Mawulolo

Ami blogueur, es-tu un thermomètre ou un thermostat ?

Avec certaines discussions et interventions lors de la dernière formation Mondoblog tenue à Dakar, je me suis vraiment interrogé sur le type de blogueur que je dois être.
Il m’a fallu entendre un aîné parler le dimanche et que le lundi, je lise le dernier billet d’Ecclésiaste Deudjui pour que cette question me revienne à l’esprit.
Dois-je (devons-nous) être un (des) blogueur(s) thermomètre(s) ou un (des) blogueur(s) thermostat(s) ?

Blogueur : thermomètre ou thermostat ?
Blogueur : thermomètre ou thermostat ?

Martin Luther King, le défenseur bien connu des droits humains, était aussi Pasteur. Il avait jugé que dans une communauté chrétienne on avait des fidèles thermomètres et d’autres qui sont des thermostats. Le premier groupe se contente de mesurer la température et de s’y conformer tandis que le second ne se contente pas seulement de la mesurer mais la régule.
Ceci veut dire tout simplement que les fidèles « thermomètres » n’agissent en rien sur les évènements qui se passent dans leur environnement. Ils laissent faire et subissent alors que les « thermostats » agissent, dénoncent et proposent des solutions.
Ceci peut facilement s’appliquer à tout autre groupe mais aussi aux blogueurs.

Le blogueur thermomètre

Le blogueur thermomètre se contente d’écrire tout en évitant les sujets qui fâchent. Je dirai qu’il écrit pour juste décrire la nature sans rien de plus. Il ne donne aucun avis, ni aucune orientation. Il est un simple spectateur. Qu’on tue les autres, qu’on les méprise ou qu’on les exploite ou qu’on bafoue les droits humains lui n’en a cure. Qu’on maltraite la veuve ou l’orphelin, que la mauvaise gouvernance s’instaure, ce n’est pas son problème.

Qu’on détruise l’environnement, que des migrants meurent, que des kamikazes tuent en se tuant ou que des terroristes décapitent des innocents, lui préfère regarder ailleurs ou composer des poèmes à l’eau de rose. Encore qu’avec des poèmes on peut dénoncer des choses qui ne fonctionnent pas.

Qu’on craigne d’être taxé d’homophile ou d’homophobe, on est thermomètre. Qu’on craigne de donner son vrai avis sur un sujet, c’est pareil.

Si nous vivons dans un pays dirigé par un dictateur et que nous craignons pour nos vies, nous pouvons au moins parler du voisin qui bat sa femme ou qui néglige ses enfants. C’est aussi un sujet qui peut éveiller des consciences.

Le blogueur fermant ses yeux sur ce qui ne va pas et qui préfère par peur ou indifférence ne rien dénoncer est donc un « blogueur thermomètre ». Son comportement est fonction de celui du groupe où il vit. Tel un béni oui-oui.

Le blogueur thermostat

Le thermostat ne se contente pas d’indiquer la température de l’endroit où il est placé, mais agit ou réagit quand cette température n’est pas normale, pour la ramener au niveau voulu.

C’est cela que doit être un blogueur : écrire quand il y a un problème. Écrire avec des preuves et des arguments. Dire ce qui ne va pas même si cela doit déranger. Faire entendre les voix de ceux qui n’ont pas d’espaces d’expression.

Face à la montée de la violence aveugle qui tue, viole, maltraite, asservit par mille et une voies, doit-on se taire et faire semblant ? Face au dérèglement climatique, doit-on rester coi?

Dans certaines traditions africaines, le bélier est sacrifié lorsque la paix revient entre deux groupes qui étaient en conflit. On dit souvent que si le bélier lui-même avait cherché à prévenir le conflit en dénonçant les germes souvent visibles, il aurait évité qu’on le sacrifie à la fin car le conflit n’aurait même pas débuté. C’est une image pour indiquer que lorsque la case de notre voisin brûle il faut l’aider à éteindre le feu, de peur que le feu n’atteigne notre propre case. Donc cher blogueur, fuir les problèmes de la société pourrait, un jour, se retourner contre toi et tu pourras être la victime du problème que tu évites de dénoncer.

Les risques d’être un thermostat

Raef Badawi fouetté - Crédit :mosaiquefm.net
Raef Badawi fouetté – Crédit :mosaiquefm.net

Il est vrai que certains blogueurs engagés l’ont payé de leur vie.  Je m’incline devant la mémoire de Neloy Neel, un blogueur engagé assassiné en cette année même au Bangladesh.

Dans beaucoup de pays aussi, des blogueurs sont traqués, emprisonnés et maltraités physiquement ou mentalement. Connaissez-vous les blogueurs Alexeï Navalny, Amos Yee, Alaa Abdel Fattah, Raif Badawi ? Eux sont connus pour souffrir de leur engagement mais d’autres moins connus ou pas du tout souffrent aussi en silence et dans l’oubli.

A la récente formation Mondoblog de 2015 à Dakar, on a certains amis blogueurs que je ne citerai pas qui nous ont parlé des menaces reçues. Certains ont dû, à certains moments, cesser leur publication sous peine de représailles. Si tu n’as jamais vécu cela, tu ne peux pas comprendre.

Mais est-ce une raison pour se taire ? Moi je dis non car le mal ne fera que progresser et devenir plus fort, plus pernicieux.

Faire son choix

Interpeller, sensibiliser, conscientiser, informer, éveiller les consciences : voilà le rôle que moi je trouve nécessaire pour un blogueur. C’est de cela qu’il s’agit. Un blogueur est un porte-voix des sans voix de nos sociétés. Il faut certainement dire ce qui marche mais encore plus dénoncer ce qui ne va pas.
Comme nous sommes à l’époque des #JeSuis…., à toi, cher ami blogueur, de faire le choix entre : « #JeSuisBologueurThermometre » et « #JeSuisBlogueurThermostat ».

Sans cela, pour moi et selon moi, vous n’aurez jamais le droit de dire « Mondoblogito ergo sum ». Vous pourriez aussi me répondre que vous ne l’avez jamais dit et je vous demanderai à quoi donc sert votre blog.

Par Roger Mawulolo (Facebook / Twitter)



Tabaski au Sénégal : rien ne se perd, tout se crée et se transforme en mouton

La fête de Tabaski est l’une des plus importantes fêtes religieuses au Sénégal. Et le point central de cette fête se trouve être le mouton. Cet animal qui fait l’objet de sacrifice pour cette fête est omniprésent dans les maisons comme dans les rues de Dakar. Au Sénégal, à Tabaski, tout se transforme en mouton.
Les négociations avec les filles (si vous voyez ce que je veux dire) ou les transactions d’argent peuvent se transformer en échange de moutons. Même dans nos réservoirs de véhicules, il y a du mouton sans oublier les voies que nous empruntons.
Lisez et vous comprendrez.

Point de vente de moutons
Point de vente de moutons

Les filles et les femmes

Faire des conquêtes féminines à l’approche des fêtes n’est pas forcément une bonne idée. Et la fête de Tabaski ne déroge pas à cette règle surtout dans un pays à majorité musulmane comme le Sénégal (je suis sûr qu’en Guinée et au Mali, ce doit être pareil). En cette période, les filles n’hésitent pas à céder (trop facilement) aux conquêtes des hommes aux portefeuilles et comptes en banque bien garnis. Un seul objectif : se garantir mouton(s) et argent (pour les bijoux, bazins et autres accessoires). Ce qui dérange un peu les conceptions pieuses, c’est que certaines filles deviennent des multiprises car elles disposent de plusieurs « preneurs ». Je veux dire qu’elles ont plusieurs « amants » en charge de la gestion de leur Tabaski. En wolof on appelle « mbarane », l’art de collectionner les amants. En période de Tabaski, le taux de « mbaranisation » monte en flèche. Et un homme averti devrait pouvoir détecter les « mbaraneuses » (adepte du mbarane) de loin sauf si lui-même joue le jeu (oui à maligne, malin et demi :D).

Les hommes mariés ont eux aussi des devoirs en période de Tabaski. Il va falloir offrir un mouton bien dodu à ses beaux-parents. Peu importe les moyens dont vous disposez. On peut trouver, à Dakar, des moutons qui coûte jusqu’à 1,5 million de francs CFA voire plus. Les polygames, qui n’ont pas de moyens financiers conséquents, sont à plaindre car il va falloir satisfaire plus d’une belle-famille.

Les réservoirs de véhicules et les rues remplis de moutons

Ne vous inquiétez pas. Le carburant à base de mouton n’est pas encore d’actualité. Mais à l’approche des fêtes de Tabaski, acheter du carburant au Sénégal peut vous faire gagner des moutons par le biais de tickets qu’on vous remet à l’achat. Vous comprendrez donc l’expression « le mouton peut se retrouver dans nos réservoirs de carburant ».

La circulation est aussi fortement entravée par les divers « stands » de vente de mouton qui assaillent les rues, les trottoirs et les terre-pleins centraux de Dakar. Ces points de vente réglementaires et anarchiques créent des embouteillages car à cause des attroupements et des parkings improvisés. La nourriture de bétail y trouve aussi sa place.

Le transfert d’argent

Les campagnes marketing des opérateurs de transfert d’argent permettent, en période de Tabaski, de gagner des prix en « mouton » lorsque l’on envoie ou reçoit de l’argent. Dénommées « khar ak khaliss » (mouton et argent en wolof), ces opérations publicitaires sont annoncées par de grands panneaux dans toute la ville. Ensuite sur les chaînes de télévision, on assiste à la remise des moutons gagnés.
Je ne citerai ici les noms des sociétés ni ne montrerai les panneaux : ce serait une publicité gratuite sans mouton en contrepartie.

Pour finir, je vous rappelle une règle : la taille du mouton offert doit être proportionnelle à l’amour qu’on porte à la femme à qui on l’offre. Toute conception contraire se retournera certainement contre l’homme.
Bonne fête de Tabaski à vous et surtout n’oubliez pas que l’essentiel est de rendre grâces à Dieu.

Par Roger Mawulolo (Facebook / Twitter)


Ces chauffeurs « débutantes » de Dakar

En lisant le billet de Salma titré « Tu fais comme… et puis quoi ? », qui traite de certaines discriminations faites aux femmes, je me suis souvenu d’un constat que j’ai fait. Ce qui m’inspire mes écrits du jour se résume en ces termes: certains hommes profitent indûment des inscriptions « Attention débutante » initiées par les nouvelles conductrices de Dakar.

 Photo : carmudi.sn

Photo : carmudi.sn

Reconnaître un(e) débutant(e)

Dès qu’on voit un véhicule faire des manœuvres assez bizarres, on se dit que c’est une débutante. Et, de loin, on voit le papier en format A4 collé à l’arrière indiquant « Débutante ».

Souvent le véhicule s’arrête en pleine circulation. Le conducteur a raté son changement de vitesse et le moteur s‘est arrêté au beau milieu de la route. Alors s’en suit un concert de klaxons de la part des autres conducteurs. Le conducteur commence par suer de grosses gouttes et on le voit chercher à redémarrer sa voiture avec des manœuvres désordonnées. Quand il aura fini de démarrer son moteur, on entend un fort roulement de moteur car il a d’abord oublié de se mettre en première avant d’appuyer sur l’accélérateur. Le moteur vrombit. Je rappelle même qu’avant de faire tout cela, le conducteur a oublié de mettre ses feux de détresse.

Un autre cas très fréquent est de voir la voiture dévaler une pente en marche arrière. Vous serez surpris de constater que ce n’est pas une manœuvre volontaire, c’est juste que la maîtrise du démarrage en côte n’est pas assurée.

La discrimination

Malgré l’inscription « Débutante », on peut voir un homme au volant. On peut donc s’imaginer deux situations :

  • soit c’est la voiture qui est débutante elle-même, mais souvent vu leur état on en doute car elles ne sont pas neuves
  • soit le véhicule appartient à son épouse ou à sa sœur.

La vérité est que le conducteur veut leurrer son monde car pour lui un homme, un vrai, ne peut pas montrer qu’il est débutant en conduite. Et le stratagème trouvé est de faire croire que le véhicule appartient à une femme débutante en conduite.

Quelqu’un m’a déjà dit, pour rire, qu’un homme étant une personne, il peut mettre « débutante » (personne débutante) sur sa voiture.

Ça m’a fait juste sourire.

La discrimination envers les femmes prend des formes très subtiles maintenant qu’elles commencent par connaître leurs droits.

 


Quand on sauve des vies en France, il y a deux cas

L’humoriste ivoirien Agalawal nous a démontré dans un de ces spectacles (voir vidéo à la fin) que dans la vie et dans beaucoup de situations, il y a souvent deux cas. Il a raison. Des choses vécues durant cette année 2015 me permettent d’être en phase avec lui. Surtout, j’ai observé que quand un étranger sauve la vie à des Français, il y a aussi deux cas.

Les héros du Thalys - Caricature de Jeffikapi (https://jeffikapi.mondoblog.org)
Les héros du Thalys – Caricature de Jeffikapi (https://jeffikapi.mondoblog.org)

Quand il vous arrive d’assister à un événement mettant en danger la vie de Français, vous aurez deux options : soit vous décidez de fuir et de ne rien faire, soit vous décidez d’agir.
Si vous choisissez de prendre la poudre d’escampette et de ne rien faire, vous êtes sauvé. Si vous décidez d’agir, il y a deux cas : soit vous réussissez, soit vous perdez. Si vous perdez alors vous êtes sauvé. Si vous gagnez, il y a deux cas. Et c’est ce qui nous intéresse ici.

Premier cas : vous êtes ressortissant d’un pays sous-développé sans nationalité française

Vous vous souvenez de Lassana Bathily ?
C’est ce jeune originaire du Mali qui a contribué à l’assaut réussi des forces françaises lors de la triste journée de la prise en otage du magasin hyper Casher par Amedy Coulibaly. Ce jeune a réussi à sauver des clients du magasin et aussi à aider les forces de l’ordre en leur donnant des informations sur les lieux.
Il a été récompensé de la nationalité française, mais la Légion d’honneur se fait toujours attendre malgré les pétitions et autres réclamations de certaines associations.

Donc je conclus (cela n’engage que moi) que si vous venez d’un pays sous-développé et que vous êtes presque sans papier et s’il vous arrive de sauver la vie à des Français, vous obtiendrez juste la nationalité française.

Deuxième cas : vous êtes ressortissant d’un pays développé

Pour ce cas, vous serez décorés de la Légion d’honneur, mais on ne vous offrira pas la nationalité. Je ne sais pas si c’est parce qu’ils n’ont  pas fait la demande.

C’est ce qui vient d’arriver aux héros du Thalys : le Britannique Chris Norman, les Américains Anthony Sadler, Spencer Stone et Alek Skarlatos décorés par le président français François Hollande. Au finish, ils seront huit à l’avoir et le principe de ce deuxième cas semble être respecté : être ressortissant d’un pays développé.

Vous voyez donc qu’il y a toujours deux cas, mais je ne vais pas m’amuser à vouloir continuer les deux cas issus de chacun des cas cités plus haut. Je vous laisse les trouver.

Il fait, en tous cas, bon de sauver des Français, il vous suffit d’un peu de courage et vous verrez si vous serez sauvé ou considéré en deux cas.
Les migrants savent donc ce qui leur reste à faire : sauver des vies françaises et ils seront sauvés.

Par Roger Mawulolo (Facebook / Twitter)


Doudou Ndiaye Rose, l’homme aux baguettes magiques

Le grand ambassadeur de la culture et de la percussion sénégalaise vient de disparaître. Le 19 août, Doudou Ndiaye Coumba Rose le tambour-major est parti sans bruit.

Doudou Ndiaye Rose au Fesman en 2014
Doudou Ndiaye Rose au Fesman en 2014

Capable de diriger cent batteurs, voire plus et sur des rythmes différents, cet homme a fait la fierté du Sénégal et de l’Afrique à travers le monde.

Doudou Ndiaye Coumba Rose avait 85 ans. Il a eu une vie pleine avec des succès dans tous les domaines tant sur la scène qu’en dehors. Au point où l’Unesco l’a classé « trésor humain vivant ». D’aucuns le traitent de « mathématicien des rythmes ».

Le public l’aimait, les femmes l’aimaient et il le leur rendait bien. Il en a épousé un certain nombre (sa religion le lui permettait). Il a aussi monté une troupe de batteuses qu’on appelait les Rosettes qui a fait sensation sur plusieurs scènes. D’ailleurs « Rose » était le nom de sa mère qu’il a ajouté au sien en hommage. Son vrai nom était Mamadou Ndiaye et il revendiquait 42 enfants. Son nom d’artiste était Doudou Ndiaye Coumba Rose. Un physique typique sénégalais : mince et teint noir.

Si je fouille dans mes souvenirs d’enfance, je trouve ceci : j’étais à l’école primaire publique de la Marina à Lomé. En ce temps, existaient encore les magazines de jeunes dénommés « Kouakou » et « Calao ». On nous les vendait à 25 francs Cfa si ma mémoire est bonne. Et c’est dans un numéro de Calao que j’ai lu un article sur cet homme qui pouvait diriger 100 batteurs à la fois. Avec mon intelligence d’enfant, j’ai essayé d’imaginer, mais cela me paraissait un peu incroyable.

Je suis arrivé au Sénégal en étant adulte et avant mes 30 ans, j’ai donc eu l’occasion de voir de mes propres yeux cet homme qui dirigeait la troupe de 100 batteurs et aussi les « Rosettes ». Lors d’un défilé de la fête de l’indépendance du Sénégal, je l’ai vu et aussi au théâtre national Daniel Sorano de Dakar.

Il ne me connaissait pas, mais moi je le connaissais.

Important, l’homme l’était. Au point où le président sénégalais Macky Sall a interrompu ses vacances pour venir saluer sa mémoire.

La rose des tambours est tombée…

Que la terre lui soit légère

Par Roger Mawulolo (facebook / twitter)

https://www.youtube.com/watch?v=4KUFwmWU0cY




Obama au Kenya ou la parabole du fils prodigue

L’une des paraboles les plus populaires de la Bible, mais aussi très controversée pour l’opinion est celle du fils prodigue. Même les non-chrétiens connaissent ce récit même s’ils ne savent pas que c’est Jésus Christ qui l’a raconté. Barack Obama, premier président afro-américain des États-Unis, étant cultivé, il connaît certainement l’histoire.
Encore une fois, je vais vous demander, de pardonner mes raisonnements simplistes, mais la vie n’est-elle pas plus simple quand on la prend simplement ?  :

En résumé, la parabole du fils prodigue, c’est l’histoire d’un homme qui avait deux fils. Un matin, l’un vint le trouver pour réclamer sa part d’héritage par avance. Ce qu’il prit. Il s’en alla donc dilapider tous ses biens avec les prostituées et mauvaises compagnies en faisant la belle vie. Il fut réduit à travailler dans les fermes et partageait même la nourriture des porcs. Il se dit un jour « Même les serviteurs de mon père mangent à leur faim alors que je souffre ici. Je vais donc retourner voir mon père pour qu’il me prenne au moins comme serviteur ou employé ».
A son arrivée, le père, fou de joie de le retrouver vivant, fit tuer le veau gras pour faire la fête. L’autre frère qui était toujours resté fidèle à son père fut frustré et en colère. Mais son père lui ceci : « Mon fils, ton frère, qui était mort et perdu est revenu à la vie ».

Je vous épargne de la signification spirituelle de cette parabole. Revenons à Obama et à ce que je lui trouve de comparable avec le fils prodigue.

Obama au Kenya - https://www.samrack.com
Obama au Kenya avant de devenir président – https://www.samrack.com


L’héritage du père…

Nous les Africains, le plus grand héritage qu’on puisse donner c’est la vie. Et donc ça, un Africain, un Kényan le lui a donné. En plus, il porte les prénoms de son père : Barack, Hussein. Si ça, ce n’est pas un héritage, alors dites-moi, c’est quoi ?

Souvent ici, quand tu veux nous rebeller contre un père qui n’assume pas ses responsabilités, on te dit « respecte au moins le fait qu’il t’ait donné la vie ». C’est trop facile non ? Mais c’est comme ça. Donc Obama n’a pas à se plaindre, il a pris son héritage dès sa naissance.

Mes comparaisons …

Obama, depuis qu’il est président des États-Unis a semblé oublier de visiter le Kenya. Aujourd’hui quand on le présente, on désigne le pays de Kenyatta comme le pays du père de Obama. Sachez que nous en Afrique, nous n’avons pas de « pays de notre père », mais que nous avons le même pays que notre père. Point barre.

On vient du même village que son père, du même quartier et de la même maison familiale. La question ne se pose même pas.

Même si votre maman est américaine donc d’un grand pays, vous venez du village de votre père même s’il se trouve dans le fin fond d’un pays pauvre submergé par les problèmes sécuritaires et sociaux. Même si le président de ce pays a été accusé de crimes par la Cour pénale internationale.

Pour en revenir à notre parabole, Obama a bien fait la belle vie aux États-Unis. Il a même avoué avoir touché à la drogue et fait plein d’autres choses répréhensibles quand il était jeune. Vous voyez qu’il n’est pas loin de la belle vie du fils prodigue. La seule différence est que lui a pu aboutir à Michelle.

Il a donc fait la belle vie aux Etats-Unis mais lui a pu devenir sénateur puis président et pas ouvrier comme le fils prodigue indiqué par Jésus Christ dans son récit. Mais qui sait ? Peut-être bien qu’il était un peu malheureux de ne pas être revenu au Kenya depuis là.

Il a donc dû se dire « Il faut quand même qu’avant la fin de ma présidence, j’aille revoir le pays de mon père ».

Le retour…

C’est ici que l’histoire prend tout son sens.

Le fils qui a tant ignoré le pays de son père, surtout depuis qu’il est président, va revenir dans quelques jours au Kenya. Ici, c’est tout comme tuer le veau gras et organiser la belle fête comme le père, dans la parabole, pour le fils n’en déplaise à celui qui est resté et qui l’a toujours servi. Il suffit d’aller voir Nairobi ces jours-ci.
Toute la ville a été nettoyée de fond en comble. Les ordures enlevées et même les habituels mendiants ont disparu de la ville. Les grandes artères et lieux repeints. Nairobi a fait peau neuve.

Côté sécurité, gare aux shebab et aux malfrats qui oseraient pointer le nez à Nairobi. Aucun agent de police ne sera en congé. Tous sont mobilisés pour la réussite de cette grande fête.

Les habitants de Kibera, l’immense bidonville de Nairobi, partageront certainement les mêmes sentiments que le frère déçu, dans la parabole, par la réaction de son père. Eux qui, comme le frère frustré, sont toujours restés fidèles au Kenya quand bien même leur misère est grandissante. Voilà qu’un fils qui vit loin et qui revient est mieux traité qu’eux.

Le comble de l’histoire est que ce fils, contrairement à celui de l’histoire, repartira à la fin de la grande fête.

Espérons juste que de là où il sera, il se souviendra de ce pays dont un des fils lui a donné la vie.
Peut-être que pour se repentir, il accordera finalement les mains de sa fille, Malia, à cet avocat kényan, Félix Kiprono, qui mobilise tout un troupeau comme dot. Pourquoi pas ?
On dit souvent « qui vole un œuf, volera un bœuf ». Moi je vous dis « qui a mangé un veau gras acceptera certainement un troupeau de 50 vaches et 70 moutons bien gras ».

En espérant que ce billet ne me vaille pas un refus définitif de mon visa en cours pour les États-Unis, je vous souhaite une bonne lecture.

Par Mawulolo (facebook / twitter)



Mondoblogito ergo sum *

Dans ce billet qui est mon quarantième sur la plateforme Mondoblog, je l’avoue, je le dis, je ne le cache plus : j’ai changé. Oui, désormais partout où je passe, partout où je suis, partout où je ne passe pas, partout où je ne suis pas, je veux sentir, entendre ou voir ce qui pourra être le sujet de mon prochain billet. Je suis devenu comme une combinaison de O’timmins et de O’hara.

Vous ne vous souvenez pas de ces deux noms et de leurs caractéristiques principales ? C’est dans « Les Rivaux de Painful Gulch » de la série Lucky Luke (bande dessinée et dessins animés).

Un O'timmins et un O'hara
Un O’timmins et un O’hara

Les O’hara sont reconnaissables à leurs grandes oreilles (je suppose qu’avec ces dimensions d’appareil auditif, ils perçoivent les sons mieux que les autres) et les O’timmins à leur gros nez (en principe, ils doivent avoir un meilleur odorat). Mais ne vous inquiétez pas mes oreilles et mon nez (déjà gros) ne se sont pas allongés entre temps.

Il me manque juste le nom qui indiquerait que mes yeux aussi sont devenus « grands ouverts ». Rantanplan, le chien de la série « Lucky Luke », m’y aidera certainement au vu des dimensions de ses yeux.

Avec ces atouts donc, j’avoue que je m’en sors bien. Et surtout que :

  • je vis sur un continent qui ne manque jamais de piquant (Afrique)

  • j’habite une ville toujours en mouvement (Dakar)

  • je viens d’un pays où il y a du nouveau chaque jour (Togo)

  • je vis dans un pays particulier où tout peut être sujet à billet (Sénégal)

  • le monde d’aujourd’hui est plein de sujets à exploiter.

Dans tous les cas, le jour où je vous dis que je ne peux plus écrire, ce sera que je serai devenu un O’hara sourd ou un O’timmins au nez bouché …

Pour le moment je vous dis « mondoblogito ergo sum ».
Je suis sûr sinon certain que quand
René Descartes rédigeait son discours de la méthode en 1637, il ne se doutait pas qu’un jour l’expression « Cogito ergo sum » (je pense donc je suis) irait à un blog. (Comme si à l’époque il pouvait savoir).

J’espère que comme Lucky Luke qui tirait plus vite que son ombre, j’arriverais un jour à bloguer plus vite que mon ombre.

En attendant je reste en mode « O’timmins et O’hara ».

 Mawulolo (facebook / twitter)
 
* Mondoblogito ergo sum (inspiré de cogito ergo sum et aussi de blogito ergo sum) : je mondoblogue donc je suis



C’est décidé, je vais travailler à la FIFA

Non! Mais, il ne peut y avoir meilleur lieu pour travailler, progresser et s’épanouir en toute tranquillité qu’à la FIFA (Fédération internationale de football association). Je viens d’en découvrir les raisons et mieux encore j’ai tous les atouts pour y réussir. Vous ne me croyez pas ? Lisez alors.

La première raison : je suis Togolais

Oui, être Togolais est un atout malgré tout ce que vous pouvez lire partout. Chez nous, avant même les élections on connaît le gagnant. C’est la même chose à la FIFA, non ? Qu’il y ait des scandales avant les élections ou même pendant, on sait les gérer. C’est pareil à la FIFA. Je suis déjà habitué à ce système et c’est un atout pour moi.

Blatter et Havelange en 1982 - Photo : Wikipedia
Blatter et Havelange en 1982 – Photo : Wikipedia

Sepp Blatter, l’actuel Président de la FIFA, a remplacé Joao Havelange qui était comme un père pour lui car il a travaillé, sous lui, pendant 23 ans (1975-1998), d’abord comme directeur des programmes de développement (1975-1981) et de 1981 à 1998, comme secrétaire général. Figurez-vous que chez moi au Togo aussi, j’ai un Président qui est le fils du précédent. En plus mon Président actuel a été ministre sous le précédent. Cela ne ressemble-t-il pas au parcours de Blatter à la FIFA ? Je connais déjà donc bien ce système « de père en fils » et c’est un atout.

Une autre bonne raison est que les scandales financiers, on en a l’habitude et ça ne nous effraie pas du tout. Des petits fonctionnaires jusqu’aux grands, les pots-de-vin ne sont pas rares. Si on compare les attributions de bourses chez moi à l’attribution des coupes du monde, je n’y vois pas trop la différence sauf la différence entre les montants. Il faut avoir le bon réseau et connaître les bonnes personnes et savoir les gérer. Je suis né dans le système, donc c’est toujours un atout que Blatter pourra exploiter chez moi s’il me prend.

Actuellement, notre football est désormais dirigé par un comité de normalisation. Suite à diverses contestations et dénonciations, la fédération a dû se résigner à céder la place au comité. C’est dire que les crises, nous c’est notre pain quotidien. Pour donc mieux gérer les crises, je peux être un atout pour Blatter.

Hayatou, mon deuxième atout

Blatter et Hayatou - Photo : El Watan - Illustration : Mawulolo
Hayatou et Blatter  – Photo : El Watan – Illustration : Mawulolo

Oui, je suis aussi Africain et donc mon premier soutien devra être Issa Hayatou, le Président de la CAF. Il est un soutien indéfectible de Blatter. Comme ma fédération de football a sans aucun doute voté pour Blatter, il n’osera pas ne pas me prendre avec lui. Dans un billet antérieur, j’avais fustigé le changement des textes de la CAF pour que Hayatou demeure président et c’est un atout pour moi.
Eh oui, Hayatou lui-même est devenu un affidé de Blatter depuis qu’il a été candidat contre lui et qu’il a perdu en 2002. Moi aussi donc, je peux avoir l’espoir de revenir dans ses petits papiers malgré mon opposition.

Ne pas supporter Platini, mon troisième atout

Il semble que la fédération française de football elle-même aurait voté pour Blatter. Où est donc mon mal si je m’oppose à Platini qui veut mettre des bâtons dans les roues de Blatter ? Est-ce ma faute s’il peine à être prophète en son propre pays ?

Vous voyez donc qu’avec ces trois raisons, je suis fait pour travailler à la FIFA. Chez moi on dit qu’une marmite reposant sur trois pieds ne peut se renverser. Avec mes trois raisons, je suis apte.

Déblatérer contre Blatter semble ne servir à rien et avec Hayatou pour atout, il peut encore de beaux jours devant lui.

En tout cas, nous en Afrique et au Togo, toute l’agitation à l’UEFA-là ne nous fait pas trembler du tout. Nous sommes habitués à gérer les élections, les opposants, les contestations, les changements de Constitution, la corruption et bien d’autres. Tout ceci ne constitue-t-il pas un atout pour moi ? Surtout qu’il y a plein de milliards à brasser.

J’y travaillerai à la FIFA, j’y travaillerai…

Mawulolo (facebook, twitter)


Cédéao : le Togo et la Gambie gagnent à 2 contre 13

Il est vrai qu’il est écrit quelque part que gagner une guerre n’est pas lié au fait d’avoir une armée pléthorique, mais reconnaissez avec moi qu’il faut être un véritable génie pour qu’une communauté de 15 pays dont des grands puisse se plier aussi facilement face à deux des plus petits la constituant. Il faut vraiment être fort pour réussir ce tour de passe-passe alors qu’aucun droit de veto n’existe.
A moins que ce ne soit les autres ou le reste de la communauté qui ne sache pas vraiment ce qu’ils veulent.

Lors de son dernier sommet des chefs d’Etat tenu à Accra au Ghana, la Communauté économique des Eats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a mis sur la table un protocole visant à prôner et encourager la bonne gouvernance et la démocratie dans ses pays membres. Et dans ce protocole était inscrite la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux. Tous les pays ont accepté sauf deux des plus petits : le Togo et la Gambie.
D’aucuns ont été surpris par cela, sauf les habitants des deux pays concernés.

La limitation du nombre de mandats présidentiels n’existe pas au Togo et en Gambie…

Faure, l'homme fort du Togo
Faure, l’homme fort du Togo

Au Togo, le Président de la République vient de rempiler pour un 3e mandat le 25 avril dernier. Malgré les contestations sur les résultats donnés, le fauteuil présidentiel a été bien gardé. Il faut bien préciser qu’au pays de Sylvanus Olympio et de Eyadéma Gnassningbé la Constitution a été modifiée en 2002 pour un nombre de mandats illimités et une élection à un seul tour.

Ne soyez donc pas étonnés que ce pays ne veuille pas de ce protocole qui mettra à mal ses propres textes. La seule surprise est que celui qui oppose son refus est le même que celui qui promet des réformes dans son pays. Et normalement dans ces réformes promises est sensé se trouver celui lié à la limitation de mandats.
Je suis sûr que le Président veut être d’abord prophète en son propre pays avant de signer à la Cédéao. Eh oui, moi je suis un croyant hein.
Au Togo, le pouvoir promet les réformes et ne les fait pas. Toutefois l’opposition peut marcher et protester comme elle veut. La démocratie c’est la liberté d’expression donc c’est déjà ça. N’est-ce pas ?

En Gambie, les promesses même n’existent pas. Et l’opposition ne peut même pas protester.
Le Président Yaya Jammeh en fait voir de toutes les couleurs à tous ceux qui se disent opposants. Bien que Banjul ait assez de place pour servir de domicile aux opposants gambiens, ces derniers préfèrent souvent habiter Dakar (Sénégal). J’espère bien que c’est une préférence et non une obligation.

Yaya Jammeh en mode "guérisseur" - Photo : seneweb.com
Yaya Jammeh en mode « guérisseur » – Photo : seneweb.com

Le Président gambien est un grand marabout et guérisseur traditionnel. Vous vous souvenez de ses séances de guérison de personnes atteintes de VIH? Il a même déclaré qu’il guérissait la fièvre à virus Ebola.
Dans tous les cas, la démocratisation de son pays est une des maladies contre lesquelles il lutte aussi avec force. Et ce n’est pas la Cédéao qui pourra l’en empêcher. Il en est à son quatrième mandat et rien ne semble indiquer une possible alternance dans ce pays du moins du vivant de Jammeh. Et ça encore il faudra attendre pour voir car les Togolais ont cru à un moment que le décès de Eyadéma, père de Faure, allait les libérer du système. Que nenni. C’est là même où tout a recommencé.

Au finish la Cédéao n’est une réalité que dans les aéroports. Au moins là-bas quand des ressortissants des pays membres passent on ne leur réclame pas de visa. Mais essayez les frontières terrestres et vous verrez. A la frontière Togo-Bénin, les policiers béninois ont signifié à un ami sénégalais qui était avec moi qu’ils ne connaissaient pas son appartenance à une quelconque communauté et donc qu’il lui fallait payer pour passer. A la frontière Togo-Ghana, le douanier ghanéen m’a répondu «You want to teach me about Ecowas? Pay me. If not, go back to your Togo». Ainsi va la Communauté au quotidien pour nous les citoyens lambda.
Au moins prochainement quand j’arriverai à la frontière gambienne et que la police ou la douane refusera de me reconnaître mon statut de citoyen de la Cédéao et voudra me faire payer, je pourrai au moins leur dire que leur Président et le mien combattent le même combat : celle de la non-limitation de leur mandat à la tête de nos pays respectifs.

Je suis sûr que j’arriverai à les convaincre avec cet argument.


La nuit est longue au Togo et le jour ne semble pas venir

S’il est une phrase très populaire dans l’expression des Togolais, c’est celle-ci : « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? » Cette question posée à la plupart des Togolais a pour réponse automatique : « La nuit est longue, mais le jour vient ». Ceci pour dire que tôt ou tard il y aura une alternance dans ce pays dirigé depuis bientôt un demi-siècle par une même famille.
Cette phrase vient de la déclaration de Sylvanus Olympio, père de l’indépendance du Togo, le jour où le pays accédait à l’indépendance en 1960. Cette phrase est aussi tirée de la Bible à Esaïe 21, verset 11.
Après la dernière élection à au regard du système mis en place par le régime pour garder le pouvoir, on est droit de se poser des questions sur ce que peut encore être la réponse de la « sentinelle ».

Le Président Faure déclaré réélu le 25 avril 2015 et va être investi le 23 mai selon le programme communiqué. Comme en 2005 et en 2010 sans oublier 1993, 1998 et 2003, le Togo n’a pas dérogé à son habitude : proclamation du président sortant comme vainqueur et protestation de l’opposition, dont le leader réclame la victoire qui lui a été volée.

Dans le rôle du protestataire, Jean-Pierre Fabre a succédé à Gilchrist Olympio (qui roule maintenant dans attelage présidentiel) et Emmanuel Bob-Akitani tandis que dans le rôle du vainqueur contesté Faure Essozimna a succédé à Etienne Eyadéma. Je rappelle, juste pour ceux qui ne le savent pas, que Faure et Eyadéma partagent le même nom de famille : Gnassingbé. La simple raison est que l’un est le fils de l’autre.

 La vie politique

La vie politique au Togo est un peu « spéciale ». Les acteurs politiques se livrent à un jeu peu digne d’une vraie démocratie. Les élections législatives sont basées sur le système proportionnel, mais figurez-vous qu’une région plus peuplée qu’une autre élit un nombre de députés inférieur à celui d’une zone moins peuplé. En fait, la clé de répartition des nombres de députés à élire est la tendance connue à être favorable à un parti ou non. Je n’ai cité le nom d’aucun parti, c’est facile à deviner.

Jean Pierre Fabre et Faure Gnassingbé - Photo : oeildafrique.com
Jean Pierre Fabre et Faure Gnassingbé – Photo : oeildafrique.com

Pour la dernière présidentielle, les résultats proclamés ont montré qu’il y a des zones où le nombre de votants a dépassé le nombre d’inscrits. D’aucuns ont parlé de nouvelles règles mathématiques inventées par la Céni (Commission électorale nationale indépendante), ce qui n’a pas empêché la validation par la Cour constitutionnelle dirigée par le juge Abdou Assouma. De toute façon, il n’y a eu aucun recours en annulation auprès de cette cour. Peut-être que c’est la composition de cette cour qui est remplie d’affidés du pouvoir en place, mais aussi et surtout les recours non aboutis des années antérieures qui ont poussé l’opposition à ne pas perdre son temps sur cette voie. Avec un système pareil, la sentinelle ne verra jamais le jour… C’est sûr.

D’un autre côté, certains opposants ont cédé à l’appel des espèces sonnantes et trébuchantes ou des postes ministériels. Ils disent que pour mieux changer les choses, il faut être au gouvernement. Pourtant on a déjà vu des « opposants »  comme Koffigoh, Agboyibor qui ont été à la tête du gouvernement, mais, la sentinelle reste toujours dans sa nuit.

Si vous interrogez les partisans du régime en place, eux vous diront qu’ils sont en plein jour tout le temps. Pour eux, le passage d’Eyadéma à Faure est une alternance générationnelle, car souvent nous disons « lui c’est lui, moi c’est moi »*.

L’opposition dite radicale est réduite à des meetings et des marches hebdomadaires pour réclamer l’alternance, le respect des accords signés et les réformes. La nuit est donc encore bien longue même si les marches se déroulent en plein jour.

 La vie économique et sociale

La majorité des Togolais s’accorde à dire que les affaires ne tournent plus comme avant, c’est peut-être pour ceux qui ne sont pas du bon bord. Le chômage frappe comme une cravache, le climat des affaires n’est pas très sain. Sans soutien et sans réseau proche du bord qu’il faut, vos affaires risquent de ne pas prospérer. Pourtant, il semble que le taux de croissance du pays s’est amélioré, hélas, le panier de la ménagère n’en a rien ressenti.

Un petit tour au centre hospitalier universitaire Sylvanus Olympio (encore lui) de Lomé vous donnera le frisson. Un malade y entrant voit son moral enterré. Les lieux étant vétustes ainsi que les équipements.
Le personnel souvent en grève. Et pour y trouver un lit, il faut connaître quelqu’un ou avoir le bras long comme on dit. Une expression répandue à Lomé dit qu’aller s’y soigner, c’est se rapprocher de la morgue.
Avez-vous déjà eu besoin de faire une transfusion sanguine ? On vous prescrit le nombre de pochettes de sang à acheter et vous vous rendez au centre national de transfusion sanguine. Sur place, rien ne vous indique la démarche à suivre. Les citoyens sont obligés d’attendre des heures et seuls ceux qui ont des connaissances ou des contacts sur les lieux se voient vite servis. On s’en fout de la vie des mourants ayant besoin de sang. Peut-être que c’est pour ça qu’on assimile la mort à la nuit. ET là encore elle sera vraiment longue pour notre système de santé.

Pendant toute la campagne pour la présidentielle, les élèves étaient à la maison, en raison de la grève des enseignants. Un des candidats avait quand même comme affiche de campagne, une grande photo avec des élèves et le slogan était qu’avec eux ils se sentaient forts.
Dites-moi comment un président peut-il se sentir fort avec des élèves qui sont chez eux au lieu d’être en classe ?

La nuit est encore bien longue pour le système éducatif togolais.

On peut encore écrire plusieurs lignes pour montrer que la nuit semble bien longue pour la sentinelle togolaise. Jusqu’au moment où je rédige ce billet, le nombre de mandats présidentiels est illimité et l’élection présidentielle est à un seul tour.

Croire donc en une alternance au Togo, du moins par les urnes, semble être une promesse du genre « Jésus revient bientôt ». Vous imaginez depuis combien d’années cette prophétie a été faite et que les gens y croient dur comme fer. Mais rassurez-vous, pour Dieu, mille ans sont comme un jour et un jour comme mille ans.

Je laisse donc chaque Togolais apporter sa réponse quand on lui demande : « Sentinelle que dis-tu de la nuit ? »

Par Roger Mawulolo  (Facebook, Twitter)

 * « lui c’est lui, moi c’est moi » est un slogan du président Faure Gnassingbé pour dire qu’il est différent de son père Eyadéma à qui il a succédé


CAF : Issa Hayatou, présidence à vie en vue

Issa Hayatou avec ses amis ont fait sauter le verrou des « 70 ans ». Cette limite d’âge imposée à tout candidat à la présidence de la Confédération africaine de football (Caf) n’a donc pas résisté. Le temps d’un congrès de deux jours, on a pu admirer le talent de serrurier de ce monsieur qui nous a démontré à travers tout son mandat qu’il veut s’éterniser à la tête de la faitière du football africain.
Après avoir usé de ses talents de tailleurs pour « retailler » les textes règlementaires afin de faire reculer d’autres candidats au poste de président, le voilà en serrurier faisant sauter le verrou de la limite d’âge.

Le congrès électif de la Caf est prévu pour 2017. Si l’on en croit sa biographie officielle, Monsieur Issa Hayatou aura 71 ans, il fallait agir vite. Surtout que la Fifa de Sepp Blatter aussi a donné l’exemple en faisant sauter la limite d’âge de 70 ans.
Si à 79 ans, le blanc, l’européen, l’occidental de la Fifa (Fédération international de football Association) peut encore se présenter, pourquoi le noir, l’africain et le sub-saharien à juste 71 ans, ne le pourrait-il pas ?
Les meilleurs exemples de démocratie nous venant de l’hémisphère nord, il est tout à fait normal qu’on copie celui du Suisse aussi, n’est ce pas ?

Depuis 1987, Hayatou règne donc en maître tout comme son ex-adversaire Blatter le fait depuis 1998.
Ex-adversaire car en 2002, Hayatou était candidat à la présidence de la Fifa et a été battu par Blatter. Depuis ce moment, ils sont devenus de très bons amis.
L’homme Hayatou est un bon apprenti car l’auteur de la douleur de sa défaite de 2002 est aujourd’hui son maître.

Blatter et Hayatou - Photo : El Watan - Illustration : Mawulolo
Blatter et Hayatou – Photo : El Watan – Illustration : Mawulolo

Le tailleur …

Lorsque Jacques Anouma, ex-président de la FIF (Fédération ivoirienne de football) commençait par devenir trop impertinent et montrait trop de velléités pour le poste de Président de la Caf, l’on a vu le côté « tailleur » de tonton Issa.
A grands coups de ciseaux dans le règlement et avec quelques coups d’aiguilles et de fil, l’atelier de couture « Issa et compagnie » a écarté Anouma.
Subitement, en 2013, quand Anouma voulait briguer la présidence de la CAF, les statuts ont été modifiés et désormais ne pouvaient être candidats que les membres du comité exécutif dont Anouma ne faisait pas partie.
Ce dernier a fait recours au Tribunal arbitral du sport (TAS) qui est basé en Suisse à Lausanne qui ne lui a pas donné raison.
Je n’ose pas croire que c‘est parce que le TAS est basé dans le pays de Blatter. Je n’ose même pas le dire puisque c’est ce même TAS qui vient de donner raison au Maroc* face à la Caf, non ?
D’ailleurs, la Caf, selon moi, a accepté un peu trop facilement la décision du TAS. Peut être c’est pour mieux se concentrer sur le congrès et la modification des textes. Qui sait?

Bon je n’ose pas croire que c’est pour cela que le Maroc aussi n’a pas dénoncé la visée de Hayatou de s’éterniser sur son fauteuil.
Tout ce que je crois, c’est que je ne crois rien… N’est-ce pas Socrate** ?

Le serrurier …

Pour la serrure des 70 ans, il a commencé par en graisser le mécanisme depuis un bon moment pour que cela saute facilement avec un simple coup de tournevis à moins que ce ne soit une clé double ou un passe qui ait été utilisé.

En février dernier, le dirigeant ghanéen Kwesi Nyantaki (membre du comité exécutif de la CAF) a donné le signal en affirmant : «La FIFA n’a plus de limite d’âge pour les membres de son comité. La CAF aussi souhaite aligner son règlement sur celui de la FIFA.».
Le comité exécutif a donc voté « haut la main » pour la levée de la limite des 70 ans offrant un boulevard à tonton Issa. Le costume est taillé sur mesure par le tailleur, n’est ce pas?
Ceci pouvant expliquer cela, quand on parle de comité exécutif de la Caf, pensez plutôt à une bande d’amis liés par des intérêts communs que sont les avantages financiers, les voyages, les séjours dans les grands hôtels etc…

Moi, aimant trop les réflexions simples, je dis, comme Gérard de Villiers, par la pensée de Malko Linge « …dans ce métier, les coïncidences sont trop rares.. ».

A l’image de certains de nos dirigeants politiques, le sport mondial est régi par ces attitudes de soif de pouvoir et c’est très dommage.

Par ailleurs Hayatou a déjà apporté son ferme soutien à Blatter pour la prochaine élection à la présidence de la FIFA qui se tient le 29 mai.
Si vous voulez rester dans les arcanes internationales du football, il vous suffira donc de crier partout : « Avé Blatter…. Avé Hayatou… »

Par Mawulolo ( @RogerLAS )

* : le Maroc avait été suspendu de toutes les compétitions de la Caf suite à sa décision de ne plus accueillir la Coupe d’Afrique des Nations 2015.

**: Socrate est un philosophe qui a déclaré « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien »


Reconnaître sa défaite électorale, exploit en deçà du Sahara, normal au-delà

Ne vous inquiétez pas. Je ne me prends pas pour Blaise Pascal*.
Tout le monde s’accordait à dire que l’issue de l’élection au Nigeria serait sanglante avec beaucoup de contestation voire des morts. Et surtout on craignait qu’aucun des deux protagonistes, Goodluck Jonathan et Muhammadu Buhari, ne reconnaisse facilement sa défaite.
Le président sortant a donc surpris son monde et surtout les médias qui se préparaient à couvrir une crise post-électorale.
Un de mes amis me disait que les médias signalent toujours qu’aucune violence n’est pour le moment notée. Le « pour le moment » est mis pour montrer qu’on est sûr que cela arrivera.

Avec une élection organisée dans des conditions particulières imposées par les attentats perpétrés par la secte islamiste Boko Haram, le géant ouest-africain vient de donner une leçon de démocratie à beaucoup d’autres pays où des élections se préparent.

Félicitations à Goodluck Jonathan malgré tout…

Buhar et Jonathan - Photo : www.thenicheng.com
Buhari et Jonathan – Photo : www.thenicheng.com

Accusé, à tort ou à raison, d’être trop tendre face à la secte terroriste Boko Haram, le bilan de Gooluck Jonathan est assez controversé. Le dossier des 200 filles enlevées à Chibock a aussi fortement entaché la fin de mandat du président nigérian sortant. Jusque-là aucune information claire sur ce dossier n’est connue. Le hashtag #BringBackOurGirls a encore de beaux jours devant lui.

Mais ici chez nous en Afrique, reconnaître sa défaite avec tout le fair-play qu’il faut est assez rare pour être souligné. Rien que pour cela, pour nous, Jonathan est un grand homme. Cela pourra-t-il constituer un gros coup de gomme sur tout ce qu’on lui reproche ?

Nos réalités ne sont pas les mêmes…

Pour les habitants d’autres continents comme l’Europe, cela pourrait paraître assez surprenant de nous voir aussi contents juste parce qu’un perdant a reconnu sa défaite. Ceux qu’ils ne savent peut-être pas c’est que chez nous en Afrique subsaharienne principalement, les réalités sont très volatiles et inflammables. Les conditions d’organisation des élections sont souvent calamiteuses pour diverses raisons : contestation du fichier électoral (cas actuel au Togo), dépouillement mal géré, transfert des urnes d’un point à un autre suscitant la suspicion, composition des commissions électorales. Souvent, le spectre de la violence est le décor régulier des élections en Afrique à quelques exceptions près.

La légitimité de certains candidats est même remise en cause, ce qui crée un sentiment de révolte si lesdits candidats sont déclarés gagnants. Les modifications des constitutions au gré du désir de rester au pouvoir sont, très souvent, la base des contestations.

On peut se souvenir :

Ces exemples fondent, aujourd’hui, les inquiétudes des Togolais et Congolais au fur et à mesure que la date des élections présidentielles se rapproche.

Heureusement que tout n’est pas aussi noir que notre peau. Au Sénégal depuis 2000 où le président Abdou Diouf a appelé Wade pour le féliciter. Ce dernier en a fait de même lors de sa défaite de 2012 où il a félicité Macky Sall ; son challenger bien avant la fin même des dépouillements. Au Ghana aussi, nous avons des élections qui se déroulent assez correctement.

On pourra attribuer l’adjectif « mauvais » à tous les mots qu’on voudra sur Goodluck Jonathan, mais au moins il n’aura pas été un mauvais perdant. Sans hésiter, je dis donc « Goodluck, merci pour ce moment ». Ce moment où tu as reconnu ta défaite.
Et voici mon hashtag : #GoodluckIsGentleman

* Blaise Pascal est l’auteur de la citation « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà »


« Panoramix le druide, viens nous sauver »

Quand j’étais enfant et souvent face à des injustices de plus puissants sur des faibles, des plus riches sur les pauvres, des aînés sur des enfants, je me disais toujours que j’aurais pu tout arranger si je pouvais goûter à la potion magique que fabriquait le druide Panoramix pour les Gaulois. Ce vieillard à la longue barbe qui fabriquait la mixture qui permettait à Astérix et ses troupes de passer des raclées mémorables à l’envahisseur romain. Je ne voulais quand même pas être comme Obélix sinon les ravages auraient été immenses. La potion magique donnait des forces surnaturelles aux Gaulois. Obélix, lui, est tombé dans la marmite de potion quand il était enfant et donc sa force surnaturelle est permanente.

Pour ceux qui jusque-là ne voient toujours pas de quoi je parle, rapprochez-vous d’une bibliothèque ou d’une librairie et demandez « les Aventures d’Astérix, le petit Gaulois »

 Panoramix, pardon viens…

 Chers amis ici me lisant, imaginez moi disposant de la potion magique de Panoramix aujourd’hui.

Je serai déjà descendu faire face à Abubakar Shekau* et sa troupe. Après les avoir roué de coups au Nigeria, je serai passé au Mali voir les gars à Kidal pour leur poser quelques questions. Je vous assure qu’ils auraient renoncé à leurs actions. Imaginez un tourbillon de gifles et de coups comme les Gaulois en donnaient aux Romains. (Illustration dans l’image ci-dessous)

Obélix et Astérix en pleine action
Obélix et Astérix en pleine action

Après le Mali, je remonte en Libye pour ramener la paix à Tripoli et dégager toutes les milices qui dérangent la « Jamahiriya ». Oh que dis-je ? Excusez-moi je voulais dire l’État libyen.
De la Libye je serai parti vers l’Égypte en traversant la Tunisie. Ceux qui ont osé tuer les touristes au musée Bardo en auraient aussi eu pour leur compte.
Le Soudan m’aurait connu, la République démocratique du Congo aussi.
J’aurais franchi le canal de Suez pour descendre au Moyen Orient calmer la situation, en Afghanistan, en Palestine, en Syrie.
Partout où il y a guerre et l’injustice, je serai allé et j’aurais fini avec les belligérants qui ne pensent pas aux victimes que sont surtout les femmes et les enfants.

 Mais surtout que la potion magique ne tombe pas dans des mains indues…

Obélix, Panoramix et Astérix
Obélix, Panoramix et Astérix

Quand je suivais l’épisode dénommé « Le domaines des dieux », j’ai constaté que la potion magique s’est retournée contre les Gaulois. Ils en ont procuré aux esclaves des Romains pour qu’ils se rebellent et prennent leur liberté. Au finish, la force gagnée grâce à la potion a servi à la construction des immeubles romains qui leur ont permis de dominer pour un moment les Gaulois. Les esclaves ayant plutôt décidé de négocier des faveurs aux Romains. Je ne sais pas si c’est parce que le chef des esclaves est un Noir hein…. Hum, nous les Noirs….(J’ai rien dit) 😀

Imaginez que la potion magique tombe dans les mains des gars de Boko Haram* ou des dictateurs, le pauvre peuple souffrira encore plus.

Les Gaulois ont failli perdre la partie. Heureusement qu’en dernier ressort, Panoramix a encore pu produire la potion grâce à des ingrédients dont lui seul a le secret. Vous voyez pourquoi, je dis qu’il n’y a que lui pour nous sauver ?

Vous voyez comment le monde des enfants est beau, non ?
Il aurait fallu qu’on y soit pour que tous nos problèmes aient déjà été réglés.
Panoramix, s’il te plaît, viens maintenant…

* Abubakar Shekau est le chef du groupe terroriste Boko Haram qui sème le trouble au Nigéria, au Tchad, au Cameroun et au Niger