Serge

Que sont devenus les anciens présidents brésiliens?

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Tous les présidents de l’ère démocratique au Brésil, aux obsèques de Nelson Mandela (Crédit photo: Blog do Planalto)

Il n’y a pas que la reconversion des footballeurs qui est difficile après la fin d’une carrière. En politique aussi, une fois qu’on a atteint les sommets de la responsabilité publique, reconstruire sa vie peut être terriblement difficile. C’est en tout cas le constat que l’on fait de la situation actuelle des anciens chefs d’Etat brésiliens: « banissement » des médias pour l’un, activisme global pour l’autre, un autre encore qui traverse les époques et continue de régner dans les coulisses du pouvoir à Brasília.

Le décès de Nelson Mandela a été l’occasion de voir réunir au même endroit cinq chefs d’Etat brésiliens, choses assez rare pour être remarquée et déclencher les moqueries sur les réseaux sociaux¹:

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José Sarney, crédit photo: Fabio Rodrigues Pozzebom/ABr

1. José Sarney: Le pont entre un passé encore pesant dans les esprits et un avenir qui tarde à s’imposer. La dictature qui tente de se réconcilier avec la démocratie. C’est un peu l’image que renvoit « l’homme fort des couloirs », orginaire de l’Etat du Maranhão, le plus pauvre du Brésil, il est élu vice-président aux côtés de Tancredo Neves qui n’assumera jamais. C’est donc à l’oligarque Sarney qu’incombe la responsabilité de conduire pacifiquement la transition démocratique à son terme.

Plus de vingt ans après, sa présence au sénat dérange, notamment à cause de ses liens ambiguës avec le régime dictatorial installé par les militaires. Sa famille contrôle l’Etat du Maranhão, si bien que lui-même est indispensable dans le jeu d’alliances qui conduisent à la présidence de la république. Un chroniquer et journaliste sportif de Espn Brasil et du journal Estado de São Paulo a composé un poème extrêmement critique envers le sempiternel sénateur: c’est à lire ici.

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Fernando Collor pratiquant du sport, crédit photo: Antonio Cruz

2. Fernando Collor: les mauvaises langues racontent qu’il fut élu parce qu’il était beau, une espèce d’Airton Senna de la politique. « Homme public au faciès d’une star de télénovela, alors pourquoi bouder son plaisir », devait penser le peuple… Il fut massivement élu dans un contexte social d’hyperinflation avant d’être chassé du pouvoir sous le coup du seul impeachment de l’histoire du Brésil.

Alors, Fernando Collor, c’est le Richard Nixon du Brésil? Il affirme aujourd’hui avoir été trahi et abandonné par ses conseillés. 

Peu de gens le savent, même au Brésil, mais Fernando Collor présidait la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat jusqu’en 2012, le sujet étant très peu commenté dans les médias. Ironie de l’histoire, Fernando Collor est probablement le premier grand communicant de la politique contemporaine au Brésil.

Au début de son mandat, le président Collor prend la polémique décision de geler l’épargne des citoyens pour contrôler un peu mieux l’hyperinflation. Il le payera cher. Vingt ans après une leçon politique est restée: « on ne touche pas aux poches de la classe moyenne! »

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Itamar Franco, crédit photo: José Cruz/Arquivo/ABr

3. Itamar Franco: C’est lui qui remplace le controversé Fernando Collor. Il était son vice-président modéré, il rompt complètement avec le populisme de son  prédécesseur et on peut dire qu’il n’a servi qu’à préparer Fernando Henrique Cardoso qui fut son ministre des affaires étrangères. L’histoire retiendra aussi que c’est sous son court mandat de 2 ans que fut institué le Plano Real qui stabilisa l’inflation au Brésil. Le président Itamar Franco est décédé en juillet 2011, il réçut les honneurs de l’ensemble de la classe politique brésilienne. C’était essentiellement un homme du compromis.

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Fernando H. Cardoso, crédit photo: Televisão Cultura/Flickr/CC

4. Fernando Henrique Cardoso: Un sociologue président de la république, ce n’est pas une chose qu’on verra tous les jours ici. Les temps ont changé. Il est l’un des intellectuels les plus respectés d’Amérique Latine, son épouse Ruth Cardoso était une amie de Simone de Beauvoir, sa vie est marquée par la lutte contre le régime des militaires installé dans les années 1960.

Mais Cardoso, c’est aussi le symbole du redressement structurel de l’économie brésilienne, notamment avec sa politique économique austère des années 1994-2002. Il privatise un nombre considérable d’entreprises, le public le détestera pour ça.

C’est le rival de toujours de Lula, les deux hommes « ne se sentent pas », deux égos sur-dimensionnés qui ne se rencontrent qu’à l’occasion d’évenemments solennels comme lors des obsèques de Nelson Mandela.

Fernando Collor est aujourd’hui un activiste chez Global Leadership où il milite pour la légalisation du cannabis au Brésil, la protection de l’environnement, etc. Il fait toujours quelques rentrées remarquées dans les médias pour critiquer le gouvernement du PT, son propre parti le PSDB (Social-démocrate) révendique difficillement son héritage.

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Dilma e Lula durante cerimônia de lançamento do PAC da Habitação – crédit photo: Fabio Rodrigues Pozzebom/ABr on Wikimedia Commons CC

5. Lula da Silva: Si l’héritage de Fernando H. Cardoso est difficile à assumer pour le PSDB, c’est en partie à cause du travail abattu par Lula. Distribution des richesses, enrichessement des banques comme jamais dans l’histoire du pays, tout le monde y a trouvé son compte… un peu trop d’ailleurs: à force de vouloir chercher le consensus, le PT s’est laissé gangrené par la corruption notamment dans l’affaire du mensalão qui constitue une tâche dans son histoire. Son plus proche collaborateur et grand conseillé, José Dirceu, est aujourd’hui incarceré.

Lula da Silva nie influencer la politique actuelle de madame Dilma Rousseff mais on sait que cette dernière effectue régulièrement des voyages à São Bernado dos Campos pour se réunir avec son mentor. L’ancien président a récemment confirmé qu’il participerait à la campagne présidentielle de 2014: le faiseur de rois sera bien là. En attendant, le président Lula donne des conférences cher payés un peu partout dans le monde.

Lire les tweets en français:

¹ – « Et Collor, Expulé du pouvoir, était bien là »
  – « Dilma n’a pas invité Joaquim Barbosa (Président de la Cour Suprême) aux         obsèques de Mandela » [en référence au rôle du juge dans l’affaire du mensalão].

 


25 % des Brésiliens adoptent le nom de leur épouse (Dessins)

Dessin de Marine Fargetton
Dessin de Marine Fargetton

C’est une petite révolution des droits de l’homme comme l’Amérique latine commence à nous habituer, avec déjà l’Uruguay qui légalise la consommation du cannabis. Au Brésil la nouvelle tendance dans les couples veut que les hommes adoptent le nom de famille de leur épouse après le mariage.

Il s’agit effectivement d’un « grand bond » vers la fin de la domination masculine dénoncée par Pierre Bourdieu… Selon des chiffres officiels d’une agence gouvernementale de l’Etat de São Paulo, des chiffres rapportés par plusieurs médias nationaux, ils sont plus de 25 % à adopter le nom de famille de ces dames.

La loi, quant à elle, a été votée dans le Code civil en 2002, mais jusqu’à maintenant on n’avait pas encore noté une telle augmentation dans la pratique. C’est donc un grand changement qui s’opère dans les moeurs auriverde, surtout quand l’on sait que le Brésil est un pays où le patriarcalisme est profondément ancré.

Dans un billet de blog datant de 2011, le célébrissime Leonardo Sakamato abordait ce thème rappelant les attaques dont il était victime à chaque fois qu’il défendait cette pratique plutôt démocratique, selon lui.

 « Les femmes doivent être obligées d’adopter le nom de l’époux, cela dépend de l’honneur du couple », rétorquaient ses détracteurs.

On voit bien que le mal est profond. Cette avancée sociale doit être perçue dans le cadre particulier du Brésil étant donné que son impact dans d’autres pays est difficilement prévisible. La démarche consistant à équilibrer les rapports entre les hommes et les femmes dans le Code civil n’est pas sans rapport avec le mouvement féministe des années 1960, époque à laquelle les femmes protestaient déjà du fait qu’elles devaient adopter le nom de leur conjoint.

Dessin de Marine Fargetton
Dessin de Marine Fargetton

A défaut de supprimer la pratique, on l’a redéfinie dans les deux sens, tout le monde est content.

Pas tout à fait, car le changement de nom peut également être le synonyme de nombreuses tracasseries, on n’oubliera pas non plus que la bureaucratie brésilienne est un véritable casse-tête chinois. En fin de compte, je me demande s’il ne serait pas préférable que chacun garde son nom de naissance, cela éviterait bien des problèmes.

En ce qui concerne les enfants, le débat risque de se prolonger encore longtemps tant les législateurs alternent entre des lois plus favorables aux épouses, et parfois aux époux…

Et vous, seriez-vous prêt à changer votre nom, au nom de l’amour ?

P.S : Un grand merci à Marine Fargetton pour ses beaux dessins sur notre première collaboration : sa page sur Facebook.

 


Neighboring sounds: radiographie d’une classe moyenne

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Une scène du film O som ao redor (Reprodução / Filme)

« Jamais deux sans trois », on enchaîne avec une troisième critique cinématographique sur Carioca Plus. Pendant plus de deux heures, le réalisateur brésilien Kleber Mendonça Filho construit ce que l’on peut considérer comme la première grande radiographie de la nouvelle classe moyenne qui a émergé après l’accès au pouvoir de la gauche progressiste au début des années 2000.

C’est donc une critique dirigée aux résultats du lulisme mais le film va bien au-délà d’un argument partisan.

Le décor est planté dans la ville de Récife, capitale de l’Etat de Pernambuco, moteur aussi de la croissance du Nordeste brésilien et qui figure parmi les villes les plus dangereuses du Brésil, selon les statistiques officielles de l’IBGE, l’Institut Brésilien de Géographie et Statistique.

Considéré par beaucoup comme le meilleur film brésilien en 2013, et même le meilleur depuis Troupe d’élite, O som ao redor (titre original) est une authentique peinture de la classe moyenne brésilienne aux acquis financiers enviables mais très pauvres culturellement.

La “révolution” menée par Lula a amené une meilleure distribution des biens matériels mais pas culturels.

Avant d’aller plus loin, je dois donc rendre hommage au réalisateur qui sort la tête de l’eau dans un contexte du cinéma brésilien caractérisé par une homogénéité médiocre, son film moderne a remporté plusieurs prix internationaux, entre autres celui du meilleur film Grand Prix au CPH Copenhague, sélection officielle aussi bien du Festival de San Francisco que de Los Angeles et pré-nominé à l’Oscar du meilleur film étranger 2014.

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Affiche du film O som ao redor, CinemaScópio/

O som ao redor n’hésite pas à faire un clin d’oeil à la tradition cinématographique brésilienne remontant à Glauber Rocha, notamment au début du film, où l’on perçoit la dérision du réalisateur qui veut situer historiquement son oeuvre en même temps qu’il le lie au mythe fondateur d’une République basée sur des privilèges héréditaires. La bande sonore du début renvoie également au maître du Cinema Novo.

C’est donc autour d’une riche famille de Recife (peu cultivée au passage) que la trame du film est construite.

On suit pas à pas la vie des habitants d’une rue dont la plus part d’immeubles appartiennent à un seul homme qui y fait régner sa loi comme à l’époque des colonels: on est dans le nordeste… donc, forcément !

Comme dans toutes les grandes villes brésiliennes, la peur guide tout le quotidien des habitants de ce quartier de classe moyenne au point d’en devenir carrément comique: une petite fille rêve que son immeuble est envahi par un gang (la meilleur scène du film), on évite le balcon de son propre appartement (par peur d’être victime d’une balle perdue?), on soupçonne ses voisins au moindre crime commis dans les environs (preuve de la bassesse morale ambiante), on se sert de son livreur d’eau minérale comme d’un dealer… Toute l’hypocrisie de la société apparait là.

Et ça fait sacrément peur…

La plus part des personnages du film montrent des signes de schizophrénie ou de névrose, d’où la violence qui imprègne la culture de l’ensemble des grands centres urbains brésiliens.

La spéculation immobilière qui explose au Brésil fait partie du décor général du film: on sent bien que tout cela va vite s’effondrer.

Bien que la fin du film soit un peu décevante, je dois avouer la bonne impression que m’inspire le courage de ce réalisateur qui n’aborde pas un thème simple: il n’est jamais facile de se regarder dans une glace.

Reste à espérer que cet excellent film soit largement diffusé à l’étranger.

Pour aller plus loin

La critique de A. O. Scott du New York Times et celle du Guardian.


“ La vie d’Adèle ” est arrivée au Brésil

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Abdellatif Kechiche a causé une très belle impression auprès des critiques brésiliens, on salue le courage du réalisateur de cette oeuvre monumentale (de presque 3 heures) qui montre sur grand écran une relation amoureuse entre deux jeunes femmes d’une manière jamais vue au cinéma. Je vous ici dis comment j’ai ressenti ce film. 

Pour ma part, il s’agit de mon premier vrai contact avec un film de Kechiche. J’ai lu des dizaines de critiques dans la presse française, entre l’admiration post-Festival de Cannes suivie par la polémique aux Inrocks ou sur la Rue, la réplique du journal Le Monde, la réception aux Etats-Unis, comment échapper à cet abattage médiatique?

Et du coup, c’est d’abord par curiosité que l’on va voir La Vie d’Adèle []. L’impact est immédiat. Il y a quelque chose chez Adèle de très attachant, sa petite bouche d’adolescente, peut-être… Elle crève l’écran par son incroyable beauté, il faut l’avouer, même si par moments, on a envie de vomir à force de la voir pleurer…

Je ne me souviens pas d’avoir lu dans les critiques un parallèle entre la première scène du film où les lycéens débattent au sujet du livre La Vie de Marianne, de Marivaux et la dernière scène du film quand Adèle, par un malheureux coup du destin, laisse s’échapper une autre belle histoire qui semblait pourtant toute tracée… Il s’agit pourtant d’un élément essentiel du film qui en dit long sur l’indétermination du choix de nos partenaires, que ce soit dans une relation hétéro ou homo. La boucle est bouclée !

Et c’est là que l’on voit que le réalisateur n’a rien laissé au hasard, Kechiche maîtrise son sujet du début à la fin.

Au Brésil, le film est passé dans les cinéma de Rio de Janeiro notamment. Si la communauté gay l’a plutôt bien reçu, certains ont été choqués par les scènes de sexe explicites :  » Si cela les gêne qu’ils n’aillent pas le voir ! « , répondent les admirateurs de Kechiche.

Bref, La Vie d’Adèle est un film mémorable, un marqueur dans l’histoire du cinéma français et du cinéma basé « sur les relations de genre », la construction d’une identité sexuelle. Le spectateur n’en sortira pas indifférent.

A la fin, on se dit que le film mérite bien tous les prix récoltés jusqu’à présent.


Mon thriller argentin de Noël

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Hernán Goldfrid, crédit photo : Casa de América/Flickr

Le petit Jésus est né à Bethléem et quelque part à Buenos Aires on assassine une jeune femme : una vida por una vida. Ce pourrait être le début d’une histoire intéressante, sauf que là, il s’agit de l’extrapolation de mon imagination qui cherche à rendre cette “ fête universelle” de Noël plus intéressante qu’elle ne l’est vraiment. L’assassinat a bien eu lieu, mais pas à Noël, moins encore dans la vie réelle. Pour tout dire, c’est en cette nuit sacrée que j’ai choisi de regarder un film argentin sorti récemment.

Les habitués de ce blog savent ma grande admiration pour le cinéma argentin. Imprévisibles, irrespectueux, iconoclastes et finement construits, les films argentins représentent ce qui se fait de mieux actuellement en Amérique latine.

Encore une fois, c’est Ricardo Darin qui est à l’affiche. Ce monstre sacré du septième art apparaît dans le rôle d’un spécialiste du droit criminel qui soupçonne un de ses étudiants d’avoir tué une jeune femme devant l’imposante faculté de droit où il enseigne.

Entre délire, obsession, paranoïa ou psychose, on ne sait pas vraiment où est la frontière entre l’imagination féconde du prestigieux professeur et son intelligence minutieuse.

Tesis sobre un homicidio est adapté du roman de Diego Paszkowski.

Le réalisateur Hernán Goldfrid met en scène un duel psychologique entre le professeur de droit et son jeune étudiant qui se considère lui-même un Surhomme, pourrait-on dire. Une thèse récurrente chez Nietzsche et Dostoïevski et qui s’adapte parfaitement à la conjoncture contemporaine : celle d’une élite économique qui se croit au-dessus des lois, et intouchable malgré sa régression morale.

Les intouchables (los intocables), par ailleurs, forment une caste dans la société argentine (dès l’époque de la dictature) protégée par son statut économique.

Sous couvert d’une démocratie retrouvée, cette élite économique de Buenos Aires se cache aujourd’hui derrière les lois qu’elle élabore afin de masquer la corruption d’une société en mal de justice.

Ce thème parcourt la trame psychologique d’Hernán Goldfrid, finement menée par Ricardo Darin et qui expose les limites structurelles de la justice et du droit moderne.

Coïncidence ou non, le thriller argentin sort à la même époque que le blockbuster de Martin Scorsese, Le loup de Wall Street, qui revient sur la vie d’un farceur courtier de la Bourse américaine qui passe cependant à travers les mailles des filets de la justice, et ce, presque sans grande conséquence. N’est-ce pas là aussi un Surhomme?

De New York à Buenos Aires la même décadence morale de nos élites et surtout la même justice aveugle parce qu’elle NE PEUT rien voir.


Dix bonnes nouvelles pour l’année 2014 au Brésil

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Un billet de Cent reais, crédit photo: Eurritimia on Flickr

Simon D. m’a demandé un papier sur “10 programmes de TF1 pour devenir plus intelligent”, cette tâche étant trop difficile j’essayerai – après les conseils d’une lectrice qui commençait à déprimer à cause du pessimisme de mes articles – de produire une liste de “dix bonnes nouvelles que nous reserve l’année 2014 au Brésil”. Mais n’allez pas croire que ce fut facile, hein.

10. Lula fera campagne pour Dilma, c’est une bonne nouvelle pour moi et pour ceux qui défendent les idées du Parti des travailleurs (travaillistes si vous préferez). Mais c’est également une mauvaise nouvelle pour les adversaires du PT qui ne trouvent toujours pas la bonne formule qui permettrait de remonter le retard dans les sondages: fallait pas tout privatiser dans les années 1990… L’actuelle présidente sera plus que favoris grâce notamment à son programme Mais médicos qui a fait appel aux médecins cubains pour combler un vide dans les villes les plus réculées du pays.

9. La seleção aura un nouveau « nouveau » maillot, je me préparais à écrire une nouvelle Chronique du mondial sur “le plus beau et le moins beau du mondial 2014”, pensant mettre en tête de ma liste “des moins beaux”  l’ex-nouveau maillot de la seleção (voir ci-dessous). Ô gloire, le destin a voulu qu’il y ait une erreur de fabrication qui retira le dit maillot de circulation; il manquait sous l’emblême de la Confederação Brasileira de Futebol (CBF) le nom du pays “Brasil”, obligatoire sur le maillot de la seleção. Encore une bavure de Nike qui produit pour la seleção des maillots tous autant ridicules depuis 2010. Bizarrement, les maillots du Portugal, des USA et de la France produits par le même équipementier sont excellents…

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Ma joie risque pourtant d’être de courte durée, le problème n’est peut être pas Nike, mais le styliste qui dessine le modelito pour les brazucas

8. La La Mannschaft à Salvador, les Lions à Natal, la Roja à Recife, pas mal non… Le nordeste brésilien aura le privillège d’accueillir au moins deux grandes selections de football, et moi, je pourrai faire le déplacement en bus pour voir le Cameroun à Natal qui est juste à côté de João Pessoa. Pour Bahia, quartier général des allemands, c’est un peu plus long (11 heures de bus) mais c’est toujours mieux que les foutus aéroports brésiliens… Et puis la Roja, madre mia, sera tout juste à Recife, grácias!!!

Quatrième bonne nouvelle… je cherche… je cherche… Pas facile.

7. Le salaire minimum va augmenter, c’est devenu une tradition depuis que Lula est arrivé au pouvoir. Les constantes révisions du salaire minimum ont largement contribué à reduire la pauvreté au Brésil contribuant ainsi à créer une classe des consommateurs qui maintiennentt l’économie brésilienne réchauffée. C’est du fordisme, me diriez-vous: les travailleurs gagnent un peu plus et dépensent tout dans les produits qu’ils produisent, oui! Mais au moins le petit peuple ne va pas mandier. S’il est aujoud’hui à 678 reais, on prévoit qu’il évolue jusqu’à 722 reais, soit à peu près 400 dollars. Pfff!!!

crédit photo: Marco / Zak on flickr
crédit photo: Marco / Zak on flickr

6. Vivement ces double Airbags , les brésiliens ont deux passions: l’une est plus connue, c’est bien entendu le football; l’autre est moins évidente à imaginer, il s’agit de la voiture. il faut aussi y voir la raison d’autant de bons pilotes de F1 made in Brazil (Airton Senna, Nelson Piquet, Felipe Massa ou Rubens Barrichello). Pour la seule ville de São Paulo par exemple, on compte sept millions de véhicules pour onze millions d’habitants, pas très écolo, je sais, mas uma paixão é uma paixão… N’empêche, le gouvernement vient de décider qu’à partir du 1er. janvier, toutes les voitures fabriquées au Brésil devront être équipées d’un double airbag. On prévoit pour l’an prochain une diminution de 20 000 morts dans les accidents de route.

5. Au moins cinquante congolais de la première et deuxième promotion d’un programme de coopération sud-sud entre le Brésil et la RD Congo termineront leurs études dans plusieurs universités brésiliens. J’en ai parlé à plusieurs réprises sur ce blog, racontant leurs histoires, leurs douleurs et leurs conquêtes… Des médecins, des ingénieurs, des journalistes, des architectes, etc. Au gouvernement congolais d’en profiter maintenant…

thumb_1345146466wC1e0EcTkr4. Uma noite não é nada [ce n’est rien qu’une nuit]est un film brésilien qui promet d’être choquant et passionant car il aborde le thème d’une relation amoureuse entre un professor qui a passé la soixantaine et une adolescente atteinte du sida… Rien que pour le courage du réalisateur dans le choix du sujet je ne manquerai pas de voir ce film qui promet. On estime à 39 000 le nombre de personnes atteintes du virus dans tout le pays.

3. Nouveau statut pour les étrangers? Tu ne travailleras pas, tu ne parleras pas de politique brésilienne, tu ne seras pas impliqué dans un acte de désordre public… autant de règles qui régissent le sejour des étrangers au Brésil, il faut savoir qu’elles datent de l’époque de la dictature militaire. En élaborant la nouvelle Constitution de 1988, les élus ont oublié de réformer le Estatuto do estrangeiro qui demeure autoritaire et contre-productif. Un nouveau texte [ la loi 5655/09] circule au congrès depuis 2013, on espère qu’il passe enfin et facilite la vie des étrangers au Brésil, notamment en ce qui concerne l’énorme bureaucratie brésilienne… le fameux custo Brasil (voir ici également, en portugais).

2. Docteur Laurie arrive, c’est effectivement une excellente nouvelle: un médecin très connu dans le milieu des cinéphiles et des « sériephiles » passera quelques semaines au Brésil afin de présenter son nouvel album, « Didn’t It Rain ». L’acteur-musicien Hugh Laurie qui est à l’affiche de Dr House effectuera une tournée effectuera une tournée dans quatre villes dont São Paulo et Curitiba… On espère qu’il amènera sa canne

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1. Miracles chez Charlyne, j’ai donc gardé le meilleur pour la fin. Il s’agit de quelque chose d’assez simple, mais quand même. Trois miracles sont sur le point de se réaliser dans la vie de Charlyne, une grande amie… Son fils de deux ans ira à l’école pour la première fois (boa sorte Thiaginho!). Elle s’inscrira dans une académie de gym pour perdre du poids et “ça c’est un vrai miracle”, dit-elle. Par ailleurs, elle espère finir l’année 2014 en beauté surtout si sa fille qui vient de naitre commence à marcher…

Pourquoi chercher des miracles ailleurs, si on les trouve chez soi?

Vanessa da Mata, Boa sorte

Bonne fête de Noël à tous et bonne année, pour de nouvelles histoires… 


And the winner is Gripen : la gifle brésilienne pour François Hollande !

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Un avion Gripen en vol, crédit photo : Arnaud Gaillard/ Wikimedia Commons

C’est plutôt une gifle suédoise que vient de se prendre le président François Hollande qui a voulu vendre à la France l’idée d’un rapprochement des relations franco-brésiliennes. Mais pour ceux qui suivent de près cette “affaire Rafale”, il était évident qu’elle n’allait pas être conclue.

L’une des principales raisons de cet échec se doit au remplacement du ministre de la Défense Nelson Jobim par Celso Amorim. Monsieur Jobim semblait favorable à une offre française, pour le moins il ne cachait pas sa méfiance du deal avec les Etats-Unis, eux-aussi en course. Dans le passé, les Américains avaient promis de vendre des avions de guerre (mais aussi leur technologie…) au Brésil; toutefois, à la dernière minute, le Sénat américain avait changé d’avis votant une loi qui interdisait le transfert de technologie.

D’autre part, l’ancien ministre de la Défense du Brésil dont je parlais plus haut avait visiblement défié l’autorité de la présidente Dilma Rousseff, ce qui lui avait valu son remplacement.

Dans tous les cas, la France démontre encore une fois sa méconnaissance du comportement brésilien. Par ici, on ne dit jamais “non” en regardant l’interlocuteur dans les yeux; il est d’usage de faire semblant d’être d’accord même quand on ne l’est pas. Hollande aurait-il mal interprété les signaux ? Et Sarkozy avant lui…?

Ne croyez pas que dans les hautes sphères du pouvoir, ce comportement typiquement brésilien change.

Un homme d’affaires américain affirmait une fois qu’il était impossible de faire du business avec les Brésiliens, il avait bien raison : “Tu les invites à dîner dimanche, ils disent tous oui, mais personne ne vient…”.

Silencieux, les Suédois étaient en embuscade attendant le bon moment pour frapper la France. Je rappelle juste que pour avoir été envahie à plusieurs reprises par ses voix – y compris l’Allemagne –, la Suède a développé une importante industrie militaire.

A l’occasion de la visite officielle, la semaine dernière, de François Hollande au Brésil, j’écrivais que la langue ne suffisait plus à faire de la France un interlocuteur de marque de la grande puissance d’Amérique latine, les faits me donnent raison aujourd’hui.

La bonne nouvelle dans cette affaire, c’est effectivement la fin de cet interminable feuilleton qui traîne depuis au moins 2008.

Le choix des Brésiliens porte sur deux critères: la qualité du Gripen NG et son prix inférieur au Rafale.

J’avais promis un seul article d’ici la fin de l’année, mais l’actualité me rattrape; au temps pour moi.

P.S : Au moment où je termine de rédiger ces lignes, l’Atlético Mineiro (actuellement au Maroc) vient de marquer un but d’anthologie contre le Raja de Casablanca, l’oeuvre de Ronaldinho… Bravo l’artiste ! Les Brésiliens se sont inclinés malgré le but de leur star. Deux Congolais jouent dans cette équipe de Raja que j’ai vu jouer au Stade des Martyres contre le TP Mazembe, finaliste lui aussi de la même compétition en 2010.

 


Je n’irai pas à la plage

Le réveillon s’approche dangereusement. Depuis six ans, je répète le même rituel de fin d’année qui consiste à aller passer la nuit du 31 décembre au 1e janvier à la plage en compagnie de quatre cent milles personnes, le tout sous la pluie et au son de quelques stars en décadence à qui la mairie paie une fortune pour qu’ils se produisent de graça dans notre belle ville. (suite…)


François Hollande au Brésil: quand la langue ne suffit plus

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Dilma Rousseff et François Hollande à Paris (Crédit photo: Blog do Planalto/Flickr)

Lorsque je dis à mes amis brésiliens que je suis Congolais, ils préfèrent toujours penser que je suis français: “Mais tu es né en France et tu parles français…”, me disent-ils. “Oui, mais mes parents sont Congolais et je suis Congolais!”. J’abandonne très vite les explications trop complexes pour ces Brésiliens qui ne prennent en compte que le lieu de naissance pour déterminer leur appartenance. Mais, le fait qu’il s’agisse là de la France est aussi un facteur important qui amplifie cette confusion dont je suis trop souvent l’objet.

Les Brésiliens aiment la France. Mais la France ne l’a toujours pas compris.

Ces deux pays ont une histoire commune. Disons qu’elles se croisent, contrairement à ce que la plupart pense.

Sur le drapeau de mon pays d’accueil on peut lire “Ordem e progresso”, c’est-à-dire “Ordre et progrès”. Slogan du positivisme, ce puissant courant de pensée qui a fait le beau temps des contre-illuministes du 19ème siècle et de ceux d’un siècle plus tôt aussi: Saint-Simon en tête.

Le maître penseur “d’une certaine” modernité française, autoritaire aussi, et diablement admirée au-delà des frontières de l’hexagone. De l’Italie au Brésil, la pensée de Saint-Simon s’est bien exportée. On trouve encore aujourd’hui une église du positivisme à Rio de Janeiro.

Le Brésil ne nie pas cette influence française dans son histoire passée (son élite militaire a été formée en France) ou actuelle (l’ex-président Fernando Henrique Cardoso a enseigné à la Sorbonne, son épouse Ruth était une amie de Simone de Beauvoir).

Ici, vous trouverez un article très éclairant sur le rapport des Brésiliens aux Français, noirs de surcroît.

Le français est l’une des langues les plus admirées par ici, perçu comme étant plus glamour que l’anglais, plus chique aussi… Parler français, c’est être raffiné.

Cependant, le passage de François Hollande à Brasília est passé inaperçu. Une énorme déception étant donné le potentiel d’une relation franco-brésilienne mieux travaillée…

Le président Hollande est venu négocier la vente de ses avions de guerre Rafales (franchement, ses chances sont réduites) et accessoirement la question de l’exportation du poulet brésilien qui pose des difficultés aux éleveurs bretons (là encore…).

La francophonie au Brésil - crédit photo: Carioca Plus
La francophonie au Brésil (Crédit photo: Carioca Plus)

Il a aussi été question d’améliorer les échanges culturels entre la France et le Brésil, surtout en matière de travail des étudiants qui traversent l’Atlantique dans les deux sens. Un accord de Permis Vacances Travail devrait permettre aux jeunes français entre 18 et 30 ans de se rendre au Brésil et d’y travailler pendant un an. Intéressant mais pas assez à mon avis.

La visite de François Hollande est d’autant plus passée inaperçue que Carla Bruni Sarkozy ne l’accompagnait pas; le président socialiste n’a ni le charisme de Sarkozy ni la puissance d’Obama. Or, dans la société du spectacle ce sont les symboles qui frappent. Pas les beaux mots.

En vérité, si la France ne compte plus comme une grande puissance c’est aussi parce que le Brésil a grandi. Son économie s’est tournée vers Pékin, premier partenaire économique de Brasília.

Paradoxalement, cette même France continue de regarder le Brésil du haut de son piédestal, elle n’attire que les « Brésiliens d’en haut”…

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(Crédit photo: Carioca Plus)

Reste à savoir si les Bleus ne viendront pas ternir encore plus une image de la France fortement écorchée au pays de la Samba, à cause notamment de sa politique étrangère militariste de ces dernières années.

Veremos… 


The day after Mandela

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Nelson Mandela – Crédit photo: Debris2008 on Flickr.com

Les sud-africains ont rendu un dernier hommage à leur leader national Nelson Mandela, décédé le 05 novembre dernier. Cette cérémonie a été suivie en direct via internet notamment. Mais au-délà de cet aspect événementiel il convient de se poser des questions sur l’avenir de ce pays vers lequel tous les regards sont désormais tournés.

Car l’Afrique du Sud porte une lourde responsabilité aux yeux du monde. Aucun faux pas ne lui sera pardonné dorénavant. On se souvient encore l’émotion et de la stupéfaction qui ont suivis le massacre des mineurs à Marikana du vivant même de Nelson Mandela.

Aujourd’hui les sud-africains célèbrent la mémoire d’un grand homme, toutefois le pays doit faire face à plusieurs conflits sociaux comme, par exemple, à la présence relativement importante des immigrés subsahariens, affirme mon cousin sur place: « pour les sud-africains c’est une fête. Pour les étrangers, c’est un peu différent. Ils sont un peu sceptiques et se demandent ce qui viendra après Mandela? On craint encore plus la xénophobie mais jusque là tout est calme… il y a pas de tensions ».

Même s’ils ont désormais leurs libertés politiques garanties par la démocratie, les noirs en Afrique du Sud ont difficilement accès à l’éducation, c’est pourquoi le gouvernement fait appel à l’élite africaine (subsaharienne notamment) pour répondre aux besoins de développement du pays. Evidemment, cela provoque des tensions palpables. Mais les populations pauvres du continent immigrent eux aussi vers ce pays qui représente tout de même l’essor du continent.

Il pleut sur Soweto, un signe aussi que le ciel n’est pas resté indifférent à la souffrance d’un peuple: « Les funérailles ont commencé aujourd’hui au stade Soccer City (FNB Stadium) sous une forte pluie mais cela n’as pas empêché les sud-africains d’aller nombreux rendre un dernier hommage à celui qu’ils appellent affectueusement Tata Madiba, father of the nation ».

Une centaine de Chefs d’Etats y étaient présents comme le témoigne mon cousin qui vit en Afrique du Sud: « Il y a plus de 145 présidents et chefs de gouvernement venus du monde entier… Obama vient de faire son speech ». Dilma Rousseff, présidente du Brésil a également fait le déplacement profitant de l’opportunité pour rappeler les liens étroits entre le Brésil et le continent africain: « Tout comme les sud-africains pleurent par leurs chants, nous qui portons orgueilleusement le sang africain dans nos veines prions et célébrons l’exemple de ce grand leader qui appartient au panthéon de l’humanité« . (Images).

Obama serre la main à Raúl Castro au Soccer City
Obama serre la main à Raúl Castro au Soccer City

On n’ignore encore quel sera l’avenir de ce merveilleux pays qu’est l’Afrique du Sud, mais la mort de Nelson Mandela inspire déjà de grands gestes: cette après-midi au Soccer City, Obama et Raúl Castro se sont salués en respect au message universel de Madida, le pardon.

Pour allez plus loin:

Poignée de main historique entre Obama et Raúl Castro.

Jacob Zuma conspué au Soccer City Stadium.

En images, les funérailles de Nelson Mandela.

Les divisions au sein de l’ANC.

Les médias américains ont trÈs peu relayé le geste historique entre Obama et Castro, rien sur le site du New York Times:

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alors que le Washington Post se contente d’une titre sans photo:

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Comme dans un roman de Dostoiévski

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Collection œuvres complètes de Dostoievski (crédit photo: Edivaldo Gomes Pinto Júniot/Wikimedia Commons)

J’adore les romans de Fiédor Dostoievski. Personne ne décrit la nature humaine aussi bien que lui. Il faut dire aussi que personne n’aide à comprendre la nature du peuple brésilien autant que l’écrivain russe.

Eh oui, vous avez bien lu. En décrivant la Russie du XVIIe siècle, l’auteur des Frères Karamázov était loin de se douter qu’il créait également un tableau capable de représenter l’essence même de la société brésilienne: une société malade, dérangée, brutale, sauvage, noyée dans une ivresse permanente comme ce pauvre Raskólnikov de Crime et châtiment. Ange et démon, génie et psychopathe, tout en même temps.

Je me souviens qu’une fois, à João Pessoa, un homme avait décimé une famille toute entière parce qu’en l’invitant à dîner, on lui offrit le plus petit morceau de poulet…

Avez-vous jamais vu quelque chose d’aussi irrationnelle?

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Dans ce pays, on tue pour un morceau de pain. Je ne veux pas critiquer injustement ce pays qui m’a trop donné, mais c’est la triste réalité. En venant au Brésil, les touristes doivent bien savoir qu’ici, il vaut mieux ne pas provoquer un inconnu, il vaut mieux éviter de contrarier un inconnu.

Un ami guinéen a été agressé par deux gardiens d’une boite de nuit. En allant se plaindre à la police, on lui a recommandé de ne pas porter plainte car cela pourrait attiser la haine de ses bourreaux.

Avez-vous vu les images violentes qui ont caractérisées un match du Brasileirão, première division brésilienne? On y voit un homme normal en train « d’assassiner » une pauvre victime, ao vivo… On se demande comment un tel individu peut circuler dans la rue, qui plus est vêtu proprement comme une personne normale de classe moyenne.  Vous trouverez des scènes choquantes [vidéo] ici et .

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Tout ça me rappelle étrangement les romans de Dostoievski où les personnages sont souvent atteints d’une espèce de folie passagère – Dmitri Fiodorovitch Karamázov en est le personnage typique. Ça fait froid dans le dos. C’est d’une précision inouïe, malheureusement, c’est aussi à l’image de ce Brésil.

Il n’ y a pas si longtemps j’ai discuté avec un fonctionnaire public à l’université et en rentrant je me suis dis que je venais peut être d’échapper à la mort.

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Complément: le jeune homme avec un bâton (tee-short blanc sur la photo) a été arrêté ce lundi; à 23 ans, il a déjà été poursuivi pour meurtre notamment.

 


Le racisme au Brésil, avec son « jeitinho »

Des habitants d'une favela à Rio de Janeiro (crédit photo: brasildefato1/Flickr)
Des habitants d’une favela à Rio de Janeiro (crédit photo: brasildefato1/Flickr)

Après le décès de Nelson Mandela, des nombreux hommes politiques brésiliens se sont découvert une nature d’humaniste, progressiste et tolérant… Pourtant, les noirs au Brésil sont loin de vivre comme des hommes effectivement libres; chaque année les statistiques le confirment. Mais au Brésil, le racisme n’est jamais déclaré, il est partout, mais oculté par ce jeitinho bien d’ici… 

Leonardo Sakamoto, célèbre blogueur brésilien publie ce dimanche un billet qui montre la nature schizophrénique des politiques brésiliens, qui sont les premiers à pleurer Nelson Mandela mais n’hésitent pas à appliquer des peines extremement lourdes pour les noirs qui s’impliquent dans des crimes mineurs: une femme envoyée en prison pour le vole d’un shampoing, un jeune homme condamné à cinq ans parce qu’il transportait du désinfectant lors des manifestations de juin, ce matériel étant considéré comme inflammable par la police.

C’est que les noirs n’ont que très peu d’accès à l’éducation. Depuis 2001 et les politiques d’affirmatives actions introduites par Lula, la proportion des noirs dans les universités a augmenté de 10 à 39 %. Par contre 65 % des blancs fréquentent l’université.

https://veja.abril.com.br/blog/ricardo-setti/tag/baixa-renda/
Des étudiantes blanches manifestent contre la politique des cotas à Brasília (Foto: Fábio Rodrigues Pozzebom / ABr)

Le Brésil est un pays fait d’inégalités que personne ne condamne, on vous présente quelques exceptions comme Joaquim Barbosa ou Pelé mais la réalité est que la plupart des noirs et des « indigènes » vivent en marge de la société: dans des réserves écologiques pour les índios, dans les favelas de Rio ou São Paulo, des zones de non-loi à la merci du trafic de drogues, la violence étant la seule alternative viable pour ces jeunes désoeuvrés… On n’oubliera pas de mentionner ce mur qui doit séparer les favelas des zones d’accès de la grande Rio qui accueillera le mondial et les JO.

La dernière polémique en date a été le choix de l’actrice et top modèle Fernanda Lima pour présenter la cérémonie du tirage au sort de la Coupe du Monde. Sur les réseaux sociaux, l’indignation: Fernanda Lima, blonde, maigre au yeux verts ne représente pas la femme brésilienne, elle ne représente d’ailleurs pas la société brésilienne très métissée.

Fernando Lima et son époux préférés à Lazarro Ramos et Camila Pitnaga (noirs) Foto: divulgação
Fernando Lima et son époux préférés à Lázaro Ramos et Camila Pitnaga (noirs) Foto: divulgação

Je n’adhère pas complètement à cette critique puisque les blancs aussi composent ce peuple au même titre que les noirs et les indigènes. Espérons que la prochaine fois, on choisira un noir…

Au sein des universités, le racisme s’impose doucement comme un objet d’étude. En 2010, je posais la question à l’un des plus grands marxistes du Brésil sur la lutte raciale dans ce pays, selon une formule utilisée jadis par Michel Foucault. Pour Francisco de Oliveira dit « Chico », « le philosophe français ne comprenait rien au Brésil, il n’existe pas de lutte raciale ici, mais uniquement une lutte des classes ». Le marxisme radical et orthodoxe ferme les yeux devant toute autre explication de la société qui ne va pas dans le sens d’une critique du capital. Grave erreur!

Mais désormais, on compte dans presque toutes les universités des groupes de recherche sur la question raciale, les thèmes de master et doctorat portant sur cette problématiquent croissent, mais uniquement dans les sciences humaines.

https://www.flickr.com/photos/armandolobos/5379597142/sizes/m/in/photostream/
Des jeunes dans une favela – crédit photo: alobos Life/Flickr)

Les universités sont d’ailleurs un univers de ségrégation raciale. Dans les facultés de médecine et d’architecture par exemple, on ne voit que très rarement des noirs. Elles sont la chasse gardée des blancs, riches faisant partie des élites brésiliennes: cette caste que les spécialistes qualifient de estamento, cercle de privilèges et de clientelisme au sommet de l’Etat et du business.

Les noirs continuent d’être assassinés en masse comme le montre les statistiques publiées par le gouvenement [39 000 noirs pour 15 000 blancs chaque année] et sont souvent maltraités par la police.

Ce racisme [séculaire] à la brésilienne est possible grâce au jeitinho, cette pratique codifiée qui consiste à résoudre tous les conflits sociaux par un petit sourire hypocrique « entre amis », un coup de main sur l’épaule (typique formule de familiarité de Lula); cette façon de tout faire à la dernière minute, de ne pas se déclarer raciste mais de changer de trottoire à la vue d’un noir, de se lever d’un siège quand un noir entre dans un bus…

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Manifestation contre les quota à Brasília: « Tu veux une place à l’université, fais l’examen d’admission » – crédit photo: Rose Brasil/ABr

Il y a quelques années une étude demandait au brésiliens s’ils étaient racistes. 97 % des interrogés se disaient être tolérants et ne pas être raciste, par contre 98 % des mêmes interrogés affirmaient connaitre une personne raciste. Négation!

Le Brésil est le pays des préjugés. Pour chaque comportement qui échappe à la norme on est vctime de préjugé [preconceito, en portugais]. De plus en plus de violence contre les homosexuels sont enregistrés, les pauvres sont discriminés et exclus de la vie sociale en général.

On s’étonne donc de remarquer comment les hommes politiques de droite, voire de l’extrême droite s’approprient l’héritage de Mandela, eux qui souvent, n’hésitent pas à montrer leur haine envers les noirs, les pauvres, les athées, les travestis, etc.

On espère aussi que cette vague d’humanisme soulevée involontairement par le décès de Mandela [comme un dernier coup de point contre les préjugés] transformera positivement la société brésilienne afin qu’elle soit réellement cette terre promise du métissage.

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“Mandela a vaincu l’Apartheid”, les titres de la presse brésilienne

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Nelson Mandela, crédit photo: Warko, Wikimedia Commons

Rarement un homme politique aura autant fait l’unanimité que Nelson Mandela. L’ancien président sud africain figurait il y a moins d’une semaine dans une liste de six références morales du 21° siècle, et ce malgré son rôle ambiguë dans le réglement du conflit congolais – cinq millions de morts. Sa mort, jeudi 05 décembre, a fait la Une de plusieurs médias brésiliens. Retour sur une soirée historique.

Mais avant cela, il faut dire la faible réactivité des médias brésiliens qui même après une démie heure de l’annonce diffusé en direct sur CNN n’avaient pas encore repris l’information sur leurs sites. A l’heure où Twitter fait concurrence aux grands médias, c’est une faute grave. Un flash ou une alerte auraient suffit à donner (au moins) l’impression qu’ils étaient concernés…

C’est probablement aussi révélateur d’un problème lié à la langue, car au moment où CNN terminait son direct avec Jacob Zuma, la presse brésilienne aurait dû commencer à rélayer l’information; pour un pays débiteur dans son histoire au continent africain, on est frustré de constater une telle méconnaissance de l’actualité du plus vieux continent du monde.

En outre, plus de deux heures après l’annonce du décès de Nelson Mandela, le compte Twitter de la présidence Dilma affichait une dernière actualisation remontant à dix heures plutôt.

Rappelons aussi ce fait marquant, mardi, lorsqu’une députée PMDB (parti des modérés allié à Dilma Rousseff) de l’Etat de Goais demandait une minute de silence en l’honneur de Nelson Mandela dont elle annonçait la mort dès le 03 novembre. Non avisés, ses collègues l’ont acompagné dans sa folie passagère.

Ceux qui ont eu la chance de passer par Johannesbourg cette année auront remarqué cette belle statue du leader sud-africain à l’aéroport Tambo OR: une image mémorable qui rappelle aux touristes l’histoire de ce pays longtemps marqué par l’Apartheid.

Statue de Nelson Mandela à l'aéroport de Joanesburg Tambo OR, crédit photo: Serge Katembera
Statue de Nelson Mandela à l’aéroport de Johannesbourg Tambo OR, crédit photo: Serge Katembera

Donc, après presqu’une heure d’attente, le journal carioca O Globo titrait “Le monde perd Nelson Mandela” rappelant que le sud-africain était un bâtisseur de ponts entre les nations.

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L’un des sites d’informations les plus visités du pays, G1, a toute de suite publié un dossier sur Mandela, des hommages des sud-africains eux-mêmes aux déclarations d’hommes politiques du monde entier en passant par celles de stars: Obama affirme s’être inspiré de Mandela, Beno Vox salue l’idéaliste, Eva Longoria regrette la disparition d’un grand leader mondial; le polémique gouverneur de São Paulo Geraldo Alckim revient sur un Nelson Mandela symbole du courage et de la résistence (étonnante réaction de celui qui n’hésite pas à réprimer dans la violence les manifestations dans la capitale économique du Brésil, comme en juin dernier). Mike Tyson qui se trouve actuellement en Algérie prie pour la famille de l’illustre disparu.

G1Globo

La presse paulista a elle aussi titré sur le décès de Madiba, ainsi Folha de São Paulo annonçait la mort du leader sud-africain qui a vaincu l’apartheid, le journal publie notamment un grand dossier à ce sujet:

folha

L’autre grand journal de São Paulo, Estadão se souvient du prix Nobel de la paix mort à 95 ans:

estadao

Toujours dans la grande métropole brésilienne, le moteur de recherhce et site d’informations générales R7.com s’intéresse à la question raciale au pays de l’arc-en-ciel, Neslon Mandela n’aura sans doute jamais réussi à erradiquer les conflits raciaux dans ce pays profondément marqué par les inégalités entre les noirs et les blancs. En Afrique du Sud, les noirs démeurent dans la mandicité (mêmes les agents de la douane) pendant que les blancs vont passer leurs vacances à Washington ou à Londres, je l’ai vu de mes propres yeux:

r7

Certains sites se sont contenté d’un simple “l’ancien président Nelson Mandela est mort”, c’est le cas de BBC Brasil, du Jornal de Brasília et de MSN:

bbcbrasil

jornalbrasilia

msn

Un peu plus bas sur le continent sud-américain, l’argentin Clarín rend hommage à l’homme qui vaincu la haine et fondé une nation:

clarin

Nelson Mandela a effectué deux visites officielles au Brésil en 1991 puis 1996, la présidente Dilma Rousseff a décrété une semaine de deuil national en l’honneur de l’homme politique sud-africain.

Il est tout de même dommage de voir l’image de Nelson Mandela récupérée par des hommes politiques du monde entier, ceux de gauche comme de droite.

 


Des stars brésiliennes contre les biographies non-autorisées

 

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Ancien ministre de la culture, Gilberto Gil performing in 2007 (Crédit photo: Joi Ito from Inbamura, Japan/cc)

C’est un phénomène connu en psychanlyse: on reproduit, adulte, les violences soufferts pendant l’enfance. Ce mal profond s’est visiblement emparé des têtes pensantes de la culture brésilienne que sont Gilberto Gil, Caetano Veloso ou Chico Buarque.

La polémique fait rage et est actuellement débatue à la Cour Suprême de Justice qui, ma foi, ne laisse rien échapper. Les biographies non-autorisées sont-elles légales, doivent-elles l’être? Ou doivent-elles au préalable passer par le consentement des principaux intéressés, c’est-à-dire les personnalités publiques? Et dans ce cas, le concept biographie non-autorisée devra simplement être supprimé des encyclopédies puisqu’elle n’existerait plus. Peut être aurait-elle sa place dans quelque Dictionnaire de métaphysique, au meilleur des cas.

Caetano Veloso, donc, ainsi que Gilberto Gil, et Chico Buarque ont été des pauvres victimes de la censure pendant leurs carrières respectives; certains forcés à l’exile où ils produisaient des textes à double sens afin de brouiller les pistes. Pourtant aujourd’hui, ils sont à la tête d’un mouvement paradoxalement nommé Procure saber [cherche à savoir]se donnant comme objectif de barrer les biographies non-autorisées.

Le mouvement a été déserté par le chanteur Roberto Carlos, figure éminente du MPB.

Le paradoxe est flagrant surtout pour ceux parmis vous qui s’y connaissent un peu en philosophie. On se souvient du célèbre texte du philosophe allemand Emmanuel Kant, Was ist Aufklärung?  [Qu’est-ce que les lumières?], il y planta les bases des Lumières en Europe avec comme dévise le fameux “Sapere Aude!”… “Ose savoir!”.

Le rapprochement est vite établi entre le Sapere Aude et ce très douteux Procure Saber… Ces “têtes pensantes de la culture brésilienne” nous demanderaient donc de faire l’effort de “chercher la vérité” alors qu’ils censureraient tout texte qui ne serait pas autorisé par eux? Le raisonnement est absurde. Le aufklärung kantien prodiguait pourtant l’autonomie de la pensée, l’émancipation face aux maîtres penseurs, et voilà ce beau slogan détourné par les “têtes pensantes de la culture brésilienne”.

Le fait est encore plus grave d’autant plus qu’ils furent tous victimes de la censure des militaires.

Mais avant de trop accabler ces pauvres “têtes pensantes de la culture brésilienne”, n’oublions pas que la polémique existe sous d’autres cieux… en France, par exemple où la première dame Valérie Trierweiler a fait condamner “ses” biographes non-autorisés à une peine 10 000 euros; il y a aussi ce livre polémique sur le controversé Dalai-Lama.

Chacun se fera une opinion. Mais qu’on laisse donc le choix au lecteur d’en juger. Ne castrons pas la pensée! N’établissons pas la pensée unique comme norme! Ô comme cela est déjà difficle de penser autrement! on court le risque d’être taxé de conspirationniste ou de complotiste (de fou, sous d’autres cieux).

Et pourtant, elles peuvent être très intéressantes, ces biographies non-autorisées. Tenez par exemple, cette histoire (non-autorisée) inspirée des évangiles apocryphes et écrite par Patrick Banon qui relate la vie de Jesus. On y apprend par exemple que dès ses neuf ans, “Jesus avait déjà ressuscité un enfant, donné la vie à des oiseaux d’argile et maudit un olivier [allez savoir pourquoi…] qu’il avait desséché d’un geste”.

Ces mêmes évangiles apocryphes relatent que Judas (le traite) était le plus spirituels des apôtres et que Jesus avait avec lui des moments d’aparté (pour ne pas troubler les autres) pendant lesquels ils discutaient de l’avenir de l’humanité et bien plus… certaines histoires ne sont pas pour les faibles.

Voir ce que pensent d’autres stars à ce sujet, sur ce lien.

– J’ai en ma possession quelques évangiles apocryphes, pour ceux que cela intéresse, le faire savoir sur son commentaire.

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Au Brésil, les leçons du jugement du mensalão

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Joaquim Barbosa préside la Cour Suprême de Justice du Brésil

Joaquim Barbosa, symbole d’un brésil réconcilié avec les démons historiques du racisme e accessoirement président de la Cour Suprême de Justice (STJ), a mené une guerre acharnée contre le plus grand scandale politique de l’histoire du pays. La semaine dernière, les principaux responsables d’un vaste système d’achat de votes des députés fédéraux par l’Exécutif ont été mis derrière les barreaux. Quelles leçons tirer, en définitif ou provisoirement, du jugement du mensalão?

Un jugement d’exception?

Le jugement du mensalão a été marquée par la radicalisation de la sphère politique brésilienne, tant dans les médias que dans les instances institutionnelles importantes, notamment par la “Guerre Froide” déclarée entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif, l’un des condamnés étant un élu fédéral.

Et là, se trouve une incroyable leçon qui mériterait d’être débatue dans les écoles de science politique: si Montesquieu a préconisé la séparation des pouvoir, les américains ont, pour leur part, préféré le check and balance of power. Il ne s’agit pas uniquement d’une différence dans la réthorique, mais bien d’une volonté chez les yankees de créer un équilibre de pouvoir de façon à ce qu’aucun groupe majoritaire ou minoritaire soit-il ne domine complètement la société. Ce qui fait de la politique américaine une système de négocition et de compromis, avant toute chose.

Chez les brésiliens, et ce malgré leur volonté de copier le modèle américain, l’équilibre des pouvoirs n’existe pas.

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Getúlio Vargas, surnommé le père des ouvriers est le symbole du populisme de gauche au Brésil (Crédit photo: predecessor of Agência Brasil/Wikimedia Commons/CC

Le rapport des forces penche très souvent en faveur de l’Exécutif au gré du charisme du président de la République; on verra alors un Getúlio Vargas ultra-puissant dans les années 1940-50, ou un Lula souverain plus récemment. Les grandes crises politiques au Brésil ont eu lieu quand l’Exécutif n’avait pas à sa tête une figure aussi charismatique que les deux cités, comme ce fut le cas dans les années 1960 peu avant le coup d’Etat des militaires. On pourra ainsi parler de cette crise qui balance le gouvernement Dilma alors qu’elle trouve ses racines dans l’administration Lula. Seulement, ce dernier était à lui tout seul un parre-feu contre toute secousse politique.

L’émergence Joaquim Barbosa à la présidence de la Cour Suprême marque une inflexion dans la vie politique du pays. Noir et issu d’une famille modeste, il arrive au moment où Lula quitte le pouvoir et se voit remplacé par Dilma Rousseff créant ainsi un déséquilibre dans le système présidentiel brésilien. Car le charisme necessaire au président de la république se trouve désormais chez le président de la Cour Suprême, d’autant plus que ce dernier apprécie et multiplie les apparitions médiatiques.

Il est en plus légitime dans son rôle d’homme politique intègre. Quoique, de la politique, on puisse douter si Joaquim Barbosa maîtrise les codes. Son domaine est purement et simplement le droit.

https://www.youtube.com/watch?v=7my8O_5m7Zo

Certains spécialistes lui reprochent d’ailleurs de “confondre les genres, de condamner sur des hypothèses plutôt que sur des preuves… De transformer le procès du mensalão en un jugement d’exception, comme ici, dans une célèbre tribune du professeur Wanderley Guillerme dos Santos, “père” de la science politique moderne au Brésil.

Peu importe, qu’il le fasse par des moyens peu orthodoxes ou pas, Joaquim Barbosa s’attaque à une problématique essentielle qu’est la corruption au Brésil. Aux yeux de l’opinion, aussi bien la droite que la gauche sont affectée par elle.

Les symboles de la gauche ébranlés

C’est qui fait de ce procès du mensalão une marque dans l’histoire politique du pays, ce n’est pas tant la culpabilité avérée des responsables politiques condamnés, mais bien ce qu’ils représentent: le renouveau de la démocratie après les années de fer.

Aussi bien José Dirceu que José Genoino ont farouchement luté contre le régime des militaires, ils ont été enprisonnés, la femme de Genoino fut par ailleurs co-détenue avec l’actuelle présidente… tout un symbole.

Or, les symboles ne doivent pas mourir.

Ancien chef du cabinet du président Lula, José Dirceu était l’homme fort du premier mandat présidentiel du Parti des travailleurs (PT). C’est lui qui modernisa les méthodes et l’approche politique qui amenèrent Lula au pouvoir.

 


Et puisqu’un maheur n’arrive jamais seul, un autre autre symbole de la gauche est actuellement ébranlé, à São Paulo cette fois-ci.

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Le maire travailliste de São Paulo, Fernando Haddad

A peine élu maire de la ville la plus riche du pays, Fernando Haddad (le premier venant de gauche dans la capitale économique du pays depuis une décennie) doit faire face à un scandale de corruption qui touche les hautes sphères du pouvoir de São Paulo.

Même s’il est déjà démontré que l’affaire remonte à l’administration précédente, il revient tout de même à monsieur Haddad de désamorcer la bombe… autant dire que c’est une tâche assez ingrate.

Finalement, en ce qui concerne le mensalão, la position de la présidente Dilma Rousseff n’est pas des plus confortables: entre d’un côté, l’obligation morale de défendre ses anciens amis (comme le souhaite son parti) et frères d’armes pendant les moments les plus difficiles; et de l’autre, la necessité d’arbitrer un conflit naissant entre les pouvoirs législatif et judiciaire, elle devra faire preuve d’une grande agilité politique.

Or, la négociation n’a semble-t-il jamais été son point fort.

 


Walter mérite sa chance pour la Coupe du Monde

https://esportes.terra.com.br/goias/com-walter-decisivo-goias-derruba-ponte-e-mantem-boa-fase,e0f190a5ae290410VgnVCM4000009bcceb0aRCRD.html
L’attaquant du Goiás, Walter (Crédit photo: Rodrigo Villalba / Futura Press)

C’est un tueur, serial killer comme on dit dans le milieu, certainement le joueur le plus incroyable (et imprévisible) qu’il m’ait été donné de voir depuis que je vis au Brésil. Walter, c’est son nom est sans doute la meilleur surprise du brasileirão 2013.

Suite de ma Chronique du mondial…

Goias est un État  économiquement moyen au centre-ouest du Brésil. Il est situé dans les hauts-plateaux  du centre du pays, notamment autour de la capitale Brasília, en zone semi-humide où d’immenses propriétés sont réservées à l’élevage du bétaille. Sa capitale Goiânia est une ville ocultée par la splendeur de l’oeuvre d’Oscar Niemeyer. Qui voudrait d’une voisine aussi préstigieuse que Brásilia? On sombre rapidement dans l’anonimat au fure et à mesure que la gloire de cette dernière croît.

Mais ça, c’était avant.

Goias, c’est aussi le nom d’un club de football moyen qui joue régulièrement le Brasileirão, la première division du championat brésilien de football. Ce club vit mal le fait de devoir partager les feux des projecteurs avec son grand rival l’Atlético Goianiense qui porte fièrement les couleurs du Milan AC: rubro-negro, sans être Flamengo.

Au début du championat brésilien personne n’imaginait que le Goias  Esporte Clube serait la principale attraction du football national; c’était sans compter avec son buteur maison: Walter, 23 ans et quelques kilos de trop (officiellement, il peserait 92 kilos).

Discret quand il s’agit d’affronter les médias, Walter n’apparait généralement qu’avec le maillot vert et blanc de son club, mercredi soir ou dimanche après-midi, jours sacrés réservés au championat brésilien. Merci, Globo!

Son passe-temps favoris? Châtier les géants comme Flamengo ou Corinthians. Personne n’y échappe, il malmène ses adversaires buts sur buts, certains sont d’une incroyable beauté comme vous pouvez le voir sur cette video:

Interrogé sur son poids par une jeune journaliste aux termes d’un match, Walter ne sut que répondre… son silence trahissait la détresse de celui qui sait que son poids (et uniquement son poids) l’empêchera de jouer la Coupe du Monde. Puisque le talent, ça le connait bien.

En attendant, Walter sème la panique dans les défenses adverses, comme celle du Corinthians, le champion du monde des clubs battu à domicile (1-2) grâce à une passe décisive du gordinho. Un mois plutôt, c’est Flamengo qui en faisait les frais.

Alors que la seleção ne trouve toujours pas un digne successeur à Ronaldo (le vrai), je dis pourquoi pas Walter à la Coupe du Monde? Du gordo (toujours le vrai), il a déjà le poids et les beaux buts…

P.S: Finalement, et contre toute attente, les bleus ont réussi à se qualifier pour la Coupe du Monde du Brésil… Espéront qu’ils viendront y écrire quelques belles lignes de la légende des France x Brésil.


Eike Batista: comment fondre sous le soleil de Rio

https://www.flickr.com/photos/governo_de_minas_gerais/6120974553/sizes/m/in/photostream/
A droite, Eike Batista (Governo de Minas Gerais/Flickr)

On ne voulait pas le croire. Eike Batista a fait faillite et avec lui le rêve d’un pays semble s’éloigner. Qu’est-ce qui a pu se passer pour qu’un homme riche, très riche, septième homme le plus riche de la planète, perde près de 30 milliards en une année, au point d’être la risée des médias occidentaux. Je ne saurais répondre à cette question, mais je peux fournir quelques éléments de réponses d’ordre culturel pour certains et aussi structurel en ce qui concerne le modèle économique brésilien.

Cela tombe bien en fait car je lisais justement un article intéressant de Jean-Joseph Boilot sur la Chindiafrique [avec quelques erreurs de jugements tout de même pour ce qui est de sa conception du panafricanisme], quand j’ai lu l’information sur le déclin de l’empire d’Eike Batista. Dans cet article, on apprend de l’économiste que le modèle brésilien est un échec du point de vue de l’innovation et de la recherche scientifique, ce sur quoi je suis assez d’accord, et je vois là l’une des raisons de la chute de Eike Batista. Le 30 octobre, son entreprise a présenté un plan de sauvetage à la justice qui a surpris le monde des affaires.

Eike Batista a demandé une mise en tutelle de son groupe OGX par la justice brésilienne afin d’éviter une faillite totale de son empire. Une manière assez peu scrupuleuse de « profiter du système » pour sauver sa peau… pour gagner du temps…

De toute évidence, « l’empire Batista » coule : « s’il n’est pas très bon en pétrole, on peut dire qu’il est doué en cuisine », s’amuse un journaliste carioca proche de l’ex-milliardaire:

 

Homme d’affaires et play-boy

Comment j’ai connu l’homme d’affaires ? A travers un portrait réalisé par une télévision et ensuite grâce à une interview [devenue célèbre] du milliardaire. Ce qui frappait de prime abord, c’était l’assurance d’Eike Batista; l’homme voulant devenir le plus riche de la planète en l’espace de 5 ans. Il serait le premier à atteindre les 100 milliards, un rêve, une obsession qui transparaissait dans toute son arrogance. Un peu comme la ville de Brasília, construite en cinq ans, l’utopie du milliardaire Eike Batista a vieilli trop vite, et mal.

https://www.youtube.com/watch?v=-98SXlqyzQ8

Autre fait marquant sur le personnage, c’était une certaine image de virilité qu’il souhaitait transmettre, on le notait dans les noms de ses entreprises OGX, EBX, MMX, REX, LLX, IMX, etc. Mais aussi dans les noms de ses enfants, comme Thor Batista [fils d’un dieu mythologique] impliqué dans un accident de voiture qui tua un homme à Rio de Janeiro (excès de vitesse au volant).

https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Eike_Batista_(new).jpg
Eike Batista/ JulianaCoutinho/Wikimedia Commons

Je me souviens aussi d’une phrase d’Eike Batista affirmant que le « trio gagnant » pour l’avenir du Brésil était formé par Dilma Rousseff, le gouverneur de Rio de Janeiro Sergio Cabral et lui-même.

Ce dernier a fait faillite, le deuxième est dans la tourmente depuis les manifestations de Rio, il serait déprimé selon les rumeurs…

Certaines personnes préfèrent travailler sans aucune pression, dans ce cas, sortir des listes Forbes ou Bloomberg des hommes les plus riches du monde lui fera peut être un grand bien:

 

A quoi tient le rêve brésilien? 

Il faut bien répondre à cette question. Comme je l’ai dit dans un article précédent, les Brésiliens profitent en ce moment du boom économique porté par une nouvelle classe moyenne [vivant dans une semi-précarité] mais ne pensent pas suffisamment au futur. Eike Batista en est le symbole. Je ne prétends pas qu’avec la chute de l’OGX, toute l’économie brésilienne va sombrer dans une grande dépression. Elle semble avoir assez bien absorbé la mauvaise nouvelle. Mais tout de même, il y a des choses à revoir.

Prenons l’exemple de Petrobras. Dernièrement, le gouvernement a organisé un appel d’offres pour explorer le gisements pétroliers présalifères découverts au Brésil, aux termes duquel deux entreprises chinoises, un français, un germano-hollandais ont pris de grosses parts alors que le géant brésilien sera minoritaire. Si l’entreprise – ou le gouvernement – avait investit dans l’innovation, la technologie elle n’en serait pas là non plus.

La chute d’Eike Batista cache peut être un mal plus profond qui gangrène le modèle économique brésilien:

 

D’où le reproche de Jean-Joseph Boilot cité plus haut, qui déplore que l’économie brésilienne ne se soit pas industrialisée au cours de ces dix dernières années et en soit encore à dépendre de la rente pétrolière ou de sa production alimentaire: un piège dans lequel il ne faut justement pas tomber.

La conclusion qu’on peut tirer de tout ceci est que la personnalité d’Eike Batista a largement contribué à sa chute, il est probable que s’il avait été aussi sobre (ou modeste) qu’un Bill Gate, ses entreprises ne seraient pas sur la sellette aujourd’hui. Il y a une dimension psychologique dans l’explication du déclin de monsieur Batista.

En même temps, on ne peut pas négliger le modèle sur lequel repose la croissance brésilienne: une économie de services et de consommation, peu investissements dans l’industrie et la technologie… Les politiques misent tout sur la rente pétrolière (au Venezuela, cela ne tient plus) alors qu’ils devraient développer leur industrie, créer plus d’emploi, investir dans l’innovation, favoriser l’immigration des élites internationales qualifiées en attendant de récupérer le retard sur le plan de l’éducation nationale.

A vouloir monter trop haut, les ailes d’Eike Batista ont fondu au soleil comme celles d’Icare.

Portrait d’Eike Batista réalisé il y a un an par The Economist à écouter en anglais:

 Pour en savoir plus: Sur LeMonde.fr

Ici, les enchères,
le rôle de Total ou sur l’analyse du Financial Times.

A propos d’Eike Batista, lire son portrait sur Lefigaro.fr ; pour comprendre son drame, aller sur The Economist.

Lire aussi ce portrait (en portugais).

 


Six bonnes raisons d’étudier aux Etats Unis selon Stéphane Kisaka

 

Logo de Be International
Logo de Be International

Il n’a pas encore 25 ans mais démontre une maturité hors du commun à diriger un projet qui a l’ambition d’être un catalyseur dans le domaine de la formation des étudiants africains aux Etats Unis. Je l’ai connu grâce à une amie au Brésil, et depuis nous échangeons régulièrement des e-mails et envisageons des moyens de promouvoir le projet Be International. Entretien avec Stéphane Kisaka qui nous livre ici six bonnes raisons d’aller étudier au pays de l’oncle Sam.

1. Le meilleur moyen d’apprendre l’anglais:

– Comment l’idée de créer ce projet t’es venue?

L’idée de Be International m’est venu à la fin de mon année universitaire à San Diego, en Californie. En effet, durant cette année je me suis rendu compte du faible nombre d’étudiants africains dans les universités américaines. Le cadre dans lequel j’ai étudié était vraiment magnifique et les formations proposées à l’université étaient d’une très grande qualité, je me suis donc demandé comment à mon niveau je pouvais changer les choses. J’avais cette envie de partager mon expérience avec un maximum d’entre eux, c’est alors que je me suis dis que créer un organisme ayant pour but d’aider les étudiants africains à accéder à des formations linguistiques ou universitaires aux Etats Unis pourrait être une solution. C’est ainsi que Be International a vue le jour à San Diego en Mai 2012.

Au niveau de l’intégration des étudiants à leur arrivée, c’est assez simple, ils sont placés en résidence universitaire ou en famille d’accueil. C’est un choix que j’avais également fait à mon arrivée aux Etats-Unis. Ce choix a non seulement pour but de leur faciliter la vie en leur permettant d’être en contact avec d’autres étudiants venant des quatre coins du monde mais également avec des personnes natives de la région tout en leur permettant de pratiquer l’anglais quotidiennement. Il n’existe aucun moyen plus efficace d’apprendre une langue que d’être immergé dans une culture qui parle la langue que vous apprenez.

https://www.youtube.com/watch?v=FB1xUGQY3xQ

2. Vous rencontrerez aussi d’autres étudiants internationaux.

– As-tu essayé de faire reconnaitre ce projet au niveau du gouvernement congolais?

Le projet est connu et reconnu par le gouvernement congolais, toutefois nous sommes seulement entrain de le mettre en place, c’est un projet qui sera amené à fonctionner sur le long terme, il faut donc lui donner des bases solides afin que nous puissions le lier intelligemment au système éducatif congolais et à ceux des autres pays africains. A l’heure actuelle, la plupart des étudiants viennent de France et de République Démocratique du Congo, car ceux sont les pays avec lesquelles je suis le plus en contact.

– Le projet ne risque-t-il pas de devenir trop « vertical » avec l’éventuelle participation du gouvernement?

Il faut également savoir qu’il n’y a pas d’étudiants prioritaires, ou de profil type, tous les étudiants qui auront le désir de partir étudier aux Etats Unis et qui feront la démarche de me contacter directement ou indirectement pourront accéder à ce projet. Il n’y a pas de limite en terme de place, l’université possède un très grand campus qui nous permettra ainsi d’accueillir un maximum d’étudiants.

Je demande également beaucoup d’aides aux étudiants que j’envois afin de m’aider à promouvoir le projet; ils sont un élément majeur dans son développement car ils prouvent non seulement que le projet est réel en apportant de la crédibilité à celui-ci mais je compte également sur eux pour le promouvoir auprès de leurs amis tout en ayant plaisir à partager leur expérience.

Nous réfléchissons également à l’implantation d’une structure diplomatique de façon à rendre les choses beaucoup plus officielles, structure qui permettra aussi de rassurer les étudiants et de gagner en crédibilité.

3. Améliorer les possibilités d’emploi et construire un réseau professionnel international:

– Tu as toi-même fait une partie de tes études aux USA, quel est selon toi l’avantage d’étudier là-bas plutôt qu’en Europe, y-a-il des différences fondamentales?

J’ai eu la chance d’expérimenter les deux modèles éducatif, aussi bien le modèle Européen que le modèle Américain. Les deux modèles sont très bien, cependant, le modèle qui est proposé en Californie est beaucoup plus performant. En effet, il ne faut pas s’arrêter uniquement à la formation proposée aux étudiants, il faut voir beaucoup plus loin; c’est à dire prêter attention au cadre dans lequel les étudiants seront formés et évolueront, la Californie est l’Etat où se trouve les grands centres de recherches américains, faisant ainsi référence à la Sillicon Valley.

– Une aubaine pour les étudiants…

Il faut savoir que les universités aussi en bénéficient aisément. Les étudiants pourront ainsi bénéficier de formations de qualités mais également y effectuer des stages de plusieurs mois. Ils auront ainsi accès à des connaissances optimales en choisissant la destination que Be International leur propose aujourd’hui.

Stéphane Kisaka, fondateur de Be International à la fin de ses études aux Etats Unis
Stéphane Kisaka, fondateur de Be International à la fin de ses études aux Etats Unis

4. Apprendre à connaître une autre culture de première main:

Je ne recherche pas de profil type, le projet est accessible à tout le monde, les étudiants doivent avant tous être motivés et avoir soif d’apprendre, et bien évidemment je souhaite que les étudiants soient ravi de partager les connaissances auxquelles ils auront eu accès avec le plus grand nombre. C’est un projet à but non lucratif, qui à pour objectif d’instruire un maximum de jeunes. Il leur permettra également de découvrir une nouvelle culture et de vivre leur propre rêve américain.

Cette intégration sera également facilitée lorsque davantage de nos étudiants seront présents en Californie. En effet, avec l’aide des étudiants sur place nous essayons de créer une « communauté Be International  » qui aura pour but de permettre aux étudiants de s’entreaider.

5. Avec Be International le coût moyen des études aux Etats Unis est réduit à plus de 50 %: 

Tu sais que la RDC est un pays post-conflit et le problème des frais académiques se posera probablement. Quelles solutions penses-tu proposer à court, moyen et long terme pour les étudiants qui voudraient aller étudier aux USA? Penses-tu à demander des bourses pour Be International?

Stéphane Kisaka, fondateur de Be International
Stéphane Kisaka, fondateur de Be International

Dans un premier temps, la solution proposée pour faciliter l’accès aux études universitaires aux étudiants congolais mais aussi aux étudiants africains plus généralement concerne les tarrifs préférentiels.

Il faut savoir que le coût moyen d’une année universitaire aux Etats-Unis est d’environ 20 000 à 30 000 dollars. Toutefois, chaque étudiant qui passera par nous pourra effectuer une formation à un prix bien moins élevé, en effet j’ai négocié des tarrifs préférentiels avec l’université afin de rendre le projet plus accessible à un maximum d’étudiants.

De ce fait, une année universitaire reviendra à 12 000 dollars pour chacun de nos étudiants.

– C’est plus de 50% de réduction tout de même…

De plus, un système de bourses universitaires à également été mis en place. Ce système permet ainsi à chaque étudiant d’obtenir une bourse universitaire à hauteur de 3 500 dollars par an après avoir effectué au moins 6 mois de cours sur le sol américain, réduisant ainsi le coût de l’année académique à 8 500 dollars.

J’ai également travaillé sur une solution qui permettra aux étudiants d’effectuer différents jobs étudiants tels que des tâches administratives dans la bibliotheque universitaire, la gestion des activités sportives ou d’autres types de travaux sur le campus universitaire qui permettront aux étudiants de répondre à une partie des frais auxquels ils feront face.

– Mais penses-tu que cela puisse évoluer encore plus?

Si l’on souhaite se positionner sur le moyen terme et le long terme, je souhaiterais développer une offre au niveau des logements qui permettrait également aux étudiants africains d’obtenir des logements à prix réduits. Le projet a vu le jour il y a un peu plus d’un an, il n’est encore qu’à ses débuts, mais je pense que d’ici quelques années la structure qui existe déjà se développera rapidement et permettra à plus d’étudiants de venir en Californie.

6. Réconnaissance et estime de soi: 

– Pour l’instant es-tu satisfait de l’évolution du projet au niveau des USA? Tes attentes sont-elles réalisées?

Il faut savoir que je suis un éternel insatisfait, je voudrais constamment que les choses aillent plus vite, toutefois je ne suis pas déçu de l’évolution du projet, j’ai eu la chance de recruter des étudiants congolais venant des quatres coins du monde aussi bien de RDC que des étudiants venant de France, du Brésil ou encore d’Inde. Je pense que petit à petit les choses vont prendre beaucoup plus d’ampleur et les étudiants arriveront en plus grand nombre. Je pense sincèrement que ce projet pourra participer à la révalorisation du système éducatif congolais. De plus, il apportera une grande fierté au pays et aux familles qui se verront envoyer un de leur enfant aux Etats-Unis.

Pour les personnes qui sont intéressés par le projet n’hésitez pas à me contacter:

E-mail: stephane.kisaka@hotmail.fr

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