Andriamialy

Cherchez l’erreur

Ce n’est pas une blague. Non, ce n’est pas drôle. Et si vous avez ri, c’est que vous avez compris. Donc, dites-le à la CUA.

Fail-corbeille-CUA-Tana
traduction : Fako = ordures (non recyclables)


Les miracles de la lessive (top 7)

Il y a plusieurs façons de nettoyer un vêtement avec plus ou moins de réussite. Je vais vous citer des faits, des témoignages personnels et d’autres « trucs » autour de la lessive et de ses miracles.

1- Quand ça rétrécit

pull

J’étais encore petit et mon frère cadet avait 8 ou 9 ans. J’étais en vacances chez un oncle et une tante qui avaient une machine à laver. Mon oncle avait un beau pull bariolé qu’il aimait bien. Il y a eu, ensuite, une dispute au sujet de ce pull. Je ne me souviens plus si  le mode de la machine n’était pas bon ou si le pull  était interdit de machine à laver ou autre chose. Le fait est que mon frère de 8 ans venait d’hériter d’un mignon petit pull qu’on dirait tricoté pour lui.

 

2- Quand ça s’allonge

bleuMa femme, qui n’est pas sur la photo, dormait un certain temps avec une robe. Cette robe, qui n’est pas sur la photo, non plus, je vous rassures, est bleue et lui arrive aux mollets. Je dois d’abord préciser  que ma femme n’est pas petite. Donc, une robe qui lui arrive aux mollets est vraiment une robe longue, très longue. Où est le problème? Nulle part, sauf si on précise que cette robe a été mon t-shirt. Je le surnommais le « t-shirt vivant » ou le « t-shirt qui grandis » ou encore le « t-shirt arbre » car il grandissait à chaque lavage. Il a commencé comme maillot de foot, taille M, puis de basket quand il permettait des gestes amples des bras. Quand il était déjà un peu long, il me donnait un air de rappeur mais passé mes genoux, j’ai du l’abandonner pour qu’il fasse « robe de nuit » pour ma femme. Il a fini sa vie, paix à son âme, en chiffon, en long chiffon.

 

3- La cheminée comme machine à laver

cheminée

Allez, un peu de culture. Pour ceux qui ne l’ont pas deviné, il s’agit de tissus faits d’amiante ou d’autre matériaux du genre qui avaient des surnoms évocateurs comme « indestructible » ou « Phoenix ». En effet, comme ce matériau résistait au feu, on nettoyait le tissu en le jetant dedans. Aujourd’hui, tout le monde est conscient des dangers de l’amiante. Même si le geste de son nettoyage au feu pourrait toujours fasciner, un tissu de ce genre n’aura plus d’acheteur.

4- Du sel pour le sang

sang

Le truc de grand-mère, maintenant. Il y a plusieurs astuces pour enlever une tâche de sang mais celle que je connais est de mettre plein de sel en poudre sur la tâche et laisser là plusieurs minutes. Ensuite, il suffit de laver le tissu et la tâche est enlevée. Enfin, je ne donne aucune garantie que ça marche à 100% mais l’avantage de cette méthode est que le sel est très accessible si la tâche survient dans la maison.

 

5- Choisir de puer

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Il y a des vêtements qui ne se lavent pas à la machine mais seulement à la main. Il y en a d’autres qui ne se lavent pas du tout et ont droit au « nettoyage à sec ». Mais il y a des vêtements qu’on appelle « vestes de politiciens » qui ne se lavent pas du tout, du tout. Moi qui suis fan de gadgets en tous genres, j’avais, tout jeune, un blouson « double face ». D’un côté, elle faisait veste classe et de l’autre, il faisait plus blouson cool, débrayé. Les couleurs aussi étaient différentes. Donc, il fallait utiliser l’une ou l’autre face selon le reste des vêtements et le code exigé. C’est exactement le même principe que la veste politicienne avec la différence que mon blouson, quand il était tâché, on devait le laver. Le politicien, à force de retourner sa veste, devient puant. Pour cacher cette puanteur, il se baigne dans des parfums de « Repentance », de « J’ai changé » et de « Amnésie ». Et ces politiciens peuvent vraiment revenir au pouvoir. Ce miracle aussi, malheureusement, peut arriver, il faut vraiment faire très très attention.

 

6- La lessive qui blanchit un noir

https://www.youtube.com/watch?v=op_NAuB4cUk

Le buzz de la liste, car tout le monde a été choqué par cette publicité, sauf ses réalisateurs. On y voit un homme noir qui blanchit après un passage au lave-linge. On a crié au racisme. Moi, j’ai pensé à l’acteur. Je me demande s’il n’a pas bien saisi l’humour noir de la pub ou bien s’il voulait juste le salaire qui va avec. Le pire, c’est que si on faisait un sondage, on trouverait surement plus de femmes qui fantasment sur un grand ouvrier noir, musclé, tout sale et plein de sueurs que sur un petit chinois qui sort d’un lave-linge.

7- Et la lessive divine

blanche

Puisqu’on parle de miracle, il faut finir ce top 7 par une citation de la Bible : «  Venez et discutons ensemble, dit l’Éternel : si vos péchés sont rouges comme de l’écarlate, ils deviendront aussi blancs que la neige. Oui, s’ils sont rouges comme la pourpre, ils deviendront aussi blancs que la laine.. «  Esaie 1:18 version Semeur. Ça, c’est le blanchissant ultime, le produit miracle dont rêvent tous les fabricants de savon.

 

Bref, laver le linge est une corvée mais parfois, cette tâche réserve des surprises plus ou moins désagréable. Dans tous les cas, il ne faut pas en avoir peur et choisir toujours la propreté.

 


Fautes de Français

Deux conversations que j’ai entendu ces derniers jours sur la prononciation du français par certains malgaches.

AU MARCHE DES CADEAUX DE FÊTES DES MÈRES

– Bonjour, vous avez des lampes?
– Oui, elles sont là-bas.- Euh…vous n’avez pas des lampes de chevet?
– ?…non, on n’a pas de lampes 220 (prononcez deuchanvé)

 

C’EST MOSHH

– En fait, elle n’a pas aimé car c’était en moche.
– ??
– moche…
– ??
– Tu vois? elle avait aussi un blouson en moche comme celui-là mais elle n’aime pas la moche (mousse).


Un jour, une blague

Je me suis dit : « si je n’ai plus le temps d’écrire ces longs articles qui, comme toute chose, ont des fans et des pas fans, à chaque fois que j’aurais envie d’écrire et que je n’ai pas le temps, je vais poster un article court. Ça me changera ».

Tous les nouveaux articles de ce genre iraient dans le catégorie « humour« , sans aucune garantie qu’ils fassent rire. Ils auront la même image d’entête, une sorte d’estampillage. Le but est d’avoir au maximum, un article humour par jour, puisque c’est court, donc, je peux les préparer à l’avance. C’est une idée à tenter! Pour aujourd’hui, je vais juste partager un lien d’un site d’actualités malgache et l’illustrer du dessin ci-dessous.

 

rajao dit vague Cliquez juste sur l’image pour aller dans l’article en question. Merci et si vous avez aimé, revenez dans cette catégorie, revenez dans ce blog.


L’État malgache est la crimogène

Je n’écris plus assez, à mon goût, faute de temps. Je peux quand même vous faire cette blague de la « crimogène » à la malgache en passant.

photo : Sylvain SZEWCZYK

La faute de langue qui transforme le « lacrymogène » en la « crimogène » n’est pas une invention malgache. Vous pouvez faire la recherche sur Google pour voir que dans d’autres pays et dans d’autres circonstances, des gens ont aussi eu la chance de placer « crimogène », comme dans ce titre d’article assez marrant « on fabrique des bombes avec la crimogène » ou plus sérieusement dans « des attaques à la crimogène et des pleures« . À Madagascar, c’était pendant la crise de 2009-2012 qu’on a vu à la télévision des personnes interviewées dans la rue et racontant comment les « crimogènes » les ont étouffés. Avec la malgachisation du terme, cela donne « voan’lay krimozena izahay » (on a été atteint par la crimogène). Et depuis, le mot est resté dans le langage courant, parfois par ignorance, souvent par malice.

Aujourd’hui, la situation à Madagascar possède des similarités inquiétantes avec celle d’avant 2009. En 2008, le peuple malgache était parmi les plus pauvres du monde. C’est toujours le cas. Le président de la république était immensément riche, tout comme l’actuel. Les syndicats appelaient à la grève, comme aujourd’hui. Le président, à ce moment là, achetait un avion de plusieurs milliards. Le président actuel est accusé d’en posséder un lui-même. Il nie. Toutefois, on sait qu’il a utilisé un jet privé pour un déplacement et cela ne peut pas être gratuit. En 2008, les gens contestaient la tenue du sommet de l’Union Africaine. Aujourd’hui, des gens militent contre la tenue du somme de la Francophonie. En 2008, des menaces de coup d’état ont conduit le président à intervenir par téléphone depuis l’extérieur, jusqu’à écourter ses séjours. Le président actuel a dû le faire aussi quand on a entendu des rumeurs d’attaques contre la télévision et la radio nationales. La seule différence est qu’actuellement, aucun leader ne se montre capable de fédérer les contestataires qui manifestent à gauche et à droite ; les différents syndicats, des agents d’Air Madagascar, les habitants de quartiers délestés du courant et les autres.

Comme en 2009 , les manifestations sont réprimés à coup de gaz lacrymogène. Le gaz lacrymogène, comme son nom l’indique est un gaz qui provoque la création de larmes afin de neutraliser une personne ou un animal (entona mandatsa-dranomaso ou krimozena, donc, en malgache). Et les gens dans la rue, dans les bureaux ou dans les bars de se mettre en garde ou de plaisanter : « – Tenez-vous bien sinon on vous enverra de la crimogène »; « – L’État ne sait rien faire d’autre que nous envoyer la crimogène »; etc.

Soudain, je me souviens d’un de mes professeurs qui, pour n’importe quel terme, sortait sa définition en se basant sur le mot latin à son origine. Il dirait que, la crimogène provient du mot latin « criminalis » qui signifie « criminel » et « gignere » qui signifie « générer, engendrer » avant de conclure par  » écrivez, vous même, la définition.  » Je n’étais pas fan de sa méthode car pour moi, un définition ne s’arrête pas au sens étymologique, mais il est vrai que c’est un bon moyen pour essayer de deviner le sens d’un mot.

Imaginons que ce mot existe. Chaque phrase qu’on entend ou qu’on lit sur la situation à Madagascar prendrait un tout autre sens.

– « Les habitants d’Ambohipo ont manifesté, les gendarmes ont lancé de la crimogène, les habitants ont répliqué par des jets de pierre« .

–  » La crimogène a fait évacué des habitants du quartier et asphyxié des enfants, l’ancien commandant dit que « si c’était un combat d’hommes », il « pourrait aussi amener ses troupes ».

– » Les manifestations sont réprimées à coup de crimogène mais la grogne sociale continue de monter« .

Je soutiens le gouvernement actuel quand il affirme que, quoique l’on dise, des choses ont été faites à Madagascar depuis l’élection du nouveau président. Je n’irai pas jusqu’à dire que ce qui a été fait est positif comme il prétend. Si la démocratie garantit vraiment la liberté de parole, la liberté de manifester ses opinions ; alors plus il y a de manifestations autorisées, plus l’état montre qu’il est démocratique. À l’inverse, si les manifestations ne sont pas autorisées, car elles sont refusées par l’État, il y a moins de démocratie. Comment  savoir ? S’il y a beaucoup de lacrymogène, cela veut dire que, soit la manifestation n’a pas été autorisée, donc le droit démocratique a été refusé, soit les manifestants sont des hors-la-loi, des casseurs, des criminels. Bizarrement, les deux causes peuvent se rejoindre : quand l’état ne donne pas l’autorisation de manifester, ceux qui veulent exercer leur droit qu’ils pensent démocratique de faire des manifestations sont considérés d’office comme des criminels et on leur inflige, au minimum, la crimogène et, au final, ils iront en prison.

Finalement, le lacrymogène servirait à neutraliser des criminels afin de protéger le peuple et ses biens. La crimogène servirait à faire que le peuple soit considéré comme criminel. Heureusement, « crimogène » n’est pas encore dans le dictionnaire mais si l’état malgache continue de l’utiliser sur son peuple, ça va vite devenir le cas.


Le mois de mai stresse les malgaches

Est-ce un syndrome, une coïncidence ou une habitude? Chaque année, l’approche du mois de mai provoque la panique chez les malgaches. Entre faits réels, rumeurs, coïncidences et manipulations, il faut savoir faire preuve de discernement.

 

image : employées d’Air Madagascar effectuant un sit-in le 22/04/2016

La légende du 13 Mai

Au début, le 13 mai n’était pas une légende. Le 13 mai 1972, les étudiants descendent sur la place devant l’Hôtel de Ville à Analakely pour la poursuite de leur manifestations. Le bain de sang qui s’ensuit est considéré comme la marque de la chute de la Première République à Madagascar et la place et les fondations de l’Hôtel de Ville, ravagé par le feu, sont devenus la place du 13 Mai. L’endroit est, depuis, la place où il faut se faire voir pour être reconnu comme un vrai politicien. Devenue un symbole, la place du 13 mai est là où Ravalomanana a entériné la mort de la seconde république et où Rajoelina, 7 ans après a lancé son fameux « Je prends le pouvoir » avant de faire tomber Ravalomanana.La légende est née. C’est devenu comme : « si tu veux faire tomber ce régime, fais-le sur la place du 13 mai! »

Et même s’il n’y a pas un coup d’état par an à Madagascar, depuis plusieurs années, l’opposition essaie toujours de faire quelque chose sur cette place même si c’est devenu interdit. Comme le 13 mai est avant tout une date, elle essaie souvent de caler une manifestation, un rassemblement, un hommage ou n’importe quoi pour ce jour précis. Et comme leur demande d’autorisation est souvent refusée, tout le monde est sur le qui-vive à l’approche du 13 mai pour voir ce qu’il va se passer car, forcément, c’est un 13 mai, il va se passer quelque chose.

Coïncidences

Moi je suis d’avis que les coïncidences n’arrivent pas par hasard. Je veux dire que s’il y a coïncidences, il y a, en amont des causes, communes ou non, qui ont amené à ce que les choses arrivent précisément. Quoi qu’il en soit, c’est vrai qu’à mesure que le mois de mai approche, les contestations contre le régime et son gouvernement se multiplient. Hier, un journal télévisé d’une chaîne privée a commencé en listant les grèves et manifestations en cours actuellement. Je vais en lister moi aussi : les agents de la compagnie aérienne Air Madagascar, les transporteurs, les greffiers et pénitenciers, les ouvriers du chantier du village de la Francophonie, les enseignants, les quartiers délestés du courant, etc.

La recrudescence de ces litiges n’est pas imputable au hasard. Peut-être qu’il y a un effet mois de mai  ou un effet papillon mais, à mon avis, il y a, en amont, des causes bien précises que je ne peux pas énumérer. C’est à ceux dont c’est le travail d’analyser cette situation et d’en tirer les enseignements car le mois de mai est là.

« Mampandry adrisa »

« Adrisa » est une espèce de sauterelle comestible. « Mampandry adrisa » signifie, littéralement, endormir la sauterelle de la technique qui consiste à faire des sifflements pour immobiliser l’insecte qu’on veut attraper. Facile de deviner qu’au sens figuré, on utilise l’expression pour la langue de bois, les promesses d’ivrogne et surtout le discours politique.

Mais à Madagascar, ce qui marche le mieux, c’est la prestidigitation des informations. J’explique, lorsqu’un magicien fait un tour de magie, il attire l’attention de l’assistance d’un côté lorsque de l’autre côté, la magie, ou plutôt l’arnaque opère. Je pense que c’est ce qui se passe à Madagascar. Je ne parle pas du fait que notre président a été pris en photo inaugurant une table de ping pong. Je dis juste que c’est bizarre que c’est lorsque les affaires politiques sont les plus chaudes que les rumeurs les plus improbables alimentent les faits divers : voleurs de cœurs, sorcelleries, vampires et monstres en tous genres empêchent les malgaches de sortir la nuit. Aujourd’hui, on parle d’un bibiolona, c’est un des monstres humanoïdes des légendes urbaines malgaches, terrifiant suceur de sang, qui occupe le devant de la scène; à en oublier le délestage, les coupures d’eaux, les routes coupées, les attaques de bandits, les meurtres, les viols, les détournements de fonds, la mauvaise gestion, et le reste.

Prévoir?

On ne peut rien prévoir. On a juste des amis et de la famille qui nous disent qu’ils font des provisions, qu’il faudrait peut-être y penser car on se sait jamais ce qui va se passer au mois de mai. Mais de l’autre côté, il ne faut pas céder à la panique. Il faut être attentif et prudent. C’est valable pour nous mais aussi pour nos dirigeants. Le mois de mai n’est pas un mauvais moment à passer. Le mois de juin ne sera pas la fin des problèmes. C’est tout de suite qu’il faut prendre le taureaux par les cornes et régler les problèmes avant qu’ils ne se compliquent. Enfin, c’est ce que je ferais si j’étais au pouvoir. Je ferais des mois de mai des mois où les meilleurs décisions sont prises et je ne donnerais aucune raison pour le peuple de se souvenir de leurs ainées qui ont renversé des montagnes au mois de mai.

Bref, le mois de mai, en hémisphère nord, c’est le printemps. À Madagascar, on devrait entrer petit à petit dans le froid. Est-ce le réchauffement climatique ou est-ce qu’il y a une fièvre du mois de mai mais, actuellement, c’est chaud!?

 


Mon cours de malgache avec Henri Rahaingoson

Henri Rahaingoson, c’était notre prof de malgache à l’Université mais je n’ai assisté qu’à quelques séances. Donc, je ne peux pas en dire beaucoup mais je tenais à faire cet hommage à cet écrivain et poète qui nous a récemment quitté. Il y a des gens qui, en quelques mots, vous laissent leurs empreintes indélébiles dans votre esprit.

D’abord, je ne suis pas de ceux qui rendent des hommages aux morts. Pour moi, les morts sont morts. C’est bien de se souvenir de leurs actions et de vivre de ce qu’ils nous ont laissé comme héritage mais pour leur rendre les honneurs, ils faudrait le faire de leurs vivants. Donc, cet article hommage, je l’ai déjà écrit il y a 7 ans, quand Henri Rahaingoson était encore bien vivant et en bonne santé( lire ici, en français) sans l’avoir nommément désigné.

Je trouve que dans ce pays, qui a quand même le respect des ainés comme une des valeurs fondatrices de la société , on ne les écoute pas assez, les vieux. Moi, pourtant, j’aime bien discuter avec les personnes âgées. Je vous ai déjà parlé de ce vieux joueur de valiha rencontré au bord de la mer. Mais il y en a d’autres des personnes expérimentées, plus ou moins âgés qui ont des choses à raconter. La transmission du savoir n’est pas l’apanage des humains, beaucoup d’autres animaux et peut-être des plantes, instinctivement, éduquent leurs progénitures sur les dangers et les opportunités de la vie. Certaines espèces, de l’autre côté, abandonnent leurs petits avant ou juste après leurs naissances. L’autruche est mentionné dans la Bible pour cela. La pieuvre femelle, si intelligente, capable d’imiter ses congénères, d’inventer des techniques et d’utiliser des outils, meurt avant que ses œufs n’éclosent et on imagine bien que si elle pouvait transmettre son savoir à ses petits, elle pourrait bien fonder une civilisation intelligente. L’héritage culturelle et scientifique fait que l’Humanité est aujourd’hui la maîtresse de cette planète.

Mais bon, à part l’article que j’ai mentionné plus haut, je ne peux rien dire de plus sur Henri Rahaingoson. Je ne le connaissais pas personnellement et à l’école, j’étais un mauvais élève qui passait plus de temps à l’école buissonnière que sur les bancs. C’est pour cela que je me suis fait violence à travailler dès…25 ans. Sinon, je sais que j’aurai fini comme certains jeunes de 45 ans qui se marient à leur ordinateur. Justement, ce court passage de 6 mois à l’université, en Sociologie, (…une deuxième passage, en fait), a été le plus grand tournant de ma vie. Pour illustrer, un an après, j’étais en CDI et fiancé. Et la différence était là : les discours des profs visaient à ce qu’on se rende compte de notre valeur et celle des être humains en général. C’est tout à fait normal. La filière devait préparer les étudiants à devenir des travailleurs sociaux. J’avais plutôt l’habitude des professeurs qui étalaient leurs savoirs scientifiques et à juger nos moindres fautes. Là, c’était le contraire. Je me souviens de la prof qui m’a chaleureusement félicité devant toute la classe alors que j’étais loin d’avoir la meilleure note.

Je me dis, alors, que j’ai été chanceux d’avoir été l’élève de Henri Rahaingoson et de beaucoup d’autres super profs. Je n’ai jamais été bon élève mais il y a des mots, il y a des phrases que mes profs ont dit, comme ça, au milieu de leurs cours, mais qui , finalement, m’ont aidé dans toute ma vie. Alors… merci!


Ecouter Madagascar en 1989 sur RFI, avec Lay Corbeille

J’ai flâné dans les archives sonores de RFI, dans ses malles, la radio a gardé les traces du passé. Les « Bruitages d’Océan Indien » ont été recueillis en 1989 par Christophe Campens et Jacques Maunick, ils nous transportent à Madagascar. Ils font surgir des histoires d’autrefois et éveillent les mémoires.

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Aller à Paris, années 1980 vs 2010

Depuis 2 ans, j’ai recommencé à voyager à l’étranger pour mon boulot, avec Mondoblog et aussi avec ma famille. Paris, Port-Louis, Abidjan, Dakar…il y a des épisodes comme ça, dans ma vie où je voyages plus souvent, comme dans les années 1980, au début des années 2000 et, donc, depuis 2 ans. Je peux comparer, de mon point de vue. Mais pour mieux illustrer l’article, disons que les voyageur(se)s s’appellent Koto et Bozy.

Avant le départ

1980

Un jour, Koto a l’opportunité d’aller en France. Ah, quelle bonne nouvelle! C’est la joie, pour tout le monde : pour Koto, bien sûr mais aussi pour toute sa famille (famille proche et élargie : oncles, tantes, cousins, cousines, etc.), ses amis, ses voisins.

Des semaines avant, tout le monde se met à écrire des lettres pour la famille d’andafy (à l’étranger), des lettres de 8 pages chacune. Koto commence à remplir ses valises de voandalana (cadeaux, littéralement : fruits de la route) pour la famille et les connaissances là-bas. Koto pouvait avoir facilement le Visa, son pays étant une ancienne colonie. Il n’a pas besoin de faire le change dans les banques, le Franc Malgache (FMG) pouvait  s’échanger ici ou là-bas. Donc, Koto n’avait à penser qu’à son passeport, son billet et ses valises.

 

2010

Bozy va aller à Paris. Bozy et sa famille sont fiers mais Bozy ne confiera pas ce secret à tout le monde. Ses amis proches le sauront et les autres comprendront par le statut Facebook : « Paris-bientôt! 😉 » . Par ce moyen, Bozy peut communiquer qu’elle va partir sans le dire « officiellement ». Ce qui filtre, un peu, les gens qui vont oser demander service en envoyant un colis. Elle n’a pas que ça à faire! Avec son passeport, elle doit déposer une demande de Visa à l’ambassade 5 semaines avant le départ; elle doit trouver un hébergement; elle doit prouver qu’elle a l’argent nécessaire pendant toute la durée de son séjour; elle doit souscrire à une assurance santé; elle doit jurer qu’elle reviendra au pays après.

Le départ

1980

Le voyage commence la veille du décollage. C’est un jour de fête. Toute la famille est venue des 4 coins de Madagascar pour « hanatitra » (accompagner) Koto à l’aéroport demain. Les grands parlotent dans le salon pendant que les enfants jouent dans la cour. Koto est heureux, impatient, il a un peu peur. Aller à l’étranger c’est un évènement tellement rare.

Le lendemain, quand il fait encore nuit, Koto, sa famille, ses amis, les voisins forment un long cortège pour aller à Ivato (louent même des bus, pour certains). Le Parking d’Ivato est plein. Les gens sortent de voiture, prennent des photos pour immortaliser le moment. Après, on accompagne Koto dans le terminal. Voilà Koto qui va se faire fouiller les bagages avant l’enregistrement. C’est le moment de pleurer. Eh, Koto ne sera absent que quelques jours! Qu’importe, il faut lui donner toutes les bénédictions avant de le laisser partir vers la frontière. Koto est nerveux avec le douanier qui a posé pleins de questions sur ses bagages, avec l’enregistrement, les formalités, les fouilles au corps. Mais il se retrouve dans la salle d’embarquement et peut souffler un peu en regardant les avions sur le tarmac. Toute sa suite : la famille, les amis, les voisins sont maintenant sur la terrasse, là-haut. Au moment de l’embarquement, il sort, à pieds, du côté de la piste vers le Tolom-piavotana, le 747 de la Compagnie nationale ou vers un autre avion d’Air France et commence à regarder vers la terrasse. Il voit plein de gens qui font des signes aux voyageurs. Il répond en secouant vigoureusement sa main au dessus de sa tête même s’il n’a pas vu qui est qui parmi ces centaines de gens. Ces « accompagnateurs » vont continuer à faire des signes de la main jusqu’à ce que l’avion disparaisse dans les nuages.

 

2010

Bozy, se lève de bon matin. Son père va la ramener à l’aéroport avec une amie qui a tenu à l’accompagner. Elle dit au-revoir à son petit frère qui a école tout à l’heure et à sa maman. La voiture roule vite jusqu’aux embouteillages d’Ambohibao. Son père lui raconte les voyages dans les années 1980. Finalement, Ivato n’a pas beaucoup changé. Quand on arrive au niveau du croisement entre le village et l’aéroport, on voit toujours la queue de l’avion qui est stationné sur le tarmac.

Bozy dit au revoir à son père et fait un câlin à son amie avant d’aller déposer ses bagages. Elle a déjà fait l’enregistrement en ligne, donc, elle n’a plus que les formalités à faire. C’est là que tout se corse. Elle et ses bagages à main vont se faire scanner et fouiller au moins 2 fois; elle va devoir prouver son identité au moins 6 fois avant qu’elle ne pourra s’assoir sur son siège. A ce moment, son père sera déjà sur le chemin de son boulot ou la maison selon le jour.

 

Le voyage

1980

Assis sur le siège économique, Koto se sent comme un prince. Les hôtesses et stewards sont attentifs et serviables. Il prend le petit carton où les menus des repas et les programmes des divertissements sont inscrits. Koto insère dans ses oreilles des écouteurs qui lui soufflent un courant d’air mélodieux dans les oreilles. Lolo sy ny Tariny, Jaojaoby et les autres constituent la playlist malgache. Il attend avec impatience les films sur le grand écran, comme au cinéma, qui vont orner ce long voyage de presque 20 heures et 2 escales. De temps en temps, Koto se lève pour les WC ou pour parler aux gens. Dans la zone fumeur, la fumée des cigarettes forme un brouillard dans lequel des vazaha (européens) sont en train de discuter à haute voix. Pendant les escales, à l’aller et au retour, Koto allait faire des courses dans les duty free shops, des commandes de la famille : du whisky, des cigarettes, du chocolat surtout. Le reste du temps, Koto dort.

2010

Dans l’avion de Bozy, les gens possèdent tous un écran personnel. Tous? enfin…presque tous. Dès le départ, il y en a toujours 2 ou 3 qui se plaignent que ça ne marche pas. C’est gênant, mais bon, tant que ce n’est pas le sien. Le vol, direct, se passe vite ou presque. Il y a des gens qui se font connaissance, se donnent des adresses ou des profils Facebook. Les autres dorment ou fixent leurs écrans pendant tout le vol.

 

Le séjour

1980

Koto est attendu à l’aéroport d’Orly par un membre de sa famille. Pour lui, l’aventure commence. Pendant tout le séjour, il va se faire passer de famille en famille, de maison en appartement pour visiter les grandes surfaces, les centres commerciaux, les jardins, tout ce qui fait le charme de Paris et qui n’existe pas à Madagascar, quoi! Koto aussi s’émerveille de n’importe quoi, alors…

2010

Bozy, elle débarque à Charles-De-Gaulle. La famille d’andafy est là pour l’attendre. Cette famille d’andafy est divisée en 2 : ceux qui croit toujours que Madagascar est toujours dans les années 1980 et ceux qui pensent que Madagascar est au moins aussi bien la France. Cela fait des phrases comme :

– Viens jouer à Fifa 15 sur ma PS4 … tu connais le jeu FIFA? Ah bon? T’as aussi une PS4? Ah oui? À FIFA 16 tu joues? Bah dis-donc!

ou

– Tu veux faire des courses? Tu crois que tu vas trouver des trucs? Je veux dire… des trucs mieux mais moins cher qu’à Behoririka … des gadgets plus récents et non bridés comme au SUPREM?

 

Le retour

1980, 2010

Koto et Bozy rentrent les valises pleins de trucs que la famille d’Andafy a donné. Un malgache qui rentre à Madagascar sans valise…ça doit exister mais ce n’est pas Koto ou Bozy. La différence c’est que Koto sera reçu comme un prince et une grande fête de distribution de voandalana va être organisée mais Bozy devra, elle, appeler au téléphone portable (chose qui n’existait pas à Mada en 1980) tous les gens qui vont récupérer leurs voandalana.

 

Cette analyse est tout à fait basée sur des expériences personnelles. Peut-être que vous avez vécu ça autrement. Peut-être que vous avez remarqué les mêmes choses. A vous de les dire en commentaires.

 

 


A Ambohijatovo, Place de la Démocratie, l’alternance est de rigueur

Le jardin d’Ambohijatovo ou la Place de la Démocratie selon d’autres appellations jouxte une stèle commémorative des évènements du 29 mars 1947 lorsque les malgaches se sont soulevés contre les colons. Forcément, l’endroit est propice pour que le politicien malgache montre ses aptitudes à exercer la démocratie malgache.

Démocratie malgache

La démocratie, à la malgache ne signifie pas « seulement » que le peuple a le droit d’exprimer son choix via le suffrage universel. Il ne signifie pas, uniquement, la faculté de chacun à s’exprimer librement en faisant attention de ne pas tomber sous la loi sur la diffamation, les insultes, les rassemblements publics, la cybercriminalité et tout le reste. Justement, la démocratie malgache consiste aussi à :

– d’une part, à faire des rassemblements non autorisés comme profiter de la mémoire de nos braves et braver l’absence d’autorisation de se réunir pour se réunir place du 29 mars, par exemple.

– d’autre part, à user de son droit légitime à protéger les gens et leurs biens et à réprimer tout rassemblement non autorisés en usant de toute la force nécessaire : gaz, bâtons, balles, grenades, etc. selon les cas.

Explications et illustrations :

Avant 2009, toutes les manifestations politiques de grande envergure et de grande importance devaient se tenir, traditionnellement, sur la place du 13 mai. En effet, c’était le théâtre des affrontements ayant eu raison de la 1ère république en 1972 et c’est l’endroit choisi par Ravalomanana pour entériner la mort du second. Pourtant, pendant les premiers mois de la crise de 2009, Ravalomanana a réussi à protéger l’accès au 13 mai et les manifestants du TGV d’Andry Rajoelina se sont rabattus sur le jardin d’Ambohijatovo, rebaptisée Place de la Démocratie. Donc, pour résumer, on a :

– Manifestants : TGV

– Au pouvoir : TIM

En 2009 et pendant toute la crise, les partisans de Ravalomanana, en exil ont exigé le retour de leur leader sur la place de la démocratie avec un nouveau nom « les zanak’i Dada » (les enfants de Papa, une mouvance, c’est à dire un rassemblement de partis dont le TIM). Ces rassemblements ont été tolérés un temps (bah, c’était TGV qui l’a baptisé Place de la Démocratie, pour faire des manifestations, alors…) avant d’être interdits pour « diverses » raisons. D’où, l’utilisation des lacrymogènes et leur exil au Magro Behoririka.

– Manifestants : Zanak’i Dada (ex-TIM)

– Au pouvoir : TGV

Quand la crise est finie, suite à l’élection de Hery Rajaonarimampianina du HVM, soutenu par Andry Rajoelina, les zanak’i Dada ont continué de demander le retour de leur Papa et ont continué à demander d’utiliser  cette place. Mais très vite, ils ont du se contenter de Magro.

– Manifestants : Zanak’i Dada (ex-TIM)

– Au pouvoir : HVM (avec le TGV)

Pour les législatives, le TGV s’est mué en MAPAR et a raflé beaucoup de sièges avant de se diviser en MAPAR 1 2 et 3. C’est une autre histoire mais en bref, le HVM n’a pas eu la majorité et a du faire des alliances pour obtenir la majorité parlementaire. C’est ainsi que le TIM a rejoint la mouvance présidentielle. Et même si ce n’est pas la conséquence directe, Ravalomanana est rentré au pays et sa femme est devenue maire de la capitale. Ce qui fait qu’aujourd’hui, ce qui s’est passé le 29 mars c’est :

– Manifestants : MAPAR (ex TGV)

– Au pouvoir : HVM à la Présidence et nouveau TIM à la Mairie

C’est merveilleux, hein?

Ce qui est arrivé au Sénateur Lylison René de Roland, le 29 Mars est, donc, un simple aspect de cette démocratie à la malgache. Cette fois-ci, il était du côté des manifestants recevant les gaz lacrymogènes à la figure quand il faisait auparavant, quand il était Commandant en exercice, partie de l’autre côté. Qui sait ce qu’il fera contre les manifestants du futur quand il sera président ou maire?

Tout ça, rappelons-le, est possible grâce à la liberté que nos ainés ont su conquérir des mains des tyrans. Ils ont donné leurs vies pour que nous puissions jouir de la vraie démocratie. Et heureusement, l’Ecclésiaste (9:5) dit que les morts ne savent plus rien de ce qui se passe sur Terre, sinon, ils dirraient que ces fleurs qu’on jette sur leurs stèles et leur mausolée tous les 29 mars ne sont pas vraiment pour eux mais pour les …démocrates malgaches.

 


Une langue malgache correcte

Depuis le temps des premiers missionnaires et jusqu’à aujourd’hui, à  Madagascar, certains vocabulaires de la langue malgache, jugés trop crus voire diaboliques sont honnis et remplacés par d’autres mots ou expressions. A y voir de plus près, on ne perd pas seulement en richesse mais on devient même ridicules, parfois.

D’abord, pour expliquer, on a le même phénomène en français. On dit rarement « chier » ou « déféquer ». On ne dit pas : « attends-moi là, je vais chier 5 minutes ». Au pire, on utilise le mot enfantin pour avoir « je vais faire caca » et souvent on dit « je vais aller aux toilettes » et que c’est la grosse commission.

En malgache, on ne dit plus « mangery » ou « mivalana« . Souvent, on fait appelle à du frangasy avec « handeha hi-caca aho« . Mais, et c’est là que je veux venir, on trouve aussi un mot sensé être un synonyme ou au moins assez proche mais finalement, c’est bizarre. On dit « handeha hivoaka aho » (Je vais sortir…).

Mais pourquoi on dit « sortir »? Mystère. Mais cela fait des conversations bien drôles aux portes des toilettes. Tu sors? Non, je rentre – Pourquoi? – Je vais sortir – Fais vite, j’ai envie de sortir aussi – etc.

Donc, ci-dessous, je vais donner 4 autres phrases ou expressions en français et en dessous l’interprétation en malgache correct puis la traduction mot à mot de la phrase malgache en français.

 

1- Il est interdit de pisser ici.

Tsy azo anaovana maloto eto.

Il est interdit de faire ce qui est sale ici.

 

2- Aujourd’hui, nous allons étudier les appareils reproducteurs chez l’Humain, à savoir, le vagin et le pénis.

Anio isika dia hianatra ny fitaovam-pananahan’ny olombelona, izany hoe ny maha-vehivavy sy ny maha-lehilahy

Aujourd’hui, nous allons étudier les appareils reproducteurs chez l’Humain, à savoir, le ce-qui-fait-la-femme et le ce-qui-fait-l’homme.

 

3- Pour se reproduire, l’homme et la femme s’accouplent.

Mba hahafahany miteraka, ny lehilahy sy ny vehivavy dia manao firaisana ara-nofo.

Pour se reproduire, l’homme et la femme font une union charnelle

 

4- A la une : Une maison attaquée, une jeune fille violée.

Matoan-dahatsoaratra : Trano iray voatafika, tovovavy iray voaolana.

A la une : Une maison attaquée, une jeune fille tordue.

 

Heureusement, je dis bien heureusement, certaines personnes osent encore utiliser les vocabulaires bien malgaches et originaux sur leurs écriteaux ou dans leurs articles.Et je dis merci à la personne qui m’a inspiré ce billet en me disant quel était son juron de tous les jours. C’est vrai que même le mot « punaise » est un bien gros mot quand on l’utilise en tant que tel. Mais quand le contexte l’exige, pourquoi ne pas utiliser le vocabulaire, malgache, ancestrale qui convient?

 


Antananarivo – 500 Ariary par heure c’est trop cher pour le parking

Les tant redoutés horodateurs vont être fonctionnels à Antananarivo. Mais le prix affiché à 500 Ariary de l’heure est vraiment exorbitant.

C’est simple, je ne sortirai plus la 205 en ville dans la semaine. Cette 205, une caisse GTI de 1986 est maintenant équipée d’un moteur diesel de moins de 2l de cylindrée. Assez bien entretenue, je peux faire l’aller et retour de chez moi, dans la banlieue Est à mon lieu de travail en centre-ville pour 5000 Ariary de carburant (1 Euro 50). Mais si je travaille 8 heures par jour et 2 heures de pause, cela veut dire que je vais payer 10 heures de parking. Si chaque heure est facturée 500 Ariary, cela fera 5000 Ariary en plus (de moins) dans mon budget. Cela va carrément doubler le budget « déplacement ».

Actuellement, le système, à la malgache, « izay tsy mbola hita ny maharatsy azy » (pour lequel on ‘na rien trouvé à redire) consiste à payer à des supposés agents de la commune 200 Ariary l’heure. Parfois, on peut payer moins, parfois c’est un peu plus.

Et puis, il y a eu ces rumeurs d’une entreprise privée qui allait prendre en charge la gestion de ces parkings. J’en ai eu la confirmation quand une enquêtrice m’a proposé son formulaire et je l’ai rapporté dans un article dans un site web malgache. En résumé, ce que j’ai pu avoir comme informations c’était que l’entreprise « privée » voulait mettre en place une gestion transparente et donnerait du travail aux « gars » qui sont en place. Je savais aussi que le prix à payer allait être élevé pour cette « transparence ».

Aujourd’hui, c’est un autre site malgache, relayant un média local, qui informe de la mise en service d »horodateurs qui permettront de comptabiliser les prix des parkings en centre ville. A ce que j’ai compris, il faudra prépayer les places dans des kiosques avant de venir les composter à l’aide de ces machines. Quand à l’organisation, je ne sais pas encore comment cela va se passer. Il y aura des contrôleurs, surement. Je ne conçois pas que les habitants d’Antananarivo puissent du jour au lendemain devenir tellement civilisés pour, d’eux-même, utiliser ces machines sans contrôle.

 

OUI….MAIS

Bien sûr, les conducteurs d’Antananarivo rêvent tous, ou presque, d’une gestion transparente des places parkings. Imaginez-vous vous approcher d’une de ces places quand tout à coup un gars surgit de nulle part et se met à vous guider pour votre créneau. « A gauche, à droite, tout droit… ». Préparez déjà les 200 Ariary pour votre départ toute à l’heure. Pire! Il se peut que vous l’ayez trouvé vous-même cette place de parking. Vous n’avez pas été aidé pour faire votre créneau. Qu’importe! Au moment de partir, vous entendez d’autres « directives ». « Alefa (Allez-y), un peu à gauche, un peu à droite, tout droit…voilà, à la prochaine Madame, Monsieur…. ». Et là, vous devez tendre les 200 Ariary et partir. Et puis pourquoi payer alors que cet énergumène n’a aucun croit de vous soutirer quoi que ce soit? Eh bien parce que cette ville est petite et que les prochaines fois, je n’aurais pas le temps ou le courage de rester dans la voiture pour voir qui viendra dégonfler mes pneus et/ou rayer ma peinture…dans les meilleurs des cas.

En payant, je me met, plutôt, au niveau du bienfaiteur, du patron ou du razoky (ainé) comme ces gars m’appellent. Après un certains temps, ces gars finissent par vous raconter leur vie, misérable, afin, c’est vrai, de vous quémander en plus de l’aide pour la femme qui a fait une fausse couche, l’enfant qui passe le CEPE, le propriétaire qui expulse, la bonne année, etc. Que peuvent-ils offrir en retour, ces pauvres gars? Rien que leur dévouement et leur amitié. La prudence, on ne doit pas l’oublier (ne pas aussi donner son adresse, le nom de sa femme, l’école de ses enfants, etc.) mais cette relation humaine amène à la fin que  la voiture, « notre voiture, à tous », je sais qu’elle est toujours en de bonnes mains.

C’est donc toujours ce même souci que j’ai dès que l’on parle d’une gestion privée des parkings de Tana. Est-ce que l’entreprise va protéger nos voitures? Faudra-t-il que je souscrive à une assurance tous risques? Si elle recrute ces gars, va-t-elle les payer assez? Je connais des agents de nettoyages qui se font encore payer 70 000 Ariary par mois (20 Euro). Même en alignant sur les agents de sécurités qui sont parfois à moins de 40 Euro par mois, cela ne va pas du tout solutionner les problèmes de  ces gars et à la fin, on se retrouvera à payer le parking et à payer les gars en sus. Oui, on sera obligés car … je l’ai déjà expliqué plus haut.

Vous me direz que je suis à côté de la plaque mais pour moi, le problème de parking à Tana est un reflet de notre pauvreté. Donc, ce ne sont pas des horodateurs qui vont tout résoudre.

Je sais déjà que des parkings chers présentent beaucoup d’avantages. Cela suppose qu’ils seront bien entretenu. C’est une supposition. Par ailleurs, 5000 Ariary par jour, vont surement décourager les gens comme moi, de pauvres bougres, à sortir quotidiennement leur vieux tacot des années 70-90 et les pousser à utiliser les transports en communs. Ah! si seulement les transports en communs d’Antananarivo méritaient qu’on les tutoie (expression malgache, explication en bas*). Moins de voitures, moins de pollutions, moins d’embouteillages.

De plus, l’argent va affluer dans les caisses de la commune. M’enfin, c’est à vérifier! J’ai fait l’analyse pour le frais du bus à 400 Ariary (dans le même site que j’ai cité plus haut). Ce qui risque de se passer, avec des frais de parkings à 500 Ariary l’heure, c’est que ces parkings ne vont pas avoir de kil (clients). Je me souviens que l’enquêtrice a fait un parallèle avec Ivato, l’aéroport, où cela marche bien même à 700 Ariary l’heure. Mais qui va à l’aéroport tous les jours? Pas le même malgache qui vient à Analakely tous les jours. On ne va à l’aéroport que si on va prendre l’avion ou si on ramène quelqu’un qui va ou vient de prendre l’avion et dans la plupart des cas, on est assez riche pour payer 700 Ariary. C’est très différent quand on parle d’Analakely et des environs. Ce qui va se passer, c’est que les places aux alentours du centre ville , privées ou encore non annexées par l’entreprise vont être très disputées. Certains trouveront mieux de laisser leur voiture quelques centaines mètres plus loin pour avoir un petit sursis.

Type d'horodateur solaire comme ceux que l'on voit fleurir dans les rues de Tana
Type d’horodateur solaire comme ceux que l’on voit fleurir dans les rues de Tana

Bref, je ne sais pas s’il y a eu une autre enquête ou une étude bétonnée qui a permis à l’entreprise qui gèrera les parkings et à la Commune Urbaine d’Antananarivo d’être surs que les conducteurs de Tana seront capables et ravis de payer 500 Ariary l’heure de parking. J’espère que tout va bien se passer. J’ai déjà vu tant d’investissements de ce genre disparaitre comme si de rien n’était.

 

* les malgaches disent de quelqu’un à qui on ne peux accorder la confiance, le respect qu’il ne mérite pas le tutoiement (tsy fanao ianao).


Le rêve-film

Aujourd’hui, je me dévoile un peu en racontant un de mes rêves; un rêve-film.

J’ai une très grande imagination et je pense que mon niveau de visualisation est aussi bien élevé. Je lis beaucoup et je visionne beaucoup de vidéos et la télévision. J’écoute beaucoup, aussi. Je pense que mon cerveau possède une base de données incommensurable d’images, de sons et de sensations. Je suis aussi adepte du RL. Ce qui fait que dans mes nuits, souvent, je visite des mondes vraiment variés mais très réalistes, je joue des rôles tantôt héroïques, tantôt burlesques, parfois inattendus. Je ferai peut-être un bon architecte dans une inception. Et chaque matin, au réveil, je me sens comme un astronaute qui revient d’une autre galaxie ou comme un bonze qui se souviens de ses vies antérieures. J’en ai, même, fait une catégorie sur mon ancien blog.

Aujourd’hui, je pense plutôt que j’ai, peut-être, juste envie de raconter des histoires. Peut-être qu’un de ces jours, je deviendrai scénariste ou écrivain. Avec mes petites expériences de montage vidéo, pourquoi ne pas envisager de faire un film, aussi? Si seulement quelqu’un me faisait une commande, ha ha ha! Pour le moment, je me contente de cette catégorie « les petites histoires » de ce blog mais un jour peut-être.

Tout ceci pour vous expliquer que l’histoire qui suit est un des rêves (un vrai rêve, j’en rajouterai à peine) que j’ai fait il y a quelques années et qui m’a tellement marqué que je me souviens toujours des moindres détails. Quand je me suis réveillé, je me demandais même si je n’ai pas voyagé dans le temps ou dans un monde parallèle. Jugez-en plutôt.

Mon rêve commence et je me retrouve sur le siège passager d’une voiture. Dehors, c’est un monde couleur terre de Sienne, aride mais couvert de buildings et de gratte-ciels en verre. Je vis dans une civilisation apparemment très avancée.

Moi et le chauffeur, mon coéquipier avons une mission périlleuse. Je le sais. Mais il me parle de tout et de rien et je lui répond. Les réponses me sortent comme ça, comme par magie. J’ai des souvenirs qui concernent tout ce qu’il dit, des personnes qu’il nomme et des autres endroits. Je me perds. Je croyais que c’était un rêve mais c’est si réel. Je perd ma lucidité et je me prend au jeu.

Il me dit qu’on arrive bientôt. Je regarde et je la vois, l’immense pyramide. C’est véritablement une montagne habitée, une tour de Babel moderne. Son sommet, qui touche les nuages est plus brillant car les fenêtres de verres n’y sont jamais ouvertes. Ces niveaux sont pressurisés.  Je sais très bien ce que je dis, ce n’est pas la première fois que je viens. Alors, on descend de la voiture et on s’avance vers l’édifice, si on peut l’appeler ainsi. On monte quelques marches et on rattrape l’ascenseur qui était prêt à partir.

L’ascenseur, c’est un véritable bus vertical qui relie les niveaux de la pyramide. Aussi grand qu’une remorque de camion, il fait des va-et vient sur de sortes de rails au milieu des faces externes. Un opérateur le fait monter et descendre. Je le trouve un peu dangereux car c’est juste un plateforme, sans mur, sans toit mais juste des gardes fous. L’opérateur s’inquiète à la vue de nos armes mais on le rassure en sortant nos badges. Quand même, on décide de se faire plus discret car on ne sait pas qui voyage avec nous. Je fais un tour rapide du coin de l’œil pour vérifier qu’il y a une dame, un homme avec des marchandises assez sales, surement des sacs de pomme de terre et quelques hommes apparemment inoffensifs.

On commence à monter. J’aime admirer les niveaux inférieurs. Il y a de grandes cours à la pelouse verte où l’on voit des enfants jouer, des mères étendre le linge, des étudiants qui sont en récré, des bureaux; tout un monde par niveau. Par réflexe, il m’arrive encore de baisser la tête quand on passe sous les poutres en béton pourtant trop hauts. Puis, la vue sur le lointain se dégage. C’est orange. Derrière les dernières maisons s’étale une terre plate et nue qui se termine au loin par des montagnes toutes aussi nues et le tout sous une couche de poussière orange, un monde sans pluie.

L’ascenseur s’arrête un fois de plus. Nous sommes au niveau H0, là où on descend. On rentre dans de jolies centres commerciaux. On n’a pas le temps de s’attarder, l’homme qu’on recherche se trouve encore dans les étages supérieurs (chaque niveau a encore plusieurs étages, par exemple H0, H1, H2…). On prend un petit ascenseur pour monter. Malheureusement, celui-ci s’arrête avant l’étage voulu car il y aurait une panne. Ce n’est pas normal. Déjà, dès que l’ascenseur s’ouvre, tout est moins beau. L’étage est surpeuplé et tout est désordonné. A mesure qu’on monte les escaliers, de grands escaliers, je me sens de plus en plus oppressé. On entre dans le domaine des mafieux. Ces étales par terre et dans ces escaliers, ces vendeurs et acheteurs nous ralentissent mais on arrive bientôt là-haut.

On vient faire notre boulot. On a un homme à ramener au bureau. On sait où il est mais ce qu’on ne sait pas c’est s’il sera oui ou non coopératif. On rentre comme ça, en trombe dans sa boutique mais on est tout de suite sous les feux des armes. On nous attendait. Bien sûr, nous ripostons et nous sommes bien mieux protégés, mieux armés et mieux entrainés que ces larcins. Mais devant la débandade générale et le nombre de nos adversaires, nous savons qu’il faudrait battre en retraite. Il faut « juste » éliminer notre cible, coûte que coûte.

Je suis confus…dans la fusillade, je suis en train de courir en descendant les marches. Mon coéquipier(…comment il s’appelle en fait? ) est avec moi et il court aussi. Il me dit des trucs que je n’entends pas, que je ne comprends pas. Je me retourne et je vois une boule de lumière sur la bouche d’un canon…si loin, si près…je sursaute…non!… c’était un rêve! Mais quand même c’était comme un film…un rêve-film.

On dit que raconter un beau rêve annule son charme et raconter un cauchemar porte malheur. Celui-là, rêve ou cauchemar, je sais qu’il n’a rien de prémonitoire ou de symbolique. C’était juste un bon film très immersif que je me suis inventé dans mon sommeil, dans mon lit. Et n’allez pas faire mon analyse et dire que je suis frustré ou traumatisé. Plutôt, je vous encourage à approfondir les techniques liés aux rêves (lucidité, induction, etc.) car chez moi, c’est ma drogue.

 


Les nouveaux anciens mots malgache

Je vous ai toujours dit que la langue malgache est une langue forte. C’est aussi grâce au phénomène des « nouveaux anciens » mots.

photo : sorabe malagasy (ancien malgache en alphabet arabe)

 

Il s’agit de mots, apparemment nouveaux mais en vérité anciens qui reviennent subitement à la mode. Aujourd’hui, par exemple, c’est le tour du mot « midoro » qui signifierait « se tenir debout sans rien faire ». Tout le monde l’utilise à tout bout de champ, dans la rue, entre amis, à la maison, sur les réseaux sociaux, dans les forums. Avant « midoro », c’était « tatasika » ou « hery jika » et je suis sur que dans quelques temps, un autre mot émergera comme cela.

C’est à dire que  ces mots, on ne les a jamais entendu auparavant. Ce ne sont pas des mots inventé par un inconnu comme « odoie ». Ce ne sont pas des mots malgachisés dans la rue comme « horera » (horreur). Ces deux moyens d’enrichir la langue malgache, l’invention et l’assimilation, ont déjà été plusieurs fois analysés et expliqués. Voici la chanson de Nanahary à ce sujet :

https://www.youtube.com/watch?v=L4pZgRpQiC8

En fait, je ne connais pas le mécanisme mais je soupçonne un effort des linguistes qui veulent faire renaître ces mots au même titre qu’ils veulent créer de nouveaux pour remplacer les mots étrangers qui polluent notre langue. En effet, l’académie malgache diffuse, de temps à autres, des mots nouveaux, intelligemment aménagés pour être vite compris, retenus et utilisés par toute la société. En même temps, il y a des émissions dans les médias qui rappellent les mots existants comme, par exemple, vahatra, de la Télévision Nationale. Mais je pense bien qu’au final, c’est l’effet de mode qui fait que tel ou tel mot fasse l’effet tâche d’huile comme cela.

Et dans tout effort d’enrichissement de la langue, je pense que c’est encore cette préservation du vocabulaire qui est le plus important. On pourra, après, avoir des synonymes mais il y aura toujours des nuances dans la signification.

Bref, je vois d’un très bon œil cette mode même si, en général, je n’aime pas suivre la mode. Je ne vais pas faire partie de ces gens qui vont dire « midorodoro » à longueur de journée. Mais si un jour j’en ai vraiment besoin, je vais choisir ce vocabulaire à la place de son équivalent en français. Le rêve, le but à atteindre est d’être capable de parler son malgache sans, une seule fois, utiliser de mots étrangers.


Madagascar : On veut éradiquer une espèce entière de « vendeurs »

La scène se passe à Madagascar dans le lieu qu’on appelle « petite forêt ». Les autorités tentent de chasser par centaines des individus de l’espèce dite « vendeur de rue ».

photo : étal d’un vendeur à la sauvette

Le « vendeur de rue » est un être pensant du règne animal,  de l’ordre des primates, de la famille des hominidae, du genre homo, de l’espèce homo sapiens mais un sous-type de « vendeur ». Il est présent partout à Madagascar mais est souvent considéré comme nuisible dans la capitale et plus particulièrement dans la « petite forêt » et aux alentours.

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Petite description

Le « vendeur de rue » ou « vendeur à la sauvette » fait surement partie des premières espèces de vendeur de l’île. On l’apparente aussi avec le vendeur « itinérant », qui est un migrateur, du fait que les deux fabriquent des nids provisoires. Mais on le considère moins noble que d’autres espèces sédentaires endémiques ou importées ainsi que certaines migratrices du fait que son nid est le plus rudimentaire et le moins orné par rapport à tous les autres vendeurs. Rappelons-le, les décorations du nid, chez le vendeur, lui sert à attirer les proies ou les espèces symbiotiques qui lui fournissent l’argent, qui le fait vivre, en contrepartie des ornementations.

Le « vendeur de rue » vit en groupes à la fois hétéroclites et homogènes. En effet, individuellement, ils sont tous uniques, ont des points communs mais la répartition de ces points communs dans l’ensemble est très chaotique. Chez les autres vendeurs, par exemple, il peut y avoir une tendance à se regrouper par type : les bouchers, les quincaillers, les merciers. Il peut aussi y avoir des solitaires comme le boulanger ou le pharmacien. Un regroupement de plusieurs types de vendeurs est même possible dans des lieux qu’on appelle « marché » ou « centre commercial ». Mais un vendeur de rue peut se comporter à la fois comme un tabac et une confiserie ou à la fois comme un boulanger et un publiphone. Pire, selon les saisons, il change de mœurs et s’adapte à toutes les conditions.

Origine

Les liens du vendeur de rue avec les autres types de vendeurs est déjà prouvé. En effet, s’il est un prédateur dans les rues d’Antananarivo, il est aussi une proie des autres vendeurs, notamment les espèces importés d’Asie qui lui prend une grande partie de son argent contre les quelques ornementations qui remplissent son nid. On soupçonne alors que beaucoup de vendeur de rue sont en fait des progénitures de vendeurs de type grossiste, chinois, indo-pakistanais. Mais, bizarrement, l’ADN du vendeur de rue montre que c’est peut-être un type d’homo sapiens vraiment différent qui s’est adapté. En effet, on a retrouvé des gènes de « ouvriers de zone franche », « salariés à mi-temps » et « étudiants sans diplôme ». De la même manière, des familles homo sapiens de types diverses fournissent régulièrement de jeunes spécimens de « vendeur de rue »; phénomène courant mais encore inexpliqué à ce jour.

Un vrai danger?

Le vendeur de rue fait peur du fait qu’il se multiplie très vite et s’adapte trop rapidement. A certaines périodes de l’année, ils sont tellement nombreux qu’ils paralysent toute la petite forêt. De plus, il échappe souvent au plus gros prédateur de l’île. Cet espèce de pieuvre vampire terrestre est pourtant réputé pour sa capacité à sucer tout l’argent des homo sapiens de tout le pays jusqu’à 1/5ème de ce qu’ils ont dans les veines.

Méthode

La méthode utilisée pour tenter de contrôler, voire supprimer la population de vendeur de rue est l’introduction d’une espèce prédatrice qui s’attaque seulement aux ornementations de son nid, le grobra. On ne sait pas si cette espèce effrayante n’est pas seulement des tentacules de la grande pieuvre. En fait, les deux espèces se ressemblent mais la parenté n’est pas établie.

Mais le vendeur de rue est coriace. Nous avons observés une attaque de grobra dernièrement. A l’instar de la mangouste, sentinelle du désert, certains vendeurs de rues font le guet et à la vue de grobra approchant à pied ou en voiture, l’un d’eux donne l’alerte avec un cri ressemblant à certains primates lémuriens ou chimpanzé. Cela fait comme « aaaaaooooouuuuuhhhhh » ou « ooooouuuuuuuhhhhh » ou « reny! reny! reny! reny!. D’un coup, tous les vendeurs de rue disparaissent, un peu comme les pigeons qui s’envolent quand on s’approche, ou les cafards dans certaines cuisines malgaches quand on allume la lumière. Et quand le danger s’éloigne, ils reviennent et redéploient leurs nids en un éclair rappelant un peu la mouche qu’on n’arrive jamais à chasser complètement.

Notre avis

Nous pensons que le vendeur de rue de la petite forêt n’est pas un type réel de vendeur mais une adaptation écologique de plusieurs autres types d’homo sapiens de l’île. Nous dirions que la proportion d’entre eux qui ont vraiment la vocation de l’être est très petite, la plupart étant des individus rejetés dans leur communauté, leur troupeau  d’origine. D’où, nous préconisons plutôt les solutions suivantes :

– réintroduction de vendeurs de rues dans leurs environnements d’origine tels que : écoles, entreprises, usines, etc.

– prise en charge des populations dont les individus se transforment facilement en vendeur de rue

– aménager de nouveaux marchés pour attirer et sédentariser des vendeurs de rue

Tout ceci nécessite de l’argent. Mais si vous avez bien suivi l’écosystème de l’argent dans cet article, vous comprendrez qui  a le plus d’intérêt à trouver et appliquer la solution. Le problème c’est juste la méthode qui est inefficace. On ne pourra pas toujours lui courir derrière, le chasser et lui faire peur.; le vendeur de rue n’est juste pas un animal.


« Amina! Amina! » : la vérité sur ce buzz

Je vais vous raconter l’histoire d‘un de mes plus vieux articles de blog sur la chanson « Amina Amina »  qui continue a être partagé, copié et piraté jusqu’à ce jour.

De quoi s’agit-il?

C’était le 10 Mars 2009. Cela faisait 1 mois que je bloguais. Ce blog,  Lay andriamialy, racontait des faits sur la crise politique qui commençait à Madagascar mais, déjà, je sentais que j’avais beaucoup de sujets, faciles et intéressants, à trouver en parlant de mon pays en général. Entre les analyses et les récits des événements politiques et sociaux, j’avais créé des catégories comme, entre autres, « malgachisation », où je traitais des assimilations de mots étrangers dans la langue malgache mais aussi des relations compliquées qu’elle entretient avec le français et l’anglais. Il y avait aussi « malgachitudes » qui, contrairement à ce que son nom indique, regroupait les articles sur la société malgache. « Jeux gasy »  recensait, expliquait, parodiait les jeux d’enfants typiquement malgaches.

Le premier article de la série des « jeux gasy » avait été écrit à la va-vite. J’essayais, un peu sérieusement, un peu par hasard, un peu par malice, d’expliquer des textes de routines et des chansonnettes en frangasy parfois incompréhensibles. J’ai pris 3 chansons : « ce matin », « 1, 2, 3 zégué » et « Amina! Amina!« .

L’article a eu un certain succès. Il a été partagé sur Facebook et sur Twitter. Il a été beaucoup commenté aussi. Il m’a été rappelé, plusieurs fois ces dernier temps, par des abonnés Facebook qui, sans arrêt, se l’approprient ou le partagent sans savoir d’où viennent ces lignes.

Une petite partie des partages sur Amina dans facebook
Une petite partie des partages d’Amina sur Facebook

Mais comment ça se fait?

Je n’ai pas fait exprès. Mais, si ça se trouve, mon explication d’Amina est bien la bonne, ou peut-être que c’est juste la plus potable. Quoi qu’il en soit, les gens partagent par milliers. Il y a même un blog qui a repris la partie « Amina » de l’article (ici).

Alors, j’avoue, ce n’est pas la vraie signification « originelle » de « Amina! » mais j’ai quand même été un peu rusé dans l’écriture de l’article.

Extrait :

Amina! Amina!
Tu as donné
à Le Zimba
Cela a a
Allez matory ‘se Pascaline a! (allez dormir, chère Pascaline)
Zimbaoe (une contraction de [hoy Zimba hoe: Zimba a dit] )
Jean Claude
Sispé (Suspect)
à la ronde, à la ronde jusqu’en bas
allez matory ‘se…

Pour commencer l’article, j’ai dit que « ce matin dans ma chambrette… «   raconte l’histoire d’une fille qui, comme les paroles l’indiquent, faisait son ménage tout en jouant au piano. Grâce à cette première traduction, j’avais d’office l’approbation de mon lecteur car lui, l’avait aussi deviné comme ça. J’ai ensuite parlé de « 1,2,3 zégué » et mon explication sur le tirailleur Randria est plus que probable car c’est clairement une marche militaire. Et j’ai terminé sur Amina, une chansonnette pour laquelle personne n’a jamais eu aucune idée de sa signification. Je veux dire que de mon vivant, ni les parents, ni les ainés, ni les profs ni personne n’a jamais dit : Amina, c’est l’histoire de ceci ou cela. Pire, tout le monde ne faisait que rigoler sur un mot « suspect » qui en phonétique malgache devenait « sisi-pe » (au coin de la cuisse). Mon idée était de donner un sens, mon sens, à cette chanson mais que cela devait coller, c’est tout.

Et alors?

Déjà, les internautes gasy devraient savoir qu’il faut toujours citer sa source quand on veut partager un article du net. D’abord, par honnêteté, puis, par prudence, car si ça se trouve, vous pouvez être victime d’une arnaque ou d’un simple canular. Là, le fautif est celui qui, le premier a copier-coller le texte en ajoutant :

« hitako tany ho any dia zaraiko… » (j’ai trouvé quelque part et je partage…)

ou « ohatra ny marina kosa ity an!… » (on dirait que c’est vrai ça…)

Les autres qui se croient malins en faisant croire que la traduction est la leur sont juste des vantards qui chassent des « j’aime ». Ils sont pathétiques. Certains veulent « améliorer » la traduction initiale mais sans connaître toute la mythologie que j’ai créé dans ma tête, ça ne va pas coller.

Donc, si un article vous plaît, vous interpelle ou vous choque, donnez le lien.

Au delà de cela, j’ai une grande satisfaction. Encore une fois, j’ai pu voir l’impact possible d’un article de blog même si le buzz a mis 6 ans à se lancer, moramora. Et je le dis assez souvent, nous les malgaches avons besoin de savoir. Nous devons donner des sens à ce que nous faisons. Que signifie Madagascar? Que signifie Malagasy? Que signifie « Amina! Amina! » ?

LA VERITE

Il y a un conte africain, à chanter en tapant des main, qui dit « Amina Tolé ». Vous pouvez le voir dans cette vidéo youtube. Les paroles, dans cette vidéo, sont très contestables, « Pascalina » n’étant pas un mot africain. Dans ce lien de contes musicaux, on a les paroles en phonétique français (sans la traduction). Donc, si quelqu’un a la traduction originale, originelle, ce serait bien de la partager.

Mais nous, quand on était petits, on avait l’histoire que je retranscrivais dans l’article. « Amina » n’est pas la même partout à Madagascar. Si vous entendiez les nouvelles versions, dans certains quartiers, vous seriez pliés en 4 (de rire). Ceux de ma génération, nous parlions bien de « lettre », n’est-ce pas? On a même fait une suite qui disait : »O ry Zimba! O ry Zimba! nankaiza ny valin’ilay taratasy nomeko anao omaly maraina? » (Zimba! où est la réponse à la lettre que je t’ai donné hier matin?). C’est à partir de cela que la première partie entre Amina, Zimba et Jean Claude peut avoir lieu. Un garçon a envoyé Zimba donner une lettre à Amina mais Jean Claude, faisant la ronde, a failli surprendre Zimba. Et ça colle, parfaitement.

Je ne connais pas votre jugement. Moi je dit qu’on peut bien « malgachiser » ou « frangassiser » (nouveau mot, si vous préférez) cette chansonnette. Tant qu’à faire, pourquoi ne pas donner un sens bien malgache à notre contexte? On peut faire ça avec toutes les autres expression qu’on utilise, ou les chansons qu’on chante à la manière miboeriboerika (parler en langues inconnues). On peut donner un sens. Un sens qui va éduquer nos enfants. A quoi ça servirait à votre enfant s’il se souvient, étant grand, de « Amina tiadoné alezimba, selaaa » à part un peu de nostalgie?

 

 

 


Le pousse-pousse ressuscite dans les banlieues de Tana

Chassé du centre ville, le pousse-pousse a depuis un certain temps trouvé le bonheur dans la périphérie d’Antananarivo.

Le pousse-pousse, ce moyen de locomotion originaire du Japon est l’une des facettes asiatiques de la Grande Île. Aujourd’hui, je suis prêt à parier que Madagascar est parmi les premiers pays au monde en terme de nombre de ces engins par habitant. L’utilisation du pousse-pousse est tellement ancienne et généralisée qu’on s’attribue même la paternité du nom français de ce jirinkisha (nom japonais).

Je me souviens de la toute dernière fois où j’ai pris le pousse-pousse à Antananarivo. Oui, je suis assez vieux pour avoir vécu cela. J’avais dans les 6 ou 7 ans et c’était du côté d’Andravoahangy. Petit à petit, les lois et décrets ont chassés ces véhicules du paysage urbain d’Antananarivo. Sauf pour prendre des photos sur l’avenue en temps de fête, il est impossible d’en apercevoir en centre ville. A vrai dire, ils ne sont pas vraiment partis mais se sont juste enlaidis et transformés en ces hideux chars à bras surchargés de marchandises ou de matériaux qui entravent la circulation. Déjà, se mettre sur un pousse-pousse est gênant, quand tu es assis comme un cocher derrière l’homme qui marche et qui court devant toi telle une bête de trait. Lorsqu’on voit ce ou ces pauvres gens charrier une tonne sur une charrette à la force des bras, on ne peut pas avoir l’habitude. C’est trop triste.

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Photo : Martin Kalfatovic

Mais comme on dit, il n’y a point de sot métier. Ce genre de travail,  tirer le char à bras, nourrit son homme, souvent sa femme et malheureusement ses enfants aussi. Mais comme on dit ici, il vaut mieux travailler dur que voler, il ne faut pas non plus chercher à interdire ce travail presque inhumain sauf si on a autre chose à proposer.

De l’autre côté, tracter un humain sur son pousse-pousse est un travail qui est mieux considéré. Il faut voir du côté d’Antsirabe, la capitale malgache du pousse-pousse pour voir combien c’est un métier admiré, envié. Non, pas à ce point là mais tu peux quand même trouver des enfants ou des jeunes qui vont dire que plus tard, ils voudront devenir tireur de pousse-pousse. Et c’est dans ces villes comme Antsirabe, Toamasina ou Mahajanga que le pousse-pousse continue à régner en maitre, survivant à chaque nouvel arrivant que ce soit les taxis, les bus ou les tricycles.

Selon le besoin, chaque ville a apporté des modifications techniques et fonctionnelles aux poussepousses. A Antananarivo, on a toujours le même avec une petite case juste pour une personne, une bâche et des roues en métal cerclé de caoutchouc. A vrai dire, la bâche et le capitonnage ont déjà disparus et il ne reste plus que la carcasse qu’on renforce pour soutenir plus de marchandises. Sinon, l’évolution est allé vers de petits chars à bras comme sur la photo avec des roues de voitures. Dans les autres villes comme Majunga, on a plutôt laissé la version originale qui avait de grandes roues et un capot rabattable au transport de marchandises tandis que la version « passager » est un peu plus petit avec des roues de moto sur des rayons métalliques. La version la plus aboutie semble être celle d’Antsirabe car cette ville présente des descentes et des montées ainsi que des routes plus ou moins bonnes. Et c’est aussi à Antsirabe que le cyclo-pousse s’est développé et est maintenant en assez grand nombre pour concurrencer la version à pied.

La version initiale encore utilisée à Toamasina
La version initiale encore utilisée à Toamasina

 

Le modèle Antsirabe
Le modèle Antsirabe

 

Antsirabe et Antananarivo se ressemblent beaucoup. S’il y avait de nouveau des pousse-pousses à Tana, ce serait surement la version Antsirabe qui aurait la côte. Mais c’est presque impossible. Dans les pays développés, on a tendance à les introduire pour le tourisme. Peut-être qu’un jour, une licence spéciale sera accordé à l’Office Régionale du Tourisme à Tana car une visite d’Analakely, Antaninarenina, Isoraka ou Andohalo ne serait pas si déplaisant à bord d’un pousse-pousse.

Tandis qu’autour de Tana, il y a de plus en plus de pousse-pousses qui transportent des gens. Il y en a à Andoharanofotsy, au Sud, par exemple. Il y a une station au croisement vers Bevalala. A partir de là, c’est le pavé puis la terre battue. Même les taxis qui sont là refusent d’aller trop loin dès que l’on quitte les pavés. J’étais là-bas, un jour pour aller du côté d’Ankadivoribe (village que les fans des films Malok’ila connaissent bien). Il y avait une vieille R12 qui a accepté de m’emmener. Le conducteur était causant. Il disait : « Moi, j’ai cette R12 qui est robuste et pour moi, tant qu’elle roule, je travaille et si elle tombe en panne, je répare et c’est tout! ». Et il continue : « Avec l’état de la route, les autres taxis ne vont pas loin et les pousse-pousses gagnent presque tous les clients ».

Il faut dire que la ville d’Antananarivo s’étend à vitesse exponentielle. En peu de temps, les communes voisines comme Andoharanofotsy, Ambohimangakely ou Sabotsy Namehana deviennent très peuplées sans que les infrastructures n’arrivent à suivre. Comme il n’y a plus de fracture, plus de no man’s land qui les sépare du centre ville, je dirais qu’il font partie de la mégalopole d’Antananarivo. De toute les façons, la majorité des gens qui y dorment viennent étudier ou travailler au centre, comme moi. Et c’est dans cette vision que du temps de Ravalomanana, on a voulu encercler le tout par l’inachevé By-Pass.

Je m’énerves un peu. Comme à Antsirabe ou Toamasina, les pousse-pousses sont les rois de la route dans les petites rues d’Andoharanofotsy. Klaxonnes comme tu veux! le pousse-pousse ou le cyclo-pousse occupera sa colonne comme il le voudra. Je suis en retard! Mais mon chauffeur est plus conciliant. Il a conscience que ces gars là travaillent avec leurs tripes. « Tu sais, me dit-il, ces gars sont très forts mais ils ne doivent jamais tomber malade car dès qu’ils tombent malade, ils meurent ». « Ah bon? » ai-je répondu, incrédule.

L’espérance de vie à Madagascar est autour de 65 ans. C’est à dire que la plupart des jeunes retraités malgaches s’en vont de suite pour la retraite éternelle, un vrai carnage. Mais tu ne verras jamais un tireur de pousse-pousse de 65 ans ou même de 60. A bien y penser, ce n’est peut-être pas le tireur de pousse-pousse qui est trop fragile face aux maladies. Il suffit de comprendre la logique : le mec travaille tous les jours pour un maigre butin. Son travail le fatigue et il peut tomber malade mais il n’a pas d’assurance maladie, pas de couverture sociale, rien du tout pour le protéger du moindre pépin. Il doit payer les frais médicaux de sa poche. Et s’il ne travaille pas, il ne gagne pas d’argent. C’est un cercle vicieux tout a fait mortel.

Alors, il y a des questions que je ne me poses pas. Par exemple, je ne me demande pas s’il faut se réjouir du retour des pousse-pousses autour de Tana ou « les pousse-pousses sont de retour, jusqu’à quand? ». Pour l’instant, c’est juste un constat. Les pousse-pousses et les cyclo-pousses retrouvent des couleurs aux alentours de Tana. C’est peut-être provisoire. Peut-être que dans 10 ans, on les retrouvera 10, 30 km plus loin. Plus de pousse-pousses aussi font plus de tireurs de pousse-pousses. C’est peut-être une bonne chose pour le taux de chômage ou c’est juste une filière informelle de plus qui échappera à l’IRSA et à la couverture sociale.

Donc, la vraie question serait : faut-il ou non encourager son utilisation? Ma réponse est « pourquoi pas? ». Mais, bien sûr, il faudrait des routes larges comme à Antsirabe ou dans les villes côtières. Et il faudrait, aussi, voir la situation de ces gladiateurs qui vendent si cher leur peau pour transporter les gens. Je rêve. Mais pourquoi, un de ces jours, on n’aurait pas la couverture sociale pour eux comme pour les chauffeurs et receveurs de bus, les gens de maisons et tous les autres qui travaillent mais qui n’ont aucun droit?

Bref, les pousses-pousses ne doivent pas disparaitre des villes de Madagascar. Je ne serais, même, pas contre leur envahissement, à nouveau, d’Antananarivo. Mais il faudrait juste que ce soit bien planifié mais pas que cela s’installe juste sauvagement.

 


Madagascar : le banquet du nouvel an du président est (déjà) gâté

A Madagascar, comme chaque année, la Présidence malgache va accueillir ses invités au grand palais d’Iavoloha pour fêter le nouvel an. Mais cette année, rien n’est plus comme avant.

Chaque année, c’est une fête grandiose qui est préparée. Il y a des discours, il y a des animations, il y a de la danse, dont l’obligatoire afindrafindrao, et il y a le banquet. Depuis un certain temps, tout cela est retransmis en direct à la télévision. Les Malgaches de toute l’île peuvent, alors, admirer les convives, envier les élus et saliver en les voyant remplir leurs panse et leurs sacs en plastique.

Il n’y a pas grand chose qui change, cette année. A l’heure où j’écris, les préparatifs vont bon train et aux dernières nouvelles, ce banquet aura lieu. Mais déjà, les blagueurs sur les réseaux sociaux se demandent comment les invités vont faire sans sacs en plastique. Je vous explique. Certains Malgaches ont l’habitude de ramener de la nourriture à la maison après une fête. Cette pratique est pourtant jugée honteuse par la société. Lors des précédentes retransmissions télévisées des banquets d’Iavoloha (le palais présidentiel), on pouvait voir certains invités remplir des sacs en plastique, bien avant la fin de la fête. Aujourd’hui, les sacs en plastique sont interdits à la vente à Madagascar, d’où ces plaisanteries.

Mais plus qu’une simple plaisanterie, les oppositions à la tenue de telles fêtes se multiplient, se durcissent, se radicalisent presque. Ce n’est pas nouveau, un texte de 2015 dans une média local a annonçait déjà la couleur. Des mots, comme « dilapidation », « gabegie » retentissent année après année et le président semble ne rien entendre. Cette année, les textes sont plus virulents. Les invités sont d’avance hués, insultés, voire maudits. Un média local les appelle, par exemple, des « poera poara » qui est intraduisible mais vous pouvez imaginer un dindon qui fait la cour à la dinde.

Sur Facebook, cette image a été partagée des milliers de fois :

Banquet du vendredi 08 janvier 2016 au Palais d’État de Iavoloha : Annulez car cela dilapide notre argent!

Il faut lire les commentaires pour se rendre compte à quel point certains Malgaches sont indignés par cette fête. Et malheureusement, l’amalgame est toujours de mise. Pour nombre d’entre eux, les fautifs, si faute il y a, n’est pas seulement le président, ni le gouvernement, mais aussi tous les invités qui acceptent de participer à ces « coupables » orgies. Pour dire combien cette situation inspire les Malgaches, comme illustration, je vais vous traduire ce poème que j’ai vu sur une page facebook.

Tonokalo

 

 

OZONA SY KAFARAM-BAHOAKA (Malédiction et plaintes contre l’État de la part du peuple)

Dia mandry ve ny sainareo ry mpilalao politika?? Avez-vous l’esprit tranquille, joueurs de politique ?
Amin’ity fako @ taonina fa tsy mba an-tsobika Avec ces tas d’ordures qu’on mesure en tonnes et non plus en sacs
Nefa ianareo andeha hamoky tena @ hanim-pitoloha Alors que vous allez vous rassasier lors un buffet
Matikambo @ 60milion ariarinay fa oetsy Iavoloha A Iavoloha, fiers de vos 60 millions d’Ariary à dépenser

Alahelombahoaka no hamenoana kibo C’est avec la tristesse du peuple que vous remplissez vos ventres
Dia irangirango tia tena no tsy hanao karibo Pour vous empiffrer d’égoïsme sans dire karibo (bienvenue)
Efa itanay eto indray fa ampiesona sy hihira On vous vois déjà dormir (discours) et chanter
Be palitao nefa MAIMBO ZAORIDIRA Avec vos grands costumes qui SENTENT L’ORDURE

Ka hoy ny ozonay vahoaka manao hoe: Le sort que jette le peuple sur vous est :
Hiola-tsinay anie nareo ka hivalana be Que vos intestins se tordent et que vous ayez la diarrhée
Hisotro ianareo ka ihinana Vous allez boire et manger
Harary kibo ipiriritra ka itongilangilana Que votre ventre vous fasse mal et vous fasse plier
Tsara kafara tompoko andairan’ny ozona Si bien contestés, messeigneurs, que la malédiction va opérer
Hiziha-kibo,kibotaina toy ny trozona Que vos ventres gonflent, que vous soyez gonflés comme la baleine
Handoa ra hioaka eran’ny trano Que vous vomissiez du sang, que vous en crachiez dans toute la salle
Fa hanina feno ozona hapiditra anareo angano Car c’est un repas maudit qui vous apportera malheur

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/0d/Iavoloha_palace.jpg
Le palais d’Iavoloha

Il faut comprendre le peuple quand des initiatives comme celle-là trouve de tels échos. Il y a tant de paradoxes dans ce pays. Des paradoxes curieux peut-être, mais surtout  perçus comme des injustices. Le peuple malgache est parmi les plus pauvres du monde, alors que ses administrateurs se permettent de faire une fête grandiose dans un des plus beaux palais d’État d’Afrique et peut-être du monde. En cette saison de pluie, la situation des Malgaches est des moins enviables avec le mauvais état des routes, les bas quartiers inondés, les ordures qui s’amassent, les virus et bactéries qui pullulent, les maisons qui s’effondrent et la faim toujours présente. Ce n’est pas seulement une question de l’alahelon-kanina (convoitises du repas de l’autre) mais une vraie prise de conscience de la réalité de la pauvreté.

De l’autre côté, est-il possible pour le président et pour le gouvernement d’annuler le banquet du nouvel an? D’abord, c’est une tradition. Fêter le nouvel an est une pratique datant des rois et une marque de souveraineté. Une invitation ou une non invitation a des significations hautement politiques. Et il ne faut pas oublier que c’est une occasion pour le chef de l’État de créer ou de consolider ses relations avec des personnalités influentes, des diplomates et des financiers.

Que dire de la somme de 60 milliards d’ariary qui circule sur les réseaux sociaux? Je ne connais pas le budget officiel mais dans le texte de l’année dernière, un journaliste a calculé un minimum de 45 millions. Je pense que 60 milliard est juste une somme farfelue, qui sert d’effet d’annonce, car il serait impossible de débourser 40 millions d’ariary (11 000 Euro) par invité en une journée, même en lui faisant manger du caviar à la louche et boire du champagne en fût, mais qui sait? Disons que 100 millions d’ariary, cela fait déjà une belle somme, qui pourrait être bien mieux dépensée ailleurs. Divisé par les milliers d’invités, cela correspond aux prix actuels d’un très bon buffet de mariage ou d’un excellent buffet de restaurant huppé.

L’analyse est donc simple. Le banquet du nouvel an, pour ses détracteurs, est juste un prétexte. Ce que ces gens espèrent c’est que le gouvernement et les dirigeants se montrent plus concernés par les problèmes du peuple car ce qui est perçu c’est plutôt un clivage, un fossé qui les sépare d’eux. Et le banquet est une illustration, une bonne métaphore, pour désigner qui sont les élus, les privilégiés, et qui sont le reste du monde. De la même manière, la beauté du palais dans la banlieue sud contraste fortement avec les rues abîmées et couvertes de boues et de détritus de la ville d’Antananarivo. Sa beauté est une preuve que les politiciens ne font pas assez pour améliorer le quotidien des Malgaches. Ils ne pensent qu’à eux-même.

A chacun d’en tirer une leçon. Oui, le message est, cette fois-ci, plus fort, plus criard. Je ne sais pas si la leçon a été apprise ou si elle a atteint les oreilles de sourds. Les dirigeants du pays doivent montrer leurs engagements contre la pauvreté et pour le bien-être de la société. Même si l’annulation du traditionnel banquet du nouvel an n’est pas une solution définitive, il faut afficher cette volonté en faveur du peuple,  au quotidien. On ne pourra jamais reprocher au peuple de s’exprimer à sa façon. La réaction, souvent au premier degré, des Malgaches s’inscrit dans nos mœurs d’insulaires. On n’est pas très nombreux et notre valeur première est le fihavanana (la famille, comme Ohana chez les Hawaiens). C’est pour cela que tout ce qui se passe ici concerne tout le monde. Et si les dirigeants montrent le bon exemple, il est à parier que tous suivront, naturellement.

Pour finir, j’aimerais, via mon blog, ne pas maudire les invités au banquet. Parmi eux, il y a ceux qui sont déjà fortement engagés dans le développement de Madagascar. Il y a de bons citoyens qui mériteraient plus qu’un simple banquet et d’autres qui n’ont pas demandé à être présents mais qui doivent l’être pour le travail. Je vous dit « bon appétit! » car je sais bien que cette année, l’ambiance est un peu pourrie.