire la vérité.

 

Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé d’effacer de la mémoire des Burkinabè, l’image de Thomas Sankara. Les médias publics ne parlaient presque pas de ce héros national. En plus de cela, tous les stigmates de la révolution ont été effacés. La Place de la Révolution porte désormais le nom officiel de Place de la Nation tandis que la devise du Burkina Faso qui était « La patrie ou la mort nous vaincrons » est désormais « Unité-Progrès-Justice ». Même après sa mort, il dérangeait.

Cependant, Sankara l’avait dit, « tuez Sankara aujourd’hui, il y aura 100 Sankara demain ». Il ne croyait pas si bien dire, car il faut aujourd’hui compter des millions de Sankara. Les partis sankaristes florissants, le nom de Sankara scandé comme un bouclier lors des manifestations, les t-shirts à l’effigie de ce héros africain, les chansons en son hommage sont venus rappeler que cet homme est immortel. En fin de compte, tout se paye sur terre.


Terrorisme : le Burkina est donc devenu un pays dangereux ?

L’ambassade de France a publié à l’endroit de ses ressortissants au Burkina Faso une cartographie des zones à risques le mardi 13 octobre 2015. Toute la partie de territoire burkinabè frontalière au Mali est déclarée zone rouge. Le gouvernement burkinabè lui n’a pas réagi comme si elle cautionnait la publication de cette cartographie des zones à risques.

Le pays est devenu un pays dangereux depuis l’attaque de la gendarmerie Samorogouan, à 45 km au nord de Orodora, la principale ville de cette zone. Le mutisme des autorités burkinabè sur cette affaire est déconcertant. Qui se tait consent. Si les autorités françaises déconseillent les zones concernées à leurs ressortissants, quel sort réserve-t-on aux populations locales ? Le même sort qu’on a réservé trois gendarmes de Samorogouan et au maréchal de logis (MDL) chef Abdoul Ba Souleymane Ilboudo tué lors de l’attaque de la gendarmerie d’Oursi dans la province de l’Oudalan ?

Le Burkina Faso est devenu un pays dangereux parce que les autorités n’ont rien fait pour mieux sécuriser le pays. Pourtant, les signes de possibles attaques djihadistes sur le territoire burkinabè étaient perceptibles depuis longtemps. D’abord, le Burkina Faso est au cœur de l’Afrique occidentale. Ensuite, des pays frontaliers ont subi des attaques de ce type. La crise au nord du Mali a conduit beaucoup de réfugiés au nord du Burkina Faso. Ce qui laisse la porte ouverte à des infiltrations.

La première alerte a été donnée au mois d’avril dernier quand un Roumain travaillant dans la mine de Tambao a été enlevé dans cette partie située au nord du pays. Jusqu’à présent nous n’avons aucun signe de vie de cet otage.

Puisqu’il ne s’agissait que d’un expatrié blanc, on ne se sentait pas si concerné. Ça n’arrive qu’aux autres, pense-t-on souvent. Les autorités burkinabè n’étaient pas inquiètes. Pendant que ces dernières continuaient de dormir sur leurs lauriers, la gendarmerie d’Oursi est attaquée par des bandits non identifiés. Ces derniers ont fait preuve de « professionnalisme » en tendant un guet-apens aux gendarmes. Bilan un gendarme tué. Bien qu’un témoin ait affirmé que les bandits avaient dit qu’ils appartenaient à Boko Haram, la piste du règlement de compte semble avoir été privilégiée.

Pourtant, le problème devait être pris à bras le corps. Cette attaque a permis de mettre à nu les conditions catastrophiques dans lesquelles travaillaient les forces de défense et de sécurité. Nous l’avons d’ailleurs dénoncé. Il suffit d’aller dans n’importe quel poste de police ou de gendarmerie du Burkina pour se rendre compte que ces derniers travaillent en sous-effectif et manquent du minimum de logistique. Face à des bandits surarmés et quelle que soit la formation de ces hommes en tenue ils ne peuvent que fuir comme des poltrons.

Le Burkina est donc devenu une zone dangereuse parce que les autorités n’arrivent plus à sécuriser les frontières du pays. Le Burkina Faso est devenu un pays dangereux. La France l’a dit et donc c’est vrai ! Cela signifie que la France maîtrise mieux le territoire burkinabè que nos autorités elles-mêmes. Cela veut dire que les services secrets burkinabè ne sont pas efficaces. Mais ce qu’on oublie, c’est que les terroristes sont tellement ingénieux qu’ils n’ont plus besoin de faire des incursions aux frontières. Ils sont capables de frapper en plein cœur de la capitale à travers des attentats- suicide par exemple.

Comme le dit un proverbe burkinabè, on a laissé le fantôme entrer dans la maison et maintenant, on veut le chasser.


Burkina: Zida n’était-il pas le numéro 2 de l’ex RSP ?

La vie nous joue souvent des tours. Hier, quelqu’un qui était voué à aux gémonies peut dès le lendemain se transformer en « baark biiga » (enfant béni) comme une jeune fille qui attend son premier amant. Illustration avec le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP). Ceux-là même qui ont défendu becs et ongles la modification de l’article 37 au départ se sont faits une nouvelle virginité comme une pute qui a fréquenté toutes les chambres de passes pendant 27.

 

Le premier ministre Yacouba Isaac Zida en treillis du RSP devrait aussi répondre au jugement de son ancien corps
Le premier ministre Yacouba Isaac Zida en treillis du RSP devrait aussi répondre au jugement de son ancien corps

Aujourd’hui, c’est le premier ministre Yacouba Isaac Zida qui se retrouve dans la situation de ceux qu’on a surnommé les RSS (Roch, Salif, Simon) lorsqu’il a célébré la messe de requiem de l’ex régiment se sécurité présidentielle (RSP) le mardi 06 octobre 2015. Lors de ce culte, l’ancien numéro 2 du RSP Yacouba Isaac Zida dans son homélie a taclé, comme Andoni Goikoetxea sur Diego Maradona, son ancien mentor Gilbert Diendéré, auteur du putsch manqué et sa troupe en déclarant ceci : « depuis sa création, le régiment de sécurité présidentielle a été utilisé par le régime du président Compaoré pour freiner les aspirations légitimes du peuple burkinabé à une vie démocratique réelle ».

Voir le tacle de Andoni Goikoetxea sur Diego Maradona

Yacouba Isaac Zida enfonce plus ses anciens : « au lieu de contribuer à la protection des populations, ce corps était devenu une menace permanente contre la marche radieuse du peuple burkinabè et un instrument pour imposer la volonté d’un groupuscule qui, incapable d’apprendre les leçons de l’histoire de notre peuple, se condamne ainsi à répéter les erreurs d’un passé à jamais révolu dans la conscience collective des Burkinabè ».  

C’est vrai. Sauf que Yacouba Isaac Zida était membre de cet ex RSP et a été réaffecté au même titre que Gilbert Diendéré après le Conseil des ministres qui a signé l’acte de décès de l’ancienne garde. Il a gravi les différents échelons du RSP en passant de commandant de compagnie à chef de corps adjoint du RSP entre 1996 et 2015 année pendant laquelle il est devenu ministre. A La place de la nation, beaucoup ont été surpris par les propos démagogues et populistes de Yacouba Isaac Zida, qui le 12 juin  2015 devant le Conseil national de la transition (CNT) défendait la cause de l’ancienne garde présidentielle. Selon lui, le Burkina Faso avait encore besoin du RSP alors que plusieurs organisations de la société civile demandaient tout simplement son démantèlement. Bien avant, à la mi avril, Zida avait affirmé que le RSP ne serait pas dissout.

Surprise. Ce n’est pas le cas en réalité. Puisque le 30 octobre à cette même place de la nation, il avait dit que le RSP sera dissout avant de raviser. Après sa prise de pouvoir et aussi sa nomination en tant que premier ministre, même s’il a troqué le treillis de camouflage vert, celui du RSP pour les habits traditionnels, Zida n’a pas démissionné.   De toutes les façons, s’il faut juger les crimes commis par l’ex RSP le premier ministre Yacouba Isaac Zida devrait répondre puisqu’il a occupé plusieurs fonctions importantes au sein de ce régiment et fait partie donc de cette composante. Il n’est pas forcément innocent sur toutes « les actes de barbaries », pour reprendre les mots du nouveau directeur de la justice militaire Sita Sangaré. Il était membre du RSP presque depuis sa création en 1995. Au jugement dernier de l’ex RSP Yacouba Isaac Zida devra également répondre. Pour réponse, il avait peur pour sa vie. Mais dans la vie, on ne peut pas collaborer avec Dieu et Satan à la fois.   Le plus important, c’est de ne pas avoir de cadavres dans son placard car Gilbert Diendéré est toujours dangereux même en prison. Celui qui est considéré comme le disque dur du régime Compaoré pourrait à son tour faire des révélations sur la participation de chacun à des actes perfides vu la sérénité machiavélique avec laquelle il a supporté les évènements depuis le putsch. S’il parle, des têtes risquent de tomber du côté des civiles comme militaires.

 Radio Liberté : Selon vous qui veut faire taire à jamais le général Gilbert Diendéré. Valère Somé : Trop de gens. Le régime de Blaise sera terminé quand on aura entendu Gilbert. Sinon nous sommes encore dans le régime de Blaise. Tant que Gilbert ne s’est pas expliqué…, il n’est pas le seul coupable ? Ce sont des hommes politiques ou des militaires qui en veulent à Gilbert Diendéré ? Hommes politiques comme militaire. Le régime de Blaise. C’est l’occasion de tous savoir. Même son coup infantile raté, on va connaitre les tenants et les aboutissants. Ce qu’il détient est trop important pour le pays.

Ahhh, la vie là même quoi! Elle est trop cool quoi. Elle peut te faire manger ton totem et puis après elle peut se…

Posted by Yacouba Ladji Bama on mardi 6 octobre 2015

Seuls les imbéciles ne changent pas. De toutes les façons, Yacouba Isaac Zida sait qu’il peut bénéficier de circonstance atténuante parce qu’il n’était plus en odeur de sainteté avec ses ex compagnons et aussi son ancien mentor et cousin. Et comme le dise aussi les saints, ce n’est pas le début qui compte mais la fin. Et comme de ce film, le bras droit du chef-bandit se retrouve dans le camp du « brave ».

Expérience professionnelle de Yacouba Isaac Zida à l’ex RSP : 

  • Depuis le 18 juillet 2011 : chef de corps adjoint du régiment de sécurité présidentielle

  • 2006 à 2011 : commandant adjoint de groupement au régiment de sécurité présidentielle

  • 2006 à 2008 : commandant de groupement adjoint au régiment de sécurité présidentielle

  • 1997 : Officier chargé de la sécurité du régiment de sécurité présidentielle

  • 1996 à 2006 : commandant de compagnie au régiment de sécurité présidentielle.


Burkina : la véritable chute du général Diendéré

C’est fini. Le mythe du général Gilbert Diendéré et du redoutable régiment de sécurité présidentielle (RSP) est tombé ce mardi 29 septembre 2015 après un assaut au camp Naba Koom II. Les Forces armées nationales (FAN) du Burkina ont utilisé la force pour mettre hors d’état de nuire l’ancienne garde présidentielle qui faisait des résistances face au mot d’ordre de démantèlement de cette structure.

Les Burkinabè ont tout fait pour l’éviter, ils n’ont pas pu. Finalement, les deux sœurs armées, les Forces armées nationales (FAN) et le régiment de sécurité présidentielle (RSP) se sont affrontées. La signature de l’accord chez le Mogho Naba Baongho le mercredi 23 septembre 2015, le chef suprême des Mossi de Ouagadougou n’a servi à rien. Tous les traditionalistes savent que lorsqu’un accord n’a pu être résolu chez le chef, c’est la voie au non-retour. En général, celui a manqué sa parole en paiera le prix cher. C’est le cas pour le général Gilbert Diendéré dont les éléments ont été maîtrisés en seulement une soirée, une attaque.

Naba Koom détruit à partir de Goughin

Les Ouagalais ont entendu aux environs de 15 heures, les premiers coups de feu : deux tirs à l’arme lourde sans précision. Cinq minutes environ après, de nouveaux tirs ont été entendus dans le secteur : trois coups simultanés d’artillerie lourde. Par la suite, un riverain du quartier Kossyam confie avoir entendu quatre tirs d’armes lourdes. Après un moment de silence, à 18 heures, le général Gilbert Diendéré s’exprime sur les antennes d’une radio locale appelant ses hommes à déposer les armes. Mais les FAN ont continué le bombardement. Notre témoin rapporte quatre coups successifs d’armes lourdes. A ce moment-là déjà, la situation était sous contrôle des FAN. Le RSP était vaincu. Les FAN ont pris le soin d’encercler le camp pour empêcher des fuites avec des armes surtout.

Les habitants du quartier Goughin ont entendu des tirs depuis leur quartier notamment au camp Sangoulé Lamizana situé dans le quartier ouest de Ouagadougou.Qui tirait : les FAN ou le RSP ? Comment un champ de bataille qui se trouve à près d’un vingtaine de km peut être aussi ressenti dans ce quartier ? L’artillerie lourde utilisée a permis d’affaiblir et de neutraliser le camp Naba Koom. Cet armement permet d’attaquer à une grande distance et de façon précise. Beaucoup d’éléments s’étaient déjà rendus au camp 11-78, situé sur la route Ouagadougou-Pô comme l’a dit le général Gilbert Diendéré à une chaîne locale. En réalité, ils s’y étaient rendus bien avant l’attaque.

L’ambassade des Etats-Unis ferme sa porte à Diendéré

Pendant ce temps, son chef Gilbert Diendéré cherchait un point de chute. L’ambassade des Etats-Unis a refusé de le recevoir. Le diplomate américain Tulinabo S. Mushingi ne voulait pas d’incident diplomatique. C’est ainsi que le général a abandonné son véhicule pour se rendre par un autre moyen dans un autre endroit. Finalement, c’est chez le nonce apostolique de Rome au quartier Ouaga 2000 non loin du camp Naba Koom et du palais présidentiel qu’il aurait trouvé refuge.

Les FAN ont pris toutes les dispositions pour éviter des dégâts collatéraux en publiant plusieurs communiqués appelant les populations à rester loin du camp Naba Koom et du palais présidentiel. Apparemment, les dispositions prises ont permis d’éviter ou peut-être d’amoindrir les dégâts collatéraux.

Le gouvernement à travers un communiqué a annoncé la prise de toutes les positions de l’ex-RSP.


Burkina : respect au Mogho Naba Baongo II

Les Forces armées nationales (FAN) du Burkina et le régiment de sécurité présidentielle (RSP) ont signé un accord sous l’égide du Mogho Naba Baongo, le chef des Mossi de Ouagadougou qui a permis de décrisper la situation politique tendue : les deux frères armés voulaient s’affronter. L’adoption de cet accord chez le 37e chef suprême des Mossi de Ouagadougou le mercredi 23 septembre 2015 revêt plusieurs symboles.

Le Mogho Naba Baongho, on pourrait l’interpréter de cette manière, a permis au Burkina Faso d’éviter une guerre fratricide. La signature de cet accord chez le Mogho Naba, montre d’abord que les Burkinabè peuvent laver le linge sale en famille. Grâce à ce symbole, ils ont pu se dire que quels que soient les problèmes, quelles que soient les divergences, ils sont capables de s’asseoir autour d’une même table, discuter et trouver des solutions à leurs problèmes. Et pour cela, ils n’ont pas eu besoin d’attendre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ou la communauté internationale pour régler leurs divergences.

En plus de cela, la signature de l’accord sous l’égide du Mogho Naba Baongho II, témoigne de l’engagement pris par les deux rivaux de respecter cet accord. En milieu traditionnel, le chef est le dernier recours pour résoudre un problème. Si l’un des camps venait à ne pas respecter cet accord, il devrait en supporter toutes les conséquences. En acceptant d’entrer dans le jeu, le Mogho Naba montre aussi son attachement à la paix, car si le RSP et les FAN devaient s’affronter « son territoire » aurait été le théâtre de violences. Peut-on imaginer les conséquences d’un tel désastre.

En plus de cela, le Mogho Naba montre une fois qu’il est à l’écoute de « ses sujets », même si tous les Burkinabè ne sont pas sur sa coupe. Malgré tout, certains doutent de la bonne foi de cette autorité morale. Pour exemple, un entretien accordé par Smockey du mouvement le Balai Citoyen.

 Le rôle du Mogho Naba, roi des Mossis et autorité traditionnelle très respectée au Burkina Faso, n’a-t-il pas été plus décisif que celui des manifestants ?

Ce n’est pas lui qui a mené l’insurrection du 30 et 31 octobre 2014 contre le régime de Blaise Compaoré. Il n’a pas non plus, ces derniers jours, appelé le RSP à rendre les armes. Le Mogho Naba, chez qui les militaires de tous bords se sont rendus pendant la crise, a toujours servi d’abri. Il pourrait jouer un rôle de pacificateur, mais son action relève surtout du copinage. Il sert les intérêts des anciens caciques du régime, qu’il connaît très bien.

Les portes du Mogho Naba ont toujours été ouvertes pour tout le monde. On ne compte pas le nombre d’artistes, de sportifs et de personnes politiques qui lui demandent sa bénédiction, et d’intercéder dans la résolution d’un problème ou bénéficier de ses conseils. Cependant, des questions se posent, car pour n’importe quel problème, le Mogho Naba est sollicité. Ce qui tend à banaliser la royauté. Au lendemain de l’insurrection populaire d’octobre 2014 des hommes politiques comme Gilbert Noël Ouédraogo – qui a soutenu la modification de l’article 37 –  et Eddie Komboigo le candidat exclu du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) – sont allés le solliciter afin d’obtenir son pardon, mais aussi pour se relancer.

Dans des cas plus chauds, le 2 novembre 2015 le général Kouamé Lougué s’est réfugié chez lui lorsque le RSP est venu le rechercher après  sa prise de pouvoir raté à la télévision nationale du Burkina. En février 2015, c’est également chez le Mogho Naba que s’est replié le premier ministre Yacouba Isaac Zida lorsqu’il a appris que des militaires du RSP l’attendaient en Conseil des ministres.

Gilbert Diendéré est allé chez le Mogho Naba lorsqu’il a été acculé de toutes parts. Il a été reçu chez le Mogho Naba.

Vous avez rendu visite au Mogho Naaba ?

J’ai rendu visite au Mogho Naaba, suite à mon arrivée comme président du Conseil national de démocratie (CND). Je souhaitais lui rendre visite a lui et aux différents responsables des communautés religieuses, depuis avant-hier. Cela n’avait pas pu se faire avant à cause des débats avec la Cédéao qui ne nous ont pas permis le temps de cette rencontre.

Cependant, le Mogho Naba est seulement le chef des Mossi de Ouagadougou et non de tous les Burkinabè. Il existe plusieurs autres chefs au Burkina comme Naba Kiba de Ouahigouya, le Kupiendéli de Fada N’Gourma, le Dima de Boussouma. Certaines sociétés burkinabè ne sont pas sous la responsabilité d’un chef traditionnel et donc ne sont pas sous l’autorité du Mogho Naba. En réalité, c’est juste parce que le royaume du Mogho Naba se trouve dans la capitale du Burkina Faso. Il est plus facile d’avoir accès à lui.

Le Mogho Naba, cette poubelle dans laquelle tout le monde vient jeter ses ordures, mérite beaucoup de respect pour ce « petit » rôle qu’il a joué dans le règlement de cette crise.


Jour J+7 du coup d’Etat au Burkina : après la tension, la décrispation

La tension est retombée à Ouagadougou ce mercredi 23 septembre 2015 après une semaine marquée par un coup d’Etat, des manifestations, la répression, voire un risque de guerre.

Malgré le retour aux affaires du président de la Transition Michel Kafando, les habitants de Ouagadougou restent méfiants. Un tour rapide dans la ville permet de constater que certains commerçants sont sortis tandis que d’autres sont restés chez eux. Un fait inimaginable à la veille de la fête de la tabaski. Justement, en prévision à cette fête, l’on peut constater par endroits, des vendeurs de moutons discutant avec des clients.

Jusqu'au mercredi 23 septembre 2015, seulement les vendeurs d'essence par terre permettaient aux Burkinabè de s’approvisionner
Jusqu’au mercredi 23 septembre 2015, seulement les vendeurs d’essence par terre permettaient aux Burkinabè de s’approvisionner

Sur le trajet, aucune station d’essence n’est ouverte. Seuls les vendeurs à la criée proposent de l’essence. Certains ont augmenté le prix. Il faut souvent tourner pour tomber sur un bon samaritain qui vous propose l’essence à un prix raisonnable. Certains, complètement, à sec ou qui refusaient de s’approvisionner en carburant sont dans l’obligation de céder pour une fois.  

Gilbert Diendéré : « Le plus gros tort a été de faire ce putsch (…). Pour moi le putsch est fini » 

Posted by Bassératou Kindo on mercredi 23 septembre 2015

 

Le Burkina Faso ayant frôlé un affrontement entre le régiment de sécurité présidentielle (RSP) et les Forces armées nationales (FAN), un tour au niveau des camps permet de constater la présence de quelques militaires au niveau du camp Sangoulé Lamizana situé à Goughin au côté ouest de la ville de Ouagadougou. Ils sont postés à deux au niveau des différentes entrées. L’entrée principale est barricadée pour des raisons de travaux.

 

En traversant, les rues, l’on peut constater le goudron noirci par les pneus brûlés . Tous les barrages ont été levés. La circulation est fluide. Les alentours du camp Guillaume Ouédraogo sont barricadés. Cette fois, ce n’est plus la place de la Nation que les forces armées nationales ont barricadée. Les soldats ont avancé de 100 mètres obligeant les passants à faire de grands détours.

 

A l’entrée de la télévision nationale , un groupe d’hommes des forces armées reconnaissables à leur treillis couleur de terre sont assis et discutent. A quelques centaines de mètres de là, c’est le RSP : les hommes  habillés en treillis verts occupent les lieux. Mais l’armement est plus discret que la veille. C’est là que se trouve le domicile de Gilbert Diendéré.

 

C’est dans un tel contexte qu’à la salle des banquets du quartier Ouaga 2000, le président de la Transition était en train d’être réinstallé dans ses fonctions de chef d’Etat. Même si les regrets du général Gilbert Diendéré ne l’empêcheront pas.

Bien avant, quand les Burkinabè se sont réveillés ce mercredi matin, ils ont appris que le RSP et les FAN ont trouvé un accord. Il n’y aura plus d’affrontements. Cela vient rappeler à tout le monde que malgré de très fortes divergences, ce peuple est capable de s’entendre pour l’idéal : la paix.


Jour J+6 du coup d’Etat : une journée tendue à Ouagadougou

Les Forces armées nationales (FAN) vont-elles attaquer ? Le régiment de sécurité présidentielle (RSP) va-t-il rendre les armes ? Que va décider la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ? Ce sont  autant de questions que se posaient les Burkinabè depuis que les FAN ont décidé de prendre leur responsabilité pour faire face au coup d’Etat orchestré par Gilbert Diendéré et ses conséquences sur la vie sociopolitique burkinabè. La journée était tendue à Ouagadougou.

Lorsque les Burkinabè se sont réveillés ce mardi 22 septembre 2015, la plupart d’entre eux pensaient qu’on assisterait à un affrontement sanglant entre les Forces armées nationales (FAN) et le régiment de sécurité présidentielle (RSP). Une guerre fratricide que redoutaient beaucoup également. Comme on le dit à Ouagadougou, « une balle perdue ne fait pas de différence entre un civil et un militaire ». Le chanteur ivoirien Billy Billy, affirmait également « La guerre, c’est doux quand on regarde à la télé ».

Ce lundi, le centre-ville, comme c’est le cas depuis le début de la crise, est vide. Cela n’empêche pas certains de vaquer à leurs occupations. La place de la Nation est quadrillée par les FAN. En face se trouve le camp Guillaume Ouédraogo. Impossible de passer par là pour rejoindre un autre quartier. L’on aperçoit des militaires en pick-up, à motos, mais aussi dans des véhicules de transports en commun se déplacer dans la ville.

Les alentours du siège du Conseil de l’Entente, où se trouve le domicile du général de brigade Gilbert Diendéré est occupé par des militaires du RSP lourdement armés. Certains témoins affirment également que les alentours du siège du palais de Kossyam sont également occupés. Les deux camps se feraient face.

Les oreilles collées au téléphone portable avec ou sans écouteur, l’on zappe de radio en radio pour savoir ce qui se passe. Que va-t-il arriver après 10 heures, puisque les FAN ont donné un ultimatum qui expire à cette heure-là pour que le RSP dépose les armes. Rien à 10 heures passées. Difficile pour les cardiaques.

Les négociations continueraient. Le général Gilbert Diendéré pour sa part a animé une conférence de presse pour annoncer qu’il ne voulait pas faire couler de sang, mais se défendrait s’il était attaqué. C’est presque le même message du côté des FAN : éviter un bain de sang.

C’est peut-être dans ce sens qu’après 18 heures, aucun coup de feu n’était entendu. Gilbert Diendéré attend la décision de la Cédéao. Les FAN semblent avoir retardé leur attaque pour des négociations qui se dérouleraient sous l’égide du Mogho Naba. C’est dans un tel contexte, que l’on apprend finalement qu’un groupe de quatre chefs d’Etat se rendraient à Ouagadougou afin de trouver une issue pacifique.

Les informations, bien avant, étaient rares. Beaucoup de rumeurs. Chériff Sy, le président du Conseil national de la transition (CNT) qui s’est également auto-proclamé président par intérim a signé un décret pour dissoudre le RSP. Pendant ce temps, les messages d’apaisement se font attendre. Il faut attaquer !

Le lundi 21 septembre 2015, une foule s’est rendue chez le Mogho Naba, le chef des Mossi de Ouagadougou où se serait trouvé le chef des putschistes Gilbert Diendéré l’obligeant a écourté sa visite.

Et pourtant, peu de personnes au Burkina ont vécu une guerre et ignorent ses conséquences. La guerre, c’est doux quand on regarde à la télé (les films).


Coup d’Etat J+5 : le projet d’accord de la CEDEAO ne passe pas

Des manifestants sont encore descendus dans la rue ce lundi 21 septembre 2015 pour exprimer leur désaccord avec le projet proposé la veille par le médiateur de la CEDEAO, Macky Sall, pour une sortie de crise. Des pneus sont encore brûlés et des barricades ont été installées sur la route pour ralentir les militaires du Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP).

Des voies barrées avec des pneus enflammé au quartier Zone 1
Des voies barrées avec des pneus enflammé au quartier Zone 1

 

Au quartier Somgandé, et comme depuis le premier jour du coup d’Etat mené par le général de brigade Gilbert Diendéré, les habitants sortent chaque jour pour manifester contre la prise de pouvoir. Sur la route menant à Kaya, difficile de passer à partir de la station Total. Sur près de 300 mètres à partir du siège de la SOTRACO, des barricades sont installées à plusieurs niveaux. Sur les arbres, des jeunes coupent des branches pour ériger les barricades. Il vaut mieux quitter la route en traversant l’espace de la SOTRACO et passer par les « six mètres », à l’intérieur des quartiers. Un jeune homme aux dreadlocks explique sa déception quant au nouveau projet d’accord proposé par le médiateur de la CEDEAO, Macky Sall : « Cet accord ne sert à rien. Je n’ai pas fait de longues études mais le mot démocrate signifie dialogue et non violence. Personne ne devrait pouvoir prendre le pays en otage et parler de démocratie. » Il s’oppose à l’amnistie que propose le général de brigade Gilbert Diendéré : « On ne connaît pas le nombre de morts ». Un autre jeune homme, lui, ne comprend pas l’acte du RSP.

« Nous avons l’impression que dans un pays comme le Burkina, qui a connu une révolution qui nous a permis d’espérer une relance économique et une vie meilleure, va connaître un coup de massue de la part d’un régiment de sécurité présidentielle censé assurer la sécurité du Président alors qu’il le prend en otage », souligne le jeune homme en question.

Au quartier Somgandé, les résistants ne baissent pas les bras
Au quartier Somgandé, les résistants ne baissent pas les bras

Les manifestants, compte tenu du contexte, préfèrent garder l’anonymat. C’est le cas également de la seule fille du groupe qui installait des briques : « Nous sommes sortis ce matin pour dire non au RSP. Même s’ils ont décidé de rendre le pouvoir. Ils ont demandé l’amnistie. Et les morts, on en fait quoi ? ». Une question dont la réponse se trouve ailleurs.

Dans d’autres quartiers, notamment à la zone 1, de nombreuses barricades constituées de pneus enflammés barraient la route. Certains tentaient de passer au travers des flammes. C’est le cas également sur l’avenue Charles de Gaule. Les usagers sont obligés de passer par les quartiers.

C’est dans un tel contexte qu’on annonçait une convergence des forces armées nationales (FAN) sur Ouagadougou pour attaquer le RSP.


J+4 du coup d’état : six morts, 108 blessés transportés à l’hôpital Yalgado Ouédraogo

Ce dimanche 20 septembre est la 4ème journée de l’officialisation du Coup d’état du Régiment de Sécurité de Présidentielle (RSP) contre le Président de la Transition Michel Kafando. Mais, le coup a commencé bien avant le mercredi 16 septembre 2015 avec la prise en otage du président et trois de ses ministres. Depuis, les tentatives de manifestations sont dispersées mais avec des conséquences : six morts, 108 blessés enregistrés à l’hôpital Yalgado Ouédraogo de Ouagadougou.

Yacouba Traoré a été tabassé par des éléments du RSP à l'hôtel Laico
Yacouba Traoré a été tabassé par des éléments du RSP à l’hôtel Laico

 

Au service traumatologique de l’hôpital Yalgado ce dimanche, c’est une forte odeur de pourritures mélangée à celle de l’eau de javel qui accueille le visiteur. A l’entrée, un groupe de la Croix Rouge burkinabè disserte. Cependant, ils ont le droit de réserve tout comme les médecins. A l’hôpital Yalgado Ouédraogo, l’on a décidé de ne pas trop communiquer sur cette situation.

Ce dimanche, trois patients sont arrivés pour des coups et blessures. Parmi eux, Yacouba Traoré, installé au fond de l’une des salles du service traumatologique. Couché, il gémit, tourne sur lui-même, tente de se relever, se recouche, ouvre les yeux, regarde autour de lui. Tout cela se fait sous le regard d’un ami Arnaud Kaboré qui l’a accompagné. Lorsque ce dernier tente d’expliquer ce qui s’est passé, le patient interpelle : « Je peux parler ». Il raconte :

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« On était à Laico. Quand, on est arrivé, on a chanté l’hymne nationale. C’est après l’hymne nationale que le RSP est arrivé. Ils étaient tous cagoulés. On a essayé de fuir. Quand on courrait, ils ont commencé à tirer des rafales. Moi j’ai essayé de m’échapper. Je me suis retrouvé au niveau de CERCO. Là-bas, on était quatre. Ils sont arrivés. Les autres ont essayé de s’échapper. Je n’ai pas trouvé d’autre endroit. J’ai essayé de faire demi-tour. Ils m’ont poursuivi. Quand ils me poursuivaient, j’ai affronté un élément. Je ne pouvais pas. J’ai vu qu’il était seul. J’ai essayé de l’affronter. Je lui ai donné quelques coups. Quand ses éléments ont vu ça, ils étaient tellement énervés, ils m’ont poursuivi. J’ai sauté, un mur et j’ai vu un V8 qui passait (apparemment il est entré dans le véhicule). J’ai demandé au monsieur d’accélérer pour me sauver.

Il était au téléphone. Ils l’ont tiré des rafales. Il s’est arrêté. C’est là, il m’a livré et ils m’ont tabassé avec l’arme. Ils m’ont tabassé avec leur arme aux cottes, au dos, sur la tête. On me piétinait aussi. Il y a un autre qui disait de « finir avec lui ». Quand j’ai entendu ça, j’ai coupé la respiration pour avoir la vie sauve. Ils m’ont tabassé et à un moment donné, ils m’ont bougé pour voir. Je ne respirais pas. Ils sont partis. Quand, ils sont partis, je me suis levé. J’ai vu un monsieur. C’est lui m’a amené au bord du goudron. J’ai appelé des amis et ils m’ont amené ici ».

D’autres fréquentent les locaux de l’hôpital Yalgado Ouédraogo depuis plusieurs jours. C’est le cas de Eric Sandgié, le bras droit dans un plâtre après avoir reçu une balle. Le jeudi 17 septembre 2015, il tentait de rentrer chez lui mais les voies étaient barricadées ou occupées par le RSP.

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Eric Sandgié a une fracture au bras
Eric Sandgié a une fracture au bras

« Arrivé au niveau de la cathédrale, ils ont barré leur voiture et ils tiraient partout. Je suis reparti au niveau de l’école Saint Exupéry pour aller passer au niveau de la direction des sapeurs-pompiers. Quand je suis arrivé à la direction des sapeurs-pompiers j’ai vu que d’autres ont barré la voie avec un cargo et deux militaires qui étaient sur une grosse moto. Ils ont garé la grosse moto et ils sont venus vers nous.

Quand, ils arrivent tout le monde ronflent sa moto et repart d’autres courent. Quand j’ai voulu me retourner avec mon vélo, celui qui était sur la moto a tiré sur mon bras. Mon bras s’est cassé. La balle est sortie par derrière. Je suis tombé. Un gars a enlevé son débardeur pour poser un garrot. Les sapeurs sont sortis. Tous leurs véhicules étaient occupés. Il y a un qui m’a mis au dos et m’a envoyé vers une clinique. C’est là-bas qu’ils ont nettoyé, puis cousu le bras. C’est avec leur ambulance qu’on m’a amené ici. (…).

Youssef Ouédraogo, lui habite le quartier Larlé de Ouagadougou. Ce samedi 19 septembre 2015, il a subit la furie des éléments du RSP alors qu’avec des amis, ils manifestaient pacifiquement selon lui. Il a eu une dent cassée :

« On nous a frappé vers Larlé hier (samedi 19 septembre) vers 9 heures. On m’a envoyé à Pogbi. Maintenant ça va. Comme j’ai des troubles de vision et j’ai mal à la dent, on m’a dit de venir ici. C’est imb…… avec la tenue du RSP, teint clair. Je sais que si on se croise un jour en cours de route, je ne le laisserai pas.

On revendiquait notre droit. On ne brûlait rien. On était à côté de la gare de Rakiéta. Nous sommes un groupe, Ouaga 24. Ils étaient deux militaires. Ils sont venus. Ils nous ont flattés en nous disant : « nous sommes avec vous ». Ils ont demandé des cigarettes. Nous avons dit qu’il n’y a pas de cigarettes ici. Puis on s’est mis à crier « Libérez Kafando, Libérez Kafando ». Le temps qu’on se rende compte, ils nous ont pris par surprise. Mon compagnon, lui il saigne du nez. Ils ont d’abord tiré. On n’a pas reculé. On avançait. Les autres ont fui. On était cinq contre eux. C’est à ce moment que l’un d’entre eux a pris une kalach pour taper mon compagnon ».

A l’hôpital Yalgado Ouédraogo, certains confient que c’est le premier jour de la répression qu’ils ont eu des problèmes. Certains refusaient de se rendre au service à cause de l’insécurité. Mais selon des informations recueillies sur place, la plupart des agents vient. Ils ont aussi l’appui de volontaires.

 
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Coup d’Etat du RSP J+3: les résistants toujours au front

Ce samedi 19 septembre 2015, trois jours après l’officialisation du Coup d’Etat du Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP), rien n’est annoncé dans la ville de Ouagadougou. En traversant le centre-ville, on voit que beaucoup de Burkinabè ont pris la ville d’assaut. Au niveau de la Société Nationale Burkinabè de l’Electricité (SONABEL), située en face de l’Etat-major général des armées et à 100 mètre de l’Institut français, on aperçoit de longs rangs. Ils sont venus payer leur facteur ou s’approvisionner en crédits pour l’électricité.

La détermination se lit dans les actes
La détermination se lit dans les actes

 

Quelques rares personnes circulent aux alentours de la Place de la Nation. Juste en face de l’immeuble abritant le siège du Médiateur du Faso, une vingtaine de militaires du Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP) reconnaissables à leurs treillis verts sont installés. Un pick-up est à côté d’eux. A part ça, tout est calme dans le centre-ville.

Cette ambiance est trompeuse. Une nouvelle fois, il faut se rendre dans les quartiers périphériques pour mieux comprendre ce qui se passe à Ouagadougou. Au quartier Nonsin, aux environs de 9 heures, des jeunes à divers endroits installaient des barricades. Au niveau du Maquis Wend-Konta, sur la route menant à l’hippodrome de Hamdalaye, des jeunes ont brûlé un pneu dont les flammes et la fumée montent haut dans le ciel. D’autres ont installé des barricades. Mais la mobilisation reste timide à ce niveau.

 

Les enfants également sont mobilisés autour de leurs grands frères
Les enfants également sont mobilisés autour de leurs grands frères

A Tampouy, et notamment sur l’axe Ouagadougou-Ouahigouya, les résistants ont barré la route pour empêcher le passage du train. De ce côté là, ils sont plus déterminés. De nombreux pneus sont brûlés. Ceux qui tentent de rejoindre l’autre côté sont obligés de faire des détours.

 

En voulant immortaliser la scène, un jeune qui semblait être le leader lance : « Il faut poster ça à Barack Obama ». Au milieu d’eux, des enfants aident à barricader la voie en apportant des pierres. Certains soufflent dans des vuvuzelas ou des sifflets.

Des gouttes de pluies viennent disperser le monde présent à ce niveau. Mais comme s’ils s’étaient donné un mot d’ordre, les manifestants réapparaissent. Cette fois, ils décident de se rendre à la Place de la Nation. Ils marchent jusqu’au niveau du commissariat de police de Tampouy.

Mais à partir de là, certains semblent peu motivés. Tandis que d’autres avancent, certains s’arrêtent. En approchant les discussions, on comprend très vite qu’il est difficile de traverser le pont. S’ils continuent, ils risquent de se faire prendre en sandwich. « Il y a des enfants parmi nous et certains risquent de tomber dans l’eau », fait savoir l’un d’entre eux. Bien qu’ayant décidé d’avancer, les jeunes doutent encore.

Visiblement, les résistants manquent d’organisation. Justement, plus aucune radio d’information locale n’émet. Il n’y a pas de mot d’ordre à suivre.


Dépénalisation des délits de presse au Burkina : mieux vaut la prison !

Le Conseil national de la Transition (CNT) au Burkina a voté le vendredi 4 septembre 2015 une loi qui supprime les peines d’emprisonnement pour les journalistes accusés de délits de presse. Cependant, si un journaliste est reconnu coupable de diffamation, son organe doit payer entre un et cinq millions de francs CFA. Compte tenu de la situation économique des médias burkinabè, combien d’organes peuvent se permettre de débourser une telle somme et survivre ?

Le député, journaliste Jean Hubert Bazié devant ses pairs a défendu le projet et ne s'est pas opposé aux lourdes amendes (ph. Boukari Ouédraogo)
Le député, journaliste Jean-Hubert Bazié devant ses pairs a défendu le projet et ne s’est pas opposé aux lourdes amendes (ph. Boukari Ouédraogo)

Les journalistes présents lors des votes pour la suppression des peines d’emprisonnement se sont rendu compte d’un subterfuge de la part du gouvernement. Un article avait été auparavant supprimé dans les textes. Juste au moment, où les députés voulaient passer à l’article suivant le rapporteur du jour a fait savoir que le gouvernement a introduit un recours : « En cas de récidive l’organe en question devrait payer le double de l’amende ! » Malgré la protestation de certains députés surpris et pris par contre-pied, il s’avère que c’était réglementaire puisque seul le gouvernement peut introduire un tel recours à la dernière minute.

La situation socioéconomique des organes de presse au Burkina Faso ne permet pas de débourser ne serait-ce qu’un million de francs CFA et survivre. La plupart vivent dans un contexte de précarité qui ne permet pas souvent d’offrir plus 50 mille francs CFA à un journaliste. Les médias burkinabè sont obligés de recruter de jeunes au chômage et qui trouvent par là une occasion d’avoir un salaire à la fin du mois. Demande à un organe de presse de payer cinq millions, c’est le condamner à mourir.

Un cadeau empoisonné

C’est un vrai piège que le gouvernement de la Transition et le Conseil national de la Transition (CNT) ont tendu aux journalistes burkinabè. Un cadeau empoisonné. S’il y avait à choisir, entre payer 1 à 5 millions de francs CFA et passer trois mois en prison et ressortir trouver son journal, sa station de radio ou sa chaîne de télévision en marche, le choix est vite fait. Mieux vaut passer trois mois en prison !

En votant pour la dépénalisation des délits de presse dans ce contexte, certains députes pensaient peut-être rendre service à la presse
En votant pour la dépénalisation des délits de presse dans ce contexte, certains députes pensaient peut-être rendre service à la presse.

L’amende proposée au départ par le gouvernement était de 5 à 10 millions de francs CFA avant d’être revue à la baisse suite à une pression de certains partons de presse et d’universitaires et certains députés, le gouvernement a revu l’amende à la baisse. Le ministre Fréderic Nikièma relève que le gouvernement s’est inspiré des pratiques excitantes dans la sous-région.

Toutefois, le Burkina Faso ne vit pas les mêmes réalités socioéconomiques que les pays de la sous-région. Les subventions de la presse dont ces pays bénéficient sont, par exemple, plusieurs fois supérieures à celles du Burkina Faso.

Le public a peur des journalistes

Personnellement, j’ai toujours été opposé au fait qu’on accorde une immunité à une personnalité sauf au chef de l’État. Cela ne veut pas pour autant dire que je sois contre le principe.

L’une des craintes se situe dans le fait que certains citoyens mécontents des peines financières ne veuillent régler les comptes par d’autres moyens déconseillés. En plus de cela, les journalistes qui manquent de formation ou mal formés peuvent se laisser aller à des dérives en croyant qu’il s’agit d’une porte ouverte à tout.

En effet, le citoyen burkinabè a peur du journaliste. Pour ceux qui ont observé le comportement des députés lors des différentes, ils s’apercevront vite qu’ils pensent que c’est un privilège qu’on fait aux hommes de médias. « C’est une occasion pour eux de nous insulter impunément ». Voilà ce qu’ils pensent.

On pourrait leur donner raison, car pour le commun des mortels, lorsqu’on attaque une personne en justice, on attend de la voir en prison. Est-ce qu’un million ou même cinq millions peuvent laver l’honneur souillé ? Non.

Nécessité d’une éducation aux médias

Toutefois, c’est dans ce domaine qu’il faut recourir à l’éducation aux médias. Le public a une telle méconnaissance du journalisme qu’il considère ses professionnels comme des personnes qui fouillent dans son intimidé. Ils sont souvent confondus à des enquêteurs policiers à cause des questions qu’ils posent tout le temps, mais aussi parce qu’ils sont toujours les premiers à révéler ce qui est caché. Il faut instaurer une confiance entre le public et les journalistes.

En plus de cela, les journalistes eux-mêmes doivent être mieux organisés pour pouvoir écarter les brebis galeuses en toute humilité. Le métier est tellement ouvert et mal régis que n’importe qui peut s’improviser patron de presse, journaliste. Chez les Mossi du Burkina, l’on affirme souvent que « c’est un seul âne qui a bouffé la farine et l’on accuse tous les ânes d’avoir le museau blanc ».


Attaque « terroriste » à Oursi : un avertissement pour le Burkina

La brigade de gendarmerie d’Oursi village situé dans la province de l’Oudalan dans la région du Sahel a été attaquée le 23 août 2015 par une bande armée non identifiée. Selon des témoignages, les assaillants auraient fait savoir qu’ils sont affiliés au groupe de terreur Boko Haram. Que ce soit une attaque terroriste ou pas, il s’agit d’un avertissement que les autorités burkinabè doivent prendre avec le plus grand sérieux.

Au delà des gendarmes, toutes les forces de défenses et de sécurité doivent être suffisamment armées (ph.https://www.gouvernement.gov.bf)

Comment ces bandits ou encore terroristes, s’y sont pris pour attaquer la gendarmerie d’Oursi ? Selon les habitants, les assaillants ont tendu un piège en envoyant une fausse alerte. Lors de cette attaque,  le maréchal des logis (MDL) chef Abdoul Ba Souleymane Ilboudo a été tué. Les assaillants se sont rendus également au domicile du chef de brigade où ils ont fait deux blessés.

Premier kidnapping au mois d’avril

Cet exemple laisse croire qu’il s’agit d’un règlement de compte tandis que d’autres estiment qu’il s’agit d’une attaque terroriste. Toutefois, cette situation doit interpeller la population et les autorités burkinabè. Le Burkina Faso n’est pas à l’abri des attaques terroristes.

Le 4 avril 2015, un Roumain a été enlevé à Tambao par des hommes armés. Depuis, plus aucune nouvelle. C’était la premier enlèvement d’un expatrié sur le sol burkinabè. Le groupe djihadiste Al-Mourabitoune a revendiqué l’attaque. Depuis, aucune nouvelle. De plus en plus, les attaques se rapprochent du Burkina Faso. Avant cela, les Burkinabè pensaient qu’ils étaient protégés et que cela n’arrivait qu’aux autres. Aujourd’hui, l’on se rend compte que nul n’est à l’abri d’une possible attaque terroriste et le mal peut venir de partout.

Banditisme grandissant

Le Burkina Faso; un terreau fertile pour le développement de groupes terroristes. Presque chaque jour, les forces de sécurité, gendarmerie annoncent l’arrestation de malfaiteurs. Ils sont souvent présentés à la presse. En général, il s’agit de récidivistes. Mais, aussitôt arrêtés, ils sont immédiatement libérés. Le recrutement des terroristes pourrait se faire au sein de cette communauté de voyous. Le chômage conduit facilement les jeunes à accepter toutes sortes de propositions. Ils ne seront donc pas insensibles aux offres mirobolantes de groupes djihadistes. Boko Haram l’a prouvé.

Ce groupe terroriste cherche à séduire les pauvres et généralement les personnes illettrées. Des jeunes qui se sentent exclus du système social puisque sans diplôme leur permettant d’espérer un emploi se laissent tenter par cette voie. Afin de s’enrichir certains d’entre eux n’hésitent pas à se lancer dans le kidnapping d’étrangers. Ce ne sont les coupeurs de route, les trafiquants et foyers de drogue qui manquent au Burkina Faso. Il ne suffit que d’une étincelle pour mettre le feu aux poudres.

Les groupes djihadistes l’ont prouvé. Ils savent vendre du rêve aux jeunes. Et pour des gens qui n’ont plus rien à perdre dans leur vie, rejoindre les groupes terroristes devient la voie du salut. Il faut donc s’attaquer, malgré le retard déjà pris, à ce mal à la racine en sensibilisant les jeunes mais surtout en leur offrant de l’emploi. Indéniablement, il faut un engagement total dans la lutte contre la pauvreté en mettant la jeunesse au cœur de toutes les initiatives.

Un plan de lutte contre le terrorisme

S’il faut lutter contre le chômage qui est une course de longue haleine compte tenu de la pauvreté du Burkina, il faudra pour cela mettre l’accent sur la sécurité des populations et la défense du territoire national. Il est incompréhensible dans un pays de savane comme le Burkina que des bandits puissent attaquer une gendarmerie et s’enfuir sans laisser la moindre trace.

Au Burkina , l’on enregistre de plus en plus de conflits locaux entre agriculteurs et éleveurs. Il s’agit d’une question également à prendre à bras le corps. Sinon, la situation risque de pourrir et il ne sera pas étonnant qu’un jour, un camp bascule dans un groupe terroriste.

L’attaque d’Oursi est la preuve même du dénuement dans lequel les forces de sécurité et de défense sont logées. Il suffit de faire un tour dans n’importe quel commissariat ou gendarmerie du pays, l’on constate qu’il n’y a souvent pas de véhicules d’intervention. Les bandits sont souvent mieux armés. Le personnel est insuffisant. 

Il faut donc un véritable plan de lutte contre le terrorisme. Les autorités auraient dû être interpellées depuis longtemps. Le Burkina Faso est entouré de pays qui connaissent des attaques fréquentes de ces bandits.

Pour le moment, c’est un petit village qui a été attaqué. Un jour, il pourrait avoir des attentats dans au cœur de la capitale.


Présidentielle au Burkina : les regards se tournent vers le Conseil constitutionnel

Le greffier du Conseil constitutionnel du Burkina Faso a reçu 22 candidatures pour le premier tour de l’élection présidentielle 2015 prévue pour le 11 octobre. L’enjeu pour les candidats est désormais de savoir si certains candidats de l’ex-majorité seront disqualifiés par le Conseil constitutionnel. Le verdict sera connu au plus tard le samedi 29 août 2015.

Les Burkinabè attendent avec impatience la liste définitive des candidats à l'élection présidentielle 2015
Les Burkinabè attendent avec impatience la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle 2015

Le nouveau code électoral voté par le Conseil national de la transition au mois d’avril 2015 excluait tous ceux qui ont soutenu l’idée de la modification de l’article 37 de la Constitution. L’article 37 de la Constitution du 11 avril 2000 stipule que « le président du Faso est élu pour cinq ans au suffrage universel direct, égal et secret » et qu’il est « rééligible une fois ». Les personnes visées sont principalement les ministres et les députés en plus de tous ceux qui ont approuvé ouvertement la modification de l’article en question.

Après l’échec d’un recours auprès du Conseil constitutionnel, l’ex-majorité avec le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), parti de l’ancien président Compaoré, ont déposé un recours auprès de la Cour de justice de la Cédéao. Celle-ci a décidé estimé le lundi 13 juillet que « l’exclusion d’un certain nombre de formations politiques et de citoyens de la compétition électorale relève d’une discrimination difficilement justifiable en droit ». Elle considère qu’il s’agit d’une violation du droit de libre participation aux élections. Par conséquent, elle demande au gouvernement burkinabè « de lever les obstacles à une participation aux élections consécutifs à cette modification ». Ce qui de l’avis de l’ex-majorité leur ouvre à l’élection présidentielle 2015.

Si après cette décision l’ex-majorité crie « victoire » et voit en ce verdict une remise en cause de cet article du code électoral, les adversaires estiment également que le verdict de la Cour de la justice de l’instance sous-régionale est en leur faveur conformément à l’article 135 du code électoral et à l’article 25, alinéa 4 de la Charte africaine des élections et de la démocratie ratifiée par le Burkina Faso.

Les regards sont désormais tournés vers le Conseil constitutionnel chargé de valider ou d’invalider les différentes candidatures. Au total, il a enregistré 22 dossiers de candidature. Des organisations de la société civile, des partis politiques remettent en cause notamment certaines candidatures comme celles d’Eddie Komboïgo, l’actuel président du CDP, parti créé par l’ancien président Compaoré en 1996. Autre personne visée, Gilbert Noël Ouédraogo de l’Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA). député au moment de l’insurrection populaire d’octobre 2014 qui s’est finalement muée en coup d’État avec la prise du pouvoir par les militaires, Djibril Bassolé et Yacouba Ouédraogo ministres à l’époque, etc. Le président du Faso Michel Kafando avait, pour sa part, affirmé qu’il respecterait le verdict de la Cédéao. A noter que le patron du CDP, Eddie Constance Komboïgo et Me Gilbert Noël Ouédraogo sont aussi candidats à la députation. 

 

Déjà, les différents partis, les organisations de la société civile (OSC) tentent d’influencer la décision du Conseil constitutionnel à travers des conférences de presse, déclarations dans les médias entre autres. Si certains affirment qu’ils respecteront la décision du Conseil constitutionnel, cela ne semble pas être le cas de tous. Le 22 août 2015, lors de son assemblée générale la coordination des élèves et étudiants du CDP a affirmé qu’elle va «se faire entendre » si une liste de leur parti venait à être invalidée. Et cela,  même si elle exclut l’usage de la force.

L’interprétation du verdict est différente selon le camp dans lequel l’on se trouve. Toutefois, c’est au Conseil constitutionnel de trancher. Il faudrait qu’après cela, chaque camp respecte vraiment cette décision. Le comportement de chaque acteur pourrait constituer un tournant décisif dans l’histoire du Burkina Faso compte tenu de la vive tension qui règne en ce moment.

Cédéao : Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest


Burkina : comment Yacouba Isaac Zida s’est discrédité

Depuis quelques jours, le régiment de sécurité présidentielle (RSP), la garde présidentielle de Blaise Compaoré, est secoué par une tension. Celle-ci est née de l’audition de certains membres de cette unité de l’armée burkinabè sur la base de rumeurs selon lesquelles la sécurité du premier Yacouba Isaac Zida, pourtant ancien numéro 2 du RSP, serait menacée par cette unité. Les tensions qui fréquentes entre le premier ministre et ses anciens collaborateurs ont fini par le discréditer.

Pas de militaire au Burkina

Ce n’est pas la première tension entre le premier ministre Yacouba Isaac Zida et les autres membres du RSP. Le premier Yacouba Isaac Zida a allumé la première mèche en annonçant à la place de la nation (ou place de la révolution), le 31 octobre 2014 que le RSP sera dissout dans la ferveur et l’euphorie de l’insurrection populaire. Pourtant, l’on raconte qu’il a été envoyé par Gilbert Diendiéré qui aurait dû représenter le RSP lors de la réunion des chefs militaires.

Par la suite, Yacouba Isaac Zida qui venait de goûter aux délices du fauteuil présidentiel s’est fendu en de multiples promesses comme un président nouvellement élu à la tête d’un Etat oubliant qu’il a été parachuté à la suite de multiples manifestations. Bien que dans la soirée du 2 novembre 2014, à travers un communiqué lu par Auguste Dénis Barry, ce dernier affirmait que l’armée ne voulait pas le pouvoir. Pourtant quelques heures avant, celle-ci a réprimé des manifestants qui ont tenté d’installer l’ex-députée Saran Séré Sérémé comme présidente de la transition à la place de Zida. Le général Kouamé Lougué, que les manifestants ont réclamé et qui avait refusé a fini avec les deux jambes cassées. Il avait tenté de se faire investir.  Il y aurait eu deux morts ce jour-là à la suite de la répression.

Ayant pris la main et désormais seul maître à bord avec comme lieutenant Auguste Denise Barry, Zida a entrepris des consultations qui ont abouti à la rédaction d’une charte de la transition. Au départ, l’armée a voulu avoir les pleins pouvoirs avant de faire des concessions après de nombreuses pressions. Le candidat proposé par l’armée pour assurer la transition Michel Kafando est désigné président pour conduire le pays jusqu’aux élections du 11 octobre 2015. Kafando nomme Zida premier ministre. Grave erreur ! Zida aurait pu entrer dans l’histoire s’il avait refusé ce poste de premier ministre et s’était mis à l’écart de la politique. Mais le pouvoir à ce quelque chose de si attirant, de si irrésistible qu’on ne peut se détacher si facilement. Blaise Compaoré le sait bien. C’est à partir de ce moment que les problèmes de Zida ont commencé.

La suite donnera raison à tous ceux qui estiment que le lieutenant-colonel aurait dû s’éloigner du pouvoir. Il entreprend une série de nominations et de remaniements qui va toucher l’armée. Il décide de la suspension de primes annuelles remises au RSP. La goutte d’eau qui fait déborder le vase. Le 30 décembre 2014, le RSP aurait humilié Zida en l’imposant des piloris comme à un élève qui ne connaît pas ses leçons. Des revendications sont faites et un délai lui est donné pour les satisfaire.

A la date du deadline, Zida ne s’exécute pas. Il est obligé ce jour-là de se réfugier au palais du Mogho Naba. Des militaires du RSP l’attendaient au Conseil des ministres d’ailleurs reporté pour lui régler son compte. Avec les tractations ils accèdent aux doléances du RSP en renonçant à la nomination de membres du RSP parmi lesquels le colonel Gilbert Diendéré dans des ambassades à l’extérieur du pays, le colonel-major Boureima Kiéré est nommé chef d’État-major particulier de la présidence en remplacement du colonel Omer Bationo…Le compromis trouvé le 4 janvier 2015 lui permet de rester à son poste. Cette crise va beaucoup fragiliser Zida qui opte pour le silence et limite ses apparitions publiques. Dès ce moment, le président Michel Kafando commence à devenir le véritable maître du gouvernement de la transition.

A la mi-avril 2015, lors d’un voyage aux Etats-Unis, Zida se prononce contre la dissolution du RSP. Confirmation le 12 juin 2015 au Conseil national de la transition (CNT) lors d’un discours sur l’état de la nation. Ces déclarations sont d’ailleurs de lui  : « Ça fait 20 ans que je suis au RSP, je connais les capacités de ce régiment, je confirme que nous en avons besoin ». Ces déclarations devaient sceller la réconciliation entre Zida et le RSP surtout qu’un comité de réflexion a été mis en place pour voir la forme que devrait prendre le nouveau RSP. Des pistes ont été avancées. Faire du RSP une cellule de lutte antiterroriste par exemple.

A la suite de ces déclarations, le Balai Citoyen qui a toujours soutenu le premier ministre a animé une conférence de presse le mardi 23 juin 2015 pour exiger la dissolution de cette unité de l’armée. Cette sortie n’arrange pas vraiment le premier ministre. De l’autre côté, le RSP considère certaines organisations de la société civile (OSC) comme des pions de Zida. Et l’objectif était d’utiliser celles-ci pour obtenir la dissolution du RSP trop indépendante.

L’audition des membres du RSP rendue publique sur les rumeurs de préparation d’assassinat contre Zida va activer à nouveau la flamme de la discorde. Ils réclament la démission de Zida et les quatre autres militaires du gouvernement de la transition. Une nouvelle situation qui va affaiblir à nouveau Zida. Des révélations graves et compromettantes pour Zida sont livrées ce dimanche 5 juillet 2015 par le site Lefaso.net. Le premier ministre compte des espions dans le RSP dont l’objectif était d’assassiner certains membres de cette unité. Si ces informations sont fondées, ce serait un coup dur pour l’actuel premier ministre. Cela donnera raison également à tous ceux qui pensent que les OSC ont commis une erreur en cautionnant la désignation de Zida comme chef de l’Etat le 31 octobre puis en l’admettant ainsi que les autres militaires dans le gouvernement.

En plus de cela, Zida s’est fait contredire sur plusieurs questions par Michel Kafando à propos de l’extradition de  Blaise Compaoré.  Il a aussi fait une fausse déclaration en affirmant que la société SOCOGIB a été attribuée à Alizéta Ouédraogo pour un franc symbolique.

Tous ces faits ont fini par discréditer le premier ministre.