David Kpelly

Tiens, ma femme est un colis piégé!

– Ouley, écoute, je sais que tu ne vas pas me croire mais je veux que tu deviennes ma femme, je veux t’épouser.

– T’es un grand plaisantin, toi, Dave, je suis déjà mariée, je vais bientôt aller rejoindre mon mari en France.

– Je suis sérieux, tu vois, je dois maintenant me marier parce que…… l’ultimatum de ma mère, lors de mon dernier passage à Lomé, le mois passé, a été clair, si jusqu’à la fin de cette année je ne lui montre pas ma future femme, eh bien, elle m’amènera une femme elle-même, une femme que je n’aurai même pas le droit de refuser, que je rendrai enceinte avant qu’elle ne me quitte, eh bien, c’est quoi cette pagaille-là hein, tous mes camarades d’enfance ont déjà deux ou trois enfants, et je suis là peinard me plaisant dans mon retard comme les couilles, à l’église tout le monde se moque d’elle que son garçon est un incapable, qu’il faudra même vérifier si ça lui chauffe vraiment en bas, parce que célibataire à cet âge-là, c’est simplement de la honte, de la vraie honte pour une mère, alors tu écoutes ce que je dis, hein, David, je veux une belle-fille, je veux écouter les pleurs de mes petits-enfants, je veux nettoyer leurs merdes sur mes cuisses, c’est cela la plus sublime joie d’une mère, voir les enfants de ses enfants, et tu sais que tu es mon unique enfant, enfin mon unique garçon, je ne t’exige plus rien, prends n’importe qui, n’importe quoi, même une Malienne, on fera avec, on lui apprendra à bien s’habiller, à ne pas trop se maquiller, à bien parler français, à ne pas trop te demander de l’argent pour s’acheter du basin, on lui apprendra qu’une femme ça travaille et n’escroque pas son homme, même une musulmane, on la digérera aussi difficilement qu’un plat de tortue, mais alors prends une femme, n’importe quelle femme, même une Tchadienne, tu m’écoutes, hein, je veux voir ma belle-fille avant la fin de cette année.

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Le syndrome du Togolais indigne

 

Il y a deux semaines, pour une complication survenue à Lomé lors du renouvellement de mon passeport, je m’étais tellement énervé contre le Togo que j’avais publiquement, sur ma page Facebook et dans une interview en ligne, déclaré que j’allais changer de nationalité. Le problème a été résolu par un mentor, écrivain togolais. Il y a de ces moments où la lourdeur de l’administration togolaise, les horreurs et matoiseries de la dictature, les cocasseries de notre opposition, les crimes et violences de notre armée, les humiliations de nos policiers et gendarmes horripilent, effarouchent tellement que l’amour pour le Togo en prend un coup. On se sent du coup si malheureux d’être togolais, parce qu’on n’a pas de bons dirigeants. Mais il y a aussi de ces moments où certains actes isolés, certaines habitudes, certains travers, certains vices, certaines perversions de nous autres petites gens, nous qui semblons ne rien représenter dans la marche de notre pays, poussent à la révolte, tout comme les agissements de nos hommes politiques et de nos corps habillés.

J’ai assisté, avec un groupe de quatre compatriotes travaillant comme moi à Bamako, le soir du 08 juin 2012, devant un restaurant togolais détenu par une Togolaise, à l’une de ces scènes qui vous révoltent contre votre identité. Nous étions partis discuter de la semaine autour d’un plat du pays, quand nous butâmes, juste à l’entrée du restaurant, sur une bagarre. Deux femmes se battaient. Et s’injuriaient en mina, la principale langue parlée à Lomé. Des Togolaises, toutes les deux. Une nièce et sa tante qui est la détentrice du restaurant. La nièce d’une vingtaine d’années avait une partie de sa perruque enlevée, et une grosse bosse sur le front, la tante, plus battue, tout le visage griffé, la jupe complètement lacérée qui laissait entrevoir sous la lumière son slip, les seins au vent.

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L’Ivoirienne s’agenouille pour sucer

Je fréquente beaucoup les bars et boîtes ces temps-ci. Je suis un homme déprimé. Voici presque deux mois que ma femme Ruth m’a quitté. Elle m’avait surpris un soir, alors que j’étais en train de m’amuser, juste m’amuser au salon avec Djénéba la bonne sénégalaise de ma voisine qui ressemble à une Togolaise ou une Béninoise parce qu’elle est trop courte, ramassée et potelée. Ruth s’était écriée, ivre de rage, de jalousie et de stupéfaction, Hein, David, qu’est-ce que je vois-là hein, après tes étudiantes, tu vas maintenant commencer à me tromper avec des bonnes, hein, quel sale porc tu es, imbécile, au lieu de penser à payer ma dot t’es là à me tromper tous les jours, la semaine passée tu as donné un faux rendez-vous à mes parents, prétextant que le capitaine Sanogo et ses soldats avaient barré les routes et t’avaient empêché de venir payer la dot, quand moi je subis les représailles, les injures et les railleries de mes parents et amis parce que j’habite gratuitement chez toi, t’es là à me tromper avec n’importe quel microbe, j’en ai marre, tu comprends, hein, marre marre marre, je m’en vais chez mes parents, tu viendras me chercher quand tu auras fini de faire le tour de tous les culs de la terre, et que tu auras rassemblé la totalité de ma dot, sale vaurien. J’avais supplié en simulant une voix pleureuse, Non, Ruth, ma Ruth à moi, ma petite tasse de chocolat, tu vas pas me faire ça hein, écoute, laisse pour le moment cette histoire de dot-là parce que chez nous au Togo c’est pas notre affaire, la dot, l’exemple nous vient du sommet de l’Etat, regarde notre président Faure Gnassingbé qui a plus de quarante ans, plus de vingt gosses, mais qui n’est toujours pas marié, qui n’a jamais payé la dot d’une femme, il ne fait que s’envoyer toutes les filles du pays, même les copines des footballeurs, et comment veux-tu que moi qui n’ai même pas encore trente ans je paie ta dot, hein, oublie-ça, mon amour, et puis regarde cette fille, tu imagines que moi je peux me la taper, hein, jamais, elle est trop courte, trop potelée, pas belle, elle ressemble à une Togolaise ou une Béninoise, je ne peux jamais tirer sur elle, même Jacob Zuma ne tirerait pas sur cette fille, crois-moi, mon amour, je… Elle avait ramassé ses effets, avait claqué la porte.

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Cette croix autour de son cou (II)

Nouvelle, deuxième partie

Mais, Vicencia, cette année de feu, de fer, de sang et de larmes, cette année où Eyadema, blessé dans son amour-propre de dictateur par ce peuple qui voulait lui arracher le pouvoir, son pouvoir à lui, avait décidé d’envoyer la mort chercher tous ses opposants, leurs descendants et ascendants où qu’ils fussent, cette année où une mère pouvait se réveiller le matin avec ses fils et filles, comme une mère-oiseau dans son nid au milieu de ses oisillons, mais se retrouver stérile le soir, tous ses enfants assassinés, noyés et gorgés de la puante et souillée eau de la grande lagune de Lomé, où un jeune homme pouvait sortir de chez lui fier de sa bonne santé et se retrouver quelques minutes après paralytique, les deux jambes amputées, agonisant dans un coin de rue, pour le plaisir de quelques militaires et policiers saoulés de drogue, d’alcool et de haine, où des artistes, des écrivains, des journalistes et des intellectuels disparaissaient de leurs domiciles pour réapparaître sur des dépotoirs des jours après, à moitié pourris, pour avoir dit ou ne pas avoir dit ce qu’il fallait dire ou ne pas dire, fait ou pas fait ce qu’il fallait faire ou ne pas faire, vu ou pas vu ce qu’il fallait voir ou ne pas voir, cette année, donc, où Eyadema semait la mort partout au Togo, fut pour toi l’année du grand amour. Tu rencontras, cette année de meurtre, ce que les adolescents appellent le prince charmant.

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Faure et ses putains font le trottoir !

Je suis tombé ce dimanche 04 juin 2012 sur un article sur le fameux site d’informations togolais, www.republicoftogo.com, article publié le 1er Juin 2012 intitulé « Voracité sexuelle chez les dirigeants du Frac ? » Le FRAC, Front républicain pour l’Alternance et le Changement, étant un regroupement des grands partis politiques togolais d’opposition créé en 2010 pour faire face à la machine à fraude du régime dictatorial cinquantenaire togolais représenté par le Rassemblement du Peuple togolais, RPT.

Voracité sexuelle chez les dirigeants du Frac ? s’intitule l’article dont voici le contenu: Les rassemblements hebdomadaires du FRAC le samedi sur la plage de Lomé n’ont pas comme unique vocation de dénoncer la politique gouvernementale. C’est aussi, selon Togo Réveil paru vendredi, une occasion de rendez-vous galants et plus si affinités. L’hebdo relate l’histoire d’une militante assidue des sauteries politiques de fin de semaine qui s’est retrouvée enceinte, résultat de la voracité sexuelle d’un des leaders politiques de ce mouvement. Et elle serait loin d’être un cas isolé, selon le journal.

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Cette croix qui saigne cet amour (I)

Nouvelle, première partie

Ce matin où en partant au bureau tu vis la croix au cou de ton unique fils, un frisson te parcourut, te secoua. Tu lui posas la question. Où il l’avait trouvée, cette croix. Un cadeau de sa jeune compagne, t’avait-il répondu. Que vous pouvez être de vrais bébés gâtés, vous les hommes de ce pays ! A dix-sept ans déjà, tu acceptes des cadeaux de ta copine, sans penser lui en offrir toi. Remerciez Dieu que vous nous avez dans ce pays, vous savez que les femmes des autres pays ne peuvent jamais vous gâter comme nous le faisons, tu l’avais taquiné. Maman, avait-il répondu en riant, tu sais bien que tu es très mal placée pour parler de ces choses-là. Laisse donc les amants se gâter comme ils veulent. Tu lui pinças le nez en l’embrassant et profitas pour voir la médaille de plus près. Le même frisson, une fois de plus, te traversa tout le corps. Te secoua. La tête en feu, tu partis au bureau.

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Le Mali mérite cela, cher monsieur !

Lettre ouverte au Premier ministre malien, Mr. Cheik Modibo Diarra

Monsieur le Premier ministre, suite à l’agression et au passage à tabac de Dioncounda Traoré, le Président par intérim du Mali, dans son bureau présidentiel, bien sûr dans son bureau à la Présidence, le 21 mai 2012, par un groupe de manifestants hostiles à l’accord signé entre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest et les pôles du pouvoir au Mali sur la prorogation de son mandat à la Présidence, vous vous étiez, Monsieur le Premier ministre, indigné. Vous vous étiez indigné, et votre profonde indignation s’était résumée à cette phrase, Le Mali ne mérite pas cela.

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Pépé bazardé

Sais-tu, cousin, que ma mère ne se rend plus dans la maison de pépé, son père, depuis la mort de ce dernier, hein. Ah, je t’ai même pas raconté que pépé n’est plus ! Cousin, laisse-moi te conter, l’affaire avait fait un tabac, grave…

Pépé, un beau matin de dimanche, il y a six mois, ne se réveilla pas. Il ne se réveilla plus. On s’y attendait, tu le sais, il  avait largement dépassé les quatre-vingts ans, et ici c’est un record. Faut vite se retirer avant qu’on ne commence par vous traiter de sorcier. A sa mort, on trouva cachés sous son lit une calebasse remplie de sang et beaucoup de gris-gris et d’amulettes. Ce fut un vrai coup de théâtre, tu sais bien que pépé fut, aux yeux de tout le monde, un très fervent chrétien et tout le monde le traitait dans le village comme un saint. Les découvertes bouleversèrent mes oncles et tantes. Furtivement, ils évacuèrent ce qu’ils appelèrent des déchets avant l’arrivée du pasteur qui devait voir le corps avant son expédition vers la morgue.

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Capitaine Sanogo, le septième amant

J’aime les Sénégalaises. Bon, disons que c’est un pléonasme, dire qu’on aime une Sénégalaise. Une Sénégalaise, c’est déjà en soi quelque chose qui s’aime, qui s’adore, qui se rêve,  qu’on désire, quelque chose sur laquelle on fantasme toutes les nuits comme un capitaine raté aigri fantasme sur un grade de général. Une Sénégalaise, c’est une petite merveille harmonieusement bâtie, droite, un majestueux colosse dressé sur des jambes d’échassier, deux boulettes fermes en bandoulière sachant tourner devant ceux qu’il faut et ne pas le faire devant ceux qu’il ne faut pas, deux gracieuses lèvres toujours luisantes sachant sourire à qui il faut et ne pas le faire à qui il ne le faut pas, deux petits yeux de fouine sachant fixer et hypnotiser qui il faut et ne pas le faire à qui il ne faut pas, des dents très blanches avec une jolie raie, une raie-sanogo, contrastant à merveille avec le teint noir de jais, des dents bien blanches qui savent mordre dans ce qu’il faut, où il faut et ne pas le faire là où il ne le faut pas, et, surtout, deux bombes-arrières ondulant sur un morceau de l’ex Youssou N’dour, le vrai Youssou N’dour, des ondulations capables de vous faire oublier les pires calamités de ce bas-monde de miasmes. Ah, une Sénégalaise, un rêve ! Si je défunte sans avoir pu en épouser une, qu’on m’enterre tout juste auprès du Monument de la Renaissance à Dakar, pour que mon fantôme puisse les admirer à loisir lors de ses randonnées nocturnes.

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La fille de la femme des ordures (fin)

Nouvelle, dernière partie

Dado, ton pays, Soutacountry, est un royaume dirigé depuis les indépendances par un roi, le roi Baobab Senior, qui avait fait presque quarante ans sur le trône avant de s’en aller, vieux, fatigué et gorgé du sang innocent des centaines de milliers de citoyens qu’il avait fait butter dans l’ombre, un beau matin, par une très obscure mort. La version qui bénéficia de l’unanimité à Soutacountry avançait que Baobab Senior, comme une poule le jour de Noël, avait été brûlé par de l’eau chaude dans sa baignoire. A sa mort, le peuple de Soutacountry, agonisant après quarante ans de dictature et de tortures, voulut, enfin, respirer la liberté mais les institutions internationales africaines et l’abominable armée de Soutacountry tinrent à respecter les vœux du défunt. En effet, le roi Baobab Senior, de son vivant, malgré les contestations de ses autres enfants, avait choisi son successeur, son fils bien-aimé Baobab Junior Le Fort. Le petit prince de trente-cinq ans devait succéder à son père, que ce maudit peuple de Soutacountry, dix mille fois maudit au nom de cette démocratie qu’il réclamait, le voulût ou pas. On intronisa donc, dans les flots du sang des citoyens qui avaient osé se rebeller contre la volonté du tout-puissant défunt, le prince Baobab Junior Le Fort.

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Fini le capitaine, vive le président !

Le nationalisme est une maladie infantile, c’est la rougeole de l’humanité. Albert Einstein

Une ville. Deux. Trois. Le Mali, tel une forteresse de sable, s’effrite au jour le jour, sous le triomphe des rebelles et des islamistes. Tout se joue comme le drame de la ville biblique de Jéricho, dont les murs s’étaient écroulés sous les coups de trompette des israélites. L’armée malienne ne combat plus. Elle n’a plus les moyens, ni la volonté. Elle n’a, d’ailleurs, jamais eu les moyens de combattre. Et les rebelles et islamistes, en terres conquises, plantent leurs drapeaux, s’apprêtant à proclamer soit leur indépendance, soit leurs idéologies extrémistes avec l’instauration de la Charia. Les narcotrafiquants et autres brigands, profitant de l’aubaine, pillent boutiques, banques et maisons dans toutes les villes ravagées, violentent et violent tout ce qui passe par leur voie. Que c’est triste, un si grand pays qui tombe si facilement entre les mains de la barbarie !

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Seydou Badian applaudit l’orage !

Le pays de Modibo Keita est au bord de l’implosion. La rébellion du Nord évolue avec frénésie, alors que le pays est rejeté par la communauté internationale. La soldatesque putschiste, ayant destitué Amadou Toumani Touré, le président démocratiquement élu, depuis le 22 mars, plus que jamais isolée, commence à paniquer, quémandant des messages de soutien sur tous les ondes. C’est le moment idéal pour expédier ce putsch mort-né six pieds sous terre. Le moment idéal pour tous les Maliens ayant une voix forte pour crier et mettre fin à ce chaos. Hélas.

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Malheurs d’une démocratie cinglée

Le pire des Etats, c’est l’Etat populaire, Pierre Corneille

Le pompeux nom de la junte analphabète ayant confisqué le pouvoir au Mali, et qui prétend redresser la démocratie, doit nous pousser, peuples africains, à méditer sur notre marche démocratique devenue désormais le premier crédo de notre développement. Il va falloir repenser comment nous pratiquons les bouts de démocratie que nous avons pu arracher de nos pouvoirs plus ou moins despotiques depuis les années 90. Car si la démocratie est avant tout un gouvernement basé sur la souveraineté du peuple, elle est aussi, et surtout, le respect de ce peuple vis-à-vis de l’autorité à qui il a confié le pouvoir. En aucun cas, dans aucune démocratie, le peuple ne peut se confondre à l’autorité. Henry Ford, dans son ouvrage Ma Vie et mon œuvre, le stipule si bien, La démocratie que je repousse, c’est celle qui prétend remettre au nombre l’autorité qui appartient au mérite.

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Hymne aux soldats de la honte

« Soldats, je suis content de vous ! »
Je suis vraiment, comme Napoléon Ier, content de vous, chers grands soldats qui venez, à Bamako, de confisquer le pouvoir que le peuple souverain a confié à un homme de son choix. Pourquoi ne pas être content de vous pour ce énième grand exploit de franchise que vous venez de commettre ? Vous venez une fois de plus de prouver que vous êtes vous, que vous êtes réellement ce que nous pensions, que nous croyons désormais que vous êtes pour nos pays africains, un véritable handicap, l’un des plus grands handicaps pour notre développement.

Soldats de la honte du Mali et d’Afrique, je suis content de vous. Vous aviez, dès les premières années de nos indépendances, prouvé que l’Afrique doit vraiment se méfier de vous, si elle veut réellement évoluer…Lire la suite


Les silences du Général ATT

« Le métier de soldat est l’art du lâche. C’est l’art d’attaquer sans merci quand on est fort et de se tenir loin du danger quand on est faible. » George Bernard Shaw, Le Héros et le Soldat

Le Mali, l’un des rares exemples de démocratie en Afrique francophone, vient d’essuyer un soufflet. Le sien. Peut-être, est-il vrai, comme le stipulent certains afro-sarcastiques, qu’aucun pays africain francophone n’est réellement démocratique, il y a juste des pays qui se reposent aux vestiaires, attendant que d’autres occupant le stade de l’anarchie et de la dictature finissent leur show. Le Mali, après vingt ans passés aux vestiaires de la démocratie à l’africaine, vient de basculer dans l’anarchie, avec en bandoulière l’un des éternels maestros qui savent entretenir la cacophonie sous nos cieux, la soldatesque. Le président malien, Amadou Toumani Touré, jusqu’ici symbole du militaire républicain pour son exploit d’avoir laissé, en 1992, le pouvoir à un civil après l’avoir arraché au militaire dictateur Moussa Traoré en 1991, vient d’être destitué, à un mois de la fin de son mandat, par un groupe de militaires qui se disent révoltés contre un gouvernement incompétent dans la lutte contre la rébellion touareg du Nord-Mali.

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Les petits-fils nègres de Molière

Le monde francophone dont une grande partie des pays africains s’apprête à célébrer, le 20 mars prochain, la journée internationale de la Francophonie, une fête qui est, avant tout, celle de la langue française.

Au-delà d’un simple outil de communication, la langue française représente aujourd’hui, plus d’un demi-siècle après l’arme idéale contre la colonisation qu’elle fut pour les intellectuels africains, un enjeu important dans la vie sociopolitique, économique et surtout littéraire des pays africains francophones.

La place de la langue française dans la création littéraire négro-africaine est aujourd’hui un débat aussi passionnant que ne le sont tous les débats qui opposent l’Afrique noire à son ancienne puissance colonisatrice, la France. Le Français est, pour certains, une menace, une grande menace pour la création littéraire des pays africains francophones car il tue les langues africaines jamais utilisées par les auteurs dans leurs ouvrages, alors qu’il est pour d’autres un moyen efficace, le plus efficace, pour les créateurs africains de partager leur art avec le reste du monde…Lire la suite


Blaise Compaoré lave plus blanc

C’est fou, comme les Africains peuvent être des provocateurs ingrats ! Dire que parmi tous ces hommages rendus aux Africaines lors de la célébration du 08 mars, personne, mais alors pas même une seule plume indiscrète, n’a rendu hommage à nos mères de la nation, ces grandes femmes qui se cachent derrière nos pères de la nation !

Nos premières dames ne sont pas des femmes ordinaires, ce sont des femmes-mythes, des merveilles. C’est bien elles qui ont réussi à plaire aux aspirations les plus profondes, à répondre aux goûts combien raffinés de nos séquoias des forêts tropicales. Et nous devons les louer, ces femmes-dieux, qui inspirent les grands projets de développement, les grandes réalisations, les grandes réformes… aux gardiens de nos destins.

Un classement des trois plus belles femmes de président d’Afrique, pour manifester notre amour incommensurable et éternel à celles qui ont dit oui, ah le grand oui, à nos guides suprêmes.

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Le maillot de bain de Beyoncé

– Chers invités, avant de donner le coup d’envoi de la partie de natation, nous allons prier notre « anniversaireuse » et son oncle professeur de sport de nous faire une petite démonstration de natation, ensuite la piscine sera libre pour tous ceux qui veulent nager. Encore une fois, joyeux anniversaaaaaaiiirrrrrrrrrre à notre amie Habibatouuuuuuuuuuuuu !
Habibatou, surgie des vestiaires dans un maillot de bain rouge – gloire à la Chine des maillots de bain rouges, la Chine rouge, la Chine conquérante, la poitrine bombée pour faire valoir son potentiel de séduction, s’approcha de moi, un complet de maillot de bain pour hommes de la même couleur en main sous les applaudissements de la centaine d’invités.

– Voilà la surprise dont je te parlais, tonton, tu vas nager avec moi, une véritable démonstration de nage, je dois être la meilleure nageuse ce soir, comme c’est moi la princesse de la fête, et tu dois m’y aider, allez, va aux vestiaires te changer, va vite te débarrasser de ces machins des messieurs des bureaux, et on plonge.

Je donnai intérieurement raison à Goudena, ce forgeron cinquantenaire de mon village dans les années quatre-vingt-dix qui s’était trouvé pour dada et exutoire de séquestrer et violer les fillettes de la dizaine, depuis que l’une d’entre elles s’était moqué de son pantalon troué qui montrait une partie de ses couilles alors qu’il buvait du vin de palme dans le plus grand cabaret du village. Les jeunes filles de la dizaine et vingtaine sont des déesses de la provocation. Je peux encore gober qu’elle me fasse passer pour son oncle, mais qu’elle me présente comme un prof… de sport, Terre et Ciel ! Se faire traiter de professeur ça ne fait déjà pas glamour, c’est une provocation, ça fait mal, mais de professeur de sport, mon Dieu, quelle injure ! C’est vrai qu’il y a des exceptions, comme au Togo où on a un prof de sport devenu président de l’Assemblée nationale puis président de la République entre Gnassingbé Père et Fils, et président de l’Assemblée de nouveau. Mais là c’est le Togo, un modèle à part. Sincèrement, être un prof de sport ici aujourd’hui, c’est presque aussi chiant qu’être un militaire ou un policier, ça ne fait rêver aucun jeune. Vaut mieux être un gérant de cybercafé pour au moins servir à ouvrir des comptes Facebook.

– Euh, hum, euh, Habibatou, tu sais quoi, je crois que tu es en train de te méprendre sur moi, tu comprends, hein, tu ne peux pas te permettre tes insolences de petite fille imbécile avec moi, tu me suis, hein. Tu ne peux pas me faire venir ici pour nager, devant tout ce grand public, sans m’avoir averti, je suis un responsable, je me respecte, et…

– Tu ne vas pas commencer à me faire des leçons de morale devant mes copains et copines, le jour de mon anniversaire, j’espère. Si tu veux nager, viens nager, si tu ne le veux pas, tu peux aller te faire foutre, parce que…

– Et puis c’est quoi cette histoire de tonton et de prof de sport, hein ! Depuis quand je suis ton oncle, et surtout un prof de sport, hein.

– Hein, tu n’es pas prof de sport hein, mais tu enseignes, c’est ce que tu me dis toujours, et un prof c’est un prof, y a pas de différence entre les profs, ils sont moches, aigris, arrogants et pauvres. Bon, je t’ai présenté comme mon oncle parce que c’est pas très cool que je montre à mes copains et copines que je sors avec toi, tu vois, hein, elles vont se moquer de moi, vont me dégrader, moi la star de toute notre école. D’abord t’es trop vieux pour moi, tu as presque trente ans, alors que regarde les petit’cops de mes copines, ils n’ont même pas vingt ans, ensuite tu n’es pas branché, aucun tatouage, aucun piercing, et t’es habillé comme un retraité parti retirer sa pension, enfin tu n’es pas très beau, tu vois, hein, si tu étais chauve et un peu plus grand on te prendrait pour Abdoulaye Wade le président sénégalais, tu ne fais pas design. Mais oublie tout ça, c’est juste pour quelques minutes, je serai bientôt à toi, va porter ton maillot de bain et viens nager avec moi, tu n’as pas financé l’anniversaire de ta nièce pour venir t’énerver juste parce qu’on t’a présenté comme un professeur de sport, tonton.

Sous les regards insistants des invités, tous de la vingtaine, en jeans plaqués, pantalons bouffants, tee-shirts-robes, baskets, assis tout autour de la piscine, le prof de sport que tout le monde voulait voir faire sa démonstration de natation avec sa nièce traîna jusqu’aux vestiaires, son maillot de bain rouge-chinois en main. Le désespoir de l’humiliation fit défiler dans le miroir dans lequel il se mirait maintenant dans les vestiaires les scènes de sa rencontre avec la jeune fille.

Il l’avait rencontrée un soir, la petite allumeuse, il y avait trois mois, devant son école. Jeune, belle et très sexy. Allumé, il avait demandé son numéro. Hésitations. Il avait insisté. Elle lui avait fait savoir qu’elle n’était pas intéressée, qu’elle avait déjà un jeune copain. Il avait insisté. Elle s’était ravisée, ayant compris qu’il pouvait lui servir. Ces tontons qui travaillent servent toujours à quelque chose, moches mais riches. Il l’avait invitée deux ou trois fois chez lui, lui avait assuré qu’il lui donnerait tout ce dont elle avait besoin si elle acceptait de sortir avec lui. Elle avait accepté, mais posé une condition, elle ne se donnerait à lui que la nuit de son dix-huitième anniversaire, dans deux semaines. Il lui avait remis une enveloppe de cent mille francs pour l’organisation de la fête. Elle lui avait promis, en contrepartie, une grosse surprise d’amour le jour de son anniversaire devant ses amis, avant la nuit du lit. La surprise, la surprise d’amour, il venait de l’avoir. Il fut présenté comme un oncle, et professeur de sport, lui qui enseignait le marketing et la communication. Elle n’était pas intéressée par ce qu’il enseignait. Etait trop vieux, trop débranché, trop laid, ressemblant trop à Abdoulaye Wade pour qu’elle le présente à ses amis comme son copain…

– Mais Dave, me dis pas que tu vas passer toute la soirée là devant ce miroir quand les invités nous attendent pour nager, hein, eh bien, excuse-moi de t’avoir fait présenter comme un prof de sport, viens on nage ensuite je rectifie, je vais te présenter comme un prof de… de quoi, hein, tu enseignes quoi au juste, hein, bon, je te présenterai même comme le fils de Kadhafi, non, de Barack Obama si tu veux. Allez, on y va, ou je fais appel à un autre, y a trop de petits beaux gosses là qui veulent nager avec moi la star de la soirée. Tu vois que je ressemble à Beyoncé avec ce maillot, hein, c’est ce qu’elle a porté durant ses dernières vacances en Floride.

J’osai un courageux coup d’œil sur mon reflet dans la glace. Mon look de prof de sport endimanché. Mon ensemble qui aux yeux de tous ces jeunes gens présents devait paraître celui d’un collecteur d’impôts ou d’un vendeur de timbres dans une mairie de région… Je ne ressemblais pas à Jay Z. Je ne ressemblais à rien qui puisse intéresser la Beyoncé ! Je ne suis plus dans le mouvement, mon Dieu, je me débranche, je ne suis plus connecté, le système me rejette, je, je, aïe je vieillis ! Un petit homme vieillissant avec un maillot de bain rouge-chinois en main dont il ne peut se servir, comme il ne sait pas nager, un vieux polichinelle escroqué et humilié par une petite fille qu’il n’est pas assez costaud pour frapper. Si j’étais au moins un prof de natation… ou de kung-fu !